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Apprentissage autorégulé

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Citer cet article :
Cosnefroy, L. (2010). L'apprentissage autorégulé : perspectives en
formation d'adultes. Savoirs (en italique), 2(2), 9-50.
https://doi.org/10.3917/savo.023.0009
L'APPRENTISSAGE AUTORÉGULÉ : PERSPECTIVES EN FORMATION
D'ADULTES
Laurent Cosnefroy
L'Harmattan | « Savoirs »
2010/2 n° 23 | pages 9 à 50
ISSN 1763-4229
ISBN 9782296139251
Article disponible en ligne à l'adresse :
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------https://www.cairn.info/revue-savoirs-2010-2-page-9.htm
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Note de synthèse
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
L’apprentissage autorégulé :
perspectives en formation d’adultes
Laurent COSNEFROY1
Introduction
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On peut affirmer sans hésiter qu’une conception strictement cognitive
des processus d’apprentissage n’est aujourd’hui plus tenable. Posséder
des connaissances et disposer d’un répertoire de stratégies d’apprentissage ne suffit pas pour apprendre ; il reste à mobiliser activement et durablement ces ressources, ce qui introduit la question des déterminants
motivationnels qui soutiennent leur utilisation spontanée. Mieux encore,
les traitements cognitifs opérés changent en fonction de la nature de la
motivation, par exemple des buts que l’apprenant se donne. Les travaux
de Dweck (1986) ont montré que le rapport à l’erreur ainsi que la nature
des stratégies d’apprentissage activées changeaient sensiblement selon
que l’on mobilisait des buts d’apprentissage ou des buts de recherche de
la performance. La compréhension des processus d’apprentissage requiert la construction de modèles s’efforçant d’intégrer les aspects cognitifs, métacognitifs et motivationnels de l’apprentissage.
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Université de Rouen, IUFM de Haute-Normandie
[email protected]
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Dans un univers changeant où règne la compétition économique, il
est devenu banal de dire que l’investissement dans le savoir est un atout
majeur pour nos sociétés postindustrielles. De l’élève à l’adulte, chacun
est invité à développer ses capacités d’apprentissage pour s’adapter et
faire preuve de créativité. La compréhension des dynamiques et des processus d’apprentissage demeure plus que jamais une question centrale de
la recherche en éducation. Quelles sont, en psychologie cognitive, les
évolutions significatives que dessinent les recherches effectuées ces dernières années sur ces questions ?
Savoirs, 23, 2010
C’est précisément cette ambition qui caractérise le concept et les recherches menées sur l’apprentissage autorégulé. À la croisée de la métacognition et de la motivation, ces recherches se donnent pour objectif
d’expliquer comment l’apprenant réussit à se mettre au travail, à faire
preuve de persévérance et à atteindre les buts fixés en contrôlant luimême ses processus d’apprentissage et sa motivation. L’univers sur lequel elles s’adossent est, pour l’essentiel, celui des apprentissages académiques. Les populations étudiées sont parfois des enfants, souvent des
adolescents et des étudiants, rarement des adultes en formation. On peut
légitimement se demander dans quelle mesure des recherches privilégiant
des apprentissages scolaires sont pertinentes pour la formation d’adultes.
Pour Bourgeois et Nizet (1997), penser la spécificité de l'apprentissage
chez l'adulte nécessite d’abord de s'adosser à une théorie générale de
l'apprentissage qui rend compte de la nature du processus d'apprentissage, indépendamment des caractéristiques particulières de l'apprenant
ou du contexte, et qui permet d'identifier les variables susceptibles d'affecter ce processus.
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Partant des apprentissages scolaires, les recherches sur l’apprentissage
autorégulé nous proposent une compréhension des mécanismes psychologiques qui sous-tendent l’autonomie dans les apprentissages. L’ambition de cette note de synthèse est de montrer que ces recherches, et les
modèles qui en résultent, fournissent un cadre théorique fructueux pour
éclairer la compréhension des processus d’apprentissage chez l’adulte.
Nous procèderons d’abord à une présentation et à une analyse critique
des principaux modèles afin d’en faire ressortir les savoirs acquis et les
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Dans un second temps, on pourra s'interroger sur le rôle de certaines
de ces variables dans différents contextes d'apprentissage et avec différents publics. Le développement de la didactique professionnelle à partir
d’une relecture de la théorie piagétienne par Vergnaud (1996) et Pastré
(1999) illustre tout l’intérêt que la formation d’adultes peut tirer d’une
théorie psychologique qui lui est à priori étrangère. De la même façon,
Clot (2008) trouve chez Vygotski une méthode historico-développementale pour étudier les transformations de l’activité qui, bien au-delà de la
psychologie de l’enfant, permet de penser la transformation de l’expérience professionnelle et son développement chez l’adulte.
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
questions en débat, puis nous examinerons les questions spécifiques soulevées par leur transposition à la formation d’adultes.
L’apprentissage autorégulé désigne l’ensemble des processus par lesquels les sujets activent et maintiennent des cognitions, des affects et des
conduites systématiquement orientés vers l’atteinte d’un but (Schunk,
1994). Il définit l’intensité avec laquelle l’individu est aux plans de la métacognition, de la motivation et de la conduite un participant actif dans
ses processus d’apprentissage (Zimmerman, 1989). La définition de
Schunk laisse entendre que la continuité de l’action et l’atteinte du but ne
vont pas de soi. Elle met implicitement en avant le rôle de l’effort dans
l’autorégulation des apprentissages puisque le contrôle doit être exercé
durablement (activer et maintenir), qui plus est dans trois domaines distincts (cognitions, affects, conduites). On retrouve cette même insistance
sur l’effort chez Vohs et Baumeister (2004), qui définissent l’autorégulation (quel que soit son domaine d’application) comme l’effort consenti pour altérer ses états internes et sa conduite. Se dessine ainsi un lien
privilégié entre autonomie et effort : être autonome requiert des efforts
(Boekaerts, 1997). Quelles en sont les raisons ?
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Un second obstacle est constitué par la confrontation à la difficulté.
Surmonter cet obstacle, toujours imprévu lui aussi, requiert également
des efforts : surcroît d’énergie et d’attention nécessité par l’identification
des erreurs, leur analyse et la recherche de nouvelles procédures plus performantes, lutte contre le découragement que peut faire naître l’expérience de la difficulté. Dans le premier cas, l’effort fait appel à des ressources métacognitives, dans le second, il mobilise des ressources motivationnelles.
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La continuité de l’action est mise en péril par l’imprévisibilité inhérente à toute activité d’apprentissage. S’engager dans une activité a un
coût, puisque c’est renoncer à d’autres activités également tentantes. Plusieurs buts sont ainsi en compétition pour capter les ressources attentionnelles, de sorte qu’il est en permanence nécessaire d’arbitrer entre
des activités concurrentes et de trouver des réponses adaptées pour protéger l’intention d’apprendre et ainsi maintenir la priorité sur l’activité en
cours (Corno, 1986 ; Eccles, 2005, Lens et Vansteenkiste, 2008).
Savoirs, 23, 2010
Les conditions de l’autorégulation
Tous les modèles de l’apprentissage autorégulé partagent un certain
nombre de présupposés quant aux conditions requises pour pouvoir
prendre le contrôle de l’apprentissage. Elles sont au nombre de quatre :
une motivation initiale suffisante, la définition d’un but à atteindre, la
possibilité de recourir à des stratégies d’autorégulation et la capacité à
s’auto-observer.
Une motivation initiale suffisante
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La conduite autorégulée est
une conduite dirigée par un but
qui fonctionne comme critère servant de point de comparaison pour décider s’il faut infléchir d’une manière ou d’une autre le cours de l’action
(Pintrich, 2004). Sans but, pas de processus de comparaison et pas
d’action compensatrice possible. Toutes les définitions de
l’autorégulation associent étroitement ce processus au concept de but, à
l’instar de la définition très épurée de Vancouver et Day (2005) :
l’autorégulation désigne les processus impliqués dans l’atteinte et le
La définition d’un but à atteindre
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Le contrôle de l’action et la protection de l’intention d’apprendre
ne sont pas indépendants de la motivation initiale. L’apprentissage autorégulé est un processus coûteux en temps et en effort dans lequel on ne
peut s’engager que si l’activité est investie d’une valeur suffisante et que
l’on se perçoit suffisamment compétent pour la mener à son terme. Un
apprenant faiblement motivé a peu de chances de déclencher des conduites de régulation. L’engagement dans le processus d’autorégulation
dépend donc largement de ressources motivationnelles qui s’incarnent
dans des croyances motivationnelles concernant la valeur de la tâche (les
différentes raisons qui peuvent être invoquées pour s’engager dans celleci, cf. Eccles, 2005) et le sentiment d’efficacité personnelle (Boekaerts,
1997 ; Winne, Perry, 2000 ; Wolters, 2003 ; Zimmerman, 1989, 2000,
2001). Reste à savoir, et c’est l’un des débats théoriques majeurs, le poids
qu’il convient d’accorder à la motivation initiale. Les chercheurs qui
s’adossent au concept de volition plaident pour une relative autonomie
des processus d’autorégulation par rapport aux conditions motivationnelles initiales.
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
maintien des buts. La définition d’un ou de buts à atteindre fait partie intégrante du processus d’autorégulation.
Un répertoire de stratégies d’autorégulation
Une fois engagé
dans l’action, le pilotage de l’activité d’apprentissage s’effectue au moyen de stratégies
d’autorégulation, c’est-à-dire des règles générales d’action qui orientent
l’activité en vue de la rendre optimale par rapport au but visé. Pour
mettre en œuvre une stratégie, il faut être persuadé qu’il est possible
d’intervenir pour influencer le cours des événements (Skinner, 1996).
C’est donc par l’utilisation de diverses stratégies d’autorégulation que se
traduit le fait que l’apprenant prenne le contrôle de son apprentissage.
Enfin, le contrôle effectif au moyen de diverses stratégies d’autorégulation implique
de développer un regard critique sur son propre fonctionnement qui
permet de juger le travail accompli et de décider, si besoin est, de changer le fonctionnement actuel. Les processus métacognitifs d’autoobservation et d’auto-évaluation (rassemblés ici sous l’expression « observation de soi ») sont déterminants. C’est lorsque l’individu cesse de
s’observer en train d’agir qu’une autorégulation efficace de l’action est
compromise (Baumeister, Heatherton, 1996).
L’observation de soi
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Le nombre d’articles sur l’apprentissage autorégulé s’est considérablement accru ces dernières années, ce qui ne veut pas dire que les modèles de référence se sont eux aussi multipliés. Une analyse systématique
des articles publiés sur ce thème dans cinq revues majeures en psychologie de l’éducation2 nous a permis d’identifier cinq modèles dont le développement s’est opéré entre la fin des années quatre-vingt et le début des
2
Journal of Educational Psychology, Contemporary Educational Psychology, Educational Psychologist, Educational Psychology Review, Learning and Individual Differences.
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Les forces en présence :
cinq modèles de l’apprentissage autorégulé
Savoirs, 23, 2010
années deux mille. Ces modèles, cités de façon répétée, font office de paradigmes qui structurent ce champ de recherches.
Les travaux de Winne représentent
l’approche la plus cognitive de
l’apprentissage autorégulé. Ce sont ceux qui restent au plus proche de la
tradition de recherche sur la métacognition. Dans le modèle de Nelson
(1996), auquel Winne se réfère, la métacognition est organisée en deux
flux, l’un montant (le monitoring) qui, grâce aux jugements métacognitifs, informe le sujet de ce qui se passe dans l’activité en cours, l’autre
descendant (le contrôle) qui, en fonction des informations fournies par le
monitoring, conduit à intervenir sur l’action en cours. Le monitoring est
ainsi le processus clé qui sous-tend les prises de décision et permet
l’adaptation aux conditions changeantes du travail en cours qui caractérise l’apprentissage autorégulé. Il n’est pas nécessaire de souscrire à
l’hypothèse que le monitoring est toujours mis en œuvre de façon délibérée. Lorsque l’apprenant maîtrise suffisamment certaines stratégies cognitives et le savoir conditionnel associé, c’est-à-dire le savoir qui définit
les conditions de validité de ces stratégies, l’autorégulation peut être déclenchée sans délibération consciente (Winne, 1995, 1996). Au surplus,
tout apprenant, indépendamment de son niveau d’expertise, possède des
croyances concernant la nature du savoir et la nature de l’apprentissage
ainsi que des croyances concernant les méthodes qui permettent de parvenir à un apprentissage efficace. Ces croyances, désignées sous le terme
de croyances épistémiques (Hofer, Pintrich, 2002), sont activées automatiquement lorsqu’on s’engage dans un apprentissage. Elles participent à
la définition de ce qu’est un apprentissage réussi et, de ce fait, constituent
des normes qui influencent directement les jugements et les réactions
émotionnelles de l’apprenant (Winne, 1997). L’importance accordée aux
croyances épistémiques, et plus généralement à la dimension non consciente de l’autorégulation, est une spécificité du modèle de Winne.
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Les travaux de Pintrich
présentent une certaine
similarité avec ceux de
Winne, puisqu’il reprend lui aussi la distinction entre monitoring et contrôle. Le contrôle, qui est le moment où l’on puise dans les stratégies dis-
L’influence des buts d’accomplissement :
le modèle de Pintrich
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Winne, ou l’héritage cognitif
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
ponibles pour modifier l’action en cours, est donc subordonné au monitoring, c’est-à-dire à la pertinence des jugements métacognitifs. L’impact
des facteurs motivationnels se manifeste dans l’influence déterminante
que l’auteur accorde aux buts d’accomplissement sur les processus
d’autorégulation.
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L’autre trait dominant des travaux de Pintrich est l’intérêt porté à l’influence du contexte sur les processus d’autorégulation, via le rôle joué
par deux facteurs : les spécificités disciplinaires et les règles, le plus souvent tacites, régissant l’interaction enseignant/apprenant. En accordant
une place au fonctionnement social des situations d’enseignement et
d’apprentissage, Pintrich se démarque des autres théoriciens de l’apprentissage autorégulé en considérant l’activité d’apprentissage en relation
avec ce que l’on appellerait dans un contexte francophone le système didactique.
Les travaux de Corno illustrent
le courant de recherche qui
s’inscrit dans le cadre de la volition. Ce concept a pour fonction de combler le fossé qui sépare la délibération, la décision et l’action (Zhu, 2004).
Corno et les modèles de la volition
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Rappelons brièvement que les buts d’accomplissement, ou de compétence, sont des buts qui orientent l’activité dans des contextes, par
exemple les contextes d’apprentissage, où celle-ci peut être évaluée en
termes d’échec ou de compétence. Les buts qu’un individu poursuit
créent un cadre pour interpréter et réagir aux événements qui se présentent. Fixant une norme par rapport à laquelle la performance va être évaluée, ils influencent l’interprétation des feedbacks et la régulation effective
de l’apprentissage. Cette proposition de Dweck, rappelée en ouverture de
cette note, Pintrich (2000) la reprend à son compte en l’étendant à la
nouvelle typologie des buts d’accomplissement, à l’origine de laquelle il a
contribué avec Elliot (1999). Celle-ci distingue quatre buts, c’est-à-dire
quatre façons de définir ce que signifie être compétent, organisés selon
deux axes approche/évitement et maîtrise/performance : apprendre et
progresser, faire mieux que les autres, éviter l’échec, maintenir la performance au niveau antérieur. Une des questions centrales est ainsi d’identifier le profil d’autorégulation activé en fonction du but de compétence
dominant.
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Il faut attendre le début des années quatre-vingt pour voir le retour du
concept de volition sur la scène psychologique, orchestré par deux chercheurs allemands, Kuhl et Heckhausen, qui s’intéresseront moins au fossé entre la délibération et la décision (c’est-à-dire le problème de la prise
de décision) qu’aux difficultés inhérentes à l’action, en développant les
deux modèles fondateurs en ce domaine : le modèle du contrôle de
l’action, rebaptisé ensuite Person System Interaction (Kuhl, 1987, 2008) et le
modèle dit du Rubicon (Heckhausen, Gollwitzer, 1986). La pierre angulaire de l’approche volitionnelle réside dans l’idée que le passage de
l’intention à l’action n’est pas automatique, tout comme l’initiation de
l’action ne garantit en rien qu’elle sera poursuivie jusqu’à son terme. Tout
apprenant est ainsi confronté à un double problème, se mettre au travail
et y rester. L’accent mis sur les spécificités de l’action conduit à une distinction capitale entre fixation du but et atteinte du but, motivation et
volition. La première prépare les décisions, alors que la seconde protège
la mise en œuvre de ces décisions : la motivation promeut une intention
d’apprendre, la volition la protège (Corno, 2001).
Pour Corno, qui se réfère davantage à Kuhl qu’à Heckhausen, le caractère imposé de beaucoup d’activités d’apprentissage fait que l’atteinte
du but n’est pas nécessairement portée par un intérêt élevé, si bien qu’un
des problèmes majeurs à résoudre est celui de la gestion de la distraction.
(Corno, 2004, 2008). Une part importante de son travail a consisté à élaborer une taxonomie des stratégies volitionnelles qui reprend et enrichit
celle produite par Kuhl (1987). Le classement des stratégies s’organise
autour de deux pôles : les stratégies qui visent à se contrôler soi en prenant le contrôle des processus internes que sont la cognition, la motivation et l’émotion, et celles qui visent indirectement le même but via le
contrôle de l’environnement (Corno, 2001). Ainsi, s’octroyer une pause
est une stratégie de contrôle de soi qui permet simultanément de contrôler la cognition (la pause prévient la surcharge cognitive) et l’émotion
(elle permet aussi un retour au calme intérieur), tandis que s’arranger
pour aller travailler en bibliothèque auprès d’un groupe de personnes
studieuses pour bénéficier d’une bonne ambiance de travail est une stratégie de contrôle de l’environnement (l’apprenant tire parti des caractéristiques de l’environnement matériel et humain pour influencer ses états
internes).
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Savoirs, 23, 2010
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
L’approche sociocognitive : Ce modèle, probablement le plus
le modèle de Zimmerman
connu3, est organisé en référence à la
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Zimmerman insiste par ailleurs sur l’intérêt d’instrumenter les processus d’auto-observation (le monitoring métacognitif). L’auto-observation
est considérablement aidée par l’enregistrement des traces de l’activité
(noter le temps passé, le moment de la journée, l’endroit choisi pour travailler). De cette façon, il devient possible de se constituer une base de
données qui permet de repérer des patterns de conduites dysfonctionnels
qui pourraient être changés. Dans les phases initiales d’un apprentissage,
l’apprenant a besoin d’un guidage actif qui l’invite à analyser le déroulement de l’activité et l’enchaînement des opérations mises en œuvre. Si
3
Il existe une présentation en français de Zimmerman dans Carré et Moisan (2002)
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théorie sociocognitive de Bandura. Quatre concepts, l’agentivité, le sentiment d’efficacité personnelle, l’auto-observation et l’autorécompense
constituent le noyau dur de ce modèle. L’être humain agit de façon
proactive en anticipant sur les résultats possibles de ses actions, et pas
seulement de façon réactive en réponse à des feedbacks comme dans un
modèle cybernétique dont la théorie sociocognitive souhaite se démarquer (Bandura, 2008). Le modèle de Zimmerman insistera donc sur deux
facettes indissociables de l’autorégulation : une autorégulation proactive
créatrice de buts et de plans d’action, et une autorégulation réactive destinée à dépasser les obstacles empêchant l’atteinte du but. Être acteur,
créer des intentions et les mener à leur terme requiert de disposer de
croyances qui poussent à agir, c’est le rôle du sentiment d’efficacité personnelle. Celui-ci est un jugement sur sa capacité à atteindre un certain
niveau de performance dans une situation donnée (Bandura, 1986). De
nombreuses recherches ont montré qu’un sentiment d’efficacité personnelle élevé favorisait l’utilisation de stratégies cognitives performantes,
l’engagement dans des activités plus difficiles, le niveau d’effort et le
temps passé à étudier (Schunk, Pajarès, 2005 ; Zimmerman, 1989, 2000).
Il apparaît comme un déterminant essentiel des conduites d’autorégulation.
Savoirs, 23, 2010
l’apprenant est livré à lui-même, sans accompagnement, il risque de se
centrer sur les résultats obtenus au détriment d’une analyse de son activité et, en cas de performances peu satisfaisantes, de développer des attributions en termes de manque de capacités qui viendront saper la poursuite ultérieure de l’effort (Zimmerman, Kitsantas, 1997).
L’autorécompense est la stratégie privilégiée dans l’approche sociocognitive pour réguler la motivation. L’apprenant se motive lui-même en se
donnant des récompenses contingentes à la qualité du travail effectué
(par exemple, s’accorder un temps de loisir). Ces autorécompenses sont
motivantes, elles renforcent le sentiment d’efficacité personnelle parce
que, étroitement associées au succès, elles soulignent les progrès réalisés
(Bandura, 1978).
Signalons enfin que les recherches menées par Zimmerman sont les
seules à s’être intéressées à des adultes et à avoir pris en considération
des apprentissages non scolaires. Il a notamment étudié l’autorégulation
des apprentissages musicaux et des apprentissages sportifs, ainsi que
l’autorégulation de l’activité d’écriture chez des écrivains (Zimmerman,
1998, 2008 ; Zimmerman, Risemberg, 1997).
Ce modèle, le seul forgé en Europe,
constitue une tentative d’intégrer
des résultats issus de paradigmes
théoriques différents provenant de la psychologie cognitive et de la psychologie du soi (Bœkærts, 1999). Sa signature tient à ce que les émotions
jouent, bien plus que dans tous les autres modèles, un rôle considérable
ainsi qu’en atteste la référence majeure que constitue la théorie des émotions de Lazarus (Lazarus, Folkman, 1987). Transposant cette perspective dans le domaine des apprentissages, Bœkærts considère que la façon
dont est évaluée la situation d’apprentissage a une influence déterminante sur les processus d’autorégulation. Une évaluation menaçante de la
situation survient lorsqu’un but important est en jeu et que l’apprenant
détecte un décalage entre les exigences de la tâche et les ressources dont
il dispose. Des émotions négatives, telles que la colère, l’anxiété ou le désespoir sont activées et des stratégies de coping déclenchées pour juguler
ces émotions. C’est ce que Bœkærts appelle se mettre en mode défensif,
l’objectif n’étant plus alors de réussir au mieux mais d’abord de maintenir
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Le poids de l’émotion :
le modèle de Bœkærts
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
ou de restaurer un minimum de bien-être. Si, au contraire, les gains escomptés l’emportent sur les inconvénients (évaluation stimulante), la situation d’apprentissage est perçue comme une réelle opportunité d’apprentissage, et une intention d’apprendre se forme. L’apprenant se met
en mode maîtrise, ce qui ne le dispense évidemment pas de protéger l’intention d’apprendre par des stratégies volitionnelles (sur ce point, on
constate de nombreuses convergences avec Corno). Bien entendu, la situation peut être réévaluée et l’apprenant passer du mode maîtrise au
mode coping, notamment lorsque surgissent des difficultés (Bœkærts,
1996, 1997 ; Bœkærts, Niemivirta, 2000).
C’est donc à considérer que tout apprenant poursuit des buts multiples que nous invite Bœkærts, puisque la conduite est gouvernée par
deux buts d’égale importance : accroître ses connaissances et ses compétences d’une part, maintenir le sentiment de bien-être dans des limites
raisonnables d’autre part. Au cours du processus d’autorégulation,
l’apprenant cherche à maintenir un équilibre entre ces deux priorités.
C’est une configuration de buts, et non un seul, qui déclenche l’action
(Bœkærts, De Koning, Vedder, 2006).
Caractéristiques de l’apprentissage autorégulé
Tous les modèles
sont structurés par
un séquençage temporel en phases ou en étapes qui fait émerger trois
temps de l’autorégulation. La phase initiale est une phase préparatoire
d’entrée dans l’action. À ce stade, des buts et des plans sont formés (aspect cognitif) et la situation d’apprentissage est évaluée du point de vue
des avantages et des menaces qu’elle recèle (aspect motivationnel). La
phase centrale représente le cœur de l’apprentissage autorégulé, lorsque
l’apprenant est engagé dans la tâche et s’efforce de contrôler son action
pour atteindre le but fixé grâce à un ensemble de stratégies d’autorégulation. La troisième phase concerne l’évaluation de l’activité. Elle
conduit à une restructuration des connaissances : attributions concernant
la réussite et l’échec, perceptions de compétence, modification des
croyances métacognitives. Ce découpage pourrait laisser penser que
l’activité est conçue de façon linéaire. En réalité, les buts et les plans
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La linéarité de l’activité mise en question
Savoirs, 23, 2010
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C’est probablement dans
la fixation des buts que
se manifeste le plus nettement l’interaction entre processus cognitifs, métacognitifs et motivationnels. Sous l’angle cognitif, la définition d’un but implique une analyse
précise de la tâche à effectuer, c’est-à-dire une compréhension correcte
de la tâche prescrite ainsi que de ses contraintes, et une évaluation de sa
difficulté. Le modèle de Zimmerman accorde une attention particulière à
ce que l’on pourrait appeler un calibrage réussi du but à atteindre.
Des buts multiples :
apprendre et conforter l’estime de soi
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peuvent être adaptés à mesure que l’on progresse dans l’avancement de
la tâche. Chez Bœkærts, par exemple, la possibilité de passer à tout moment du mode défensif au mode maîtrise, et réciproquement, signifie
que l’évaluation initiale de la situation n’est pas figée. Seul le modèle de
Corno se lit de façon linéaire. C’est là une des difficultés que soulève le
concept de volition : la rupture affichée entre motivation et volition –
scénarisée par la métaphore du « franchissement du Rubicon » chez
Heckhausen et Gollwitzer (1986) – induit une conception linéaire de
l’activité. La phase volitionnelle succède à la phase motivationnelle. Les
buts semblent fixés une fois pour toutes, alors que, sous la pression du
déroulement de l’action, les buts sont amenés à se transformer, de sorte
que l’activité réalise un autre but que celui défini initialement. La psychologie du travail a rendu familière cette idée avec la distinction tâche redéfinie/tâche effective (Leplat, 2000). Le rapprochement avec la psychologie du travail n’est pas fortuit. S’intéressant à la dynamique de l’activité
dans des situations complexes, on peut attendre des recherches sur
l’apprentissage autorégulé qu’elles mettent en évidence, elles aussi, la tension entre tâche prescrite et activité, et donc l’importance de la redéfinition progressive de la tâche au cours de l’activité. L’ajustement des buts
au fur et à mesure de l’apprentissage est à considérer comme une stratégie d’autorégulation essentielle. Pour autant, les modèles de l’apprentissage autorégulé ne tirent pas toutes les conséquences de la non-linéarité
de l’activité. La redéfinition des buts n’apparaît jamais comme une stratégie en tant que telle dans les différentes taxonomies des stratégies
d’autorégulation.
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
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Mais la définition des buts est aussi étroitement liée aux représentations de soi, ce que traduit le concept de soi possible introduit par Markus (Markus, Nurius, 1986). Ces sois possibles sont à considérer comme
la manifestation cognitive d’états finaux durables à approcher (soi possible désiré) ou à éviter (soi possible redouté). Ils représentent ce que les
individus pourraient devenir, voudraient devenir ou ont peur de devenir
(Martinot, 2008). L’idée sous-jacente est celle d’une organisation hiérarchique des buts : les buts de haut niveau (tels les sois possibles) sont de
la forme « Je veux être » (be goals), ils génèrent, en fonction de la situation,
des buts spécifiques (do goals) qui vont leur donner satisfaction (Carver,
Scheier, 1996). Le pouvoir attracteur des sois possibles révèle que la valorisation de soi est un puissant mobile des conduites. La « poursuite de
l’estime de soi » (Crocker, Park, 2004) est un ressort essentiel de l’autorégulation : les apprenants régulent leur conduite pour faire advenir un
soi possible positif, pour maintenir un soi actuel positif ou pour éviter
d’actualiser une conception de soi négative (Garcia, Pintrich, 1994).
C’est en somme un double enjeu qui oriente la dynamique de
l’apprentissage : accroître ses connaissances et ses compétences, activer
des représentations de soi qui confortent l’estime de soi. Dès lors, il
s’agit de considérer que l’apprenant ne poursuit pas un seul but, de nature cognitive, centré sur l’apprentissage, mais des buts multiples reliés
aux représentations de soi. Cet aspect, souligné par Pintrich, est au cœur
du modèle de la double priorité de Bœkærts ; il est également présent
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Dans cette perspective, trois facteurs doivent être pris en considération (Locke, Latham, 2002 ; Zimmerman, 2008). Le but doit être spécifique. Un but général (« Je ferai du mieux que je peux ») laisse planer une
ambiguïté sur le résultat à atteindre, ce qui peut conduire à considérer
comme acceptable un large éventail de performances. Les buts proximaux ont plus de force motivationnelle que les buts distaux parce qu’ils
procurent des feedbacks plus immédiats qui permettent de juger des progrès accomplis, lesquels se répercutent positivement sur le sentiment
d’efficacité personnelle. La difficulté du but influence positivement les
efforts fournis. Si les compétences nécessaires sont acquises, l’apprenant
dépensera plus d’effort pour atteindre un but difficile que pour atteindre
un but facile.
Savoirs, 23, 2010
chez Winne lorsqu’il rappelle que l’activité en cours est évaluée par rapport à un profil de normes hétérogènes tant cognitives que conatives.
Une dynamique conflictuelle
L’autorégulation des apprentissages
au cœur de l’autorégulation
est un processus conflictuel, et cela à
deux niveaux distincts. Conflit entre s’engager sans réserve dans
l’apprentissage en investissant du temps et de l’effort, et protéger l’estime
de soi en adoptant un mode d’autorégulation défensif. Et même lorsque
l’engagement est sans réserve et que les aspects défensifs sont au plus
bas, le conflit demeure puisqu’il convient en permanence de protéger
l’intention d’apprendre d’activités concurrentes. C’est l’objet des stratégies volitionnelles. Nous proposons dans la figure I ci-dessous une architecture des stratégies d’autorégulation qui exprime cette dimension conflictuelle de l’apprentissage autorégulé. La dénomination « stratégies
d’autorégulation » est à considérer comme un terme générique qui recouvre en fait trois familles distinctes de stratégies, chacune avec leur
fonction propre.
Stratégies d’autorégulation
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Stratégies cognitives
et métacognitives
Fonction :
optimiser le traitement
de l’information
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Défavorables à l’apprentissage
Stratégies volitionnelles
Fonction :
protéger l’intention
d’apprendre
Stratégies
défensives
Fonction :
protéger l’estime de soi
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Favorables à l’apprentissage
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
Figure I : Architecture des stratégies d’autorégulation
Les stratégies d’autorégulation
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de contrôle sont bien connus.
Il existe une abondante littérature qui traite de ces questions (par
exemple, Noël, Romainville, Wolfs, 1995 ; Weinstein, Husman, Dierking,
2000). La plus-value qu’apportent les recherches sur l’apprentissage autorégulé est de mettre en avant le rôle des stratégies volitionnelles et de
contribuer à une meilleure connaissance de celles-ci. Une stratégie est
choisie en fonction du but à atteindre, des caractéristiques de la tâche et
des ressources de la personne. Elle est, par essence, contextuelle, de sorte
que deux questions se posent concernant les stratégies volitionnelles :
peut-on identifier un répertoire de stratégies utiles pour protéger l’intention d’apprendre et peut-on préciser leurs conditions de validité ? En
l’état actuel de la recherche, il est impossible de répondre à ces deux
questions. La première est toujours en débat, car il n’existe aucune taxonomie des stratégies volitionnelles qui fasse consensus. Nous disposons
de cinq taxonomies (Corno, 2001 ; Kuhl, 1987 ; Pintrich, 1999 ; Wolters,
2003 ; Zimmerman, 1989, 2008) dont les recoupements sont partiels.
Une des difficultés majeures réside dans le choix des critères organisateurs d’une telle taxonomie. Ainsi, se récompenser est une stratégie de
régulation de la conduite chez Zimmerman, de la motivation chez Pintrich et Wolters ; rechercher l’aide d’autrui est une stratégie de contrôle
de la conduite chez Pintrich, de contrôle de l’environnement chez Corno
et Zimmerman, et de contrôle de l’émotion chez Bœkærts. On le voit, le
problème n’est pas tant d’identifier les stratégies volitionnelles que de définir les catégories au sein desquelles les regrouper.
À partir des travaux cités, nous avons construit une nouvelle taxonomie présentée dans le tableau I. La structuration adoptée, inspirée de
Corno (2001), repose sur la distinction entre contrôle direct et contrôle
indirect des états internes. Le contrôle des états internes s’organise autour du triptyque attention/motivation/émotion, les stratégies concernées sont des stratégies de régulation de la motivation et de l’émotion.
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À la recherche d’une logique pour Les stratégies d’apprentissage
organiser les stratégies volitionnelles et les processus métacognitifs
Savoirs, 23, 2010
Les stratégies de contrôle du contexte d’apprentissage ont pour fonction
d’agir indirectement sur ces états internes en façonnant le contexte
d’apprentissage.
Les stratégies destinées à renforcer la valeur de la tâche ont été spécifiées à partir de la distinction approche/évitement, cadre fondamental
aux yeux d’Elliot (2006) pour penser les processus motivationnels. Le
mobile de la poursuite de l’effort est soit de se rapprocher d’un état absent valorisé positivement (approche), soit de rester éloigné d’un état absent dont la proximité produirait des conséquences négatives (évitement). Par exemple, l’apprenant trouve des ressources motivationnelles
pour poursuivre le travail en imaginant la déception ressentie par des
personnes importantes de son entourage s’il abandonnait.
Les stratégies de contrôle de la
motivation ont été beaucoup
mieux décrites que les stratégies de contrôle de l’émotion. Les modèles
de l’apprentissage autorégulé intègrent certes une composante émotionnelle, mais celle-ci reste à un niveau très général. On sait peu de choses
finalement, y compris dans le modèle de Bœkærts, des émotions vécues
pendant un épisode d’apprentissage et de leur régulation.
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Une voie prometteuse pour combler ce déficit est de s’appuyer sur les
travaux de Pekrun (Pekrun, 2006 ; Pekrun et al., 2002). Cet auteur, dont
l’objet de recherche n’est pas l’apprentissage autorégulé, s’est intéressé
aux effets des émotions sur la qualité de l’apprentissage et la réussite. Ses
recherches ont montré que l’expérience émotionnelle associée aux apprentissages était bien plus riche qu’on ne l’imaginait et ne se limitait pas
à l’émotion qui a focalisé tous les regards dans ce domaine, à savoir
l’anxiété. La colère (ou l’énervement) en particulier serait à considérer
comme une émotion centrale, activée par la poursuite de l’effort et la
confrontation à la difficulté, dont la régulation pourrait être aussi importante que la régulation de l’anxiété (Goetz et al., 2007). Les travaux de
Pekrun constituent une référence essentielle pour toute théorie qui se
donne comme objet la dynamique de l’activité d’apprentissage, car ils
mettent en relief l’évolutivité des émotions survenant au cours de
l’apprentissage. Un épisode d’apprentissage est en mesure de déclencher
plusieurs types d’émotions, et cet ensemble se transforme au fur et à me26
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De l’émotion aux émotions
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
sure de l’activité, de sorte que l’état initial n’est pas prédictif de ce qui va
se produire pendant l’activité.
Contrôle des états internes
(attention, motivation, émotion)
1. Activation d’un but d’approche : rendre saillantes les raisons de poursuivre l’effort.
Exemples : renforcement des buts de performance, de l’utilité de la
tâche, s’autorécompenser.
2. Activation d’un but d’évitement : rendre saillantes les conséquences négatives d’un échec.
Exemples : remise en cause du projet professionnel, non obtention
du diplôme, déception des proches.
3. Soutien du sentiment d’efficacité personnelle
Exemples : auto-encouragement, auto-instruction, fractionnement de
la tâche en sous-tâches, activation de souvenirs de réussite.
4. Contrôle de l’émotion
Exemples : évacuation de la tension corporelle (respirer, manger,
marcher…), recherche de soutien auprès d’autrui, induction d’une
émotion négative pour des résultats positifs (pessimisme défensif).
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5. Structuration de l’environnement : aménager le lieu de travail pour empêcher les distractions ou créer un climat motivationnel favorable.
Exemple : s’isoler, ranger la pièce où l’on travaille, mettre de la musique.
6. Accroissement des ressources disponibles : rendre la tâche plus maniable
en obtenant des informations supplémentaires ou en renégociant la
tâche prescrite.
Exemples : recherche d’aide matérielle (Internet, bibliothèque), recherche d’aide d’autrui.
7. Structuration du temps : anticipation et programmation des actions à
mettre en œuvre.
Exemples : allocation de ressources en temps et ordre de priorité
entre les tâches, définition de doses de travail optimales, recherche de
la pression temporelle (procrastination non défensive), intentions
d’exécution.
Tableau I : Taxonomie des stratégies volitionnelles
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Contrôle du contexte d’apprentissage
Savoirs, 23, 2010
Le mode défensif décrit
par Bœkærts est dicté
par le besoin de se protéger d’émotions négatives dont l’une des sources majeures est la crainte
de l’échec. Si l’effort joue un rôle central dans l’autorégulation des apprentissages, il est probable que, du point de vue de l’apprenant, le rapport à l’effort soit beaucoup plus ambivalent. L’effort est une arme à
double tranchant (Covington, 1992) puisqu’à faire des efforts on prend
inévitablement des risques en cas d’échec. Comment analyser l’échec
d’une personne qui s’est investie durablement dans un apprentissage sans
remettre en cause, d’une manière ou d’une autre, ses capacités ? Comment l’apprenant lui-même n’en viendrait-il pas à douter de ses compétences ? L’échec menace la compétence et, par contrecoup, l’estime de
soi. Le sentiment d’être compétent – c’est-à-dire d’interagir efficacement
avec l’environnement – est en effet un canal privilégié pour estimer la valeur de soi (Covington, 1992 ; Crocker, Wolfe, 2001 ; Elliot, Moller,
2003 ; Rhodewalt, Vohs, 2005). La compétence n’est pas liée automatiquement à l’autovalorisation4, elle le devient dans un second temps parce
que nos sociétés valorisent le fait de réussir dans un environnement
compétitif. Les réussites et les échecs dans ce domaine ont donc un impact considérable sur le plan personnel. La valeur de soi s’adossant à la
compétence, les buts normatifs fondés sur la comparaison sociale – faire
mieux que les autres (recherche de la performance) ou éviter de paraître
incompétent aux yeux d’autrui (évitement de l’échec) – sont des buts extrêmement prégnants dans les contextes d’apprentissage.
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Toute situation d’apprentissage est donc susceptible d’activer des stratégies défensives pour protéger l’estime de soi. Parmi celles-ci, les stratégies d’autohandicap ont été le plus étudiées (Martin, Marsh, Debus,
2003). Elles ne constituent cependant qu’un des sous-ensembles des stratégies défensives. La fixation des buts est également propice à l’expression de stratégies défensives, par exemple en se fixant un but modeste de
sorte que la probabilité d’échouer soit réduite, ou, au contraire, en se
fixant des buts à ce point ambitieux que l’échec est couru d’avance. Là
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C’est d’abord un besoin psychologique à satisfaire pour Deci et Ryan (2002)
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La protection de l’estime de soi,
le versant défensif de l’autorégulation
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
où tous auraient échoué, ou presque, l’échec ne révèle évidemment rien
des aptitudes de l’apprenant. Ces aspects défensifs se manifestent également au cours ou après la tâche d’apprentissage par un évitement systématique des conduites de vérification et d’auto-évaluation qui, en confrontant à un travail imparfait, confronte aussi à un soi possible redouté
(Cosnefroy, 2009). Enfin, une fois la tâche accomplie, la protection de
l’estime de soi se manifeste par des attributions causales qui externalisent
la difficulté (Rhodewalt, Vohs, 2005) et par des comparaisons sociales
descendantes plutôt qu’ascendantes qui conduisent l’apprenant à se
comparer à des personnes ayant moins bien réussi que lui (Martinot,
2008).
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L’avertissement délivré par les recherches sur l’apprentissage autorégulé est très clair : il ne suffit pas d’être motivé pour apprendre et être
autonome. Il faut le rester et faire quelque chose pour entretenir un niveau initial de motivation dont rien ne garantit la pérennité au cours de
l’apprentissage. C’est le rôle dévolu aux stratégies volitionnelles. Les recherches sur l’apprentissage autorégulé consacrent le retour sur le devant
de la scène de la volition, pensée non pas comme un substitut de la motivation mais comme complément indispensable à celle-ci. Dans la lignée
des travaux de Kuhl (2008), la volition n’est pas à considérer comme un
mécanisme unitaire, et encore moins une aptitude, mais plutôt comme la
coordination de différents sous-systèmes mentaux relatifs à l’attention,
l’émotion, la motivation, coordination s’effectuant de façon chaque fois
singulière en fonction de la tâche à accomplir. La volition s’appuie sur
des ressources stratégiques qui se développent avec l’expérience et aboutissent davantage à des schèmes (Vergnaud, 1996) qu’à des routines rigides. Loin d’être invariantes, les stratégies volitionnelles sont adaptées
aux caractéristiques des situations d’apprentissage (Corno, 2008).
En dépit d’une motivation initiale élevée, le passage de l’intention à
l’action n’est pas automatique. Se mettre au travail demeure souvent un
problème. Gollwitzer a longuement étudié cette question à l’aide du concept d’intention d’exécution. Pour se mettre au travail, dit-il, il faut profiter d’un contexte favorable et saisir les opportunités d’agir. Faute de re29
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Bilan des recherches : une compréhension renouvelée
des apprentissages
Savoirs, 23, 2010
connaître ces opportunités, l’apprenant laisse passer les occasions et diffère l’engagement dans l’action. L’intention d’exécution a précisément
pour fonction de faciliter le passage à l’action. Elle se présente sous la
forme d’un énoncé conditionnel : « si la situation X est rencontrée, alors
je mettrai en œuvre la conduite Y » L’intention d’exécution répond à la
question « comment atteindre le but fixé ? » en spécifiant quand, où et de
quelle façon agir.
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Si l’on considère que le périmètre de la motivation inclut ce qui permet d’expliquer la direction, le déclenchement, la persistance et l’intensité
du comportement (Fenouillet, 2009), il ne fait pas de doute que le concept d’apprentissage autorégulé appartient au champ de la motivation
puisqu’il interroge les mécanismes qui permettent le passage à l’action et
la poursuite de celle-ci jusqu’à l’atteinte du but. Cependant, la connaissance des croyances motivationnelles et des buts qui orientent la conduite de l’apprenant ne saurait rendre compte seule de l’ensemble des
processus qui se déroulent au cours de l’activité d’apprentissage. Cette
part d’imprévisibilité de l’action, que les stratégies volitionnelles ont pour
fonction de dompter, plaide pour une séparation conceptuelle entre motivation, entendue au sens restreint de motivation initiale déterminant le
choix et l’orientation des conduites, et volition. Ces deux processus demeurent néanmoins interdépendants et, de ce point de vue, la position
des chercheurs se réclamant de la volition nous paraît excessive et, surtout, incompatible avec une conception non linéaire de l’activité. Il n’y a
pas de rupture radicale entre motivation et volition, au sens où la première influence la seconde sans la déterminer totalement, et la seconde,
par une boucle de rétroaction, retentit sur la première en modifiant l’intention initiale de l’apprenant. À cette réserve près, il est souhaitable
d’opérer une clarification conceptuelle en considérant motivation et volition comme deux sous-ensembles interdépendants d’un ensemble plus
vaste, la conation (Broonen, 2007 ; Carré, 2008 ; Fenouillet, 2008 ; Reuchlin, 1999 ; Snow, 1996).
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En cela, c’est davantage qu’un processus de planification consistant à
allouer des ressources de temps au travail projeté. Il s’agit simultanément
de déterminer les conduites les plus opératoires pour atteindre le but et
les situations les plus favorables pour les mettre en œuvre. (Gollwitzer,
1999 ; Gollwitzer, Sheeran, 2006).
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
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Pour les raisons qui viennent d’être rappelées, le paradigme de l’apprentissage autorégulé est particulièrement attractif pour comprendre la
dynamique des apprentissages, et ceci bien au-delà de son ancrage initial
dans les apprentissages scolaires. Dans la dernière partie de cette note,
nous examinerons plus spécifiquement ce qu’apporte la transposition des
problématiques de l’apprentissage autorégulé à la formation des adultes.
Elle permet d’éclairer certaines difficultés d’apprentissage et, en retour,
elle produit des effets théoriques en faisant émerger des questions de recherche insuffisamment prises en charge en l’état actuel des recherches
sur l’apprentissage autorégulé. Trois spécificités de l’apprentissage chez
l’adulte seront examinées :
– la pression à l’autorégulation dans et hors la formation ;
– le poids de la formation par le travail et son corollaire, le poids des
interactions sociales et du groupe ;
– l’apprentissage délibéré et informel par autoformation, ce qui conduira à interroger les liens conceptuels entre apprentissage autorégulé et
apprentissage autodirigé.
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Un autre intérêt du concept d’apprentissage autorégulé est de réintroduire le conflit au cœur de l’apprentissage. L’apprenant est sans cesse
obliger d’arbitrer entre des forces contradictoires, et cela à deux niveaux.
L’importance accordée aux représentations de soi conduit à une conception de l’apprenant à la poursuite de buts multiples, centrés à la fois sur
l’acquisition de connaissances et de compétences, d’une part, et sur la validation de soi, d’autre part. L’engagement en formation chez les adultes
est étroitement lié à des enjeux identitaires, à la recherche d’un équilibre
nouveau où l’apprenant peut réaliser ses aspirations. La tension entre soi
actuel et soi possible est à l’origine d’une dynamique facilitant les apprentissages ou y faisant obstacle (Bourgeois, 2006 ; Bourgeois, Nizet, 1997).
Ainsi, selon que la situation d’apprentissage est perçue sur un versant
stimulant ou sur un versant menaçant, une dynamique de l’apprentissage
ou une dynamique de protection de l’estime de soi va s’instaurer. Une
fois la dynamique d’apprentissage enclenchée, l’apprenant ne doit pas
baisser la garde cependant. Il lui revient de maintenir durablement à
l’arrière-plan les activités concurrentes en recourant à des stratégies volitionnelles.
Savoirs, 23, 2010
Autorégulation des apprentissages et formation des
adultes
L’une des caractéristiques de l’adulte
est qu’il est dans la nécessité d’assumer lui-même ses conditions
d’existence qui imposent des contraintes (Lesne, cité par ChampyRemoussenard, 2005). Les enfants et les adolescents n’ont pas à prendre
en charge la vie domestique, ils n’ont pas, par définition, de vie professionnelle et, s’ils sont évidemment insérés dans une famille, ils n’ont pas
non plus à prendre en charge des tâches éducatives. Un adulte en formation doit au contraire mener de front la formation, la vie professionnelle,
la vie domestique et familiale. Ce n’est pas uniquement dans les activités
d’apprentissage que l’autorégulation doit se déployer, mais dans tous les
autres domaines mentionnés où, là aussi, des buts sont à atteindre qui
nécessitent un effort pour contrôler ses états internes et ses conduites.
Est-il possible de faire face simultanément à toutes ces situations qui requièrent de s’autoréguler ? Ce problème a été étudié par Baumeister qui,
analysant les raisons de l’échec de l’autorégulation, a forgé le concept de
force autorégulatoire. Puisque contrôler les états internes et la conduite
signifie inhiber la force des réponses habituelles (résister aux automatismes, ne pas se laisser aller au découragement), ce contrôle consomme
des ressources qui doivent ensuite être reconstituées. Quel que soit le
domaine considéré, l’individu puise dans un stock commun qui, au fur et
à mesure des conduites d’autorégulation, diminue (Schmeichel, Baumeister, 2004). Baumeister s’appuie sur la métaphore du muscle pour décrire
les caractéristiques de la force autorégulatoire : une fois l’effort terminé,
le muscle n’est pas immédiatement disponible pour un autre effort, il a
besoin d’une période de récupération pour se reconstituer (Baumeister,
Heatherton, 1996). Mutatis mutandis, la réussite de l’autorégulation dépend des ressources disponibles. Si l’individu a dû fortement s’autoréguler dans sa vie personnelle ou professionnelle, il n’est plus en mesure
de s’autoréguler immédiatement avec succès dans une activité d’apprentissage. L’effort consenti pour apprendre n’est possible que si, par ailleurs, l’individu n’a pas été obligé de puiser dans ses ressources pour atteindre par lui-même des buts dans d’autres domaines. L’autorégulation
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La pression à l’autorégulation chez l’adulte
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
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Si la force autorégulatoire est limitée, cela implique qu’il y aura nécessairement des discontinuités dans la dynamique de l’apprentissage. À certains moments, l’adulte pourra considérer qu’il n’est pas en mesure de
faire face aux exigences de la formation faute de disposer de ressources
qui ont été consommées dans d’autres domaines. L’hypothèse de la force
autorégulatoire introduit une analyse contextuelle de l’autorégulation qui,
bien que revendiquée dans tous les modèles de l’apprentissage autorégulé, demeure insuffisamment développée (sauf chez Bœkærts et Pintrich).
En effet, l’échec dans une tâche d’apprentissage ne signifie pas que
l’apprenant ne possède pas les habiletés requises (les stratégies d’apprentissage et les stratégies volitionnelles) ou que la tâche ne présente pas de
valeur. Cet échec se comprend si l’on prend en compte l’ensemble du
contexte de vie de l’apprenant et l’ensemble des contraintes qui, à un
moment donné, peuvent être défavorables à l’apprentissage parce
qu’elles ont asséché provisoirement les ressources disponibles. Le danger
est de mener de front plusieurs activités puisant dans les ressources
d’autorégulation. Dans ces conditions, les stratégies volitionnelles de
structuration du temps jouent probablement un rôle crucial chez l’adulte
parce qu’elles permettent une programmation des activités qui évite dans
la mesure du possible des proximités temporelles qui seraient trop consommatrices de ressources. Compte tenu des contraintes auxquelles
l’adulte doit faire face, le travail demandé en formation peut activer un
sentiment d’efficacité personnelle faible du fait de ce sentiment d’épuisement des ressources. La mise en œuvre de stratégies de régulation du
sentiment d’efficacité personnelle est probablement décisive pour accroître les ressources d’autorégulation. Autrement dit, la force autorégulatoire pourrait être augmentée avec de l’entraînement, c’est-à-dire par
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fatigue, les ressources doivent être reconstituées, ce qui signifie que
l’enchaînement d’activités demandant effort et contrôle de soi aura un
effet préjudiciable sur l’activité se trouvant en bout de chaîne. C’est le
cas, par exemple, lorsque les activités d’apprentissage sont renvoyées
après les tâches liées à la vie professionnelle, domestique et familiale.
C’est pourquoi, notent Baumeister et Heatherton (1996), s’autoréguler
tard le soir peut être souvent problématique car les ressources sont épuisées. Ce modèle a été mis à l’épreuve avec succès dans plusieurs expériences impliquant des étudiants (Muraven, Tice, Baumeister, 1998).
Savoirs, 23, 2010
l’exercice répété de stratégies volitionnelles. Cette hypothèse est tout à
fait compatible avec la métaphore du muscle et c’est bien celle que défend Baumeister : la répétition de l’autorégulation produit certes de la fatigue à court terme mais conduit probablement sur le long terme à une
extension de la force autorégulatoire (Muraven, Tice, Baumeister, 1998 ;
Schmeichel, Baumeister, 2004). La mise en œuvre de cette dernière a un
coût, l’effort implique fatigue, dimension à laquelle les modèles de
l’apprentissage autorégulé ont été peu sensibles ; en dépit de ce coût, il
est indispensable d’exercer de façon répétée ces stratégies afin
d’augmenter la capacité à s’autoréguler.
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une caractéristique de
la formation des adultes (Malglaive, 1990). Ces dernières années ont été
marquées par une valorisation de la formation dans et par le travail, qui a
conduit à un rapprochement entre la formation et le travail (Carré, 2005 ;
Champy-Remoussenard, 2005). Il est donc légitime d’interroger l’apport
des modèles de l’apprentissage autorégulé à la formation par le travail.
Celle-ci revêt plusieurs formes que les oppositions entre apprentissage
formel et informel, d’une part, et apprentissage explicite et implicite,
d’autre part, aident à mieux saisir. L’apprentissage peut être un effet secondaire des activités de travail, il est alors implicite, parce qu’il n’y a pas
d’intention délibérée d’apprendre, et informel parce que l’apprentissage
se fait par le travail en dehors de tout dispositif de formation. Les activités d’apprentissage ne sont pas distinctes des activités de travail (Eraut,
2007). Ainsi travailler en équipe, observer et écouter autrui, se confronter
à des tâches difficiles ou à des rôles nouveaux, expérimenter de nouvelles
procédures, sont autant de processus mis en œuvre dans le cadre des activités de travail susceptibles d’être aussi à la source d’apprentissages.
Eraut (2007) a proposé une typologie de ces activités qu’il distingue des
activités spécifiques d’apprentissage sur le lieu de travail (supervision, visite de sites, conférences, par exemple). Les modèles de l’apprentissage
autorégulé s’intéressent à un apprenant doté d’une intention et, par conséquent, d’un but clairement posé qui orientera la conduite et son contrôle par des processus à la fois conscients et non conscients. On ne peut
donc parler d’autorégulation des apprentissages lorsque l’apprentissage
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La formation au travail et par le travail : Analyser l’expérience
pour se former est
l’analyse des pratiques
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demeure implicite. En revanche l’apprentissage implicite réalisé sur le
lieu de travail peut faire l’objet d’une explicitation et d’une élaboration
dans un dispositif formel d’apprentissage (Tynjälä, 2008). C’est le cas des
dispositifs d’analyse de pratiques qui s’insèrent dans un dispositif de
formation, par exemple d’alternance (apprentissage formel), et qui visent
à l’explicitation et la transformation du savoir tacite (apprentissage explicite). Cette modalité de formation nécessite une forte autonomie de l’apprenant qui, pour reprendre la définition déjà citée de Zimmerman, doit
se mobiliser intensément aux plans cognitif, métacognitif et motivationnel pour tirer parti de l’expérience professionnelle. Apprendre en analysant sa pratique professionnelle est une forme d’apprentissage autorégulé. À la considérer sous cet angle, l’analyse des pratiques apparaît comme
un mode d’apprentissage particulièrement complexe, surtout lorsqu’elle
est mise en œuvre dans une intention de professionnalisation avec des
personnes novices comme cela a été le cas en France ces dernières années dans la formation initiale des enseignants. La première difficulté réside dans la définition du but sans lequel il n’y a pas d’autorégulation
possible. Les recherches de Zimmerman (2008) et de Locke et Latham
(2002) ont montré l’importance d’un but précis pour soutenir l’engagement dans la tâche. Or l’analyse de pratiques s’apparente souvent à une
tâche peu structurée dans la mesure où le but posé reste à un haut niveau
de généralité (apprendre à partir de son expérience professionnelle) et relativement lointain, l’analyse se nourrissant de la répétition et de la comparaison d’expériences diversifiées. Dans ces conditions, il peut être difficile de percevoir que l’apprentissage progresse faute de disposer de critères suffisamment précis et proches par rapport auxquels s’évaluer. Il
est probablement plus aisé pour un professionnel expérimenté de transformer ce but général en un ou des buts spécifiques car il dispose déjà
d’une mémoire structurée d’expériences professionnelles et une certaine
représentation de ses forces et de ses difficultés.
Par ailleurs, Zimmerman a souligné l’intérêt d’instrumenter l’autoobservation en se donnant des traces du déroulement et du résultat de
l’activité. En gardant des traces d’un épisode à l’autre, il devient possible
d’identifier des patterns dysfonctionnels. Il note, en outre, combien il est
important pour les débutants d’analyser le déroulement de l’activité
beaucoup plus que le résultat de celle-ci (Zimmerman, Kitsantas, 1999).
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Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
Savoirs, 23, 2010
En centrant trop précocement le regard sur les résultats de l’activité, le
risque est de développer, en cas d’échec, des attributions en termes de
manque de capacités qui feront obstacle à la poursuite de l’effort. Cette
perspective invite à ce que le discours sur les pratiques s’étaie sur des
traces dont le choix aura fait l’objet d’une réflexion préalablement à la
pratique.
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En résumé, les recherches sur l’apprentissage autorégulé suggèrent
trois conditions pour que les dispositifs d’analyse de pratiques mis en
œuvre dans une intention de professionnalisation avec des débutants
soient à l’origine d’une véritable expérience d’apprentissage : ces dispositifs permettent-ils à l’apprenant de définir des buts suffisamment précis
qui soutiendront l’analyse de l’activité et l’engagement durable dans le
dispositif ? L’auto-observation de l’activité s’appuie-t-elle sur un ensemble d’indicateurs dont le choix a fait l’objet d’une réflexion avant
même de s’engager dans l’activité ? Ces dispositifs sont-ils introduits à un
moment où l’apprenant a pu se constituer un répertoire de pratiques suffisamment stabilisées ?
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Un troisième obstacle concerne spécifiquement les débutants. Pour
Winne et Zimmerman, les débutants ont besoin du guidage d’un expert
afin de s’approprier les savoir-faire nécessaires. Si l’autorégulation intervient trop tôt, le débutant se trouve confronté à une situation de double
tâche excédant ses ressources attentionnelles. Il doit consacrer son attention à la maîtrise d’un ensemble de savoir-faire et, simultanément, s’interroger sur la pertinence de ces savoir-faire. Deux temps distincts sont
donc à distinguer dans le développement de l’autorégulation : la constitution d’un répertoire de savoir-faire qui permet une efficacité relative de
l’action à un coût psychique tolérable (sans susciter trop d’anxiété notamment) puis, une fois ce premier équilibre atteint, un retour sur ces
pratiques afin d’en interroger les fondements et de les adapter en fonction du contexte (Winne, 1995 ; Zimmerman, 2000). Une réflexion sur
l’action ne serait véritablement fructueuse qu’à partir d’un certain seuil de
maîtrise de l’action. Cette approche n’est pas très éloignée de celle qui
prévaut dans le champ de la didactique professionnelle où l’on considère
que le problème est d’abord « d’identifier des classes de situations et des
formes d’organisations de l’activité assez stables pour qu’il soit possible
d’en circonscrire l’analyse » (Samurçay, Vergnaud, 2000).
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
La place centrale accordée au travail
dans la formation d’adultes a pour corollaire l’importance que revêt le groupe. En effet, une des différences
avec les activités scolaires habituelles tient à ce que l’activité de travail
est socialement partagée et s’exprime souvent par un travail en équipe.
De même, les dispositifs tels que l’apprentissage par problèmes ou
l’apprentissage par projets, dont la vocation est d’être au plus près des
problèmes rencontrés sur le lieu de travail, sont des dispositifs qui requièrent un travail en groupe (Tynjälä, 2008). Dans tous ces cas, la personne participe à l’autorégulation d’un groupe de travail. La volition est
moins nécessaire en groupe car les apprenants se protègent mutuellement. Les processus métacognitifs de contrôle sont répartis entre tous
les membres du groupe (Corno, 2001, 2004). Le partage des fonctions de
contrôle est une spécificité de l’autorégulation groupale. Une autre différence tient au fait qu’en groupe la comparaison sociale est omniprésente.
Lorsqu’elle se joue en termes de différences de compétences (qui est le
plus compétent, mon partenaire ou moi ?) plutôt qu’en termes de validité
des jugements (quelle est la réponse la plus appropriée ?) une partie de
l’attention sera captée par une interrogation sur sa propre valeur au détriment de la résolution de la tâche. La menace sur les compétences peut
amener à privilégier une régulation relationnelle plutôt que cognitive des
désaccords au détriment de la performance du groupe (Buchs et al.,
2008). Ces différences conduisent à distinguer deux contextes spécifiques
de l’apprentissage autorégulé : l’autorégulation individuelle et l’autorégulation groupale. Trois dimensions participent aux activités
d’apprentissage : la dynamique motivationnelle, les processus cognitifs et
les processus psychosociaux lorsque se nouent des interactions sociales
(Bourgeois, 2008). Les modèles de l’apprentissage autorégulé s’efforcent
d’articuler les deux premières dimensions, alors que la troisième n’est pas
un objet central des recherches. Tous les auteurs considèrent que
l’apprentissage autorégulé peut s’exprimer tout autant dans des formes
sociales que dans des formes individuelles sans que soit reconnue la spécificité du niveau groupal. De façon surprenante, il n’est jamais fait allusion, dans aucun modèle, à l’impact des conflits sociocognitifs et de leur
mode de régulation sur la progression du travail de groupe. La transposition des problématiques de l’apprentissage autorégulé à la formation
d’adultes ouvre ainsi une nouvelle question de recherche : quelle est la
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S’autoréguler en groupe
Savoirs, 23, 2010
nature de l’autorégulation groupale et sa spécificité par rapport à
l’autorégulation individuelle ?
Les adultes apprennent également
par eux-mêmes en dehors des circuits institués de formation, dans
des formes d’apprentissage explicite, puisqu’il y a une intention d’apprendre, bien que non formel. L’autodidaxie est l’exemple le plus emblématique de ces processus d’autoformation. Toutefois, l’autoformation, ou
apprentissage autodirigé, ne se restreint pas à cet unique cas de figure.
Plus largement, l’apprentissage autodirigé est caractérisé par les efforts
que l’individu déploie pour apprendre par lui-même (Carré, 1997 ;
Tremblay, 2003). Cette forme d’apprentissage se rencontre également
dans les apprentissages formels et dans des dispositifs pédagogiques spécifiques qui permettent d’apprendre par soi-même en dehors de la présence du formateur (autoformation accompagnée, Carré, 2002). S’autodiriger ne se réduit donc pas à une do-it yourself (Loyens et al., 2008) ou à
une « soloformation » (Carré, 2003). Le concept d’apprentissage autodirigé est issu de la formation d’adultes, à la suite notamment des travaux
de Knowles (1975), tandis que le concept d’apprentissage autorégulé est
un produit des apprentissages scolaires. Knowles (1975) définit
l’apprentissage autodirigé comme le processus par lequel l’apprenant
prend l’initiative, avec ou sans l’aide d’autrui, pour diagnostiquer ses besoins d’apprentissage, formuler des objectifs, identifier les ressources
humaines et matérielles, choisir et mettre en œuvre les stratégies
d’apprentissage appropriées et évaluer les résultats obtenus. Initiative,
persistance, curiosité, désir d’apprendre, autodiscipline, confiance en soi
et capacité à prendre les obstacles comme des défis à relever sont pour
Guglielmino (citée par Hoban et al., 2005) les principales caractéristiques
de l’apprenant autodirigé. À partir de deux populations distinctes, les
élèves et les adultes, les concepts d’apprentissage autodirigé et d’apprentissage autorégulé s’efforcent de rendre compte du même phénomène,
l’autonomie dans les apprentissages. On ne peut d’ailleurs qu’être frappé
par la similitude des définitions qui mettent toutes deux l’accent sur le
rôle de l’intentionnalité, de l’effort et du contrôle que l’apprenant exerce
sur la tâche. L’apprentissage autodirigé ne serait-il que le nom que l’on
donne à l’apprentissage autorégulé chez l’adulte ou bien des différences
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Apprentissage autodirigé
et apprentissage autorégulé
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
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Par ailleurs, la manière de concevoir les caractéristiques de l’apprenant
n’est pas nécessairement identique dans les deux approches. À l’origine,
les recherches sur l’autodirection ont été influencées par l’approche humaniste de Rogers. Celle-ci repose sur le postulat d’une capacité d’autodirection chez l’adulte, qui est à la fois une force motivationnelle orientant vers l’autonomie et la croissance, et un système d’évaluation de
l’expérience. Ce processus de développement peut être entravé et c’est le
but assigné à la thérapie rogérienne que de le relancer (Pagès, 1970).
Cette conception est totalement étrangère aux modèles qui ont été pré39
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significatives séparent-elles ces deux mondes conceptuels ? Il semble
tout d’abord que le champ de l’apprentissage autodirigé soit moins structuré que ne l’est celui de l’apprentissage autorégulé. Carré parle à ce propos d’une galaxie qu’il suggère d’organiser en cinq courants majeurs
(Carré, 1997, 2002) qui chacun donne sens à ce que signifie apprendre
par soi-même. Selon que l’accent est mis sur les pratiques d’apprentissage
indépendantes des institutions d’éducation (l’autodidaxie), la construction de soi à travers l’expérience personnelle (histoires de vie), les
groupes et les organisations par lesquels s’effectue l’autoformation (réseaux, associations), les dispositifs pédagogiques qui la favorisent ou les
processus psychologiques requis sous-tendant l’autodirection, les cadres
théoriques convoqués sont bien distincts. Cela contraste avec l’unité des
recherches sur l’apprentissage autorégulé qui s’inscrivent toutes dans le
champ de la métacognition et de la motivation. Probablement faut-il voir
dans cette variété d’approches l’indice du champ plus large que vise à
embrasser l’apprentissage autodirigé. C’est la conclusion à laquelle parviennent Loyens et al. (2008) dans un des très rares articles consacrés à la
comparaison des deux concepts : l’apprentissage autodirigé est plus large
que l’apprentissage autorégulé car il s’intéresse à la fois aux caractéristiques de l’environnement d’apprentissage qui favorisent l’autonomie et
aux caractéristiques psychologiques de l’apprenant. Une des facettes des
recherches sur l’apprentissage autodirigé consiste à étudier comment,
grâce à l’ouverture du dispositif de formation, l’apprenant peut exercer sa
liberté de choix et exercer un contrôle réel sur l’apprentissage (Jézégou,
2005). Cette perspective est absente dans les recherches sur l’apprentissage autorégulé qui limitent leur périmètre à l’élucidation des processus
psychologiques de l’autonomie.
Savoirs, 23, 2010
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L’absence du paradigme de l’autodétermination peut paraître surprenante tant la question de l’autonomie est centrale chez Deci et Ryan. En
fait, cette absence n’est pas si surprenante que cela quand on se souvient
que les modèles de l’apprentissage autorégulé ont d’abord cherché à
rendre compte des apprentissages scolaires pour lesquels, dans la très
grande majorité des cas, la définition par l’apprenant lui-même de la
tâche à accomplir ou, plus largement, du projet de formation ne se pose
pas. Toutefois, la restriction du champ opéré dans les recherches sur
l’apprentissage autorégulé est bien davantage l’effet d’une décision prag40
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sentés. Ceux-ci proposent au contraire une vision nettement plus conflictuelle de l’apprenant, partagé entre des buts multiples qui ne sont pas
toujours compatibles. Lorsque les recherches sur l’apprentissage autodirigé ne s’inscrivent pas dans le paradigme rogérien, les processus cognitifs sous-jacents à l’autodirection et à l’autorégulation ne coïncident pas
nécessairement. Un exemple de dissociation entre l’autodirection psychologique et l’autorégulation psychologique nous est donné dans le
modèle de la double dimension de l’apprentissage autodirigé élaboré par
Carré (2002, 2003, 2010). L’autodirection résulte d’un contrôle exercé à
deux niveaux : le choix et la finalité de l’action, l’intentionnalité du projet
de formation, d’une part (autodétermination), le pilotage de l’apprentissage, d’autre part (autorégulation). C’est lorsque l’apprenant est en mesure de prendre la décision à ces deux niveaux que l’on parlera
d’apprentissage autodirigé. L’intérêt de ce modèle est de réintroduire un
paradigme théorique totalement absent des recherches sur l’apprentissage autorégulé, celui de Deci et Ryan (2002). Ce paradigme permet de
mieux comprendre la motivation à l’engagement en formation, bien qu’il
puisse introduire certaines tensions, notamment en ce qui concerne la
définition de l’autonomie. Dans les modèles de l’apprentissage autorégulé, l’autonomie est définie en extériorité. L’apprenant est autonome s’il
est capable d’atteindre le but fixé, que celui-ci soit autodéterminé ou non.
Chez Deci et Ryan au contraire, il n’y a de véritable autonomie que lorsque l’apprenant peut considérer que le but émane de lui-même (Reeve et
al., 2008). Ce que les auteurs appellent la régulation introjectée (par
exemple, aller jusqu’au bout de l’activité sous peine de se sentir coupable) n’est pas une figure de l’autonomie alors qu’elle le serait dans la
perspective de l’apprentissage autorégulé.
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
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Plus généralement, l’intérêt pour les conditions motivationnelles de
l’autorégulation n’est pas absent des modèles de l’apprentissage autorégulé. C’est particulièrement évident chez Zimmerman qui accorde le rôle
que l’on sait au sentiment d’efficacité personnelle, mais cela s’applique
également à Bœkærts pour qui construction de la motivation et autorégulation de l’apprentissage se situent dans une véritable continuité. La situation d’apprentissage sera perçue comme stimulante ou menaçante en
fonction des sois possibles et du sentiment de compétence qu’elle activera, et ce jugement déterminera le mode de régulation adopté. De la
même façon, Pintrich (2000) avance l’hypothèse que les processus
d’autorégulation dépendent des buts d’accomplissement activés dans la
situation d’apprentissage. Ces trois auteurs intègrent également la valeur
de l’activité (Eccles, 2005) comme variable motivationnelle déterminante.
C’est pourquoi il serait excessif de considérer que les modèles de
l’apprentissage autorégulé « font l’impasse sur les conditions prédécisionnelles de l’action » (Carré, 2010). Il reste à élucider, et c’est probablement une des difficultés majeures à laquelle confronte le rapprochement entre les deux champs de recherche, dans quelle mesure les concepts motivationnels mobilisés dans les modèles de l’apprentissage
autorégulé (buts d’accomplissement, valeur de l’activité, sentiment
d’efficacité personnelle, schémas de soi et sois possibles) sont compatibles et peuvent s’articuler avec la théorie de l’autodétermination de Deci et Ryan. Si la complémentarité est évidente entre le sentiment
d’efficacité personnelle de la théorie sociocognitive et le sentiment de
compétence de la théorie de l’autodétermination, comme l’a montré Car41
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matique, le choix des populations étudiées, que de la définition même du
concept. La fixation des buts fait partie intégrante du processus
d’autorégulation comme nous le rappelle Pintrich (2000). Elle intervient
dans tout un continuum de situations allant de situations d’apprentissage
fortement structurées (contrainte maximum) à des situations où
l’apprenant doit lui-même s’interroger sur ses besoins d’apprentissage
(autonomie maximum). Les recherches entreprises par Zimmerman sur
la manière dont les écrivains autorégulent leur activité d’écriture et les
musiciens leur pratique de l’instrument, en se fixant eux-mêmes les buts
à atteindre, illustrent cette conception plus large de l’autorégulation
(Zimmerman, 1998 ; Zimmerman, Risemberg, 1997).
Savoirs, 23, 2010
ré (2010), cette articulation reste à construire pour les autres concepts
mentionnés.
Il serait finalement peu satisfaisant d’opposer apprentissage autodirigé
et apprentissage autorégulé en restreignant le second à la gestion des
moyens, tandis que le premier inclurait à la fois la définition de la tâche à
accomplir et le pilotage de l’apprentissage. Pour clarifier la terminologie,
il est utile de distinguer deux types de situations d’apprentissage. D’une
part, les situations où préexiste une tâche prescrite définie par un concepteur autre que l’apprenant, ce dernier devant naturellement redéfinir
la tâche prescrite (redéfinition qui implique à la fois des aspects cognitifs
et motivationnels), d’autre part, les situations où l’apprenant définit luimême la tâche. En accord avec le modèle de Carré, on réservera le terme
d’apprentissage autodirigé au second cas de figure. Deux options sont
alors disponibles pour délimiter le concept d’apprentissage autorégulé :
soit il désigne l’autorégulation de situations d’apprentissage définies par
autrui, et dans ce cas apprentissage autodirigé et apprentissage autorégulé
fonctionnent comme deux concepts complémentaires de même niveau
logique renvoyant à des situations d’apprentissage distinctes ; soit on lui
confère un statut plus englobant en considérant qu’entre autonomie et
contrainte, il n’y a pas une séparation nette mais bien plus un gradient
d’autorégulation. Dans ce cas, l’apprentissage autodirigé apparaîtrait
comme une forme particulière de l’apprentissage autorégulé, celle nécessitant la plus forte autorégulation.
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On se souvient de la déception engendrée il y a quelques années par le
courant des remédiations cognitives, déception d’autant plus grande que
les attentes avaient été fortes. L’expérience doit nous instruire : le paradigme de l’apprentissage autorégulé n’est certainement pas un nouvel eldorado théorique qui déboucherait ipso facto sur des dispositifs pédagogiques novateurs susceptibles d’améliorer significativement les apprentissages. Pour autant, son application à la formation d’adultes semble
prometteuse. Il permet d’enrichir la lecture des processus d’apprentissage
en soulignant l’importance des buts en rapport avec la valorisation ou la
protection de l’estime de soi ainsi que les stratégies défensives que ces
buts peuvent générer. Il attire également l’attention sur la nécessité de
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Conclusion
Note de synthèse – L’apprentissage autorégulé : perspectives en formation d’adultes
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disposer d’un répertoire étendu de stratégies volitionnelles pour mener
l’apprentissage à son terme. Il est important que cette conception élargie
des apprentissages soit mieux connue des formateurs d’adultes afin qu’ils
puissent la diffuser auprès de leur public. Les recherches sur l’apprentissage autorégulé contribuent en outre à éclairer certains phénomènes de
discontinuité dans les apprentissages et certaines des conditions requises
pour que les dispositifs d’analyse de pratiques donnent leur pleine mesure. Mais le gain est aussi dans l’autre sens. Se trouvant confronté à la
formation d’adultes, le concept d’apprentissage autorégulé voit s’ouvrir
de nouvelles voies de recherche : spécificité de l’autorégulation groupale,
articulation avec le concept d’apprentissage autodirigé et la théorie de
l’autodétermination. L’analyse des convergences et des fractures avec
l’apprentissage autodirigé doit être poursuivie afin d’examiner s’il est
possible d’organiser en un seul espace théorique ces deux ensembles de
recherches. Une question demeure en suspens, à laquelle les modèles actuels ne répondent qu’imparfaitement : quel est le poids des variables
personnelles et contextuelles et comment se noue leur interaction dans
l’autorégulation des apprentissages ? Sur tous ces points la recherche
francophone a des arguments à faire valoir. Les recherches menées sur le
conflit sociocognitif sont en mesure d’éclairer la compréhension de
l’autorégulation groupale, de même que les modèles issus de la didactique
et ceux issus de l’analyse de l’activité en situation de travail peuvent aider
à mieux comprendre le rôle du contexte dans l’apprentissage autorégulé.
Savoirs, 23, 2010
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