La Supplication Svetlana Alexievitch Résumé Voici la structure de l’œuvre : 2020 Les illustrations utilisées dans ce résumé ne représentent PAS la réalité et ont pour objectif d’améliorer la mémorisation Information historique On retrouve ici des précisions chiffrées sur la catastrophe • Déjà, la Biélorussie ne compte aucune centrale nucléaire sur son territoire. Pourtant, c’est le pays le plus touché, bien plus que l’Ukraine et la Russie. En effet, 70 % des radiations sont retombées sur le territoire biélorusse. • Ensuite, les chiffres des victimes sont comparées à la Seconde Guerre Mondiale : o La guerre a tué 1 biélorusse sur 4 o Pour ce qui est de la radiation, 1 biélorusse sur 5 est contaminé • Le nombre de personnes irradiées continue d’augmenter, • Et enfin, le sarcophage construit autour du réacteur a une durée de vie limitée, et présente déjà des faiblesses. 2 Prologue Une voix solitaire On démarre avec un premier témoignage appelé “une voix solitaire”. Il s’agit de l’épouse de l’un des premiers pompiers intervenu sur le réacteur. Le couple vivait dans la ville la plus proche de la centrale. Soumis à des radiations extrêmes lors de son intervention, le pompier tombe immédiatement malade, comme tous ses collègues. Il est alors transféré dans un hôpital spécial à Moscou. Elle décrit l’horrible transformation de son corps. Mais par amour, et malgré sa grossesse, elle s’occupera de lui jusqu’à la fin. Quelques mois après, elle accouche de leur fille qui, gravement touchée par les radiations, meurt à la naissance. Plus tard, elle met au monde un petit garçon, ce qui lui donnera une nouvelle raison de vivre. Ils habitent dans une résidence réservée aux gens qui travaillaient à la centrale. Elle raconte que les résidents meurent les uns après les autres dans l’indifférence générale, car personne ne veut entendre parler de leur mort. Mais pour elle, il ne s’agissait pas de parler de la mort en racontant son expérience. Mais bien de l’amour qu’elle éprouvait pour son mari. 3 Interview de l’auteur par elle-même sur l’histoire manquée Ici, l’auteur nous explique que ce qui l’intéresse, ce sont « les sentiments des individus qui ont touché à l’inconnu ». Elle dit que, ne pouvant le vaincre ni l’expliquer, tout le monde a voulu oublier Tchernobyl. Mais la souffrance existe bel et bien en Biélorussie, et elle veut rappeler que Tchernobyl reste un mystère à élucider. Pour elle, cet événement marque un point de rupture dans l’histoire, à partir duquel « l’ancien monde n’existe plus ». Car le monde de Tchernobyl est incomparable, il dépasse l’entendement humain. Grâce à ses témoins, elle tente donc d’établir une vérité sur ce nouveau monde. Elle souligne enfin avoir eu l’impression de « noter le futur », parce que ses entretiens sonnent comme un avertissement sur ce qui risque d’arriver au monde entier. 4 1. La terre des morts Monologue sur la nécessité du souvenir Explication du titre : Même si le témoin souhaite tout oublier des horreurs de la guerre, son souvenir revient malgré lui. Ce chapitre s’ouvre sur le témoignage d’un psychologue qui se rappelle l’horreur de la Seconde Guerre Mondiale. Ce souvenir agit comme une protection, comme si le plus terrible était derrière lui. Mais après avoir visité Tchernobyl, il se sent de nouveau sans défense… Monologue sur ce dont on peut parler avec les vivants et les morts Explication du titre : Tristesse et solitude font qu’une vieille dame discute avec ses proches décédés comme elle le ferait avec des vivants. Ce monologue est celui d’une vieille dame qui vit seule dans un village de la zone évacuée, car elle n’a pas voulu quitter sa maison. Elle raconte son immense tristesse après avoir vécu le départ et la mort de tout ce qui l’entourait. Elle attend à son tour la mort, avec impatience. Autour d’elle, la nature a repris ses droits. Cela nourrit son incompréhension : comment croire ce qui est dit sur les radiations, puisqu’autour d’elle « tout vit » encore ? Dans sa grande solitude, elle parle aussi bien avec les vivants que les morts. 5 Monologue sur une vie entière écrite sur une porte Explication du titre : Un père considère la porte de sa maison comme un talisman, car des souvenirs familiaux y sont gravés Ce témoignage est celui d’un père de famille qui vivait à Pripiat. Il se décrit comme un « homme de Tchernobyl », une curiosité pour le monde. Il raconte être retourné à Pripiat pour récupérer la porte de sa maison. Car sur cette porte était gravé les différents stades de sa croissance et de celle de ses enfants. Son père y fut allongé avant son enterrement, comme le voulait la coutume locale. Puis il y a allongé sa fille de six ans, déjà consciente de son terrible destin, avant de mourir des effets de la radiation. Monologue d’un village : comment appeler les âmes du paradis pour pleurer et manger avec elles Explication du titre : certains témoins évoquent des rituels de la Toussaint où des repas familiaux sont organisés pour pleurer les morts Sept habitants d’un village irradié prennent la parole à tour de rôle. Trop attachés à leur terre, ils ont décidé d’y revenir après l’évacuation forcée. Ils comparent leur peur à celle vécue lors de la Seconde Guerre Mondiale. Mais en pire car Tchernobyl, c’est « une guerre audessus de toutes les guerres », comme un Jugement dernier. Tantôt, les uns évoquent leur tristesse, ils pleurent les morts. Tantôt, les autres évoquent leur bonheur. Dans cette zone abandonnée, ils se sentent libres. Ils font même de l’humour noir, comme ce grand-père qui dit « chasser les radiations » lorsqu’il tue son veau pour le débiter. 6 Monologue sur la joie d’une poule qui trouve un ver Explication du titre : les vers de terre ne résistant pas aux radiations, une habitante se réjouit de voir sa poule en trouver Il s’agit du monologue d’une habitante de la zone évacuée. Elle parle de la peur de la radioactivité. Elle la compare à Dieu, qui est partout, mais que personne ne voit. Mais comme on ne peut pas combattre Dieu, « il faut vivre ! » nous explique-t-elle. Elle raconte sa joie de voir une poule qui trouve un ver, car les vers ne peuvent survivre si les radiations sont trop fortes. Monologue sur une chanson sans paroles Explication du titre : cette « chanson sans paroles » est le son qu’émet une vieille dame muette lorsqu’elle souffre Ce monologue est l’appel d’une habitante d’un village évacué qui souhaite retrouver sa voisine, une dame âgée et muette qui vivait seule, probablement placée dans un foyer pour personnes malades. Cette habitante ne veut pas qu’elle meurt d’angoisse dans un monde qui lui est étranger. Pour la reconnaître, elle précise : quand elle a mal, elle gémit, comme une chanson. 7 Trois monologues sur une peur très ancienne Explication du titre : cette « peur très ancienne » fait référence à la peur envers l’Homme, capable de massacrer autrui en raison de ses différences Ces trois monologues sont ceux de trois femmes qui ont fui la guerre pour se réfugier à Tchernobyl. La première est russe et, enceinte, a dû fuir le Tadjikistan alors en guerre pour sauver son enfant. En effet, la guerre civile du Tadjikistan, qui s’est déroulée suite à l’effondrement de l’URSS, opposait le camp communiste, donc les populations d’origine russe, aux « islamo-démocrates », d’origine tadjike. Elle s’est ainsi réfugiée en zone contaminée biélorusse, avec sa mère, son mari et son bébé. Le village est vide, les radiations ayant fait fuir la population. Mais elle dit avoir beaucoup moins peur de vivre ici. Car elle n’a pas peur de Dieu, mais de l’homme. Puis sa mère prend la parole. Elle ajoute que Dieu a repris cette terre aux hommes. Elle dit ne pas avoir peur de l’eau ou de la terre contaminée, mais peur de l’homme qui n’éprouve plus de pitié pour les autres. La 3ème femme est une réfugiée de Kirghizie. Pour les mêmes raisons, elle trouva une terre d’asile à Tchernobyl. Les locaux s’étonnent de la voir ici, avec des enfants. Mais elle aussi ignore la peur de la radioactivité. 8 Monologue sur l’homme qui n’est raffiné que dans le mal, mais simple et accessible dans les mots tout bêtes de l’amour Explication du titre : un témoin « illuminé » démontre que l’Homme est complexe quand il fait le mal, mais simple quand il exprime de l’amour Ce monologue est celui d’un homme sans identité, qui survit seul dans la nature de Tchernobyl. Il aime lire et méditer. Il explique qu’il faut subir le monde créé par Dieu avec courage et jusqu’au bout. Il dit également craindre l’homme. Car il « n’est raffiné que dans le mal », autrement dit il est capable de choses très complexes dans un but mortel. Mais il est simple et accessible dans les mots tout bêtes de l’amour, comme dans une prière. Retrouve l’analyse de chaque monologue + des citations à réutiliser dans tes dissertations dans Le Joker www.prepa-up.com/la-force-de-vivre 9 Le chœur des soldats Des soldats, miliciens, liquidateurs, pilotes et dosimétristes prennent la parole à tour de rôle. Certains évoquent le sentiment d’avoir fait quelque chose d’héroïque. Leur sens du devoir prenait le pas sur leur peur. Ils décrivent cette expérience comme l’une des plus intenses de leur vie. L’un d’entre eux dit que seul un système militaire à la russe peut produire de tels héros. D’autres évoquent la folie de la situation : par exemple la délimitation arbitraire de la zone contaminée, ou encore le trafic de matériel contre de l’alcool, qui a fait sortir de Tchernobyl beaucoup d’objets radioactifs. Un pilote d’hélico raconte avoir vu une quantité incroyable de petits soldats qui couraient dans tous les sens sans comprendre ce qu’ils faisaient. Un autre groupe de soldats nous parle plutôt de la mort. Notamment ceux qui devaient tuer tous les animaux errants ou retourner la terre contaminée. L’un d’eux dit qu’il n’a pas peur de la mort, mais de la manière dont il va mourir. Il rappelle que les morts de Tchernobyl restent seuls, car on les enterre à part, sous une couche de plomb et de béton. Enfin, un dernier groupe d’hommes évoque certains ressentiments au retour de mission. Un conducteur exprime sa colère de ne jamais avoir eu le droit de connaître la dose de radiations à laquelle il avait été exposé. Un autre, malade à cause des rayonnements mais tenu au secret de ce qu’il a vu, se fera virer de son usine sans pouvoir se défendre. Un dosimétriste enfin, raconte le râteau qu’il s’est pris par une fille qui ne voulait pas avoir d’enfant avec un « tchernobylien ». 10 2. La couronne de la création Monologue sur de vieilles prophéties Explication du titre : Une mère compare Tchernobyl à une prophétie biblique qui annonce une époque d’abondance pour la Nature dont l’Homme ne profitera pas, car il ne pourra alors plus avoir d’enfants Il s’agit du témoignage d’une mère qui nous parle de sa fille née avec de terribles malformations car elle vivait dans un village touché par la radioactivité. Elle l’ignorait et ne savait donc pas « qu’il ne fallait pas s’y aimer ». Cela lui rappelle une prophétie de la Bible qui dit qu’une époque d’abondance viendra pour la nature, où l’homme ne pourra plus enfanter. Ses sentiments sont tiraillés : elle ressent de la culpabilité d’avoir eu un enfant, à cause notamment de l’Eglise qui lui dit qu’elle a péché. Mais elle aime éperdument sa fille, et a l’envie de crier l’innocence de son amour conjugal. Monologue à propos d’un paysage lunaire Explication du titre : Ce « paysage lunaire » est celui d’une terre de Tchernobyl après le passage des liquidateurs, la terre ayant été retournée et recouverte de sable Dans ce texte, un enseignant s’interroge : vaut-il mieux oublier ou se souvenir ? Lui se souvient d’un paysage lunaire, où la terre contaminée avait été retournée jusqu’à l’horizon. Il se demande encore pourquoi il y a si peu d’écrits sur Tchernobyl. Selon lui, c’est parce que cette horreur invincible dépasse le temps humain. 11 Monologue sur un témoin qui avait mal aux dents et qui a vu Jésus tomber et gémir Explication du titre : Un liquidateur qui souffrait de sa rupture amoureuse pendant Tchernobyl, pensait davantage à son exfemme qu’à la catastrophe. Il réfère son expérience à cette anecdote biblique : un homme a vu Jésus portant sa croix tomber devant sa maison, mais cet homme avait si mal aux dents qu’il ne s’est même pas soucié du malheur de l’enfant de Dieu C’est le monologue d’un liquidateur qui venait de se faire quitter par sa femme au moment de Tchernobyl. A cause de son divorce, il était à côté de la plaque et n’éprouvait même pas de peur. Il raconte que les liquidateurs s’habituaient à vivre dans le danger, car « il est impossible de vivre tout le temps dans la peur ». Il voyait des fous se sacrifier pour hisser un drapeau rouge sur le réacteur, symbole de victoire. Selon lui, ces actes illustrent le culte soviétique pour le combat. Mais il s’interroge « qui vaincre ? L’atome ? La physique ? L’univers ? ». Son souvenir le plus traumatisant, avoir enterré la terre ellemême, et avec elle tout un « petit peuple » d’insectes. 12 Trois monologues sur « la poussière qui marche » et « la terre qui parle » Explication du titre : Un ermite de Tchernobyl compare l’Homme à « la terre qui parle », car l’Homme vient de la terre et cherche à comprendre sa vie, et les animaux à « la poussière qui marche », car les animaux se contentent de vivre Trois chasseurs prennent la parole lors de ce témoignage. Ils ont été réquisitionnés lors de Tchernobyl pour abattre tous les chats et chiens errants, un holocauste qui les a traumatisés. Ils racontent avoir rencontré un type qui appelait les hommes, « la terre qui parle » et les animaux, « la poussière qui marche », en référence à la Bible. Ils racontent aussi comment de nombreux objets et animaux sont sortis illégalement de la zone contaminée pour être revendus. Eux-mêmes se sont habitués à manger le gibier qu’ils y chassaient. Ils avaient besoin de rire, d’un humour potache soviétique. 13 Monologue sur la difficulté de vivre sans Tchekhov ou Tolstoï Explication du titre : Une mère qui trouvait des conseils avisés sur la vie dans ses lectures de Tchekhov et Tolstoï n’y trouve plus rien qui puisse l’aider à comprendre Tchernobyl Une jeune fille prend la parole. Evacuée de Tchernobyl, elle commença à avoir peur d’elle-même quand elle comprit que les gens de l’extérieur l’évitaient. Désormais, elle a peur d’aimer son fiancé, car une ségrégation s’est mise en place entre « tchernobyliens » et les autres, comme pour les hibakuchi de Hiroshima Les hibakuchi sont les survivants de l’explosion d’Hiroshima. Ils ne peuvent se marier qu’entre eux. Pour les tchernobyliens, on dit que c’est « péché d’enfanter ». Alors elle prie, pour son amour, pour avoir le droit d’aimer. Elle raconte aussi que sa mère a toujours trouvé conseils dans les livres (Tchekhov/Tolstoï). Mais aucun ne lui permet de comprendre Tchernobyl. Alors la jeune fille nous dit que c’est aux « tchernobyliens » d’aider à comprendre ce mystère, par leur vie et leur mort. 14 Monologue sur ce que Saint-François prêchait aux oiseaux Explication du titre : Un opérateur de cinéma qui veut témoigner de la condition des animaux à Tchernobyl, s’appuie sur l’image biblique de Saint-François connu pour avoir parlé aux oiseaux comme à ses semblables Ce monologue est celui d’un cadreur qui a filmé des scènes de vie à Tchernobyl pendant l’accident. Il voulait comprendre sa vraie nature et vivre des sensations fortes. Mais au lieu de croiser des héros, dans cette situation incompréhensible, il a vu du chacun pour soi. L’humour était le seul salut. Depuis, il voit l’homme comme un « vendeur d’apocalypse ». Un jour, un enfant qui avait visionné ses images, notamment celle d’une grand-mère qui voulait sauver son chat, lui demanda pourquoi on n’avait pas chercher à sauver les animaux. Depuis, il ne filme que des animaux, comme SaintFrançois qui prêchait aux oiseaux. Monologue sans titre – Un cri… Explication du titre : Ce « cri » de rage est celui d’un soignant s’occupant des victimes de Tchernobyl Il s’agit des paroles d’un assistant médecin qui s’occupe de personnes irradiées. Il est irrité par la curiosité mal placée des gens venant lui poser des questions. Il dit n’avoir aucune réponse à leur donner, car « c’est la 1ère fois qu’un tel événement se produit dans le monde ». 15 Monologue à deux voix pour un homme et une femme Explication du titre : Un couple d’enseignants prend la parole La femme décrit la génération de Tchernobyl, des enfants tristes et fatigués qui se posent déjà trop de questions sur la mort. Là où elle vit, les gens ont faim et manquent d’éducation. Comme les radiations sont invisibles, ils n’y prêtent plus attention. Pour eux, « Tchernobyl est moins grave que de laisser des légumes non récoltés dans les champs ». Elle regrette le monde d’avant, où elle pouvait profiter de la nature comme si elle devait exister pour toujours. Puis, son mari prend la parole. Il dit que c’est une erreur de comparer la guerre à Tchernobyl. A la guerre, la perspective de la mort est immédiate, non dans un avenir quelconque. A la guerre, c’est la famine, alors que les légumes poussent à Tchernobyl. A la guerre, on se cache de l’ennemi, alors qu’on ne peut se cacher de l’atome. Le seul point commun selon lui, c’est qu’on ne peut en parler. S’il ne sait plus comment vivre, il dit que les enfants eux, se sont déjà habitués. Il s’attriste de voir les scientifiques du monde entier les considérer comme des cobayes. Pour lui, la Biélorussie est devenue le « laboratoire du diable ». 16 Monologue sur une chose totalement inconnue qui rampe et se glisse à l’intérieur de soi Explication du titre : L’horreur et l’incompréhension que suscite la catastrophe chez un journaliste lui fait ressentir cette « chose qui se glisse » en lui et détruit ce en quoi il croyait C’est un journaliste qui prend la parole. Il compare la catastrophe à une « chose totalement inconnue » qui « se glisse à l’intérieur » de lui. C’est une réalité qui dépasse la fiction. Pour tenter de la comprendre, il note tout un tas de conversations et d’anecdotes qu’il entend sur le sujet, et qui forment ce qu’il appelle une « mythologie de Tchernobyl ». Par exemple, une rumeur dit que l’explosion du réacteur serait d’origine extraterrestre. 17 Monologue sur le regret du rôle et du sujet Explication du titre : Un « passeur de mémoire » sur l’histoire de Tchernobyl prend son rôle à cœur, mais regrette en même temps que son sujet soit « morbide » Il s’agit d’un témoignage du vice-président de l’association « Le bouclier de Tchernobyl », une association de mémoire qui gère un musée autour de la catastrophe. Il nous parle de son travail au musée et raconte par exemple le courage des 3 600 soldats qui ont nettoyé le toit du réacteur, ratissant le combustible nucléaire sans protection ou presque. Pour lui, leur sens de l’abnégation montre l’héroïsme soviétique. Elevés comme des soldats, ils sont toujours « prêts à faire l’impossible ». Il veut rendre hommage à leur sacrifice, trop souvent enfoui sous le secret d’Etat ou évoqué de manière si banale qu’on pourrait le prendre comme un « conte pour faire peur aux enfants ». Il compare enfin la génération de Tchernobyl à une génération désemparée, vivant dans un monde où « seule la souffrance humaine n’a pas changé ». 18 Le chœur populaire Des souvenirs de femmes, épouses de liquidateurs, médecins, résidentes de Tchernobyl et mères de famille. Beaucoup de ces souvenirs sont liés aux enfants. Des médecins se souviennent de ceux qui jouaient avec insouciance dans le sable contaminé. D’autres racontent avoir accouché d’un mort-né, ou avoir peur d’enfanter. Des mères décrivent leurs enfants à l’hôpital qui, conscients de leur destin, jouaient à faire mourir leur poupée. D’autres femmes évoquent des souvenirs de guerre. Celui de l’évacuation, dans l’incompréhension la plus totale. Ou de la propagande à la télévision, qui affirmait que « la situation » était « sous contrôle ». Dans ce chœur de femmes, certaines choisissent aussi de parler, en bien ou en mal, de l’héroïsme soviétique. Une enseignante notamment retourna la terre contaminée de son école sans protection. Son sens du devoir était plus fort que la peur. Car elle dit que son peuple a appris à vivre dans l’horreur. Une autre critique cet héroïsme patriotique qui, selon elle, ne servait qu’à camoufler le manque d’informations scientifiques. 19 3. Admiration de la tristesse Monologue sur ce que nous ignorons : la mort peut être si belle Explication du titre : L’incendie du réacteur était d’une telle beauté que beaucoup de gens l’ont admiré en s’exposant alors mortellement aux radiations Une évacuée de la ville de Pripiat se souvient des premières heures de la catastrophe. Tous les habitants, scientifiques y compris, observaient à leur balcon la beauté de l’incendie du réacteur, ce qui causera la mort de nombreux d’entre eux. Au départ, pensant pouvoir reprendre rapidement une vie normale, elle raconte ne pas avoir eu peur. Mais évacuée pour toujours et vue comme une pestiférée en dehors de Tchernobyl, elle comprit rapidement qu’elle faisait maintenant partie d’un peuple à part. Avec le temps, elle cherche à se sauver de ce malheur. Alors, elle prie, et rêve de sa vie d’avant. 20 Monologue sur la légèreté de devenir poussière Explication du titre : Un liquidateur amené à travailler sans se poser de questions dans le cadre mortel de Tchernobyl a alors compris qu’il était facile de « devenir poussière » Ce monologue est celui d’un ingénieur chimiste. Il est convoqué peu après la catastrophe pour apporter ses compétences. Il se rend vite compte qu’on l’envoie en fait au charbon, mais le patriotisme l’emporte sur lui. On lui donne une pelle et beaucoup de vodka. Son travail consistait à retourner la terre contaminée, encore et encore. Un travail de fous, dans des conditions mortelles. Pour maintenir le moral, les autorités, dans la grande tradition soviétique, offraient des distinctions comme celle de « meilleur fossoyeur de l’Union Soviétique ». Face à la folie de la situation, il comprit vite combien il était facile de « redevenir poussière ». 21 Monologue sur les symboles d’un grand pays Explication du titre : les symboles de puissance et de justice portés par l’URSS étaient si ancrés dans l’inconscient des soviétiques qu’aucun ne pouvait s’imaginer que le gouvernement puisse prendre de mauvaises décisions lors de la catastrophe Dans ce texte, l’ancien ingénieur en chef de l’Institut de l’énergie nucléaire biélorusse prend la parole. Pendant la catastrophe, son travail consistait à contrôler la radioactivité des denrées alimentaires provenant de Tchernobyl. Selon lui, ce n’était plus des aliments, mais des « déchets radioactifs ». Et pourtant, les gens continuaient de consommer ces produits. Lui et ses collèges s’interrogeaient sur les mesures d’urgence à prendre, mais les instructions étaient claires : « continuez les contrôles et regardez la télé ». Conscient du peu de précaution prise par les autorités, il continuait pourtant à croire aux symboles de puissance et de justice de son pays. Par peur d’être exclu aussi, il n’a lancé aucune alerte. Plus tard, sa foi soviétique s’est effondrée. 22 Monologue sur le fait que, dans la vie, des choses horribles se passent de façon paisible et naturelle Explication du titre : Une scientifique n’a volontairement pas prévenu les populations des risques encourus lors de la catastrophe. Elle regrette donc d’avoir laissé le drame se dérouler « de façon paisible » Ce monologue est celui d’une inspectrice de la préservation de la nature. Au moment de la catastrophe, son travail consistait à prélever des échantillons d’eau de la zone contaminée. Tout était classé confidentiel. Elle voyait sur le terrain que la plupart des consignes n’étaient pas comprises ni respectées. Les échantillons étaient transportés sans protection, les déchets enfouis sur les nappes phréatiques… Les paysans continuaient leur travail comme si de rien n’était. Les scientifiques leur préconisaient des gestes barrière inefficaces pour les rassurer. Tous complices de ces actes infâmes, elle a préféré fermer les yeux. Elle éprouve aujourd’hui la culpabilité d’avoir participé à un crime. C’est comme cela qu’elle se rendit compte que « des choses horribles se passent de façon paisible et naturelle ». 23 Monologue sur le fait qu’un russe a toujours besoin de croire en quelque chose Explication du titre : Un historien prétend que, plutôt que d’apprendre des erreurs du passé, les russes se projettent sans cesse dans de nouvelles croyances pour avancer Un historien prend la parole. Il dit que Tchernobyl est une catastrophe de la mentalité russe. Selon lui, le russe est hostile au progrès, mais convaincu qu’il peut maîtriser la nature, et donc s’en remet toujours au petit bonheur la chance. L’URSS ayant fait un bond technologique trop rapide, lui confier une centrale nucléaire, c’était comme confier un TGV à « deux cochers de diligence ». Mais son pays est trop occupé à survivre encore une fois pour regarder son histoire en face. Selon lui, cela démontre en même temps la grandeur de son peuple, qui veut toujours croire en quelque chose. 24 Monologue sur la physique, dont nous étions tous amoureux Explication du titre : Un scientifique raconte qu’avant Tchernobyl, le bienfait de la physique nucléaire faisait l’unanimité chez les soviétiques Ce témoignage est celui d’un ancien chef de laboratoire nucléaire biélorusse. Le jour de la catastrophe, il est l’un des premiers à comprendre la situation et à prévenir ses proches. Mais malgré ses avertissements, certains insouciants voulaient quand même partir en weekend à côté de Tchernobyl ! Il comprit plus tard pourquoi. A son époque, le nucléaire et la physique sont des sujets qui suscitent un fanatisme presque romantique. On ne pouvait y penser en mal. Cette ère de fascination s’est terminée pour laisser place à l’ère de l’apocalypse. Aujourd’hui atteint d’un cancer, l’ingénieur dit avoir une nouvelle perception de la vie. Il est fasciné par la nature. Pour lui « le principal, c’est la vie et la mort ». 25 Monologue sur ce qui est plus insondable que la Kolyma, Auschwitz et l’holocauste Explication du titre : Une institutrice dit que Tchernobyl est encore plus difficile à expliquer que les camps de concentration (Kolyma est une région connue pour les camps du Goulag en Russie). Il s’agit de l’extrait d’une lettre d’une institutrice qui habitait la zone de Tchernobyl. Elle se souvient, en attendant les consignes des autorités les premiers jours de la catastrophe, d’avoir eu la sensation d’être sans défense. Seulement quelques personnes (politiques, opérateurs de le centrale) avaient le sort de millions de gens entre leur main. Pour cette raison, Tchernobyl lui apparait plus bouleversant que « la Kolyma, Auschwitz et l’holocauste ». Elle s’étonne que les intellectuels ne parlent pas du sujet. 26 Monologue sur la liberté et le rêve d’une mort ordinaire Explication du titre : Un liquidateur raconte que, face au danger, il a éprouvé un extraordinaire sentiment de « liberté ». Le « rêve d’une mort ordinaire » fait référence à l’insouciance de ces liquidateurs qui espéraient ressortir indemnes de leur passage à Tchernobyl Ce témoignage est celui d’un liquidateur. Préparé comme tout son peuple à une future guerre, sa conscience n’était néanmoins pas prête à ça. Les premiers jours, il prenait garde de ne rien toucher de trop radioactif. Puis, l’habitude s’installa et il finit par ne plus faire attention. Comme nombre de ses camarades, il se porta volontaire pour nettoyer le combustible nucléaire du toit de la centrale. Les radiations étaient telles qu’ils ne devaient pas rester plus de 50 secondes. L’humour les sauvait de la peur. Il éprouvait même un sentiment de liberté qu’il décrit comme « grandiose » et « fantastique ». 27 Monologue sur ce qu’il faut ajouter à la vie quotidienne pour la comprendre Explication du titre : Un liquidateur dit que les soviétiques ont besoin d’ajouter des mythes à la réalité pour pouvoir l’expliquer : sur Tchernobyl, lui et ses camarades racontaient par exemple que les extraterrestres leur seraient venus en aide pour essuyer les dégâts Un photographe prend la parole. Il fut appelé à Tchernobyl comme maçon. Les humains avait quitté les lieux pour toujours, et ils faisaient partie des premiers à visiter ces lieux figés pour l’éternité. Il voulait tout mémoriser, d’où sa passion pour la photographie. Ses officiers niaient le danger quand il les interrogeait sur la nature des radiations qu’il subissait. Mais il explique que de toute façon, le soviétique oublie vite ce qui se rapporte à sa propre vie, même quand il « frôle la mort ». Le soir, l’alcool aidant, ils repartaient tous dans de longues discussions sur l’avenir de leur patrie. 28 Monologue sur un petit monstre qu’on aimerait quand même Explication du titre : Les enfants malformés sont si nombreux à Tchernobyl que de futures mamans se font à l’idée qu’elles devront aimer un « petit monstre » Ce monologue est celui d’une habitante de la région de Tchernobyl. Elle explique que sa famille n’a pas fui car partout ailleurs, les gens auraient eu peur d’eux. Selon elle, la génération qui a connu la guerre était heureuse. Car la victoire lui a donné une « formidable énergie vitale ». Alors qu’à Tchernobyl, on a peur de vivre, peur pour ses enfants, et ceux qui ne sont même pas encore nés. Sa propre fille essaye déjà de se faire à l’idée qu’elle aura des enfants gravement malades. Elle éprouve le sentiment d’être condamnée. 29 Monologue sur un soldat muet Explication du titre : Une metteuse en scène se souvient avoir vu un film sur la Seconde Guerre Mondiale où un soldat, muet tout le long, se met à rire dans la scène finale lorsque qu’un nouveau-né urine sur sa mitraillette Une metteuse en scène et enseignante de théâtre prend la parole. Elle se dit incapable de mettre en scène une œuvre sur Tchernobyl ou sur la guerre. Pour elle, cette horreur ne peut être transformée en spectacle. Rescapée des camps de concentration, elle explique qu’il lui « suffisait » alors de survivre, par exemple de manger la neige pour se désaltérer. Mais avec Tchernobyl, les enfants ne peuvent même plus manger la neige la plus blanche qui soit. Pour elle, Tchernobyl a remis en question l’immortalité de notre monde. Mais c’est devenu en même temps le destin éternel de la Biélorussie. Elle nous dit que le propre de son pays, c’est la souffrance et le malheur. 30 Monologue sur l’éternel et le maudit : que faire et qui est coupable ? Explication du titre : Dans la Bible, Dieu « l’éternel » « maudit » l’homme qui n’a confiance qu’en l’homme. A Tchernobyl, l’Homme faisait ainsi trop confiance à son génie scientifique, et il en a été puni. Mais impossible de désigner un coupable, car tous les soviétiques partageaient cette même foi en l’atome Il s’agit du monologue d’un ancien secrétaire du parti soviétique de la région de Tchernobyl. Il a participé à la propagande lors de la catastrophe. Il refuse d’être vu comme un criminel, ayant agi par devoir et étant resté à Tchernobyl avec sa famille. Il s’insurge contre la critique faite aux communistes d’avoir caché la vérité au peuple. Pour lui, ce secret d’Etat était nécessaire, car personne n’a besoin de savoir qu’il va mourir. A son sens, c’est justement cet idéalisme soviétique qui a donné la foi de combattre le réacteur. Monologue d’un défenseur du pouvoir soviétique Explication du titre : Un témoin prend la défense de l’URSS concernant la gestion de la catastrophe Ici, un anonyme prend la parole. Sur la défensive face aux questions que lui pose l’auteur, il dit regretter l’Etat communiste, dont Tchernobyl aurait causé l’effondrement. Il ajoute que les habitants de Tchernobyl souffrent, et regrette qu’aucun coupable ne soit désigné. 31 Monologue sur comment deux anges ont rencontré la petite Olga Explication du titre : Une petite fille raconte que sa sœur Olga, morte du « mal des rayons », a été emmenée au ciel par deux anges Dans ce monologue, une journaliste nous fait part de sa colère. Au début, elle ne croyait pas à la catastrophe, convaincue que les autorités les auraient avertis. Puis, elle s’est déplacée dans la zone et a vu les dosimètres se bloquer au maximum. Certains villages étaient encore habités pour les travaux des champs, sur ordre du parti et avec l’accord criminel des radiologues. Les locaux faisaient donc jouer les enfants dans le sable… Elle dit ne jamais pouvoir pardonner aux responsables, en raison de la mort d’une jolie jeune fille, Olga, dont la sœur dira qu’elle a été emportée par deux anges. 32 Monologue sur le pouvoir démesuré d’un homme sur un autre Explication du titre : Un ancien scientifique dénonce les pressions qui se sont exercées depuis le Kremlin sur les responsables politiques les incitant à ne pas réagir face à la catastrophe. Ce témoignage est celui de l’ancien directeur de l’Institut de l’énergie nucléaire biélorusse. Il exprime sa grande colère à l’égard de l’Etat stalinien. Dès les premières heures de la catastrophe, il tenta de convaincre le 1er secrétaire du parti soviétique biélorusse de faire évacuer la population. Mais il parlait à un mur. Le secret était partout, instauré depuis Moscou. Il fera tout de même de nombreuses analyses sur le territoire qui aurait subi l’équivalent de 350 bombes de Hiroshima. Mais soit la population, désinformée, le prenait pour un fou, soit les autorités fermaient les yeux, par crainte du parti ou par désir de promotion. Menacé à de multiples reprises, ce scientifique a continué de conserver les preuves de ce qu’il appelle « l’histoire d’un crime ». 33 Monologue sur des victimes et des prêtres Explication du titre : Les biélorusses sont en même temps les « victimes » et les « prêtres » de leur souffrance. « Victimes » car ils subissent des catastrophes dont ils ne sont pas responsables, « prêtres » car ils cherchent à expliquer le sens de ces catastrophes dans leur vie La présidente d’un comité de femmes appelé « Enfants de Tchernobyl » prend la parole. Elle raconte d’abord le désordre lors de la catastrophe. La population, entraînée à réagir en cas de guerre atomique, était malgré tout prise au dépourvu face à cette « version high tech de la fin du monde ». Inquiets, les gens se sont réunis plus que jamais pour fêter le Premier Mai, comme un besoin de faire « partie du troupeau ». Elle explique que leur esprit communautaire les faisait se sentir plus forts. Les soviétiques disaient toujours « nous ». Mais après Tchernobyl, ils apprirent à dire « je », avec les mots suivants : « je ne veux pas mourir, j’ai peur ». Elle explique enfin que, l’histoire de la Biélorussie étant jalonnée de malheurs, la souffrance est presque une raison d’être pour son peuple. Tchernobyl aurait donc donné du sens à leur vie. Ils en sont à la fois « les victimes et les prêtres ». 34 Le chœur des enfants Des enfants de 9 à 16 ans sont interrogés. La plupart évoque la maladie et la mort. Plusieurs expliquent que leurs parents sont revenus malades de Tchernobyl. Un enfant lui-même malade, raconte avoir tellement souffert qu’il demanda un jour à sa mère de le tuer. Un autre, ayant vu beaucoup de ses camarades mourir, sait déjà que la mort l’attend lui aussi. Dans ce chœur d’enfants, d’autres parlent de la nature. En effet, l’une est traumatisée d’avoir vu tant d’animaux laissés à l’abandon. Une ado se souvient également d’avoir eu peur pour la forêt qu’on n’avait pas pris soin de laver comme le reste. Un autre a été marqué par le retour des moineaux un an après la catastrophe. Un autre encore se demandait au début si tout allait muter monstrueusement. Et puis, d’autres souvenirs traumatisants sont évoqués par ces enfants : • Celui d’une grand-mère parlant de fin du monde, • Celui d’avoir vu sa maison enterrée, et avec elle, tout un village, • Celui enfin d’un petit frère jouant à Tchernobyl. 35 Conclusion Une autre voix solitaire Le titre « Une autre voix solitaire » fait écho avec le témoignage du prologue « Une voix solitaire » Ici, c’est le dernier témoignage, celui d’une épouse de liquidateur. Elle raconte l’amour fou qu’elle vivait avec son époux. Mais les membres de l’équipe avec qui il avait travaillé à Tchernobyl mouraient les uns après les autres. Il attendait donc son tour et finit lui aussi par tomber malade. Elle décrit alors la terrible dégradation physique de son homme. Il devint si méconnaissable que même les infirmiers ou le personnel de la morgue, pourtant habitués, étaient terrifiés de son état. Aussi, cette mère de famille nous explique que c’est l’amour pour son fils qui l’a sauvé. Et que pendant qu’il regardera le monde avec ses yeux d’enfant, elle chuchotera sa prière pour Tchernobyl, en espérant un jour comprendre le sens de ces souffrances. En guise d’épilogue Tout à la fin, un mini-épilogue montre ironiquement que certains profitent de Tchernobyl pour en faire une attraction touristique. Ce résumé ne suffit pas pour assurer aux épreuves Pour aller plus loin Le Joker Fais décoller tes notes en Français-Philosophie www.prepa-up.com/la-force-de-vivre 36