Anesthésie locorégionale en médecine d'urgence

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25-010-G-20
Anesthésie
locorégionale
en
médecine
d’urgence
N.
Marjanovic,
J.
Guenezan,
B.
Drugeon,
R.
David,
M.
Roulaud,
M.
Violeau,
P.
Rigoard,
O.
Mimoz
Résumé
:
L’anesthésie
locorégionale
(ALR)
est
une
méthode
d’analgésie
efficace
s’intégrant
dans
une
démarche
multimodale
ciblée.
Sous-utilisée
aux
urgences,
elle
est
particulièrement
utile
lors
de
la
prise
en
charge
des
traumatismes
et
plaies
de
la
face
et
des
membres,
y
compris
en
milieu
préhospitalier.
Sa
pratique
nécessite
une
formation
théorique
et
pratique
spécifique
mais
aussi
des
connaissances
en
anatomie
et
en
pharmacologie.
Elle
doit
être
encadrée
par
la
rédaction
de
procédures
écrites
et
validées
par
l’ensemble
des
acteurs
du
parcours
de
soins
du
patient.
Le
déploiement
de
l’échographie
facilite
son
utilisation
en
sécurisant
la
procédure
par
l’identification
des
structures
vasculaires
et
nerveuses.
L’ALR
doit
s’intégrer
dans
la
prise
en
charge
globale
du
patient,
prendre
en
compte
les
contraintes
environnementales
et
sécuritaires,
et
respecter
les
indications
et
les
contre-indications.
La
maîtrise
de
l’ensemble
de
ces
conditions,
intimement
liée
à
la
généralisation
de
l’utilisation
de
cette
technique,
est
un
enjeu
d’avenir,
qui
doit
permettre
de
mieux
prendre
en
charge
la
douleur
et
ainsi
la
qualité
des
soins
des
patients
consultant
aux
urgences.
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2022
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Tous
droits
réservés.
Mots-clés
:
Anesthésie
;
Anesthésie
locorégionale
;
Douleur
;
Antalgie
;
Traumatologie
;
Urgences
Plan
Introduction
1
Analgésie
locorégionale
dans
les
structures
d’urgence
2
Bases
pharmacologiques
en
anesthésie
locorégionale
2
Complications
des
anesthésiques
locaux
4
Matériel
nécessaire
à
l’anesthésie
locorégionale
dans
une
structure
d’urgence
4
Anesthésie
locorégionale
de
la
face
4
Anesthésie
locorégionale
de
la
main
et
des
doigts
7
Anesthésie
locorégionale
de
la
cuisse
11
Anesthésie
locorégionale
du
pied
12
Perspectives
de
l’anesthésie
locorégionale
en
médecine
d’urgence
16
Conclusion
16
Annexe
A.
Contraintes
de
l’anesthésie
locorégionale
en
médecine
d’urgence
17
Annexe
B.
Propriétés
physicochimiques
et
pharmacocinétiques
des
anesthésiques
locaux
18
Annexe
C.
Complication
des
anesthésiques
locaux
18
Annexe
D.
Place
de
la
neurostimulation
19
Annexe
E.
Perspectives
de
l’anesthésie
locorégionale
en
médecine
d’urgence
19
Introduction
Douleur
en
médecine
d’urgence
Parmi
les
patients
consultant
aux
urgences,
60
%
présentent
une
douleur
aiguë [1].
La
douleur
est
le
motif
principal
de
consultation
pour
85
%
d’entre
eux [1].
Bien
que
la
prise
en
charge
de
la
douleur
soit
une
priorité
nationale,
un
indicateur
de
qualité
et
un
critère
impératif
dans
la
procédure
de
certification
V2
des
établissements,
la
douleur
est
souvent
non
renseignée
dans
les
dossiers
médicaux
des
urgences
et
insuffisamment
prise
en
charge [2,
3].
Aux
urgences,
les
phénomènes
douloureux
sont
exacerbés
par
la
mobilisation
nécessaire
lors
d’investigations
radiologiques,
du
transport
et
de
l’installation
du
patient
dans
un
service.
Ils
favorisent
des
manifestations
physiopathologiques
telles
que
la
tachycardie
ou
le
stress.
Ces
dernières
sont
pourvoyeuses
de
complications
cardiovasculaires
et
neurologiques
pouvant
aug-
menter
la
durée
d’hospitalisation
et
majorer
le
risque
de
décès
à
12
mois [4].
En
conséquence,
la
prise
en
charge
de
la
douleur
doit
être
précoce,
adaptée
à
chaque
patient
et
multimodale.
Elle
repose
sur
l’administration
d’antalgiques
à
posologie
adaptée
au
patient
associée
ou
non
à
une
analgésie
locale
ou
locorégionale.
Limites
des
approches
médicamenteuses
Les
médicaments
antalgiques
peuvent
s’avérer
insuffisants
et/ou
générer
des
effets
délétères,
notamment
chez
le
sujet
âgé [5].
L’anesthésie
locorégionale
(ALR),
en
tant
qu’alternative
ou
en
EMC
-
Médecine
d’urgence 1
Volume
0
>
n0
>
xxx
2022
http://dx.doi.org/10.1016/S1959-5182(22)43841-4
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25-010-G-20 Anesthésie
locorégionale
en
médecine
d’urgence
complément
des
autres
mesures
antalgiques,
permet
une
épargne
médicamenteuse
et
diminue
ainsi
leurs
effets
iatrogènes [6].
Ce
chapitre
traite
des
techniques
d’ALR
dans
le
cadre
de
l’urgence,
excluant
de
fait
les
blocs
dans
le
cadre
de
l’anesthésie
pour
intervention
chirurgicale.
Un
certain
nombre
de
patholo-
gies
douloureuses
se
prêtent
particulièrement
à
l’usage
de
l’ALR
aux
urgences,
même
si
son
utilisation
reste
aujourd’hui
trop
peu
fréquente,
par
méconnaissance [7].
Place
et
évolution
de
l’anesthésie
locorégionale
aux
urgences
L’intérêt
majeur
des
blocs
nerveux
périphériques
par
ALR
réside
en
leur
efficacité
analgésique
en
l’absence
de
retentissement
général.
Plusieurs
techniques
sont
adaptées
à
l’urgence,
tout
parti-
culièrement
pour
la
gestion
des
lésions
traumatiques
de
la
face
et
des
membres.
La
pratique
de
l’ALR
aux
urgences
est
encadrée
d’un
point
de
vue
technique
et
législatif
par
une
conférence
d’experts
conjointe
de
la
Société
franc¸aise
d’anesthésie
et
de
réanimation
(SFAR),
de
la
Société
franc¸aise
de
médecine
d’urgence
(SFMU)
et
du
Samu-Urgences
de
France
(SUdF)
datant
de
2002
et
actualisée
en
2016.
Ces
recommandations
ne
prennent
pas
en
compte
les
améliorations
récentes,
et
notamment
la
place
de
l’échographie
dans
la
sécurisation
du
geste.
Or,
longtemps
considérée
comme
la
technique
de
référence,
la
neurostimulation
est
aujourd’hui
supplantée
par
le
repérage
échographique.
L’échographie
est
devenue
la
méthode
de
réfé-
rence
pour
le
repérage
des
structures
nerveuses
et
vasculaires,
mais
nécessite
un
apprentissage
préalable
et
une
bonne
connaissance
de
l’anatomie
et
de
la
sonoanatomie.
Analgésie
locorégionale
dans
les
structures
d’urgence
Implémentation
dans
les
structures
d’urgence
L’implémentation
d’une
filière
d’ALR
dans
un
service
d’urgence
est
un
défi
qui
nécessite
une
coordination
multidisciplinaire
entre
urgentistes,
chirurgiens,
anesthésistes,
pharmaciens
et
radio-
logues.
L’intérêt
de
ces
techniques
dans
une
démarche
d’analgésie
multimodale
ciblée
ou
dans
la
réalisation
d’actes
thérapeutiques
est
régulièrement
démontré
que
cela
soit
en
médecine
préhospi-
talière [8,
9] ou
au
sein
des
services
d’urgence [10].
De
plus,
l’essor
de
l’échographie
permet
d’exacerber
les
bénéfices
de
l’ALR,
tout
en
améliorant
la
sécurité [11].
Malgré
cela,
l’ALR
reste
sous-utilisée
en
France.
Seuls
2,5
%
des
patients
qui
pourraient
en
bénéficier
en
ont
finalement
une
aux
urgences [5].
Les
causes
de
cette
sous-utilisation
sont
mul-
tiples
:
absence
de
culture
en
ALR,
absence
de
protocole,
manque
de
formation,
manque
de
connaissances [12].
Une
réflexion
légitime
doit
être
menée
sur
les
moyens
et
la
formation
néces-
saire
pour
répondre
aux
exigences
du
terrain
:
acquisition
de
connaissances
(anatomie,
utilisation
des
anesthésiques
locaux
[AL]),
apprentissage
technique
(gestes,
procédures,
échographie,
surveillance,
complications),
appréhension
des
problèmes
médi-
colégaux
(transfert
de
compétence,
responsabilité).
Besoins
Besoin
en
formation
La
pratique
de
l’ALR
nécessite
des
connaissances
en
phar-
macologie,
en
anatomie
et
une
habileté
technique.
Les
recom-
mandations
des
sociétés
savantes
soulignent
la
nécessité
d’un
enseignement
théorique
et
pratique
encadré
au
moins
en
partie
par
des
anesthésistes-réanimateurs,
car
il
conditionne
l’efficacité,
la
sécurité
du
geste
et
un
transfert
de
compétence
optimal [13].
Le
médecin
urgentiste
doit
connaître
l’ensemble
des
prérequis,
c’est-
à-dire
les
indications,
les
contre-indications,
les
effets
indésirables
des
techniques
d’ALR
et
des
AL,
mais
aussi
les
règles
de
sécurité.
Par
ailleurs,
l’ALR
nécessite
une
pratique
régulière
pour
permettre
le
maintien
des
connaissances
et
des
compétences,
ce
qui
n’est
pas
toujours
possible
dans
un
service
d’urgence
en
tension
ou
lorsque
le
temps
de
prise
en
charge
compte.
Du
fait
de
l’évolution
des
pratiques,
la
maîtrise
de
l’ALR
requiert
une
parfaite
connaissance
en
matière
de
sonoanatomie,
d’échoguidage
et
d’échorepérage
comme
le
rappelle
le
consensus
d’experts
concernant
le
premier
niveau
de
compétence
pour
l’échographie
clinique [14].
Il
n’existe
pas
pour
l’instant
de
courbe
d’apprentissage
en
méde-
cine
d’urgence,
mais
dix
à
30
réalisations
sont
nécessaires
pour
maîtriser
le
geste
en
fonction
du
bloc
en
anesthésie.
Plusieurs
enseignements
sous
forme
de
diplômes
universitaires
(DU)
ou
de
diplômes
interuniversitaires
(DIU)
permettent
d’acquérir
la
formation
nécessaire
à
la
pratique
de
l’ALR.
Ils
comprennent
à
la
fois
un
enseignement
théorique
et
pratique
avec
des
stages
au
bloc
opératoire.
Certaines
universités
ou
centres
hospitaliers
accrédités
par
le
Collège
franc¸ais
de
médecine
d’urgence
(CFMU)
proposent
également
une
initiation
aux
médecins
en
exercice
sur
des
modèles
fantômes [15] ou
sur
corps [16].
Enfin,
le
diplôme
d’études
spécialisées
de
médecine
d’urgence,
créé
en
2015,
a
inté-
gré
cet
enseignement
dans
la
formation
initiale.
Il
permet
ainsi
de
répondre
aux
exigences
de
la
médecine
d’urgence
moderne
dans
l’étendue
de
son
exercice.
Besoin
organisationnel
L’ALR
aux
urgences
doit
être
pratiquée
dans
un
espace
dédié
et
avec
du
matériel
adapté.
L’existence
d’un
chariot
d’ALR
simplifie
la
réalisation
du
geste.
Il
doit
inclure
des
procédures
écrites
sur
les
modalités
de
réalisation
et
de
surveillance
de
l’ALR,
ainsi
que
de
la
prise
en
charge
des
complications.
Des
informations
recueillies
de
manière
standardisée
indiquant
les
produits
administrés,
les
pro-
cédures
utilisées
et
les
éléments
de
surveillance
(heure
d’injection,
examen
neurologique
initial,
complications
liées
à
la
procédure)
ainsi
que
le
recueil
du
consentement
éclairé
du
patient
sont
ren-
seignées
dans
le
dossier
médical.
Une
feuille
de
surveillance
en
cas
de
sortie
du
service
doit
également
être
remise
aux
patients.
Conformément
aux
textes
législatifs
en
vigueur,
l’ensemble
des
équipes
médicales
et
paramédicales
du
service
doit
être
formé
aux
règles
de
bonnes
pratiques
pour
créer
une
véritable
culture
de
l’ALR
dans
son
service [17].
Contraintes
Elles
sont
liées
à
l’environnement
de
la
médecine
d’urgence
et
à
la
sécurité
(Annexe
A).
Bases
pharmacologiques
en
anesthésie
locorégionale
Les
AL
utilisés
pour
réaliser
une
ALR
bloquent
la
conduction
nerveuse
de
manière
réversible.
Ils
agissent
par
l’intermédiaire
des
canaux
sodiques
sodium/potassium
(Na/K)
ATPase-dépendants
situés
sur
la
membrane
cellulaire
des
neurones
en
diminuant
la
perméabilité
du
canal
à
l’ion
Na+.
Ils
exercent
également
une
interaction
sur
d’autres
cibles
cellulaires
par
inhibition
des
canaux
potassiques
et
calciques,
et
ont
une
action
mitochondriale
avec
diminution
de
la
synthèse
d’adénosine
triphosphate
(ATP)
(Fig.
1).
Propriétés
physicochimiques
et
pharmacocinétique
des
anesthésiques
locaux
Les
AL
ont
une
structure
comportant
un
noyau
aromatique
hydrophobe,
une
chaîne
intermédiaire
et
un
pôle
hydrophile.
Ils
sont
classés
en
deux
familles
:
les
aminoesters
(procaïne,
tétra-
caïne)
et
les
aminoamides
(lidocaïne,
mépivacaïne,
bupivacaïne,
ropivacaïne,
étidocaïne).
Les
AL
utilisés
en
médecine
d’urgence
font
partie
de
la
classe
des
aminoamides
(Annexe
B).
2EMC
-
Médecine
d’urgence
Téléchargé pour Ahmed MEHERZI ([email protected]) à University of Tunis El Manar Faculty of Medicine of Tunis à partir de ClinicalKey.fr par Elsevier
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Anesthésie
locorégionale
en
médecine
d’urgence 25-010-G-20
Tableau
1.
Données
pharmacologiques
des
principaux
anesthésiques
locaux
utilisables
pour
l’anesthésie
locorégionale
aux
urgences.
Molécule
Présentation
Puissance
Délai
d’action
Durée
d’action
Dose
maximale
(injection
unique)
Risque
toxique
Lidocaïne
Xylocaïne®
0,5
%
;
1
%
;
2
%
4
Rapide
5–10
min
Courte
60–120
min
300
mg
(adulte)
2–5
mg/kg
(enfant)
+
Xylocaïne®avec
adrénaline
1/200
000
4
500
mg
(adulte)
6–7
mg/kg
(enfant)
+
Mépivacaïne
Carbocaïne®
1
%
;
2
%
0,8
Rapide
10–15
min
Intermédiaire
90–180
min
400
mg
+
Ropivacaïne
Naropeine®
0,2
%
;
0,75
%
;
1
%
6,1
Lent
15–25
min
Long
180–360
min
150
mg
(adulte)
2,5–3
mg/kg
(enfant
>
12
ans)
+++
Versant
extracellulaire
AL
AL
AL
+
AL
+
AL
AL
+
Na+
Figure
1.
Mode
d’action
des
anesthésiques
locaux
sur
un
canal
sodique
ATPase-dépendant.
AL
:
anesthésique
local
sous
forme
non
ionisée
;
+AL
:
anesthésique
local
sous
forme
ionisée.
Molécules
utilisables
aux
urgences
Trois
AL
présentent
un
ratio
efficacité/sécurité
favorable
et
sont
recommandés
aux
urgences
:
la
lidocaïne,
la
ropivacaïne
et
la
mépivacaïne
(Tableau
1).
La
lidocaïne
a
un
délai
d’action
rapide
et
une
durée
d’action
courte.
Elle
est
utilisable
pour
les
plaies,
les
pro-
cédures
de
réduction
de
luxations
et
de
fractures.
La
ropivacaïne
présente
un
délai
d’action
plus
long,
mais
une
durée
d’action
pro-
longée.
Elle
est
intéressante
pour
la
prise
en
charge
de
la
douleur
provoquée
par
les
soins
et
les
mobilisations
des
patients
ayant
une
fracture
de
l’extrémité
supérieure
du
fémur.
La
mépivacaïne
est
de
durée
d’action
intermédiaire.
Elle
semble
plus
adaptée
lors
des
transferts
préhospitaliers,
notamment
chez
les
patients
avec
fracture
diaphysaire
fémorale.
Le
mélange
d’AL
est
déconseillé
en
raison
d’une
toxicité
neurologique
additive.
Intérêt
des
adjuvants
Adrénaline
L’adrénaline
est
un
puissant
vasoconstricteur.
Son
addition
à
faible
dose
dans
la
solution
ralentit
l’absorption
systémique
des
AL
et
prolonge
la
durée
du
bloc.
La
posologie
optimale
est
de
5
g/ml.
Son
emploi
doit
être
prudent
chez
le
patient
corona-
rien,
artéritique
ou
hypertendu.
Le
risque
principal
est
l’ischémie
distale
lors
des
blocs
des
extrémités.
Clonidine
La
clonidine
est
un
agoniste
des
récepteurs
alpha-2
adréner-
giques
de
la
corne
postérieure
de
la
moelle
et
agit
directement
sur
l’influx
nerveux
par
un
effet
hyperpolarisant.
La
clonidine
admi-
nistrée
par
voie
périnerveuse
(0,5–1
g/kg)
au
niveau
des
blocs
nerveux
périphériques
permet
d’augmenter
la
durée
du
bloc
sen-
sitif
et
améliore
l’analgésie.
Le
bénéfice
est
surtout
retrouvé
avec
la
mépivacaïne
et
discuté
avec
les
AL
de
longue
durée
d’action
comme
la
ropivacaïne,
mais
n’a
pas
été
évalué
en
médecine
d’urgence.
Alcalinisation
L’alcalinisation
des
solutions
d’AL
permettrait
d’augmenter
le
gradient
de
pH
entre
l’extérieur
et
l’intérieur
de
la
cellule,
et
ainsi
d’augmenter
la
quantité
de
formes
ionisées
intracellulaires
d’AL.
Les
études
cliniques
ne
retrouvent
pas
toujours
de
bénéfice
à
l’alcalisation,
et
cette
pratique
n’est
pas
recommandée.
Dexaméthasone
La
dexaméthasone
est
un
corticoïde
de
synthèse
utilisé
pour
prolonger
la
durée
d’un
bloc
périnerveux
jusqu’à
24
heures
ou
plus [18],
bien
qu’un
risque
neurotoxique
ne
soit
pas
totalement
écarté [19].
Son
mécanisme
d’action
est
inconnu.
Aux
urgences,
elle
est
utile
pour
les
patients
dont
l’intervention
chirurgicale
est
différée,
pour
prolonger
la
durée
de
l’analgésie.
L’injection
de
dexaméthasone
peut
être
périneurale
ou
intraveineuse.
Peu
d’études
ont
montré
la
supériorité
d’un
mode
d’administration
sur
l’autre.
En
pratique,
la
dexaméthasone
est
administrée
par
voie
intraveineuse
lente
à
la
posologie
de
10
mg
devant
l’absence
d’autorisation
de
mise
sur
le
marché
(AMM)
pour
l’administration
périnerveuse.
Antidote
des
anesthésiques
locaux
Les
émulsions
lipides
sont
composées
d’acides
gras
à
chaîne
longue
ou
d’un
mélange
de
chaîne
longue
et
intermédiaire.
Leur
administration
est
indiquée
pour
le
traitement
des
manifesta-
tions
cardiaques
ou
neurologiques
en
cas
de
toxicité
systémique
liée
aux
AL [20–22].
Ils
agiraient
en
absorbant
les
différentes
molé-
cules
d’AL
via
des
gouttelettes
lipidiques
selon
le
modèle
du
piège
lipidique.
Une
autre
hypothèse
est
une
action
métabolique
insulinodépendante
des
lipides
diminuant
le
stress
glycémique
tissulaire
sur
les
cellules
myocardiques
associée
à
une
activation
des
canaux
calciques,
favorisant
la
contractilité
myocardique.
Leur
utilisation
ne
doit
en
aucun
cas
retarder
la
réanimation
car-
diorespiratoire.
L’Intralipide®à
20
%
est
la
présentation
injectable
d’émulsions
lipidiques
la
plus
utilisée.
Un
bolus
de
3
ml/kg
doit
être
administré
dès
l’apparition
des
premiers
symptômes.
La
nécessité
d’une
per-
fusion
d’entretien
entre
0,2
à
0,5
ml/kg
sur
30
minutes
ne
paraît
pas
indispensable,
mais
une
récidive
des
troubles
du
rythme
est
possible.
En
l’absence
d’amélioration,
le
bolus
initial
peut
être
répété
une
à
deux
fois,
à
5
minutes
d’intervalle,
et
la
perfusion
peut
être
accélérée
(0,5
ml/kg/min).
Une
surveillance
clinique
et
élec-
trocardiographique
rapprochée
est
nécessaire
pendant
au
moins
6
heures.
En
cas
d’arrêt
cardiorespiratoire,
un
bolus
de
1,5
ml/kg
en
1
minute
suivi
d’une
perfusion
continue
de
0,25
ml/kg
sur
1
heure
est
recommandé.
Il
est
possible
de
renouveler
le
bolus
deux
fois
sans
dépasser
une
dose
cumulée
de
12
ml/kg.
EMC
-
Médecine
d’urgence 3
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25-010-G-20 Anesthésie
locorégionale
en
médecine
d’urgence
Sédation
et
anesthésie
locorégionale
Une
sédation
première
peut
faciliter
la
réalisation
du
bloc,
notamment
en
cas
d’agitation
du
patient.
Celle-ci
doit
permettre
de
garder
un
contact
verbal
pour
la
détection
des
complications
aux
AL.
Les
médicaments
de
courte
durée
d’action
et/ou
anta-
gonisables
sont
à
privilégier.
Le
midazolam
est
la
molécule
de
choix,
administré
par
bolus
intraveineux
de
0,05
mg/kg
jusqu’à
l’obtention
de
l’effet
désiré.
La
kétamine
à
la
dose
de
0,5
à
1
mg/kg
par
voie
intraveineuse
est
une
alternative.
L’administration
d’antalgiques
semble
intéressante
dans
une
démarche
multimo-
dale.
Le
choix
se
porte
généralement
sur
la
morphine
en
titration
intraveineuse
de
2
à
3
mg
toutes
les
5
minutes,
en
fonction
du
poids,
associée
ou
non
à
un
bolus
initial
de
0,1
mg/kg.
Le
mélange
équimolaire
oxygène–protoxyde
d’azote
est
utile
notam-
ment
chez
l’enfant.
Complications
des
anesthésiques
locaux
Les
complications
secondaires
à
l’administration
des
AL
sont
locales
ou
systémiques
(Annexe
C).
Matériel
nécessaire
à
l’anesthésie
locorégionale
dans
une
structure
d’urgence
Environnement
L’ALR
doit
s’effectuer
au
calme
dans
une
pièce
disposant
d’oxygène,
d’un
chariot
d’urgence
et
de
réanimation
avec
l’ensemble
du
matériel
permettant
une
réanimation
cardiopul-
monaire.
L’utilisation
d’un
chariot
spécifiquement
conc¸u
pour
la
réali-
sation
de
l’ALR
est
recommandée.
Il
doit
contenir
l’ensemble
du
matériel
et
des
médicaments
nécessaires
à
la
réalisation
du
geste.
Les
protocoles
institutionnels
de
réalisation
d’une
ALR
et
de
prise
en
charge
des
complications
potentielles
doivent
être
facilement
disponibles.
Mise
en
condition
Le
patient
est
surveillé
à
l’aide
d’un
moniteur
multipara-
métrique
permettant
la
surveillance
continue
du
pouls,
de
la
fréquence
respiratoire,
de
la
tension
artérielle
et
de
la
saturation
pulsée
en
oxygène.
Cette
surveillance
débute
avant
et
doit
se
pour-
suivre
pendant
au
moins
30
minutes
après
réalisation
d’une
ALR
du
membre
supérieur
et
pendant
au
moins
60
minutes
après
réa-
lisation
d’une
ALR
du
membre
inférieur [23].
La
pose
d’un
accès
vasculaire
de
sécurité,
ou
la
vérification
de
la
perméabilité
d’un
accès
vasculaire
déjà
en
place,
est
un
prérequis
nécessaire
pour
traiter
une
éventuelle
complication.
Par
analogie
avec
les
cathéters
intravasculaires,
la
tonte
des
poils
au
site
de
ponction
n’est
pas
utile
si
ceux-ci
ne
gênent
pas
la
réalisation
du
geste
ou
l’adhésion
d’un
pansement.
La
peau
est
désinfectée
largement
avec
un
antiseptique
en
solution
alcoo-
lique,
de
préférence
avec
de
la
chlorhexidine
alcoolique
à
2
%.
L’utilisation
de
larges
champs
stériles,
délimitant
le
champ
opéra-
toire,
permet
de
limiter
le
risque
de
fautes
d’asepsie.
L’opérateur
est
équipé
d’un
masque,
d’un
calot
et
de
gants
sté-
riles
à
usage
unique,
auxquels
on
ajoute
une
casaque
stérile
en
cas
de
mise
en
place
d’un
cathéter.
Aiguilles
de
ponction
La
longueur
des
aiguilles
est
adaptée
à
la
morphologie
du
patient
et
à
la
profondeur
du
nerf.
Elles
doivent
avoir
un
diamètre
de
21
à
23
Gauge
pour
permettre
un
retour
veineux
rapide
lors
des
tests
d’aspiration
et
une
bonne
perception
de
la
résistance
à
l’injection.
Le
biseau
doit
être
court
(20–30)
pour
limiter
le
risque
de
lésions
nerveuses.
Leur
structure
échogène
facilite
leur
repé-
rage
échographique.
Elles
peuvent
être
munies
d’un
canal
latéral
facilitant
l’injection
de
l’AL
et
d’une
connectique
si
une
neuro-
stimulation
est
utilisée [13].
Un
système
de
localisation
et
de
suivi
des
aiguilles
de
type
GPS
est
en
cours
d’évaluation.
Il
permettrait
d’améliorer
les
performances
en
termes
de
confort
de
l’opérateur,
de
nombre
de
tentatives,
de
redirections
d’aiguilles
et
de
contacts
osseux [24] et
d’accélérer
la
courbe
d’apprentissage
des
nouveaux
opérateurs [25].
Il
n’est
pas
recommandé
d’utiliser
des
aiguilles
à
biseau
long
ou
en
«
pointe
de
crayon
»
(Annexe
D).
Place
de
l’échographie
L’échographie
est
actuellement
la
méthode
de
référence
pour
le
repérage
des
structures
nerveuses
et
la
sécurisation
de
l’ALR [26].
Elle
nécessite
un
apprentissage
préalable,
et
une
bonne
connaissance
des
réglages
de
l’appareil,
de
l’anatomie
et
de
la
sonoanatomie
des
structures
concernées.
La
sonde
utilisée
doit
avoir
une
fréquence
la
plus
élevée
possible
en
fonction
du
type
de
bloc
et
de
la
profondeur
de
la
cible
afin
d’obtenir
une
image
précise
et
permettant
une
bonne
résolution
spatiale.
En
pratique,
une
sonde
linéaire
avec
des
fréquences
supé-
rieures
à
10
MHz
est
tout
à
fait
adaptée
à
cet
usage.
Elle
doit
être
enveloppée
dans
une
gaine
stérile
contenant
du
gel.
Du
gel
stérile
unidose
doit
être
utilisé
entre
la
gaine
et
la
peau
du
patient.
Les
paramètres
de
profondeur,
contraste,
gain
et
focale
doivent
être
ajustés
pour
obtenir
une
image
permettant
le
suivi
de
la
progres-
sion
de
l’extrémité
de
l’aiguille
en
temps
réel.
La
trajectoire
de
l’aiguille
doit
être
réfléchie
et
anticipée
par
une
recherche
dynamique
des
éléments
anatomiques.
Les
structures
nerveuses
sont
identifiées
dans
leur
coupes
petit
axe
(transversale)
et
grand
axe
(longitudinale),
permettant
ainsi
une
cartographie
précise
du
trajet
nerveux.
Le
nerf
est
idéalement
abordé
par
une
coupe
«
petit
axe
»
et
l’approche
de
l’aiguille
se
fait
de
manière
tangentielle,
dans
le
plan
(toute
la
longueur
de
l’aiguille
est
alors
visualisée
à
l’écran)
ou
en
dehors
du
plan
(coupe
transversale
de
l’extrémité
de
l’aiguille).
L’aiguille
doit
progresser
lentement
et
son
extrémité
doit
toujours
être
visualisée
en
échographie.
Pour
cela,
on
utilise
l’hydrolocalisation
qui,
par
une
succession
d’injections
de
la
solu-
tion
d’AL,
permet
de
suivre
la
position
de
l’extrémité
de
l’aiguille.
Cela
permet
de
visualiser
en
continu
le
trajet
de
l’aiguille
et
d’éviter
toute
lésion
neurale.
Une
autre
technique
de
visualisation,
l’hydrodissection,
consiste
à
écarter
(disséquer)
les
fascias
et
les
espaces
intermus-
culaires
en
injectant
de
l’AL
en
continu
durant
la
progression
de
l’aiguille.
Cela
en
facilite
la
pénétration
et
la
mobilisation
jusqu’à
la
cible,
le
nerf.
L’échographie
diminue
le
risque
de
plaie
vasculaire
et
la
durée
du
geste,
limite
le
risque
d’injection
intraneurale
et
aug-
mente
le
taux
de
succès
de
l’ALR.
Sa
généralisation
est
cependant
limitée
par
son
coût
et
la
nécessité
d’être
formé.
Des
travaux
sont
en
cours
pour
sécuriser
encore
plus
l’échoguidage
par
l’utilisation
de
la
3D/4D [27,
28],
mais
le
manque
de
données
ne
permet
pas
de
conclure
à
une
réduction
des
complications
inhérentes
à
l’ALR.
Enfin,
dans
un
souci
de
respect
des
règles
d’hygiène,
l’échographe,
la
sonde
et
les
câbles
doivent
être
nettoyés
et
dés-
infectés
entre
deux
patients.
Anesthésiques
locaux
L’injection
de
l’AL
se
fait
avec
une
seringue
luer
lock
préala-
blement
positionnée
sur
le
canal
latéral
de
l’aiguille
et
dont
la
taille
est
adaptée
au
volume
de
la
solution
à
injecter
(hydrodissec-
tion/hydrolocalisation
comprises).
Le
choix
de
la
molécule,
de
sa
concentration
et
du
volume
à
administrer
est
détaillé
ailleurs.
Anesthésie
locorégionale
de
la
face
Les
blocs
de
la
face
et
du
cuir
chevelu
sont
peu
connus
et
sous-utilisés
en
médecine
d’urgence.
Trois
blocs
sont
réalisables
de
manière
uni-
ou
bilatérale
:
4EMC
-
Médecine
d’urgence
Téléchargé pour Ahmed MEHERZI ([email protected]) à University of Tunis El Manar Faculty of Medicine of Tunis à partir de ClinicalKey.fr par Elsevier
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Anesthésie
locorégionale
en
médecine
d’urgence 25-010-G-20
1
1
2
2
3
3
3
4
4
4
Nerf
ophtalmique
Nerf
maxillaire
Nerf
mandibulaire
1
Figure
2.
Innervation
sensitive
de
la
face
par
le
nerf
trijumeau
et
localisation
des
foramens
supraorbitaire,
infraorbitaire
et
mentonnier.
1.
Nerf
et
foramen
supraorbitaire
;
2.
nerf
et
foramen
supratrochléaire
;
3.
nerf
et
foramen
infraorbi-
taire
;
4.
nerf
et
foramen
mentonnier.
le
bloc
frontal
;
le
bloc
infraorbitaire
;
le
bloc
mentonnier.
Ces
blocs
sont
simples
de
réalisation
et
ne
nécessitent
que
peu
de
matériel.
Ils
sont
idéaux
en
cas
de
plaies
multiples
de
la
face.
Par
ailleurs,
en
raison
des
ramifications
nerveuses
multiples
et
des
ana-
stomoses,
les
sutures
des
plaies
du
nez
nécessitent
régulièrement
de
réaliser
le
bloc
de
manière
bilatérale.
Innervation
sensitive
de
la
face
L’innervation
sensitive
de
la
face
est
assurée
par
des
ramifica-
tions
issues
du
nerf
trijumeau
(V)
(Fig.
2).
Le
V
est
un
nerf
quasi
exclusivement
sensitif
issu
du
tronc
cérébral.
Il
se
divise
en
trois
branches
au
niveau
du
ganglion
trigéminal,
appelé
aussi
ganglion
de
Gasser,
situé
sur
la
face
antérosupérieure
du
rocher
tempo-
ral.
Ces
trois
branches
assurent
presque
entièrement
l’innervation
sensitive
de
la
face.
Le
nerf
ophtalmique
(V1)
innerve
le
front,
la
région
orbitaire,
la
paupière
supérieure,
la
cornée,
la
région
temporale
et
la
racine
du
nez.
Le
nerf
maxillaire
(V2)
assure
l’innervation
sensitive
d’une
région
homolatérale
de
la
face
inté-
ressant
l’hémilèvre
supérieure,
la
joue
et
la
paupière
inférieure.
Enfin,
le
nerf
mandibulaire
(V3)
permet
l’innervation
sensitive
des
parties
inférieure
et
latérale
de
l’hémiface,
mais
aussi
l’innervation
motrice
du
muscle
masséter
et
des
autres
muscles
masticateurs
via
une
anastomose
avec
la
racine
motrice
du
trijumeau.
Noter
que
la
région
intéressant
l’angle
mandibulaire,
aussi
appelé
encoche
massétérine,
n’est
pas
innervée
par
le
V,
mais
par
une
branche
du
deuxième
nerf
cervical.
Bloc
frontal
Repère
anatomique
Le
bloc
frontal
consiste
en
une
anesthésie
du
territoire
du
nerf
frontal,
branche
du
V1
et
de
ses
rameaux,
les
nerfs
supraorbitaire
et
supratrochléaire.
Ces
nerfs
assurent
l’innervation
sensitive
du
EMC
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Médecine
d’urgence 5
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