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Calcul d erreur (ou Propagation des incertitudes)

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Travaux Pratiques de Physique
vers. septembre 2014
Calcul d’erreur (ou Propagation des incertitudes)
1) Introduction
Le mot "erreur" se réfère à quelque chose de juste ou de vrai. On parle d’erreur sur une
mesure physique lorsqu’on peut la comparer à une valeur de référence qu’on peut
considérer comme "vraie" (par ex: mesure de la vitesse de la lumière, de la température du
zéro absolu).
Généralement, pour les mesures effectuées au laboratoire, on ne possède pas de valeur de
référence et on ne connaît pas la valeur exacte de la grandeur mesurée (par ex. vitesse d’un
projectile (tir)). On parle alors d’incertitude.
Le résultat Y d’une mesure dépend généralement de plusieurs grandeurs mesurées x1, x2, ….
On parle alors d’une grandeur composée. Chaque grandeur mesurée a une certaine
incertitude x1, x2,… et ces dernières vont se combiner pour produire l’incertitude totale
Y sur le résultat Y. La façon dont l’incertitude de chaque paramètre individuel contribue à
l’incertitude totale est décrite par la propagation des incertitudes.
La propagation des incertitudes est donc le terme correct pour l’expression improprement
mais couramment utilisée de calcul d’erreur.
2) Mesure
Par mesure on entend soit le dénombrement d'un ensemble d'objets ou d'évènements (par
ex. le comptage de processus de désintégration radioactive) soit la comparaison d'une
grandeur à mesurer avec une unité de même espèce (par ex. comparaison d'une distance
avec l'unité de longueur). Le résultat d'un dénombrement est déterminé de façon univoque
par un nombre sans dimension, par contre le résultat d'une mesure par comparaison, c'est‐
à‐dire le nombre mesuré, dépend du choix de l'unité. Il est donc tout aussi important
d'indiquer l'unité choisie que le nombre obtenu.
Le Système international d’unités (abrégé en SI), inspiré du système métrique, est le
système d’unités le plus largement employé au monde, qui est défini par la Conférence
générale des poids et mesures. Il s’agit d’un système décimal (on passe d’une unité à ses
multiples ou sous‐multiples à l’aide de puissances de 10), sauf pour la mesure du temps. On
parle aussi de système MKSA, en référence aux unités principale qui le compose : le mètre
(longueur), le kilogramme (masse), la seconde (temps) et l’ampère (courant électrique). Ce
système est composé de 7 unités de base; en plus des quatre précédentes, il y a encore le
kelvin (température), la mole (quantité de matière) et la candela (intensité lumineuse).
Toutes les autres unités sont déduites de ces unités de base, mais certaines possèdent un
nom particulier (par exemple le Newton pour la force, 1 [N] = 1 [kg∙m∙s‐2]).
Il est essentiellement impossible de déterminer la vraie valeur d'une grandeur physique (par
ex. la détermination de la masse d'un corps par pesée). Cela s'explique par le fait que les
instruments de mesure utilisés, de même que les organes des sens dont on ne peut se
passer, ne possèdent pas une sensibilité infinie. La limite de sensibilité se trouve imposée en
dernier lieu par la structure atomique de la matière et les phénomènes de fluctuations
statistiques qui y sont liés (par ex. le mouvement brownien). Un résultat de mesure aura par
conséquent plus ou moins de chances de s'approcher de la vraie valeur de la grandeur à
mesurer, suivant la finesse de l'instrument de mesure et l'habileté de l'expérimentateur.
3) Les incertitudes de mesure
On distingue différentes sortes d'erreurs dont toute mesure peut être affectée: les erreurs
systématiques, les erreurs accidentelles et la dispersion statistique.
i) Les erreurs systématiques se produisent par exemple lorsqu'on emploie des unités mal
étalonnées (échelle fausse, chronomètre mal ajusté) ou lorsqu'on néglige certains
facteurs qui ont une influence sur la marche de l'expérience (par ex. l'influence du
champ magnétique terrestre dans une mesure magnétique). Cela mène à un décalage
(biais) du résultat si l‘erreur commise est toujours la même. Les erreurs systématiques
influencent l’exactitude (ou justesse) de la mesure (voir Fig. 1.c).
Dans la plupart des cas, les erreurs systématiques, pour autant qu'on connaisse leur
cause, peuvent être prises en considération par une correction correspondante
apportée au résultat de la mesure. Pour les mesures effectuées dans le cadre de travaux
pratiques de physique, elles n'ont en général qu'une signification de second plan.
ii)
Les erreurs accidentelles par contre ne peuvent en principe pas être évitées. Leur cause
se trouve dans l'expérimentateur lui‐même. La sûreté avec laquelle la main manie un
instrument (par ex. l’arrêt d'un chronomètre), l'exactitude avec laquelle l'œil observe
(par ex. la position d'une aiguille sur une échelle) ou l'acuité différentielle de l'oreille
(par ex. pour la détermination d'un minimum d'intensité sonore) sont limitées. C'est la
tâche de tout observateur d'être conscient des erreurs accidentelles de mesure, de les
maintenir aussi faibles que possible et d'estimer ou calculer leur influence sur le résultat
obtenu.
Les erreurs accidentelles affectent la précision (ou fidélité) de la mesure (Fig. 1.b).
Fig. 1: Exactitude et précision: (a) Exact et précis; (b) Exact, pas précis; (c) Pas exact, mais précis.
iii) La dispersion statistique apparaît lorsqu’on fait des
mesures répétées de la même grandeur. Si l’on
mesure plusieurs fois le même phénomène avec un
appareil de mesure suffisamment précis, on
obtiendra à chaque fois un résultat différent xi. Ceci
est dû à des phénomènes perturbateurs (par ex.
bruit de fond électronique, sensibilité d’un
instrument aux variations de température) ou, pour
des mesures extrêmement précises, à la nature
aléatoire du phénomène (chaos, incertitude
quantique).
Fig. 2: Distribution de Gauss.
Pour un grand nombre de mesures et phénomènes physiques, on peut généralement
postuler que la distribution des valeurs obtenues suit une distribution de Gauss
(distribution normale). Notons que cette distribution n'est pas toujours valable comme
le montre l'exemple des phénomènes de désintégration (distribution de Poisson).
La distribution de Gauss est caractérisée par deux paramètres (voir Fig. 2): sa valeur
moyenne xo et sa variance σ2 (ou déviation standard ). Dans la distribution de Gauss,
68% des mesures sont comprises entre xo‐ et xo+95% entre xo‐2 et xo+2et 99.7%
entre xo‐3 et xo+3
La dispersion statistique affecte la précision de la mesure (Fig. 1b). Le but de répéter un
grand nombre de fois (N fois) la mesure du même paramètre est d'obtenir une estimation
aussi précise que possible de la vraie valeur cherchée xo. On constate que cette estimation
sera d'autant plus précise que la distribution de Gauss est étroite, c’est‐à‐dire que σ est
petit. La méthode de mesure, les appareils utilisés ainsi que l'habileté de l'expérimentateur
contribuent chacun à la grandeur de σ (par ex : un chronomètre électronique est plus précis
qu'un chronomètre mécanique, un faisceau lumineux associé à une cellule photoélectrique
sera plus précis que l'œil et la main de l'expérimentateur pour détecter le passage d’un
projectile en un point).
Le meilleur estimateur de la vraie valeur xo est la moyenne arithmétique x des N résultats
individuels xi:
1 N
x   xi
(1)
N i 1
De même, le meilleur estimateur de la variance de la distribution de x est donné par
1 N
(2)
 x2 
(xi  x )2

N  1 i 1
Finalement, la précision avec laquelle on détermine xo est donnée par la variance de la
moyenne x qu’on note  x 2 :
1
N
 x 2   x2 


1  1 N
 1  N

x2  x 2  .

(xi  x )2    

N  (N  1) i 1
 N  (N  1)

(3)
Cette valeur varie inversement avec le nombre de mesures N. Ainsi, si on veut diminuer la
déviation standard de la moyenne  x d’un résultat d'un facteur 2 (c’est‐à‐dire réduire
l’incertitude de moitié), il faut quadrupler le nombre de mesures (ou alors améliorer la
méthode et/ou les appareils, sans parler de l'expérimentateur!).
Le résultat de la mesure est finalement donné sous la forme : x   x
A côté de l'erreur absolue  x d'un résultat de mesure, il est souvent commode d'indiquer
l'erreur relative  x x . L'erreur absolue a toujours la même dimension (même unité) que le
résultat de la mesure lui‐même. L'erreur relative n'a pas de dimension et s’exprime en % ou
en ‰.
Chiffres significatifs: Le nombre de chiffres significatifs à indiquer dans un résultat est
également fixé par le calcul des incertitudes. En donner trop est tout aussi faux que d'en
donner trop peu! La convention admise est la suivante: tout résultat doit comporter un
nombre de chiffres significatifs tel que le dernier soit affecté de l'erreur fixée par le calcul
des erreurs; l'avant‐dernier par contre est certain. Ainsi une masse M pesée à ±2 mg et
trouvée égale par exemple à 25.3873 g sera donnée par: M  (25.387  0.002) g .
4) Incertitudes sur une mesure composée; loi de propagation
Les mesures effectuées en physique sont le plus souvent indirectes, c'est‐à‐dire que le
résultat final d'une expérience ne consiste pas en la mesure (répétée ou non) d'un seul
paramètre, mais de plusieurs grandeurs qui, liées par une loi physique, conduisent au
résultat cherché. Chacune de ces grandeurs a une certaine incertitude; le résultat de
l’expérience en comportera aussi une qui dépend des incertitudes individuelles. On veut
déterminer de quelle manière chacune de ces incertitudes se répercute sur la grandeur
finale.
4.1) Propagation des incertitudes
Illustrons cela par un exemple simple (Fig. 3). Si on veut déterminer la surface d’une pièce,
on mesure sa longueur l et sa largeur d et la surface est donnée par la fonction S = ld. Les
distances mesurées comportent une incertitude l sur la longueur et d sur la largeur.
Comment déduire l’incertitude S sur la surface calculée?
Envisageons le cas le plus défavorable et considérons que les incertitudes augmentent
chaque fois les grandeurs mesurées. L’incertitude S sur la surface correspond alors à
l’accroissement total de la surface (voir Fig. 3a) :
(4)
S  (l  l )  (d  d )  ld  d l  l d  l d .
Le dernier terme peut être négligé lorsque les incertitudes sur les grandeurs mesurées sont
petites par rapport aux grandeurs elles‐mêmes (x << x), ce qui permet de simplifier le calcul
d’erreur en considérant la différentielle (variation) de la fonction par rapport aux différentes
variables (Fig. 3b):
S  d l  l d 
S
S
l 
d
l
d
(5)
Fig. 3: Accroissement total (a) et différentielle (b) de la surface d’un rectangle de
longueur l et de largeur d comportant des incertitudes. La différence entre ces
deux grandeurs est le petit rectangle rouge dont la surface peut être négligée.
Plus généralement, on aura pour une fonction de plusieurs variables f(x1, x2, x3,…) :
f 
f
f
f
x1 
x2 
x3  ...
x1
x2
x3
(6)
Fig. 4:
L’incertitude f sur une grandeur f résultant de l’incertitude x sur une variable x
dépend de la pente locale de la courbe f(x), donnée par la dérivée partielle f x .
Le principe consiste donc à calculer la dérivée partielle (notée f x i ) de la fonction f par
rapport à chaque variable xi, qui représente l’accroissement de la fonction f pour une petite
variation de la variable xi (voir Fig. 4).
Rappel : la dérivée partielle d’une fonction par rapport à une variable xi consiste à dériver la
fonction par rapport à xi en considérant toutes les autres variables comme des constantes.
Quelques cas simples :
L’application de la propagation des incertitudes décrite par la formule générale (6) devient
particulièrement simple dans les cas particuliers suivants, souvent rencontrés en pratique :
Somme/différence: lorsque la grandeur composée n’est constituée que de sommes ou de
différences:
y  x1  x2  x3  ... , alors y  x1  x2  x3  ...
(7)
Dans une somme (différence), les erreurs absolues s’additionnent.
Produit/quotient: lorsque la grandeur composée n’est constituée que de produits ou de
quotients:
y x1 x2 x3
y  x1  x2 / x3  ... , alors
(8)



 ...
y
x1
x2
x3
Dans un produit (quotient), les erreurs relatives s’additionnent.
Produit de puissances: lorsque la grandeur composée n’est constituée que d’un produit de
puissances
x3
y
x
x2
(9)
y  x1  x2   x3  ... …, alors
 1

 ...
y
x1
x2
x3
Dans tous les autres cas (par ex. en présence de relations trigonométriques, de logarithmes,
de racines, etc…), la formule générale (6) doit être utilisée en calculant toutes les dérivées
partielles.
Exemple : la période d’oscillation T d’un pendule simple dépend de la longueur l du pendule:
T  2 l g . En mesurant la longueur du pendule et sa période (donc ici deux mesures), on
obtient de façon simple l'accélération de la pesanteur g: g  4 2l T 2 . L’incertitude sur g est
obtenue à partir des incertitudes sur l et T par:
g 
2l

g
g
2 1
l 
T  4  2 l  3 T 
T
T

l
T
Méthode simplifiée: selon (8), g  4 2

l
T T
(10)
(quotient → erreurs relatives s’ajoutent)
2l T 
g l T T
2T 
2  l
 l 2T 
2 l  l



 g   
 g  4 2  
  4  T 2  T 3 


g
l
T
T
T 
T  l
T 
 l
4.2) Propagation de la dispersion statistique
Si les valeurs des différentes grandeurs xi ont été obtenues par une moyenne statistique sur
un nombre de mesures répétées, l’incertitude sur chaque paramètre est donnée par la
dispersion statistique ou déviation standard  x (voir §3.iii). Si les différentes variables sont
indépendantes, les incertitudes se combinent aléatoirement de sorte que la variance sur la
grandeur combinée est donné par:
2
f
2
2
2
 f  2  f  2  f  2
2

  x3  ... et  f   f
  x1  
  x2  



x
x
x
 1
 2
 3
(11)
5) Loi physique à vérifier expérimentalement; régression linéaire
Dans de nombreuses expériences effectuées en physique, la détermination d'une grandeur
se réalise en vérifiant une loi faisant intervenir la grandeur en question. La vérification
expérimentale d'une loi théorique reliant plusieurs grandeurs physiques peut se faire
simplement en s'efforçant de mettre la loi sous une forme linéaire par un changement de
variable approprié.
Rappel: la forme analytique d'une droite est y = px+h; p = pente, h = ordonnée à l'origine.
Exemple: dans le pendule simple, la période d’oscillation dépend de la longueur du pendule
de la manière suivante : T  2 l g . On peut décrire ce phénomène par une relation
linéaire en représentant T2 en fonction de l: T 2   4 2 g  l .
Les points de mesures (xi, yi) sont alors reportés avec leurs barres d’incertitudes sur un
système d'axes orthogonaux, ce qui permet de reconnaître immédiatement si la loi est
vérifiée en examinant l'alignement des points expérimentaux (voir Fig. 5). Les barres
d’erreur consistent en des segments horizontaux et verticaux de longueur xi et yi portés
de part et d’autre de chaque point (xi, yi). On voit qu'il est de première importance de
reporter les points de mesures avec leur domaine d'erreur préalablement à toute discussion
concernant la validité de la loi à vérifier.
Fig. 5: Principe de la vérification expérimentale d’une loi physique sous forme graphique.
Régression linéaire:
Pour vérifier la linéarité d’une relation, on cherche à faire passer la "meilleure droite"
(appelée aussi droite de régression) par tous les points de mesure (avec leurs barres
d’erreur). Ceci se fait manuellement ("à l’œil") ou par calcul (méthode des moindre carrés).
Méthode manuelle:
La meilleure droite passant par les points donne la pente po de la relation entre y et x.
L'erreur sur la pente est obtenue en considérant les droites "extrêmes" de pente pmax et pmin
passant à peu près par 2/3 des points expérimentaux (avec leurs erreurs). L’erreur sur la
pente est alors donnée par: p  ( pmax  pmin ) / 2 .
Moindres carrés:
Une méthode couramment utilisée pour obtenir la droite représentative du phénomène
décrit par les points (xi, yi) est basée sur la méthode des moindres carrés, qui minimalise la
N
somme des écarts verticaux
(y  y
i 1
i
théo
) 2 entre les points expérimentaux et la droite, où
ythéo représente l’ordonnée des points sur la droite optimale. Les coefficients de la droite de
régression (pente p et ordonnée à l’origine h) peuvent être obtenus par calcul avec un
tableur ou autre logiciel dédié. Il faut toutefois noter que la régression linéaire ainsi obtenue
(par exemple en utilisant une courbe de tendance standard du logiciel Excel) ne tient pas
compte des incertitudes sur les points de mesures, ce qui fait qu’on point connu avec une
grande précision a le même poids dans le calcul de la droite qu’un point entaché d’une
grande imprécision. De plus, il serait plus correct de considérer les distances absolues entre
les points et la droite plutôt que les distances verticales qui sont plus faciles à traiter. Pour
ces raisons, les régressions linéaires seront effectuées aux TP de Physique avec une macro
spéciale implémentée dans Excel et non pas avec l’outil standard de courbe de tendance.
Cela permettra en particulier de déterminer les incertitudes p et h sur les paramètres de
la droite.
Dans tous les cas, le résultat est indiqué sous la forme p  p0  p
Exemple: Vérification de la loi du pendule T  2 l g et détermination de l'accélération
terrestre g. On met d'abord la formule à vérifier sous la forme linéaire appropriée
T 2  4 2 l g .
Les variables mesurées expérimentalement sont les couples (li±Δli, Ti ±ΔTi), où Δli et ΔTi sont
les incertitudes sur les mesures de li et de Ti. La représentation linéaire exige de transformer
ces couples pour obtenir les grandeurs adéquates (li±Δli, Ti2±Δ(Ti2)) qui sont alors reportées
graphiquement comme indiqué sur la Fig. 6.
La pente p de la droite de régression correspond à p  4 2 g d’où l’on déduit l’accélération
terrestre g  4 2 p . L’erreur sur g s’obtient à partir de l’erreur sur la pente par la formule
générale (6): g 
g
4 2
p  2 p
p
p
Remarque: Dans ce cas, on peut appliquer directement la formule simplifiée (8) car on a ici
un quotient de sorte que les erreurs relatives s’ajoutent simplement:
4 2
g g  p p  g  (p p ) g  2 p
p
Fig. 6: Vérification expérimentale de la loi du pendule et détermination de l’accélération
terrestre g par la pente du graphique.
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