Œil et Physiologie de la Vision - VII-3. 1ère partie
Rétinopathie du LCHAD-D
Elle a été initialement décrite en 1989 et classée en quatre stades en 1998 [Tyni et al.,
1998a]. Stade 1 : fond d’œil hypopigmenté et fonctionnement normal des neurorétines ;
stade 2 : dépôt de pigments en zone maculaire avec dysfonctionnement des
neurorétines, mais acuité visuelle conservée ; stade 3 : disparition de la pigmentation
maculaire remplacée par une pâleur maculaire et une atrophie de la choriocapillaire,
apparition de pigments en périphérie, dysfonctionnement majeur des neurorétines avec
ERG pouvant être non discernable : à ce stade, les patients peuvent décrire une
héméralopie associée à une dyschromatopsie ; enfin, stade 4 : perte des photorécepteurs
et des vaisseaux de la choriocapillaire au pôle postérieur et perte de la vision centrale.
L’évolution se fait lentement vers une atrophie rétinienne avec, à long terme, une
diminution sévère de l’acuité visuelle [Hayes, et al., 2007].
Mécanismes possibles de la rétinopathie du LCHAD-D
Ils ne sont pas encore élucidés avec certitude. La rétinopathie affecte précocement
l'épithélium pigmentaire puis la choriocapillaire [Tyni et al., 1998b], [Tyni et al., 2002],
[Tyni et al., 2004], [Stopek, et al., 2008].
Déficience de l'épithélium pigmentaire
L’épithélium pigmentaire possède de très nombreuses mitochondries avec une activité de
béta-oxydation intense [Tyni, et al., 2002]. La déficience de l'épithélium pigmentaire
pourrait être due à l’accumulation d’acylcarnitines anormales (et toxiques ?) induisant
alors la mort des cellules de l'épithélium pigmentaire. Le retentissement sur les
photorécepteurs serait secondaire [Tyni, et al., 2004], [Roomets et al., 2008].
Gillingham et coll [Gillingham et al., 2005], Flechter et coll [Fletcher, et al., 2012]
observent une corrélation clinique entre l’évolution de la rétinopathie et le taux de 3-
hydroxyacylcarnitines dans le plasma de leurs patients, confortant ainsi l’hypothèse de la
toxicité des 3-hydroxyacylcarnitines sur la rétine. Cependant, Flechter et coll. soulignent
qu’aucune étude toxicologique directe n’a été publiée prouvant que les 3-hydroxy acides
à longue chaîne et les 3-hydroxyacylcarnitines sont spécifiquement toxiques pour les
cellules rétiniennes…
Après analyses histologiques d’épithéliums de patients atteints de LCHAD-D, Fletcher et
coll [Fletcher, et al., 2012] suggèrent que la mort des cellules de l'épithélium pigmentaire
résulterait de l’activité intense de nombreux macrophages trouvés dans l'épithélium
pigmentaire atteint, avec effet secondaire sur les photorécepteurs, plutôt que d’un effet
toxique.
Déficience des photorécepteurs
D’autres facteurs semblent participer à la survenue et l’évolution de la rétinopathie du
LCHAD-D comme le déficit énergétique important par manque d’ATP [Stopek, et al.,
2008]. Ce facteur pourrait expliquer la dissociation entre le dysfonctionnement du
système des cônes plus précoce que celui des bâtonnets, comme cela est illustré par
l’exemple que nous présentons et commentons ci-dessous.
Traitement
Il associe une supplémentation en triglycérides à chaîne moyenne et des précautions
diététiques : éviter le jeûne, une alimentation pauvre en acide gras à longue chaîne
[Jones et al., 2003]. Il lui est souvent associé une supplémentation en acide
docosahexaénoïque (DHA) qui est le principal constituant des membranes des
photorécepteurs et des cellules de l’épithélium pigmentaire [Tyni, et al., 2004]. Le DHA
améliore l’état général et ralentirait voire stabiliserait l’évolution de la rétinopathie
[Gillingham, et al., 2005], [Sturm, 2008], [Fletcher, et al., 2012].