LAICITE ET IDENTITE La laïcité est fondée sur l’articulation de quatre principes : La séparation de l’Eglise et de l’état; la neutralité de l’autorité publique à l’égard des diverses croyances; la liberté de conscience; l’égalité des droits. La laïcité s’est construite au début, par rapport au christianisme. Elle a après intégré le protestantisme, et le judaïsme. Elle se voit confrontée depuis quelques années à une nouvelle religion extérieure à la vision chrétienne du monde, en l’occurrence l’islam. Depuis quelques années notamment depuis l’affaire médiatique du foulard, et surtout le 11 septembre, les débats publics sur la laïcité, renvoient toujours implicitement et ces dernières années explicitement, à l’islam. Selon Jean Baubérot, les débats sur l’islam et l’interdiction de signes religieux dans l’espace public ont conduit à hypertrophier le principe de neutralité, jusqu’à l’interpréter comme une neutralisation de l’espace public et non comme neutralité de l’arbitre qui fait respecter les règles. Il qualifie cette conception de « laïcité répressive ». La laïcité (et la tradition laïque), a perdu son aptitude à l’indifférence et à la neutralité pour se transformer en un système d’étalon de l’identité ; elle est devenue condition d’intégration imposée aux citoyens français enraciné dans un référentiel musulman. Une réaffirmation rigoriste du principe de laïcité conduit à ce que, comme l’écrit Nilüfer Göle, (sociologue, directrice d’études à l’EHESS de Paris, dans son excellente enquête sur « Les musulmans au quotidien »): « L’idéal universaliste de la civilisation française a revêtu les habits du particularisme culturel » La question est : Comment faire de la place aux derniers arrivants que la République considère comme des citoyens selon la loi, mais qu’une certaine vision de « l’identité française » exclu ? Il faut rappeler qu’en France, la citoyenneté est définie par le droit du sol (jus solis). En effet cette vision de l’identité qui jusque là était valable de part une certaine « homogénéité » de la population, le référent « judéochrétien » suffisait pour définir un certain dénominateur commun des citoyens (avec toutes les doutes qu’on peut avoir sur la partie « judéo », quand on relit l’Histoire). Ceci n’est pas spécifique à la France, d’ou la question subsidiaire: comment intégrer à la notion de l’identité européenne une nouvelle population dont un des référents civilisationnels et culturels est autre que judéo-chrétien? Peut on imaginer l’élargissement de ce référent à un autre comme « Judéo-Islamo- chrétien » ? d’autant plus que les rapports de l’islam et de l’Europe en général et la France en particulier ne remonte pas uniquement à la colonisation ou à l’immigration. Cet élargissement est à prendre dans une vision culturelle bien sur et non cultuelle. Il ne s’agit pas de nier ou de rejeter l’identité française définit par une certaine continuité de l’Histoire - mais justement, et selon cette même notion de la continuité de l’Histoire - Il s’agit d’accepter qu’une autre référence culturelle et civilisationnelle soit intégrée dans l’identité nationale. On ne peut pas dans l’histoire de ce pays, avoir accueilli autant de populations pour des raisons diverses, qu’elles soient économiques ou par générosité et penser que cela n’induirait pas de changement dans la constitution de la société actuelle. Une société n’est pas un bloc monolithique, elle est vivante, le temps est inscrit dans son ADN. De la même manière, on peut dire que la laïcité ne l’est pas non plus, elle n’est pas un dogme. Une vision agressive et exclusive de la laïcité peut alimenter à la fois une certaine islamophobie ( au sens racisme antimusulmans) et un radicalisme religieux. Il faudrait donc redéfinir une nouvelle vision de l’identité française, et réfléchir à comment faire de la place aux derniers arrivants qui font partie à part entière de l’Histoire contemporaine de ce pays, sans leur proposer ni une assimilation à la Zemmour ni les essentieliser. La laïcité dans son essence universelle peut permettre cela. Elle est l’outil qui pourrait garantir et permettre que cette mutation de la société française accouche d’une société harmonieuse ou le pluriel adhère au commun. Un commun qui fait société, une société pétrie d’idéaux des Lumières. H.Legzouli