ses représentants gui président à l’administration et à la justice1. La Grèce, en
général, mais particulièrement Athènes, a réalisé une forme absolument originale
d’organisation politique el, en même temps, un développement tout à fait
exceptionnel de l’individu. En face du Barbare, qui subit le despotisme, qui le
divinise, le Grec est libre citoyen ; en face de l’Empire, création : massive de
l’Orient, il aménage ingénieusement sort Étal minuscule. La cité grecque est
aussi miraculeuse que l’art ou la pensée de la Grèce elle a constitué une
expérience2 ; elle est un exemple, un modèle είς άεί.
Le double intérêt du livre que Gustave Glotz, par toute son œuvre antérieure,
était si bien préparé écrire, c’est, avec une science admirable, de suivre dans
leur évolution, de préciser dans leurs caractères essentiels, de fouiller, en
quelque sorte, dans le détail de leur mécanisme, les institutions grecques ; et
c’est de formuler ou de suggérer les idées générales que comporte une pareil
sujet, d’inviter à la réflexion sociologique. Au souci du réalisme absolu il joint le
don d’explication profonde.
Fustel de Coulanges expliquait merveilleusement : il expliquait trop bien, trop
simplement, avec une trop parfaite logique. Le respect de Glotz pour le chef-
œuvre du maître n’empêche pas sa critique de s’exercer. Les sociétés humaines
ne sont pas des figures de géométrie, mais des êtres vivants ; le vrai est
toujours complexe, quand il s’agit d’hommes... qui peinent, qui luttent, gui
obéissent à des besoins divers.
Ce qu’on trouve donc, en ce livre, d’abord, c’est la genèse de la πόλις. Le nom
fluide de polis avait désigné l’acropole, le bourg fortifié, par opposition à la
bourgade ouverte, κώµη, — avant de signifier la cité3. D’après des faits épars,
avec le fil conducteur de fragiles conjectures, Glotz en reconstitue les humbles
origines. Il utilise, prudemment, sûrement, et la philologie, et l’archéologie, et les
innombrables analogies que présente l’élude comparée des sociétés humaines. Il
part, lui aussi, du clan4, — le γένος, clan patriarcal, élément social primaire, —
pour arriver, à travers les associations de familles, — les phratries, — dont la
nature est discutée, — et les groupements belliqueux de clans, les φυλαί, tribus,
à l’organisme politique né de la vie sédentaire et du synœcisme5.
West une société en noie d’évolution que présentent les poèmes homériques. Le
roi des rois, le plus roi, βασιλεύτατος, — car le βασιλευς, primitivement, est le
chef du γένος, celui qui marche devant les autres6, — intermédiaire entre les
dieux, dont il descend (διογενής), et les hommes, a une autorité sacerdotale
incontestée, radis une autorité politique précaire : dans la monarchie homérique
on distingue les éléments rte l’oligarchie gui lui succédera, et même de la
1 Rappelons, cependant, da révolution égyptienne, où l’individu a déchaîné ses appétits
et s’est rué contre toutes les disciplines : voir MORET, t. VII, pp. 255 et suiv.
2 Voir JARDÉ, t. X, Avant-propos, p. XI. — RENOUVIER, dans l’Introd. à la Philosophie
analytique de l’Histoire (p. 92), oppose, de façon frappante, à ses grands empires qui
vouaient des races entières à la mort morale, ces populations qui ont créé la science libre
et la loi et organisé des premières républiques.
3 Cf., t. X, p, 355.
4 Voir DAVY, t. VI.
5 Cf., pour Rome, HOMO, t. VI. — Sur des noms de clans et leur origine, voir AD.
REINACH, Atthis, les origines de l’État athénien (extrait de la R. S. H., 1919), pp. 19-20.
6 AD. REINACH, p. 30 : βαίνω et λαός, — étymologie, d’ailleurs discutée.