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1-7 Brucellose et contexte operationnel Calvet (1)

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Épidémiologie
Brucellose et contexte opérationnel.
F. Calveta, M. Heaulmea, R. Michelb, J.-P Demoncheauxc, S. Bouéd, C. Girardete.
a DISS-FFCV, BP 3024 – Dakar, Sénégal.
b Unité d’épidémiologie des maladies infectieuses, Institut Pasteur de Dakar, BP 220 – Dakar, Sénégal.
c Secteur vétérinaire interarmées, 9 route du mas Rillier – 69142 Rillieux La Pape Cedex.
d EAABC, avenue du Maréchal Foch, Quartier Bessières – 49409 Saumur Cedex.
e Secteur vétérinaire interarmées, 1 place Joffre, École militaire – 75007 Paris.
Article reçu le 8 janvier 2009, accepté le 1er septembre 2010.
Résumé
La brucellose est une zoonose devenue très anecdotique en France. Elle persiste cependant de façon plus ou moins
marquée dans les zones où nos troupes sont projetées dans le monde. Elle doit être, de fait, envisagée par le médecin
militaire dans le diagnostic différentiel d’une fièvre non palustre au retour de l’étranger. Les caractéristiques de cette
maladie et sa répartition géographique mondiale sont développées. Le risque d’acquisition pour les militaires français est
ensuite évalué, ainsi que le diagnostic de la brucellose et sa prévention.
Mots-clés : Brucellose. Lait cru. Maladie d’importation. Opérations extérieures. Zoonose.
Abstract
BRUCELLOSIS AND MILITARY OPERATIONS OVERSEAS
Brucellosis zoonosis seems nowadays very anecdotal in France. Yet it persists as more or less pronounced in the areas
where our troops are projected worldwide. So it has to keep being included in the differential diagnosis of a non-malarial
fever by the military physician when personnel return from abroad. The characteristics of this disease and its world
distribution are developed. The brucellosis risk for the French soldiers is evaluated then its diagnosis and prevention are
studied.
Keywords: Brucellosis. Imported disease. Overseas operations. Raw milk. Zoonosis.
Introduction.
Alors que certaines maladies animales à caractère
zoonotique comme l’encéphalopathie spongiforme
bovine ou la peste aviaire ont mobilisé l’attention du
grand public au cours des deux dernières décennies,
certains grands fléaux historiques de l’élevage sont
désormais considérés comme éradiqués dans notre
pays. Depuis les années 1950, les mesures de police
sanitaire mises en œuvre en Europe, axées tout d’abord
sur la vaccination puis sur le dépistage et l’abattage
des cheptels contaminés, ont permis en effet d’améliorer
considérablement l’état sanitaire des élevages
d’animaux de rente, de sorte que la France est reconnue
F. CALVET, vétérinaire principal. M. HEAULME, médecin en chef. R. MICHEL,
médecin en chef, praticien certifié. J.-P. DEMONCHEAUX, vétérinaire principal,
praticien confirmé HA. S. BOUÉ, vétérinaire. C. GIRARDET, vétérinaire principal,
praticien certifié.
Correspondance : F. CALVET, DISS-FFCV, BP 3024 – DAKAR, Sénégal.
E-mail : [email protected]
médecine et armées, 2010, 38, 5, 429-434
officiellement indemne de tuberculose et de brucellose
bovine ainsi que de brucellose ovine (1, 2).
Si la tuberculose demeure une préoccupation de santé
publique majeure, sans relation directe avec le monde
animal, la brucellose est désormais considérée dans notre
pays comme une maladie « du passé ». Elle constitue
cependant une infection commune des cheptels dans de
nombreux pays où les forces françaises sont déployées et
doit, à ce titre, rester présente à l’esprit du médecin
militaire, notamment face à un patient présentant une
fièvre d’origine indéterminée au cours d’une mission de
courte durée ou au retour en métropole.
La brucellose chez l’homme : orientations cliniques.
En France, les praticiens ont été, par le passé,
assez largement confrontés à des cas humains de cette
maladie : on recensait encore en France plus de 800 cas
humains annuels jusque dans les années 1990. Dans
429
le cadre du diagnostic différentiel d’une f ièvre non
palustre, avec la raréfaction des cas de brucellose
autochtone, on peut redouter que cette maladie ne soit
plus évoquée de prime abord.
À partir d’un cas clinique.
En octobre 2008, un militaire, âgé de 38 ans, consulte
auprès du service médical de son unité, en métropole pour
un syndrome grippal apparu brutalement deux jours
auparavant. Le patient décrit une asthénie importante, des
douleurs musculaires, de très fortes céphalées, ainsi que
des pics thermiques pouvant aller jusqu’à 40,2 °C.
Le militaire a rejoint son régiment mi-juin 2008, après
quatre mois de mission de courte durée à Djibouti.
Ces pics sont décrits comme des « crises » fébriles
aiguës, au nombre de quatre à cinq par 24 heures et d’une
durée de deux heures. Elles surviennent essentiellement
la nuit, accompagnées d’une sudation importante
d’odeur forte, de tremblements involontaires et
d’arthralgies lors des mouvements. Les céphalées sont
systématiques à chaque crise. En dehors de ces épisodes,
le patient se sent très fatigué. L’appétit est conservé.
Les premiers examens permettent d’exclure l’hypothèse du paludisme. Des antalgiques sont prescrits
(kétoprofène et paracétamol) : ce traitement ne suffit
cependant pas à soulager le malade lors des oscillations
thermiques algiques. Des examens complémentaires
sont alors effectués. La recherche sérologique d’une
infection par Brucella sp., à l’épreuve à l’antigène
tamponné (EAP ou Test au Rose Bengale), est positive.
Cette recherche est réalisée au quatrième jour de la
maladie, dans un laboratoire médical proche. Une biantibiothérapie est alors prescrite, associant la
doxycycline à raison de 200 mg/j (Granudoxy ®) et la
rifampicine à 900 mg/j (Rifadine 300® : 3 cp/j) durant six
semaines. Les signes cliniques rétrocèdent totalement en
cinq jours. Le malade reste asthénique durant deux
semaines. Il n’a pas présenté de rechute à ce jour.
Au bilan, l’association d’un tableau clinique évocateur,
d’un résultat positif à l’épreuve de l’antigène tamponné et
d’une évolution satisfaisante suite à l’antibiothérapie
constituent un faisceau d’arguments en faveur d’un cas de
brucellose, qu’il aurait fallu confirmer soit par l’isolement
de l’agent soit par une deuxième sérologie positive : par
séroagglutination de Wright en l’occurrence, pratiquée
dans un laboratoire référent à Paris, pour pouvoir
considérer ce cas comme « certain » selon la procédure de
déclaration officielle en vigueur en France (3).
Caractéristiques de la maladie.
La durée d’incubation de la brucellose peut être très
variable, de deux semaines à cinq mois et le tableau
clinique est habituellement polymorphe : c’est la
« maladie aux cents visages ».
Néanmoins quelques symptômes sont régulièrement décrits en phase aiguë, comme une f ièvre
ondulante, sudoro-algique, plutôt nocturne, avec
une odeur caractéristique de sueur (« odeur d’étable »).
À cela s’ajoutent des malaises, une asthénie, ainsi
que des myalgies, des arthralgies, des céphalées, des
430
adénopathies, une hépato-splénomégalie, des signes
digestifs, un amaigrissement rapide et important.
La gravité de la maladie réside surtout dans ses
complications qui surviennent dans environ 10 % des cas.
D’infection aiguë systémique, la brucellose passe à un
stade d’infection focalisée : le plus souvent le foyer est
articulaire et des douleurs d’intensité variable, pouvant
aller de modérées à handicapantes, sont susceptibles
d’apparaître de quelques jours à plusieurs années après
l’épisode aigu. Des complications uro-génitales sont
également possibles à type d’orchite, d’épididymite ou
d’infections ovariennes. Comme chez l’animal, les
brucelles pathogènes sont abortives chez la femme
enceinte. Des atteintes viscérales ont été décrites dans la
littérature : le plus souvent hépatiques, mais également
rénales, ou touchant le système nerveux central, les
poumons, le cœur, etc. La seule prévention contre ce
passage à la chronicité sera la rapidité et la pertinence du
traitement mis en place. Les brucelloses sont rarement à
l’origine de décès (3-11).
Éléments d’évaluation du risque en
opérations extérieures.
Si la brucellose fait partie des maladies « oubliées » en
métropole, elle demeure très largement répandue dans le
monde. L’infection humaine étant directement liée à la
maladie animale, le risque pour les personnels militaires
est lui-même fonction en premier lieu de l’état de santé
des animaux dans la zone considérée.
Situation générale de la brucellose animale
dans le monde.
De nombreuses espèces animales sont des réservoirs de
Brucella, avec une pathogénicité variable pour l’animal
lui-même et surtout pour l’homme selon l’espèce de
Brucella considérée (tab. I). La répartition géographique
de la maladie animale dans le monde est strictement
corrélée à celle des régions d’élevage de caprins, d’ovins
et de bovins. Elle concerne tous les continents, avec une
densité des cas surtout marquée en Afrique, en Asie,
notamment au Proche-Orient, et dans les pays d’Europe
centrale, en particulier la zone des Balkans (fig. 1).
Tableau I. Réservoirs des espèces de Brucella et pathogénicité pour l’homme.
Espèce
Réservoir
Pathogénicité
pour l’homme
Brucella melitensis
Caprins (chèvre), ovins
(mouton), camélidés
Très forte
B.abortus
Bovins (bœuf, buffle),
camélidés
Forte à très forte
Forte à faible
B.suis
Porc, lièvre…
B.canis
Chien
Faible
B.ovis
Ovins
Non pathogène
B.neotomae
Rongeurs
Non pathogène
Baleines, dauphins,
phoques, morses
Forte pour certaines
espèces, inconnue
pour d’autres
B.pinnipediae
B.cetaceae
f. calvet
Figure 1. Répartition géographique de la brucellose animale (année 2009). Source : OIE.
L’incidence et la prévalence de la brucellose varient
d’un pays à l’autre. Schématiquement on peut distinguer
deux types de pays :
– les pays développés qui, à l’image de la France, voient
la maladie devenir de plus en plus rare grâce à une sévère
politique de dépistage au sein des troupeaux et
d’éradication par la vaccination ou l’abattage ;
– les pays en voie de développement, qui ne disposent
pas des moyens pour mettre en place une politique de lutte
massive contre la maladie et dans lesquels la brucellose
reste endémique. Ainsi, en 2002, l’intervalle estimé de la
prévalence de la brucellose parmi les troupeaux de zébus
du bassin laitier d’Abéché (Tchad Oriental) était de 9,5 %
à 30,5 % des bêtes. Parmi les éleveurs 2,6 % étaient
séropositifs pour la brucellose (2, 12). Le même constat
peut être établi dans les pays où un conflit a dégradé l’état
sanitaire des cheptels du fait d’une désorganisation du
suivi des troupeaux. Ainsi, la Croatie, pays où la détection
de la maladie animale et les moyens d’éradication sont
remis en place depuis plusieurs années, a identifié 542
ovins et 15 caprins séropositifs, signant un antécédent
d’infection par Brucella melitensis en 2009.
En élevage d’animaux de rente, la maladie est
essentiellement abortive et cause des pertes économiques importantes en cas d’enzootie, en plus des
abattages (13-15).
Situation de la brucellose chez l’homme sur
les principaux théâtres opérationnels.
En 2009, le nombre de nouveaux cas humains déclarés
de brucellose dans le monde (2, 16, 17) est de l’ordre de
500 000. La brucellose est une zoonose à déclaration
obligatoire en France, et dans tous les pays où sont
déployés des personnels militaires français. Cependant,
même dans l’Hexagone où la procédure de déclaration
brucellose et contexte opérationnel
est connue du personnel médical, il faut considérer qu’il
existe encore une importante sous-déclaration. A fortiori,
dans les zones de conflit, les informations zoo-sanitaires
circulent mal, les moyens de diagnostic sont insuffisants
et la priorité n’est plus au recensement des cas cliniques.
Les chiffres évoqués ici ne doivent donc être considérés
que comme des valeurs à minima.
En Afghanistan :
En 2008, la brucellose était la première zoonose
recensée en Afghanistan, avec 746 cas déclarés
(tableau II). En 2009, la brucellose a été cliniquement
diagnostiquée et déclarée chez 823 patients, occupant
la troisième place dans la liste des zoonoses les plus
souvent rencontrées, derrière la leishmaniose et la
tuberculose à Mycobacterium bovis (2).
Au Liban :
Ce sont 157 cas humains qui ont été déclarés au
Liban en 2008. La brucellose était classée première
cause de zoonose cette année là. Aucun cas n’a été
enregistré en 2009 (2).
Tableau II. Zoonoses les plus fréquemment déclarées en Afghanistan en 2008.
Maladie
Cas Décès
Taux pour 100 000
Rang
individus
Brucellose
746
0
2.4 926
1
Leptospirose
210
0
0.7 017
2
Toxoplasmose
200
0
0.6 682
3
Tuberculose bovine
188
0
0.6 282
4
Salmonellose
160
0
0.5 346
5
Escherichia coli O157 110
0
0.3 675
6
Fièvre charbonneuse
0
0.0134
7
4
431
Au Tchad :
L’incidence de la zoonose parmi la population n’est
pas connue de manière chiffrée. La brucellose est
cependant bien présente sur le territoire, où elle
sévit notamment comme maladie professionnelle dans
le milieu des éleveurs.
Dans les Balkans :
La brucellose zoonose a touché 1 014 personnes en
Bosnie-Herzégovine en 2008 et 458 en 2009 (cas
off iciellement déclarés). Peu d’informations sont
fournies par les autres pays balkaniques.
À Djibouti :
Depuis 2005, la république Djiboutienne déclare une
vingtaine de cas annuellement, et répertorie la brucellose
humaine (avec 15 autres pays du Proche-Orient) parmi les
maladies d’origine alimentaires présentes sur son
territoire. On estime à 6,5 % la prévalence sérologique de
la maladie dans les troupeaux (18, 19).
Les autres zones de projection des forces françaises,
pour lesquelles des données chiffrées récentes n’ont pu
être obtenues, ne sont pour autant pas déclarées indemnes
de brucellose (Sénégal, Côte d’Ivoire…) (2, 20).
Facteurs de risque pour les personnels
militaires.
La transmission de la brucellose à l’homme est
observée principalement à la suite de la consommation
d’aliments contaminés et, plus rarement, à la suite d’un
contact direct avec un animal. Brucella melitensis est
isolée dans 80 % des cas tous continents confondus. Les
20 % restants sont le fait de B. abortus, B. suis ou B. canis.
Les femelles des espèces laitières, vaches, zébus,
chèvres, brebis, excrètent les brucelles dans leur lait.
La consommation de lait cru non pasteurisé, de fromage,
ou de crème représente le mode de contamination
principal de l’homme. L’affinage de certains fromages, qui s’accompagne d’une acidif ication et d’une
déshydratation, peut dans certaines circonstances
être défavorable à la survie des brucelles, de sorte que
les fromages frais sont à considérer comme les
plus dangereux. La contamination des muscles est
exceptionnelle, en revanche les abats consommés
peu cuits peuvent héberger des brucelles. De faibles
niveaux de contamination des aliments sont suffisants :
la dose minimale infectante chez l’homme est estimée
entre 10 et 100 brucelles (fig. 2).
La population militaire est exposée à ce mode de
contamination en raison de diverses pratiques à
risque. D’une manière générale, tout achat de
denrées alimentaires, et principalement de produits
laitiers, sur le marché local favorise l’exposition à des
agents de zoonoses, dont les brucelles. Or, le militaire
français est connu pour apprécier le recours à la
restauration locale, pratique d’autant plus fréquente
que la situation opérationnelle est calme. Par ailleurs,
sur certains théâtres, il est d’usage d’approvisionner
certaines denrées auprès de fournisseurs locaux,
sans toujours prendre les précautions minimales
pour s’assurer au préalable de la qualité sanitaire
des produits ainsi réalisés. Enf in, dans certaines
circonstances opérationnelles, les troupes sont placées
432
Figure 2. Le mode de contamination le plus fréquent de l’homme par des
brucelles est alimentaire.
en situation d’autonomie alimentaire, ce qui implique
un approvisionnement en denrées locales.
En ce qui concerne le second mode majeur de
transmission de la brucellose à l’homme qui est le contact
direct avec un animal infecté, il n’est important que pour
des professions à risque comme les éleveurs d’animaux
ou les vétérinaires exerçant en pratique rurale. La
manipulation, sans précautions, de carcasses d’animaux
morts peut aussi être à l’origine de contaminations
humaines (fig. 3).
Figure 3. La transmission de la brucellose chez les militaires par contact direct
est peu probable mais possible.
f. calvet
Approche médicale et préventive de
la brucellose en contexte militaire.
Diagnostic.
Lorsqu’une fièvre survient chez un militaire quelques
semaines à quelques mois après une mission hors de
France, la brucellose doit faire partie des hypothèses
diagnostiques secondaires. Comme le montre le
tableau III, les cas recensés actuellement en France
correspondent en règle générale à des cas importés, de
sorte que les antécédents de mission à l’étranger sont
essentiels à évoquer. De même une enquête sur les
habitudes alimentaires du patient peut fournir des
éléments d’orientation.
Si le diagnostic sérologique est le plus fréquent, seul
le diagnostic bactériologique par culture et isolement
de la souche apportera la certitude.
La sensibilité du diagnostic par hémoculture est
estimée à 80 % en phase aiguë, contre 10 % lors de la
phase chronique. La plupart des tissus biologiques
permettent d’isoler la bactérie en culture (sang, liquide
synovial, liquide céphalo-rachidien…) exception faite
des annexes fœtales, l’avortement étant dû à une
inflammation du placenta et non pas au passage de l’agent
bactérien de la mère au fœtus. Mais cette méthode de
diagnostic est lente (minimum 30 jours), d’où le recours
indispensable, bien que moins sensible et moins
spécifique, au diagnostic sérologique.
Tableau III. Distribution géographique de l’origine des cas de brucellose
déclarés en France entre juin 2002 et juin 2004.
Pays de
contamination
Nombre de
cas total
(%)
N = 72
Nombre de
Nombre de
cas certains cas probables
(%)
(%)
N = 50
N = 22
Ce dernier regroupe plusieurs méthodes (tab. IV). La
méthode par séroagglutination de Wright est de loin la plus
répandue. Aucune des techniques sérologiques disponibles
n’est en fait totalement satisfaisante en raison de
l’existence, en plus de sensibilités variables, de réactions
faussement positives : la bactérie la plus fréquemment
responsable de ces réactions croisées est, comme chez
l’animal, Yersinia enterocolitica. On retrouve également
des faux positifs avec Francisella tularensis, E. coli, et
Salmonella sp. Chez l’homme les affections autoimmunes (lupus, polyarthrites rhumatoïdes) sont
également à l’origine de résultats sérologiques erronés.
Par ailleurs, le titre sérologique n’est pas prédictif de
l’évolution clinique, les anticorps persistant en général
plusieurs mois après l’épisode aigu y compris en cas
d’administration d’un traitement efficace (21).
Le diagnostic peut également être réalisé par
amplification génique (polymerase chain reaction PCR), méthode plus spécifique que les sérologies, mais
moins sensible que l’isolement lui-même.
Traitement.
Les nombreux traitements classiquement conseillés
lors d’une brucellose zoonose ne sont pas tous identiques
dans leur efficacité et leur action contre d’éventuelles
rechutes ou passage à la chronicité. L’antibiothérapie
avec une seule molécule ne doit pas être retenue, au
contraire de la bithérapie voire de la trithérapie.
L’association qui semble statistiquement éviter le plus
une nouvelle crise brucellique au patient reste le protocole
doxycycline et streptomycine, devant l’association
doxycycline et rifampicine. Six semaines de traitement
minimum sont préconisées pour participer également à
la baisse significative du taux de rechutes (22).
Aucun vaccin humain contre la brucellose n’est
actuellement disponible en Europe (2, 23).
France
14 (19 %)
5 (10 %)
9 (41 %)
Portugal
14 (19 %)
14 (28 %)
0 (0 %)
Information et prévention.
Algérie
Turquie
Egypte
7 (10 %)
7 (14 %)
0 (0 %)
6 (8 %)
6 (12 %)
0 (0 %)
2 (3 %)
2 (4 %)
0 (0 %)
Espagne
2 (3 %)
2 (4 %)
0 (0 %)
Italie
2 (3 %)
2 (4 %)
0 (0 %)
À l’échelon collectif, les armées mettent en œuvre des
moyens et une organisation de la logistique de la
restauration qui permettent généralement d’assurer un
bon niveau de sécurité vis-à-vis de la brucellose, comme
des autres maladies d’origine alimentaire. Il est par contre
beaucoup plus difficile de lutter contre les comportements
à risque, comme le recours à la restauration locale ou
l’organisation de points de restauration officieux.
Les séances d’information préalables à la projection
des militaires sur un théâtre hostile ou lors de mutation en
famille à l’étranger, comprennent systématiquement une
mise en garde contre les zoonoses, en particulier sur les
risques liés à l’alimentation. Dans ce cadre, il importe
d’insister sur les mesures essentielles de prévention de la
brucellose à l’échelon individuel. La consommation de
lait cru et de produits à base de lait cru devrait être
proscrite ou, si elle est souhaitée malgré les conseils du
service de santé, seulement réalisée avec des laits portés à
ébullition, sous réserve de respecter un protocole adapté :
le couple temps-température sera de 72 °C durant 20
secondes au minimum. Aucun fromage au lait cru n’ayant
subi de protocole d’assainissement ne peut être considéré
comme acceptable au plan sanitaire. La consommation de
Tunisie
2 (3 %)
2 (4 %)
0 (0 %)
Djibouti
1 (1,5 %)
1 (2 %)
0 (0 %)
Guinée Conakry
1 (1,5 %)
1 (2 %)
0 (0 %)
Inde
1 (1,5 %)
1 (2 %)
0 (0 %)
Irak
1 (1,5 %)
1 (2 %)
0 (0 %)
Italie/Israël
1 (1,5 %)
1 (2 %)
0 (0 %)
Liban
1 (1,5 %)
0 (0 %)
0 (0 %)
Malte
Mauritanie/
Sénégal
Ouganda
1 (1,5 %)
1 (2 %)
1 (5 %)
1 (1,5 %)
1 (2 %)
0 (0 %)
1 (1,5 %)
0 (0 %)
1 (5 %)
Tanzanie
1 (1,5 %)
1 (2 %)
0 (0 %)
Zambie
1 (1,5 %)
0 (0 %)
1 (5 %)
Indéterminé
12 (17 %)
2 (4 %)
10 (45 %)
brucellose et contexte opérationnel
433
Tableau IV. Comparatif des différentes méthodes de diagnostic sérologique de la brucellose.
Méthode sérologique
Période
e
Séroagglutination de Wright
e
Réaction dès le 12 -15 jour de la
maladie, puis décroit en 4 à 8 mois
e
Réaction ou épreuve à l’antigène Réaction seulement au bout du 3 mois
de la maladie. Mais positive plus
tamponné (EAT)
longtemps que Wright (environ 12 mois)
Avantages
Inconvénients
Méthode de référence pour l’OMS
Sensible
Peu spécifique : faux positifs
(nombreuses réactions croisées)
Rapide, sensible et spécifique
Lente
Faux positifs
Seuil de positivité un peu élevé
(deux fois le seuil de Wright)
Technique d’immunofluorescence
indirecte
Plus précoce que Wright et reste
positive environ 18 mois
Sensibilité excellente
Intradermoréaction à la mélitine
(hypersensibilité retardée)
Réaction 3 à 4 semaines après le début
de la maladie
Une fois le test réalisé lecture
48 heures après
viandes ou d’abats peut être assez largement sécurisée
par le recours à une cuisson à cœur, même si cela va
parfois à l’encontre des traditions culinaires et des
attentes des consommateurs.
Enfin, il importe de formuler une interdiction générale de
manipulation des cadavres d’animaux, mesure essentielle
dans le cadre de la prévention des zoonoses en général.
Conclusion.
La brucellose zoonose est actuellement, en France,
une maladie d’importation qui demeure très rare. Pour
discrète qu’elle soit dans l’Hexagone, cette maladie
demeure d’actualité dans de nombreuses régions du
monde où les forces françaises sont déployées. Il importe
donc de se montrer attentif et d’inclure la brucellose dans
les approches de diagnostic différentiel face à toute fièvre
non palustre chez un militaire en mission à l’étranger ou
de retour en France.
La prévention de la brucellose chez l’homme est
aisée et implique essentiellement, comme pour une
majorité d’agents zoonotiques, des pratiques alimentaires raisonnées, avec une consommation de produits
laitiers pasteurisés et de viandes cuites à cœur.
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f. calvet
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