Destination d’origine : pièce de l’étage supérieur de la Villa Lemmi (nom des propriétaires de la villa
vers 1870) à Chiasso Macerelli, près de Florence. Au XVe : villa ayant appartenu aux Tornabuoni de
1469 à 1541, famille parente par alliance (et alliée) des Médicis avec qui elle avait des intérêts
politiques et financiers communs.
Les sujets des deux fresques (aujourd’hui au Louvre) de la villa Lemmi sont des allégories célébrant, a
priori, de nouveaux époux. Appartenaient à un ensemble de 3 fresques (ou 4 ?) recouvrant chaque mur
de la pièce. Découvertes sous des couches de badigeon en 1873 et vendues par les Lemmi à un
antiquaire/marchand nommé Bardini qui se hâta des les récupérer avant que la famille ne se rende
compte de leur valeur (dégradations dues à la dépose dans la hâte). La dépose est une technique pour
détacher une fresque/peinture murale du mur, en emportant l’enduit de la fresque et son support de
mortier afin de la déplacer dans un autre lieu. Elles furent ensuite marouflées (collées) sur toile
La 3e fresque (portrait en pied de Giovanni Tornabuoni ?), complètement dégradée, est restée en place
tandis que les 2 autres furent achetées par la France en 1882 et conservées au Louvre.
Fresques en mauvais état de conservation et lacunaires (mais restaurées).
Malgré leur état, les fresques témoignent de l’art délicat des meilleures compositions de Botticelli.
Sinuosité des lignes, fraîcheur et harmonie des couleurs, drapés aériens, grâce des attitudes.
Commanditaire : famille Tornabuoni. Giovanni Tornabuoni, père de Lorenzo est aussi l’oncle de
Laurent le Magnifique (dont la mère est Lucrezia Tornabuoni, sœur de Giovanni et épouse, donc, de
Pierre de Médicis). Tornabuoni : une des + grandes familles de négociants florentins du XVe siècle.
En bon florentin du Quattrocento, Giovanni alliait le goût de l’ostentation et l’orgueil familial à une
piété fervente (il commande en 1485 à Ghirlandaio, son artiste préféré, les célèbres fresques de la vie
de la Vierge pour le chœur de Santa Maria Novella).
1ère hypothèse : on suppose le plus fréquemment que le somptueux mariage de Lorenzo Tornabuoni et
Giovanna degli Albizzi en 1486 fut l’occasion de la commande. D’après Horne (1908), Lightbown
(1978) et Giulio Carlo Argan, elles auraient été exécutées pour ces noces: les fresques portaient
autrefois les blasons de ces 2 familles. L’importance de l’évènement avait été célébré aussi par 2
médailles portant, à l’avers, le profil des jeunes gens et, au revers, Mercure pour Lorenzo (Dieu du
Commerce) et les Grâces (avec inscription latine : chasteté, beauté, amour) pour Giovanna.
2ème hypothèse : Caterina Caneva (1992) rappelle les études de Salvini (1955) et d’Ettinger (1976)
pour proposer un autre mariage, 3 années plus tôt, occasion éventuelle de cette commande : celui de
Matteo Albizzi et de Nanna Tornabuoni, en 1483. Cette hypothèse, basée sur une analyse stylistique,
placerait l’exécution entre le séjour romain de Botticelli et La naissance de Vénus (à condition que sa
datation, non unanime, soit de 1484).
Enin, Alexandra Grömling et Tilman Lingesleben penchent pour la 2e hypothèse, arguant que le visage
de Giovanna, connu par une médaille, n’est pas celui de la fresque (mais argument contestable, me
semble-t-il, pour une allégorie louangeuse).