Telechargé par koussalima jean-marie

memoire Jean Marie KOUSSALIMA

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RÉPUBLIQUE DU BENIN
-----O---MINISTÈRE DE L’ENSEIGNEMENT
SUPÉRIEUR ET DE LA
RECHERCHE SCIENTIFIQUE
-----O---UNIVERSITÉ DE PARAKOU
-----O---ÉCOLE DOCTORALE, SCIENCES JURIDIQUES,
POLITIQUES ET ADMINISTRATIVES
-----O---MÉMOIRE DE MASTER II RECHERCHE DROIT ÉCONOMIQUE
-----O---OPTION : DROIT DE L’ENTREPRISE
-----O----
SUJET :
LA SÉCURITÉ SOCIALE DES TRAVAILLEURS À L’ÉPREUVE DU
PRINCIPE D’ÉGALITÉ DE TRAITEMENT EN DROIT TOGOLAIS.
Réalisé et soutenu publiquement le 04 juin 2020 par :
M. Koumantéga KOUSSALIMA
Sous la Direction de :
M. Éric DEWEDI,
Maître de conférences, agrégé en droit privé et sciences criminelles, Directeur de
l’École Doctorale, Sciences Juridiques, Politiques et Administratives de
l’Université de Parakou.
ANNÉE ACADÉMIQUE : 2018-2019
AVERTISSEMENT
L'université de Parakou n'entend donner aucune approbation aucune improbation
aux opinions émises dans ce document ; ces opinions doivent être considérées
comme propres à son auteur.
i
DÉDICACE :
 À mes parents,
 À tous ceux qui mènent cette lutte inlassable de sauvegarde des droits de
l’homme en général, et des droits socioéconomiques des travailleurs en
particulier.
ii
REMERCIEMENTS
L’arrivée aux termes de ces travaux de recherches, n’a été possible que grâce au
soutien, de toute nature de certaines personnes à qui nous tenons à exprimer notre
profonde reconnaissance, sans toutefois oublier la volonté de Dieu à qui nous
rendons grâce pour tous les bienfaits. Nous pensons ainsi particulièrement :
 Au Professeur Éric DEWEDI, Maître de conférences Agrégé, Directeur de
l’École Doctorale, Sciences Juridiques Politiques et Administratives de
l’Université de Parakou, pour la direction de ce mémoire, ainsi que pour
tous les sacrifices consentis en vue d’assurer à toute la promotion une
formation de haute qualité, nous y tirons un intérêt majeur,
 Aux corps enseignant et administratif de l’École Doctorale, Sciences
Juridiques, Politiques et Administratives de l’Université de Parakou, pour
leurs diverses contributions,
 Aux membres du jury, qui, malgré leurs diverses préoccupations, ont
accepté évaluer ce travail, afin d’y porter un regard critique pour son
amélioration,
 À tout le personnel du Centre de Documentation et d’Information Juridique
de la Cour d’Appel de Cotonou pour la fourniture de la documentation
nécessaire en vue de la rédaction de ce mémoire,
 Au personnel du cabinet d’avocat Maître Joseph DJOGBENOU à Cotonou
au Bénin,
 À messieurs Essoham ALI et Dihigbamba KPANOUGOU pour leurs
précieux conseils en vue de l’amélioration de ce travail,
 À Monsieur Jean Marie SOLUMBA pour la parfaite collaboration durant la
formation,
 À mes parents pour tout le soutien durant la formation,
 À mes camarades de promotion pour tous ces moments de convivialité
partagés et passés ensemble.
À vous toutes et tous, de près ou de loin, veuillez recevoir les expressions de
nos profondes gratitudes.
iii
SIGLES ET PRINCIPALES ABRÉVIATIONS
ACOSS
: Agence Centrale des Organismes de Sécurité Sociale
AISS
: Association Internationale de la Sécurité Sociale
Al.
: Alinéa
Art.
: Article
Ass.
: Assurances
C.C.
: Convention Collective
CADES
: Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale
CDD
: Contrat à Durée Déterminée
CDI
: Contrat à Durée Indéterminée
CEDH
: Cour Européenne des Droits de l’Homme
Chron.
: Chronique
CIPRES
: Conférence Interafricaine de la Prévoyance Sociale
CNSS
: Caisse Nationale de Sécurité Sociale
CPAM
: Caisse Primaire d’Assurance Maladie
CRCC
: Caisse de Retraite Complémentaire des Cadres
CRT
: Caisse de Retraite du Togo
CSS
: Code de Sécurité Sociale
Déf.
: Définition
DUDH
: Déclaration Universelle des Droits de l’Homme
Éd.
: Édition
EN3S
: École nationale supérieure de Sécurité sociale
FCFA
: Franc de la Communauté Française d’Afrique
iv
Ibid.
: Ibidem
INAM
: Institut National d’Assurance Maladie
IPRES-RCC
:Institut de Prévoyance
Complémentaire des Cadres
IRCANTEC
:Institution de Retraite Complémentaire des Agents Non Titulaires
de l’État et des Collectivités
MTESS
: Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité Sociale
N°
: Numéro
OIT
: Organisation Internationale du Travail
ONG
: Organisation Non Gouvernementale
Op. cit.
: Opéra Citato (cité plus haut)
P.
: Page
PACS
: Pacte Civil de Solidarité
PP.
: Pages
R.F.D.A
: Revue Française du Droit des Affaires
RSE
: Responsabilité Sociale de l’Entreprise
RTDJA
: Revue Trimestrielle de Droit et de Jurisprudence des Affaires
S.S.
: Sécurité Sociale
SCI
: Société Civile Immobilière
SMIG
: Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti
TASS
: Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale
TC
: Tribunal des Conflits
URSSAF
: Union de Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et
d’Allocations Familiales.
v
Retraite
du
Sénégal-
Retraite
SOMMAIRE
INTRODUCTION .....................................................................................................1
PARTIE I. UNE SÉCURITÉ SOCIALE INÉGALE : SOURCE D’UN
DÉSÉQUILIBRE ....................................................................................................11
CHAPITRE I. Un déséquilibre lié à un système de sécurité sociale sélectif ..13
Section I. Une sécurité sociale basée sur un modèle d’assurance .....................13
Section II. Un système de protection sociale moins efficace .............................21
CHAPITRE II. Un déséquilibre lié au statut juridico économique des
travailleurs. ...........................................................................................................30
Section I. Une différence de traitement relevant du statut économique du
travailleur ............................................................................................................30
Section II. Une différence de traitement relevant du statut juridique du
travailleur : le cas des agents contractuels d’État ...............................................39
PARTIE II. UNE INÉGALITÉ SURMONTABLE À L’ÉGARD DES
REFORMES ............................................................................................................49
CHAPITRE I. L’extension des assurances sociales ..........................................51
Section I : Une sécurité sociale non contributive basée sur la solidarité ...........51
Section II. Une réforme du cadre juridico-institutionnel de sécurité sociale .....59
CHAPITRE II. La réforme du système de financement ..................................69
Section I. Un rééquilibrage du financement de la sécurité sociale togolaise .....69
Section II. Une gestion efficace des ressources financières de la sécurité
sociale………………………………………………………………………….77
CONCLUSION ........................................................................................................86
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ..............................................................90
TABLE DE MATIÈRES ........................................................................................98
vi
INTRODUCTION
1
« Les inégalités persistantes entre les régimes de protection des travailleurs
menacent la solidarité qui fonde la sécurité sociale et qui implique de cotiser selon
ses ressources et de recevoir selon ses besoins, quel que soit le statut sous lequel est
exercé le travail. Pour tendre vers l’unité, objectif initial des fondateurs de la
sécurité sociale, il faut interroger les différentes situations de travail et la manière
de les traiter, afin d’apporter des prestations sociales de nature équivalente à tous
les travailleurs, sans nier la spécificité de leurs besoins sociaux.»1 Cette réflexion
de l’ancien avocat en droit social, Coralie Larrazet illustre les différentes inégalités
existantes entre les différents régimes de sécurité sociale des travailleurs.
L’entreprise étant une
« unité économique qui implique la mise en œuvre de
moyens humains et matériels de production ou de distribution des richesses
reposant sur une organisation préétablie»2, il est aussi fort évident que l’ensemble
du capital humain3 soit exposé à des degrés différents de risques sociaux4 dont la
prise en charge, assurée par la « sécurité sociale ».5 Cela nécessite alors l’accès et le
traitement paritaire entre les différents travailleurs. « L'équité n'est pas l’égalité ; les
anciens ont défini la justice comme […] "volonté permanente d'attribuer à chacun
son droit". La question est de savoir ce à quoi chacun a droit ! En matière de
prestation médicale, l'adulte bien portant n'a rien à gagner à recevoir plus qu'une
surveillance légère ; la vie d'un malade peut dépendre d'un traitement très coûteux ;
les soins quotidiens indispensables à un octogénaire assez favorisé quant à la santé
dépassent souvent ses dépenses en nourriture »6. De telles disparités en matière de
retraite entre les différents régimes de protection sociale ont poussé divers acteurs
1.
2.
3.
4.
5.
6.
C. LARRAZET, « Les non-salariés et la Sécurité sociale : le défi de l’égalité », p. 08. disponible à
l’adresse https://silogora.org/wp-content/uploads/2018/03/C.-Larrazet.mp4 consulté le 27/10/2019.
S. GUINCHARD et T. DEBARD, Lexique des termes juridiques, 2017-2018, Dalloz, p. 889.
Le capital humain ici désigne l’ensemble des travailleurs de l’entreprise, des ouvriers aux cadres sans
aucune distinction.
Le terme "risque social" désigne un événement dont la survenue est le plus souvent incertaine et
imprévue, provoquant une diminution du niveau de vie, soit par ce que les dépenses augmentent,
soit par ce que les ressources diminuent. Il est alors dit "social" car sa prise en charge est assurée par
la collectivité.
« Ensemble des régimes assurant la protection de l’ensemble de la population contre les différents
risques sociaux : maladie, maternité, invalidité, vieillesse, décès, accidents du travail et maladies
professionnelles, charges familiales », S. GUINCHARD et T. DEBARD, Lexique des termes
juridiques, 25ème éd. 2017-2018, Dalloz, p. 2158.
J.-P. BENZÉCRI, « disparité géographique et équité du système français de sécurité sociale », in
« Les cahiers de l’analyse des données, tome 14, no 2 (1989) p. 143.
2
sociaux ainsi que le gouvernement français à l’élaboration d’un projet de loi portant
réforme de retraites en vue d’éradiquer ces différentes inégalités existantes7 par la
préconisation d’un système universel par point.
C’est l’analyse de cette situation dans le cadre de cette recherche qui a conduit
au choix de ce sujet libellé comme suit : « la sécurité sociale des travailleurs à
l’épreuve du principe d’égalité de traitement en droit togolais».
Par « sécurité sociale », il faut entendre de façon générale l’ensemble des
systèmes de prestations sociales. La plupart des législations à l’instar de celle
togolaise, n’en donnent pas une définition expresse. Celle-ci est envisagée par
plusieurs doctrinaires dont l’idée générale gravite autour des systèmes de
prestations sociales. Ce système est danse et peut varier d’un pays à un autre ou de
l’ordre interne à l’ordre international.8 Cependant, la variabilité de cette notion ne
doit pas être confondue avec la protection sociale qui est un ensemble un peu plus
vaste que la sécurité sociale.
« Si en effet, la protection sociale, expression au
demeurant vague et peut être ambigüe, regroupe tous les efforts, institutions et
techniques qui tendent à protéger les personnes des risques sociaux, et à les mettre
autant que possible, à l’abri du besoin, la sécurité sociale apparait comme un des
éléments seulement de cette protection plus vaste même s’il s’agit de la pièce la
plus importante.»9
Aussi convient-il de différencier la sécurité sociale de « l’aide sociale »10. La
première répond à un effort contributif par des efforts de cotisations de ses
bénéficiaires11 alors que la seconde fait face aux besoins de ceux qui n’ont pas de
revenus ou revenus suffisants pour y faire face.12
Le terme « travailleur » est vu juridiquement comme « toute personne qui
exécute, moyennant une rémunération forfaitaire, pour le compte d’un ou plusieurs
établissements, un travail qui lui est confié soit directement, soit par un
7.
8.
9.
10.
11.
12.
Voir les art. 01, 02 et 03 du projet de loi instituant un système universel de retraite en France.
J.-P. LABORDE, Droit de la sécurité sociale, Presse éditeur de France-PUF, 2005, p. 02.
J.-P. LABORDE, op. cit., p. 03.
« Secours apporté par les collectivités publiques aux personnes dont les ressources sont insuffisantes»,
S. GUINCHARD et T. DEBARD, Lexique des termes juridiques, 25ème éd. 2017-2018, Dalloz, p.
139.
J.-P. LABORDE, op. cit., p. 04.
J.-P. LABORDE, op. cit., p. 03.
3
intermédiaire 13 . Ce peut être aussi celui qui exécute, soit seul 14 , soit avec son
conjoint, partenaire lié par un PACS, concubin ou avec ses enfants à charge ou
avec un auxiliaire, le travail confié par un donneur d’ouvrage lui procurant les
matières premières, moyennant une rémunération forfaitaire. Le travailleur à
domicile est assimilé au salarié par la loi»15.
La notion d’« épreuve » est ici entendue comme une action, qui met en
expérience un fait ou acte par rapport à un autre. C’est dire donc que c’est une
confrontation de deux valeurs pour un résultat attendu. Elle permet alors de vérifier
l’efficacité ainsi que les défauts pouvant y résulter.
Un « principe » désigne d’abord une origine, une cause première. C’est un
élément constitutif de quelque chose, une cause première et originelle. C’est encore
une règle théorique générale qui détermine la conduite et l'action à respecter.
L’égalité de traitement renvoi d’abord à deux autres principes qui sont l’égalité
devant la loi et la non-discrimination des individus se trouvant dans la même
situation. Les travailleurs se trouvant dans les situations identiques doivent être
également traités de façon identique, pour ce qui concerne les avantages sociaux de
toute nature. C’est un principe de rationalité et de justice du droit.16
Par référence au droit togolais, il faut y entendre l’ensemble des dispositions
juridiques17 qui, à un moment donné, règlent le statut des biens et des personnes
ainsi que les rapports entre les personnes publiques ou privées au Togo.
De toutes ces définitions, l’on pourra retenir du sujet une compréhension assez
explicite qui est celle de la condition et du degré d’accessibilité des travailleurs
togolais aux prestations sécurité sociale au Togo, ou encore celle des conditions
13.
14.
15.
16.
17.
C’est le cas d’un travailleur salarié qui est sous la subordination juridique et économique d’un
employeur.
Reference faite au travailleur indépendant exerçant son activité en toute indépendance.
S. GUINCHARD et T. DEBARD, op.cit., p. 2038.
J. PELISSIER, G. AUZERO, E. DOCKES, Droit du travail, 26ème éd. Dalloz, 2012, p. 663.
Au Togo, le système de sécurité sociale essentiellement basé sur la logique d’ « assurances sociales »
a un cadre normatif datant de l’époque coloniale. L’évolution juridique de ce système a été le résultat
de l’adoption de la loi n°2011-006 du 21 février 2011 portant code de la sécurité sociale. La loi de
2011 est venue répondre à un souci majeur qui était la limite de la sécurité sociale aux seuls salariés
selon les dispositions de la loi portant Code du travail. À côté de cette disposition, on retrouve la loi
n°63-18 du 21 novembre 1963 portant création de la Caisse de Retraite du Togo pour s’occuper du
régime des fonctionnaires civiles, des magistrats et des militaires de l’État togolais sans toutefois
oublier les différents décrets et règlements.
4
d’extension du principe d’égalité de traitement, qui tire sa source en droit du travail,
vers le droit de la sécurité sociale au Togo.
La protection de l’individu contre les aléas de l’existence reste profondément
marquée par la nature de sa relation de travail18. Elle tire son origine du monde
industriel19 et est liée à un emploi, visant à répondre à certaines urgences du monde
du travail telles que les accidents du travail 20 et certaines maladies à caractère
professionnel ou non professionnel, mais aussi, elle vise à institutionnaliser la
solidarité dans la société afin que les individus ne dépendent plus de la charité. De
nombreuses entreprises togolaises regroupent en leur sein, des acteurs sociaux21 de
différentes catégories, qui ont le droit d’être couvert par une sécurité sociale, telle
que recommandés par les textes juridiques nationaux 22 et internationaux23 sous la
houlette de l’ONU. Ils sont regroupés en diverses catégories socioprofessionnelles,
de grades et classes différentes 24 , soumis à la subordination 25 tant juridique
qu’économique de leurs employeurs. Certains acteurs font partie intégrante de
l’entreprise, mais y exercent leur activité sans subordination d’un employeur en
qualité de travailleurs indépendants26. L’entreprise est alors une société, un monde
du travail regroupant plusieurs travailleurs de régime juridiques différents.
Toutefois, « les inégalités, principalement générées dans la société moderne par la
18.
19.
20.
21.
22.
23.
24.
25.
26.
Y. BATARD, La protection sociale des agents publics et des salariés : égalité de droits, inégalités de
traitement, L’harmattan, 2004, p. 15.
La révolution industrielle suscita le développement d’une classe ouvrière, dont les membres ne
disposent que d’un seul bien, leur force de travail, et tire leur unique revenu de sa location à un
entrepreneur. La classe ouvrière reste alors décimée par des accidents de travail, l’insuffisance
technique, les vulnérabilités de la main d’œuvre infantile. Cette classe vit alors dans une insécurité
économique dans la mesure où elle vit uniquement que des revenus de leurs forces de travail. Cette
situation d’insécurité a eu pour conséquence la mise en place d’un système de prise en charge dans les
État de ces différents risques sociaux.
Voir l’art. 49 de la loi n°2011-006 portant code de sécurité sociale au Togo.
Voir D. SIMONNET, « Les acteurs de l’entreprise », in « les 100 mots de l’entreprises, pp. 13 à 31.
La sécurité sociale togolaise est régie par la loi n°2011-006 du 21 février 2011 portant code de la
sécurité sociale pour les travailleurs du secteur privé et la loi n° 91-11 du 23 mai 1991 fixant le régime
des pensions civiles et militaire pour les fonctionnaires d’État.
Voir l’art. 22 de la DUDH.
Le monde des travailleurs du Togo est organisé et reparti en trois grandes catégories de travailleurs à
savoir les agents d’exécutions, les agents de maîtrise et les cadres et assimilés.
La subordination juridique est « la situation de dépendance, du travailleur placé, en droit, sous
l’autorité de celui pour lequel il effectue une tâche (…) marque spécifique et principal critère du
contrat de travail, ainsi que de l’affiliation au régime général de la S.C.I » V. G. CORNU,
Vocabulaire juridique, 12ème édition, 2016, mis à jour.
Le travailleur in dépendant est tout travailleur ordinaire à la seule différence que ce dernier n’est pas
lié par un contrat de travail et travail pour son propre compte. Ils bénéficient dans certains systèmes
juridiques de sécurité sociale de régimes spéciaux du fait de leur situation juridique.
5
condition de salarié, et qui portent atteinte aux principes devant gouverner une
collectivité de citoyens, ont ainsi suscité une vision de la justice centrée sur la
recherche d’une plus juste répartition des ressources entre les acteurs de
l’économie » 27 . Le droit de la sécurité sociale togolaise qui s’appuie sur cette
condition salariale, exige donc des assurés un revenu
28
comme assiette au
financement de la sécurité sociale. Cette logique contributive29, basée sur le salariat,
répond donc à la norme « à contributions égales, prestations égales », marquant
ainsi une rupture avec la conception d’ « universalisation des prestations » où on
peut contribuer sans espérer une prestation30. Ceci révèle une interrogation majeure
quant à l’égalité d’accès31 et de prestation de système de sécurité sociale mise en
place au Togo.
Outre la protection sur le plan interne, le principe d’égalité est protégé au niveau
international par la Déclaration universelle des droits de l’homme et les Pactes
internationaux des Nations unies du 16 décembre 196632, mais également au niveau
européen par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des
libertés fondamentales et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
L’avènement de la création de l'OIT puis de l’ONU, fait de la sécurité sociale
une valeur juridique et un droit humain fondamental, par sa consécration dans des
textes nationaux et internationaux. La sécurité sociale reste un maillon essentiel de
l’OIT, dans la mesure où elle est devenue, au fil des temps, un des principaux
objectifs de cette institution. En effet, la Déclaration concernant les buts et objectifs
de l’OIT de 1944 prône «l'extension des mesures de sécurité sociale en vue
d'assurer un revenu de base à tous ceux qui ont besoin d'une telle protection ainsi
que des soins médicaux complets.»33
27.
28.
29.
30.
31.
32.
33.
R. LAFORE, « Le principe d’égalité dans la Sécurité sociale : incertitudes et ambiguïtés de sa
construction contentieuse » in « Le Droit Ouvrier », p. 433.
Voir l’art. 12 de la loi n°2011-006 du 21 février 2011 portant code de la sécurité sociale du Togo.
R. LAFORE, op. cit. p. 440.
Idem, p. 438.
L’accès à la sécurité sociale conditionné par un revenu professionnel constitue en soit, une limite
affectant le principe de l’égalité à la sécurité sociale.
Il s’agit du Pacte International sur les Droits Civils et Politiques (PIDCP) et le Pacte International sur
les Droits Économiques, Sociaux et Culturels (PIDESC).
Adoptée à Philadelphie (États-Unis) le 10 mai 1944 (§ f de la section III). Consulté à l’adresse
http://www.ilo.org/ilolex/french/iloconst.htm#annex le 25/08/2019.
6
Les lieux de travail, spécialement les entreprises, constituent un noyau
économique dans lequel les différents acteurs à savoir les employeurs, les chefs
d’entreprises et leurs salariés sont soumis à divers risques sociaux liés au monde du
travail. Le droit de la sécurité sociale intervient alors pour définir les mécanismes de
prise en charge des différents risques liés au travail en entreprise. L’idéal voudrait
alors en vertu du principe d’égalité de traitement, tel que hautement prôné en droit
du travail, qu’aussi en droit de la sécurité sociale les prestations soient effectuées
suivant la situation et l’exposition des risques de chaque travailleur. « L’égalité en
droit social s’apprécie tant en droit du travail qu’en droit de la protection
sociale. »34 Le Togo ayant opté le modèle d’assurance, l’égalité s’apprécie dans la
pratique par rapport au ratio de contribution sans toutefois tenir compte de la
situation réelle de travail. Ceci explique donc le fondement de la limite du principe
d’égalité de traitement en droit de la protection sociale.35 L’égalité de traitement tel
que visé dans le droit du travail, n’a pour autant la même valeur et la même teneur
en droit de la sécurité sociale. Pour une justice sociale optimale, l’égalité se
concrétise également par une solidarité socioprofessionnelle 36 dans la prise des
risques sociaux avec la « mutualisation des risques sociaux ».37
L’exposition aux risques de travail varie d’une catégorie de travailleurs à une
autre. Par exemple, les ouvriers qui disposent le plus souvent de revenus faibles,
sont beaucoup plus exposés aux accidents de travail38 du fait de leur situation de
34.
35.
36.
37.
38.
V. MORGAND, « L'égalité en droit social : où en est-on ? » Disponible en ligne sur l’adresse
https://www.village-justice.com/articles/egalite-droit-social-est,25577.html consulté le 16/09/2019.
V. ROULET, protection sociale d’entreprise, état des lieux et perspectives, Recherche effectuée dans
le cadre d’une convention conclue entre l’Institut de Recherches Économiques et Sociales (IRES) et la
CFE-CGC, septembre 2013, p. 37
La solidarité ainsi visée est de nature horizontale organisant une distribution entre usagers de situation
comparable et verticale, transférant des garanties des mieux dotés vers ceux qui le sont moins.
« Mutualiser un risque consiste à le répartir à égalité parmi les membres d'un groupe homogène (une mutualité).
Pour être assuré le risque doit revêtir quatre caractères : être futur, être incertain, ne pas dépendre totalement de la
volonté de l'assuré et qu’il ne survienne pas au même moment pour tous les assurés. L'assureur organise la
solidarité entre les assurés : les sinistres de certains sont financés par les primes ou les cotisations de tous. L'objectif
est de diminuer le coût d'indemnisation pour l'auteur du dommage et assurer une indemnisation de la victime.
L’assureur peut être une organisation publique ou privée. L'assurance publique est le fondement de la Sécurité
Sociale qui couvre les risques maladie, maternité, décès, accidents de travail… L'assurance privée est assurée par les
compagnies d’assurance et les mutuelles.», disponible en ligne sur l’adresse http://sabbar.fr/droit/identifier-lerisque-pour-proteger/ consulté le 25/08/2019.
Accident, quelle qu’en soit la cause, survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne
salariée ou travaillant à quelque titre ou à quelque lieu que ce soit pour un ou plusieurs employeurs ou
chefs d’entreprise.
7
travail. « Cette classe vit dans une insécurité économique exceptionnelle dans la
mesure ou ses membres tirent leur unique revenu de la location de travail : tous les
événements d’ordre physique ou économique (chômage) les privent de leurs moyens
d’existence.»39 La marche vers l’unité se traduit donc par des interrogations sur la
situation de travail de chaque travailleur afin d’y apporter les prestations
équivalentes40. Le système étant déclaratif41 la base de calcul des cotisations reste
assise sur les salaires des travailleurs.
Si les travailleurs du secteur public relèvent essentiellement de la CRT42, pour
ce qui concerne leur sécurité sociale, il faut néanmoins relever que tel n’est pas le
cas des agents contractuels de l’État qui se voient affiliés au régime général de droit
privé à la caisse nationale de sécurité sociale. Le législateur togolais les place dans
une situation d’égalité avec les travailleurs des entreprises privés. La nature des
relations de travail43 étant la même avec les agents permanents de l’État, la nature
juridique 44 de l’engagement de travail des agents contractuels leur confère un
régime de sécurité sociale de droit privé géré par la CNSS. Nul ne devrait alors
douter d’un régime uniforme de sécurité sociale entre les agents contractuels et les
fonctionnaires. Ce qui devrait leur justifier l’affiliation à la CRT dans les mêmes
conditions que les fonctionnaires.
Tout ce constat effectué dans le cadre de la protection sociale d’entreprise,
méritent une réflexion approfondie ; réflexion qui déterminera la place de chaque
travailleur dans le droit de la sécurité sociale. Étudier l’égalité de traitement entre
les travailleurs d’une entreprise en droit de la sécurité sociale revient alors à mettre
en confrontation cette égalité avec celle résultant dans le cadre du droit du travail et
y relever les effets tant positifs que négatifs qu’on y trouvent et essayer d’apporter
39.
40.
41.
42.
43.
44.
J.J. DUPEYROUX, M. BORGETTO et R. LAFORE, Droit de la sécurité sociale, 17ème éd., 2015,
Dalloz, p. 16.
C. LARRAZET, op.cit., p. 04.
Art. 07 à 10 de la loi 2011 - 006 portant code de sécurité sociale du Togo.
Le régime de la Caisse de Retraite du Togo a été institué par la loi n°63-18 du 21 novembre 1963 pour
s’occuper des fonctionnaires civiles, des magistrats et des militaires de l’État togolais.
La nature du Travail des agents contractuels répond aux exigences d’une mission de service public
avec des prérogatives de puissance publique à eux reconnu.
L’agent contractuel bien que exerçant une mission de service publique commandée par l’intérêt
général, n’acquiert pas pour autant la qualité de fonctionnaire, il reste lié à l’administration par un
contrat de travail de droit commun
8
les solutions en ce qui concerne les effets négatifs. La sécurité sociale n’est rien
d’autre que la mise en place d’un système de prestations sociales. Encore faut-il un
dispositif juridique qui détermine les conditions de jouissance des droits à
prestations, d’où l’effectivité du droit de la sécurité sociale. La sécurité sociale
répond donc à un impératif double à savoir celui économique et celui juridique.
Économiquement il contribue à la sécurisation de l’emploi par la mise en place de
système de sécurisation et d’indemnisation, l’angle juridique ne serait rien d’autre
que l’encadrement de la jouissance effective.
Eu égard à cette analyse, la problématique majeur est de savoir si le système de
sécurité sociale togolais mis en place favorise-t-il l’accès égal et équitable de tous
les travailleurs à l’indemnisation des risques sociaux ? Autrement dit, les différents
acteurs de l’entreprise sont-ils couverts par la sécurité sociale dans les mêmes
proportions ?
L’analyse théorique et pratique de cette situation du Togo, en matière de la
sécurité sociale révèle une inquiétude majeure. Les prestations de sécurité sociale
répondent à un standard « d’assurance » sans toutefois tenir compte de la situation
salariale ainsi que celle des conditions de travail dans lesquelles l’assuré travaille.
La logique contributive 45 de sécurité sociale, accorde moins de chance de
prestations sociales aux travailleurs de faibles revenus.
L’intérêt théorique de cette réflexion permettrait de mettre en relief les
différentes inégalités et disparités qui interviennent dans le processus46 d’affiliation
et de prestations de sécurité sociale des travailleurs togolais ; ainsi que
l’aménagement des pistes de solutions adaptées à la condition juridique et
économique de chaque travailleurs, pour faire face aux inégalités avérées dans les
prestations sociales.
45.
46.
Bismarck, chancelier allemand est à l’origine des systèmes d’assurance sociale, dont le modèle type
fut créé en 1883 dans son pays. Le principe était celui d’une assurance maladie et vieillesse
obligatoire, pour les bas revenus, sur une base professionnelle et majoritairement financée par des
cotisations sociales (pour moitié patronales pour moitié salariées). Cette formule fut reprise par
l’Autriche (1888), le Danemark (1891) et la Belgique (1894) puis par la France (1930). Après 1945, le
principe des assurances sociales obligatoires dans ces pays fut généralisé à tous les travailleurs,
salariés ou non, à revenus faibles ou élevés (sauf en Allemagne) et à leur famille proche
Le processus d’affiliation reste variable selon qu’il s’agisse des travailleurs du secteur privé et
parapublic dont le régime est assuré par la CNSS, et ceux du secteur privé qui relèvent de la CRT.
9
L’angle pratique de cette étude permet aux acteurs du monde du travail et de la
sécurité sociale togolaise, de mettre en place les dispositifs d’ordre juridique et
institutionnel, en vue de l’amélioration positive de la qualité de sécurité sociale au
Togo. L’arsenal juridique imposé servira alors au renforcement des capacités des
différentes institutions 47 en charge de la sécurité sociale au Togo, et bien
évidemment d’en créer d’autres aux besoins nécessaires pour une meilleure gestion.
La réalisation de ce travail ne sera effectuée que par l’exploitation des
documents juridiques ainsi que les points de vue doctrinaires ayant contribué à la
résolution de la question juridique de cette réflexion. Les apports par l’expertises de
certaines personnes ressources du monde professionnel telle que le personnel de la
caisse nationale de sécurité sociale, celui de la division du travail et des lois sociales
sera également d’une grande utilité.
Cependant, malgré le rétrécissement du champ de cette réflexion qui se limite
au cadre législatif du Togo, les enquêtes menées dans le champ juridique des pays
voisins, enseignent que le système de sécurité sociale est relativement parfait et
reste adapté à la réalité économique et sociale de chaque État. Cependant, l’analyse
générale du cadre juridique et économique de la sécurité sociale togolaise présente
un aspect déséquilibré 48 qui crée une inégalité entre les travailleurs (Partie I).
Toutefois, plusieurs mesures de tous ordres restent encore possibles en vue du
rétablissement de l’équilibre49 de sécurité sociale (Partie II).
47.
48.
49.
Essentiellement la CNSS, l’INAM et la CRT.
Ce déséquilibre est constaté doublement, d’un côté par la différence de la situation juridique des
travailleurs, notamment leurs régime juridique de travail et de l’autre côté par la différence de la
situation économique notamment la différence de salaire.
Le rétablissement de l’équilibre se fera par la mise en œuvre accentuée des reformes générales ou
partielles du régime actuelle de sécurités sociale afin de lutter contre les différentes disparités sociales.
D’ailleurs, l’exemple le plus usuel est celui des réformes des retraites initiées par le gouvernement
français et qui visent l’uniformisation des régimes de retraites pour une meilleure prestation des
retraités français.
10
PARTIE I.
UNE SÉCURITÉ SOCIALE INÉGALE :
SOURCE D’UN DÉSÉQUILIBRE
11
Le droit de la protection sociale togolaise évolue depuis sa création en 1956 par
le décret N° 242/56/ITLS du 15 mars 1956 en fonction de la réalité
socioéconomique et professionnelle de la population active. C’est ainsi que
l’activité salariale analysée en son sens juridique 50 apparaît comme l’élément
essentiel et primordial d’affiliation et d’assujettissement au régime général 51 et
obligatoire de la sécurité sociale. Le salarié remplissant toutes les conditions52 de
son affiliation est donc appelé à verser des cotisations53 périodiques aux organismes
de protection sociales 54 que sont la CNSS et la CRT, en contrepartie d’une
prestation en cas de survenance d’un risque. Cette condition salariale crée l’aspect
d’une inégalité de prestation de sécurité sociale par le caractère sélectif en raison du
manque d’un revenu professionnel d’une part importante de la population qui ne
peut faire face aux cotisations sociales. L’aspect inégal de la sécurité sociale sera
abordé du point de vue de son caractère sélectif (chapitre I) ainsi que du point de
vue juridique et économique des travailleurs (chapitre II).
50.
51.
52.
53.
54.
Art. 2 al 1er de la loi N°2006-010 portant code du travail du Togo «est considérée comme travailleur
au sens du présent code, quels que soient son sexe et sa nationalité, toute personne qui s’est engagée à
mettre son activité professionnelle, moyennant rémunération, sous la direction et l’autorité d’une autre
personne, physique ou morale, publique ou privée, appelée employeur. Pour la détermination de la
qualité de travailleur, il ne sera tenu compte ni du statut juridique de l’employeur, ni de celui de
l’employé. »
J.-P. LABORE « L’affiliation comme figure de l’appartenance au droit de la sécurité sociale » in
champ libre 5, Droit, Justice, Politique, juin 2006, L’Harmattan, p. 08.
Les conditions d’affiliation revêtent un caractère double qui est juridique par un emploi salarié et
économique par l’existence d’un salaire minimum.
J.-P. LABORE, op. cit, p. 09.
Au Togo, l’institution du régime général de sécurité sociale des salariés est la CNSS. La CRT reste
spécifique aux agents publics permanents de l’État ainsi que l’INAM qui intervient dans le cadre de
leur assurance maladie obligatoire.
12
CHAPITRE I. Un déséquilibre lié à un système de sécurité sociale sélectif
L’obligation donnée aux personnes (physiques ou morales) assujetties de verser
des cotisations périodiquement55 afin de prétendre à une prestation au terme de la
sécurité sociale confère à cette dernière son caractère de contrat d’assurance qui
nécessite la réunion d’un certain nombre d’éléments56 (Section I). À cette situation
s’ajoute l’aspect inefficace du système de sécurité sociale mis en place, laissant
ainsi d’autres secteurs en marge de la sécurité sociale (Section II).
Section I. Une sécurité sociale basée sur un modèle d’assurance
Au Togo, le système de sécurité sociale répond dans sa plus grande partie au
mécanisme « d’assurance sociale »57 qui est le régime général obligatoire, imposé
par l’État afin de protéger les travailleurs salariés des risques sociaux. Le modèle
d’assurance vient de l’inspiration de l’Allemand Otto Von Bismarck. La sécurité
sociale est donc conditionnée à l’exigence d’un revenu professionnel 58 (§ 1) qui
constitue l’assiette des cotisations, limitant ainsi la protection sociale à cette
minorité salariale (§ 2).
55.
56.
57.
58.
Au Togo, les périodes ainsi que les modalités de recouvrement des cotisations sociales sont
déterminés selon les dispositions de l’art. 74 du code de la sécurité sociale par arrêté du ministre de
tutelle.
« Le contrat d’assurance est la convention par laquelle un souscripteur se fait promettre une
prestation, pour lui ou pour un tiers, en cas de sinistre, moyennant le payement d’une prime ; cette
prestation est payée par une entreprise d’assurance qui effectue la compensation de risques
analogues en utilisant des méthodes statistiques. Cette définition permet de dégager les trois éléments
que l’on retrouve dans un contrat d’assurances : le risque à garantir, une prime qui est le prix de la
sécurité, une prestation de l’assureur en cas de sinistre. » Y. LAMBERT-FAIVRE et L.
LEVENEUR, Droit des assurances, 13ème édition, Dalloz, 2011, p. 263.
Bismarck, chancelier allemand est à l’origine des systèmes d’assurance sociale, dont le modèle type
fut créé en 1883 dans son pays. Le principe était celui d’une assurance maladie et vieillesse
obligatoire, pour les bas revenus, sur une base professionnelle et majoritairement financée par des
cotisations sociales (pour moitié patronales pour moitié salariées).Cette formule fut reprise par
l’Autriche (1888), le Danemark (1891) et la Belgique (1894) puis par la France (1930). Après 1945, le
principe des assurances sociales obligatoires dans ces pays fut généralisé à tous les travailleurs,
salariés ou non, à revenus faibles ou élevés (sauf en Allemagne) et à leur famille proche.
Le revenu professionnel implique toute ressource financière devant faire face aux cotisations sociales.
On a donc le salaire chez les travailleurs salariés avec tous les accessoires nécessaires et tout le revenu
résultant de l’activité professionnel, chez les travailleurs indépendants.
13
§ 1. La prévalence d’une activité salariale
L’affiliation obligatoire de tous les travailleurs59 soumis aux dispositions de la
loi portant code du travail au régime général de sécurité sociale (A), ainsi que le
versement préalable de cotisations (B) aux organismes de protections sociales font
de l’activité professionnelle salariale une condition60 de base d’accès à la sécurité
sociale.
A. L’affiliation et l’immatriculation obligatoire, conséquence d’une activité
professionnelle salariée
Il faut noter qu’il existe une distinction technique de l’affiliation par rapport à
d’autres termes voisins avec une certaine liaison dans le domaine de la protection
sociale tels que l’assujettissement61 et l’immatriculation62.
L’assujettissement n’est rien d’autre que le rattachement obligatoire d’une personne
à un régime sous l’effet obligatoire de la loi voire volontaire dans certaines
situations
telles
que
l’assurance
volontaire.
Une
fois
les
conditions
d’assujettissement établies, l’assuré devrait alors être affilié, donc rattaché à un
régime de sécurité sociale. L’immatriculation vient dont matérialiser l’affiliation et
l’assujettissement par une procédure administrative d’enregistrement. Il faut noter
que l’affiliation est acquise de plein droit par le simple fait d’être salarié selon les
exigences du code du travail63. Le statut de salarié tel que défini par la loi portant
code du travail confère de droit à l’assuré son affiliation au régime générale de la
sécurité sociale. Ceci lui revient alors de passer par la procédure administrative
59.
60.
61.
62.
63.
Le terme travailleur met en exergue ici le lien de subordination qui doit exister entre la personne du
travailleur ainsi que celle de son employeur. Toutefois, cette subordination vise beaucoup plus
l’aspect économique que juridique afin de s’assurer du versement des cotisations sociales par
l’employeur.
M. BORGETTO, « la protection sociale fondée sur l'emploi : un modèle inadapté ? entre cotisations
sociales et fiscalité, in « Informations sociales », 2007/6 n° 142 | p. 08.
« Obligation d’affilier aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si
elles sont titulaires d’une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, salariées ou
travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels
que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur
contrat », S. GUINCHARD et T. DEBARD, lexique des termes juridiques, 25ème éd., 2017, Dalloz,
p. 209.
« Opération administrative qui consiste à inscrire officiellement un travailleur sur la liste des assurés
sociaux d’une caisse. Cette immatriculation, qui se traduit par l’attribution d’un numéro, est
définitive » S. GUINCHARD et T. DEBARD, lexique des termes juridiques, 25ème éd., 2017, Dalloz,
P 1085.
Art. 02 de la loi n° 2006-010 du 13 décembre 2006 portant code du travail du Togo.
14
d’immatriculation64 au sein de la CNSS pour se voir inscrit sur la liste des assurés
sociaux. Pour ce faire, en raison de son statut de premier responsable de son salarié
les textes juridiques togolais du droit social 65tout comme ceux de la plupart des
autres pays laissent cette charge d’immatriculation à l’employeur à titre principal
tout en admettant l’exception au salarié lui-même de le faire à titre secondaire après
l’écoulement d’un certains délais sans que l’employeur le fasse.
Au Togo tout comme dans la plupart des autres pays, les législations relatives au
droit du travail et au droit de la sécurité sociale laisse peser cette charge
d’immatriculation et d’assujettissement, à l’employeur. Cette procédure tient son
caractère obligatoire de la loi qui prévoit des sanctions pénales 66 à tout employeur
qui y manquera. Au regard du droit du travail, l’entreprise est considérée d’abord
comme un ensemble de personnes rémunérées exerçant une activité et ensuite
placée sous la subordination67 d’une autre personne appelée employeur. Ce dernier
reste le responsable principal de l’entreprise qui se trouve dans l’obligation
d’assurer la sécurité de ses salariés au regard de l’hygiène, de la santé ainsi que
différents risques sociaux. Pour ce faire la loi lui fait obligation de procéder à son
immatriculation dans un délai de huit (8) jours à compter soit de l’ouverture ou de
l’acquisition de l’entreprise si celle-ci comporte l’emploi des salariés , soit du
premier embauchage d’un salarié suivant la création de son entreprise à son
immatriculation d’abord en tant qu’employeur ensuite dans l’actif des salariés qu’il
embauche.68Il doit ensuite procéder à sa diligence à l’immatriculation de ses salariés
dans un délai de huit(8) jours à compter de la date de l’embauche du salarié. Dans le
cas où le travailleur aurait été déjà immatriculé par un employeur précédant, le
nouvel employeur est donc tenu d’en informer à la caisse pour la mise à jour de la
carrière du travailleur et ce dans le même délai de huit (8) jours.
64.
65.
66.
67.
68.
Possibilité laissée au salarié lui-même de le faire au cas où son employeur ne respecte pas cette
obligation à lui légale.
Loi n°2006-010 du 13 décembre 2006 portant code du travail du Togo et la loi n°2011-006 portant
code de sécurité sociale.
Art.95 de la loi n°2011-006 portant code de sécurité sociale
La subordination du salarié par rapport à son employeur s’apprécie au point de vue juridique et
économique.
Voir l’art. 07 la loi n°2011-006 portant code de sécurité sociale au Togo.
15
Dans le but de trouver une solution à un éventuel manquement de l’employeur à
son devoir d’immatriculation de ses employés, le législateur togolais autorise le
salarié lui-même de procéder à sa propre immatriculation dans un délai d’un mois à
compter de sa date d’embauche. À cet effet, il bénéficie de l’obligation
d’information auprès de son employeur ainsi que des organismes en charges de la
sécurité sociale sur l’état de sa sécurité sociale et cette procédure d’immatriculation
personnelle, ne peut constituer un motif de son licenciement.
Toutefois, en ce qui concerne les travailleurs indépendants tout comme ceux de
l’économie informelle, leur immatriculation devrait intervenir dans un délai de
trente (30) jours suivant le démarrage de l’activité69.
Une fois l’immatriculation tant de l’employeur que du salarié effectuée, la charge de
l’obligation de payement des cotisations sociales reste ouverte à la responsabilité de
l’employeur.
B. Le versement préalable de cotisations sociales, conséquence de
l’affiliation obligatoire
La question de versement des cotisations sociale en droit de la sécurité sociale
est une question étendue qui pose à la fois le problème de l’assiette, de la charge et
du taux de la cotisation.
Par assiette des cotisations, il faut entendre tout ce qui, dans le patrimoine de
l’assujetti, est effectivement soumis à cotisations de sécurité sociale. 70 C’est la
« base de calcul des cotisations. Elle comprend toutes les sommes versées aux
travailleurs en contrepartie ou à l’occasion du travail » 71 . Au Togo, « les
cotisations dues au titre du régime général de sécurité sociale sont assises sur
l’ensemble des rémunérations perçues par les personnes assujetties, y compris les
indemnités, primes, gratifications, commissions et tous autres avantages en espèces,
ainsi que la contre-valeur des avantages en nature, mais à l’exclusion des
remboursements de frais et des prestations familiales versées »72 . L'évaluation des
69.
70.
71.
72.
Art. 28 de l’arrêté n°002/2012 /MTESS/CAB/DGTLS fixant les modalités d’application du code de
sécurité sociale.
J.-P. LABORDE, op. cit., p. 446.
S. GUINCHARD et T. DEBARD, lexique des termes juridiques, 25ème éd., 2017, Dalloz, p. 197.
Art 12 de la loi n°2011-006 portant code de sécurité sociale au Togo.
16
avantages en nature est faite conformément aux textes en vigueur en la matière. On
conclut alors au regard de ce texte que le salaire73 est l’élément de base essentielle
sur lequel sont assis les cotisations sociales à l’exclusion de certains éléments tels
que les remboursements de frais des prestations familiales versées au titre de la
sécurité sociale.
La charge de la cotisation sociale au Togo reste partagée entre l’employeur et le
salarié74dont la plupart reviennent exclusivement à l’employeur75.
La détermination du taux des cotisations comme du montant des prestations
relèvent du pouvoir réglementaire. La législation togolaise l’a évalué à un taux
global de 21,5 %76 dont 17% de la part de l’employeur et 4% de la part du salarié
assise uniquement sur la branche des pensions.
C’est ainsi que le versement des cotisations sociales est depuis longtemps resté
l’une des premières conditions donnant droit aux prestations sociales. Cette
situation marque alors une limite essentielle du système de sécurité sociale basé sur
le salariat.
La prévalence de l’activité salariale par l’affiliation et l’immatriculation
obligatoire ainsi que le versement préalable des cotisations sociales constituent la
conséquence d’une protection sociale limitée.
§ 2. La conséquence d’une protection limitée
L’influence démographique et la situation économique moins favorable de
certains travailleurs de l’entreprise, ne favorisent pas une sécurité sociale de
l’entreprise répondant aux normes de traitement paritaire entre les salariés. Ceci
entraine donc une sécurité sociale limitée d’abord quant à l’assujettissement (A),
ensuite limitée aux prestations (B).
73.
74.
75.
76.
Le salaire ici implique toute forme de revenu rentrant dans le champ d’application des taux de
cotisations sociales, ce qui inclut les revenus professionnels des travailleurs indépendants.
Il faut tout de même rappeler que les travailleurs déclarés au titre des indépendants sont seuls
responsables de toutes les charges sociales sans aucunes exonération.
Toutefois, malgré le partage des dettes sociales entre le salarié et son employeur, ce dernier reste
légalement le débiteur principal sur qui repose la charge de versement des cotisations sociales.
Art. 2 du décret n° 2012-038/PR du 27 juin 2012 portant révision des taux de cotisations à la caisse
nationale de sécurité sociale (CNSS).
17
A. La protection limitée quant à l’assujettissement
Après quelques analyses sur l’état du système de fonctionnement de la sécurité
sociale togolaise, on peut sans doute relever son caractère défaillant et limité dans la
mesure où il est essentiellement basé sur une activité salariale ou du moins un
revenu professionnel. Il faut aussi relever que les différents acteurs de l’entreprise
quand bien même, possèdent un revenu du fait de leur travail bien sûr, n’ont pas
tous accès dans les mêmes conditions à la sécurité sociale. Dans la théorie, toute
personne créant une entreprise et, employant en son sein des travailleurs est tenue
par les textes à sa déclaration ainsi qu’à celle des travailleurs77. Les textes prennent
également soin d’exclure toute forme de discrimination naissant dans le processus
d’affiliation78.
Cependant, de nouveaux rapports et constats révèlent une autre réalité dans la
pratique79. Ceci reste expliqué par diverses raisons tenant à la condition juridique et
économique des salariés. Les mécanismes actuels de protection sociale ne
bénéficient qu’à une faible partie de la population80, essentiellement celle relevant
du salariat dans les secteurs publics et privés, c’est à dire celle disposant déjà des
revenus les plus élevés au sein de la population active. Les assurances sociales qui
constituent le modèle de la sécurité sociale togolaise se trouvent limitées à un cercle
restreint de la population qui dispose au moins d’un revenu professionnel. Les
entreprises n’évoluant pas toutes dans les mêmes conditions, certaines choisissent
de déclarer certains salariés en tenant compte de leurs forces économiques pour
faire face aux cotisations sociales. Cette sélection vise alors les salariés qui
bénéficient d’une grand stabilité dans l’entreprise notamment ceux reliés par des
CDI. Les salariés recrutés sous des CDD, en considération de leur caractère
temporaire dans l’entreprise restent le plus souvent victimes du défaut de
déclaration par leurs employeurs à la sécurité sociale. « Les informations collectées
durant la mission d’expertise permettent de se faire une idée du nombre de
77.
78.
79.
80.
Art 07, 08 et 09 de la loi n°2011-006 portant code de sécurité sociale au Togo et l’art. 27 de la C.C. de
2011.
Art. 03 de la loi n°2011-006 portant code de sécurité sociale au Togo
Tous les acteurs du monde de l’entreprise, notamment du dirigeant au salarié, ont accès aux services
de sécurité sociale selon les niveaux et régimes différents.
5% estimé selon le rapport de l’OIT.
18
personnes effectivement prises en charge par type de prestation sociale. Rapportée
au nombre de personnes relevant de la catégorie concernée par chacune de ces
prestations, ces chiffres permettent de déterminer les besoins encore à couvrir.»81
L’analyse du rapport de cette mission d’expertise révèle donc que tous les
travailleurs relevant du régime général de sécurité social ne sont effectivement pas
pris en charge 82 . Certains travailleurs le seraient sans que d’autres le soient. Le
constat aurait également édifié que la taille de l’entreprise reste un facteur
déterminant en ce sens que, les PME et les micros entreprises connaissent un faible
taux d’affiliation tandis que les entreprise de tailles connaissent un taux élevé. La
grande responsabilité de cette situation pour la plupart revient aux employeurs et
chefs d’entreprise car, ces travailleurs sont au nom de la loi assujettis mais non
encore affiliés.
Outre les inégalités relevées dans le cadre de l’affiliation, le régime des
prestations reste sans difficultés et exclusions. Qu’en est-il alors ?
B. La protection limitée quant aux prestations
Le droit de la protection sociale togolaise a été le fruit d’une longue évolution
réglementaire et législative dont le point de départ est l’arrêté N° 242/56/FTLS du
15 mars 1956 instituant uniquement la branche des prestations familiales. Jusqu’à la
loi N° 2011 - 006 portant code de sécurité sociale, le champ d’application de la
sécurité sociale au Togo concernait uniquement les travailleurs salariés au sens de la
loi portant code du travail de 2006. C’est ainsi que la dernière modification de 2011
est venu donner un coup de pouce dans le domaine en y intégrant certaines
catégories de régimes des travailleurs non-salarié tel que les indépendants et les
travailleurs de secteur de l’économie informelle, les élèves des écoles de formation
professionnelle ainsi que les ministres des cultes83. Toutefois, cette extension reste
81.
82.
83.
P. AUFFRET, la protection sociale au Togo : Situation présente, besoins des populations et propositions pour
l’avenir, rapport du PNUD en septembre 20011, p. 57. , rapport disponible à l’adresse suivante :
http://www.socialprotection.org/gimi/gess/RessourcePDF.action%3Bjsessionid%3DsnvrZ8xT8LzYJnQLl4qCnJ40
s2hG2c0TM1cczWYJZXSfQjhy39Cr!726592978%3Fressource.ressourceId%3D30412 consulté le 28/08 / 2019.
Les PME, les micros entrepris ainsi que celles œuvrant dans le secteur informel sans oublier certains
travailleurs le plus souvent recruté sous le régime de CDD, connaissent un faibles taux d’affiliations
dans les organismes de sécurité sociale.
Voir l’art. 03 de la loi n°2011-006 portant code de sécurité sociale au Togo.
19
encore à parfaire dans le cadre des prestations où certaines n’ont pas encore vu le
jour pour certaines catégories de travailleurs. Lorsqu’on analyse le régime
d’affiliation des travailleurs en droit togolais, spécialement dans le C.S.S on se rend
compte que parmi tous les travailleurs assujettis, tous n’ont pas droit à toutes les
prestations disponibles par le régime général84. C’est ainsi que les travailleurs de
l’économie informelle se voient privés des prestations des risques professionnelles,
tandis que les élèves des écoles de formation professionnelles ainsi que les
stagiaires et apprentis sont couverts uniquement pour les risques professionnels
« survenus par le fait ou à l‘occasion de leur formation, apprentissage ou stage.» 85
Cependant le droit aux prestations légales des travailleurs sous régimes de
contrats à durée déterminée se voit dans certaines circonstances fragilisés en raison
évidemment de leurs situations instables et temporaires dans l’entreprise. La prise
en charge des risques sociaux liés au travail fait, le plus souvent objet d’une simple
convention entre le travailleur en CDD et son employeur. Toutefois, le régime de la
couverture obligatoire maladie, de l’INAM86 a été mis en place, pour la couverture
des agents publics et assimilés de l’État. En conséquence, les travailleurs du secteur
privé ne bénéficient pas encore d’une assurance maladie87 en dehors de quelques
soins liés aux accidents de travail et maladies professionnelles. Dans les régimes de
retraite, l’on note une différence de traitement entre les différents travailleurs en
considération de plusieurs facteurs dont les principaux sont liés à la situation
économique ou encore juridique avec les différents travailleurs.88
En sommes, l’on pourra retenir que le régime de sécurité sociale du Togo,
principalement basé sur le salariat, rencontre de ce fait des limites qui s’observent
tant au niveau de l’assujettissement qu’au niveau des prestations.
84.
85.
86.
87.
88.
Idem.
Idem.
L’INAM a été mise en place par la loi n° 2011-003 du 18 février 2011 pour l’assurance obligatoire
des agents publics et assimilés en maladie.
L’assurance maladie dans le secteur privé se limite dans le cadre professionnel notamment en cas
d’accident de travail.
En ce qui concerne le régime des retraites, les travailleurs ayant des salaires élevés voient leur pension
vieillesse élevés par rapport à ceux des salaires faibles. Ceux du secteur public ont un taux de
remplacement plus élevé que ceux du secteur privé dont le taux est faible avec comme base de calcul
la moyennes du salaire des cinq (05) dernières années.
20
Que déduire de tout cela du système et du dispositif en soit de la sécurité sociale du
Togo.
Section II. Un système de protection sociale moins efficace
Au regard de l’organisation et du fonctionnement du système de sécurité sociale
du Togo, l’on peut admettre que ce système fait face à de nombreux défis89 qui ne
sont pas encore relevés tant par le législateur, que par tout autre acteur du monde de
la sécurité sociale. Il est encore plus difficile, de parvenir à un système fiable
d’extension au bénéfice de l’ensemble de tous les acteurs du monde de l’entreprise
dans les meilleures proportions. En effet, malgré la volonté d’étendre la sécurité
sociale au bénéfice de l’ensemble des couches socioprofessionnelles par la loi
portant code de sécurité sociale de 2011, il faut noter que cette extension éprouve
encore des difficultés de tous ordres sur le terrain en raison de l’influence de la
croissance démographique et de la croissance économique moins favorable à l’essor
de la sécurité sociale pour tous. L’objet de cette section est donc de relever les
aspects d’une inefficacité fonctionnelle (§ 1) et ceux relevant de l’inefficacité
législative (§ 2).
§ 1. Une inefficacité fonctionnelle
L’inefficacité fonctionnelle du système de sécurité sociale du Togo est marquée
par d’abord la faiblesse de son organisation moins adaptée à la réalité sociale(A),
puis suivra la fragilité des institutions en charge de la sécurité sociale (B).
A. L’organisation moins adaptée par un régime unique
La sécurité sociale togolaise a été depuis la loi de 2011 le fruit d’une longue
évolution de textes qui sont parvenus à l’étendre à d’autres catégories
socioprofessionnelles notamment90. Cette extension devrait donc couvrir les autres
catégories de travailleurs qui bien que ne l’étant pas convenablement au sens de la
loi portant code du travail, donc indépendamment de tout employeur, disposaient
89.
90.
Les défis majeurs auxquels est confrontée la sécurité sociale togolaise, sont l’amélioration de la
qualité de
prestation sociale ainsi que l’extension de l’affiliation à toutes les couches
socioprofessionnelles.
La loi de 2011 est venue répondre au souci d’extension des assurances sociales à d’autres catégories
socioprofessionnelles telles que annoncées par l’art. 03 du CSS.
21
des revenus nécessaires pour faire face aux cotisations sociales. Cette catégorie des
travailleurs indépendants doit donc relever d’un régime exceptionnel au régime
général des travailleurs salariés dépendants, et par conséquent d’un régime
spécialisé. Le droit Togolais a choisi plutôt de les intégrer au régime général sans
aucune distinction en les assimilant aux salariés. À l’image de certaines
législations91, les travailleurs indépendants bénéficient d’un régime spécialisé en
raison de la particularité de leur procédure d’immatriculation ainsi que du
financement des charges sociales
92
dont ils sont les seules responsables
contrairement aux salariés dépendants dont les charges sont partagés en grandes
parties à l’employeur. L’employeur est donc un élément important contribuant à la
garantie d’une meilleure protection du salarié. Cependant il en est autrement des
travailleurs indépendants qui sont les seules responsables en ce qui concerne le
financement de leur sécurité sociale notamment avec des cotisations qu’ils assurent
seuls en qualité d’employeurs et de salariés. Toutefois, aucune mesure
d’exonération, ni d’accompagnement efficace n’est encore mis à leur disposition.
C’est ainsi que dans le souci de préserver les intérêts des assurés, les travailleurs
indépendants dépourvus d’employeurs, qui naturellement assurent la protection
sociale des salariés, doivent bénéficier de façon particulière à un régime spécial93
distinct de celui général, voire géré par des institutions appropriées à ce régime.
« Dès lors, disposer d’un régime de protection sociale spécifique permettait à ces
catégories d’affirmer leur distinction, et ainsi garantir leur existence en tant que
groupe social.»
94
« D’autres activités ont bien donné lieu à des activités
spécifiques : mines, marine marchande, fonction publique. Mais les agriculteurs
(salariés et exploitants) se présentent autant comme profession que comme
91.
92.
93.
94.
Le droit français de la sécurité social prévoit un régime spécial des indépendants à savoir le régime
social des indépendants (RSI) qui est devenu depuis la réforme de 2018 Sécurité sociale pour les
indépendants (SSI).
Les travailleurs assurés sous le régime des indépendants sont les seuls responsables de toutes les
charges sociales à savoir celles des salariés et celles des employeurs dans les mêmes taux et conditions
prévues par la loi.
L’exemple illustratif est le régime social des indépendant en France créé en 2006.
Voir la découverte des institutions de la protection sociale, disponible en ligne à l’adresse
http://www.viepublique.fr/decouverteinstitutions/financespubliques/protectionsociale/definition/pourq
uoi-securitesociale-est-elle-divisee-differents-regimes.html consulté le 1er /09/ 2019.
22
catégorie sociale aux caractères marqués … » 95 Au Togo, malgré les différentes
modifications intervenues dans le domaine de la sécurité sociales, on n’est toujours
pas parvenu à mettre en place des régimes spécialisés au bénéfice de certains
assujettis en raison de la particularité de leurs activités et sources de revenus. En
dehors du régime général obligatoire, la sécurité sociale doit être repartie en régimes
spéciaux afin de contribuer à un traitement efficace correspondant à la situation de
l’assuré.
L’organisation de la sécurité sociale étant moins adaptée aux réalités, qu’en serat-il alors de la qualité des institutions en charges de la sécurité sociale.
B. La fragilité des institutions de sécurité sociale
Au Togo il existe au total deux organismes légalement institués afin de régir le
mécanisme de fonctionnement de la protection sociale des travailleurs. C’est le cas
d’abord de la Caisse de Retraite du Togo (CRT) institué par la loi N° 91-11 du 23
mai 1991, fixant le régime des pensions civiles et militaires et qui couvre les agents
publics de l’État et tous les autres fonctionnaires soumis au statut général de la
fonction publique 96 ; enfin on a la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS)
issue de l’époque colonial97, et régie actuellement, après quelques modifications par
la loi n° 2011-006 portant code de la sécurité sociale au Togo, qui couvre tous les
travailleurs soumis au code du travail ainsi que les travailleurs indépendants et ceux
95.
96.
97.
J.P. CHAUCHARD, J.Y. KERBOURC’H et C. WILLMANN, Droit de la sécurité sociale, LGDJ,
8ème éd., 2018, p. 183.
Voir l’art. 1er du décret n° 91 / 208 pris pour l’application de la loi n° 91-11 du 23 mai 1991 fixant le
régime des pensions civiles et militaire de la CRT.
L’histoire de la sécurité sociale togolaise trouve son origine à l’époque coloniale avec la succession de
plusieurs textes coloniaux qui sont respectivement la loi du 15 décembre 1952 portant création du
code du travail commun aux territoires d’Outre-mer. Cette loi avait institué la médecine du travail
sans toutefois y impliquer l’assurance maladie. Quelques années plus tard, un arrêté du 15 mars 1956
instituait un régime de prestations familiales géré par la caisse de compensation des prestations
familiales, suivi de celui du 30 avril 1956 fixant ses règles d’organisation et de fonctionnement. C’est
ainsi que celui du 28 juillet 1956 fixait le règlement intérieur de la caisse de compensation et
prévoyait la liste des travailleurs salariés soumis au code du travail de 1952. Le droit de la sécurité
sociale des anciennes colonies françaises d’Afrique s’émerge alors âpres l’indépendance avec la
création par la loi du 17 janvier 1964 de la branche des accidents de travail et maladies
professionnelles. Quelques années plus tard, l’ordonnance du 05 juin 1968 vient renforcer le système
avec la création du régime de pension vieillesse, invalidité et décès. Les régimes une fois consolidés,
l’ordonnance N° 39/73 du 12 novembre 1973 crée la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS)
avec plusieurs modifications intervenues plus tard dont la dernière en date est celle de la loi N° 2011006 du 21 février 2011 visant quelques mesures d’extension pour satisfaire d’une part à l’égalité de
tous citoyens à la protection sociale.
23
du ministère des cultes disposant d’un revenu nécessaire pour faire face aux
cotisations sociales.
Cependant, si le fonctionnement de la CRT se présente simple 98 en raison de
l’existence d’un employeur unique qui est l’État, tel n’est vraiment pas le cas de la
CNSS où il existe une multitude d’employeurs qui ont l’obligation d’assurer
l’immatriculation de leurs employés ainsi que la déclaration des salaires.
Néanmoins, quelques difficultés majeures restent à relever notamment la
concentration de ces deux systèmes à des régimes uniques de la protection sociale.
Basées essentiellement sur le système de répartition, les deux caisses publiques
rencontrent souvent des difficultés essentiellement financières à savoir un
déséquilibre financier liée au nombre plus important des actifs cotisant que les
inactifs comme par exemple les retraités. Le caractère fragile de la CNSS relève de
la difficulté d’affiliation de certaines catégories assujetties à savoir les travailleurs
indépendants et surtout ceux de l’économie informelle. En effet, bien qu’assujetties
au régime général de la CNSS, cette dernière devrait se doter d’une institution
spécialisée en vue de l’accompagnement de cette catégorie aux organismes de
sécurité sociale pour leur meilleur prise en charge. Il leur est encore plus difficile en
raison de l’inexistence d’un employeur à leur solde à pouvoir prétendre à une
sécurité sociale plus aisée au même titre que les autres travailleurs dépendant de
leurs employeurs. L’on note ainsi un très grand déficit tant au plan financier que
structurel de la CNSS qui ne permet vraiment pas à une meilleure prise en charge
des différents travailleurs assujettis au régime général notamment en ce qui
concerne les soins de santé réglementés dans le secteur public par une institution
spécialisée qu’est l’Institut National d’Assurance Maladie. 99 Le système reste
98.
99.
La simplicité se mesure en raison de l’affiliation automatique de tous les fonctionnaires sans passer
par le système déclaratif comme c’est le cas dans le secteur privé.
Selon le rapport de Pierre AUFRETT de septembre 2011 sur la situation présente, les besoins des
populations et propositions pour l’avenir sur l’avenir de la protection sociale du Togo, Une étude
actuarielle conduite en 2009/2010 à la demande des Autorités togolaises donne des indications
concernant le nombre de salariés inscrits à la CNSS et le nombre d’allocataires de pensions. Dans les
deux cas, des écarts importants ont été constatés. Concernant les cotisants, les fichiers de la CNSS
enregistrent 126.574 salariés pour 2008. Toutefois pour 60 % d’entre eux, le fichier n’enregistre
aucune information concernant les salaires. Dès lors seules les informations concernant 50.480
salariés seraient exploitables. À noter que le rapport d’activité concernant l’année 2008 retient le
chiffre de 69.483 salariés.
24
encore inefficace en ce sens que l’INAM 100 a un champ d’application réduit
seulement aux travailleurs du secteur public et parapublic. Ceux du secteur privé
restent encore de nos jours sans couverture en matière de maladie.
En dehors de l’inefficacité fonctionnelle, l’inefficacité législative constitue un
handicap au développement du système de sécurité social mis en place.
§ 2. Une inefficacité législative
L’inefficacité législative du système de sécurité sociale aurait été marqué par
d’abord par la carence de la réglementation des mutuelles (A) qui constituent l’une
des pistes les plus importantes de la sécurité sociales, ensuite par les lacunes des
textes actuels en vigueur en matière de la sécurité sociale(B).
A. L’absence de réglementation spéciale des mutuelles
« Bien que jouant un rôle non négligeable dans la prise en charge des dépenses
de santé, les mutuelles togolaises ne sont pas régies par un Code de la mutualité.
Certes les dispositions de divers textes nationaux 101 ou internationaux 102 font
référence à des mutuelles sous forme des assurances de groupe.
Ainsi la loi n°95-014 du 14 juillet 1995 porte réglementation des institutions
mutualistes ou coopératives, mais il s’agit ici d’institutions en charge de l’épargne
et du crédit. Le code du travail103 évoque les mutuelles mais sous la forme ancienne
de caisses de secours mutuels » 104 . « Le Togo continue donc d’utiliser les
dispositions contenues dans le Code de la mutualité française d’avant
l’Indépendance. Une réflexion est actuellement en cours afin d’intégrer dans la
législation togolaise le Code de la mutualité proposé par l’UEMOA » 105 . Les
100.
101.
102.
103.
104.
105.
L’INAM est une institution d’assurance maladie des travailleurs mise en place par la loi du 18 février
2011.
Loi portant code du travail du Togo.
Voir l’art. 95 Code des assurances CIMA 2012, Annexe au traité CIMA du 10 juillet 1992 « Est un
contrat d’assurance de groupe le contrat souscrit par une personne morale ou un chef d’entreprise en
vue de l’adhésion d’un ensemble de personnes répondant à des conditions définies au contrat, pour la
couverture des risques dépendant de la durée de la vie humaine, des risques portant atteinte à
l’intégrité physique de la personne ou liés à la maternité, des risques d’incapacité de travail ou
d’invalidité ou du risque de chômage. »
Art. 27 de loi portant code du travail du Togo « Les statuts des caisses spéciales de secours mutuels sont
soumis à l’approbation du ministre chargé du travail, après avis du directeur général du travail »
P. AUFFRET, op.cit., p. 29.
Idem.
25
mutuelles constituent une forme de sécurité sociale complémentaire qui vient
améliorer la qualité de vie des individus par le principe de l’autogestion. C’est donc
un moyen de prévoyance sociale libre, individuel ou collectif, dont une des missions
est d’assurer la prévention et l’indemnisation des risques sociaux susceptible
d’atteindre tout individu seul ou en groupe, dans sa personne physique.106 Selon la
définition qui en est donnée par le Code de la Mutualité française107, la mutuelle est
un groupement ayant la capacité civile, dont la création est soumise à déclaration.
Le statut de la mutuelle relève du principe de l'autogestion. Elle poursuit un but non
lucratif menant dans l'intérêt de ses membres, moyennant le versement d'une
cotisation, à des actions de prévoyance, de solidarité et d'entraide. Il faut donc
relever de cette définition que les mutuelles sont des organismes à statut juridique
très important qui mérite une meilleur réglementation. Elles peuvent parfois être
considérer comme organisme social et être en tant que tels intégrées à un régime
obligatoire de la sécurité sociale.
Au Togo, il faut relever l’existence dans les faits, de plusieurs sociétés de
mutuelles telles que les groupements de mutuelles de santés qui ne sont pas régies et
règlementés par un texte de loi spécial. « Les mutuelles créées ces dernières années
ont pour objectif la prise en charge des dépenses de santé, confirmant ainsi la
préoccupation des ménages concernant cette catégorie de dépenses » 108 . Chaque
mutuelle fixe sa propre stratégie en matière de montant de cotisation et de
prestations à payer permettant une adaptation aux revenus et aux priorités de prise
en charge des ménages constituant le groupe. Le Togo continue toujours à faire
recours à son ancienne colonie la France en matière de législation des mutuelles109.
Cependant, les difficultés restent encore en vigueur en raison de la rigidité de la
plupart de ces textes qui en réalités ne répondent pas aux réalités ancestrales,
économiques et sociales du Togo. En raison de leurs origines très encrés dans les
traditions ouvrières, il demeure plus important pour chaque couche sociale d’être
doté d’un outil législatif suffisant pour faire face à une meilleurs réglementation
106.
107.
108.
109.
J.P. CHAUCHARD, J.Y. KERBOURC’H et C. WILLMANN, op.cit., p. 539.
Voir l’art. L111-1, al. 1 du code de la mutualité française.
P. AUFFRET, op.cit., p. 55.
Référence à la loi portant code de la mutualité en République Française.
26
des mutuelles puisque ces derniers sont, en raison de leur efficacité plus ou moins
grandissante, menacées par la concurrence des compagnies privées d’assurance et
même par des institutions publiques de prévoyance notamment la caisse nationale
de sécurités sociale. L’utilisation des mutuelles dans le cadre de la généralisation de
l’obligation d’assurance à caractère social nécessite préalablement une clarification
des dispositions législatives et réglementaires en la matière.
En dehors de l’absence d’une réglementation spéciale des mutuelles qui est à
déplorer, il existe aussi des lacunes importantes des textes actuelles qui pourraient
contribuer au mieux à la sécurité sociale des travailleurs.
B. Le caractère lacunaire des textes actuels.
L’actuelle législation togolaise en matière de la sécurité sociale a été le fruit
d’une longue évolution qui a tiré ses racines de l’époque coloniale110. Cependant,
l’application de ces différents textes a toujours révélé des lacunes existantes en ce
qui concerne le droit de la protection de l’entreprise. Si les salariés restent fort
évidemment liés à la sécurité sociale par le principe d’assujettissement
obligatoire 111 , l’on devrait néanmoins se poser la question du régime social des
dirigeants d’entreprises ainsi que les autres associés ou actionnaires pour lesquels le
législateur togolais passe sous silence. Contrairement au Togo, le Bénin consacre
l’affiliation au régime général des dirigeants sociaux et autres acteurs non-salariés
des entreprises112. Il faut donc dire que ce sont des textes qui comportent des limites
quant à la couverture sociale de la grande partie des acteurs du monde de
l’entreprise. Il est tout de même anormal d’assimiler ces derniers aux travailleurs
indépendants dans la mesure où l’exercice du mandat du gérant tout comme la
110.
111.
112.
Par l’arrêté N° 242 /56/FTLS du 15 mars 1955, il fut instituée la branche des prestations familiales qui
était gérée à l’époque par une Caisse dénommée Caisse de Compensation des Prestations Familiales.
Plus tard, la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles ainsi que la branche des
pensions, verront le jour successivement par la loi N° 63-28 du 17 janvier 1964 et l’ordonnance N°
68-16 du 05 juin 1968. L’apparition d’un véritable code de sécurité sociale ne verra le jour que par
l’ordonnance N° 39/73 du 12 novembre 1973 instituant un code de sécurité sociale au Togo qui vient
donc fusionner les trois textes préexistant. Conscient dont de l’évolution du monde social et de la
réalité économique importante, le législateur est parvenu à mettre à jour l’ordonnance de 1973 par des
amendements qui ont donné lieu à la loi N° 2011-006 du 21 février 2011 portant code de sécurité du
Togo actuellement en vigueur.
Art. 0 3 de la loi portant code de sécurité sociale du Togo.
Art. 04 de la loi N° 98-019 portant code de sécurité sociale du Bénin.
27
prestation de travail du salarié sont effectués dans l’intérêt de l’entreprise, et il
incombe au chef d’entreprise d’assurer la sécurité sociale du gérant ainsi que des
salariés. Les situations de salariés et dirigeants de l’entreprise ne pourraient être
différenciées en ce qui concerne leur sécurité sociale. Dans le cas contraire la
différence de traitement, en ce qui concerne leur régime de sécurité sociale, ne
pourrait être justifié. La politique de l’extension de la sécurité sociale doit toucher
tous les acteurs du monde de l’entreprise sans distinction. Les textes togolais
présentent cette lacune en ce sens que plusieurs catégories d’acteurs du monde de
l’entreprise restent sans régime de sécurité sociale. En dehors de la non extension
totale dont souffre la législation togolaise, il faut également relever l’absence de
prévision de certains textes de certaines prestations à savoir la branche de
l’indemnisation chômage ceci en raison de l’insécurité liée à la stabilisation des
emplois, surtout les travailleurs de l’entreprise sous statut CDD. La grande
difficulté de ces travailleurs à la fin de leur contrat reste leur situation moins
favorable à l’égard de la sécurité sociale « Le chômage révèle des caractères qui
entrent dans le champ de la sécurité sociale : c’est un risque individuel, mais sa
portée est collective et national, à ce titre il peut être indemnisé ».113 Le régime de
l’assurance chômage devrait donc être mis en place afin de pouvoir indemniser les
salariés qui auraient perdu leurs emplois involontairement.
Au niveau de la santé, on déplore cependant l’absence d’assurance maladie
obligatoire dans le secteur privé qui n’est pas encore prévu par les textes. Quand
bien même l’INAM, elle se limite aux agents publics et assimilés soumis au statut
général de la fonction publique
114
. La couverture maladie obligatoire des
travailleurs salariés est dorénavant en application dans plusieurs pays africains115 à
l’exception du Togo où ce régime est encore limité.
113.
114.
115.
J.P. CHAUCHARD, J.Y. KERBOURC’H et C. WILLMANN, op.cit., p. 477.
er
Voir l’art. 1 de la loi n° 2011-003 du 18 février 2011 portant création de l’INAM.
C’est le cas du Gabon avec l’ordonnance presidentielle du 21 aout 2007, du Bénin avec le projet
ARCH (Assurance pour le Renforcement du Capital Humain), ou encore de la Côte d’ivoire avec la
loi n° 2014-131 du 24 mars 2014 instituant la couverture maladie universelle.
28
En somme, le système de sécurité sociale des travailleurs togolais est un système
essentiellement basé sur le modèle d’assurance 116 qu’on désigne par assurance
sociale, et dont les différentes prestations sont concentrées en un régime unique117
quelle que soit la nature du salarié. Ceci rend donc la protection sociale sélective
des personnes qui disposent d’un revenu et qui ont la capacité de contribuer aux
charges sociales à savoir les cotisations à la CNSS. En dehors de ce caractère
sélectif qui rend la sécurité sociale inégale entre les différents acteurs de la vie
active, on note également un autre mécanisme qui pourrait entrainer l’inégalité de la
sécurité sociale ; il s’agit en effet du mécanisme de financement qui diffère d’une
catégorie à l’autre et qui fera l’objet du chapitre suivant.
116.
117.
Modèle contributif dont le financement est assuré par les cotisations sociales des employeurs et leurs
salariés.
Le régime de sécurité sociale togolaise est mono régime et essentiellement basé sur le salariat. Le
régime général unique rassemble en son sein tous les régimes des travailleurs sans aucune distinction
lié à la nature juridique du travailleur, encore moins à son activité rémunératrice.
29
CHAPITRE II. Un déséquilibre lié au statut juridico économique des
travailleurs.
« La part des cotisations assises sur les salaires dans le financement de la
protection sociale est élevée en France, même si elle a diminué significativement en
vingt ans par suite des exonérations et allègements opérés.»118 En effet, en raison
du phénomène économique de la différence de salaires entre catégories de
travailleurs, y compris la différence salariale liée au genre, on assiste de façon
conséquente à une participation inégale des différents acteurs119 de l’entreprise aux
différentes charges sociales qui relèvent de la sécurité sociale. « Le niveau global
des prélèvements obligatoires et les taux appliqués sur les facteurs travail et capital
reflètent les différences de mise en œuvre de la protection sociale et de conventions
qui qualifient ou non de prélèvement obligatoire telle ou telle part de son
financement.»120Dans ce chapitre, l’analyse sera axé sur le handicap du financement
de la sécurité sociale entrainant une inégalité de traitement du fait d’une différence
de statut économique (Section I) avant de relever une différence de traitement
relevant du statut juridique121 et économique des travailleurs (Section II).
Section I. Une différence de traitement relevant du statut économique du
travailleur
L’assiette des cotisations correspond la base salariale sur laquelle sont appliqués
les taux de contributions et cotisation des différentes branches. Le salaire reste donc
l’assiette principale des cotisations de la sécurité sociale qui inclut d’autres
accessoires à savoir les indemnités, primes et gratifications ainsi que les avantages
en nature. Cependant, en raison des différences de salaires 122 constatées pour
diverses raisons, les cotisations sociales demeurent par conséquent inégales par
118.
119.
120.
121.
122.
A. DUTHILLEUL, Le financement de la protection sociale, avis et rapports du conseil économique
et social, p. 22.
Les employeurs et les employés constituent les deux grandes entités qui forment le bloc des acteurs
sociaux de l’entreprise. Les deuxièmes forment en leur sein différent catégories dont la convention
collective du Togo du 20 décembre 2011 les regroupe en agents d’exécution, aux agents de maitrise et
aux cadres qui occupent une place importante dans l’entreprise.
A. DUTHILLEUL, op.cit., p. 23.
Le statut juridique ici relève de la nature de l’emploi ainsi que des relations de travail entre
l’employeur et le salarié.
A. DUTHILLEUL, op.cit., p. 23.
30
l’influence des différences salaires (§ 1) ainsi que l’influence d’un déficit financier
constaté dans certaines branches de prestations. (§ 2).
§ 1. L’influence des inégalités salariales
L’égalité de traitement en droit de la sécurité sociale togolaise se trouve affecté
par les phénomènes d’inégalité de salaire tant au niveau des catégories socio
professionnelles (B) qu’au niveau du genre (B).
A. La différence des revenus socio professionnels
Au Togo la convention collective interprofessionnelle distingue plusieurs
catégories des travailleurs repartis en trois (3) grandes classes avec des
qualifications différentes 123 . L’une des conséquences directes de ces situations
différentes de catégorie est la différence de salaire124 qui résulte de la différence de
qualification et de situation dont relève chaque travailleur. « L’éventail des salaires
peut s’expliquer à la fois par les caractéristiques des salariés et celles des
entreprises qui les emploient. L’enquête sur la structure des salaires en 2002, qui
porte sur les entreprises de plus de 10 salariés, fournit des informations sur ces
deux aspects. Le niveau de diplôme peut dépendre de plusieurs facteurs, dont
l’origine sociale, et jouer plusieurs rôles : il permet l’accès aux professions les plus
rémunératrices, mais garantit aussi le plus souvent un surcroît salarial aux
titulaires
des
plus
hauts
niveaux
de
formation,
même
à
catégorie
socioprofessionnelle donnée.».125 Ceci n’est donc sans effets sur la sécurité sociale
surtout dans le domaine du financement126 où le salaire127 est le facteur important.
En effet les cadres et les assimilées ont généralement un salaire très élevés et
donc une assiette de cotisation assez importante que les agents d’exécution qui
participent à la sécurité sociale le plus souvent avec une assiette limitée à la valeur
123.
124.
125.
126.
127.
Voir l’annexe II de la convention collective interprofessionnelle du Togo.
Voir P. CAHUC, « Pourquoi y a-t-il des différences de salaires ? » in « Reflets et perspectives de la
vie économique » Tome XL | pages 13 à 24.
R. AEBERHARDT et J. POUGET, « Comment expliquer les disparités salariales ? », p. 29.
La sécurité sociale togolaise étant de type bismarckien, chacun participe en fonction de son revenu
professionnel.
Le salaire déterminant la capacité contributive de l’assuré, seuls les travailleurs avec de gros salaires
en bénéficient de façon avantageuse surtout en matière de retraite.
31
minimale du SMIG. 128 Il est encore plus difficile pour les travailleurs avec des
salaires insuffisants de faire face aux prestations suffisantes de sécurité sociale,
surtout avec l’absence des régimes complémentaires. Les travailleurs cadres et
assimilé bénéficient plus de la sécurité sociale en matière de la retraite en raison de
leur participation plus importante aux charges sociales129. Ce rapport de situations
différentes crée donc une inégalité sociale en ce qui concerne la sécurité sociale.
C’est donc une inégalité relative qui peut au même moment être avantageuse ou
défavorable selon qu’il s’agisse de la prestation ou de la cotisation.
Toutefois il convient de nuancer ce caractère inégal de la sécurité sociale selon
que le système est bâti sur la capitalisation130 ou la répartition131 , c’est l’exemple de
la retraite par capitalisation. « Les défenseurs de la capitalisation estiment que ce
mode de financement permet à la fois aux affiliés de bénéficier d’un meilleur
rendement de leur placement retraite et à l’échelle macro-économique, de stimuler
la croissance à travers l’augmentation de l’épargne. Ils estiment également que la
capitalisation est moins exposée aux évolutions démographiques. Ils soulignent
enfin le caractère plus équitable de régimes où chacun constitue sa propre épargne
retraite ». 132 Il serait alors un peu difficile de voir l’aspect inégal de la sécurité
sociale entre les différentes catégories de travailleurs si le système est basé sur le
mécanisme de la capitalisation des ressources de l’assuré.
Néanmoins, le système de financement par répartition participe à l’équilibre
dans la seule condition de supériorité d’actifs cotisants. « Un régime fonctionnant
par répartition pure est équilibré si le total des pensions versées aux retraités est
égal au total des cotisations versées par les actifs. L’équilibre dépend donc d’une
part du nombre de cotisants et de retraités et d’autre part du montant des pensions
128.
129.
130.
131.
132.
Art. 12 al. 02 de la loi portant code de sécurité sociale du Togo.
L’illustration est faite en France avec la reforme d’Emmanuel MACRON en vue d’éviter les disparités
existantes entre les différents régimes de retraite.
Le système de financement par capitalisation est un système qui fonctionne suivant le principe de
l’accumulation par les travailleurs d’un stock de capital qui servira à financer les prestations de ces
mêmes travailleurs qui seront inactifs plus tard.
Le système de financement par répartition repose sur la solidarité intergénérationnelle. Les cotisations
versées par les travailleurs actifs servent à payer les prestations des travailleurs inactifs.
M. RHOMARI, La réforme des systèmes de retraite dans les pays en développement et l’extension de
la couverture à l’emploi informel : Application au Maroc, thèse pour l’obtention du grade de docteur
en économie, p. 47.
32
et des revenus des cotisants »133. Toujours dans le cas des retraites, le financement
dépend de la participation financière des actifs qui peuvent être des cadres ou des
agents d’exécution dont pour ces derniers la participation financière est faible en
raison de la faiblesse de leur salaire. La forte participation financière du travailleur
cadre participera à la prestation de l’agent d’exécution dont le financement a été de
faible
importance.
Les
inégalités
salariales
des
différentes
catégories
socioprofessionnelles entrainent de facto des capacités inégales de participation aux
charges sociales telles que la sécurité sociale. L’avènement des systèmes de retraites
complémentaires d’entreprise au Togo contribuerait à l’amélioration de leur
traitement en matière de retraite.
Cependant, la différence de salaire relevant de la différence de sexe est aussi le
produit d’une inégalité sans cesse accrue qui touche la sécurité sociale.
B. La différence socioéconomique du genre
« Les inégalités peuvent prendre des formes très diverses : écarts de salaires et
de patrimoines, exclusion du marché de l’emploi, différences entre femmes et
hommes, marginalisation de certains territoires, disparités dans l’accès à
l’éducation et aux soins -mais leurs conséquences se rejoignent : l’accroissement
de la pauvreté, la précarisation et la marginalisation, dont les femmes sont les
premières à souffrir. »134 En effet, « La plupart des systèmes de sécurité sociale
étaient à l’origine structurés de façon à répondre aux besoins des familles ayant un
apporteur de revenu de sexe masculin. Vu l’évolution des styles de vie, des attentes
et des structures familiales, une grande partie de la population ne vit pas dans une
famille de ce type, ce qui a renforcé l’exigence de l’égalité entre les sexes »135. Le
principe de l’égalité entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins 136 a
133.
134.
135.
136.
Idem, p. 38.
Voir Oxfam, pour un système économique qui bénéficie à toutes et tous!, consulté en ligne sur
https://www.oxfam.org/sites/www.oxfam.org/files/etats_des_lieux_inegalites_maroc.pdf le 02/09/
2019.
Voir le rapport de l’OIT lors de la 89 ème session de la Conférence Internationale du Travail en 2001,
Sécurité sociale questions, défis et perspectives, p. 11.
Idem.
33
été posé depuis longtemps par le traité de Rome du 25 mars 1957137 instituant la
Communauté économique européenne. Par la suite plusieurs textes 138 se sont
succédé en faveurs du principe de l’égalité de traitement et de l’égalité de chances
entre homme et femme en matière d’emploi. La situation défavorable des femmes
sur le marché de l’emploi par rapport aux hommes engendre des retombées
négatives sur leur système de sécurité sociale 139 . Les prestations servies par les
régimes professionnels à savoir celui togolais, dépendent du niveau des gains et de
l’ancienneté, deux critères qui tendent à favoriser les hommes
140
. « Les
classification à la base des rémunérations doivent être commune aux travailleurs
masculins et féminins. Toute discrimination résultant notamment des conventions
collectives doivent être éliminées ; ainsi une prime à raison du sexe doit être
bilatéralisme. »141
De nombreux constats révèlent qu’en matière de sécurité sociale, les femmes
vivent plus dans une situation de précarité par une logique de dépendance 142 vis-àvis de leurs époux. Le défi majeur est donc aujourd’hui de « passer d’une logique
de dépendance des femmes vis-à-vis de leur conjoint à une logique d’égalité. »143
Dans la même logique, le système de protection sociale au Togo porte en lui « une
forte responsabilité dans la reproduction des inégalités entre les femmes et les
hommes »144par le système de la contributivité qu’il incarne depuis longtemps. « La
137.


138.
139.
140.
141.
142.
143.
144.
Art. 119 « Chaque État membre assure au cours de la première étape, et maintient par la suite,
l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les
travailleurs féminins pour un même travail. Par rémunération il faut entendre, au sens du présent
article, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés
directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de
l'emploi de ce dernier. L'égalité de rémunération, sans discrimination fondée sur le sexe, implique :
que la rémunération accordée pour un même travail payé à la tache soit établie sur la base d'une
même unité de mesure ;
que la rémunération accordée pour un travail payé au temps soit la même pour un même poste de
travail. »
Une série de directives illustrant l’attention particulière que les instances européennes portent sur le
principe d’égalité de traitement ont relayé le traité de Rome dont la plus important est la directive
unique du 05 juillet 2006 du parlement européen et du conseil qui réunissait les directives précédentes.
Voir le rapport de l’OIT lors de la 89 ème session de la Conférence Internationale du Travail en 2001,
Sécurité sociale questions, défis et perspectives, p. 41.
Idem.
A. MAZEAUD, Droit du travail, 10ème éd., 2016, LGDJ, p. 597.
C. MARTY, « La protection sociale à l’épreuve de l’égalité entre les femmes et les hommes », p. 02.
Idem.
Idem.
34
protection sociale, et donc le système de retraite145, ont été conçus il y a soixantedix ans sur le modèle de l'homme soutien de famille, qui travaille à temps plein et
sans interruption de carrière. Le mode de calcul de la pension a été basé sur cette
[norme] de carrière. Quel que soit le régime de retraite, la pension dépend à la fois
du salaire et de la durée de carrière (durée de cotisation), avec une durée minimale
définissant la [carrière complète]. Ce calcul défavorise les femmes car elles ont en
moyenne des carrières plus courtes du fait des interruptions pour élever les enfants,
et des parcours comprenant souvent des périodes à temps partiel. »146 « Dans un
contexte national où les femmes connaissent un taux d’activité plus faible que les
hommes, le régime général de Sécurité sociale se distingue par une
surreprésentation des femmes dans ses effectifs », 147 or ces dernières ont en
moyenne des carrières plus courtes, elles atteignent plus difficilement la durée de
cotisation exigée148.
L’homme et la femme, bien que bénéficiant de la même protection en ce qui
concerne l’égalité de traitement se retrouvent dans la pratiques du droit du travail
dans des situations différentes, notamment avec un temps de travail généralement
plus court chez la femme que chez l’homme ainsi que des secteurs différents. Le
facteur physique n’est pas aussi du reste en ce sens que les hommes résistent plus en
termes de durée de travail que les femmes et donc sont plus sollicités par les
employeurs en vue d’exécuter les heures supplémentaires de l’entreprise. « Les
statistiques témoignent de la difficulté de faire évoluer les rôles de genre. Si l’on
constate, en France, un engagement croissant des femmes sur le marché du travail,
les modalités de cet engagement diffèrent de celles des hommes (temps partiel,
retraits plus fréquents, etc.). Le degré et les modalités de participation différente
des femmes et des hommes sur le marché du travail se traduisent par un revenu
moins élevé pour les femmes, plus dépendantes que les hommes des revenus de leur
145.
146.
147.
148.
Pour une analyse des retraites intégrant la dimension de genre, voir « Retraite des femmes, un enjeu décisif
pour toute réforme », C. MARTY, http://www.fondation-copernic.org/index.php/2018/07/25/femmes-etretraites-un-besoin-derupture/ consulté le 12/12 / 2019.
C. MARTY, op. cit., p. 02.
C. BONVALOT, « l’égalité femmes / hommes à la sécurité sociale », EN3S-École nationale
supérieure de Sécurité sociale, in « Regards », p. 48.
C. MARTY, op. cit., p. 02.
35
conjoint et se répercutent, en cas de problème, sur le montant de leurs prestations
sociales respectives. En parallèle, l’implication des hommes dans la sphère
familiale évolue très lentement, alors qu’on sait que ce facteur est déterminant pour
favoriser la participation des femmes au marché du travail. C’est dans cette
dynamique que s’ancrent profondément les inégalités de genre »149
Si les différences salariales entre différentes catégories professionnelles ainsi
que celles touchant le genre ont entrainé une situation de déséquilibre financière, il
revenait cependant à l’État au nom de la solidarité nationale de relever cet équilibre
en termes d’un financement complémentaire ; cependant l’on note une défaillance
de la part de celui-ci.
§ 2. L’influence d’un déficit financier
Le caractère insuffisant du système de financement par cotisation (A) et la
moindre intervention de l’État dans le financement de la sécurité sociale (B)
favorise un déficit financier qui déséquilibre le système de protection social
togolais.
A. L’insuffisance du système de financement par cotisation
En dehors de son caractère restreint à un cercle spécial qui est celui du salariat, le
système de sécurité sociale basé sur les cotisations sociales a révélé un certain
nombre de limites qui marquent son insuffisance ou son inefficacité 150 .
Les
évolutions économiques et surtout démographiques 151 ont constitués pour le
système de sécurité en place, des facteurs importants qui ont touché le
fonctionnement normal de la sécurité social. « Démographie et sécurité sociale sont
les deux termes d’une équation globale »152. Au Togo, la croissance démographique
et économique s’est révélée importante ces dernières années créant ainsi
l’augmentation d’un niveau de vie plus adéquat ainsi que l’augmentation du nombre
149.
150.
151.
152.
P. VIELLE, la protection sociale comme régime de genre, disponible en ligne sur
http://fellows.rfiea.fr/dossier/devenir-parents-rester-inegaux/article/la-protection-sociale-comme regime-degenre consulté le 02 /09/ 2019.
M. BORGETTO, op. cit., p. 09.
Les changements démographiques affectent partout la planète, avec une intensité qui varie beaucoup
selon les pays et remettent en cause l’équilibre économique et financier des régimes de sécurité
sociale.
J. DAMON « changements démographiques et sécurité sociale : Défis et opportunités » in
« informations sociales » (n° 183), p. 94.
36
important de chômeurs. Le nombre important des prestataires face à des ressources
financières
uniquement
basées
sur
des
cotisations
sociales
a
entrainé
progressivement un déficit financier pour l’ensemble des branches153. Cette cause
du déficit trouve ainsi son explication à deux niveaux principaux à savoir la baisse
des recettes assises uniquement sur les cotisations sociales des salariés actifs et la
hausse des dépenses sociales154 notamment un besoins élevé des soins de santé de
bonne qualités. L’augmentation du nombre de chômeur vient donc impacter les
ressources financières de la sécurité sociale quand bien même l’indemnisation du
chômage n’est pas encore de mise au Togo. L’analyse des différentes causes du
déficit de la sécurité sociale française des années 1981 a révélé la diversité des
causes. C’est ainsi qu’on peut relever les causes techniques liées au développement
de la médecine avec l’apparition de nouveau soins de santé. Politiquement on
retrouve des prestations qui s’améliorent sans pour autant améliorer le système de
financement adapté. L’amélioration des conditions de vie des salariés amène ces
derniers à faire face aux nouvelles exigences sociales liée notamment à la
couverture sociale155. Le vieillissement de la population devrait donc être de mise
dans la mesure où la population qui vieillit devient une charge sociale à l’égard de
la population active. « Le vieillissement, qui se présente dans tous les pays avec des
niveaux certes différents, constitue assurément le défi central : il pèse
mécaniquement sur les comptes, les priorités, la philosophie et l’organisation des
régimes de sécurité sociale »156
Face donc à cette situation déficitaire de la sécurité sociale, il était donc de mise
pour l’État de prendre des mesures qui devraient rééquilibrer les comptes des
différentes branches de la sécurité sociale à travers des reformes et mises en places
des mécanismes alternatifs de financement afin de relever le déficit. Qu’en est-il
alors spécialement en droit de la sécurité sociale du Togo ?
153.
154.
155.
156.
M. BORGETTO, op. cit., p. 10.
Idem.
Au Togo, la mise en place de « l’assurance vieillesse pour tous » en 2019 constitue une innovation
dans le cadre de l’extension d la couverture sociale pour tous, toutefois cela augmenterait une dépense
de plus qui devrait être pris en charge par des cotisations sociales.
J. DAMON, op. cit., p. 95.
37
B. Le Manque d’un mécanisme adéquat de compensation déficitaire
Malgré le caractère déficitaire relevé par la sécurité sociale togolaise, il est
encore plus difficile pour le système de relever ou du moins réduire ce déficit afin
de retrouver l’équilibre plus ou moins stable. La cause principale de cette difficulté
reste le manque d’autre mécanisme de financement en dehors de celui par les
cotisations sociales. Dans les autres systèmes par exemple le système français,
plusieurs mécanismes alternatifs157 ont été mise en place afin de rétablir l’équilibre
financier qui se trouvait menacé par un déficit occasionné par l’indisponibilité des
ressources nécessaires pour faire face aux dépenses sociales actuelles. En matière de
déficit des comptes de la sécurité sociale, l’État se révèle comme l’acteur principal
devant contribuer à l’équilibration des comptes sociaux. Tel a été le cas en France
avec la mise en place des cotisations sociales généralisées (CSG) 158 . L’État est
parvenu alors à fiscaliser la sécurité sociale par la mise en place d’un impôt qui
devrait combler l’insuffisance des cotisations sociales. « L’impôt a su en effet
gagner une position significative, à la fois pour des raisons de justice et pour des
raisons d’efficacité »159 ; à la lecture de ce texte on constate bien que le financement
de la sécurité sociale par l’impôt n’est pas seulement gage d’une justice sociale mais
également un instrument qui rend efficace le système de protection sociale.
Cependant la situation reste encore déplorable dans le système togolais ou l’État
n’intervient moins pas dans le financement du système. C’est ainsi que l’essentielle
du budget de la sécurité sociale reste assis sur les cotisations sociales des salariés.
Ceci contribuerait alors sans doute à un déséquilibre de la sécurité sociale qui
pourrait en raison du déficit être limité à certaines branches de prestations ou encore
à certaines catégories de travailleurs160 en raison de l’insuffisance des ressources.
157.
158.
159.
160.
Plusieurs méthodes peuvent alternatives peuvent participer au financement de la sécurité sociale.
Parmi ses méthodes, la France par exemple a choisi du système de fiscalisation qui met en œuvre
plusieurs impôts participatifs à savoir la TVA, l’impôt sur le revenu, la taxe sur l’investissement dont
la plus important a été les cotisations sociales généralisées.
Les contributions sociales généralisées sont des prélèvements obligatoires qui ont été créés en France
le 18 décembre 1990 afin de participer au financement de la sécurité sociale et qui ont la nature d’un
impôt.
J.P. LABORDE, op.cit., p. 189.
La participation de l’État au financement de la sécurité sociale devient plus bénéfique aux travailleurs
indépendants ainsi qu’à ceux ayant des revenus faibles pour faire face au complément des prestations
sociales dont le régime général n’en fait pas cas.
38
La relève du déficit de la sécurité sociale est par nature un rôle et un devoir réservé
à l’État quand bien même le financement est assuré par le système de cotisation des
salariés. Tout en garantissant à chaque citoyen dans les conditions d’égalité, le droit
au travail161, l’État se doit de garantir également un droit équitable aux prestations
sociales avec la garantie des ressources financières disponibles. La faible
participation financière de l’État togolais au financement 162 du système de la
sécurité sociale constitue l’une des faiblesses qui engendre en conséquence le déficit
régulier des comptes sous l’influence de l’évolution démographique et économique.
L’efficacité du système de la sécurité sociale devrait alors se reposer sur la rigidité
du système de financement qui doit permette le dégagement des comptes
excédentaires afin d’assurer à suffisance et en bonne qualité la sécurité sociale des
travailleurs et de la population. Bien que les travailleurs soient les véritables acteurs
du financement afin d’assurer leur sécurité, l’État devrait cependant assurer son rôle
de veille afin d’éviter un éventuel déficit, déficit qui pourrait entrainer des
prestations insuffisantes et inégales.
Au Togo, tout comme dans la plupart des pays de l’Afrique subsaharienne, la
qualité de salarié ne lie seulement pas les personnes privées, il peut y avoir
l’interférence d’une personne publique comme employeur du salarié public. Quid
alors de la protection sociale du salarié désigné agent contractuel de l’État par
rapport aux autres salariés ?
Section II. Une différence de traitement relevant du statut juridique du
travailleur : le cas des agents contractuels d’État
Les agents contractuels163 de l’État constituent une catégorie de travailleurs qui
sont considérés de part et d’autres comme des salariés et/ou des fonctionnaires. « Le
dualisme 164 public/privé crée un dualisme de nature juridique des relations de
161.
162.
163.
164.
Voir art. 37 de la constitution togolaise.
Le système de sécurité sociale étant essentiellement basé sur le modèle Bismarckien d’assurances,
l’État se trouve écarté de son financement.
« Personne recrutée par un organisme public sur le fondement d’un contrat, de façon théoriquement
provisoire, et n’ayant donc pas la qualité de fonctionnaire », », S. GUINCHARD et T. DEBARD,
Lexique des termes juridiques, 25ème éd. 2017-2018, Dalloz, p. 562.
Le dualisme est tout système qui dans un ordre d’idée quelconque admet la coexistence de deux
principes essentiellement irréductibles.
39
travail. Ce dualisme juridique (droit privé / droit public) des relations de travail
induit le dualisme des régimes de protection sociale. »165 Bien que chargé d’une
mission de service public donc de l’intérêt général, ils ne sont tout de même pas
classés dans la catégorie à part entière des fonctionnaires. Quand bien même le
législateur 166 togolais a unifié le statut juridique du fonctionnaire et de l’agent
contractuel, le statut social167 reste encore distinct d’une catégorie à une autre.
Pour mieux appréhender ces inégalités de protection sociale (§ 1), on envisagera
le régime juridique parapublic lié à la nature de la fonction et de l’engagement
contractuel (§ 2).
§ 1. Un régime juridique parapublic des agents contractuels de l’État.
Le régime juridique parapublic des agents contractuels de l’État se situe à deux
niveaux distincts. De par leur engagement168, ils relèvent du droit privé du travail
(A). Toutefois la nature de leur service169 « public » leur confère les caractéristiques
de fonctionnaires de l’administration publique(B).
A. Un régime de droit privé du travail quant à la nature de l’engagement
Les agents parapublics bien qu’investis d’une mission de service public au même
titre que les autres fonctionnaires, se réservent une certaine particularité notamment
en ce qui concerne leurs conditions d’accès à la fonction publique. Si généralement
l’accès à la fonction publique de l’État est subordonné par un concours d’entrée, la
spécialité des agents contractuels relèvent bien évidemment d’un accord contractuel
soumis au code du travail.
Le contrat de travail lie ainsi l’agent à son employeur 170 qui est l’État. « Le
contrat est donc la base juridique de l’engagement de l’agent public contractuel de
165.
166.
167.
168.
169.
170.
Y. BATARD, Op.cit., p. 15.
Art. 3 de loi n°2013- 002 portant statut général de la fonction publique togolaise.
Selon l’alinéa 6 de l’art. 252 de loi n°2013- 002 portant statut général de la fonction publique
togolaise « La protection sociale et le régime de pension des contractuels reposent sur les mêmes
principes que ceux qui régissent les travailleurs bénéficiant d'un contrat de travail à durée
déterminée. »
Les agents contractuels de l’État sont liés à leur fonction publique par un contrat de travail de droit
privé, ce qui confère leur régime de sécurité sociale au régime privé des salariés.
La nature du service des agents contractuels répond aux critères matériels de qualification du service
public dont exercent également les fonctionnaires titulaires.
P. SOGLOHOUN, « Le statut des agents publics contractuels de l’État en Afrique noire
francophone » p. 14.
40
l’État »171. Il faut donc dire que la spécificité du statut de l’agent contractuel réside
dans la signature d’un contrat de travail avec la possibilité d’observation d’une
période d’essai dans les mêmes conditions prévues par le code du travail. L’agent
contractuel est donc toute personne exerçant son emploi en vertu d’un contrat
individuel. Ainsi, un agent public contractuel est « toute personne dont la situation
administrative est régie par un contrat individuel, accepté et signé par lui, le liant à
l’administration »172 et exerçant pour le compte d’un service public administratif.
En effet, c’est par un contrat, c’est-à-dire un acte qui suppose le consentement
de deux ou plusieurs personnes, en l’occurrence l’autorité administrative et l’agent
en question, que l’agent public contractuel accède à la fonction publique. La
relation contractuelle suppose et répond « à une logique foncièrement égalitariste »
entre les contractants qui sont l’État c'est-à-dire l’administration publique et l’agent.
Le consentement des deux parties s’avère indispensable à cet effet. Au contraire, le
fonctionnaire est intégré à la fonction publique en vertu de l’acte administratif
unilatéral qu’est la nomination. Le statut qui détermine son accès à la fonction
publique et l’exercice de son emploi est de source légale et réglementaire.
Il est à relever à cet effet qu’il soit « un agent contractuel de droit public ou de
droit privé »173, l’agent contractuel reste lié à l’administration pour qui il travaille,
par un acte contractuel définissant non pas sa qualité de fonctionnaire, mais celle de
salarié de l’État. D’un point de vue générale il faut dire que les règles qui
gouvernent l’accès à la fonction publique des agents contractuels donc leur
recrutement sont fondés sur la signature d’un contrat individuel qui doit lier l’agent
contractuel à son employeur174. Comme tout contrat de droit commun du travail, il
acquiert sa force juridique par l’expression du consentement de l’agent qui accepte
adhérer à la relation contractuelle de travail.
171.
172.
173.
174.
Idem.
Art. 1er de la loi n° 2013-002 du 21 janvier 2013 portant Statut général de la Fonction publique
togolaise.
TC 25 mars 1996, M. Berkani c/ Centre régional des œuvres universitaires et scolaires de Lyon,
R.F.D.A., n° 4, 1996, pp. 819-823, concl. Martin. La jurisprudence française opère cette distinction
entre agent contractuels de droit public qui sont des personnels non statutaires travaillant pour le
compte d'un service public à caractère administratif quel que soit leur emploi et les agents contractuels
de droit privé qui travaillent pour le compte d’un service public à caractère industriel et commercial.
L’employeur ici est la personne publique qui est l’État.
41
Cependant, si le recrutement d’un agent contractuel dans la fonction publique de
l’État est matérialisé par un contrat individuel de droit privé du travail lui conférant
ainsi un régime juridique de droit privé, il faut néanmoins relever que cela n’est
exactement pas le cas dans les règles qui régissent son emploi dans la fonction
publique, celles-ci restent soumises au régime du droit public.
B. Un régime de droit public quant aux relations de travail
Les agents contractuels de l’État bien que liés à leur employeur qui est l’État par
un acte contractuel, restent liés à leur emploi par les règles de droit public
notamment le statut général de la fonction publique175 qui définit le cadre juridique
et les modalités d’exercice de la fonction publique. Que ce soit un agent permanant
ou contractuels, ils relèvent tous du personnel de l’administration et sont soumis
aux mêmes règles d’emploi car travaillant tous dans l’intérêt général de la nation176.
Le régime juridique de tous les agents de l’État y compris les contractuels, se
trouvent donc unifié. « Cette unification est soit conçue dans une acceptation
extensive, en englobant dans le nouveau statut général tous les agents publics et
assimilés sous le vocable d’agents permanents de l’État, soit demeurée dans une
approche exclusive, en supprimant la catégorie des agents publics contractuels et
assimilés »177. « La question de la qualification d’agent public ne se pose également
qu’à propos des personnes qui, au sein des collectivités publiques, participent aux
activités de service public.»178
L’unification du régime juridique des agents publics de l’État, qu’ils soient
contractuels ou permanant témoignent de l’égalité qui existe entre les deux
catégories de travailleurs car ils sont chargés d’une même mission qui est celle du
service public de l’État. En conséquence, il faut relever que le statut général de la
fonction publique n’est plus uniquement consacré aux fonctionnaires et donc les
agents publics contractuels de l’État y trouvent une bonne place. Ils constituent ainsi
175.
176.
177.
178.
La dernière modification de la loi portant statut général de la fonction publique a procédé à
l’unification du régime juridique du personnel de la fonction publique.
L’intérêt général ici se traduit par un service public rendu indifféremment de la personne qui l’a
rendu.
P. SOGLOHOUN, op.cit., p. 21.
J.M. AUBY, J.B AUBY, D. JEAN-PIERRE et A. TAILLEFAIT, Droit de la fonction publique,
7ème éd., 2009, Dalloz, p. 112.
42
une catégorie à part entière d’agents publics comme les stagiaires qui sont des
fonctionnaires en devenir, car ayant vocation à être titularisés à la fin de leur stage.
Avec cette unification, les agents publics contractuels ne devraient donc pas
légalement être considérés comme des «fils naturels» 179 de la fonction publique
comme l’avait relevé le professeur Lachaume, mais plutôt à l’instar des
fonctionnaires, comme des fils légitimes. En dépit de leur engagement contractuel
dans la fonction publique, les agents contractuels ne peuvent accomplir leur mission
de service public qui leur est assignée en vertu des dispositions de droit privée du
travail. Cela revient à dire que l’engagement contractuel en vertu des règles de droit
commun du travail ne peut juste que lier la personne de l’agent à son employeur
public qui est ici l’État en ce qui concerne sa situation personnelle sans toutefois
toucher les règles relatives à l’exercice de son travail qui relèvent du statut général
de la fonction publique dont ils font partie intégrante. L’unification des régimes
juridiques de ces deux catégories d’agents publics sous-entend la reconnaissance
statutaire des agents contractuels comme membre de la fonction publique. C’est
d’ailleurs compte tenu du rôle quasi similaire que jouent les agents contractuels que
le doyen Hauriou n’a pas hésité de les qualifier de « demi fonctionnaires »180.
L’intégration dans un texte unifié181 des diverses règles régissant la fonction
publique tend à sécuriser l’agent public contractuel de l’État dans son parcours
professionnel et garantit, par voie de conséquence, le bon fonctionnement du service
public. En soumettant les agents publics contractuels de l’État à des dispositions
contenues dans le statut général de la fonction publique, on en arrive à la conclusion
qu’ils ne constituent plus le « tiers exclu »182 de la fonction publique.
Outre cette intention du législateur de fonctionnariser les agents contractuels par
leur intégration dans le régime juridique des agents permanents, le législateur en a
179.
180.
181.
182.
J.-B AUBY, G. BRAIBANT, J.-F. LACHAUME, « Les agents publics contractuels après l’arrêt
« Berkani». Entretien sur les conséquences de la récente extension jurisprudentielle », D.A., 1997,
Chron. 18, p. 08.
M. HAURIOU, notes de jurisprudence de 1892 à 1923, Sirey, 1931, cité par F. PEIFFER, Les
agents contractuels de la Fonction publique territoriale, Mémoire Master II Recherche, Université
Paul Verlaine, 2007-2008, p. 40.
Le statut général de la fonction publique est le texte unique fixant le régime juridique du personnel de
la fonction publique du Togo.
E. DOCKES « L’agent public non statutaire et le Code du travail », A.J.F.P., n° 4, 1997, p. 01.
43
voulu également leur faire bénéficier certains droits et avantages dont bénéficiaient
entre temps uniquement les agents permanents. En sommes, il est à retenir que la
mission de service public, dans l’intérêt général de toute l’administration confère
aux agents contractuels une qualité de fonctionnaire, dont les règles de
fonctionnement sont d’ailleurs régies par le statut général de la fonction publique au
même titre que tous las autres agents permanents.
L’aspect parapublic des agents contractuels de l’État tel que relevé dans ce
paragraphe témoigne d’un régime juridique professionnel hybride de cette catégorie
spéciale de salarié. L’on serait à présent en mesure de se poser la question dans le
cadre de cette étude du régime social y réservé à cet effet.
§ 2. Un régime social inégal des agents contractuels
« Parce qu’ils ne sont pas des agents titulaires mais bien des « agents nontitulaires, les contractuels sont exclus des logiques professionnelles et identités
collectives »183. Ils ne jouissent pas de façon égalitaire184 des mêmes droits que les
agents permanant de l’État en se voyant aligné au régime de droit privé de la
protection sociale (A) sans un régime complémentaire de retraite (B).
A. Un régime social de droit privé assimilé aux travailleurs salariés
« La protection sociale du salarié de droit privé et la protection sociale de
l’agent de droit public reposent sur des statuts juridiques différents … »185 Malgré
un statut de quasi fonctionnaire de la fonction publique, les agents contractuels se
voient limités dans leur protection sociale par rapport aux autres agents permanant
de la fonction publique qui bénéficient de la stabilité dans la protection sociale.
« L’État leur employeur est le garant de l’égalité de traitement même si
l’égalité de traitement, corollaire au principe de l’égalité de traitement devant la
loi ,n’interdit pas de traiter différemment des agents publics se trouvant dans des
situations différentes au regard du service public. »186 Les agents contractuels sont
183.
184.
185.
186.
A. PEYRIN, « Résorber la précarité sans réduire les inégalités, une dualisation négociée des carrières
dans les fonctions publiques (2009-2011) », p. 05.
L’égalité ici devrait se traduire par le bénéficie d’un régime identique de prestations sociales entre les
agents contractuels et ceux permanent en raison de l’identité du service public rendu.
Y. BATARD, op.cit., p. 13.
Idem.
44
alors affiliés au régime social de base en commun avec les salariés privés à la caisse
nationale de sécurité sociale.
Cette situation laisse subsister des interrogations dont les tentatives de réponses
amènent certainement à penser à une inégalité de traitement en considération de leur
situation de travail et de la mission de service public qu’ils accomplissent dans les
mêmes conditions de travail que les agents permanant qui bénéficient d’un statut
social plus avantageux187. Dans la logique de l’unification du régime juridique des
contractuels et des agents permanents, il faut alors dire qu’aucune disposition ne
devrait justifier cette différence de traitement à l’égard des agents contractuels en
matière surtout de la protection sociale. L’agent contractuel même en vertu d’un
contrat à durée indéterminée reste soumis aux dispositions du code de sécurité
sociale et non au régime de la caisse de retraite comme un agent permanant de la
fonction publique. Si le statut de la fonction publique ne fait aucune distinction
quant à ce qui concerne les agents permanant et les agents contractuels de la
fonction publique, il faut alors dire que la même disposition devrait s’appliquer en
termes de leur sécurité sociale car ils ont occupé les mêmes fonctions et soumis aux
mêmes risques durant leur fonction. Le régime des pensions et retraite des
fonctionnaires institué par la loi du 23 mai 1991 exclut de son champ d’application
les agents contractuels avec de lourds avantages accordés aux fonctionnaires
publics.
Les fonctionnaires statutaires bénéficient de plus d’avantages en vertu de leur
situation statutaire alors que les agents contractuels en reçoivent de façon limitée et
renvoyé au régime générale de sécurité sociale des travailleurs salarié. En vertu de
leur régime spécial de sécurité sociale, les fonctionnaires en activité bénéficient de
prestations au moins égales à celles prévues par le régime général de la sécurité
sociale. Selon que le montant du traitement à verser, en application des droits
statutaires ou du régime général de sécurité sociale, est plus avantageux pour le
fonctionnaire, son administration lui verse soit exclusivement le premier, soit le
187.
L’avantage des agents permanents sur les agents contractuels quant au régime social se démarque au
niveau de la branche des pensions où le régime de la CRT qui gère les fonctionnaires offre des
prestations beaucoup plus avantageuses que ceux du régime des salariés.
45
premier assorti d’une indemnité différentielle qui porte son montant au niveau du
second. Qu’en est-il de leur protection complémentaire ?
B. Une inexistence d’un régime complémentaire de protection sociale
Au Togo, le régime des droits sociaux des agents contractuels étant soumis au
même régime des salariés de droit privé,188 il devrait donc être mis à leur disposition
un régime complémentaire189 compensatoire de leurs droits sociaux qui n’ont pas
été pris en compte. La protection sociale complémentaire permet aux salariés, avec
l’aide de l’État, de souscrire une couverture en complément de celles fournies par la
sécurité sociale du régime général. Le taux de remplacement en matière de retraite
reste disproportionné entre les fonctionnaires du secteur public et ceux du régime
privé en défaveur de ce dernier où « le montant de la pension de vieillesse ou
d'invalidité, de la pension anticipée et de l'allocation de vieillesse est fixé en
fonction de la rémunération mensuelle moyenne définie comme la soixantième
partie du total des rémunérations mensuelles soumises à cotisations au cours des
cinq (05) dernières années précédant la date d'admissibilité à pension.»190. Dans la
fonction publique, seul est pris en compte le dernier salaire. Le régime
complémentaire des agents parapublics s’inscrit comme la continuité du régime
général en complément du déficit ou de l’insuffisance constaté. Cet effort de
redynamisation de la protection sociale a été marqué par l’institution en 1974, par le
décret N°74-184/PR du 20 décembre, de la Caisse de Retraite Complémentaire des
Cadres (CRCC). Le décret institue le statut général des organismes paraadministratifs en vue d’assurer une retraite complémentaire aux cadres des
organismes parapublics du Togo et de rétablir le déséquilibre profond existant dans
le traitement des cadres de la fonction publique et ceux des entreprises
parapubliques à leur admission à la retraite.
Cependant il faut relever que ce régime institué a toujours éprouvé des
difficultés dans son fonctionnement, entrainant par l’écoulement du temps son
188.
189.
190.
Les deux régimes sont gérés par une institution unique qui est la caisse nationale de sécurité sociale.
En France l’IRCANTEC est une institution de protection sociale complémentaire des agents non
titulaires de l’administration qui complète les prestations du régime général notamment en matière de
retraite.
Voir art. 44 du code sécurité sociale du Togo.
46
inexistence pratique au plus pire sa dissolution en 2010. Ceci reste prouvé par la
volonté de la CNSS depuis les années 2005 de mettre fin à cette institution avec de
lourdes conséquences négatives pour les salariés concernés. La fin de la CRCC était
ainsi marquée par son ouverture aux salariés privés par un fonctionnement selon le
système de capitalisation pur et simple, l’ouvrant à tous les travailleurs des secteurs
publics et privés. La suspension de l’attribution de nouvelles pensions aux assurés
cadres partant à la retraite du 1er septembre 2005 matérialisait d’une manière ou
d’une autre l’inexistence de cette institution de prestation sociale des salariés cadres
du secteur parapublic. Cette décision a été mise en application effective à partir du
30 juin 2006 par la CNSS qui a ainsi supprimé tous les droits acquis des
pensionnaires de la CRCC. Malgré l’intervention judiciaire du Tribunal de travail
de Lomé en faveur des pensionnaires dudit régime, ce processus de disparition n’a
point été empêché par l’État qui décida d’arrêter la gestion de la CRCC en
procédant à sa liquidation.
La garantie de la retraite étant très primordial dans la vie d’un salarié, elle
devrait être la première préoccupation de la protection sociale complémentaire des
agents contractuels qui ne bénéficient pas du même régime de base de retraite avec
les fonctionnaires statutaires de la fonction publique. Tel est le cas avec la
législation française191 qui a mis en place un régime complémentaire retraite pour
les agents contractuels de la fonction publique française ainsi qu’en droit sénégalais
et ivoirien avec la mise en place respectivement de L’IPRES-RCC 192 et le régime de
retraite par Capitalisation193. Le régime togolais trouve ainsi sa défaillance du fait de
l’absence d’un système efficace complémentaire pour les agents contractuels, un
système qui devrait rétablir l’équilibre avec les fonctionnaires statutaires.
À défaut d’intégration des agents contractuels dans le régime de la caisse de
retraite (CRT), l’institution d’un régime complémentaire s’avère nécessaire dans la
mesure où ce régime permettrait de relever la pente afin de hisser les agents
191.
192.
193.
Le décret n°70-1277 du 23 décembre 1970 portant création de l’Institut de Retraite Complémentaire
des Agents Non titulaires de l’État et des Collectivités publiques a favorisé en France la retraite des
agents contractuels de la fonction publique en complément de leur sécurité sociale.
L’IPRES-RCC a été créé en 1973 par les partenaires sociaux sénégalais et régi par la loi n°.75-50 du 3
avril 1975
Ce régime a été mis en place à la suite du conseil des ministre du 04 avril 2018.
47
contractuels au même niveau de sécurité sociale. Les salariés du secteur privé ou
parapublic à savoir les agents contractuels de l’État qui relèvent du régime privé194
de la sécurité sociale de base ne pourront dans la réalité pas se prévaloir de ce seul
régime qui est d’ailleurs moins avantageux selon la situation juridique de l’assuré,
notamment les salariés parapublics.
En somme, l’analyse du système juridique et institutionnel de sécurité sociale du
Togo laisse planer à la surface une situation de déséquilibre entre les différents
acteurs sociaux. Toutefois cette situation permet également de réfléchir sur divers
éléments de solution en vue du rétablissement de la parité dans les prestations
sociales.
194.
Le Régime privé de sécurité social est celui de la CNSS.
48
PARTIE II.
UNE INÉGALITÉ SURMONTABLE À
L’ÉGARD DES REFORMES
49
La sécurité sociale n’est pas seulement un droit humain fondamental, elle aide
également à relever des défis socio-économiques très divers et, partant, à renforcer
la résilience de la société. Elle remplit d’autant mieux ce rôle lorsqu’elle offre une
couverture adéquate et complète de la population195. Le phénomène de la disparité
de la sécurité sociale entre les différentes couches socioprofessionnelles reste de nos
jours un véritable défi majeur que les acteurs de la sécurité sociale sont appelés à
relever. Le respect de l’égalité n’assure pas pour autant l’équité dans les prestations
sociales. Pour y parvenir, chaque État devrait mettre en place un système de sécurité
sociale adéquat en fonction des régimes de sécurité sociales existants afin d’assurer
au mieux une justice sociale d’égalité et d’équité entre les différents assurés.
L’inégal accès de la grande partie de la population socioprofessionnelle, nécessite
diverses reformes juridiques ou encore institutionnelles des services de sécurité
sociale. Ceci donnerait un espoir d’une meilleure participation financière196 de tous
les acteurs à une sécurité sociale adéquate. L’analyse globale du régime togolais
révélant un déséquilibre, de nombreuses pistes restent encore possible pour en
surmonter. C’est pourquoi dans le cadre de cette étude, le constat révèle d’énormes
défis qui restent encore à être relevés afin d’envisager une sécurité sociale plus ou
moins parfaite de la couche socioprofessionnelle garantissant un équilibre sociale
dans la protection sociale. Cette réalisation devrait prospérer par la véritable
réforme du système de sécurité social ainsi que la mise en place d’un mécanisme de
financement adapté à la situation de chaque travailleur.
C’est ainsi qu’il sera envisagé la mise en place d’un mécanisme d’extension de
la sécurité sociale à toutes les couches socioprofessionnelles (Chapitre I) avant de
revenir sur les grands axes de réformes du système de financement de la sécurité
sociale togolaise (Chapitre II).
195.
196.
Le rapport de Beveridge a permis à plusieurs États de réorganiser leur système de sécurité sociale en
vue d’assurer un système d’indemnisation efficace d’indemnisation des risques sociaux.
La question du financement de la sécurité sociale de type assurantiel se pose au niveau du financement
des travailleurs autonomes dont le taux reste identique à celui des travailleurs salaries dont une partie
des charges sociales est assurées par l’employeur.
50
CHAPITRE I. L’extension des assurances sociales
L’extension de la sécurité sociale reste aujourd’hui un défi majeur auquel font
face les différents acteurs principaux de la sécurité sociale. Elle vise de façon
générale à étendre la couverture sociale à l’ensemble de la population qu’elle soit
active ou non active et sans considération du revenu salarial. De façon plus
particulière dans le cadre de ce chapitre, les assurances sociales visent à étendre les
assurances à l’ensemble de toutes les catégories socioprofessionnelles. L’extension
se fait de façon progressive en y intégrant les entreprises de plus en plus petites car,
« ce sont justement ceux qui travaillent dans les petites entreprises qui sont les
moins bien payés et dont la sécurité de l’emploi est plus faible, et qui, par
conséquent, ont le plus besoin d’une couverture sociale » 197 L’analyse de cette
extension permettra d’en étudier la faisabilité à travers la mise en place d’un
système non contributif basé sur la solidarité198 (Section I) ainsi que la réforme du
cadre juridico-institutionnel de la sécurité sociale (Section II).
Section I : Une sécurité sociale non contributive basée sur la solidarité
Au sens de la sécurité sociale, la solidarité s’étend d’une part entre l’État et les
groupements socioprofessionnels, et d’autres parts, la solidarité interne entre les
différentes couches socioprofessionnelles elles-mêmes. Dans le cadre de cette
section d’étude, il sera question de distinguer la solidarité nationale entre l’État et
les groupes socioprofessionnels 199 (§ 1) ainsi que la solidarité interne socioprofessionnelle
entre les travailleurs200 eux-mêmes (§ 2).
§ 1. Un système de sécurité sociale par la solidarité nationale
« Les nombreuses personnes exclues du système de sécurité sociale, peuvent
compter sur l’assistance publique dont les mesures intéressent d’une part l’action
197.
198.
199.
200.
E. REYNAUD, « L’extension de la couverture de la sécurité sociale : la démarche du Bureau
international du Travail », p. 19.
La solidarité s’entend comme un devoir social ou une obligation réciproque d’aide et d’assistance ou
de collaboration gracieuse qui existe entre les personnes d’un groupe ou d’une communauté en raison
du lien qui les unit.
Cette solidarité doit s’entendre comme les différentes aides de toute nature que l’État doit apporter
aux différents travailleurs en renforcement de leur protection social souvent insuffisant.
La solidarité socioprofessionnelle entre les travailleurs reste interne entre les travailleurs eux même
par le système de mutualisation de risque.
51
de santé publique qui, en Afrique subsaharienne, est essentielle en absence
d’assurance maladie universelle, puis d’autre part, les mesures promues par le
service des affaires sociales. Ces deux formes d’assistance relèvent de la
responsabilité de l’État qui fait œuvre de solidarité nationale »201. De ce principe de
solidarité202, la sécurité sociale doit être assurée indépendamment à un revenu (A) et
en considération des besoins sociaux exprimés avec l’extension de la qualité
d’assuré social. (B)
A. Une sécurité sociale indépendamment à un emploi rémunéré
L’émergence démographique sans cesse accrue a laissé derrière elle une lourde
tasse de conséquences qui ont affecté la plupart des institutions de l’État au rang
desquelles celles en charge de la sécurité sociale ainsi que divers partenaires
sociaux. L’idée de l’intervention de la puissance publique est de développer une
culture de l’assurance et de la solidarité en matière de protection contre les risques
sociaux.203
Au Togo, l’on note une grande croissance de la population active qui se trouve
involontairement dans une situation de dépendance socioéconomique. L’absence
d’emploi d’une marge importante de la population active ne voudrait pas pour
autant dire que cette marge demeure exclue des prestations sociales pour n’avoir pas
cotisé depuis une certaine période. Le chômage reste un fléau, donc un risque social
au terme de la sécurité social qui devrait être indemnisé. C’est ainsi que le régime
de la solidarité 204 constitue un palliatif à l’absence de prestations sociales des
personnes sans emploi et qui sont en situation de demandeurs d’emploi. En prenant
pour base principale la solidarité, « le chômage n’y est plus considéré comme un
risque social relevant du principe d’assurance, mais comme la manifestation d’un
besoin, de nature alimentaire et fondé sur l’aide sociale.»205 Au sens de l’affiliation
il faut noter qu’elle est envisagée sous deux angles à savoir le sens étroit et le sens
201.
202.
203.
204.
205.
D. T. AGBODJAN, « Le droit à la sécurité sociale : principes internationaux et besoins sociaux en
Afrique subsaharienne » in « Revue Québécoise de Droit International » p. 159.
M. BORGUETTO, op. cit., p. 14.
E. REYNAUD, op. cit., P 03.
V. COHEN, « traitement social du chômage et devenir des chômeurs » in « mouvements », p. 142.
J.P. CHAUCHARD, J.Y. KERBOURC’H et C. WILLMANN, op.cit., p. 494.
52
large. Si le sens large vise l’affiliation à la sécurité sociale donc l’appartenance à
une catégorie socioprofessionnelle, il faut noter que le sens étroit est moins restrictif
et vise seulement l’affiliation à une caisse d’assurance et sur le fondement d’une
appartenance sociale notamment la citoyenneté. Les chômeurs dépourvus d’une
qualification professionnelle appropriés gardent alors cette possibilité d’affiliation
au sens étroit fondée sur l’appartenance citoyenne206. Le régime de solidarité est un
régime à la charge de l’État et qui est géré par une institution spécialisée 207 , ce
régime parce qu’il sert des prestations à des chômeurs n’ayant pas acquis ou ayant
épuisé leurs droits aux prestations repose sur la solidarité nationale 208 . L’État y
demeure alors un principal acteur et créancier des prestations aux différents
chômeurs au nom de la solidarité nationale dont il a la charge 209 . Cependant
l’assurance chômage devrait permettre au Togo, l’indemnisation de toute personne
en situation de demandeur d’emploi. Le chômage reste un véritable souci auquel le
monde de la sécurité sociale togolaise devrait faire face car le législateur n’ayant
prévu aucune disposition expresse. La solidarité nationale viendrait donc au secours
des personnes qui n’ont pu cotiser du moment où l’assurance répond aux normes
d’une exigence contributive, donc d’une affiliation obligatoire liée à un emploi
rémunéré. Toutefois il convient de rappeler que le terme « chômage » reste de nos
jours un terme à connotations divers qui n’a pu véritablement avoir une définition
concrète au sens de la loi. Le bureau international du travail en a donné un sens plus
ou moins restreint en considérant le chômage comme la situation d’une personne
qui se retrouve sans emploi, recherchant de l’emploi et disponible à court terme. Il
est alors plus clair que les qualités de chômeur devraient alors satisfaire aux normes
requis par le BIT aussi bien en matière de demande d’emploi que de sécurité sociale
dans le cadre de cette étude. Toute personne sans emploi et n’ayant aucune
qualification requise ne devrait être assimilée à un chômeur. Il devrait être un
régime spécial bénéficiant aux chômeurs qui ne remplissent pas ou ne remplissent
206.
207.
208.
209.
J.P. LABORDE, op.cit., p. 167.
En France, le régime de solidarité a été institué en 1984 à la charge de l’État et géré par pôle emploi.
Voir en ce sens N. KERSCHEN, « Beveridge hier et aujourd’hui », p.p. 01 à 07.
V. COHEN, op. cit., p. 142
53
plus les conditions propres au régime d’assurance 210 . Ce régime devrait être
structuré en diverses prestations bénéficiant aux chômeurs à savoir l’allocation
spécifique de solidarité (ASS) au profit des chômeurs de longues durée , de
l’allocation de fin de formation versée aux demandeurs d’emploi. La solidarité
nationale est alors appréhendée comme un outil d’établissement de la justice sociale
par l’intervention active de l’État en matière de sécurité sociale à travers la
redistribution du revenu national. La solidarité nationale devient alors un système
beaucoup plus d’assistance publique basée sur le modèle de W. Beveridge 211 de
l’universalisation de la sécurité sociale212.
B. Une extension de la qualité d’assuré social
Dans la conception « beveridgienne » de la sécurité sociale, l’extension de la
sécurité sociale est beaucoup plus générale et vise une protection de l’ensemble de
la population qu’elle soit active ou non. Cependant, dans le cadre de cette étude et
dans une conception socioprofessionnelle, on peut toutefois envisager l’extension
de la qualité d’assuré social sans la nécessité d’une activité professionnelle
préalable lorsque l’intéressé est invité à prendre lui-même s’il le souhaite cette
qualité. C’est aussi le cas lorsque cette qualité est attribuée en considération de la
situation spécifique autre que professionnelle à savoir l’état de besoin. C’est en effet
une
technique
extensive
qui
permettra
à
toute
personne
de
s’assurer
personnellement auprès du régime général pour certaines prestation en nature telles
que l’assurance maladie et la maternité à tous ceux qui ne peuvent prétendre à une
affiliation de plein droit. Cependant, il est à noter que ce dispositif d’assurance
personnelle ne devrait être confondu avec celui de l’assurance volontaire qui existe
déjà et qui est beaucoup plus aménagé à des personnes ayant rempli des conditions
d’affiliation par le passé. L’assurance volontaire213 se doit donc, de se voir élargit le
210.
211.
212.
213.
Idem.
William Lord Beveridge, économiste anglais est l’auteur d’un rapport sur la sécurité sociale en 1941.
Son plan de sécurité sociale s’inscrivait dans une politique d’ensemble à dominante économique
(inspirée des idées keynésiennes) visant à éliminer la pauvreté. Le principe du système était de couvrir
tous les citoyens automatiquement, sans obligation de cotisations préalables et sans lien avec la
profession, la protection sociale étant majoritairement financée par l’impôt.
B. LAUTIER, « Universalisation de la protection sociale et protection des plus vulnérables », in
« Revue Tiers Monde » 2013/2 n°214 de Armand Colin, p. 188.
Son régime reste toujours lié à l’activité professionnelle exercée par l’assuré entre temps.
54
champ d’application à toute personne intéressée même n’ayant pas remplis des
conditions d’assujettissement et de cotisation. L’exemple illustratif est la loi
française n°78-2 du 02 janvier 1978 relative à la généralisation de la sécurité214.
Pour une couverture beaucoup plus équilibrée il faut noter donc que le nouvel
assuré devrait se voir bénéficier de certaines exonérations lorsque par exemple ses
revenus ne dépassent pas un certain seuil comme par exemple le SMIG qui est
établi aujourd’hui à une valeur financière d’au moins à 35000 FCFA. L’analyse
statistique révèle cependant un accroissement de risques pour des travailleurs qui se
retrouvent avec des revenus très modestes donc un taux élevé de risque contre une
prestation moindre même inexistante. L’une des difficultés majeures reste la sous
affiliation et la non-couverture de certaines catégories de travailleurs notamment les
travailleurs des PME qui se retrouvent avec des revenus insignifiants qui ne peuvent
véritablement faire face à leur sécurité sociale. L’assurance personnelle auprès d’un
régime spéciale contribuerait alors à l’amélioration d’une sécurité sociale adéquate
à cette catégorie délaissée de certains risques sociaux liés à leurs activités
professionnelles. Les travailleurs du secteur informel bien que bénéficiant d’un
régime de prestation légale très réduit devrait se prévaloir d’une assurance
personnelle complémentaire en vue de prétendre aux prestations non pris en compte
tels que les risques professionnels215.
En dehors de la solidarité nationale qui met en œuvre l’intervention des
différents acteurs sociaux de la sécurité sociale aux rangs desquels on retrouve
l’État ainsi que le législateur, les acteurs socioprofessionnels se doivent de cultiver
une solidarité interprofessionnelle entre eux à divers niveaux d’échelles.
§ 2. Un système de sécurité sociale par la solidarité socioprofessionnelle
« En l’absence de relation d’emploi suffisamment stable, une des principales
préoccupations des actifs du secteur informel des pays en développement est
214.
215.
Cette loi rompt avec le principe d’assurance sociale selon le modèle bismarckien et permet l’affiliation
de toute personne résidant sur le territoire français même sans activité professionnelle, ce qui leur
ouvrait le droit aux prestations familiales.
Le législateur de 2011 bien qu’ayant étendu la sécurité sociale aux travailleurs informels ne leur
accorde pas le bénéfice des prestations contre les risques professionnels.
55
d’assurer la continuité dans le temps de leurs ressources monétaires » 216 . La
solidarité socioprofessionnelle dans le cadre de la sécurité sociale s’est exprimée
depuis longtemps à divers niveaux. Elle s’est exprimée d’abord par une interaction
collective et solidaire entre les différents agents professionnels ainsi qu’entre
différents organismes professionnelles à travers les mutuelles d’entreprises.
Cependant il faut relever que cette solidarité a été d’une faible importance et
inefficacité à divers endroit de la société professionnelle. L’objectif de ce
paragraphe est alors de mettre en places des mécanismes permettant le renforcement
du système de protection par solidarité socioprofessionnelle que sont la solidarité
interindividuelle (A) et la solidarité interprofessionnelle (B).
A. Le renforcement des solidarités interindividuelles
L’avènement du lien social, des solidarités familiales ainsi que le désir
d’intégration et d’appartenance au groupe social constituent les différents faits
générateurs qui ont su générer les solidarités internes entres les différents individus
de la couche socio professionnelle. Certes ce mérite essentiel que nous avons de
cette solidarité reste d’abord la volonté indéniable des différents individus, mais il
faut cependant relever l’inefficacité de celle-ci qui mérite des renforcements
notoires. « La société démocratique travaillée par des effets du modèle industriel,
affronte dans le même temps la question du lien social217, ce par quoi les individus
sont inclus dans un réseau de droit et d’obligations réciproques qui assurent au
plus près leur socialisation et leur protection » 218 . La dissolution du lien social
qu’elle soit volontaire ou involontaire constitue un phénomène qui éloigne des
personnes isolées d’une sécurité sociale convenable. La sécurité sociale reste alors
liée à des formes d’appartenance et de constitution d’un tissu social soudé.
L’individu qui se socialise en intégrant un groupe social assure également sa
sécurité sociale à travers le groupe social qui le protège. La famille constitue alors
216.
217.
218.
Y. GUICHAOUA, « solidarité professionnelle et partage des risques parmi les travailleurs informels :
une étude de cas à Abidjan » in « Autre part » p. 203.
Le lien social pouvant exister entre les différents individus de la société est envisagé comment un fait
social qui oblige toute personne à porter assistance à l’autre. Les travailleurs forment donc entre eux
sans distinction de catégorie un tissu social les obligeant à mettre ensemble tout risque social pouvant
intervenir dans la vie de l’un ou l’autre des travailleurs.
J.J. DUPEYROUX, M. BORGETTO et R. LAFORE, op.cit., p. 115.
56
un groupe social d’individu au sein duquel la solidarité occupe une place
importante219, dans le même champ en constituant une principale base de la sécurité
sociale. Les risques sociaux même inhérents à la personne, se voient socialisé pour
être des risques collectifs donc assurés par le groupe social. La famille est un lieu de
solidarité immédiates où se produisent et distribuent les moyens d’existence
matériel et symbolique220. Émanant de la sphère politique en charge des intérêts de
la collectivité, un ensemble d’interventions, mixant le judiciaire et l’administratif,
vont venir assurer les protections et pallier les carences éducatives du groupe
familial. Le travailleur salarié quelle que soit sa nature est un membre social qui
doit cultiver l’esprit familial par la cohésion sociale, l’intégration totale à une unité
sociale et solidaire. Ceci réconforte ainsi sa sécurité sociale du moment où les
différents risques sociaux susceptibles d’intervenir dans la vie du salarié sont
socialisés par son groupe sociale d’appartenance. Avec l’affaiblissement de « la
sociabilité primaire » des vieilles sociétés paysannes, les sociétés démocratiques
doivent alors passer à un régime de « sociabilité secondaire ». Cette intégration
constitue une société érigée en un problème auquel la collectivité doit y faire face
pour la prise en charge221.
En dehors de la solidarité interindividuelle comme gage d’une meilleure
protection sociale, il faut noter qu’il existe également une forme de régulation de
sécurité sociale entre les organismes professionnels qui se traduit par la solidarité
interprofessionnelle entre les différentes entreprises.
B. Le renforcement des solidarités interprofessionnelles
« D’une logique de mutualisation des risques, de type assurantielle, entre les
travailleurs, le système de protection sociale évolue vers une part accrue de
solidarité, qui vise à renforcer la cohésion sociale au profit de ceux qui en seraient
exclus, quelles qu’en soient les raisons.»222 Outre la conception de l’égalité comme
219.
220.
221.
222.
Y. GUICHAOUA, op.cit., p. 194.
I. THERY, « transformation de la famille et « solidarité familiale » : question sur un concept », in
Repenser la solidarité(2007), p. 149.
J.J. DUPEYROUX, M. BORGETTO et R. LAFORE, op.cit., p. 113.
A. DUTHILLEUL, Le financement de la protection sociale, avis et rapports du conseil économique
et social, p. 11.
57
le traitement identique de deux personnes se trouvant dans la situation identique,
« l’égalité d’accès à une protection sociale s’est incarnée dans une égalité
catégorielle de portée plus restreinte qui, mettant en solidarité les membres de
chaque catégorie, assurait entre eux une protection similaire, tout en autorisant de
fortes différences entre catégories »223. Dans le cadre de la législation togolaise il
faut dire que cette pratique reste encore méconnue de la plupart des acteurs sociaux
ou mieux les quelques formes existantes manquent encore d’une base juridique
fiable pour faciliter le bon fonctionnement. Similaire au régime des assurances
sociales, elles fonctionnent sur la base des cotisations sociales versée par les
membres ainsi que dans leurs intérêts par des actions de prévoyance, de solidarité.
L’avènement
des
mutuelles
favoriserait
une
meilleure
sécurité
sociale
complémentaire au régime général légal dans la mesure où elles permettaient de
réaliser certaines opérations d’assurance telles que la couverture des risques de
dommage corporels ainsi que des risques de perte de revenus par l’assurance
chômage 224 . Le fonctionnement étant subdivisé en prévoyance individuelle et
prévoyance collective225, il faut noter que les entreprises optent pour la prévoyance
collective de tous les salariés de l’entreprise de façon solidaire. Dans le cas
d’opérations individuelles, l’adhérant signe un bulletin d’adhésions et acquiert la
qualité de membre participant ; dans le cas d’opérations collectives vivement
recommandées aux chefs d’entreprises et aux employeurs, les salariés deviennent
membre participants de la mutuelle soit d’une adhésion obligatoire pour laquelle
tous les salariés sont tenus d’être affiliés à une mutuelle en vertu des dispositions
réglementaires législative ou des convention collectives soit encore par la décision
unilatérale de l’employeur. Les mutuelles d’entreprises 226 exercent donc leurs
activités dans l’intérêt des salariés ou encore des anciens salariés d’une entreprise
déterminée ainsi que les familles de ces salariés. Elles exercent leurs activités sous
223.
224.
225.
226.
R. LAFORE, « Le principe d’égalité dans la Sécurité sociale : incertitudes et ambiguïtés de sa
construction contentieuse » in « Le Droit Ouvrier », p. 436.
J.J. DUPEYROUX, M. BORGETTO et R. LAFORE, op.cit., p. 1097.
Idem, P. 1098.
Les mutuelles d’entreprises sont envisagées comme des systèmes de protection complémentaire mise
en place par des employeurs en vue d’assurer le complément de la couverture par le régime légal de
base.
58
le contrôle d’un comité d’entreprise. Assurant presque toutes les prestations de
sécurité sociale, les mutuelles viennent renforcer, voire compléter les prestations
sociales de certains salariés dont le régime général n’en prévoit pas. Les travailleurs
de l’économie informelle ne bénéficiant pas des prestations de sécurité sociale
contre les risques professionnels gardent cette possibilité de se voir indemniser à
travers la prévoyance individuelle auprès d’une mutuelle. Le Togo devrait alors
adopter une loi spécifique sur la mutuelle obligatoire en entreprise qui obligerait
tous les employeurs à proposer une couverture complémentaire de tous les salariés
en complément de leur affiliation à la sécurité sociale227. La complémentaire santé
collective choisie par l’employeur est obligatoire pour l’ensemble des salariés de
l’entreprise, sauf dans le cas d'une dispense de cotisation demandée par le salarié
auprès de l’employeur. En ce qui concerne évidemment les salariés indépendants,
ils pourront cependant souscrire à une mutuelle spéciale 228 dont les cotisations
seront déductibles du revenu imposable.
En vue de faciliter une sécurité sociale paritaire et équilibrée sur la base de la
solidarité évoquée, il parait ainsi nécessaire dans le système togolais à une meilleure
adaptation par la mise en place d’une reforme tant sur le plan normatif
qu’institutionnel qui fera l’objet de la section suivante.
Section II. Une réforme du cadre juridico-institutionnel de sécurité sociale
Aux vues des différentes disparités constatées et dans le souci de passer à une
étape de prestations sociales beaucoup plus équilibrée, il est bien évidemment
nécessaires pour l’État togolais de procéder à la reformes des différents cadres
intervenant dans le domaine de la sécurité sociale. Les plus importantes reformes
devraient alors envisager le domaine législatifs (§ 1) en passant par la mise en
227.




228.
En France, depuis le 1er janvier 2016, la loi sur la mutuelle obligatoire oblige l’employeur à proposer
une couverture complémentaire santé collective à tous ses salariés, en complément de leur affiliation à
la sécurité sociale. La loi vise toutes les entreprises, quelle que soit leur taille : TPE, PME ou grandes
entreprises. L’employeur choisit l’organisme d’assurance de son choix, mais le contrat doit
obligatoirement prévoir :
Une cotisation de la part de l’employeur à hauteur de 50 % minimum (le salarié paye le reste),
Des garanties minimums,
De couvrir tous les salariés et leurs ayants droit,
La mutuelle obligatoire pour le conjoint.
C’est l’exemple de la mutuelle Madelin en France pour les travailleurs non-salariés.
59
places et l’assainissement des différentes institutions (§ 2) capables de gérer à bien
cette mission de justice sociale aux sein du monde socio professionnel.
§ 1. La réforme du cadre juridique
Les inégalités de traitements intervenues çà et là dans les différentes normes
d’assujettissement, avec l’exclusion d’une fraction importante du monde
socioprofessionnel ainsi que la fusion en un régime unique général illustre le
caractère lacunaire des textes actuels de la sécurité sociale. La réforme du cadre
normatif de la sécurité sociale des salariés togolais en vue d’assurer un traitement
équitable et égalitaire entre les différentes couches socioprofessionnelle ne devrait
s’opérer sans passer par
l’extension juridique du champ d’assujettissement à
toutes les catégories socio professionnelles (A) ainsi que la mise en place des
régimes spéciaux (B) pour cette catégories de travailleurs en raison de la spécificité
juridique de leurs activités professionnelles.
A. L’élargissement du champ d’assujettissement
En l’état actuel du système de sécurité sociale basé sur un « modèle
d’assurance » 229 il est bien évident que le critère principal reste la capacité
participative aux cotisations sociales. L’originalité de l’assujettissement au droit de
la sécurité sociale togolaise à travers l’ordonnance n° 39/73 du 12 novembre 1973
modifiée par la loi n° 2001 -12, du 29 novembre 2001 et la loi n° 2008-004 du 30
mai 2008 repose de façon stricte sur un contrat de travail au sens du droit de
travail230, c'est-à-dire la prestation en vertu d’un contrat de travail d’une activité
sous la subordination juridique d’un employeur moyennant une rémunération.
Certes le législateur de 2011 à travers la loi n°2011-006 portant code de sécurité
sociale du Togo est venu résoudre un tout petit peu cette situation d’exclusion avec
l’intégration du champ d’application de certaines catégories de travailleurs
notamment les indépendants et les travailleurs des secteurs informels ainsi que les
ministères de cultes, mais relevons que cela reste encore insuffisant au regard
229.
230.
Modèle de sécurité sociale obligatoire mise en place par l’Allemand Otto Von Bismarck et qui est
fondé sur le travail et sur la capacité des individus à s’ouvrir des droits grâce à leurs activités
professionnelles. Elle est obligatoire et repose sur la participation financière des ouvriers et
employeurs sous la forme de cotisations sociales.
Art 34 de la loi N°2006-010 portant code du travail du Togo.
60
d’autres types de travailleurs qui ne se trouvent pas couverts par la sécurité sociale.
Il faut alors noter que « la sécurité sociale ressent par répercussion la mutation
profonde que subissent, à l’heure actuelle et depuis plusieurs années déjà, les
relations de travail».231L’évolution du monde technologique emporte avec celle la
multiplication de diverses formes de travail que d’autres doctrinaires n’hésitent pas
à qualifier d’ « emploie traditionnel ».
En conséquence, face aux nouvelles formes de travail, la régularisation des
rapports de travail basée sur la dichotomie classique entre travail salarié et travail
indépendant est remise en cause ainsi que son critère essentiel qui est la
subordination juridique. Si la jurisprudence du droit du travail se voit divisé sur le
critère de subordination à retenir dans la qualification d’un travailleur salarié à
savoir la subordination juridique 232 ou encore celle économique 233 , le droit de la
sécurité social devrait quant à lui visé beaucoup plus le second critère qui est la
subordination économique car la finalité étant la participation économique aux
cotisations sociales.
C’est alors sur cette base que le législateur devrait considérer comme travailleur
au sens du droit à la sécurité sociale certaines personnes à savoir les dirigeants des
sociétés commerciales à savoir les gérants des sociétés à responsabilité limitée ainsi
que ceux des personnes, les membres de conseil d'administration ainsi que les
administrateurs généraux. L’idée de l’extension du champ d’application vise
l’assujettissement de certaines catégories comme travail sous le critère de la
présomption d’un contrat de travail en fonction de la nature de l’activité. Il est donc
clair que l’idée de cette réforme ne viserait donc que d’établir une justice sociale
entre les travailleurs en luttant contre le phénomène de faux indépendant. 234 L’idée
231.
232.
233.
234.
J.F. NEVEN et S. GILSON, La sécurité sociale des travailleurs salariés : assujettissement,
cotisations, sanctions, Larcier, p. 125.
Arrêt Bardou Cass. Soc. 06 juillet 1931, «La condition juridique d’un travailleur à l’égard de la
personne pour laquelle il travail ne saurait être déterminé par la faiblesse ou la dépendance
économique dudit travailleur et ne peut résulter que du contrat conclu entre les parties ; (…) la
qualité de salarié implique nécessairement l’existence d’un lien juridique de subordination du
travailleur à la personne qui l’emploie ».
Arrêt Labane Cass. Soc. 19 décembre 2000 l’arrêt Labanne s’écarte de la logique de l’arrêt Bardou et
retient indirectement la subordination économique comme critère essentiel de qualification d’un
contrat de travail.
A. WATTEYNE, « Des faux indépendants, ou aux frontières imprécises du contrat de travail et du
statut de travailleur indépendant », Chron. D.S., 1992 p. 01.
61
de l’extension pourrait alors viser également certaines catégories de travailleur à
savoir ceux qui sans être lié par un contrat de travail fournissent contre
rémunération des prestations de travail sous l’autorité d’une autre personne. Certes,
il est bien vrai qu’avec la réforme législative de 2011, toutes ces catégories visées
peuvent légalement se voir assujettis au titre de travailleurs indépendant, mais la
vraie justice sociale pourrait donc être envisagée en leur intégrant de façons
assimilés au champ des travailleurs salariés afin qu’ils bénéficient des avantages
dans le traitement de leur sécurité sociale notamment en ce qui concerne la
participation financière ou l’employeur y participe également.
La diversité des travailleurs avec pluralité des secteurs d’activités
socioprofessionnelles existant devrait de nature amener le législateur à la mise en
place des régimes spéciaux en fonction de la nature du travailleur ainsi que le
secteur d’activité.
B. La mise en place de régimes spéciaux et autonomes
La diversité des catégories de travailleurs assujetties à la sécurité sociale avec
divers secteurs d’activités ne pourrait être organisée de façon égalitaire et paritaire
autour d’un seul régime. C’est ainsi qu’en se basant sur l’organisation et la
législation actuelle de la sécurité sociale togolaise, les travailleurs salariés au sens
du droit du travail, les travailleurs indépendants et ceux des secteurs informels , les
travailleurs libéraux, les élèves et apprentis des écoles de formation professionnelle
et les ministres des cultes ne peuvent être confondues autour d’un régime unique qui
est le régime générale avec une organisation presque identique pour toute catégorie
d’assurée. L’absorption de tous les assurés dans un régime général unique de
traitement serait de nature à compromettre l’égalité de prestation sociale entre les
travailleurs salariés. L’égalité de traitement peut donc être liée à la catégorie de
salarié assurée ou encore à la nature de l’activité exercée, ce qui devrait alors
nécessiter un régime particulier pour certaines catégories de travailleurs. En France,
l’intention du législateur de 1945, qui était celle d’unifier et simplifier le système de
sécurité social en un régime unique, s’est vue heurtée par l’opposition de plusieurs
62
catégories de professions qui refusaient cette idée d’absorption 235 . « La place
qu’occupent les régimes spéciaux au sein des régimes de sécurité sociale est
importante car ils prennent en charge près de 5 millions de personnes… »236 La
spécialité d’un régime apparait total lorsque l’ensemble des risques sociaux définis
par la loi entrent dans le champ du régime, ou partielle. Dans ce dernier cas, c’est le
régime général qui prend à sa charge des risques non couverts et qui donne à la
spécialité sa mesure 237 . Dans le contexte togolais, les travailleurs de l’économie
informelle devrait se voir doté d’un régime spéciale pour la prise en charge des
risques professionnels ainsi que d’autres avantages qui ne sont pas pris en compte
par le régime général. Pour une meilleure prise en charge sociale, les élèves des
écoles de formations professionnelles, les apprentis et stagiaires se trouvent
également dans le droit d’être affilié à un régime spécifique pour la prise en charges
d’autres risques sociaux qui ne leur sont pas accordés par le régime général. La
spécificité et l’autonomie financière accordée aux régimes spéciaux garantissent aux
assurées une sécurité sociale plus meilleure et adaptée à leurs situations. C’est la
principale raison d’être des régimes spéciaux qui servent, d’une manière générale
des prestations plus élevées que tout autre régime légal, y compris le régime
général. L’absorption du régime des indépendants par le régime général témoigne
de la volonté de fusionner les deux catégories de travailleurs à savoir les travailleurs
salariés qui relèvent légalement du régime général obligatoire et les travailleurs
indépendants dont le régime juridique est beaucoup plus particulier. Il devient alors
beaucoup plus impérieux au législateur de doter cette particularité de travailleurs
d’un régime de sécurité sociale propre à lui. Ceci a été le cas de la situation
française avec la création du régime social des indépendants (RSI)238.
235.
236.
237.
238.
Ce refus a été maintenu et traduit par l’art. 17, ord. 17 octobre 1945 (Art L. 711-1 CSS)
J.P. CHAUCHARD, J.Y. KERBOURC’H et C WILLMANN, op.cit., p. 167.
Idem. p. 168.
Le RSI français a été créé par l’ordonnance du 08 décembre 2005, il est né de la volonté du législateur
et du consentement des professionnels indépendants de confondre trois régime spéciaux à savoir le
régime maladie-maternité, le régime vieillesse-invalidité –décès des artisans et le régime vieillesseinvalidité-décès des commerçants et industriels en un seul régime autonome.
63
Outre un besoin de simplification, (le recouvrement des charges sociales étant
source de complexité), la reforme obéit à une volonté de voir promu le travail
indépendant et la petite entreprise239.
Après la réforme du cadre normatif par l’extension juridique de champ de
l’assujettissement à d’autres catégories de travailleurs, ainsi que la mise en place
des régimes spéciaux, quid alors de la réforme du cadre institutionnel.
§ 2. La réforme du cadre institutionnel
La réforme du cadre institutionnel de la sécurité sociale togolaise peut être
analysée à plusieurs niveaux avec la mise en place de plusieurs institutions
adéquates pour assurer une meilleure sécurité sociale des travailleurs. Cependant,
dans le cadre de cette étude, la réforme envisagée se situe à deux niveaux à savoir la
mise en place des caisses spécialisées de prestations sociales (A) ainsi que
l’organisation adaptée des institutions en charge du contentieux de la sécurité
sociale togolaise (B).
A. La mise en place de caisses spécialisées pour chaque régime
La réorganisation institutionnelle de la sécurité sociale togolaise ne devrait
prospérer sans l’idée de la mise en place des caisses spécialisées. C’est dire alors
que normalement chaque régime spécial et autonome devrait alors être adapté par sa
caisse spécialisée. L’autonomie des régimes spéciaux est sous entendue également
une autonomie financière qui ne saurait être géré globalement avec la caisse unique
du régime générale. Dans les législations togolaises, bien que prévue une gestion
financière et autonome de chaque branche240 , il est quand même fort probable de
douter de la réalité de l’autonomie financière de chaque branche de prestation
d’autant plus qu’elles sont toutes gérées en interne au sein de la caisse unique du
régime générale. La vraie autonomie se matérialisera par la mise en place véritable
de chaque caisse en fonction du régime et de la branche de prestation. À titre
d’exemple le régime social des travailleurs indépendants étant un régime spécial et
autonome doit se voir gérer par une caisse spéciale et autonome à cet effet qui
239.
240.
D. POSTEL-VINAY, « La création du régime social des indépendants : un essai à transformer ? »,
Dr. Soc. 2007, p. 07.
Art. 25 de loi n°2011-006 portant code de sécurité sociale du Togo.
64
n’aura point d’interférence avec la caisse générale du régime général qui
normalement s’occupe du régime des travailleurs salarié. La répartition
institutionnelle bien qu’existant à travers l’implantation des caisses régionales de
sécurité sociales fonctionnent toujours sur la même base du régime générale avec la
caisse unique qui est la caisse nationale de sécurité sociale dont le siège se trouve à
Lomé. L’ensemble des assurances sociales devient alors trop condensé pour être
gérer par une caisse unique du ressort du régime générale. La caisse nationale se
doit donc de subir un démembrement pour laisser place à d’autres institutions
financières spécialisées et adaptée à chaque situation. C’est l’exemple dans la
législation française ou la caisse nationale d’allocation familiale est issue du
démembrement de l’ancienne caisse nationale de sécurité sociale241. Les différents
risques issus du régime général sont appelés à être gérés par des caisses spécialisées
qui devraient être mise en place par le système de sécurité en place. La même
organisation devrait être envisagé au niveau de la caisse de retraite du Togo qui
s’occupe des agents de la fonction publique dont le statut juridique est gouverné
par le statut général de la fonction publique dont l’objet de cette réflexion ne s’y
attelle pas totalement, mais il faut relever que dans le cas des agents contractuels de
l’État qui relève d’un régime parapublic, elle favoriserait leurs meilleures gestions
en matière de la sécurité sociale.
En plus de la mise en place des caisses spécialisées pour la gestion de différents
régimes existant, il faut dire qu’il s’avère très important pour le système
juridictionnel togolais de mettre en places des juridictions spécialisées en vue de
faire face de façon efficace à un contentieux de la sécurité sociale bien organisé.
B. La réorganisation du contentieux de la sécurité sociale
Le juge reste le garant principal de l’égalité devant la loi de tous les citoyens de
façon générale et plus particulièrement dans le champ de cette étude, un garant
principal de l’égalité de traitement 242 de tous les assurés sociaux devant les
différentes institutions en charge de la sécurité sociale des salariés. « En 1968, dans
241.
242.
J.P. CHAUCHARD, J.Y. KERBOURC’H et C. WILLMANN, op.cit., p. 113.
J. BARTHÉLÉMY, « Le principe d’égalité de traitement » in «Les Cahiers du DRH » - n° 157 Septembre 2009, pp. 31 à 41.
65
un article intitulé [l’inégalité dans le droit de la sécurité sociale],J. BORDELOUP
montrait la spécificité du contentieux de la sécurité sociale ; il décrivait les
difficultés des juridictions judiciaires pour apprécier les modes de fonctionnement
du service public de la sécurité sociale, qui place nécessairement l’usager dans une
situation d’infériorité, alors que les techniques privatistes sont associées au
principe d’égalité des plaideurs.»243 Pour parvenir à cette noble mission, il devient
alors plus que nécessaire de mettre à sa disposition les outils nécessaires afin de lui
permettre de mener à bien son rôle dans de bonnes conditions. Le contentieux de la
sécurité sociale togolaise est organisé de façon classique. « Les litiges auxquels
donne lieu l‘application des législations et réglementations de sécurité sociale
visant les assurés, les employeurs et la Caisse, à l‘exception des affaires pénales et
des litiges qui appartiennent exclusivement par leur nature à un autre contentieux,
sont de la compétence du Tribunal du travail dans le ressort duquel se trouve le
domicile de l‘assuré ou de l‘employeur intéressé »244. L’analyse de cette disposition
donne clairement la compétence matérielle de tout litige lié à l’interprétation de la
loi portant code de sécurité sociale au Togo au Tribunal du travail dans les mêmes
conditions que tout litige relatif au droit du travail. Par ailleurs, il est prévu que « les
contestations d'ordre médical relatives à l‘assuré, notamment à la date de
consolidation en cas de réalisation d'un risque professionnel, au taux d'incapacité
permanente, à l'existence ou à la gravité de l'invalidité, à l’existence d'une usure
prématurée des facultés physiques ou mentales, donnent lieu à l'application d'une
procédure d'expertise médicale.» Cette disposition révèle un aspect technique du
contentieux de la sécurité sociale qui est lié à l’état de santé de l’assuré et laissant
ainsi la compétence de telles contestations à un expert médical neutre aux parties
qui sont la CNSS et l’assuré. Le contentieux technique lié à l’incapacité a beaucoup
plus un aspect médical245. « Méconnu des juristes, il traite pourtant des difficultés
qui touchent les justiciables les plus précaires.»246
243.
244.
245.
246.
I. SAYN, « Accès au juge et accès au droit dans le contentieux de la protection sociale » in « RFAS no
3-2004 », p. 113.
Voir l’art. 93 de la loi n°2011-006 portant code de sécurité sociale du Togo.
M. KEIM-BAGOT, «Le contentieux technique de la sécurité sociale : un contentieux en péril ?», in «
Regards », p. 61.
Idem.
66
Le contentieux de la sécurité sociale togolaise reste marqué par des difficultés
liées à « l’inégalité structurelle qui existe entre les moyens juridiques et
économiques à la disposition de l’organisation gestionnaire de la prestation et la
personne privée.»247 Le contentieux de la sécurité sociale togolaise nécessite une
organisation bien structurée, tendant vers sa spécialisation 248. « La multiplication
des juridictions et la complexité des règles de compétences qu’elle suscite,
favorisent la disparition institutionnelle de ces [petites] juridictions, devenues des
juridictions [défavorisées], sous-dotées, éventuellement sous-qualifiées, parfois et
pour grossir le trait, ravalées au rang de [juridictions non identifiées] »249. Le juge
tout en garantissant l’accès équilibré des parties au procès, participe également au
rééquilibrage des armes afin d’assurer l’égalité juridique des parties au procès250.
« En France, la volonté de favoriser l’accès au juge dans le contentieux de la
protection sociale a conduit à créer des juridictions spécifiques, présumées plus
proches des justiciables, où le recours à un avocat n’est jamais obligatoire.»251Ce
contentieux reste divisé entre plusieurs juridictions avec parfois des ordres de
juridictions différents 252 . « La décision de séparer le contentieux de la sécurité
sociale du contentieux de travail au sein des chambres civiles de la Cour de
cassation, le second restant à la chambre sociale tandis que le premier est
dorénavant affecté à une autre chambre civile de la Cour ne peut, semble-t-il, que
renforcer ce constat »253
À l’image du système français 254 de la sécurité sociale, l’institution d’un
Tribunal spécial en charge de la sécurité sociale avec bien sûr un juge spécialisé du
247.
248.
249.
250.
251.
252.
253.
254.
I. SAYN, op.cit., P .114.
Idem.
Idem, p. 125.
Idem, p. 124.
Idem.
D’une part le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS), pour le contentieux général, à côté des
juridictions du contentieux technique mais aussi du tribunal de grande instance ou même du juge aux
affaires familiales ; d’autre part, les juridictions d’aide sociale (commissions départementales et
commission centrale d’aide sociale) et le tribunal administratif.
I. SAYN, op.cit., p .125.
L’ancienne organisation du contentieux de la sécurité sociale française retoupait le contentieux de la
sécurité social en deux grands contentieux de ressorts juridictionnels différents à savoir le contentieux
général de la sécurité sociale soumis au Tribunal des affaires de sécurité sociale et le contentieux
technique de l’incapacité soumis au Tribunal du contentieux de l’incapacité.
67
contentieux de la sécurité sociale devient plus que nécessaire dans la mesure où ce
contentieux présente divers angles de spécialités.
Plusieurs mécanismes aurait permis de mettre en place un système de sécurité
sociale beaucoup plus extensif à l’endroit de toutes les couches socio
professionnelles. En raisons de l’immense diversité de ces dernières avec de sources
de revenus différentes, une reforme beaucoup plus adaptée du système de
financement de chaque catégorie contribuerait encore plus à une sécurité sociale
encore plus paritaire et meilleure.
68
CHAPITRE II. La réforme du système de financement
« La question de l’égalité, et plus largement des normes de justice qui
commandent la protection sociale, doit, au-delà des prestations qui sont délivrées,
être envisagée du point de vue des contributions qui constituent les ressources du
système »255. Pour ce faire, divers acteurs du monde de la sécurité sociale se sentent
interpelés avec la mise en œuvre des moyens nécessaires qui permettront de lutter
contre ces inégalités créées via les disproportions constatées dans le financement256
de la sécurité sociale. L’État257 à travers le législateur reste alors le premier acteur
interpellé du fait de son rôle indéniable dans l’instauration de la justice et la paix
sociale. À cet effet, une véritable loi de finance de la sécurité sociale, jusque-là
encore méconnue du monde de la sécurité sociale togolaise devrait voir le jour avec
la prise en compte des réalités juridiques et sociales de chaque régime de sécurité
sociale ainsi que de celle de la catégorie 258 du salarié y affilié. L’objectif de ce
chapitre est alors de montrer que cette réforme législative devrait introduire un
système de rééquilibrage du financement de la sécurité sociale togolaise (section I)
ainsi qu’une gestion efficace des ressources financières de la sécurité sociale
togolaise (section II).
Section I. Un rééquilibrage du financement de la sécurité sociale togolaise
Le rééquilibrage du financement des branches et régimes de la sécurité sociale
devrait beaucoup plus s’appesantir sur la capacité financière de chaque assuré. Le
système togolais de la sécurité sociale étant essentiellement déclaratif, l’assiette des
cotisations sociales est basée sur les salaires 259 déclarés sur lesquels seront
appliqués les taux de cotisations. Cependant, la différence des couches
socioprofessionnelles entrainant conséquemment une différence de salaire, tous les
salariés ne peuvent pas participer à la même teneur surtout avec l’influence des
255.
256.
257.
258.
259.
R. LAFORE, op.cit., p. 438.
Idem.
Idem, p. 435.
OIT, Rapport de la 89ème session de la Conférence Internationale du Travail en 2001, Sécurité sociale
questions, défis et perspectives, p. 11.
Voir les art. 09 et 12 de la Loi n°2011-006 du 11 février 2011 portant code de sécurité sociale au
Togo.
69
faibles salaires qui sont plus désavantageux. L’autorité publique devrait alors
procéder au rétablissement de l’équilibre de participation aux assurances sociale par
la mise en place d’un financement adapté à chaque régime de salarié (§ 1) ainsi que
la diversification des ressources de la sécurité sociale (§ 2)
§ 1. La mise en place d’un financement adaptée à chaque régime de salarié
Certaines
catégories
de
travailleur
260
en
raison
de
leur
situation
socioéconomique ne peuvent participer aux cotisations sociales au même degré que
les travailleurs des autres couches socioprofessionnelles dont les salaires sont plus
élevés. Un mécanisme d’exonération (A) ainsi que la mise en place de régimes
complémentaires (B) contribueraient à un équilibre plus rationnel en raison de leur
situation financière inadaptée au système en place.
A. L’application des exonérations et réductions générales de cotisations
sociales
« Une seconde bataille a été perdue par les salariés, celle des exonérations. Les
employeurs ont obtenu au nom de la défense de l’emploi, et de l’incitation à
l’embauche de nombreuses exonérations de charges sociales »261. L’évolution du
financement de la sécurité sociale est marquée, outre l’élargissement de l’assiette et
la diversification des ressources, par une deuxième tendance lourde : la volonté de
ne favoriser l’emploi et la croissance. Des prélèvements sociaux assis
principalement sur le facteur travail étant supposés défavorables à l’emploi, les
évolutions du financement de la sécurité sociale ont eu pour but de remodeler la
structure des prélèvements sociaux pour les rendre économiquement plus efficaces,
et plus favorables en termes d’activité et d’emploi. C’est le sens de la politique
d’exonérations 262 de cotisations patronales de sécurité sociale. L’exonération à
première vue est sensée être de portée générale sur toutes les cotisations sociales
avec pour objectifs premiers de rendre le champ des cotisations spéciales plus
260.
261.
262.
On peut citer les travailleurs qui ont de faibles revenus en particuliers ceux des PME et ceux du
secteur informel sans oublier certains indépendants qui ont une situation économique très faible.
R. CHARVIN, Droit de la protection sociale, Préface de Charles Bonifay, 2007, L’Harmattan, p. 93.
F. DELCHEVALERIE, Transformation des mécanismes de financement de la sécurité sociale des
travailleurs salariés : Quel impact sur le financement public et la gestion paritaire ?, mémoire de
master droit de l’entreprise, Université Catholique de Louvain, 2015-2016, p. 35.
70
souples pour certains jeunes créateurs d’entreprises ainsi que des salariés à temps
partiels263. Dans le droit togolais, il faut noter qu’en dépit de l’élargissement du
champ de la couverture sociale à d’autre catégories de travailleurs, spécialement les
travailleurs indépendants, l’ensemble des assurés n’aspirent pas tous et au même
degré d’égalité de sécurité sociale selon la situation de chaque assuré, surtout de la
situation financière. L’équilibre devrait s’opérer par un système de réduction ou
d’exonération au bénéfice de certaines catégories de travailleurs dont les situations
financières c'est-à-dire les revenus sont plus faibles ou encore inférieures à un
certain plafond. « Les personnes affiliées au régime général en application de l’art.
380-1 sont exonérées de cotisations si leur revenu est inférieur au plafond de
ressources précité ». 264 Le système judiciaire français est allé plus loin en y
dénonçant une inégalité de traitement 265 . L’objet des exonérations seraient de
ramener tous les assurés sociaux en fonction du revenu qu’il soit professionnel ou
non professionnel, à un niveau équivalent au titre des cotisations de la sécurité
sociale. La loi française portant création de la couverture maladie créait en son sein
une inégalité de traitement entre les assurés en ce sens que pour deux assurés
possédant un même revenu, la loi accorde des exonérations d’une catégorie donnée
sans faire autant pour d’autres. Au Togo, l’autorité administrative est appelée à
prendre des mesures d’exonération partielles ou totales selon le plafond de revenu
de l’assuré ainsi que de celui de la CNSS. Lorsque nous prenons par exemple le cas
des travailleurs indépendants comparativement aux travailleurs dépendants, il faut
noter qu’il y’a une disparité, donc une inégalité des deux catégories de travailleurs
dans la mesure où les deux sont taxés au même taux alors qu’aux niveaux du
paiement, les charges sont partagées chez les salariés dépendants entres le salarié et
son employeurs dont ce dernier participe pour la grande partie. L’indépendant ne
bénéficie point de cet avantage dans la mesures où il est tenu de supporter la totalité
des charges. IL est par conséquent justifié de leur faire bénéficier un régime
d’exonération dans la limite des charges qui sont par nature réservées à
263.
264.
265.
Idem
J.J. DUPEYROUX, M. BORGETTO et R. LAFORE, op.cit., p. 460.
C’est le cas par exemple de la décision n° 99-416 DC du 23 juillet 1999 du conseil constitutionnel
français à la suite de la saisine dénonçant une inégalité de traitement entre les assurés sociaux
71
l’employeur. Dans le système français, la loi Fillon de 2003 a créé une réduction
générale à des cotisations patronales qui devrait être appliqué à compter du 1 er
juillet de la même année.
En plus de l’application des régimes d’exonération, la mise en place d’un
système complémentaire favoriserait une meilleure prise en charges des assurés
dans la mesure où le régime général a été défaillant ou insatisfaisant.
B. La mise en place des régimes complémentaires
«La terminologie ne trompe pas qui, à propos du régime général, conduit aussi à
parler du régime légal, ou obligatoire ou très significativement, de régime de base.
L’observation du reste peut être faite pour tous les régimes de sécurité sociale. La
couverture qu’ils mettent en œuvre, pour importante qu’elle soit, est presque
toujours inferieur et parfois même très inférieure au montant réel et complet du
risque et de la charge qu’il s’agit de garantir.»266 Les régimes complémentaires
comme leur nom l’indique servent à compléter les insuffisances et les faiblesses du
régime de base. Les régimes complémentaires vont à l’avantage des salariés du fait
du renforcement de l’équilibre par l’insuffisance du régime de base. À titre
d’exemple, le fonctionnaire statutaire de la fonction publique et celui contractuel se
trouve dans une situation d’inégalité du dernier par rapport au premier en ce sens
que la part employeur dans la fonction publique revient à 20% pour l’employeur
public alors qu’il n’aurait bénéficié que de 17% uniquement s’il était aligné au
régime de droit privé du travail donc de la caisse nationale de sécurité sociale. Or,
les cotisations vieillesse au régime général ne peuvent pas dépasser un certain
plafond dans la branche pension267 de la Sécurité sociale. Le taux de pension dans le
privé s’élevant très faiblement, vous ne pourriez toucher à la retraite que d’une
pension aussi faible. D’où la nécessité de la création des régimes de retraite
complémentaire du privé qui devront être obligatoires à la charge des
employeurs268. « Les bénéficiaires naturels de la protection sociale complémentaire
266.
267.
268.
J. -P. LABORDE, op.cit., p. 159.
Art. 16 al. 2 de la loi n° 2011-006 portant code de sécurité du Togo
Voir la fiche pratique de la mise en place d’un régime de protection sociale complémentaire, disponible à
l’adresse https://www.ag2rlamondiale.fr/files/live/sites/portail/files/pdf/Sante-Prevoyance/AG2R LAMONDIALEPrevoyance-Fiche-pratique-mise-en-place-regime-protection-sociale complementaire.pdf consulté le 10/12/2019.
72
sont les salariés. Mais le salarié n’est pas une île. D’une part, il faut lui souhaiter
qu’il quitte un jour son statut de salarié pour bénéficier paisiblement des fruits de
son épargne : le salarié est un futur retraité. Dans des circonstances moins
heureuses, que le chômage ou la maladie ne l’ait pas épargné, le besoin de
protection est tout aussi important. Et, d’autre part, parallèlement à sa carrière, le
salarié construit sa vie de famille. Non seulement le salarié mais aussi l’ancien
salarié et ses ayants droit accèdent à la protection sociale complémentaire.» 269
« La protection assurée par les régimes légaux de sécurité sociale et notamment
par le régime général comporte des insuffisances qui résultent notamment de ce que
dans le régime général, les revenus de remplacement destinés à se substituer à un
revenu professionnel défaillant ne prennent ce dernier en considération que dans la
limite d’un plafond».270 Dans le constat général, en moyenne 70% des dépenses de
santé sont couvertes par le régime général, ce qui justifie cette insuffisance et le
recours aux régimes complémentaires de couverture. La protection sociale
complémentaire servirait non pas seulement de compléter le régime général mais de
créer d’autres branches de prestations de prestation lorsque le régime légal n’en
prévoit point. Tout comme le régime général, le régime complémentaire est doté
d’une large couverture de risques au-devant desquels le risque vieillesse. Cette
dernière se subdivise en retraites complémentaires et retraites supplémentaires à la
seule différence que la première catégorie peut relever du régime général et
obligatoire alors que la seconde est facultative et fonctionne toujours selon le
principe par capitalisation. Toutefois les deux systèmes de retraite gardent leur point
commun essentiel qui est le complément de la couverture du régime légal des
assurés. Les régimes complémentaires trouvent leur justification aussi dans la
mesure où un plafond de sécurité social est exigé par le regimbe général. « Autant
dire que, pour le personnel d’encadrement peut avoir été très supérieur et même
pour beaucoup d’autres salariés, la pension de retraite du régime de base n’est pas
suffisante pour garantir un niveau de vie comparable au moins au niveau de vie
antérieur. On comprend dans ces conditions qu’un régime de retraite
269.
270.
V. ROULET, op.cit., p. 13.
J.J. DUPEYROUX, M. BORGETTO et R. LAFORE, op.cit., p. 1025.
73
complémentaire pour les cadres ait été institué par une convention collective
nationale de retraites et de prévoyance des cadres…»
271
Les régimes
complémentaires jusqu’ici méconnu de la pratique togolaise servirait à relever le
défis de l’inégalité et de l’insuffisance constatée au niveau du régime général
commun à tous les salaries. Il faut aussi préciser qu’en dehors des retraites, les
régimes complémentaires peuvent aussi intervenir dans le cadre des autres risques
naturels tels que la maladie, la maternité, l’accident, l’invalidité et le décès. On se
situerait dans ce cas beaucoup plus du côté des prévoyances complémentaires qui
sont de diverses natures.
En somme, l’instauration des exonérations des charges sociales et l’institution
des régimes complémentaires de protection sociale au profit de certaines catégories
de travailleurs contribuent à améliorer la stabilité financière en matière de sécurité
sociales de cette catégorie de travailleurs. Toutefois, l’État devrait au même
moment penser à un système efficace de compensation financière.
§ 2. La diversification des ressources de la sécurité sociale
L’évolution de nouvelles dépenses liées à la sécurité sociale des travailleurs,
rend pratiquement insuffisantes les recettes assises uniquement sur les salaires et les
revenus d’activité 272 . Des mesures appropriées peuvent être mis en place pour
faciliter cette compensation. Parmi ces mesures, la fiscalisation des recettes de la
sécurité sociale (A), ainsi que les subventions publiques (B) sont importantes dans
le cadre de la présente étude.
A. La fiscalisation des recettes de la sécurité sociale
L’analyse du système de financement de la sécurité sociale togolaise, plus
précisément des assurances sociales, révèle la faiblesse ou encore l’insuffisance des
cotisations sociales pour faire face à différentes prestations. «Les travailleurs et les
citoyens ne disposent cependant pas tous de revenus stables permettant de cotiser
aux régimes de sécurité sociale. Dans ce contexte, le financement par l’impôt de
271.
272.
J. -P. LABORDE, op.cit., p. 160.
A. DUTHILLEUL, op.cit., p. 20.
74
l’extension de la couverture peut constituer une solution » 273 . Face à cette
insuffisance 274
des ressources disponibles, l’État peut prendre des mesures
alternatives afin d’avoir les ressources nécessaires pour faire face à certains risques
de la sécurité sociale. « Les difficultés financières traversées par le régime général
ont imposé, par-delà les cotisations salariales qui supportent la tension entre les
objectifs de maintien de l’emploi et les nécessités de maintien du système, de
trouver d’autres ressources.» 275 C’est ainsi que la fiscalisation de certaines
ressources s’avère indispensable. Le financement fiscal de la sécurité sociale
constitue une part importante des ressources de la sécurité sociale. Les impôts et
taxes affectés sont des ressources qui peuvent être affectées au financement des
prestations sociales ainsi que certaines dépenses spécifiques liées à la sécurité
sociale. « La fiscalisation de la protection sociale désigne le passage de la
cotisation sociale à l’impôt pour alimenter les caisses de la sécurité sociale, avec
l’espoir de faire diminuer corollairement le chômage. Quel impôt utiliser pour
remplir cet objectif ? Ici débute la quête frénétique de l’assiette miraculeuse du
nouvel impôt se substituant aux cotisations sociales »
276
. Le système de
financement de la sécurité sociale par la fiscalisation contribue non seulement à
garantir la disponibilité suffisante des ressources, mais aussi à la réduction du
chômage et du cout du travail. « …En ne touchant que la masse salariale, le
financement de la protection sociale pèse fortement sur le coût du travail. Le travail
est surtaxé, ce qui contribue à maintenir le chômage à un niveau élevé. Pour faire
baisser le chômage, il faut réduire le coût du travail en allégeant les prélèvements
qui pèsent sur les salaires…La fiscalisation de la protection sociale désigne le
passage de la cotisation sociale à l’impôt pour alimenter les caisses de la sécurité
sociale, avec l’espoir de faire diminuer corollairement le chômage.» 277 Ce fut
273.
274.
275.
276.
277.
Voir le rapport de l’AISS, « 10 défis mondiaux pour la sécurité sociale », p. 06.
Le Togo a éprouvé une détérioration des conditions de vie au cours de la dernière décennie, le PIB
réel par habitant étant actuellement 25 pour cent inférieur à ce qu’il était en 1980. Le gouvernement a
recueilli environ 15 pour cent uniquement du PIB en recettes publiques et seulement 0,4 pour cent
environ du budget est consacré à la protection sociale.
J.J. DUPEYROUX, M. BORGETTO et R. LAFORE, op.cit., pp. 850-851.
M. NAVARRO et G. ZUCMAN, « Quel avenir pour le financement de la protection sociale ? » in
« regards croisés sur l’économie » 2007 / 1 (n°01) 159.
Idem.
75
l’exemple français avec la mise en place en 1991 par le gouvernement de Michel
Rocard par la loi du 29 décembre 1990, de la CSG qui est prélevée à la source sur la
plupart des revenus. Son assiette inclut les revenus d’activité, les revenus du
patrimoine et de placement, et les revenus de remplacement et Il est destiné au
financement d’une partie des dépenses de sécurité sociale. La fiscalisation pourrait
ainsi alléger la tâche des contributions sociales aux employeurs et employés avec
une sécurité sociale à plusieurs dimensions. Néanmoins la fiscalisation à elle seule
ne suffirait point à la compensation complète. Qu’en est – il des autres procédés ?
B. Les autres mécanismes de compensation financière
Plusieurs mécanismes peuvent intervenir dans la compensation du déficit
financier entrainé par l’insuffisance des ressources des cotisations sociales. En
dehors de la fiscalisation envisagée précédemment, ils sont diverses et se retrouvent
en diverses formes également. Parmi celles-ci, il peut être envisagé les subventions
publiques278 spécialement pour certains régimes, les intégrations financières, ainsi
que les compensations bilatérales et démographiques. Elles sont basées sur la
solidarité financière des différents régimes existant. L’intégration financière de
façon générale apparait comme le groupement ou l’assemblement en un tous des
comptes financiers. Certains régimes d’assurances en fonction de leur déficit
financier peuvent se voir donc intégrés à d’autres régimes ou au régime
général. « Le régime général reprend dans ses comptes les soldes des régimes des
étudiants en maladies (mais le déficit est partagé entre l’ensemble des régimes
maladie), des salariés agricole en vieillesse et maladie, des mineurs pour les
accidents de travail, des ministres des cultes en maladie et retraite, des militaires
en maladie.» 279 La technique de compensations bilatérales intervient en signe de
solidarité entre deux régimes le plus souvent dans le cadre des prestations en nature.
« Le principe est le suivant : on applique à ces régimes les règles relatives aux
cotisations et prestation du régime général. Si cette transposition fait apparaitre un
déficit, le régime général compense. Et inversement.»
278.
279.
280.
280
La compensation
F. DELCHEVALERIE, op.cit., p. 37.
J.J. DUPEYROUX, M. BORGETTO et R. LAFORE, op.cit., p. 299.
Idem, p. 300.
76
démographique généralisée281 se distingue de l’intégration financière car elle n’a
pas pour objet de pouvoir financer le solde d’un régime mais de lui apporter une
aide pour pouvoir compenser le déséquilibre démographique. Elle ne concerne que
les régimes ayant plus de 20000 actifs cotisants et retraités selon la législation
française. «Elle porte d’un côté, sur les charges de l’assurance maladie et maternité
au titre des prestations en natures et, de l’autre, sur l’assurance vieillesse au titre
des droits propres… Entre les régimes des salariés, elle cherche à remédier, non
seulement aux inégalités démographiques, mais aussi au disparités des capacités
contributives.»282
En sommes, le rétablissement de l’équilibre rationnel dans le financement de la
sécurité social est un rôle beaucoup plus dévoué à l’État qui doit mettre en place un
plan de financement adapté à chaque régime, tout en mettant en place un système
efficace de compensation du déficit financier qui pourrait y résulter.
Les ressources nécessaires de la sécurité sociale une fois disponible, un dispositif
efficace serait important en vue de leur bonne gestion pour des prestations paritaires
et égalitaires à chaque assuré.
Section II. Une gestion efficace des ressources financières de la sécurité sociale
L’efficacité de la gestion des ressources financières de la CNSS est d’autant
plus important qu’elle contribue à une meilleure garantie et conservation financière
des prestations des salariés. Le régime général de la sécurité sociale obéissant au
principe d’autonomie financière des branches, des règles de gestion financières
mises en place doivent être adapté pour une meilleure efficacité de gestion. Le point
central de l’organisation des ressources financières de la sécurité sociale se situe au
plan économique et juridique. Sur le plan économique, les ressources financières
doivent faire l’objet d’une gestion saine témoignée par une trésorerie adéquate bien
structurée. Au plan juridique, les règles d’art de recouvrement de la cotisation
sociale devraient être revues afin de pallier les difficultés relatives au recouvrement
effectif des cotisations sociales. La disponibilité des ressources suffisantes permet
281.
282.
La compensation démographique généralisée est issue de la loi française portant code de sécurité
sociale en son art. L. et D. 134-1 et s.
J.J. DUPEYROUX, M. BORGETTO et R. LAFORE, op.cit., p. 300.
77
ainsi une meilleure garantie des prestations sociales de toutes les couches
socioprofessionnelles dans les bonnes normes d’équité sans aucune exclusion. C’est
pourquoi, cette étude sectionnaire aura pour objectif de décrire les mécanismes de
réorganisation des services de recouvrement des cotisations sociales (§ 1) avant de
revenir sur la gestion appropriée de la trésorerie du régime général (§ 2).
§ 1. L’assainissement du système de recouvrement des cotisations sociales
« Dans les organismes de Sécurité sociale qui fonctionnent selon les principes
de l’assurance sociale bismarckienne, le recouvrement des cotisations sociales
constitue une activité des plus névralgiques, si ce n’est la première. En effet, les
cotisations sociales sont la principale ressource financière de ce type d’organismes.
C’est donc essentiellement sur lesdites cotisations que reposent les dépenses
techniques de paiement des prestations sociales, raison d’être de ces
organismes »283. Au Togo, l’analyse de plusieurs études révèle une inefficacité du
système de recouvrement qui doit être réorganisé (A) avec un mécanisme de
contrôle efficient (B)
A. La réorganisation efficace des modalités de recouvrement
Les ressources de la sécurité sociales proviennent dans leur quasi totalités des
cotisations sociales des différents assurés. Il est bien évident que les employeurs et
les entités déclarées à la CNSS sont par conséquent débiteurs des cotisations
sociales à la caisse, mais la grande difficulté est toujours éprouvée dans les
mécanismes de recouvrement des dites cotisations. L’on ne saura faire face à ces
difficultés, que par l’assainissement des organes en charges du recouvrement, ainsi
que de leur modalité de recouvrement. Donc, le recouvrement de ces cotisations
constitue une fonction importante284 pour la bonne marche des régimes gérés par la
CNSS. L’organisation de la CNSS du Togo confie la mission de recouvrement des
cotisations sociales au « département des recouvrement et d’immatriculation ». En
283.
284.
B.A. NKOUROU, « La Pratique du recouvrement des cotisations sociales dans les organismes de
Sécurité sociale de type bismarckien : l’exemple de la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale du
Cameroun », Edilivre, p. 01.
P. NSHIMIRIMANA , problématique du recouvrement des cotisations sociales dans un organisme
de sécurité sociale : cas de l’INSS du Burundi, Rapport De Stage EN3S – 14ème promotion des cadres
supérieurs CIFOCSS-IM2, effectué à l’URSSAF, p. 08.
78
effet, la persistance des difficultés relatives au recouvrement des cotisations sociales
témoigne de l’inefficacité de ce département dans sa mission, d’où la nécessité de la
mise en place d’un système et d’un organisme spécialisé. Le recouvrement des
cotisations sociales est un ensemble de procédures juridiques qui doit conduire à un
versement effectif des cotisations sociales ; «le processus de recouvrement des
cotisations sociales présente des faiblesses significatives dans toute la chaîne des
opérations, dont le fonctionnement s'avère alors particulièrement difficile à
optimiser.»285 Les organismes rencontrent des difficultés286 sérieuses pour maîtriser
les effectifs des employeurs et des travailleurs devant être affiliés au régime de
sécurité sociale. Cette situation est liée particulièrement aux dysfonctionnements
existant dans les procédures d’immatriculation et d’identification des employeurs et
des salariés. Le processus de recouvrement étant plus processuel et juridique, un
organe adapté et spécialisé dans le service de recouvrement est mieux adaptée pour
une telle mission en toute fiabilité. « …Il y a lieu de souligner que la détermination
des majorations de retard et des pénalités ainsi que l’émission des taxations d'office
et des relances des employeurs débiteurs ne sont pas généralement systématisées.
De même elles ne sont pas systématiquement appliquées, ce qui ne préserve pas les
créances des Caisses, qui renoncent ainsi implicitement à la mise en œuvre effective
de leur action en recouvrement forcé. Les circuits d’encaissement des titres de
paiement sont souvent longs et ne garantissent pas leur remise rapide en
banque.»287
L’avènement du système de « télépaiement » 288 et de « télé déclaration »,
nécessite ainsi un système adéquat, efficace et automatique de gestion des
transactions bancaires des employeurs dans le cadre du paiement des cotisations
sociales. Les comptes cotisants éprouvent le plus souvent des problèmes de fiabilité
285.
286.
287.
288.
S. GARANKE, Le recouvrement des cotisations de sécurité sociale en Afrique francophone : La
gestion du recouvrement dans les organismes de prévoyance sociale des États membres de la
CIPRES, Rapport du Colloque des directeurs d'institutions de sécurité sociale des pays francophones
d'Afrique, P .12.
Idem.
Idem.
L’avènement de l’évolution de la technologie et de l’information facilite désormais la déclaration à la
CNSS des salariés en ligne par le système de « télé déclaration », ainsi que le payement des
cotisations sociales.
79
de sources diverses. La fiabilisation des procédures d’immatriculation des assujettis
et le renforcement des actions de recherche et de détection des employeurs
indélicats sont indispensables. Dans cette perceptive, en plus de l’exploitation
minutieuse des informations disponibles au niveau de l’organisme telles que celles
figurant sur les déclarations ou les demandes produites, la collaboration et les
échanges d’informations avec les institutions comme les Chambres de commerce,
les Services des impôts, d’électricité, etc., constituent des sources appréciables pour
détecter les entreprises qui ne se sont pas immatriculées. Comme le souligne le
BIT289, « il est possible, en combinant le recouvrement des cotisations sociales avec
celui des impôts, d’améliorer le respect des obligations et de tirer un meilleur
rendement des ressources. […] Dans trois des cinq pays (Hongrie, Croatie et
Slovénie), le fisc290 a la charge du recouvrement des cotisations ». L’efficacité du
recouvrement repose non seulement sur la maîtrise des effectifs, mais également sur
un traitement exhaustif et systématique des informations financières les concernant
et sur une bonne gestion de leurs comptes auxiliaires. Cette efficacité est d’autant
plus nécessaire avec l’implication de l’administration fiscale
291
dans le
recouvrement comme le souligne Stan ROSS292 qu’ « en principe, l’intégration des
activités de recouvrement fonctionnera le mieux là où l’organisme d’assurance
sociale et le fisc auront été tous les deux modernisés : de la sorte, le processus
d’intégration peut se concentrer étroitement sur le transfert des fonctions de
recouvrement ».
Le recouvrement et la bonne gestion des ressources de cotisations sociales
requièrent toujours un contrôle rigoureux des différents partenaires sociaux.
289.
290.
291.
292.
E. FULTZ et T. STANOVNIK, Le recouvrement des cotisations d’assurance pension : tendances,
questions et problèmes en Europe centrale et orientale, 1ère éd., Budapest, 2005, pp. 35-36.
Ensemble des services chargés d’établir et de percevoir les impôts.
A. A. CADETE TCHINTCHIN, La gestion du contentieux du recouvrement des cotisations
sociales, Rapport de stage, Cycle des Cadres Supérieurs de Sécurité Sociale 14ème promotion : 20122013, p. 10.
S. ROSS, Le recouvrement des cotisations sociales : pratiques et problèmes actuels, rapport de la
conférence internationale de l’Association Internationale de Sécurité Sociale (AISS) sur « Les
changements dans la structure et l’organisation de l’administration de la Sécurité sociale », Cracovie,
3-4 juin 2004.
80
B. Le renforcement du contrôle technique des recouvrements
La caisse nationale de sécurité sociale assure le contrôle des employeurs et des
salariés dans le cadre de l’application des dispositions relatives au code de sécurité
sociale par les inspecteurs et contrôleurs de la caisse ainsi que ceux du travail.
Fonctionnant sous le régime déclaratif, la caisse doit en retour se doter d’un
véritable dispositif de contrôle des employeurs dans le cadre des déclarations de
salaires effectifs qui constituent la base de contrôle des cotisations sociales. À cet
effet le droit togolais relève donc que « Le contrôle de l‘application par les
employeurs des dispositions de la présente loi est assuré par les inspecteurs et
contrôleurs de la Caisse et par les inspecteurs et contrôleurs du travail et des lois
sociales » 293 Toutefois, l’analyse de cette disposition relève l’aspect général du
contrôle dont il est question. Même si ce pouvoir de contrôle concerne toutes les
dispositions du code de sécurité sociale, il n’en demeure pas inutile de renforcer ce
contrôle de façon technique au niveau du service de recouvrement des créances
sociales. Ce dispositif de contrôle tel que vécu dans la pratique est quelques peut
défaillant à la solde des contrôleurs et inspecteurs qui font des descentes rares dans
les lieux de contrôle. Cette défaillance laisse ainsi une liberté aux employeurs et
chefs d’entreprises qui se donnent à des fausses déclarations voire qui ne le font
même pas. Cette situation nécessite un renforcement avec des services et organes
bien spécialisés dans le domaine de recouvrement. À cet effet, il doit être envisagé
deux types de contrôle à savoir le contrôle à la pièce et celui sur place 294 . Le
contrôle à la pièce permettra donc de vérifier par les pièces justificatives de
l’immatriculation, alors que celui à la carte permettra de s’assurer de
l’immatriculation effective des salariés dans les lieux de travail 295. L’absence d’une
unité spécialisée de recouvrement comme l’URSSAF dans le système français
constitue un handicap dans la mesure où une telle organisation pourrait constituer
un grand dispositif de contrôle efficace des employeurs. La mise en place d’un
293.
294.
295.
Voir l’art. 92 de la loi n°2011-006 portant code de sécurité sociale du Togo.
P. NSHIMIRIMANA, op.cit., p. 13.
Idem.
81
organisme spéciale de recouvrement296aurait de facto permis la spécialisation des
« inspecteurs de recouvrement » 297 avec un pouvoir de contrôle spécial sur les
employeurs et entreprises en ce qui concerne le versement des cotisations sociales.
Le droit togolais est d’ailleurs beaucoup plus restreint dans le contrôle des
inspecteurs et contrôleurs en ne leur laissant pas le droit de dresser les mises en
demeure et les procès-verbaux. Le pouvoir ne se limite juste qu’au rapport de
contrôle dressé au directeur général de la caisse et à l’inspecteur de contrôle298. Ce
dispositif législatif laisse présager un rôle moins actif réservé aux contrôleurs.
§ 2. L’optimisation de la trésorerie du régime général
Le système d’optimisation des ressources du régime général de la CNSS sera
effectué par le renforcement de la gestion de la trésorerie du régime général (A),
avec le renforcement du contrôle de la tenue des comptes (B).
A. Le renforcement de la gestion de la trésorerie du régime général
Afin de s’assurer de la fiabilité et de la disponibilité des ressources de la Caisse,
il est nécessaire de mettre en place au niveau national un compte unique de
disponibilité de ressources. L’objet principal du compte serait alors l’enregistrement
en recette, les cotisations et autres contributions et, en dépense les prestations
réglées par l’organisme299. Il doit alors mesurer le flux de variation de la trésorerie
des ressources, et ses subdivisions ouvertes au siège ne doivent être débitrices300.
Étant donné que les ressources internes au régime général ne suffissent pas pour
couvrir l’ensemble des prestations, ce qui justifie des prestations insuffisantes pour
certaines branches, diverses solutions classiques s’offrent pour cette compensation
déficitaire à travers une bonne gestion optimale de la trésorerie. Les prêts au compte
de disponibilité restent la solution possible pour ces branches déficitaires. La
législation togolaise autorise les différents branches à effectuer des réserves et avec
296.
297.
298.
299.
300.
C’est l’exemple en France avec l’URSSAF qui est un organisme privé en charge de la mission de
service public de recouvrer les cotisations sociales et allocations familiales.
L’inspecteur de recouvrement est conçu en France afin d’examiner l’entreprise par rapport aux
déclarations effectuées avec la mobilisation des compétences juridiques, comptables et informatiques.
Voir l’art. 92 de la loi n°2011-006 portant code de sécurité sociale du Togo.
J.J. DUPEYROUX, M. BORGETTO, et R. LAFORE, op.cit., p. 795.
Idem.
82
des revenus des différents taux de placement des ressources disponible par branche
en ses termes « les fonds de réserves de chaque branche, leurs placements
respectifs ainsi que le produit de ces placements seront comptabilises séparément.
Les placements sont effectués à moyen ou long terme et selon le plan financier
établi par le conseil d'administration de la Caisse. Ce plan doit viser, en premier
lieu, leur sécurité réelle. Il doit viser, en outre, à obtenir un rendement dans leur
placement »301 Les revenus des taux de placement devront être reversés au compte
unique de disponibilité pour la prise en charges des prestations plus nécessiteuses
dans les branches se sentant au besoin. Le modèle français en est une illustration
avec l’ACOSS302 qui est un établissement public administratif chargé d’assurer la
gestion commune de la trésorerie des quatre branches du régime général 303 .
« L’ACOSS centralise les cotisations, impositions et recettes diverses affectées aux
différentes branches du régime général, et leur met à disposition les fonds
nécessaires au versement de leurs prestations.»304 Le compte unique contribue alors
à l’apurement des déficits cumulés par toutes les branches. La loi française du 22
juillet 1993 relative aux pensions de retraite et à la sauvegarde de la protection
sociale créait à cet effet le fonds de solidarité vieillesse dont une des missions était
de rembourser à l’État pendant 15 ans la somme nécessaire à l’apurement d’une
dette du régime général. 305 Les réserves et les revenus de placement de chaque
branche doivent faire l’objet d’un reversement au compte unique de gestion de
trésorerie du régime général306. La répartition pourra être faite de façon rationnelle
en fonction du besoin exprimé par les branches. Les ressources seront ainsi
disponibles à long terme et chaque assuré pourra prétendre à la prise en charge total
du risque survenu dans le cadre de son travail ou encore de maladie non
professionnel. Après le renforcement du système de gestion de la trésorerie du
301.
302.
303.
304.
305.
306.
Art 24 de la loi n°2011-006 portant code de sécurité sociale du Togo.
L’agence Centrale des organismes de sécurité Sociale est une institution du système de sécurité
sociale français qui collette en collaboration avec l’URSSAF les contributions et cotisations sociales
qui financent les quatre branches du régime général.
Voir l’art. L. 225-1 du code de la sécurité sociale français.
N. ABECERA et P.-Y. BOCQUET, La gestion de trésorerie de l’Agence centrale des organismes de
sécurité sociale, rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, p. 97.
J.J. DUPEYROUX, M. BORGETTO et R. LAFORE, op.cit., p. 796.
Idem.
83
régime général, il devrait être rendu efficace et crédible par la tenue des comptes
régulière et contrôlée.
B. Le renforcement du contrôle de la tenue des comptes
Au regard des enjeux que représentent les actifs financiers dans un organisme de
sécurité sociale, l’optimisation et l’assurance de leur gestion est une nécessité
impérieuse qui doit avant tout assurer la disponibilité nécessaire. «La gestion saine
et rigoureuse des cotisations conditionne et amplifie la confiance des partenaires
sociaux et des employeurs et les incite au respect de leurs engagements. De même,
le suivi méthodique des comptes individuels assurés sert le bon droit au juste
bénéficiaire et sauvegarde par ricochet l’intégrité des ressources des Caisses.»307
Cela devrait passer par un contrôle de gestion de tous les mouvements comptables
sur les différentes ressources de la caisse. En vue de faciliter un contrôle et d’en
assurer son efficacité, il devrait être effectuée à chaque branche de prestation, une
tenue régulière des comptes. Le plan comptable unique appliqué permet une
meilleure consolidation des comptes et d’obtenir des résultats comptables à
comparer aux objectifs de dépenses fixées 308 . Les institutions spécialisées de
contrôle des comptes telles que « les commissions des comptes » 309 Les agents
comptables de la caisse nationale transmettent les comptes annuels et infra annuels
aux organismes de contrôle 310 pour approbation ou improbation. Ces comptes
doivent donc être régulières, sincères et donner une image fidèle du patrimoine et de
la situation financière des branches et régimes, condition indispensable pour être
mis en état d’être certifié.311 Toutes les opérations, de toute nature, effectuées par
les trésoriers ou tout autre agent doivent être mesurées, dirigées, contrôlées et
supervisées de façon à permettre à l’Agent Comptable de réaliser ses
307.
308.
309.
310.
311.
I. AWADE, déclaration tenue lors de l’ouverture du séminaire de la CIPRES à Lomé en février 2018,
disponible à l’adresse https://www.republicoftogo.com/Toutes-les-rubriques/Social/Prevoyant-etgestionnaire consulté le 14/02/2020.
Idem, p. 794.
Institution française d’analyse et de vérification des comptes de sécurité sociale. Elle est chargée de
les analyser et de faire des prévisions pour les années en cours et suivantes. Elle est présidée par le
ministre chargé de la sécurité sociale et pourvue d’un secrétaire général permanent nommé par le
premier président de la cour des comptes.
J.J. DUPEYROUX, M. BORGETTO et R. LAFORE, op.cit., p. 794.
Idem, P. 795.
84
objectifs. « C’est un contrôle effectué aux différents niveaux de responsabilité
(responsable du département, Fondé de pouvoir, Agent Comptable). Il a pour
objectif de réduire au maximum les erreurs et autres risques.»312
En dehors du contrôle interne par les organismes de la sécurité sociale, le contrôle
juridictionnel à travers la cour des comptes viendrait juger de la régularité des
comptes établis par les comptables des entreprises et établissements publics313. «Le
rôle de la Cour des comptes sur les comptes et la gestion des organismes de
Sécurité sociale s’est progressivement accru depuis 1949. La cour a renforcé sa
mission de contrôle, elle a participé à la mise en place de la réforme comptable
desdits organismes, au milieu des années 1990.»314La réalité togolaise marquée par
la non effectivité de la cour des comptes affecte le contrôle efficace des ressources
de la sécurité sociale au niveau national car elle est « une institution supérieure de
contrôle financier de l’État, de ses établissements et de ses entreprises publics, et
des organismes de Sécurité sociale. » 315 En effet, la certification des comptes
nécessite que les organismes de sécurité sociale pratiquent une comptabilité
d’exercice, c’est-à-dire que les normes comptables soient harmonisées et
consolidées.316 Ainsi, l’assurance d’une gestion saine et efficace des ressources par
cette mission de contrôle, favoriserait une abondance de ressources ainsi que des
mesures de prestation dans la justice et l’équité entre les différents travailleurs ayant
cotisé.
312.
313.
314.
315.
316.
Y. ADIGBO, Gestion des actifs financiers dans les organismes de sécurité sociale, rapport de stage, p. 13.
Voir art. 107 de la constitution togolaise.
L. HERVIER, « le rôle des organismes de contrôle en matière d'évaluation 1949-2007 : l'exemple de
la cour des comptes », in « Informations sociales », 2008/6 n° 150, p. 46.
Idem.
Idem.
85
CONCLUSION
86
Les règles d’assujettissement à la sécurité sociale des travailleurs salariés
reposent sur des principes et volontés qui résultent directement de la volonté du
législateur317. Le législateur dans sa tâche de rédaction de la loi est donc appelé à le
faire en considération des principes consacrés au nom de la sécurité sociale. Au
nom de ces principes, un principe important reste déterminant dans le cadre de la
législation sociale. « Il importe de souligner, une fois de plus, les inégalités
considérables qui peuvent exister dans le cadre d'un système, en apparence
égalitaire, mais dont le pouvoir de redistribution n'est pas contrôlé avec
précision »318. De sa naissance en droit du travail à travers la maxime générale « à
travail égal, salaire égal », l’égalité de traitement se devrait alors de façon logique,
être étendue au domaine du droit de la sécurité sociale, chose qui est fait d’ailleurs,
sauf qu’il faudra noter que « le visage » de cette égalité n’est plus le même dans les
deux grands domaines du droit social. Cette égalité dans le traitement des assurés de
la sécurité sociale, est tant appréciée sur le plan national qu’international 319 .
L’égalité au sens large suppose l’effacement de toute discrimination320 quelle que
soit l’origine. Si l’égalité en droit du travail doit tenir compte de la situation des
travailleurs les uns par rapport aux autres, il faut dire que celle appliquée au droit de
la sécurité sociale reste étendue et tient compte non seulement de la situation des
travailleurs, mais aussi de la nature du risque auquel ils sont exposés. La couverture
des risques sociaux étant l’objet essentiel du droit de la sécurité sociale, elle devrait
beaucoup plus reposer sur « une solidarité »321 traduite par la « mutualisation des
risques ». La présente étude sur le cas du droit de la sécurité sociale togolaise s’est
bornée à l’analyse du cadre juridique de la sécurité sociale togolaise.
Cette analyse contre toute attente, révèle une situation de déséquilibre social liée
à plusieurs raisons, dont la principale reste le facteur contributif des prestations
sociales mise en place par le régime unique. En dehors de ce facteur, notons
l’inadéquation ou mieux encore l’insuffisance des textes actuels qui ne favorise pas
317.
318.
319.
320.
321.
J. F. NEVEN et S. GILSON, op.cit., p. 07.
J.-P. BENZÉCRI, op.cit., p. 146.
Voir la convention N° 118 de l’OIT sur l’égalité de traitement en droit de la sécurité sociale adoptée le
28 juin 1962 et entrée en vigueur le 25 avril 1964.
J.P. CHAUCHARD, J.Y. KERBOURC’H et C. WILLMANN, op.cit., p. 591.
J.P. LABORDE, op.cit., p. 09.
87
une meilleure prise en charge surtout dans le cadre de la santé des travailleurs
togolais. Le législateur aurait été défaillant dans sa mission de régulation de justice
sociale en ce sens que plusieurs dispositions nécessaires à la protection sociale du
salarié dans l’entreprise sont passées sous silence de la loi. L’égalité en droit de la
sécurité sociale sera donc un facteur combiné entre la solidarité 322 et l’assurance qui
sont les deux grands modèles de la sécurité sociale. L’avènement d’un régime
mixte323 génèrerait plus de ressources du fait de la participation financière de l’État
en dehors des cotisations sociales de toute nature.
Toutefois, la responsabilité de cette inégalité ou encore de ce déséquilibre reste
tout de même partagée entre les différents acteurs du monde de la sécurité sociale
des travailleurs ainsi que les travailleurs eux-mêmes.
D’abord, l’étude de la situation pratique des travailleurs de l’entreprise au regard
de leur sécurité sociale a permis de se rendre compte du faible taux d’affiliation de
ces derniers aux organismes de la sécurité sociale notamment la CNSS. La situation
économique étant parfois faible et défavorable, les employeurs choisissent de se
passer de cette obligation légale. Dans le cadre institutionnel, il faut avouer que les
institutions togolaises ne sont pas encore adaptées à la prise en charge parfaite des
entreprises. En effet dans le domaine de la santé, aucun régime obligatoire
d’assurance maladie hormis les prestations médicales liées aux accidents de travail
et maladies professionnelles gérés par la CNSS, 324 L’INAM, quand bien même
existe au titre de l’assurance maladie obligatoire, ne profite qu’aux seuls travailleurs
soumis au statut général de la fonction publique. L’effort de généralisation devrait
être mené dans le domaine de l’assurance maladie de l’INAM, afin que celle-ci
profite aux salariés privés. La CNSS est donc appelée à mettre en place un système
efficace de contrôle sur les employeurs pour deux objectifs précis : leur propre
immatriculation et ensuite celle de leurs employés aux organismes de sécurité
sociale. Dans la législation togolaise, bien que ce système de contrôle ait été prévu,
il faut tout de même relever qu’il est inefficace et mérite un certain renforcement
322.
323.
324.
F. DELCHEVALERIE, op.cit., p. 31.
Reference faite au régime mixte de sécurité sociale français qui inclut dans le financement la
participation de l’État par l’impôt et les subventions publiques.
P. AUFFRET, op.cit., p. 32.
88
technique. Tous les salariés des entreprises quelques soient leurs situations
juridiques et financière préservent ce droit précieux de la protection sociale liée au
travail. Qu’on soit lié à l’entreprise par un CDD ou un CDI, le droit aux prestations
sociales doit y demeurer indifférent. Ce qui prévaut c’est la considération du risque
et les mécanismes de sa prévention, au pire des situations, sa réparation complète au
cas où il survenait.
Toutefois, afin d’optimiser cette protection, le système togolais mérite une
révision du système de financement325 en considération de la situation juridique et
économique du travailleur qui y cotise. En raison de leur vulnérabilité économique
due à l’insuffisance des salaires parfois en dessous du SMIG326 en vigueur, certains
ouvriers sont privés de certaines prestations sociales telles que la réparation des
risques professionnels. Les mesures d’exonération ont leur raison d’être et
spécialement dans le cas togolais elles doivent viser les personnes de bas revenus327,
par des réductions générales de cotisations et les aides à l’embauche ciblées sur des
catégories de population ou d’entreprises328. Toutefois, le déficit engendré devrait
être compensé par plusieurs mécanismes offerts au système dont le plus usuel passe
par la fiscalisation afin d’optimiser les ressources nécessaires.
En tout état de chose, l’on devrait avoir à l’esprit que la lutte contre les
inégalités en droit social surtout en droit de la sécurité sociale sera toujours une lutte
sans cesse dans la mesure où l’égalité recherchée se trouve sous divers angle
variables l’un par rapport à l’autre. Elle n’est point une égalité mathématique en
raison des situations différentes des travailleurs assurés pour un même régime
juridique de sécurité sociale. Les inégalités constatées se retrouvent sous diverses
facettes dont celle du genre. L’égalité parfaite se traduirait par le traitement de
chaque travailleur par un régime raisonnable et relatif à sa situation de travail et de
risque social.
325.
326.
327.
328.
Cette révision devrait également tenir compte des mesures d’exonérations ainsi que des subventions
publiques à l’endroit de certaines couches socioprofessionnelles défavorisées.
La loi Togolaise du travail fixe le SMIG à 35000 FCFA.
Cette mesure d’exonération est beaucoup plus envisagée pour les travailleurs indépendants qui
supportent la totalité des charges sociales en tant que employeurs et salariés.
J.J. DUPEYROUX, M. BORGETTO et R. LAFORE, op.cit., p. 824.
89
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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2.
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2.
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3.
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4.
Loi n°2006-010 du 13 décembre 2006 portant code du travail au Togo.
5.
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6.
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7.
Loi n° 2014-131 du 24 mars 2014 instituant la couverture maladie universelle
en Côte d’ivoire.
8.
Décret n°70-1277 du 23 décembre 1970 portant création de l’Institut de
Retraite Complémentaire des Agents Non titulaires de l’État et des
Collectivités publiques en France.
9.
Décret
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du 20 décembre,
de la Caisse
de
Retraite
Complémentaire des Cadres (CRCC) du Togo.
95
10. Décret n° 2012-038/PR du 27 juin 2012 portant révision des taux de
cotisations à la caisse nationale de sécurité sociale (CNSS).
11. Décret n° 91 / 208 pris pour l’application de la loi n° 91-11 du 23 mai 1991
fixant le régime des pensions civiles et militaire de la CRT au Togo.
12. Arrêté n°002/2012 /MTESS/CAB/DGTLS fixant les modalités d’application
du code de sécurité sociale au Togo. Déclaration universelle des droits de
l’homme du 10 décembre 1948.
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1.
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http://www.socialprotection.org/gimi/gess/RessourcePDF.action%3Bjse
ssionid%3DsnvrZ8xT8LzYJnQLl4qCnJ40s2hG2c0TM1cczWYJZXSfQj
hy39Cr!726592978%3Fressource.ressourceId%3D30412
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2.
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12. www.dalloz-actualite.fr
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97
TABLE DE MATIÈRES
AVERTISSEMENT .................................................................................................. i
DÉDICACE .............................................................................................................. ii
REMERCIEMENTS............................................................................................... iii
SIGLES ET PRINCIPALES ABRÉVIATIONS .................................................. iv
SOMMAIRE ............................................................................................................ vi
INTRODUCTION .....................................................................................................1
PARTIE I. UNE SÉCURITÉ SOCIALE INÉGALE : SOURCE D’UN
DÉSÉQUILIBRE ....................................................................................................11
CHAPITRE I. Un déséquilibre lié à un système de sécurité sociale sélectif ..13
Section I. Une sécurité sociale basée sur un modèle d’assurance ......................13
§ 1. La prévalence d’une activité salariale ......................................................14
A. L’affiliation et l’immatriculation obligatoire, conséquence d’une
activité professionnelle salariée ................................................................14
B. Le versement préalable de cotisations sociales, conséquence de
l’affiliation obligatoire ...............................................................................16
§ 2. La conséquence d’une protection limitée ................................................17
A. La protection limitée quant à l’assujettissement .............................18
B. La protection limitée quant aux prestations ....................................19
Section II. Un système de protection sociale moins efficace .............................21
§ 1. Une inefficacité fonctionnelle ..................................................................21
A. L’organisation moins adaptée par un régime unique .....................21
B. La fragilité des institutions de sécurité sociale .................................23
§ 2. Une inefficacité législative ......................................................................25
A. L’absence de réglementation spéciale des mutuelles .......................25
B. Le caractère lacunaire des textes actuels. .........................................27
CHAPITRE II. Un déséquilibre lié au statut juridico économique des
travailleurs. ...........................................................................................................30
98
Section I. Une différence de traitement relevant du statut économique du
travailleur ............................................................................................................30
§ 1. L’influence des inégalités salariales ........................................................31
A. La différence des revenus socio professionnels ................................31
B. La différence socioéconomique du genre ..........................................33
§ 2. L’influence d’un déficit financier ............................................................36
A. L’insuffisance du système de financement par cotisation ...............36
B. Le
Manque
d’un
mécanisme
adéquat
de
compensation
déficitaire…………………………………………………………………38
Section II. Une différence de traitement relevant du statut juridique du
travailleur : le cas des agents contractuels d’État ...............................................39
§ 1. Un régime juridique parapublic des agents contractuels de l’État. .........40
A. Un régime de droit privé du travail quant à la nature de
l’engagement ..............................................................................................40
B. Un régime de droit public quant aux relations de travail ...............42
§ 2. Un régime social inégal des agents contractuels .....................................44
A. Un régime social de droit privé assimilé aux travailleurs salariés .44
B. Une inexistence d’un régime complémentaire de protection
sociale……………………………………………………………………..46
PARTIE II. UNE INÉGALITÉ SURMONTABLE A L’EGARD DES
REFORMES ...........................................................................................................49
CHAPITRE I. L’extension des assurances sociales ..........................................51
Section I : Une sécurité sociale non contributive basée sur la solidarité ...........51
§ 1. Un système de sécurité sociale par la solidarité nationale ......................51
A. Une sécurité sociale indépendamment à un emploi rémunéré .......52
B. Une extension de la qualité d’assuré social.......................................54
§ 2. Un système de sécurité sociale par la solidarité socioprofessionnelle ....55
A. Le renforcement des solidarités interindividuelles ..........................56
B. Le renforcement des solidarités interprofessionnelles ....................57
Section II. Une réforme du cadre juridico-institutionnel de sécurité sociale .....59
99
§ 1. La réforme du cadre juridique..................................................................60
A. L’élargissement du champ d’assujettissement .................................60
B. La mise en place de régimes spéciaux et autonomes .......................62
§ 2. La réforme du cadre institutionnel ...........................................................64
A. La mise en place de caisses spécialisées pour chaque régime .........64
B. La réorganisation du contentieux de la sécurité sociale ..................65
CHAPITRE II. La réforme du système de financement ..................................69
Section I. Un rééquilibrage du financement de la sécurité sociale togolaise .....69
§ 1. La mise en place d’un financement adaptée à chaque régime de salarié .70
A. L’application des exonérations et réductions générales de
cotisations sociales .....................................................................................70
B. La mise en place des régimes complémentaires ...............................72
§ 2. La diversification des ressources de la sécurité sociale ...........................74
A. La fiscalisation des recettes de la sécurité sociale ............................74
B. Les autres mécanismes de compensation financière .......................76
Section II. Une gestion efficace des ressources financières de la sécurité
sociale …………………………………………………………………………77
§ 1. L’assainissement du système de recouvrement des cotisations sociales .78
A. La réorganisation efficace des modalités de recouvrement ............78
B. Le renforcement du contrôle technique des recouvrements ...........81
§ 2. L’optimisation de la trésorerie du régime général ...................................82
A. Le renforcement de la gestion de la trésorerie du régime général .82
B. Le renforcement du contrôle de la tenue des comptes ....................84
CONCLUSION ........................................................................................................86
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ..............................................................90
TABLE DE MATIÈRES ........................................................................................98
100
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