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ADENOMYOSE

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Gynécologie Obstétrique & Fertilité 32 (2004) 976–980
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES
Adénomyose : quel bilan d’imagerie moderne ?
Adenomyosis: what imaging modality in the diagnosis and
staging?
P. Taourel a,*, G. Laffargue a, H. Dechaud b
a
b
Service d’imagerie médicale, hôpital Lapeyronie, 371, avenue du Doyen-Gaston-Giraud, 34295 Montpellier cedex 05, France
Service de gynécologie, hôpital Arnaud-de-Villeneuve, 371, avenue du Doyen-Gaston-Giraud, 34295 Montpellier cedex 05, France
Reçu le 22 décembre 2003 ; accepté le 16 septembre 2004
Disponible sur internet le 14 octobre 2004
Résumé
L’adénomyose représente avec les fibromes la pathologie myométriale la plus fréquente. Son diagnostic clinique est
souvent difficile. À partir de sa définition histologique, la sémiologie, les limites et le rôle diagnostique de
l’hystérographie, de l’échographie abdominale et endovaginale et de l’IRM seront largement détaillées.
© 2004 Publié par Elsevier SAS.
Abstract
Adenomyosis constitutes the most frequent myometrial disorder with leiomyoma. Its clinical diagnosis is often
difficult. After giving a histopathologic definition, the semiology, the limits, and the diagnostic role of hysterography,
transabdominal and endovaginal sonography and MRI will be discussed.
© 2004 Publié par Elsevier SAS.
Mots clés : Utérus ; Adénomyose ; Imagerie
Keywords: Uterus; Adenomyosis; Imaging modality
1. INTRODUCTION
L’adénomyose est définie par la présence ectopique de
foyers d’endomètre composés de glande et de chorion
profondément enchâssés dans le myomètre. Sa physiopathologie demeure inexpliquée et sa fréquence apparaît extrêmement variable dans la littérature avec une incidence sur
pièces d’hystérectomie variant entre 19 et 62 % [1], une telle
variation étant directement proportionnelle au nombre de
prélèvements réalisés mais également à la définition anatomopathologique prise en compte et notamment à la profondeur de pénétration endométriale au sein du myomètre
exigée pour porter le diagnostic d’adénomyose.
* Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (P. Taourel).
1297-9589/$ - see front matter © 2004 Publié par Elsevier SAS.
doi:10.1016/S1297-9589(04)00289-9
Selon la diffusion des lésions découvertes seront distinguées l’adénomyose diffuse correspondant à une dissémination de nombreux foyers dans de multiples sites myométriaux, et l’adénomyose focale correspondant à quelques
foyers retrouvés sur une seule localisation myométriale.
L’adénomyome est une forme d’adénomyose focale qui
prend un aspect nodulaire, et qui pose des difficultés de
différenciation macroscopique avec un léiomyome.
L’adénomyose atteint la femme en période d’activité génitale, le plus souvent entre 40 et 50 ans. Elle est beaucoup
plus rare, mais néanmoins possible, après la ménopause.
Le diagnostic est rarement affirmé sur les signes cliniques
qui sont non spécifiques mais parfois très invalidants et qui
associent, en premier lieu, des hémorragies génitales à type
de ménorragies ou de ménométrorragies, une dysménorrhée résistante aux traitements antalgiques et une dyspareu-
P. Taourel et al. / Gynécologie Obstétrique & Fertilité 32 (2004) 976–980
nie. L’examen clinique est souvent non évocateur et ne
retrouve que les signes d’une maladie associée : autres
localisations d’endométriose, fibrome.
Le traitement inclut différentes modalités : traitement
médical (progestatifs, analogue de la LHRH), réduction d’endomètre sous hystéroscopie, hystérectomie totale. Les difficultés du diagnostic clinique et l’impact d’un bilan précis
dans la décision thérapeutique, même si celle-ci repose
principalement sur la gêne induite par les symptômes cliniques, rendent nécessaire l’utilisation large de l’imagerie. Ce
bilan d’imagerie a d’abord reposé sur l’hystérographie puis
sur l’échographie et aujourd’hui sur le couple échographie
endovaginale–IRM. L’objectif de cette mise au point est
d’exposer la sémiologie, les limites et la place des techniques
d’imagerie, à l’exclusion de l’imagerie endoscopique et anatomopathologique, pour les différentes étapes du diagnostic
d’adénomyose : diagnostic positif, bilan préthérapeutique,
suivi après traitement.
2. TECHNIQUES
2.1. Hystérosalpingographie
2.1.1. Sémiologie
Le signe hystérographique direct est la mise en évidence
de cryptes adénomyosiques sous la forme de multiples petits
spicules de 1 à 4 mm de long, s’étendant de l’endomètre
jusqu’au sein du myomètre (Fig. 1), de meilleure visibilité sur
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Fig. 2. Signes indirects d’adénomyose en hystérographie : les parois utérines
sont rigides et les cornes utérines sont ectasiques et relevées en corne de
taureau ou classique « tuba erecta ».
les clichés en réplétion et pouvant tapisser toute la cavité
utérine dans le cadre de l’adénomyose diffuse [2]. Lorsque
ces images d’addition siègent au niveau des cornes utérines,
elles donnent des images en « boule de gui » avec des
diverticules arrondis à pédicule étroit.
Les signes indirects d’adénomyose sont l’agrandissement
diffus de la cavité et la difficulté à son remplissage, l’ectasie
des cornes utérines et une image d’angulation en baïonnette
au niveau de l’isthme utérin témoignant de lésions d’endométriose des ligaments utéro-sacrés et du cul-de-sac de
Douglas (Fig. 2).
2.1.2. Pièges et limites
La plupart des cryptes glandulaires ne communiquent pas
avec la couche superficielle de l’endomètre et donc ne sont
pas injectées au cours de l’hystérographie, engendrant de
nombreux faux-négatifs [3]. Des cryptes trop proximales
siégeant dans la muqueuse correspondent simplement à des
trajets glandulaires. Par ailleurs, les spicules ne sont pas
spécifiques, pouvant être retrouvés lors d’extravasations
vasculaires ou lymphatiques.
2.1.3. Indication
Le manque de spécificité mais surtout de sensibilité de
l’hystérographie dans le diagnostic d’adénomyose expliquent
que l’hystérographie ne soit plus utilisée chez une patiente
suspecte d’adénomyose. Notons cependant, dans la principale indication de l’hystérographie en pathologie gynécologique, le bilan de stérilité, la présence de signes d’adénomyose doit être notée. Cependant que la relation existant
entre adénomyose et stérilité demeure controversée, la
stérilité étant plus souvent expliquée par des lésions d’endométriose externe associées, notamment de siège tubaire ou
ovarien.
2.2. Échographie sus-pubienne
Fig. 1. Signe direct d’adénomyose en hystérographie avec multiples images
d’addition linéaire de siège fundique.
2.2.1. Sémiologie
La visualisation des cryptes glandulaires est exceptionnelle par voie sus-pubienne en raison de leurs petites tailles.
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L’échographie sus-pubienne ne retrouvera le plus souvent
qu’un utérus augmenté de volume, globuleux, d’échostructure légèrement hétérogène avec, dans les cas typiques, une
asymétrie d’épaisseur des parois utérines antérieure et postérieure.
2.2.2. Pièges et limites
L’échographie a une très mauvaise sensibilité si l’on utilise
comme critère diagnostique la présence de cryptes très
évocatrices mais exceptionnellement vues en échographie,
et une mauvaise spécificité si l’on utilise comme critère la
présence d’une augmentation de volume de l’utérus ou d’un
utérus hétérogène car de nombreuses autres causes peuvent expliquer une augmentation de volume de l’utérus à
commencer par les fibromes utérins.
2.2.3. Indications
L’apport de l’échographie sus-pubienne dans le diagnostic
d’adénomyose est limité [4]. Elle est réalisée en première
intention chez les patientes vierges, ou parfois en complément de l’échographie endovaginale dans les très gros utérus.
2.3. L’échographie endovaginale
2.3.1. Sémiologie
L’échographie endovaginale a le principal intérêt de pouvoir visualiser des cryptes glandulaires au sein du myomètre,
visibles sous la forme de petites lésions liquidiennes siégeant
au niveau de la partie interne du myomètre (Fig. 3), parfois
regroupées sous forme de plages hétérogènes donnant un
aspect de « tache de léopard » au myomètre [5,6]. Plus
rarement, il est possible de voir une couronne échogène
endométriale tapissant la crypte glandulaire ou la remplissant en fin de cycle. Il existe alors, au sein de la partie interne
du myomètre, des nodules arrondis ou des flammèches
hyperéchogènes.
En l’absence de ces signes directs, l’échographie endovaginale recherchera des signes moins spécifiques [7] : un
aspect irrégulier de la jonction endomètre–myomètre, un
volumineux utérus en l’absence de myome pour l’expliquer,
une asymétrie d’épaisseur de paroi utérine, un myomètre
d’échostructure hétérogène.
Fig. 3. Adénomyose en échographie endovaginale avec cryptes glandulaires paracavitaires postérieure (3a) et antérieure (3b) vues sur les coupes sagittales (3a
et b) et axiale (3c). Noter la correspondance IRM avec une coupe sagittale pondérée en T2 (3d) où sont également bien individualisées les cryptes décrites en
échographie.
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2.3.2. Pièges et limites
Les kystes myométriaux très évocateurs du diagnostic ne
sont retrouvés que dans deux tiers des cas, même dans les
séries les plus performantes. Ils ne devront pas être confondus avec les autres images liquidiennes utérines : veine
myométriale siégeant au niveau du tiers externe du myomètre, kystes de Naboth, diverticules cicatriciels posthystérotomie siégeant dans la région cervico-isthmique, kystes glandulaires siégeant au niveau de l’endomètre, vésicules
molaires résiduelles après tumeur trophoblastique, rares et
dans un contexte clinique caractéristique.
En cas d’absence de ces signes directs, l’imagerie s’appuiera sur des signes indirects moins spécifiques.
Lorsque l’adénomyose est très localisée dans une forme
nodulaire (adénomyome) le diagnostic différentiel est posé
avec un fibrome et l’échographie rencontre des difficultés
souvent solutionnées par l’IRM qui permet de caractériser
l’adénomyome par son contenu hématique [8].
2.3.3. Indications
L’échographie endovaginale est l’examen de base dans le
diagnostic d’adénomyose [9]. Elle a en outre l’intérêt d’apprécier la profondeur de l’adénomyose qui est un des éléments de choix dans la prise en charge : traitement médical,
réduction endométriale sous hystéroscopie, hystérectomie.
Elle permet enfin le suivi sous traitement.
2.4. L’imagerie par résonance magnétique (IRM)
2.4.1. Sémiologie
Les critères IRM d’adénomyose sont très corrélés aux
critères macroscopiques et incluent la visualisation des cryptes glandulaires au sein du myomètre et l’épaississement
réactionnel de la partie interne du myomètre [4,10] (Fig. 4).
Les cryptes seront visualisées sous forme de petites lésions
en hypersignal T2, punctiformes et souvent en isosignal
T1 qui correspondent à du tissu endométrial non hémorragique, ou sous forme de spots hyperintenses en T1 et en T2,
plus rares, qui correspondent à des cryptes glandulaires à
contenu hémorragique (Fig. 4a). L’épaississement de la partie interne du myomètre est visualisé en IRM sous la forme
d’un épaississement de la ligne jonctionnelle avec des critères de taille régulièrement revus à la hausse, dont les anciennes valeurs seuil, à 5 mm puis à 8 mm, sont aujourd’hui à
11 ou 12 mm [5,9–11]. Pour certains, l’épaisseur de la zone
jonctionnelle doit être rapportée à l’épaisseur totale du
myomètre et la zone jonctionnelle est considérée comme
épaissie lorsqu’elle est supérieure à l’épaisseur du myomètre. Les signes indirects les plus utiles sont la mauvaise
définition de l’interface entre la ligne jonctionnelle et le
myomètre externe, et l’absence d’effet de masse sur l’endomètre ou de déformation du bord externe de l’utérus [12].
2.4.2. Pièges et difficultés
De même qu’en échographie endovaginale, les spots kystiques au sein du myomètre sont inconstamment visualisés,
Fig. 4. Volumineux utérus infiltré par une adénomyose diffuse vue sur des
coupes IRM sagittales pondérées en T1 (4a) et en T2 (4b et 4c). Noter
l’épaississement très important de la zone jonctionnelle, l’interface mal
limitée entre la zone jonctionnelle et le bord externe du myomètre, la
présence de multiples kystes au sein de cette zone jonctionnelle, dont un au
moins est hémorragique avec un hypersignal sur la séquence pondérée en T1.
rendant alors utile, comme signe diagnostique, l’épaississement de la zone jonctionnelle. Or la visualisation de la zone
jonctionnelle est présente chez environ 80 % des patientes
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en période d’activité génitale et 50 % des patientes ménopausées. Ce signe ne peut pas être évalué chez les patientes
dont la zone jonctionnelle n’est pas visualisée. À l’inverse,
des contractions utérines peuvent être responsables d’un
pseudo-épaississement de la ligne jonctionnelle mais celui-ci
est localisé, de forme ovalaire et disparaît sur une séquence
pratiquée quelques minutes plus tard.
RÉFÉRENCES
[1]
[2]
[3]
[4]
2.4.3. Indications
En diagnostic, la principale indication de l’IRM repose sur
les difficultés de l’échographie et notamment en cas d’association fréquente entre adénomyose et fibrome ou dans les
utérus volumineux [13]. L’IRM permet encore, mieux que
l’échographie, de différencier un adénomyome d’un fibrome
utérin dans les formes localisées. Enfin, l’IRM est une technique plus reproductible que l’échographie endovaginale et
pourrait donc être utilisée pour apprécier l’efficacité d’un
traitement médical. Le principal avantage de l’IRM reste
cependant dans la recherche d’autres localisations, notamment ovariennes et sous péritonéales.
[5]
[6]
[7]
[8]
[9]
3. CONCLUSION
L’imagerie a une place de plus en plus importante dans le
diagnostic et surtout le bilan d’extension d’une adénomyose.
L’examen de base est l’échographie endovaginale. Une IRM
pourra lui être adjointe en cas de difficulté de l’échographie
endovaginale, notamment dans les utérus volumineux et/ou
polyfibromateux, ou lorsque la symptomatologie clinique fait
suspecter des localisations associées, en particulier d’endométriose sous-péritonéale.
[10]
[11]
[12]
[13]
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