Chapitre I Le système climatique et ses composantes I.1 Introduction Le climat est traditionnellement défini comme la description en termes de la moyenne et de la variabilité des variables atmosphériques pertinents tels que la température, les précipitations et le vent. Le climat peut donc être considéré comme une synthèse ou un agrégat de temps. Cela implique que la représentation du climat dans une région particulière doit contenir une analyse des conditions moyennes, du cycle saisonnier, de la probabilité des extrêmes telles que le gel et les tempêtes sévères, etc… D’après l'Organisation Météorologique Mondiale (OMM), 30 années est la période classique pour effectuer les statistiques utilisées pour définir le climat. Ceci est bien adapté pour l'étude de ces dernières décennies car il nécessite une quantité raisonnable de données tout en fournissant un bon échantillon des différents types de conditions météorologiques qui peuvent se produire dans un domaine particulier. Cependant, en analysant le passé le plus lointain, comme le dernier maximum glaciaire, il ya environ 20000 ans, les climatologues ont souvent intéressé aux variables caractéristiques d'intervalles de temps plus longues. En conséquence, la période de 30 ans proposée par l'OMM devrait être considérée plus comme une indication plutôt que d'une norme qui devrait être suivie dans tous les cas. Cette définition du climat comme représentatives des conditions sur plusieurs décennies devrait, bien sûr, ne pas masquer le fait que le climat peut changer rapidement. Cependant, un intervalle de temps considérable est nécessaire pour observer une différence de température entre deux périodes. En général, pour la moindre différence entre les deux périodes, la période-unité est le temps nécessaire pour être en mesure d'identifier avec certitude toute modification de la température entre elles. Nous devons également prendre en compte le fait que l'état de l'atmosphère, utilisé dans la définition du climat donnée ci-dessus est influencée par de nombreux processus impliquant non seulement l'atmosphère, mais aussi de l'océan, la glace de mer, la végétation, etc. Le climat est donc maintenant de plus en plus souvent défini dans un sens plus large que la description statistique du système climatique. Cela comprend l'analyse du comportement de ses cinq composantes principales: l'atmosphère (l'enveloppe gazeuse entourant la Terre), l'hydrosphère (eau liquide, soit l'océan, lacs, eaux souterraines, etc.), la cryosphère (eau solide, c'est à dire la glace de mer, les glaciers, les calottes glaciaires, etc.), la surface de la terre et la biosphère (tous les organismes vivants), et des interactions entre eux (GIEC 2007 Fig 1.1). Nous allons utiliser cette définition plus large lorsque nous utilisons le mot climat. Les sections suivantes de ce premier chapitre contiennent des informations générales sur ces composants. Notez que le système climatique lui-même est souvent considérée comme faisant partie de l'ensemble du système de la Terre, qui inclut toutes les parties de la Terre et non seulement les éléments qui sont directement ou indirectement liées à la température ou les précipitations. Fig 1.1: Vue schématique des composantes du système climatique et de leurs modifications éventuelles GIEC (2007). I.2 Les composantes du climat I.2.1 L’atmosphère Composition et température On appelle « atmosphère » l'enveloppe gazeuse qui entoure certains corps célestes comme, par exemple, la Terre, Vénus ou Mars. Les gaz sont maintenus autour de ces corps célestes par la force gravitationnelle qui les retient et les empêche de s'échapper vers l'espace. Fig. 1.2. Profil vertical de l'atmosphère terrestre L'épaisseur de l'atmosphère (voir Fig. 1.2) varie entre 350 et 800 km ; elle dépend en particulier de l'activité solaire ; l'épaisseur moyenne est d'environ 600 km. Au-delà de cette altitude, on est dans l'exosphère : ce n'est pas le vide qui y règne, on y rencontre encore quelques très rares particules, d'hydrogène et d'hélium essentiellement, mais si rares que l'on peut considérer qu'il n'y a jamais de collision entre elles. Ces particules ne sont plus retenues par la gravité terrestre et peuvent s'échapper vers l'espace. Les molécules des gaz atmosphériques sont donc essentiellement concentrées près du sol. Ainsi, la moitié de la masse de l'atmosphère se situe au-dessous de 5 500 m, les 3/4 audessous de 10 km, les 9/10 au-dessous de 16 km ; 99 % de la masse de l'atmosphère se situe entre 0 et 30 km. Dans cette couche, la composition chimique de l'air est relativement homogène La composition chimique de l'atmosphère terrestre L'atmosphère terrestre est originale, comparée à celles des autres planètes du système solaire. Ainsi, les atmosphères de Vénus et de Mars sont très riches en dioxyde de carbone CO2 (respectivement 97 % et 95 % de ce gaz), alors que l'atmosphère terrestre en contient très peu. L'eau joue un rôle extrêmement particulier dans l'atmosphère terrestre : la vapeur d'eau est le seul gaz à y présenter une concentration très variable dans le temps et dans l'espace. Les autres gaz, eux, ont une concentration relativement stable et homogène, même s'il y a évidemment des fluctuations. Une autre particularité de l'eau, essentielle, est que ce corps est le seul présent dans l'atmosphère à présenter des changements d'état aux températures habituellement rencontrées sur notre planète : ainsi, aux températures usuelles sur Terre, on voit quotidiennement de la vapeur d'eau se condenser, et de l'eau liquide parfois se changer en glace ; et on voit non moins couramment de l'eau liquide s'évaporer… Les autres constituants de l'atmosphère, quant à eux, ne se présentent qu'à l'état gazeux ; il faudrait des températures extraordinairement froides (que l'on pourrait atteindre dans un laboratoire, mais que l'on ne trouve jamais naturellement dans l'atmosphère) pour les rencontrer à l'état liquide ou solide. L'eau joue un rôle tellement particulier dans l'atmosphère que les météorologistes décrivent habituellement l'air atmosphérique comme un mélange de deux gaz : l'air sec et la vapeur d'eau qu'ils traitent à part. En moyenne, l’eau ne représente que 0,25 % de la masse totale de l'atmosphère, ce qui en fait un constituant assez minoritaire. L'eau se rencontre essentiellement dans les premiers kilomètres de l'atmosphère. On la trouve sous forme de vapeur, et aussi sous forme liquide (dans les nuages, brouillards…) et solide (dans certains nuages). Insistons sur le fait que la vapeur d'eau est un gaz invisible, présent partout dans l'atmosphère. Le tableau ci-dessous décrit la composition de l'air sec: Signalons que cette liste de gaz n'est pas exhaustive ; certains gaz dont les pourcentages en volume sont encore plus faibles n'apparaissent pas. On constate sur ce tableau que trois gaz, l'azote, le dioxygène et l'argon, constituent presque 100 % du total ; les autres gaz ne représentent chimiquement que des traces. Malgré leur très faible concentration, certains de ces gaz à l'état de trace jouent un rôle important. - Ainsi, les gaz dits « à effet de serre » limitent les pertes d'énergie par rayonnement de la surface de la Terre, et entraînent donc un réchauffement de la température de notre planète. L'effet de serre est très bénéfique pour la Terre : sans lui, les températures seraient glaciales, peu propices à la vie. Le problème mis en évidence au cours des dernières décennies réside dans l'augmentation de l'effet de serre à cause des activités humaines (l'utilisation croissante des combustibles fossiles et accessoirement le déboisement). Le dioxyde de carbone (CO2) et le méthane (CH4) sont deux gaz impliqués dans cette augmentation de l'effet de serre. L'ozone L’Ozone (O3) joue lui aussi un rôle crucial, malgré sa très faible concentration. Son importance réside dans sa capacité à absorber une grande partie des rayonnements ultraviolets en provenance du Soleil et à « protéger » la surface de la Terre de ce rayonnement dangereux. L'ozone se trouve essentiellement en altitude, avec un pic de concentration vers 25 km (voir Fig. 1.3): c'est la célèbre « couche d'ozone », qui présente malheureusement des trous fluctuants, apparaissant et disparaissant au-dessus des pôles selon le moment de l'année. Fig. 1.3 : Profil vertical typique de l’ozone atmosphérique Il y a un peu d'ozone dans les basses couches, dans l'air que nous respirons : cet ozone de basse couche est essentiellement produit par les activités humaines ; autant l'ozone d'altitude est bénéfique pour la vie, autant celui près du sol est néfaste pour l’homme: c'est un gaz irritant. Les aérosols L'atmosphère terrestre est composée de corps à l'état gazeux (essentiellement de l'azote et du dioxygène) et d'eau, qui présente la particularité d'exister dans l'atmosphère sous ses trois états : solide, liquide et gazeux. Ce n'est pas tout ; on y rencontre aussi ce que les météorologistes appellent des aérosols : ce sont des particules solides ou liquides (à l'exclusion des gouttelettes ou des cristaux d'eau) en suspension dans l'air. Certains aérosols sont d'origine naturelle, comme les cendres volcaniques, le pollen des fleurs, les spores de plantes ou les cristaux de sel marin ; d'autres sont produits par l'activité humaine (rejets industriels). La présence de ces aérosols dans l'atmosphère n'est pas anodine du tout : en effet, certains d'entre eux ont la propriété de faciliter la formation des gouttelettes d'eau ou des cristaux de glace qui forment les nuages. Variation de la température avec l'altitude On a mis en évidence, dans l'atmosphère, un certain nombre de couches caractérisées par leur profil thermique vertical (Fig. 1.4). - La première couche, celle dans laquelle nous vivons, s'appelle la troposphère. Elle est épaisse d'une dizaine de kilomètres, et elle est caractérisée par une décroissance moyenne de la température avec l'altitude de 0,65 °C par 100 mètres. La troposphère est la couche dans laquelle ont lieu l'immense majorité des phénomènes météorologiques ; elle contient presque toute la vapeur d'eau. La limite supérieure de la troposphère s'appelle la tropopause. Son altitude varie en fonction de la latitude, ainsi que de la situation météorologique. On la trouve en moyenne vers 6 à 8 km aux pôles, 11 km aux latitudes tempérées et vers 16-18 km aux latitudes équatoriales. - La seconde couche s'appelle la stratosphère, caractérisée par une croissance de la température avec l'altitude, d'abord très faible, puis devenant plus nette à partir de 30 km. La limite supérieure de la stratosphère s'appelle la stratopause, qui se situe en moyenne vers 50 km d'altitude, avec une température moyenne de 0 °C. - La troisième couche s'appelle la mésosphère ; on y observe une décroissance rapide de la température avec l'altitude, cessant brusquement à la mésopause, située vers 80 km et 1 Pa et où l'on a des températures comprises entre –120 °C et –50 °C. - Enfin, au-delà de 85 km environ, c'est la thermosphère ; on y observe une augmentation rapide de la température avec l'altitude. Signalons que les molécules de gaz y deviennent si rares que la notion de température établie sur l'agitation des molécules n'a plus vraiment de sens à partir de 100 km environ. À ces hautes altitudes, les particules commencent à interagir avec le vent solaire. Le schéma ci-dessous récapitule ces différentes couches, pour une atmosphère « standard » aux moyennes latitudes. Fig 1.4 : Variation de la température avec l'altitude Ce profil vertical de température est totalement lié à la composition chimique de l'atmosphère, et à la capacité des différents gaz qui la composent d'absorber certains rayonnements. Ainsi, l'augmentation de la température avec l'altitude dans la stratosphère, et donc le maximum relatif de température à la stratopause, s'explique par l'absorption des UV par l'ozone stratosphérique. Circulation générale de l'atmosphère Les températures élevées à l'équateur rendent l'air moins dense. Il a donc tendance à s’élever avant d'être transporté vers les pôles à haute altitude dans la troposphère. Ce mouvement est compensé à la surface par un déplacement vers l'équateur de l'air. Sur une Terre immobile, cette grande cellule de convection atteindrait les pôles, ce qui induit des échanges directs entre les endroits les plus chauds et les plus froids sur la Terre. Toutefois, en raison de la rotation de la Terre, une telle structure atmosphérique serait instable. Par conséquent, les deux cellules entraînées par la montée à l'équateur, appelées cellules de Hadley, tout près avec une branche vers le bas à une latitude d'environ 30 ° (Fig. 1.5). La limite nord de ces cellules est marquée par des vents forts d'ouest dans la haute troposphère appelé les jets troposphériques. A la surface, la rotation de la Terre est responsable d'une déviation vers la droite dans l'hémisphère nord et vers la gauche dans l'hémisphère sud (en raison de la force de Coriolis) de l'écoulement provenant des latitudes moyennes à l'équateur. Cela donne lieu aux alizés, circulation caractérisant les régions tropicales. Fig 1.5: Représentation schématique de la circulation générale moyenne de l'atmosphère. (A) et (D) représentent les systèmes à haute et basse pression La circulation extratropicale est dominée à la surface par les vents d'ouest, dont la symétrie zonale est perturbée par les ondes lentes et la succession continue des perturbations qui régit les variations du temps au jour le jour dans ces régions. La caractéristique dominante de la circulation méridienne à ces latitudes est la cellule Ferrell, qui est plus faible que la cellule de Hadley. Comme il est marqué par un mouvement d’ascension dans sa branche vers le pôle et le mouvement de subsidence dans la branche de l'équateur, il est appelé une cellule indirecte par contre la cellule de Hadley est appelée cellule directe.