Telechargé par Willinton Lopez Vega

TRAVAIL RAE willi

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Quelles transformations du travail social la notion de « singularisation »
permet - elle d’éclairer et de comprendre ?
Durant les dernières décennies, s’est présentée une transformation dans la façon de
penser, voir, constater et traiter la pauvreté en tant qu’acteurs.
Cette transformation a été motivée, à partir de celles de la société et des politiques
sociales mises en oeuvre.
Aujourd’hui le travail social est plus vulnérable à cause du changement radical de ce
modèle en s’éloignant de sa genèse historique et rentrant dans un course folle òu
l’identité et les pratiques de l’action sociale se voient forcer de s’adapter. Elles
constatent avec impuissance ce changement aussi pour les usagers, de plus en plus
nombreux, différents entre eux et sans une grille type pour les identifier.
L’effort de ce travail va chercher à répondre comment le processus de
singularisation va servir d’éclairage sur le chemin de la transformation du travail
social.
« Quand les êtres sociaux sont de moins en moins définis par leurs inscriptions
héritées, quand s’effacent les définitions des places sociales par les rôles, les statuts
ou les identités collectives, quand se diluent les cadres sociaux (conventions
collectives, prestations automatiques, mécanismes redistributeurs, etc..) de l’état
social, quand les identités d’appartenance cèdent le pas à des identités de
construction, la question de la reconnaissance vient vite sur le devant de la
scène… c’es sous la forme spécifique de l’« estime de soi » que cette question se
trouve socialement posée à travers le symptôme aujourd’hui envahissant de la
souffrance (qu’elle soit social ou psychique)… Ce qui vient d’ailleurs au cœur du
débat est alors moins la relation d’aide que l’aide à la relation. Et donc celle de la
nature et de la qualité des attachements qui font l’existence sociale » (ION, J. « Le
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travail social au singulier ». Avant propos à la seconde édition, P. XVI. Dunod, Paris,
2006.
Dans ce contexte une question nait pour nous ouvrir un champ de réflexion :
- Est- que le travail social connu depuis la naissance, arrive jusqu’ à la fin de la vie ?
1. La chute des formes historiques du travail social sur autrui.
1.1. La fin de la société en dette vers le citoyen.
Fini l’idéal de la société qui en vertu d’une dette, reconduit durablement les oubliés
de la croissance, dans le système des bataillons des salariés. L’affaiblissement du
collectif actif que maintenait le système des assurances sociales (il n y a plus tout le
collectif producteur de biens matériels qui soutenait les plus faibles de l’échelle
sociale comme il l’était dans les années 60)
Le système change complètement, l’individu qui avant pouvait prétendre que la
société lui devait beaucoup voir tout, devient un individu qui a une dette envers la
société. Il doit contribuer à la vie de cette société qui lui demande de produire et
cotiser pour après avoir le droit de demander une rétribution, ainsi on passe à une
dynamique d’échanges « donnant – donnant. »
Dans le système de cette société, il y avait les pauvres facilement classifiés – les
pauvres de toujours- (les veuves, les orphelins, les handicapés) vers lesquelles la
société sans aucun doute (et parce qu’elle pouvait se le permettre, les ressources
étaient saines) acceptait d’ assumer une dette et une responsabilité laissée de côté
du système de production. Maintenant cette acceptation de responsabilité devient
trop risquée et les ressources nécessaires ne sont plus les mêmes.
- La société veut se prémunir de toutes les éventualités de risques, la solidarité n’a
plus une rétribution et un droit acquis mais dépend des capacités d’ aides
disponibles.
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- Les droits deviennent sous contrat : Il n’y a pas des droits attribués d’une façon
automatique pour tout le monde et sans une connaissance directe de l’individu. Cela
passe par un système d’acquisitions des devoirs de l’individu envers la collectivité et
pas à l’inverse. Pour rentrer dans cette collectivité, l’individu devra démontrer des
capacités et des projets de vie clairs.
Plus la personne sera capable de travailler sous contrat plus il pourra prétendre à
des droits, à des biens et à la sécurité (Matrice salariale). L’individu devient
responsable en premier et ultime lieu de son succès ou de son échec.
« …En effet, les réussites comme les échecs seraient directement imputables à une
compétence personnelle et à une force de volonté qu'il suffirait de déployer pour
parvenir à réussir, même si le contexte est particulièrement défavorable ».
EHRENBERG, Alain « L'individu incertain », Hachette Pluriel Référence, 1996. P.
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Comme par exemple : Dans les années 80, la France a implanté une allocation
appelée RMI (Revenu Minimal d’Insertion). Elle était financée par l’état et donnait la
possibilité aux personnes sans ressource ou ressources inférieures à un plafond fixé
par décret de vivre mieux. Cette allocation exigeait un engagement et la
manifestation express de la part de l’individu à laquelle l’allocation était
attribuée. Autrement dit, l’ allocataire devait manifester son désir d’adhésion et d’
insertion dans la société.
L’autonomie s’instaure comme une norme nécessaire, et comme un processus avec
deux connotations : une norme positive, qui était émancipatrice, l’individu qui
acquière une indépendance économique et quitte le nid familiale et une norme
négative, comme l’ imposition d’ un système dans lequel l’individu doit être capable
de trouver sa place dans la société. (EHRENBERG, Alain « L'individu incertain »,
Hachette Pluriel Référence, 1996).
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1.2. La mutation de l’état providence (appelé aussi –l’état social) et l’action
sociale développée par les travailleurs sociaux.
« Le système de protection sociale tel qu’il s’est développé partout en Europe au sortir
de la guerre assurait les individus contre la maladie, fournissait un régime de retraite
ou encore une assistance aux personnes sans ressources.
Il a connu au fil des décennies plusieurs crises successives qui ont touché tous les
pays européens, conduisant à une refonte de l’État providence traditionnel : crise de
financement tout d’abord, à la suite des coûts croissants de la santé, du chômage et
du vieillissement ; crise d’efficacité ensuite, liée à l’incapacité de l’État de résoudre
des problèmes de précarité et d’exclusion ; crise de légitimité enfin, puisque la
finalité et la gouvernance de l’État providence sont devenues confuses ».
P. Rosanvallon, La Crise de l’État providence, Paris, Seuil, 1981.
Il y a un lien entre la mutation de l’état providence (omniprésent au travers de sa
gouvernance dans tous les aspects de la société) et les transformations du travail
social.
Pendant les « trente glorieuses », qui sont les 30 années de croissance depuis la
IIème guerre mondiale, le travail social se présentait comme un système
d’intégration qui aidait les personnes qui avaient ratés le train de la croissance. Dans
ces années- là, c’était la pratique de rattrapage que les travailleurs sociaux avaient
mis en place : intégrer ces individus dans les groupes stables, collectivité, famille,
travail, vie de voisinage dans le quartier. Le sentiment d’appartenance était une
manifestation d’intégration dans la société dite stable et en pleine croissance.
Avec la crise de l’état providence, quand le retour de la grande pauvreté liée à la
crise financière, ce modèle commence à être en échec. L’état perd sa légitimité et le
modèle d’intégration proposé par le travail social commence à ne plus avoir de
validité face au besoin massif d’intégration de plus en plus de personnes touchées
par la précarité. L’idée de décollectiviser commence à s’installer, parce qu il n’ y a
plus de systèmes collectifs qui arrivent à protéger l’individu de la grande crise
financière ainsi que pour lutter pour ses droits (le syndicat ne peut défendre les
droits des travailleurs). L’individu est livré à lui-même.
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Le tourbillon des transformations, la concurrence, la compétitivité, le besoin
d’adaptation et la perte de crédibilité des collectivités empêchent les individus de se
rassembler pour défendre leurs droits. Les licenciements sont plus récurrents, les
gens deviennent très précaires, L’état providence ne peut pas garantir les
protections sociales et pourtant l’action des travailleurs sociaux se voit très touchée,
face à un marché qui fait la loi.
Face à la grande masse des personnes précarisées, le travail social doit gérer l’état
d’ urgence sous le contrôle direct des élus, la grande vague des « surnuméraires »,
nommés « inutiles au monde » de cette société submergée dans une dynamique de
plus en plus inégalitaire (CASTEL, Robert : « Les Métamorphoses de la question
sociale. Une chronique du salariat », Fayard, 1995).
Le public précaire du travail social change et il est lié à cette crise de l’état, de la
société et de tout le modèle social. L’instabilité s’installe et les groupes qui se
disaient intégrés tombent dans un nouveau type de pauvreté. La pratique du travail
social est confrontée de plus en plus à la précarisation des individus ( apparaissent
alors sur la toile les chômeurs en fin de droit, les chômeurs de longue durée… mis
en échec par le nouveau système).
« … à cet égard… trois caractéristiques s’avèrent essentielles dans le processus de
redéfinition des pratiques : la fin de la durée comme horizon du travail ; la
transformation des publics avec pour corrélat leur caractère de plus en plus
indéterminable… » ION, J. « Le travail social au singulier ». Avant- propos à la
seconde édition, P. 7. Dunod, Paris, 2006.
Ces transformations obligent le travail social à s’adapter, nouveaux problèmes
nouvelles façons d’agir. Les politiques territorialisées, sont la réponse à la nouvelle
mutation sociale, « un processus de recomposition et de redéfinition des frontières
des politiques sectorielles et catégorielles. Elle privilégie dès lors l’individualisation
du traitement par la singularité des situations et des territoires ». Hamzaoui, M.,
Artois, P. & Mélon, L. (2013). « La territorialisation du social à l’épreuve des
associations parapubliques ». Nouvelles pratiques sociales, 26(1), 149–164.
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L’insertion imprégnée du transitoire et dans un cadre de condition durable, qui
donnait aux individus peut-être un soulagement dans leur situation, mais qui était
loin d’être une sortie possiblde leur condition.
« La notion de territoire implique précisément que l’espace retenu présente
des caractéristiques sociologiques qui soient constitutives de son unité. Cette
définition est donc présentée comme fondatrice d’un découpage plus pertinent que
ceux habituellement en vigueur, supposés inadéquats au traitement du problème
considéré. En ce sens, ces territoires sont aussi des espaces d’action créés pour
des interventions spécifiques ». Ion, J. (1990). « Le travail social à l’épreuve du
territoire », Toulouse, Privat. P. 40
Mais cette vision territoriale donne pouvoir à des élus locaux de décider comme de
traiter les politiques locales, et ce sont eux qui ont la décision à qui peuvent
bénéficier de ces politiques. Une vision managériale du social local qui considère les
problèmes sociaux comme des problèmes spatiaux. Même si des fois les facteurs
d’exclusion et d’ inégalités ont des causes spatiales, les problématiques de chômage
de masse et la précarisation, sont aujourd’hui un problème qui va plus loin que des
frontières territoriales.
Dans cette nouvelle transformation, l’état est devenu le parfait absent, dans ce
nouveau panorama, le retrait de l’état, est le signe de sa nouvelle politique. Avant
omniprésent dans tous les aspects de la vie sociale des citoyens, maintenant il
laisse de côté ce rôle maître qui faisait possible l’intégration de tous ses membres.
Il n’y a pas de droits égaux pour tous au nom d’une mission vocationnelle et
universelle. Maintenant il n’y a pas une assignation automatique et anonyme des
droits, la norme c’est la participation active des sujets et leur singularisation
singularité ?
1.3. Le travail sur autrui et les valeurs universelles du Programme
Institutionnel
Ces deux éléments sont très présents dans l’action du travail social.
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Le travail sur autrui est l’élément unificateur de toutes les professions du social, un
travail qui cherche la transformation de l’individu pour lui permettre de se configurer
à la société et à ses normes.
Le programme institutionnel est un travail validé par la croyance de ses valeurs
universelles (les mêmes pour tous et partout), Dubet utilise l’expression « d’origines
sacrées », pour désigner la noble source du programme institutionnel. Il désigne le
mode de sociabilité à un type de relation sur autrui qui met en médiation les valeurs
universelles et l’individu particulier. La vocation reste centrale, qui sera validée par
les valeurs, une façon d’être intégré socialement et d’avoir fait siennes les normes.
Les normes rendent libre l’individu qui fait partie des salariés et qui choisit librement
de suivre les normes (p. 33).
Le travail social a suivi le même schéma du programme institutionnel, vu comme une
vocation qui cherche à soutenir l’individu, alors même que les valeurs et principes
universels sont incarnés dans la vocation du travail social (profession) et font partie
de la transmission des valeurs qui oriente vers la socialisation de l’individu/sujet.
1.4. Le déclin du programme institutionnel et du travail social
"La longue critique des institutions a fini par imposer l'image de simples machines à
conformer et à discipliner, à détruire toute individualité. Pour toute une génération,
celle de 68, le mot institution a évoqué l'asile décrit par Goffman et la machinerie du
système panoptique de la prison des lumières exhumée par Foucault". L'école est
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une caserne et la prison totalitaire. Sans enlever la force de ces critiques, François
Dubet rappelle que dans le programme institutionnel la volonté de contrôle participe
toujours d'un projet plus large : révéler ou restaurer le sujet.
Le programme institutionnel est considéré comme une machine à conformer les
individus, à détruire leur singularité en essayant de les faire rentrer dans un seul
modèle.
Pas une seule application des principes et pourtant différentes classes de principes,
l’ambivalence s’installe dans la façon d’appliquer les valeurs. Dans le cas de l’école,
par exemple, le programme institutionnel affirmait que le traitement était le même
pour tous et ce n’est pas le cas pour les enfants dans les écoles des quartiers
sensibles et des banlieues…Ils ne recevaient pas le même traitement que les enfants
des quartiers favorisés.
La professionnalisation jugée sur l’efficacité des tâches accomplies appliquant des
procédures de contrôle et d’évaluation, la profession ne se mobilise pas au nom des
valeurs d’une vocation sinon sur l’utilisation des techniques légalistes. Aujourd’hui
être un bon professionnel est évalué sur la capacité de maîtrise dans l’application
des procédures légales.
Si présente une redéfinition des publics d’une représentation universelle et abstraite
à une logique d’adaptation des individus et des cas.
Multiplication des politiques publiques diversifiées pour traiter une masse de public
aussi très diversifié : les chômeurs formés, les familles monoparentales, les
immigrés, les nouveaux pauvres nés de la crise financière.
Toutes les valeurs dans lesquels les individus avaient une aspiration tombent en
crise et présentent un changement radical. Ces changements affectent les valeurs du
travail sur autrui, le modèle s’effrite. Une grande demande sociale exige une
demande d’automatisation des individus qui doivent être responsables de leur propre
parcours.
Dans le camp du travail social, le déclin si présent dans la transformation d’un métier,
le travail social qui était considéré comme une institution à elle seule, avec la notion
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« institution de soi », maintenant ce rôle a changé. Il s’agit d’une mutation qui touche
tous les niveaux de la société : individus, les familles qui les socialisent, les
institutions, les modèles et les rôles tombent dans l’incertitude et affecte l’efficacité
de leurs supports. (Alain Ehrenberg)
La réponse sociale aux problèmes des individus est de moins en moins collective et
prend la forme d'un accompagnement médical, social, qui peut durer toute la vie.
Cette action publique individualisant traduit un changement des significations : "De
l'obéissance à l'action, de la discipline à l'autonomie, de l'identification à l'identité, ces
déplacements ont effacé la frontière entre le citoyen public, et l'individu privé".
De fait s’installe la logique du service basé sur une contractualisation, la relation n’est
pas sur l’aide mais sur l’élaboration d’un projet et la négociation contractuelle.
1.5. La responsabilisation de l’individu et la nouvelle configuration de la
solidarité
L’état social décline et la relation vers l’individu avant la transmission des valeurs de
la société se faisait d’une façon verticale vers l’individu qui pour être intégré devait
faire siennes ces valeurs. Une forte critique visait l’état social qui le voyait comme
machine dispensatrice d’argent aux individus et qui contribuait à l’institution et
gênerait des individus inactifs et assistés.
Avec le déclin l’état doit se reconfigurer en état bailleur qui responsabilise les
individus, chaque individu doit être responsable et acteur pour trouver une place
dans la société.
La société se meut dans un nouveau modèle de responsabilisation de l’individu, la
responsabilisation vient d’une exigence pour sauver l’état social. IL s’appuie sur un
mouvement de production continu qui met en relation des individus responsables et
aussi la relation de ces individus entre eux (Responsabilité – Responsabilisation).
La solidarité se transforme en une solidarité individualisée qui demande des
capacités à l’individu afin de pouvoir sortir de sa situation… l’aide ne sera pas
attribuée si l’individu ne montre pas sa disponibilité d’acquérir des compétences et l’
envie de changer sa situation.
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2. L’action publique d’ aujourd’hui :
- Une analyse Référentielle
2.1. Changement de l’action sociale vers un modèle de singularisation de l’action
publique.
Se présente un changement du contexte sociétal et pourtant par inertie se présente
un changement de l’intervention sociale. Le travail social (système de rattrapage) qui
intégrait les individus dans le train du progrès de la société. Maintenant tout change,
la travail social doit faire face à une masse d’inconnus, précaires éternels sans
aucune promesse d’ une meilleure condition de vie….
On peut énumérer les changements qui ont forcé le but de cette action sociale :
- Multiplications de petits boulots sociaux : -face à la grand vague de chômage de
masse, on voit la naissance de petits boulots sociaux comme exigence à faire
coïncider le traitement du chômage par des agents, non qualifiés, pour avoir le rôle
de médiation dans les lieux sensibles, les cités, qui contenaient la grand masse des
individus (la plupart des jeunes) précarisés afin qu’ils arrivent à avoir un futur avec
un avenir.
Les agents de terrain sont des personnes non qualifiées, qui avaient le rôle de servir
d’interface entre la population des quartiers et les institutions. Ces boulots n’avaient
pas la configuration d’un vrai travail sans l ’expérience et les acquis d’un
professionnel du travail social. Ces métiers non qualifiés avec une population très
diversifiée (les jeunes des banlieues, mères seules) étaient donnés à des gens du
quartier avec des compétences de médiateurs.
Par exemple, on connaît le cas des femmes relais : en principe c’était des
bénévoles qui faisaient de pont entre les gens locaux et l’institution, qui après
étaient engagées avec des semi-emplois dû à l’exigence d’une société qui souffrait
de cette transformation et devait faire face à cette nouvelle réalité sociale .
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« Le traitement social du chômage a souvent eu, entre autres curieux effets, de
multiplier les semi-emplois dans le secteur social. Ainsi les premières formules —
travaux d’utilité collective, stages d’initiation à la vie professionnelle, jeunes
volontaires, supposées permettre l’insertion de jeunes chômeurs dans le monde du
travail — ont été largement utilisées par les associations et les collectivités locales,
d’autant que leur apparition a souvent coïncidé avec les mesures de restrictions
budgétaires liées aux critiques de l’État providence. » ION, Jacques, « Le travail
social au singulier », Dunod, Paris, 2006. P.17.
« Si ces emplois peuvent quelquefois servir de tremplin vers le statut de salarié ou
permettre d’enclencher un processus de formation pour des catégories exclues, ou
non encore insérées dans le marché du travail, leurs caractéristiques essentielles
restent cependant, pour la majorité d’entre eux, la précarité, le temps partiel et le très
faible niveau de qualification. Rarement, ils constituent une solution subsidiaire à la
pénurie de travailleurs sociaux » Idem. P. 18
- Apparition des nouveaux postes d ’encadrement :
La réalisation des nouveaux dispositifs, comme le processus de décentralisation, n’
ont fait que multiplier les postes d’encadrement, occupés par des agents totalement
étrangers au contexte de la tradition sociale (managers, administrateurs, membres
de l’École Nationale d’Administration –ENAD--). Ces administrateurs (devenus les
patrons des travailleurs sociaux) ont tenté de contrôler « le monde du social » très
peu connu pour eux, avec transformations nettement organisationnelles. (ION, J.
2006)
Naissance d’un nouveau contexte idéologique (très contractuel) et qui a crée la
dénaturalisation de la vocation du travail social, et la logique d’entreprise et de
gestion devient la pratique dominante.
- Le front et l’arrière
Le commentaire antérieur tend à développer une séparation très nette en premier
lieu au niveau hiérarchique entre les dirigeants et les travailleurs sociaux (personnel
de terrain).
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Le deuxième point est fondé par l’exercice de l’ action sur le terrain. Il y a une
opposition d’un côté les managers, qui ne sont pas dans les quartiers, mais occupent
des postes de gestion (back-office/ à l’ arrière) et les professionnels qui sont au
front, sur le terrain, et qui sont confrontés à la misère quotidienne du public qu’ ils
rencontrent.
Ces « professionnels du front » doivent faire preuve d’innovation et débrouillardise
permanentes. Ils doivent s’adapter, improviser au quotidien sans pouvoir faire
référence aux acquis classiques de la profession. (ION, J. 2006)
Le « burning out » devient un mot récurrent qui fait partie de la structure qui reflète
cette conjoncture et qui fait augmenter la crise des professionnels sans repère et
sans identité professionnelle.
2.1.2. Intervenants sociaux et les nouveaux usagers
- La dénomination de travailleur social est remplacée par l’intervenant social.
Il y a un regroupement d’agents très différents (bénévoles, semi-professionnels et
travailleurs sociaux). Cette transformation a été faite devant l’exigence à faire face à
l’urgence de la masse des exclus (l’usager totalement redéfinissable, qui a souffert
d’une mutation en devenant un autre) . L’intervention devient provisoire sans idéal
pédagogique.
- De l’ayant-droit à l’usager, les dénominations de publics, à consommateurs,
bénéficiaires. La définition du sujet de l’intervention publique acquière une grande
importance dans les années 80. Ceci est dû à la nécessaire modernisation de l’État
et l’exigence de l’humanisation des services publics. (ION ,J. 2006).
On commence à utiliser une conception complètement nouvelle du sujet administré,
et l’on parle maintenant de l’usager qui vient avec une évolution du droit,
L’intervention devient une intervention sociale d’aide à la personne. Ce concept
renforce la protection de l’administré qui est devenu une personne. Une façon
différente émerge pour représenter l’usager ainsi qu’un questionnement sur la façon
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de l’accueillir et lui offrir un service de qualité. La définition d’usager se substitue à
celle d’administré. Ce présente enfin une évolution du droit qui renforce la protection
de l’usager-personne et qui valorise son approche.
« L’ayant droit n’est en principe plus représenté par un numéro et un dossier, mais il
acquiert une existence spécifique incarnée dans un corps physique que l’on peut
rencontrer ». ION, Jacques, « Le travail social au singulier », Dunod, 2006, p.81
- Les usagers ont aussi la position de demandeurs avertis, de moins de moins prédéfinissable, due à la grande diversification du public, l’extrême hétérogénéité
comme effet de la transformation sociographique.
La classification et l indentification des usagers n’étaient pas possible, son horizon
n’était pas envisageable, la généralisation de la crise a perturbé le repère qui
permettait l’identification à priori de l’usager.
- L’individualisation et la restauration identitaire, la constitution de l’identité de la
personne devient l’élément principal de la relation et considérer autrui dans une
nouvelle perspective, définir l’usager et l’aider à prendre conscience de son identité.
La crise a multiplié la perte des repères pour les individus, sans conscience de leur
identité, éloignés des collectivités et des institutions. Le processus d’individualisation
nait dans un contexte d’une société d’inclusion affaiblie. La norme est de devenir soimême, l’intégration est pensée comme « le produit d’une participation des individus à
l’action collective », (ION, J. 2006), une exigence d’autonomie pour l’individu. Il est
renvoyé vers un processus de redéfinition de son identité.
Alors l’intervention sociale est basée sur le processus de reconstruction de la
personne, un travail de restauration identitaire sur elle-même. L’individu dévient la
source autonome de pensée et d’actions, et dans ce changement de société
l’individualisation est le paramètre et l’objectif de toute dynamique sociale.
- L’intervenant en manque d’offre est obligé d’utiliser ses ressources personnelles
Dans ce contexte, il est très récurant que l’intervenant se trouve dans la position de
n’avoir rien à offrir, malgré le fait qu’il est solliciteur. Il y a le défaut d’une offre quelle
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qu’elle soit, un usager sans repère qui demande des solutions et un intervenant qui
se trouve dans l’ impossibilité de le satisfaire parce qu’ il n’ y a rien à lui offrir.
A cause du manque de solutions à offrir, les bénévoles se multiplient et cet
intervenant n’est pas un professionnel classique.
Nait une symétrie : l’usager expose son histoire et il y a souvent situation d’impasse
à garantir un contrat. L’intervenant lui fait une offre, en prenant appui sur toutes ses
ressources personnelles pour conserver la relation entre eux deux… un seul
intervenant. (ION, J. 2006).
2.2. La souffrance sociale et sa pratique de reconnaissance
La société produit une souffrance psychique, les individus tombent en souffrance
psychique liée à l’incapacité de trouver sa place dans la société. Apparait un travail
de reconnaissance de cette souffrance aux formes démultipliées et qui est destiné à
la reconnaissance des personnes (minorités, population en détresse, et les laissés
pour compte de la société).
Pendant un longue période, la lutte pour la redistribution des richesses et la lutte
pour la reconnaissance étaient présentes dans tous les domaines de la société
(sexe, mariage, travail etc.). Aujourd’hui il faut que l’institution reconnaisse la
singularité de chaque individu et doit développer l’accomplissement et la réalisation
de ces singularités. Être une institution juste ne signifie pas avoir un traitement
égalitaire envers tous sinon s’engager pour la reconnaissance de la singularité des
individus.
On peut distinguer trois types de reconnaissance qui sont produites par les
institutions
1. La reconnaissance dépréciative : Qui a par conséquence la dévalorisation, la
stigmatisation de classes et groupes d’individus, et la dépréciation (harcèlement…
présent dans le monde du travail).
2. Une reconnaissance décalée sous deux formes : la méconnaissance à l’intérieur
d’une institution (n’être pas reconnu par ses pairs ou sa hiérarchie) et la mort sociale
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exprimée par l’invisibilité de certains groupes sociaux et qui sont vus comme des
indésirables (migrants, refugiés).
3. Une reconnaissance insatisfaite : elle est ressentie par l’individu, quand le
contexte institutionnel ne permet pas un processus d’identification forte.
2.3. Le nouveau paradigme de l’intervention publique
L’accompagnement, est devenu le nouveau paradigme de l’intervention publique qui
est présent dans la plupart des domaines de l’action sociale. Avec ses origines
multiples (pendant les années 80 dans le champ du handicap nait l’accompagnement
pour aider à intégrer les handicapés dans la vie ordinaire toujours en tant
qu’accompagné… l’accompagné devient dépendant de l’intervenant et dans les
années 90 avec la figure du parrainage, par la prévention spécialisée et l’
accompagnement hors murs)
A côté de ces formes d’accompagnement sont apparues les associations caritatives
qui renforce l’action sur la reconnaissance de la personne et de ses capacités.
L’individu est vu comme une personne avec des ressources et des outils à se
mobiliser avec la société.
Il y a une prise en compte totalement nouvelle des usagers, où l’accompagnement se
fait d’une façon humaine et un travail d’insertion de l’individu dans un lien relationnel
et de respect de son intégrité comme personne.
L’accompagnement dans ses trois pôles :
- Une éthique de la présence caractérisée par l’ accompagnement . L’intervenant ne
peut rien faire en face de la situation de l’usager qui n’a pas de possibilité de sortir
de sa situation…L’accompagnement se fait au niveau humain, pour montrer à
l’individu qu’il n’ est pas seul dans la situation malgré le fait qu’ il ne peut pas sortir de
sa dépendance.
- La médiation : Le monde est devenu assez complexe et de nombreuses personnes
n’arrivent pas à trouver de repère. L’intervenant doit faire appel à son ingéniosité
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pour savoir comment rétablir le contact, faire de la médiation, créer des liens, trouver
dans l’urgence une solution aux différents problèmes (permettre l’accès à l’emploi,
trouver un logement etc…). Cet accompagnement devient une protection, une
mobilisation de l’expérience et des connaissances et réussir à faire valider sa
légitimation pour pouvoir accéder aux droits et aux différents services. Proposer la
médiation entre l’univers de la personne et l’univers social, l’univers de l’offre et la
demande.
- La logique de la surveillance institutionnelle
L’accompagnement se déroule dans l’application d’une mesure qui est prescriptive et
l’accompagnement, qui devait être pour aider la personne, devient (off-record) une
instance de contrôle et de surveillance sous prétexte de l’ utilisation correcte des
fonds publiques.
On voit bien comment l’accompagnement ne suit pas toujours le sens éthique et qu’il
se déploie dans trois pôles, qui ne sont pas tous dans l’éthique et qui suivent un
caractère de sanction et de contrôle institutionnel.
2.4. L’automatisation autonomie ?????de l’individu et le concept d’
enrôlement?????
Dans le processus d’automatisation d’autonomie de l’individu et l’empowerment son
enrôlement, son implication ???? est un élément important qui cherche à fortifier le
niveau participatif de tous les citoyens aux décisions collectives. Donner le pouvoir à
la personne pour qu’elle arrive à prendre en main son destin et ses décisions.
(BACQUÉ, M., BIEWENER, C. 2013)
??l’ empowerment(émancipation ??) est une notion polysémique qui a ses origines
dans les années 90 au Royaume Uni et aux Etats Unis qui comporte plusieurs
dimensions.
- Permettre l’autoréalisation, l’émancipation des individus et la reconnaissance des
minorités dans un contexte de transformation sociale.
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- Montrer la pauvreté comme une incapacité dans une dynamique de dépossession
sociale.
Trois modèles d « empowerment »
ATTENTION ::Mettre entre Gillemets « » ou traduire ou expliquer ce que c’ est !
- Le modèle Radical : Transformation de la société par le bas qui cherche à
transformer les représentations sociales. Redistribution des ressources et droits
politiques (Act-up, mariage pour tous, égalité de genre).
- Le modèle social libéral : Questionne sur les conditions socio-économiques et
politiques du pouvoir mais sans aller au centre des mécanismes structurels qui
produisent les inégalités sociales.
- Le modèle néo-libéral : L’empowerment permet l’accès au pouvoir dans l’optique
d’entrée dans le monde du travail et d’avoir un pouvoir d’achat et de consommation.
Le marché dicte ses normes et ses dynamiques. L’individu doit être rentable et doit
trouver sa place sur le marché. Ce modèle ne remet pas en cause la source des
inégalités sociales. L’individu soumis à la loi du marché sans aucune possibilité
d’émancipation et de réalisation individuelle.
On a vu que « l’empowerment » a des notions très différentes et qu’elles vont
dépendre de la conception qui va orienter la pratique. Mais dans le processus
d’autonomatisation d’ autonomie ? ce concept cherche à rendre l’individu seul et
responsable de son destin. Cependant il y a aussi une grande responsabilité
d’éradiquer les sources des inégalités et à donner vraiment le pouvoir d’émancipation
à l’individu afin qu’il puisse avoir l’opportunité d’être intégré dans la société.
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Conclusion
Dans l’exposé sis dessus, il est développé le processus des transformations du
travail social pour arriver au processus actuel de singularité de l’individu et de l’action
sociale. Mais il est important de noter que dans cet univers des mutations, le travail
social n’est pas le seul à l’expérimenter. C ’est le social en tant que société (avec ses
frontières et sa nature) avec l’identité de l’individu qui suivent ce chemin de
redéfinition et de transformation. (ION, J. 2006).
Toutes ces transformations dans leur état actuel, nous montrent que dans le travail
social il n’y a pas qu’un seul objet mais une grande diversité d’objets qui montrent
l’unité dans sa diversité. Rompre avec le stéréotype d ’un seul modèle assigné
historiquement et qu’historiquement il a évolué en différentes identités.
On peut dire que l’intervention sociale doit assumer les défis de redéfinir son identité
dans le contexte d’un horizon sociétal et défaillant et agir avec un processus de
restauration de l’identité personnelle des usagers totalement désaffiliés et sans
repère identitaire.
Le travail social a besoin de vaincre une série de stéréotypes et de stigmatisations
assignés depuis le début de l’action sociale qui lui donnent l’image d’être une
profession subsidiaire parmi tant d’autres.
La démonstration est faite que le travail social est lié au quotidien de l’individu et de
la société. Il ne modifie pas les besoins, ni les manques mais ce processus qui nait et
à travers lequel l’individu peut prendre conscience de ses compétences qui lui
permettront de participer aux changements de ses conditions de vie est constructif.
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Avec le renforcement de l’identité propre et spécifique de la personne, et son
acceptation de nouveaux paradigmes, le travail social lui apportera, grâce à cette
nouvelle façon d’action et de relation avec l’individu, une sortie positive et pleine d’
espoir dans ce contexte souvent décomposé de la société.
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