
A. Lois générales
Constitutions, et DDHC, anamnèse du système actuel
Dès le siècle des Lumières, on voit apparaître de nouvelles valeurs prônées par les philosophes (Montesquieu,
Voltaire, Rousseau, Diderot, D’Alembert, etc.), telles que la tolérance, la liberté, l’égalité, mais aussi le
rationalisme, l’individualisme, le libéralisme, s’opposant au pouvoir absolu de la monarchie, et à l’obscurantisme
et la superstition de l'Église catholique de l’époque.
On entre alors dans une période d’instabilité des régimes politiques (voir frise chronologique, annexe 1), qui
amène de profondes modifications politiques, et bouleversements de l’ordre social. En 1789, avec la Révolution
française, la monarchie absolue cède sa place à une monarchie constitutionnelle, puis à la 1re République.
La DDHC (1789) permet de garantir les droits naturels, inaliénables et sacrés de l’Homme (droits et devoirs), telles
la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l'oppression.
La constitution (15 constitutions à ce jour, voir frise chronologique, annexe 1) édicte les droits fondamentaux des
citoyens, tel que l’égalité des citoyens, mais aussi la séparation des pouvoirs, la mise en place du suffrage
universel, le principe de laïcité, etc.
L’une des premières grandes modifications mise en place dans le domaine du social a été de conférer à l'État la
responsabilité de fournir assistance aux personnes vulnérables, mettant fin à la délégation de cette tâche au
clergé. Rapport à cet héritage, elle fut nommée “dette sacrée” de l’Etat.1
De ce principe est issu notre système de protection social actuel, basé sur une logique d’assurance, d’assistance, et
de protection universelle, comme nous le verrons dans le prochain chapitre.
Il est important, selon nous, de connaître l’origine de notre système, les souffrances, et les combats qui ont pu
amener des améliorations, afin de comprendre l’importance de les défendre, lorsqu’ils sont mis en péril.
Nous aimerions citer l’article 35 de la 2de Constitution (1793), qui n’a jamais pu être adopté/appliqué, à cause du
contexte historique (la Terreur, période de violence et de répressions outrancières qui a suivi la Révolution), et qui
a ensuite été retiré des constitutions suivantes (pourquoi ?), qui instituait que :
“Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du
peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.”
A titre indicatif, le gouvernement Borne a déjà fait appel vingt fois, à l’article 49 alinéa 3 de la constitution, au 1er
décembre 2023 (avec 27 motions de censure déposées, ce qui est un record pour la Ve République).
Et pour conclure ce chapitre, une dernière petite digression, en rendant un hommage à Stéphane Hessel2, qui, de
part son histoire, et son désir de transmission, a tenté de rappeler qu’il est important de s’indigner et de
s’engager, quand le système ne joue plus son rôle de providence, et tenterait même de revenir sur les droits des
citoyens.
Ordonnances des 4 et 19 octobre 1945, portant création de la sécurité sociale
Pour anticiper l'issue de la 2de guerre mondiale, le programme du CNR, initialement nommé Les jours heureux, et
adopté par tout l'éventail politique représenté au sein de la Résistance française, prévoit la mise en place d’un «
plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas où
ils sont incapables de se le procurer par le travail » (1944). Ce principe universel va donner naissance à la Sécurité
sociale française par les ordonnances des 4 et 19 octobre 1945, et sera mise en œuvre par le ministre du Travail
Ambroise Croizat. La charte des DUDH, à laquelle la France adhère, reprend également ce principe3.
Elle garantit aux citoyens français l'égalité d'accès aux soins, la qualité des soins et la solidarité.
Actuellement, elle est constituée de 5 branches : maladie (CNAM, CARSAT, CPAM), famille (CAM, CAF),
recouvrement (ACOSS, URSSAF), vieillesse (CNAV, anciennement “retraite des vieux”), et depuis 2005, la lutte
contre la dépendance (CNSA).
3 DUDH, Art. 22 — Toute personne, en tant que membre de la société, a droit à la sécurité sociale ; elle est fondée à obtenir la satisfaction
des droits économiques, sociaux et culturels indispensables à sa dignité et au libre développement de sa personnalité, grâce à l'effort
national et à la coopération internationale, compte tenu de l'organisation et des ressources de chaque pays.
2 Il a participé, en tant que secrétaire à l’ONU, à la rédaction de la charte des DUDH (Déclaration universelle des droits de l'homme) en
1948.
1 Constitution de 1793, Article 21. - Les secours publics sont une dette sacrée. La société doit la subsistance aux citoyens malheureux, soit
en leur procurant du travail, soit en assurant les moyens d'exister à ceux qui sont hors d'état de travailler.