La planète
Biodiversité
La biosphère vue de l’espace
(image recomposée par ordinateur).
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La planète Biodiversité
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La biodiversité, des espèces aux écosys-
tèmes, se transforme rapidement, souvent
sous forme de déclin, en réponse à la
croissance des populations humaines.
D’autres variables environnementales se
modifient elles aussi : climat, cycles bio-
géochimiques, notamment de l’azote et du
phosphore ou de l’eau. Le concept « limites
de la biosphère » définit les limites pour
la biodiversité et ces variables environne-
mentales qu’il importe de ne pas franchir,
dans l’intérêt des sociétés humaines. Une
synergie pourrait exister entre ces diffé-
rentes limites. La biodiversité joue un rôle
central dans cette synergie, à la fois par
sa sensibilité à ces différentes menaces
et par les fonctions essentielles qu’elle
assure : régulation des conditions environ-
nementales, disponibilité en eau, fertilité
des sols et productivité des écosystèmes,
donc potentiel agricole et énergétique.
La biodiversité pourrait ainsi être un facteur
limitant majeur des transformations anthro-
piques de la planète. Il importe donc de fi-
nir les propriétés de la biodiversité qu’il
s’agira de préserver, au-delà des enjeux liés
à sa valeur intrinsèque n
DC
DC
PROFESSEUR
ÉLÈVE
Sous la pression de l’homme, la biodiver-
sité est souvent menacée de déclin. Sans
compter les modifications du climat et des
cycles touchant l’azote, le phosphore ou
l’eau. Voilà pourquoi, un concept de « limites
de la biosphère » a été défini et qu’il
importe de ne pas franchir n
Denis Couvet,
professeur au Muséum national d’Histoire naturelle
DOSSIER
DOCSCIENCES
© R. Stockli, A. Nelson, F. Hasler, NASA/GSFC/NOAA/ USGS
La biosphère vue de l’espace
(image recomposée par ordinateur).
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DOSSIER
La planète Biodiversité
Àla lumière des multiples interactions
entre biodiversité et sociétés, la pser-
vation de la biodiversité s’organise
autour de deux thèmes, la préservation de la
diversibiologique et le maintien des struc-
tures et fonctions de la biodiversité ordinaire,
et de quatre possibilités d’intervention :
– dans les relations entre sociétés et bio-
diversité ;
– sur la manière dont la biodiversité est
intégrée au sein des services écosysté-
miques*;
– dans les préférences, priorités des sociétés
pour différents services écosystémiques ;
– dans la construction, légitimité, des insti-
tutions dédiées à la préservation de la bio-
diversité, de la Convention pour la diversité
biologique (CDB) à la Plateforme intergou-
vernementale scientifique et politique sur la
biodiversité et les services écosystémiques
(IPBES), créées toutes deux par les Nations
unies, en 1992 et 2012 respectivement.
PRÉSERVER LA DIVERSI BIOLOGIQUE
Cette politique demande à
identifier les entités les plus
menacées et les menaces corres-
pondantes : transformations
d’habitat, surexploitation,
changement climatique, inva-
sions biologiques, pollutions.
Différentes mesures sont alors
envisagées. La limitation de
l’extension des activités humai-
nes – agriculture, foresterie,
infrastructures humaines – et la restauration
des habitats les plusgras sont la première
préoccupation. Face à la surexploitation, sont
instaurés des quotas d’exploitation, voire
l’interdiction de cette activité, du commerce
d’espèces. Face aux invasions biologiques,
des mesures de contrôle des flux biologiques
sont mises en place.
CONSERVATION IN SITU
Pour les espèces les plus menacées, une
politique majeure a été la création d’espaces
protégés, permettant la conservation in situ,
c’est-à-dire hors captivité. Ces espaces
occupent de l’ordre de 10 % des terres émer-
gées. En Europe, le réseau Natura 2000,
ciblé sur les espèces menacées de cette zone,
couvre environ 15 % de la surface de chaque
État. Afin de concilier protection, exigences
sociales et économiques des populations
locales, des voies de développement origi-
nales, agriculture extensive, sylviculture, tou-
risme, sont proposées dans ces espaces, qui
peuvent ainsi devenir des laboratoires sociaux.
Des corridors entre ces espaces, des « trames
vertes » (terre) et « trames bleues » (eau),
sont mis en place, afin de faciliter le dépla-
cement des espèces menaes. Ils sont néces-
saires dans au moins deux cas de figure :
lorsque le changement climatique déplace la
« niche climatique » de ces espèces vers des
latitudes plus élevées et lorsque les popula-
tions locales sont trop petites pour survivre
isolées ; ce dernier problème concerne au
premier chef les grands prédateurs qui ont
de grandes exigences spatiales. Par exemple,
la population de grizzlis du massif du
Yellowstone, aux États-Unis, réduite à une
centaine d’individus, ne pourra survivre
localement que si des individus de l’espèce
peuvent se déplacer entre cet espace protégé
et d’autres écosystèmes se trouve l’espèce.
CONSERVATION EX SITU
La conservation ex situ, qui correspond aux
jardins, zoos ou encore banques d’embryons
ou de graines, maximise la probabilité de
survie d’une espèce menacée, tout en mini-
misant les conflits socioéconomiques. C’est
une stratégie largement appliquée chez
les plantes et les animaux domestiqués.
Afin de préserver à la fois les espèces
menacées et les structures et fonctions
de la biodiversité ordinaire, différents
types de mesures sont nécessaires :
conservation ex et in situ, innierie
écologique, mesures de type social,
économique et politique.
Lynx ibérique (Lynx pardinus): 150 individus recensés.
Biosphère
Compartiment à la
surface de la planète
comportant les êtres
vivants, leurs productions
(sols, atmosphère…).
Ce compartiment s’est
accru au cours de l’évo-
lution du règne vivant.
Services écosysmiques
Bénéfices que les êtres
humains tirent du
fonctionnement des
écosystèmes.
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Moins de 150 lynx ibériques
sont recensés aujourd’hui
en Espagne et au Portugal.
C’est une espèce inscrite
sur la liste rouge de l’UICN
car elle est menacée à
cause du braconnage, de la
perte de son habitat tradi-
tionnel et la raréfaction des
proies, comme le lapin... n
DC
PROFESSEUR DC
ÉLÈVE
Lynx pardinus ou lynx ibérique est une espèce inscrite sur
la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation
de la nature (UICN). Cette espèce est menacée car elle
comprend aujourd’hui moins de 150 individus partis dans
le Sud-Ouest de l’Espagne, peut-être au Portugal, sous
forme de deux populations distinctes. Les menaces qui pèsent sur elle sont
causées par la perte des habitats qui lui sont favorables – maquis et forêts –,
la raréfaction des proies comme le lapin, et par le braconnage. La sauvegarde
de cette espèce demande donc une restauration de tous ces habitats,
la régulation des populations de proies et la lutte contre la chasse illégale,
mais aussi de nouvelles pratiques d’élevage. Celles-ci doivent être compatibles
avec les modifications profondes des écosystèmes européens, le retour des
grands carnivores, la progression des forêts, et une demande sociale forte de
restauration des fonctionnalités des écosystèmes pour concilier la vie sauvage
et l’activité agricole n
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Lynx ibérique (Lynx pardinus): 150 individus recensés.
© Iberian Lynx Ex-situ Conservation Programme www.lynxexsitu.es
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La pie-grièche, un oiseau commun.
Un inconvénient majeur est de ne pas favo-
riser les adaptations au changement global,
correspondant aux conditions de vie in situ.
En deçà de la taille minimale viable – qui
serait de l’ordre d’un millier d’individus –,
une esce peut être entre dans un vortex
d’extinction – effets généti-
ques et démographiques
conduisant spontanément
une espèce vers l’extinction,
en labsence de menace.
Le renforcement est alors
nécessaire, et peut se faire à
l’aide de croisements avec
des individus issus de taxons
nétiquement compatibles,
comme dans le cas de la panthère de Floride.
La introduction d’espèces est aussi pratiquée,
avec un objectif de restauration d’habitats.
L’ESSENTIELLE
« BIODIVERSITÉ ORDINAIRE »
La biodiversité ordinaire comprend les
espèces non menacées, leurs interactions
écologiques, sous forme de communautés et
d’écosystèmes et les fonctionnalités des
écosystèmes liées à ces entités.
Elle subit de profondes modifications en
réponse au changement global. Les grands
carnivores se raréfient, mais aussi les chauves-
souris, les oiseaux (particulièrement dans les
espaces agricoles), les amphibiens, les
pollinisateurs ou encore les grands arbres.
À l’inverse, la prolifération des grands
herbivores, constatée dans
l’ensemble des pays de
l’OCDE (Europe, États-Unis,
Japon, Australie, etc.) a des
effets majeurs sur la végétation.
Les patrons*sont comparables
en milieu marin, avec le
clin*prentiel des espèces
au sommet des chaînes alimen-
taires et des récifs coral-
liaires – habitat essentiel pour
de nombreuses espèces marines – et la
prolifération de certains niveaux trophiques
inrieurs (duses...). Dans tous les milieux,
les espèces spécialistes d’un habitat
(rencontrées dans un seul type d’habitat,
agricole, forestier, urbain…) sont remplacées
par des espèces généralistes, entraînant une
homogénéisation biotique locale.
Certaines de ces transformations sont mani-
festement des dégradations : diminutions
d’abondance, de diversité biologique de
certains groupes (oiseaux, pollinisateurs…).
D’autres transformations peuvent être
considérées comme des adapta-
tions au changement global.
Certaines de ces adaptations
néanmoins perturbent le fonc-
tionnement des écosystèmes. Ainsi
l’hétérogénéidu déplacement des
aires de distribution vers les
latitudes plus élevées en réponse au
réchauffement climatique altère
le fonctionnement des chaînes
alimentaires.
LES « SERVICES » RENDUS
PAR LA DIVERSI
Les services écosystémiques essentiels, dits
« de support et de régulation », indispen-
sables à la vie humaine, dépendent de cette
biodiversité ordinaire : qualité de l’eau et de
l’air, fertilité des sols, pollinisation, contrôle
biologique (des proliférations animales ou
végétales), prévention des épidémies, régu-
lation du climat local et global… Ces services
sont menacés par les altérations de la
biodiversi, clin d’abondance, de diversi
biologique, changement des propriétés
moyennes… Par conséquent, la préservation
de la biodiversité ordinaire et des services
écosystémiques vont de pair. Les combiner
devrait être un objectif majeur des politiques
environnementales à venir.
RESTAURER ET ADAPTER
L’ingénierie écologique, appliquant les
principes de l’écologie pour améliorer les
fonctionnalités des écosystèmes, tente de
répondre à la demande humaine, tout en
préservant les propriétés essentielles de la
biodiversi ordinaire : abondance et diversité
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DOSSIER
La planète Biodiversité
La biodiversité
ordinaire rend
des services
indispensables
à la vie humaine.
Déclin de
la biodiversi
Baisse de l’abondance
ou de la diversité
biologique.
Patron écologique
Structure écologique
currente (distribution
de la diversité des
espèces, des écosys-
tèmes…) qui dépend
de mécanismes écolo-
giques et évolutifs.
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