stéphane gsell la civilisation carthaginoise

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STÉPHANE GSELL
MEMBRE DE L’INSTITUT
PROFESSEUR AU COLLÈGE DE FRANCE
HISTOIRE ANCIENNE
DE
L’AFRIQUE DU NORD
TOME IV
LA CIVILISATION CARTHAGINOISE
PARIS
LIBRAIRIE HACHETTE
79, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79
1920
Livre numérisé en mode texte par :
Alain Spenatto.
1, rue du Puy Griou. 15000 AURILLAC.
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HISTOIRE ANCIENNE
DE
L’AFRIQUE DU NORD
— IV
LIVRE PREMIER
HISTOIRE ÉCONOMIQUE DE CARTHAGE
CHAPITRE PREMIER
AGRICULTURE
I
Ce fut seulement vers le milieu du Ve siècle que Car-
thage se constitua en Afrique un territoire(1) dont elle put ex-
ploiter les ressources. Agrandi plus tard, ce domaine embras-
sait, dans la seconde moitié du IIIe siècle, l’Est, le Nord, une
partie du centre de la Tunisie(2). Il comprenait des régions qui
conviennent plus ou moins aux céréales, aux arbres fruitiers,
à l’élevage : quelques-unes fertiles et pourvues en général de
la quantité d’eau nécessaire; d’autres, les terres sont pau-
vres (comme le massif boisé de la Khoumirie), les pluies
sont souvent insuffisantes (comme les plaines et les bas pla-
teaux du Sahel, en bordure de la côte orientale).
La République s’annexa aussi le littoral méditerranéen sur
____________________
1. Voir t. I, p. 464.
2. T. II, p. 95 et suiv.
2 HISTOIRE ÉCONOMIQUE DE CARTHAGE.
la petite Syrte et entre les deux Syrtes : zone improductive,
sauf des oasis, disséminées le long du rivage, séparées par
des espaces déserts, et, à une distance variable de la mer, le
bourrelet déchiqueté du plateau saharien(1).
Sur les côtes de l’Algérie et du Maroc, certaines cités
phéniciennes et puniques s’entourèrent d’un territoire(2) dont
les colons tirèrent parti. Ce n’étaient là, sans doute, que des
banlieues : des jardins plutôt que des campagnes.
Tels furent les éléments du domaine agricole, assez res-
treint et inégalement doté par la nature, dont les Carthaginois
disposèrent dans l’Afrique du Nord(3).
Les Phéniciens d’Orient étaient d’excellents agricul-
teurs. Dans la bande étroite qu’ils occupaient entre la Médi-
terranée et le Liban, en arrière des villes de la côte, Tyr, Si-
don, Byblos, etc., s’étendaient des cantons fertiles, qui furent
merveilleusement fécondés par le travail des hommes. On y
cultivait les céréales et surtout la vigne, l’olivier, d’autres ar-
bres fruitiers.
Les Carthaginois, eux aussi, s’adonnèrent avec succès à
l’agriculture(4). Cicéron(5) prétend qu’ils la négligèrent, mais
cette assertion est certainement inexacte. Par la mise en va-
leur de leurs possessions, comme par l’influence que leurs
exemples exercèrent sur les indigènes, ils contribuèrent beau-
coup à préparer la prospérité matérielle qui devait s’épanouir
en Afrique sous la domination romaine.
Quelques textes nous permettent d’entrevoir l’état floris-
sant des pays dont ils furent les maîtres. A la fin du IVe siècle,
____________________
1. T. I, p. 23-24.
2. T. II, p. 115.
3. Comme nous l’avons fait observer (t. II, p. P3), Strabon dit à tort que les Car-
thaginois s’annexèrent en Afrique tous les pays qui ne comportaient pas la vie nomade.
4. On trouvera des indications sur l’agriculture en Afrique, aux époques punique
et romaine, dans un travail remarquable, et trop peu connu, de F. Lacroix, Revue afri-
caine, t. XII-XIV (1868-1870).
3. République, II, 4, 7. Conf. t. II, p. 433.
AGRICULTURE 3
quand les soldats d’Agathocle, ayant débarqà l’extrémi
de la péninsule du cap Bon, se dirigent vers Carthage, un spec-
tacle digne d’admiration se déroule sous leurs yeux : belles
demeures appartenant à la noblesse punique, vignobles, oli-
vettes, vergers, prairies pleines de moutons, de bœufs, de che-
vaux(1). Un demi-siècle plus tard, des troupes romaines, qui
viennent de prendre Clupea, au Sud-Est du même cap, ren-
contrent, dans une courte expédition, beaucoup de maisons
de campagne, fort bien construites ; ils s’emparent aisément
d’une grande quantide bétail et font, dit-on, plus de vingt
mille prisonniers(2). Peu après la guerre d’Hannibal, le poète
Ennius vantait les champs bien cultivés que portait la terre
d’Afrique(3). Vaincue dans cette guerre, Carthage avait perdu
toutes ses possessions d’outre-mer, probablement aussi ses co-
lonies des côtes de la Numidie et de la Maurétanie; elle avait
renoncer aux monopoles commerciaux qu’elle s’était -
servés dans une bonne partie de l’Occident. Elle chercha sans
doute des compensations dans une exploitation plus intense de
son territoire africain. Appien affirme(4) qu’elle redevint très
prospère, grâce à la fécondité de ses campagnes et aux profits
qu’elle tirait de la mer. Vers l’année 153, Caton et d’autres
Romains, venus pour régler un différend entre Masinissa et la
République, virent autour d’eux, dit encore Appien(5) un pays
cultivé avec soin, aménagé par de grands travaux.
Nous avons une autre preuve de l’intérêt que les Cartha-
ginois portèrent à l’agriculture et du succès avec lequel ils la
pratiquèrent. Des traités d’agronomie, composés par plusieurs
____________________
1. Diodore, XX, 8, 3-4; pour ce passage, voir t. III, p. 29. Conf. Diodore, XX, 3,
3 : Agathocle veut, en envahissant l’Afrique, piller un pays rempli de biens de toute sorte,
que la prospérité des Carthaginois y a accumulés.
2. Polybe, I, 29, 7. Conf. t. III, p. 80.
3. Ennius, 2° édit. de J. Vahlen, p. 205 (Sat., 10) :
« Lati campi quos gerit Africa terra politos ».
4. Lib., 67.
5. Ibid., 69.
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