DON PERNETY FABLES EGYPTIENNES ET GRECQUES 5
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PRÉFACE.
A Philosophie considérée en général a pris naissance avec le monde,
parce que de tout temps les hommes ont pensé, réfléchi, médité ; de tout
temps le grand spectacle de l’Univers a du les frapper d admiration, &
piquer leur curiosité naturelle. Né pour la société, l’homme a cherché les
moyens d’y vivre avec agrément & satisfaction ; le bon sens, l’humanité,
la modestie, la politesse des mœurs, l’amour de cette société, ont donc dû être
les objets de son attention. Mais quelque admirable, quelque frappant qu’ait été
pour lui le spectacle de l’Univers, quelque avantage qu’il ait cru pouvoir tirer
de la société, toutes ces choses n’étaient pas lui. Ne dut-il pas sentir, en se
repliant sur lui-même, que la conservation de son être propre, n’était pas un
objet moins intéressant ; & penserait-on qu’il se soit oublié, pour ne s’occuper
que de ce qui était autour de lui ? Sujet à tant de vicissitudes, en but à tant de
maux ; fait d’ailleurs pour jouir de tout ce qui l’environne, il a sans doute
cherché les moyens de prévenir ou de guérir ces maladies, pour conserver plus
longtemps une vie toujours prête à lui échapper. Il ne lui a pas fallu méditer
beaucoup pour concevoir & se convaincre que le principe qui constitue son
corps & qui l’entretient, était aussi celui qui devait le conserver dans sa manière
d’être. L’appétit naturel des aliments le lui indiquait assez : mais il s’aperçut
bientôt que ces aliments, aussi périssables que lui, à cause du mélange des
parties hétérogènes qui les constituent, portaient dans son intérieur un principe
de mort avec le principe de vie. Il fallut donc raisonner sur les êtres de
l’Univers, méditer longtemps pour découvrir ce fruit de vie, capable de
conduire l’homme presque à l’immortalité.
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Ce n’était pas assez d’avoir aperçu ce trésor à travers l’enveloppe qui le couvre
& le cache aux yeux du commun. Pour faire de ce fruit l’usage qu’on se
proposait, il était indispensable de le débarrasser de son écorce, & de l’avoir
dans toute sa pureté primitive. On suivit la Nature de près ; on épia les
procédés qu’elle emploie dans la formation des individus, & dans leur
destruction. Non seulement on connut que ce fruit de vie était la base de toutes
ses générations, mais que tout se résolvait enfin eu ses propres principes.
On Se mit donc en devoir d’imiter la Nature ; & sous un tel guide pouvait-on ne
pas réussir ? à quelle étendue de connaissances cette découverte ne conduisit-
elle pas ? Quels prodiges n’errait-on pas en état d’exécuter, quand on voyait la
Nature comme dans un miroir, & qu’on l’avait à ses ordres ?
Peut-on douter que le désir de trouver un remède à cous les maux qui antigène
l’humanité, & d’étendre, s’il était possible, les bornes prescrites à la durée de la