Une partie de campagne

Telechargé par Gabriel MUZAS
Une partie de campagne, de Guy de Maupassant ; le dispositif des
personnages dans une nouvelle naturaliste
Extrait 4 : « La chute »
Plan de commentaire
Introduction :
Au XIVème siècle, alors que la Révolution industrielle métamorphose la société, de
nombreux auteurs essaient de représenter une forme de réalité. Le naturalisme, est
l'une des réponses à ces changements. Guy de Maupassant, élève de Flaubert, se
plonge dans cette mouvance en étudiant la société de son temps. Par le naturalisme,
il excelle à raconter des histoires brèves les déterminismes sociaux et lironie du
destin jouent un rôle essentiel. Il utilise souvent la technique de la nouvelle à « chute
» pour surprendre le lecteur et donner une résonance nouvelle à l'ensemble du récit.
Une partie de campagne est une nouvelle naturaliste. Elle raconte la journée à la
campagne d'une famille bourgeoise parisienne qui cache des tensions sociales. Le
récit nous montre une relation ambiguë qui aura une chute tragique entre deux
personnages qui n'appartiennent pas au même milieu social. La chute offre une fin à
la fois surprenante et choquante, qui donne son sens rétrospectivement à toute
l'histoire. Le lecteur pourra résoudre l'intrigue. L'accélération de la narration à l’aide de
2 ellipses temporelles, crée une intensité dramatique qui prépare le lecteur à la
conclusion.
Cest pourquoi on se demandera dans quelle mesure cette chute conclut-elle
réellement le récit et permet-elle den donner le sens ?
Pour y répondre, on s'interrogera sur l'écriture théâtrale. Puis on continuera avec
l'étude de la progression théâtrale et pour finir on expliquera la chute morale de
l'histoire.
A- Une écriture théâtrale
1. La structure du texte
Pour commencer, l'extrait étudié est écrit sur une structure narrative qui rappelle celle
d'une pièce de théâtre, organisée en trois actes bien distincts.
Chaque acte est marqué par une ellipse temporelle qui fait avancer l'intrigue de
manière abrupte tel un sprint à la fin d’une course. Cela prépare le lecteur à la
compréhension de la morale. Le premier acte constitue le départ « à Bezons », la
famille Dufour s'en va après une journée à la campagne. La sortie est signalée par
l'expression « … la famille Dufour s’en alla ». Le deuxième acte se déroule deux mois
plus tard, Henri retrouve Mme Dufour à Paris, dans sa quincaillerie rue des Martyrs.
La scène se termine avec la réplique « à bientôt » qui marque la séparation des
deux personnages. Le troisième acte survient « L'année suivante », la deuxième
ellipse plus longue que la première, Henriette et Henri se retrouvent dans la chambre
ils s'étaient rencontrés à Bezons, à la même date au même lieu. La sortie de scène
est indiquée par la phrase « je crois qu'il est temps de nous en aller », parole qui
clôt le récit. Ces trois actes présentés dans lordre nous fait prendre conscience de
l’accélération de la narration, deux mois s’écoulent en quelques lignes puis une année
entière disparait. Il sagit dellipses temporelles qui passent sous silence des périodes
de lhistoire, permettant ainsi d’éliminer les détails sans importance et de se concentrer
sur lessentiel ( Naturalisme ). Le lecteur peux mieux se préparer à l’effet choc de la
chute.
2. Les règles classiques de l'écriture théâtrale
Dans ce passage, Maupassant semble prendre exemple sur les règles
traditionnelles du théâtre, en particulier celles d'unité de lieu et d'action. Tout d'abord,
l'unité de lieu est préservée par des espaces symboliquement chargés. Chaque scène
se déroule dans un endroit précis qui reflète l'évolution des relations entre les
personnages. Ensuite, l’unité d’action permet de se concentrer sur lintrigue de
lhistoire.
Dans la scène 1, l'unité de lieu est « Bezons » (l. 391) et l’unité daction est le
départ de la famille Dufour ce qui signifie la fin des vacances à la campagne.
La deuxième scène se déroule « rue des Martyrs » (unité de lieu), dans la
quincaillerie parisienne où Henri retrouve Mme Dufour ( unité daction ), la tonalité de
ces retrouvailles sont dramatiques. Cette rue fait référence à Saint Denis qui subit le
martyre et la décapitation. Maupassant utilise cette symbolique pour démontrer que
les personnages sont des martyrs de leur milieu social ( Ref La parure).
Dans la troisième scène, Henri revient « à leur chambre dans le bois », un lieu
à la fois symbolique et intime, les retrouvailles d'Henri et Henriette prennent une
dimension tragique. La boucle narrative est bouclée par ce retour à l'origine et souligne
l'immuabilité des situations malgré le temps. Ces divers lieux lon voit la
conservation de l’unité d’action permettent d'observer comment Maupassant
représente les modifications des rapports entre les personnages et l'évolution de leurs
sentiments.
B- Une progression théâtrale.
Pour continuer, nous allons remarquer que l’épilogue est construit comme une action
scénique.
1. Une action scénique
Dans cet extrait, les dialogues des personnages l’emportent sur le rôle du narrateur et
il semble que les scènes soient reliées entre elles par l’intrigue amoureuse. Les
dialogues dominent la narration pour inciter le lecteur à simplement observer la
situation et en tirer la morale et la chute du récit. En effet, la première scène, bien
quelle soit écrite avec seulement une réplique pour vingt-huit lignes, se relie tout de
même à l’intrigue amoureuse comme le prouve « le soupir et les larmes » . Ces
derniers désignent par métonymie les émotions de Mme Dufour et Henriette, ce qui
annonce la tonalité tragique pour les scène suivantes. La seconde scène, elle, est bien
dominée par un dialogue au détriment du rôle du narrateur. Cet acte est toujours en
lien avec lintrigue amoureuse, « une émotion (…) étreignit » Henri. A la 3ème scène,
cest toujours le cas d’une façon légèrement différente. Le dialogue au discours
narrativisé qui passe au discours indirect, qui passe soudainement au discours direct
renforce l’effet de choc et la révélation des sentiments des personnages.
2. Des ellipses temporelles qui découpent une progression dramatique
Les ellipses accélèrent l’histoire en suggérant implicitement quHenriette s’est mariée
sans explication. Les causes senchainent les unes avec les autres dans une logique
du milieu social qui détermine le destin des personnages. Tout au long du texte,
l’évolution générique ne jusqu’à la chute fatale. Dans un premier temps, nous
observons une scène de comédie avec la famille Dufour qui sen va, « M. Dufour,
dégrisé, s’impatientait » . Puis la scène suivante, qui se déroule « Deux mois plus tard
», a un goût amer où lon pressant le drame en observant un paradoxe. En effet, entre
la comédie supportée par Mme Dufour qui ne souhaite rien assumer et Henri,
personnage « triste » car il apprend qu Henriette sest mare au personnage le plus
antipathique de l'histoire, il en résulte un humour dramatique. On peut imaginer quelle
est tombée enceinte dHenri et quelle a se marier rapidement pour aller ensuite se
réfugier à la campagne le temps de sa grossesse. Tout cela dans lunique but de faire
croire que lenfant est légitime. Henry a l'air de comprendre la supercherie comme le
prouve son « Ah ! » suivi de points de suspension qui démontrent sa réflexion
lorsque Mme Dufour lui annonce que Henriette s'est mariée. En dernier lieu, la
troisième scène se déroule l «année suivante ». Les 12 mois qui se sont écoulés sont
loin davoir brisé la mémoire de leur amour « Moi, j'y pense tous les soirs ». La tragédie
de cette histoire réside dans un amour véritable impossible.
C Une chute morale.
1. Le triomphe ironique des valeurs bourgeoises
La chute de cette histoire met en évidence le triomphe ironique des valeurs
bourgeoises car le commerce des Dufour est plus important que le bonheur de leur
fille. En effet, Henriette s'est mariée avec l'homme choisi par ses parents car cet
homme « aux cheveux jaunes » prend la relève de la quincaillerie de la famille Dufour
« c'est lui qui prend la suite ». Cet homme sauvera le cas échéant l'honneur
dHenriette en l'épousant s'il s'avère qu'elle est enceinte d'Henri. Le mariage
conventionnel est privilégié par la famille au regard de l'amour véritable que Henriette
porte à Henri. De surcroît, son mari est un personnage vulgaire « Allons ma bonne »,
il représente une allégorie de la grossièreté de la bourgeoisie de l'époque.
2. Une morale tragique
La morale de cet extrait est tragique car elle fait état de la condition de la femme à
cette époque qui subissait le mariage arrangé pour subvenir à ses besoins. En effet,
l'absence d'éducation ne permettait pas aux femmes de choisir leur avenir qui était
décidé par la famille. Malgré la douleur causée par leur amour impossible « il crut
qu'elle allait défaillir », les convenances et la bienséance prenaient le dessus : « Puis
ils se mirent à causer naturellement, de même que si rien ne se fût passé entre eux. »
CONCLUSION
En conclusion, ce récit montre la dérision comique qui s'achève en tragédie intime.
C'est une satire sociale qui met en évidence l'opposition entre les conventions sociales
et le bonheur de l'individu. Les personnages n'échappent pas à leur destin, ils sont
enfermés par leur milieu social.
La chute est donc particulièrement réussie car elle permet à l'histoire de prendre tout
son sens par un effet de choc.
Le mot de la fin revient au personnage le plus insignifiant et le plus antipathique de
l'histoire ce qui renforce la morale tragique. L'histoire constitue donc une sorte de fable.
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