See discussions, stats, and author profiles for this publication at: https://www.researchgate.net/publication/331207944 2. Les Tensioactifs Method · February 2019 DOI: 10.13140/RG.2.2.34205.97763 CITATIONS READS 0 7,817 1 author: Anthony Hutin Pontifícia Universidade Católica do Rio de Janeiro 26 PUBLICATIONS 115 CITATIONS SEE PROFILE Some of the authors of this publication are also working on these related projects: Application notes on Interface and Surface science View project Les petits savoirs du physicochimiste View project All content following this page was uploaded by Anthony Hutin on 19 February 2019. The user has requested enhancement of the downloaded file. Les petits savoirs du physicochimiste : 2. Les tensioactifs 2. Les tensioactifs Problématique : Qu’est-ce qu’un tensioactif ? Quelle est son influence sur la tension interfaciale ? Comment se comporte-t-il en milieux aqueux et en milieux gras ? ? Contenu : Généralité et définition des tensioactifs Comportement en milieu aqueux et huileux Facteurs influençant la CMC 1 Définition et structure De tous les tensioactifs que nous connaissons aujourd’hui, le plus ancien est le savon pour ces propriétés détergentes. Figure 1 :Structure schématique d’un tensioactif. Les tensioactifs sont des molécules amphiphiles possédant une double affinité, ils sont composés d’une partie hydrophile (miscible dans l’eau) polaire et d’une partie hydrophobe (miscible dans l’huile) apolaire (Figure 1). Les tensioactifs ont donc une affinité particulière pour les interfaces du type eau/huile et eau/air qui vont leur permettre de satisfaire leur double affinité. Cette propriété leur donne la capacité de diminuer l’énergie libre aux interfaces en diminuant la tension interfaciale ou superficielle des phases en contact. 1.1 Notion de HLB Leur caractère hydrophile ou hydrophobe n’est pas égal suivant leur structure. Pour connaître leur caractère majoritaire, on peut utiliser la notion de HLB (Hydrophilic Lipophilic Balance) [1] ou balance hydrophile-lipophile qui estime numériquement le rapport d’équilibre entre les deux parties. Cette échelle varie de 0 à 40 et plus la valeur est élevée et plus le tensioactif est soluble dans l’eau (plus hydrophile). Plusieurs méthodes de calcul existe dans la littérature [2, 3], la plus courante consiste à prendre en compte le rapport de la masse moléculaire de la partie hydrophile sur la masse moléculaire de la partie hydrophobe : 𝑀𝑎𝑠𝑠𝑒 𝑚𝑜𝑙é𝑐𝑢𝑙𝑎𝑖𝑟𝑒 𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑒 ℎ𝑦𝑑𝑟𝑜𝑝ℎ𝑖𝑙𝑒 𝐻𝐿𝐵 = 20 𝑀𝑎𝑠𝑠𝑒 𝑚𝑜𝑙é𝑐𝑢𝑙𝑎𝑖𝑟𝑒 𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑒 ℎ𝑦𝑑𝑟𝑜𝑝ℎ𝑜𝑏𝑒 La limite du HLB réside dans son mode de calcul. Il ne prend en compte que la structure chimique du tensioactif sans tenir compte des interactions moléculaire (Lewis, van der Waals …). 1.2 Fonction des tensioactifs Selon leur structure les tensioactifs ont des fonctions et des propriétés différentes : Détergents (13<HLB<15) : composés chimiques capables d’enlever les salissures sur un support solide grâce à leur pouvoir solubilisant. Agents de solubilisation (18<HLB<20) : lorsque leur concentration dépasse la concentration micellaire critique (cmc), les molécules de tensioactif se regroupent en agrégats appelés micelles. Seule leur partie hydrophile reste en contact avec les molécules d’eau. Ces micelles peuvent piéger et ainsi solubiliser des substances normalement insolubles dans l’eau. Agents moussants (3<HLB<8) : les tensioactifs stabilisent les films minces entre les bulles d’air et l’eau pour réussir à former une mousse. Agents dispersants : les tensioactifs permettent de créer une dispersion de particules hydrophobes en solution. Ces agents empêchent la floculation (regroupement) des particules qui pourraient alors sédimenter. Agents émulsifiants (E/H : HLB<6 et H/E : HLB>10) : ils facilitent la formation d’émulsion entre deux liquides non miscibles. Le premier liquide est dispersé dans le second liquide sous forme de gouttelettes. L’émulsion peut être de deux types, huile dispersée dans l’eau (H/E) ou inversement (E/H). Les tensioactifs vont former un film à l’interface entre les deux liquides. 1.3 Structure des tensioactifs Les tensioactifs peuvent aussi être classés selon la nature de la partie hydrophile : Anioniques : tête polaire chargée négativement. Cationiques : tête polaire chargée positivement. Zwitterioniques ou amphotères : la partie hydrophile comporte au moins une charge positive et une charge négative. Non ioniques : aucune charge. i. Tensioactifs anioniques Ils libèrent une charge négative (anion) en solution aqueuse. Ils ont une tendance hydrophile plus marquée avec une valeur de HLB comprise entre 8 et 18. Ils permettent de former des émulsions d’huile dans eau H/E. Parmi ces tensioactifs, on peut citer les savons (sels d’acide gras) de formule générale RCOOM avec R la longueur de la chaîne hydrocarbonée et M un métal alcalin ou une base organique ; les dérivés sulfatés (laurylsulfate de sodium) utilisés comme agents émulsionnants ou moussants et les dérivés sulfonés (dioctylsufosuccinate de Anthony Hutin – Linkedin – Researchgate Les petits savoirs du physicochimiste : 2. Les tensioactifs sodium) souvent mouillant. caractérisés par un fort pouvoir ii. Tensioactifs cationiques Ils libèrent une charge positive (cation) en solution aqueuse. Ce sont souvent des produits azotés (un atome d’azote chargé positivement) comme les sels d’ammonium quaternaire. Ils ont des propriétés bactériostatiques et émulsionnantes. iii. Tensioactifs amphotères Ils contiennent à la fois des groupements acides et basiques, à pH basique ils se comportent comme des tensiaocitfs anioniques et à pH acide comme des tensioactifs cationiques. Ils ont un HLB élevé et sont utilisés comme détergents. On peut citer les bétaïnes (groupement ammonium quaternaire et acide carboxylique), les dérivés de l’imidazoline et les polypeptides. Ils ont tous l’avantage d’être compatibles avec les autres types de tensioactifs. iv. Tensioactifs non ioniques Ils ne comportent aucune charge et donc ne s’ionise pas dans l’eau. 2 Comportement en solution 2.1 Milieu aqueux La partie hydrophile a une forte affinité avec les molécules d’eau car elles partagent des interactions de van der Waals et de Lewis. La partie hydrophobe ne peut établir que des interactions de type van der Waals donc l’eau a moins d’affinité avec cette partie de la molécule tensioactive car elles ne peuvent établir des liaisons hydrogènes (Lewis). Cependant la partie hydrophobe a plus d’affinité pour l’eau que l’air car il n’y a pas d’interaction de van der Waals avec les molécules d’air. Figure 2 : a/Tensioactifs en solution à faible concentration (a) et forte concentration.au delà de la CMC (b). A faible concentration en tensioactif (Figure 2.a), un équilibre va s’établir entre tensioactif en solution et tensioactif adsorbé à la surface eau-air. Les tensioactifs isolés à la surface tendent à être couchés à la surface eauair pour satisfaire les interactions de van der Waals avec les molécules d’eau. Lorsque plusieurs tensioactifs se regroupent à la surface, ils forment une brosse ce qui satisfait les interactions de van der Waals entre chaînes grasses. Plus la concentration en tensioactif augmente dans l’eau et plus la surface est saturée ce qui nécessite un surplus d’énergie pour que le tensioactif s’adsorbe à la surface. Au-delà d’une certaine concentration la surface est complètement saturée et l’énergie à fournir pour qu’un tensioactif s’adsorbe à la surface est trop grande, il y a alors formation d’agrégats des tensioactifs qui s’associent en micelles (b). Les têtes hydrophiles restent en contact avec l’eau mais les queues lipophiles se regroupent entre elles, ce phénomène est renforcé par la non compatibilité de l’eau avec les chaînes grasses des tensioactifs. En milieux aqueux, les micelles peuvent regrouper plusieurs centaines de molécules tensioactives. Leur dimension et leur géométrie dépendent essentiellement de la structure du tensioactif et de son environnement chimique [4, 5]. La CMC peut être détectée par plusieurs méthodes différentes comme l’étude de la variation de tension superficielle (voir AN T01) pour tous les types de tensioactifs et l’étude de la conductivité électrolytique des solutions pour les tensioactifs ioniques. A partir d’une certaine concentration, la formation des micelles est favorisée par les interactions hydrophobes entre tensioactifs qui deviennent suffisamment importantes par rapport aux interactions hydrophiles pour que se forme spontanément les micelles. Quand la partie hydrophile d’une molécule tensioactive est plus importante que la partie hydrophobe, la tendance à former des micelles est plus forte et la CMC est donc plus basse. Certaines interactions défavorisent la formation des micelles. Par exemple, les effets de solvatation du groupe polaire favorisent la solubilisation monomoléculaire du tensioactif dans l’eau. A plus forte polarité de ce groupe, plus faible est la tendance à former des micelles et donc plus haute est la CMC. Un autre effet défavorable correspond aux interactions de type électrostatique répulsif entre les parties hydrophiles des tensioactifs. Si les forces de répulsion sont trop grandes, les molécules ne peuvent pas s’approcher suffisamment pour que se produise l’interaction hydrophobe entre les chaînes grasses des tensioactifs. Ceci explique pourquoi les tensioactifs ioniques qui possèdent des charges nettes dans leur groupe hydrophile forment beaucoup plus difficilement des micelles que les tensioactifs non ioniques qui ont un groupe hydrophile non chargé. Pour un même groupe hydrophile, la CMC des tensioactifs ioniques est typiquement 100 à 1000 fois plus grande. On peut donc dire que la CMC est une mesure quantitative de l’affinité globale d’un tensioactif pour la phase aqueuse. 2.2 Milieu gras ou huileux En solution dans un corps gras, appelé huile, les tensioactifs ne sont pas repoussés vers la surface (Figure 3). La queue grasse du tensioactif et l’huile sont compatibles alors que la tête hydrophile a moins d’affinité pour l’air que pour l’huile à cause de l’absence d’interaction de van der Waals avec l’air. Par contre la partie hydrophile d’un tensioactif peut établir des liaisons hydrogènes avec d’autres tensioactifs et s’agréger pour trouver un état d’énergie plus favorable. Anthony Hutin – Linkedin – Researchgate Les petits savoirs du physicochimiste : 2. Les tensioactifs hydrophile et à une augmentation des interactions entre la chaîne grasse et la solution aqueuse. Les alcools sont couramment utilisés comme cotensioactifs. Ils ont tendance à diminuer la CMC par la formation de micelles mixtes tensioactif-alcool dans lesquelles l’insertion des molécules d’alcool permet de réduire les forces répulsives entre les groupes hydrophiles [6-9]. Figure 3 : Tensioactifs en milieu gras. 2.3 Partage entre un milieu aqueux et un milieu gras Lorsque deux phases non miscibles eau et huile sont en contact, le tensioactif peut se distribuer dans les deux phases du liquide et s’absorber à l’interface eau-huile. En fonction de la nature du tensioactif (structure et HLB) il peut avoir plus d’affinité pour une phase ou l’autre et avoir une très faible adsorption à l’interface. Les micelles peuvent favoriser une solubilisation de la phase huile qui va se retrouver en émulsion dans la phase eau. 3.2 Effet de la température La température a deux effets opposés sur le caractère hydrophile des tensioactifs non ioniques. Une première augmentation de la température aux alentours de 50°C produit une réduction d’hydratation du groupe hydrophile. Les liaisons hydrogènes dépendent de l’agitation des molécules d’eau, lorsque la température augmente cette agitation augmente et l’établissement des liaisons hydrogènes est de plus en plus difficile. Cet effet est celui produisant le point de trouble des tensioactifs non ioniques qui a donc tendance à favoriser la micellisation : la CMC diminue. D’autre part, l’augmentation de la température produit une désorganisation croissante des molécules d’eau qui se trouvent près de la partie hydrophobe, ainsi l’antagonisme décroît ce qui défavorise la formation de micelles : la CMC augmente. Figure 4 : Partage des tensioactifs entre un milieu gras et un milieu aqueux 3 Facteurs influençant la CMC La présence de solutés affecte le comportement des tensioactifs ioniques tandis que la température affecte plus particulièrement les tensioactifs non ioniques 3.1 Effet des solutés La présence de solutés dans la phase aqueuse peut modifier les interactions qui favorisent ou pas la micellisation. L’addition d’électrolytes à tendance à diminuer la solubilité des substances dans l’eau et donc à diminuer la solvatation de la partie hydrophile du tensioactif. De même, l’addition d’électrolyte produit une plus grande concentration d’ions au voisinage de la surface des micelles et donc un effet d’écran qui réduit les répulsions entre les parties hydrophiles. Ces deux effets favorisent la formation des micelles, la présence d’électrolyte tend à diminuer la CMC. Cet effet est plus fort pour les tensioactifs ioniques alors que pour les tensioactifs non ioniques et amphotères la diminution de la CMC est plus due à la désolvatation du groupe Figure 5 : Conductivité de solutions de CTAB à des concentrations en dessous et au-dessus de la CMC en fonction de la température [10]. La température a également un effet sur la solubilisation des tensioactifs ioniques en solution. Lorsque la température augmente, on constate que la solubilité de tensioactifs ioniques à tendance à augmenter lentement (Figure 5). A partir d’une certaine température, appelée température de Krafft, on observe que la solubilité augmenter très rapidement. Ceci indique que le mode de solubilisation du tensioactif change à la température de Krafft, on passe d’une solubilisation monomoléculaire à une solubilisation micellaire. La température de Krafft correspond au point où la solubilité du tensioactif atteint la CMC. En dessous de la température de Krafft, le Anthony Hutin – Linkedin – Researchgate Les petits savoirs du physicochimiste : 2. Les tensioactifs tensioactif n’est pas assez soluble pour qu’il soit en concentration suffisante pour former des micelles. La température de Krafft est dépendante de tous les effets qui peuvent affecter la CMC d’un tensioactif (longueur des chaînes, polarité …). L’effet des électrolytes sur la température de Krafft est plus difficile à interpréter car ces derniers produisent un double effet sur la CMC et sur la solubilité [11]. 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. Griffin, W.C., Classification of Surface-Active Agents by "HLB". Journal of the Society of Cosmetic Chemists, 1949. 1: p. 311. ICI Americas, i., The HLB System: A Time-saving Guide to Emulsifier Selection. 1984: ICI Americas, Incorporated. Kruglyakov, P.M., Hydrophile Lipophile Balance of Surfactants and Solid Particles: Physicochemical aspects and applications. 2000: Elsevier Science. 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