instaurent leur programme politique, intitulé la "Révolution nationale", qui s'appuie sur un ensemble d'idé
réactionnaires, le monde rural ainsi que l'artisanat en deviennent des composantes majeures. Sous l'é
devise "Travail , Famille, Patrie" et sous couvert d'une longue tradition historique de la France rurale, ces hommes
politiques prônent le "Retour à la terre" face à une industrialisation qui aurait appauvrie la nation. Pétain dé
dans un discours prononcé à Tulle, le 20 avril 1941, "La France redeviendra ce qu'elle n'aurait jamais dû
d'être : une nation essentiellement agricole. Elle restaurera les antiques traditions artisanales
l'Agriculture et du ravitaillement, Pierre Caziot, surenchérit quelques mois plus tard, le 21 septembre, en dé
qu' "il faut oser proclamer la primauté de la paysannerie et la nécessité d'une politique donnant à
agricole la première place dans l'économie de la nation".
La paysannerie est donc mise à
l'honneur par une intense propagande qui souhaite maintenir le poids de
l'agriculture face au monde urbain, discours qui semble être entendu à l'heure des restrictions.
Les paysans y sont d'autant plus sensibles, dans les premiers mois du régime vichyste, qu'ils s'é
laissés-pour-compte de la société française dans l'entre-deux-guerres, face à
la promotion de la civilisation
mécanique et industrielle. La Corporation nationale paysanne n'est pas vue d'un mauvais œil. Instauré
dé
cembre 1940, elle regroupe sous un monopole l'ensemble des structures syndicales agricoles d'avant guerre,
ainsi que les organismes de propriétaires, de crédits ou d'assurance. L'image qu'elle véhicule d'une solidarit
paysanne venant au secours des populations urbaines pour leur assurer le ravitaillement, est mê
Pétain ne déclare-t-il pas dans son discours du 1er janvier 1941 :
"Je m'adresse aux Paysans de France. Il faut
qu'ils tirent de la terre tout ce qu'elle peut donner. Les rendements devront être augmentés en dé
difficulté" ? Ou bien encore, "Paysans, mes amis, je vous fais confiance et je compte sur votre dé
m'aider à relever la France". La propagande vichyste s'empare de ces thè
mes pour mettre en avant la
paysannerie et l'artisanat, l'idée étant d'affirmer qu'elle est garante de l'ordre social face à la culture ouvriè
citadine, jugée responsable, entre autres, de la défaite.
Afin d'enrayer l'hémorragie des campagnes, une "Mission de restauration paysanne" est créé
état les cultures abandonné
es, tandis qu'un "Service civique rural" est mis en place, en mars 1941, qui fait
participer les jeunes aux grands travaux agricoles pour pallier la main d'œuvre masculine manquante. Un "pé
de Retour à la terre" est alloué, en mai 1941, aux familles ayant un enfant à charge qui, exerç
industrielle ou commerciale, s'engagent à pratiquer un mé
tier agricole pendant au moins six mois. Mesures qui ne
sont que des pis-aller. Ce qui grève avant tout les récoltes, ce sont les prélè
vements des Allemands pour leurs
propres troupes d'occupation stationnées en France.
Dès l'été 1940, l'Allemagne organise les conditions d'un véritable pillage organisé
qui touche tous les secteurs
de l'économie française. De plus, le taux de change de 1 Reichsmark
contre 20 Francs favorise les achats par
l'Allemagne et la baisse des stocks des magasins. Très vite apparaissent les premières pé
définitives. En septembre 1940, beurre, vin, œufs, charbon deviennent rares.
La population, surtout urbaine, n'a que faire de cette propagande du "Retour à
la terre". Pour elle, les
campagnes sont devenues synonymes de ravitaillement. D'autant que certains paysans, par ré
temps de disette, constituent des réserves qui ne sont pas livrées aux coopératives malgré les appels à
du gouvernement. C'est dans ce surplus, parfois prémédité
pour une revente au prix fort dans le cadre du
"marché noir", que les habitants des villes vont chercher à amé
liorer leur ration alimentaire. De plus, certaines
productions, faute de moyen de transport, ne peuvent être vendues comme avant-guerre sur les marché
venue des citadins à
la ferme est donc une aubaine pour certains agriculteurs modestes. L'image d'une
paysannerie redevenue le socle de l'économie française n'a été que l'un des nombreux mythes de la pé
vichyste d'avance voué à l'échec. Il n'en demeure pas moins que choyés par le ré
marqués par un conservatisme politique, de nombreux ruraux ont manifesté
dans un premier temps de la
sympathie pour Philippe Pétain, lui-même issu du monde rural et admiré pour son rôle durant la Premiè
mondiale.
Pourquoi s'opposer à l'occupant et à Vichy dans le monde rural ?
En zone occupée, l'intense propagande visant à pré
senter un occupant "correct" ne peut faire oublier aux
populations rurales, en premier lieu dans le nord de la France, les crimes commis par l'armé
plusieurs zones de combats. Ce ressentiment est accru là où le vainqueur impose l'hé
bergement chez l'habitant
de ses soldats et s'empare des récoltes et des troupeaux.
Dans les deux zones, le nouveau ré
gime politique mis en place par Vichy avec le soutien de l'occupant
bouleverse de maniè
re brutale et autoritaire les cadres de vie traditionnels de la population. L'encadrement de la
population au sein de groupes tels les Corporations, les Offices, les Ordres professionnels, etc., heurte en milieu
rural des mentalités séculaires de petits producteurs indé
pendants. Plus encore, l'interdiction de la chasse et la
confiscation des armes qui remet en cause une liberté acquise par le monde rural à la Révolution franç
suscite refus et opposition.
En milieu rural, les mesures de répression contre des gens connus dont on est souvent proche (é