
Le drame d’Œdipe
Puisque l’on est chez les classiques, franchissons les
quelques kilomètres qui séparent Ménilmontant du bois
de Vincennes pour évoquer
Œdipe Roi
de Sophocle, mis en
scène par Antoine Caubet, au Théâtre de l’Aquarium. Cette
fois, on est à Thèbes frappée par la peste. La population
fait appel à son roi, Œdipe, en lui confiant une mission très
précise : retrouver le meurtrier du père d’Oedipe, l’ancien
roi Laïos. Selon les oracles, en effet, c’est la condition sine
qua non pour échapper au fléau de la maladie.
Voilà donc Œpide (Pierre Baux) qui lance l’enquête, tel
un Maigret des temps jadis. Il cherche, il interroge, il
tâtonne, il hésite. On lui parle d’un attentat à l’intersection
de deux routes. Puis, au fil de ses recherches, Oedipe
doit affronter la vérité, aussi insupportable soit-elle. Le
meurtrier de Laïos n’est autre que lui, Œdipe, père d’un
complexe éternel qui l’a conduit dans le lit de sa mère et
qui fera la gloire de Freud. Le fils maudit ne s’en remettra
jamais. Il finira aveuglé (au sens littéral du terme) par
une réalité impossible à admettre.
Terrible pièce où un homme se découvre en même temps
qu’il élucide un mystère. Œdipe est une énigme pour
Œdipe. Il n’est pas celui qu’il croyait être et il ne peut
être celui qu’il est vraiment. Par cette version réussie et
imaginative (notamment avec les chœur), Antoine Caubet
confirme un talent qui saute aux yeux.
Jack Dion
18 novembre 2013