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Automédication
A. Baumelou, S. Lauraire, S. Tachot, M. Flachaire
En France les médicaments non inscrits sur une liste de substances vénéneuses peuvent être achetés par le
public sans prescription médicale préalable. Ils constituent la classe des médicaments dits de prescription
médicale facultative. De nombreux principes actifs ont subi au cours des 10 dernières années une
exonération de la liste des substances vénéneuses, par la procédure dite de délistage ou « switch ». Ces
délistages ont contribué à modifier le champ des indications cliniques concernées par l’automédication.
Longtemps cantonnée à des traitements de courte durée pour des symptômes ou des affections bénignes,
l’automédication concerne aussi maintenant des affections chroniques ou des problèmes majeurs de
santé publique (addiction tabagique, contraception d’urgence). L’automédication reste néanmoins en
France un mode marginal de traitement. Les ventes des spécialités non listées non remboursées ne
représentent que 6 % des ventes totales de médicament. Les facteurs favorisant le développement de ce
comportement : éducation thérapeutique, consumérisme, sont contrebalancés par un certain
corporatisme de la profession médicale, une anxiété des pharmaciens face à un élargissement de leur
activité de soins mais surtout l’attachement des patients à la classe des médicaments remboursés.
© 2006 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Automédication ; Prescription médicale facultative ; Législation pharmaceutique ;
Éducation thérapeutique ; Délistage
Plan
¶ Introduction
1
¶ Définition du médicament d’automédication
1
¶ Statut réglementaire du médicament d’automédication
2
¶ Classe des médicaments de prescription médicale facultative
3
¶ Automédication et Europe
3
¶ Comportement d’automédication et acteurs
3
¶ Risques de l’automédication
4
¶ Avenir de l’automédication
4
■ Introduction
L’automédication est un comportement. Face à un symptôme
ou une maladie le patient prend un médicament qu’il croit
bénéfique pour sa santé. Ce comportement suppose que l’individu connaît ou reconnaît le symptôme ou la maladie, qu’il
connaît cet agent extérieur comme ayant des effets bénéfiques
sur son état et qu’il a suffisamment confiance en lui et dans le
médicament pour se l’administrer sans avis médical [1]. Dans
cette démarche le patient peut s’aider de nombreux autres avis.
Nous envisageons successivement les médicaments susceptibles d’être ainsi consommés et les caractéristiques de ce comportement.
Traité de Médecine Akos
Les législations concernant l’automédication étant très
différentes d’un pays à l’autre, notre analyse se borne à étudier
la situation française et les évolutions de la réglementation
européenne.
■ Définition du médicament
d’automédication
Il n’existe pas en France de définition réglementaire du
médicament d’automédication. Comme pour tout médicament,
les autorités sanitaires vérifient a priori que c’est un médicament et lui accordent une autorisation de mise sur le marché
(AMM) : « On entend par médicament toute substance ou
composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines ou animales
ainsi que tout produit pouvant être administré à l’homme ou à
l’animal en vue d’établir un diagnostic médical ou de restaurer,
corriger, ou modifier leurs fonctions organiques. »
En France, la prescription est obligatoire pour toute spécialité
inscrite sur une liste (listes I, II, stupéfiants). D’après le Code de
la Santé publique (article L.5132-6), ces listes comprennent « les
substances, les médicaments, les produits insecticides ou
acaricides ou tout autre produit ou substance susceptible de
présenter pour la santé des risques directs ou indirects ». Dans
le droit français, seuls les médicaments inscrits sur une liste sont
soumis à prescription médicale préalable. A contrario on en
déduit que tous les médicaments non inscrits sur une liste
1
1-0153 ¶ Automédication
peuvent faire l’objet d’automédication mais cette définition
positive n’est jamais formulée. On peut substituer au terme de
« médicament d’automédication » le terme de médicament de
prescription médicale facultative (PMF) puisque réglementairement ces médicaments peuvent bien sûr être prescrits par un
médecin. Ce terme correspond exactement au terme anglais
« non prescription drug » [2] . Les termes autrefois utilisés de
médicament-conseil, de médicament semi-éthique n’étaient pas
plus réglementairement définis que celui d’automédication. Ils
ne sont plus guère utilisés. Le terme OTC (« over-the-counter ») [3]
n’est pas utilisable car il désigne les « General sale list medicines »
délivrées sans recours au pharmacien, mode de délivrance qui
n’existe pas en France.
Les classifications en rapport avec le remboursement par les
organismes sociaux et les modes de délivrance à l’officine
n’interviennent pas dans cette définition : on connaît en France
de nombreux médicaments non listés qui sont remboursés
(antalgiques par exemple) et des médicaments listés qui sont
non remboursés (médicaments des troubles de l’érection par
exemple). Il est, en France, habituel de considérer que le
médicament d’automédication n’est pas remboursé par les
organismes sociaux puisqu’il ne peut y avoir de remboursement
sans prescription médicale initiale.
Tableau 1.
Principes actifs exonérés en France depuis 1996.
Voie orale
Dextrométhorphane bromhydrate
Famotidine
Nicotine
Ranitidine
Kétoprofène
Nifuroxazide
Cétirizine dichlorhydrate
Lopéramide
Cimétidine
Lévonorgestrel
Ibuprofène
Métopimazine
Voies locales
Diclofénac
Aciclovir
Hydrocortisone
Kétoconazole
Cromoglycate de sodium
Minoxidil
■ Statut réglementaire
du médicament d’automédication
Le médicament non inscrit sur une liste de substances
vénéneuses ou médicament de PMF doit faire l’objet avant sa
commercialisation d’une autorisation préalable par le ministre
chargé de la santé dite autorisation de mise sur le marché ou
AMM. Elle est proposée par le directeur général de l’Agence
Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé (AFSSAPS)
sur avis de la commission d’AMM. L’analyse des dossiers de ces
médicaments est réalisée par un groupe de travail ad hoc. Les
conditions d’analyse des dossiers avant autorisation ne diffèrent
pas de celles définies pour les médicaments listés. Elles sont
définies par l’avis aux fabricants du 27 mai 2005 [4].
Une voie spécifique de la mise sur le marché de ces médicaments consiste en l’exonération de la liste des substances
vénéneuses. Elle est aussi appelée procédure de « délistage ». Le
terme anglais de « switch » est souvent utilisé. Actuellement,
cette procédure consiste pour le fabricant à demander pour un
médicament déjà commercialisé et dont la substance active est
inscrite sur une liste des substances vénéneuses une exonération
à la réglementation des dites substances. Cette exonération est
accordée selon des conditions particulières concernant la forme
pharmaceutique, le dosage unitaire et le conditionnement. Cette
exonération peut ne concerner que certaines indications
thérapeutiques. Le processus est scientifiquement et réglementairement bien défini. Des critères pharmacologiques et cliniques permettant d’envisager pour un principe actif un délistage
ont été proposés. L’accent est mis sur la démonstration de la
sécurité de la spécialité dans les conditions réelles d’un usage
sans prescription médicale.
Au niveau européen une recommandation pour la constitution d’un dossier en vue d’un délistage a été publiée en septembre 1998. Cette recommandation a été actualisée début 2006 [5].
Le Tableau 1 donne la liste des principes actifs exonérés en
France depuis 1996.
L’ampliation d’AMM d’une spécialité non soumise à prescription médicale comporte quatre annexes. L’annexe I ou résumé
des caractéristiques du produit est destinée aux professionnels
de santé, l’annexe II concerne notamment des données pharmaceutiques ainsi que les conditions de délivrance,
l’annexe IIIA définit les mentions obligatoires concernant
l’étiquetage, l’annexe IIIB définit les modalités d’information du
public, la notice destinée au patient. Un soin tout particulier est
apporté à la rédaction de cette notice, vecteur direct auprès du
patient de l’information spécifique au médicament mais aussi
vecteur
2
Acide niflumique
Ibuprofène
Terbinafine chlorhydrate
Béclométasone chlorhydrate
possible de conseils d’éducation sanitaire et document de
référence pour le contrôle de la publicité auprès du public [4].
La publicité du médicament de PMF est soumise à une
réglementation spécifique. Pour les spécialités remboursées par
les régimes obligatoires d’assurance maladie, la publicité dirigée
vers le public est interdite et seule la publicité dirigée vers les
professionnels de santé est autorisée. Cette publicité fait l’objet
d’un contrôle a posteriori.
Pour les médicaments ni listés ni remboursés il y a possibilité
de publicité auprès du public sauf restriction spécifique dans
l’AMM. Celle-ci fait l’objet d’un contrôle a priori. Ce contrôle
porte tout particulièrement sur la conformité des allégations aux
mentions de l’AMM.
En France le seul lieu de délivrance d’un médicament (prescrit ou non) est l’officine pharmaceutique. La délivrance du
médicament de PMF doit être faite par un pharmacien. Elle doit
être accompagnée d’un conseil thérapeutique en vue du bon
usage de ce médicament.
Le système français de notification des effets indésirables, la
pharmacovigilance, fait obligation aux professionnels de santé
de notifier les éventuels effets indésirables des médicaments. La
fréquence des notifications concernant les médicaments de PMF
est néanmoins très faible [6].
“
Points essentiels
Le médicament de prescription facultative (PMF) est une
spécialité dont le(s) principe(s) actif(s) n’est (ne sont) pas
inscrit(s) sur une liste de substances vénéneuses. Les
conditions d’autorisation de ces spécialités sont définies
dans un avis au fabricant publié au Bulletin officiel de la
République Française du 15/09/2005.
La procédure administrative de sortie de liste d’un
principe actif est appelée délistage ou exonération ou
« switch ». Les conditions d’obtention d’un délistage par
un fabricant sont définies par des recommandations
européennes mises à jour en janvier 2006.
Traité de Médecine Akos
Automédication ¶ 1-0153
■ Classe des médicaments
de prescription médicale
facultative
Les médicaments délivrés sans ordonnance (c’est-à-dire
achetés spontanément par le patient) ne représentent qu’une
très faible part de la consommation pharmaceutique globale.
Encore faut-il distinguer à l’intérieur de cette classe ceux qui
sont présentés au remboursement et ceux que l’on pourrait
considérer comme correspondant réellement à un comportement d’automédication. Le Tableau 2 donne le marché en
France du médicament non prescrit, en distinguant la part
remboursée et la part non remboursée.
Ces médicaments couvrent les classes pharmacothérapeutiques suivantes : affections des voies respiratoires, antalgie,
affections du tractus digestif, affections cutanées, vitamines et
minéraux. Le Tableau 3 représente les parts des principales
classes pharmacothérapeutiques de ce marché.
Les indications de ces médicaments définissent le champ
d’exercice d’une prise en charge personnelle du soin : elles
étaient traditionnellement définies comme des symptômes
bénins et de courte durée [7]. Ce champ s’est notablement accru
et cette tendance commune aux autres pays européens et aux
Etats-Unis [8] s’est illustrée en France par deux décisions
gouvernementales récentes : les délistages des médicaments de
la contraception d’urgence et des substituts nicotiniques. Dans
un cas comme dans l’autre, les affections concernées ne sont ni
des symptômes, ni des affections bénignes et le traitement (par
les substituts nicotiniques) peut s’étendre sur plusieurs mois.
Dans certains pays le champ de l’automédication peut
s’étendre à la prévention [9]. La Grande-Bretagne est le premier
pays à avoir autorisé une statine (hypolipidémiant inhibiteur de
la HMG CoA estérase) en automédication. La simvastatine a été
Tableau 2.
Le marché en France des médicaments de prescription médicale
facultative.
2002
2003
2004
En millions d’euros prix consommateur
MPT
23447
24403
25323
HPT
5384
5383
5201
AM
1555
1575
1493
autorisée à la dose de 10 mg sur la liste P (délivrance sans
ordonnance en officine et par le pharmacien). L’autorisation a
été accordée au vu des résultats de la Heart Protection Study.
Cette autorisation fait l’objet de polémiques importantes.
D’autres pays ont ouvert de nouvelles perspectives de délistage :
l’Australie a délisté l’orlistat dans le traitement et la prévention
de l’obésité.
Suivant cette orientation générale visant à élargir le champ
des indications de la prise en charge personnelle de la maladie,
une réflexion commune entre agences et industriels a défini les
champs possibles des nouvelles indications. Celles-ci sont
répertoriées en fonction de leur orientation vers les domaines de
la prévention ou du traitement, pour des maladies aiguës ou des
poussées aiguës de maladies chroniques.
■ Automédication et Europe
Dans le domaine du médicament la réglementation européenne est un élément moteur majeur des modifications de la
réglementation française. Une directive européenne récente
(2004/27/CE 31.03.04) introduit des modifications dont la
transposition dans le droit national va modifier à coup sûr
certains fonctionnements.
En cas d’innovation thérapeutique ou en cas d’intérêt majeur
pour la santé publique, la procédure d’examen de l’autorisation
du médicament pourra être centralisée au niveau européen. Sera
alors aussi décidée au niveau central par l’EMEA (European
Agency for the Evaluation of Medicinal Products) la noninscription sur liste.
Des recommandations européennes susceptibles de favoriser
cette procédure centralisée ont été rédigées. Elles concernent les
procédures de délistage, les règles de dénomination de ces
spécialités, les conditions d’autorisation des spécialités utilisant
des principes actifs dits d’« usage médical bien établi ».
Concernant le délistage, la directive précitée introduit une
protection des données d’une durée de 1 an à dater de l’octroi
du délistage lorsque la modification de la classification d’un
médicament a été accordée sur la base d’essais précliniques ou
cliniques dits « significatifs ». Cette protection est aussi accordée
en cas de nouvelle indication pour des substances d’usage
médical bien établi.
La création au sein de l’EMEA d’une structure spécialisée dans
la réglementation des spécialités de prescription médicale
facultative est en discussion.
Variation en % par rapport à l’année antérieure
MPT
+ 2.,9
+ 4,1
+ 3,8
HPT
- 2,41
0
- 3,4
- 8,2
+ 1,2
- 5,2
AM
■ Comportement d’automédication
et acteurs
Pourcentage du marché pharmaceutique total
HPT
23
22,1
20,5
AM
6,6
6,4
5,9
MPT : marché pharmaceutique total, HPT : marché de la prescription médicale
facultative remboursée et non remboursée, AM : marché de la part non
remboursée de la PMF (source : AESGP).
Tableau 3.
Principaux domaines d’utilisation des médicaments d’automédication
(prescription médicale facultative non remboursée).
En millions d’euros
prix consommateur
2002
2003
2004
ORL et respiratoire
360
377
350
Antalgiques
176
172
168
Digestif
211
198
194
Dermato
176
172
168
Vitamines et minéraux
133
125
119
Fatigue
67
58
53
Substituts nicotiniques
86
132
119
Autres
346
340
321
Total
1555
1575
1493
Traité de Médecine Akos
Le comportement qui consiste à vouloir se soigner seul est
très ancien. Au XVIIIe siècle Furetière voulait même lui donner
un nom. Il distinguait les situations où on se « médicine »
(automédication) de celles où on se « médique » (sur prescription). Il faut rappeler qu’en 1950 à la naissance de la sécurité
sociale de l’ordre de 50 % de notre pharmacopée n’était pas
inscrite sur liste.
L’objet d’un développement de l’automédication comme
élément normal du soin suscite donc une profonde modification des comportements des nombreux intervenants sur ce
sujet. Le comportement d’automédication correspond pour le
patient (certains dans le cadre de ce comportement l’appellent
le consommateur) à des situations très différentes [10]. Certaines
peuvent être a priori considérées comme dangereuses ou illicites
et doivent être découragées : réutilisation dans l’armoire à
pharmacie de médicaments de prescription médicale obligatoire,
autoprescription de médicaments hors de leurs indications,
délivrance pharmaceutique de médicaments inscrits sur liste,
prescription a posteriori par le médecin traitant aux fins de
remboursement (pratique qui touche près d’un achat sur deux
de médicament non listé).
Nous n’envisageons ici que le comportement dit vertueux où
l’individu a reconnu son symptôme, sait le traiter, connaît les
limites de cette prise en charge personnelle et assume la
3
1-0153 ¶ Automédication
profondément différente. L’erreur était une erreur d’évaluation
initiale. Les remèdes ont été une modification profonde de la
législation pharmaceutique internationale, dont une inscription
sur liste presque systématique pour tous les nouveaux principes
actifs.
Les risques d’un mésusage en automédication existent : usage
en automédication de médicaments listés antérieurement
prescrits, erreurs de conditionnement, abus médicamenteux, de
psychotropes notamment, dopage, usage chez la femme
enceinte [16, 17].
Le risque globalement le plus reproché à l’automédication est
celui de perte de chance. À notre connaissance ce risque n’a
jamais été évalué de manière scientifique. La prescription
médicamenteuse ne garantit nullement dans notre contexte
sanitaire la qualité du dépistage. Les conditions actuelles
d’autorisation de ces médicaments doivent apporter de bonnes
garanties en termes de santé publique ; en particulier les
indications retenues pour un usage en automédication doivent
comporter un risque de perte de chance le plus faible possible.
La délivrance pharmaceutique est une autre sécurité.
Deux risques actuellement sont mal évalués. Le risque de
surdosage est accru par la dénomination de la spécialité : un
patient peut absorber sous des dénominations différentes
plusieurs doses d’un même principe actif. Ce risque est réel,
notamment avec le développement des marques « ombrelle »
(déclinaison d’une gamme de produits ayant le même principe
actif) même si l’agence française veille à ce que cette information soit clairement mentionnée sur les notices et dans les
conditionnements. Le risque d’interaction médicamenteuse
existe également, interaction notamment entre les médicaments
prescrits et non prescrits [18].
responsabilité financière de son achat. Ce comportement est
rare dans la population française, en comparaison notamment
avec les pays voisins du Nord de l’Europe. Deux facteurs
concourent au faible développement de cette pratique. D’une
part le mouvement d’« empowerment » [11, 12] qui soutient dans
les pays anglo-saxons les pratiques de « managed care », de « collaborative care » est beaucoup moins développé en France.
D’autre part, l’absence de remboursement hors prescription
médicale préalable et le coût plus élevé de ces médicaments par
rapport à ceux de prescription constituent à notre avis les freins
majeurs.
Pour le pharmacien [12] , la délivrance d’un ou plusieurs
médicaments de PMF exige une bonne connaissance de la
pharmacie clinique, lui permettant la reconnaissance de la
plainte, la connaissance des signes rendant préférable un avis
médical, une délivrance adaptée et le conseil thérapeutique.
L’enseignement de la pharmacie clinique au cours des études de
pharmacie pourrait être renforcé mais surtout une formation
professionnelle continue dans ce domaine est indispensable. De
plus, l’acte de délivrance idéal est long et exige de la confidentialité. Les conditions matérielles de l’organisation des pharmacies en France ne sont pas toujours adaptées. Un espace de
confidentialité, une meilleure accessibilité et un affichage des
prix de ces médicaments devront accompagner un éventuel
développement de ce marché.
Pour le médecin il existe deux obstacles majeurs à la prescription de ces médicaments. Le premier est la méconnaissance par
le corps médical des médicaments composant cette classe. Fort
peu de ces médicaments sont catalogués dans le Vidal, principal
dictionnaire en France des spécialités pharmaceutiques, les
monographies sont rares [13, 14] , les réseaux de visite des
laboratoires commercialisant ces médicaments sont dirigés
principalement vers le pharmacien. Le second est la demande
par le malade de médicaments remboursés. Un développement
de la pratique d’automédication serait contemporain d’un
changement radical de l’attitude du médecin, orientant son rôle
vers des pratiques d’information, d’éducation thérapeutique,
d’aide à la prévention [15].
“
■ Avenir de l’automédication
Le développement d’un comportement d’automédication
dans la population n’est pas une fin en soi. Il a pour objectif
de développer l’initiative des patients dans des domaines
définis, ce faisant de soulager dans le domaine du soin primaire
le praticien d’un certain nombre de prises en charge et donc de
lui offrir la possibilité de recentrer son action sur la prévention,
l’éducation thérapeutique et la prise en charge de pathologies
lourdes.
Une grande part du conseil thérapeutique sur ces indications
bien définies sera déléguée au pharmacien. La responsabilisation
financière du patient est un gage de bonne observance et
diminuera sans doute le gaspillage.
Les moyens de ce développement seront apportés par le
délistage (ou exonération) de principes actifs médicamenteux
d’efficacité prouvée et pourront être accélérés par des procédures
de déremboursement sur des classes pharmacothérapeutiques.
Les conséquences financières de cette évolution pour le
patient seront peut-être limitées par des prises en charge
partielles ou totales de certains de ces médicaments par des
assurances complémentaires.
Points essentiels
Recommandations aux pharmaciens
Les bonnes questions lors de la délivrance d’un
médicament de PMF :
• Pour qui ce médicament ?
• Quels sont les symptômes ?
• Ça dure depuis quand ?
• Quels autres médicaments prenez-vous (prend-il ou
–elle) ?
Conduite à tenir concernant l’automédication lors
d’une consultation médicale
• Demander au patient s’il prend un (des) médicament(s)
non prescrit(s).
• Se renseigner sur leur composition (boîte, notice,
pharmacien, fabricant).
• Vérifier l’absence de cumul de dose d’un principe actif
avec d’autres médicaments prescrits ou non.
• Apprécier les risques d’interaction médicamenteuse.
.
■ Références
[1]
[2]
[3]
■ Risques de l’automédication
Le terme automédication a en France une connotation
négative. Le drame de la thalidomide commercialisée hors
prescription par les laboratoires Grunenthal en Allemagne est à
notre avis pour beaucoup dans cette image. Rappelons que dans
tous les autres pays où elle était commercialisée avec prescription médicale obligatoire, l’incidence des accidents n’a pas été
4
[4]
[5]
[6]
Bader JP. Réflexions sur le bon usage du médicament. Concours Méd
1995;117(1839-42, 1912-4, 1980-2, 2049-51, 2113-7):1758-60.
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Ministère des Affaires Sociales et de la Solidarité. Avis du 27 mai 2005
aux fabricants concernant les demandes d’autorisation de mise sur le
marché des médicaments de prescription médicale facultative. Bulletin
Officiel n°2005-8. Annonce n°32.
European Commission. A guideline on changing the classification for
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Hanser E. Surveillance des effets indésirables des médicaments non
prescrits. [thèse de doctorat en médecine], UER Pierre et Marie Curie,
2000.
Traité de Médecine Akos
Automédication ¶ 1-0153
[7]
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[8] AESGP. France. In: Economic and legal framework for non prescription medicines. June; 2005. p. 160-79.
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the counter. BMJ 2005;330:39-41.
[10] Laure P. Enquête sur les usagers de l’automédication : de la maladie à la
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and patients. BMJ 1996;312:758-60.
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[18] Honig PK, Gillepsie BK. Drug interactions between prescribed and
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A. Baumelou ([email protected]).
Hôpital Pitié-Salpêtrière, département Biospim (Santé Publique-Biostatistiques-Information Médicale), 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13,
France.
S. Lauraire.
S. Tachot.
AFSSAPS, 143-147, boulevard Anatole-France 93285 Saint-Denis cedex, France.
M. Flachaire.
AFIPA, 8, rue Saint-Saëns 75015 Paris, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Baumelou A., Lauraire S., Tachot S., Flachaire M. Automédication. EMC (Elsevier SAS, Paris), Traité de
Médecine Akos, 1-0153, 2006.
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