RJOI 2010 – n°11 149
Maurice, un petit État insulaire particulièrement dynamique qui a proclamé son indépendance le
12 mars 1968
1
. La présence de la France est enfin remise en cause de manière rituelle et plus ou
moins épisodique par les autorités politiques d'Antananarivo qui revendiquent officiellement - 12
ans après l'accession de Madagascar à la pleine souveraineté internationale survenue le 26 juin
1960 - le rattachement à la Grande-Terre des îles Éparses du canal de Mozambique : nommément
le mini-archipel des Glorieuses et les trois îlots Juan de Nova, Europa et Bassas da India
2
.
Assurément, le récif de Tromelin, l'archipel des Glorieuses et les îlots Juan de Nova,
Europa et Bassas da India - dispersés respectivement à l'ouest, au nord et à l'est de Madagascar -
n'ont pas fini de défrayer la chronique sur la scène internationale même si ces terres sont
désertiques, dépourvues de richesses naturelles et étendues globalement sur moins de 50
kilomètres carrés de terres émergées
3
. Jusqu'à nouvel ordre, le sort de ces "poussières d'Empire" -
sommairement indiquées dans les dictionnaires et autres documents cartographiques - demeurera
sujet à controverses aussi longtemps qu'elles feront l'objet de revendications de la part de certains
États riverains de la zone sud-ouest de l'océan Indien. Cependant, si les îles Éparses du canal de
Mozambique et le récif de Tromelin suscitent une curiosité certaine dans la Communauté
internationale, ces territoires lilliputiens ne laissent pas également indifférents sur le plan interne
comme le révèle l'actualité française la plus récente. Après une longue période d'hibernation qui
remonte à un décret du 1
er
avril 1960, deux événements importants concernant l'ensemble de ces
îlots se sont en effet produit coup sur coup, en 2005 et en 2007.
D'abord, les îles Tromelin, Glorieuses, Juan de Nova, Europa et Bassas da India ont été
dotées d'un nouveau responsable sur le plan administratif en vertu d'un arrêté du 3 janvier 2005
4
.
Depuis cette date, elles ne sont plus administrées par le préfet du département de La Réunion en
sa qualité de "délégué du Gouvernement de la République". Pour des raisons de commodité
géographique, ces îlots sont désormais gérés par le "préfet, administrateur supérieur des Terres
australes et antarctiques françaises", sans pour autant être encore officiellement rattachés à cette
collectivité territoriale insolite de la République.
Certes, cette solution administrative tardive était de loin préférable à la précédente. Elle
était néanmoins un "pis-aller" dans la mesure où les îles Éparses du canal de Mozambique et le
récif de Tromelin demeuraient des "territoires résiduels de la République" au même titre que
Clipperton, un îlot isolé dans le Pacifique nord-oriental au large des côtes occidentales du
Mexique. Depuis la mise en œuvre de l'arrêté du 3 janvier 2005 comme depuis l'entrée en
vigueur du décret du 1
er
avril 1960, complété par son premier arrêté d'application en date du 19
1
Voir ORAISON (A.), "À propos du conflit franco-mauricien sur le récif de Tromelin (La succession d'États sur l'ancienne
Isle de Sable)", R.D.I.S.D.P., 2008/1, pp. 1-115. Pour faire "bon poids", le Gouvernement mauricien conteste également et
officiellement depuis le 7 juillet 1980 la souveraineté de la Grande-Bretagne sur l'archipel des Chagos, y compris sur l'atoll
de Diego Garcia qui abrite une importante base militaire américaine aéronavale. Cet archipel corallien d'une cinquantaine de
kilomètres carrés de terres émergées a été intégré par un order in council ou décret-loi du 8 novembre 1965 dans le British
Indian Ocean Territory (BIOT) en violation flagrante du principe de l'intégrité territoriale de la colonie anglaise de l'île
Maurice. Sur l'ensemble de la question, voir notamment ORAISON (A.), "Le contentieux territorial anglo-mauricien sur
l'archipel des Chagos revisité (Quelles perspectives d'avenir pour les originaires des îles Diego Garcia, Peros Banhos et
Salomon et leurs descendants déportés à Maurice ? )", R.D.I.S.D.P., 2005/2, pp. 109-208.
2
Voir ORAISON (A.), "À propos du différend franco-malgache sur les îles Éparses du canal de Mozambique (La succession
d'États sur les îles Glorieuses, Juan de Nova, Europa et Bassas da India)", R.G.D.I.P., 1981/3, pp. 465-513.
3
Dans la présente étude, l'expression générique ou collective "îles Éparses" ne vise que les quatre îlots désertiques ancrés
dans le canal de Mozambique et officiellement revendiqués par les autorités malgaches depuis 1972 : à savoir l'archipel des
Glorieuses et les trois îlots Juan de Nova, Europa et Bassas da India. A contrario, elle ne vise pas le récif de Tromelin qui est
isolé dans l'océan Indien occidental - à l'est de Madagascar - et qui n'est revendiqué que par Maurice depuis 1978.
4
Voir l'arrêté du 3 janvier 2005, "relatif à l'administration des îles Tromelin, Glorieuses, Juan de Nova, Europa et Bassas da
India (îles Éparses)", in J.O.R.F., 18 janvier 2005, p. 798. Pour le commentaire de ce texte, voir également ORAISON (A.),
"Le préfet des Terres australes et antarctiques françaises : un nouveau responsable de la protection de l'environnement sur les
îles Tromelin, Glorieuses, Juan de Nova, Europa et Bassas da India", R.J.P.É.F., 2006/1, pp. 120-151.