D’où proviennent ces formes dont se sont emparés les artistes modernes ?
J. L. : D’un point de vue historique, ces formes, qui étaient très présentes dans les
sociétés archaïques, ont disparu en Occident vers le Ve siècle av. J.!C. avant de
réapparaître – c’est en cela que c’est un propos sur la modernité – à la fin du
XVIIIe siècle, sous une triple influence. Tout d’abord les découvertes archéologiques
qui ont fasciné les artistes, de l’égyptomanie aux grandes séances de fouilles en
Grèce au XIXe siècle, où l’on a redécouvert, entre autres, la civilisation cycladique.
Puis la technologie, avec l’art des ingénieurs dont Eiffel est un exemple majeur, et
une sorte de gnosticisme, qui suscite alors un nouvel intérêt pour les formes
primordiales exprimant le rapport de l’homme au cosmos. Enfin, les
mathématiques et les sciences, et notamment la biologie qui s’intéresse à ce
moment!là au principe de croissance des os, des cellules, des plantes... Ainsi, les
références sont toujours très précises lorsque tel biologiste influence Henry Moore
ou tel ingénieur inspire Brancusi.
P.-A. D. : La réémergence des formes simples est aussi liée aux disciplines comme
l’anthropologie, avec la découverte d’autres cultures et l’arrivée d’objets
d’Océanie, d’Afrique, etc.
J. L. : Bien sûr ! La redécouverte de ces sociétés archaïques…
P.-A. D. : …dont certaines encore vivantes : dans toutes les cultures, il y a des
archétypes de formes qui ont su traverser les siècles dans des objets de petite
taille selon un fil jamais rompu. C’est passionnant.
J. L. : C’est une des choses qui nous fascine dans ces formes : elles sont la partie
présente d’une mémoire en général très ancienne.
Comment cette exposition s’inscrit-elle dans la programmation du Centre
Pompidou-Metz ?
L. L. B. : Avec Formes simples, nous célébrerons notre quatrième anniversaire.
C’est plus qu’un symbole puisque, depuis la première année avec Chefs-d’œuvre ?,
chaque été est rythmé par un grand événement thématique. Formes simples se
présente comme un volet de ce polyptyque qui, je crois, crée peu à peu notre
identité lorraine.
Qu’apporte la participation de la Fondation d’entreprise Hermès dans
l’organisation de cette exposition ?
L. L. B. : C’est un partenariat dans la durée, un projet nourri de dialogues. La
Fondation est à l’écoute, attentive, présente depuis la première esquisse. Je crois
que l’avenir des aventures culturelles se situe dans un partenariat public!privé
éthique fort.
P.-A. D. : À la Fondation, nous tenons beaucoup à cette idée d’œuvre collective. La
rencontre avec le Centre Pompidou!Metz consiste à participer au projet, en être
un acteur sans s’ingérer dans le contenu artistique ou la programmation. C’est
très motivant, alors que nous essayons de pousser plus loin l’idée d’un mécénat
qui soit le plus vertueux possible, c’est!à!dire vraiment au service de l’intérêt