l'intolérance religieuse L 'l'intolérance religieuse est le discrimination une personne ou un groupe de personnes, en fonction de leur religion [1] [2]. index 1 Les causes de l'intolérance religieuse o 1.1 La religion de l'État 2 L'intolérance dans le monde contemporain 3 les organisations internationales pour la défense de la liberté religieuse o 3.1 Nations unies o 3.2 Union européenne 3.2.1 Parlement européen 3.2.2 Conseil européen 4 la législation nationale o 4.1 Italie o 4.2 D'autres pays 5 notes 6 bibliographie 7 Articles connexes Les causes de l'intolérance religieuse en religions polythéistes Il ne se produit pas le phénomène de 'intolérance [3] pour la multitude des dieux, cela signifie qu'il ya la divinité vraie et unique et tous sont à craindre [4]. L'intolérance se manifeste chez les anciens quand il y a une caste sacerdotale qui veut maintenir ses privilèges. Donc, il n'a pas été, par exemple, dans la politique religieuse de l'État romain adressée généralement à accueillir dans panthéon dieux étrangers nationaux qui peuvent être l'objet d'un culte à l'intérieur de ses frontières, mais en dehors de son territoire sacré, ou de faire des cultes officiels du dieu ennemi qui deviennent ainsi les nouveaux protecteurs du peuple victorieux. [5] Intolérance peuples anciens se manifeste plutôt contre ceux qui sont accusés d'introduire de nouveaux dieux, comme les philosophes qui seront déclarés coupables godlessness ou athéisme, comme dans le cas de Socrate, sur des accusations de vouloir répandre les principes qui portent atteinte à la moralité publique et religion nationale: « [...] Cela a la signature et le serment d'Apple Orchard Pommeraie, Pitthée contre Socrate Sophronisque, Alopecense. Socrate est coupable de ne pas reconnaître comme des dieux traditionnels de la ville, mais d'introduire une nouvelle Divinité; et il est également coupable de corrompre la jeunesse. Peine: mort [6] » Ainsi, le sénatus Rome prohibant bacchanales et supervise les cultes étrangers, se justifie non pas comme une volonté de défendre la religion de l'État, mais plutôt l'ordre moral et public garanti par la religion nationale, celui qui est pratiqué par des personnes laissé libre dans ses choix. L'intolérance est plutôt liée à la orthodoxie contenant des principes absolus et inviolables, dogmes révélé à partir d'une seule divinité et stocké de façon permanente dans les textes sacrés inaltérables et gardés par une caste sacerdotale. Tomber dans ces caractéristiques des religions supranationales et caractéristique universelle d'un église qui s'adresse aux personnes de toute race ou de nationalité, mais en même considérés dans leur individualité, qui est promis le salut, compris comme la libération du mal et de l'erreur. Ces religions ont l'origine d'un fondateur historique qui est présenté comme novateur par rapport aux croyances antérieures: « Orthodoxie est un concept étranger aux religions naturelles et nationales parce que naturel. , Il est à la place des religions bien fondée. Ce qui, comme ils sont originaires de l'œuvre d'un fondateur, ils portent de la naissance les germes d'un développement conforme à leur nature; Et quand ils ont été formés par la séparation et de protestation contre une autre religion, ainsi que dans leur développement qui accentuent leur génie séparatiste et « protestant »; et ainsi donner lieu par la suite à jamais de nouvelles formations (sept) du même type (par opposition à une autre dans la doctrine et dans le culte), selon une division progressive et processus subdivision - à savoir la différenciation progressive -, à travers laquelle il intensifie de plus en plus l'esprit original d'exclusivité et le séparatisme, et donc de l'intolérance et l'intransigeance [7]. » Ce phénomène d'intolérance est cependant pas eu lieu dans les religions fondées par un caractère mythique Elle a fait référence à un ensemble de doctrines mythologiques non catalogués dans les textes sacrés. Un exemple de ces religions était celle de mystères qui se propagent dans le monde grec ancien et Moyen Orient, avec un développement particulier hellénistique et par la suite époque romaine. Je suis retourné dans les mystères des religions nationales parce que dans leur fidèle manquait une attitude exclusiviste et séparatiste. Lorsque vers la fin du monde antique, même en l'absence d'une orthodoxie dans la religion syncrétique Roman, en particulier contre la Christianisme Il manifeste une certaine intolérance religieuse nature populaire justifiée par l'assimilation de la religion chrétienne à un crime contre l'Etat avec la condamnation conséquente des nouveaux croyants de religion qui refusent de reconnaître la divinité de l'empereur. Parmi les persécuteurs du début historiographique chrétienne comptés Flavio Claudio Giuliano (Quels chrétiens ont appelé Julien l'Apostat), le dernier empereur païen de Rome, qui, avec une politique religieuse » ... visant à la restauration du paganisme, a commencé par des actes de neutralité et a pris fin avec l'intolérance anti-chrétienne.[8]» [9] En fait, Giuliano priver seulement les chrétiens du droit d'enseigner la littérature (Homère, Virgilio, etc., ou mythologie polythéisme) parce que ces mythes se sont opposés frontalement. L'attitude chrétienne envers la religion antique avait aussi tourner à la violence si un élément de conflit entre eux et l'empereur Julien a été condamné à payer pour la reconstruction d'un temple païen sur le feu par les chrétiens[10][11]. De l’intolérance, de la discrimination et de la violence fondées sur la religion ou la conviction Le Conseil de l’Union européenne a publié le 21 février 2011 des conclusions sur la promotion et la protection de la liberté de religion ou de conviction sans aucune discrimination. Le Conseil est le principal centre de décision politique de l’Union européenne Le Conseil a adopté les conclusions suivantes : "Le Conseil réaffirme que l’Union européenne est résolument attachée à la promotion et à la protection de la liberté de religion ou de conviction sans aucune discrimination, et rappelle les conclusions générales qu’il a adoptées à cet égard le 16 novembre 2009. Le Conseil exprime sa profonde préoccupation concernant le nombre croissant de manifestations d’intolérance et de discrimination fondées sur la religion, dont témoignent les violences et les actes de terrorisme perpétrés récemment, dans différents pays, contre des chrétiens et leurs lieux de culte, des pèlerins musulmans et d’autres communautés religieuses, actes qu’il condamne fermement. Aucune région du monde n’est hélas épargnée par le fléau de l’intolérance religieuse. Le Conseil adresse ses condoléances et exprime sa solidarité aux pays concernés et aux victimes de ces actes et rend hommage aux pays pour leur détermination à prévenir de tels actes. La liberté de religion ou de conviction est un droit de l’homme universel, qui doit être protégé partout et pour tous. Les États ont pour premier devoir de protéger leurs citoyens, y compris les personnes appartenant à des minorités religieuses, ainsi que toutes les personnes relevant de leur juridiction, et de préserver leurs droits. Toutes les personnes appartenant à des communautés et à des minorités religieuses devraient pouvoir pratiquer leur religion et leur culte librement, individuellement ou en communauté, sans craindre d’être la cible de manifestations d’intolérance ou d’attaques. La liberté de religion ou de conviction est intrinsèquement liée à la liberté d’opinion et d’expression, ainsi qu’à d’autres droits de l’homme et libertés fondamentales, qui, ensemble, contribuent à la mise en place de sociétés pluralistes et démocratiques. La communauté internationale doit être plus ferme dans la manière dont elle réagit face à ceux qui veulent utiliser la religion comme instrument de division, alimentant ainsi l’extrémisme et la violence. Dans le cadre d’un renforcement des efforts déployés par l’UE dans l’action bilatérale et multilatérale qu’elle mène en faveur de la liberté de religion ou de conviction, l’UE et ses États membres restent attachés à la concrétisation de la liberté de religion ou de conviction dans toutes les régions du monde ; ce thème sera traité dans les rapports annuels de l’UE sur les droits de l’homme. L’UE continuera de nouer le dialogue avec les pays partenaires et de proposer sa coopération pour promouvoir la tolérance religieuse et protéger les droits de l’homme. Elle jouera un rôle plus actif dans les enceintes multilatérales, en particulier l’ONU, afin que la lutte contre l’intolérance religieuse recueille un soutien vigoureux provenant de toutes les régions. L’UE et ses États membres continueront de soutenir des initiatives dans le domaine du dialogue interculturel et interreligieux dans un esprit d’ouverture, de main tendue et de compréhension mutuelle, y compris les initiatives émanant de l’Alliance des civilisations des Nations unies, de l’UNESCO et de la Fondation Anna Lindh. Le Conseil se félicite des efforts déployés actuellement pour renforcer l’action menée par l’UE afin de promouvoir et de protéger la liberté de religion ou de conviction à la suite des conclusions du Conseil de 2009. Le Conseil invite la Haute Représentante à rendre compte des mesures prises et des propositions concrètes faites pour renforcer encore l’action de l’UE en la matière." Violence, intolérance, y a-t-il une spécificité de l'islam? Depuis qu’il n’a plus été possible à l’Occident d’ignorer la violence et les atrocités commises au nom de l’islam – disons, par commodité, depuis les attentats du 11 septembre 2001 – il n’a jamais manqué de bon esprits pour s’improviser théologiens, au débotté, et pour nous expliquer que, bien évidemment, ceux qui tuent et oppriment au nom de l’islam n’ont rien compris à la religion de Mahomet, qui est fondamentalement pacifique et tolérante, ou à tout le moins ni plus intolérante ni plus violente que les autres religions monothéistes. Ce discours désormais bien rodé se fait bien sûr particulièrement entendre lorsque se produit quelque attentat, ou bien que l’Occident se décide à combattre timidement des jihadistes devenus trop entreprenants – comme en ce moment. Dans ce contexte, je me suis donc dit qu’il ne serait pas malvenu de vous présenter cet article qui rappelle utilement quelques faits élémentaires que nos théologiens en herbe devraient connaître – s’ils se souciaient réellement de théologie, et de vérité. Bonne lecture ! Are judaism and christianity as violent as islam? Par Raymond Ibrahim, Middle East Quarterly, summer 2009 « Il y a bien plus de violence dans la Bible que dans le Coran ; l’idée que l’islam se serait imposé par l’épée est une fiction occidentale inventée durant le temps des croisades, lorsque c’étaient précisément les chrétiens occidentaux qui se livraient à une guerre sainte brutale contre l’islam1[1]. » Ainsi parle Karen Armstrong, une ancienne nonne qui se décrit comme une « monothéiste freelance ». Cette citation résume le plus influent de tous les arguments qui servent aujourd’hui à réfuter l’accusation selon laquelle l’islam serait violent et intolérant par nature : toutes les religions monothéistes, disent ceux qui avancent cet argument, et pas seulement l’islam, ne sont pas avares de textes violents et intolérants ainsi que d’évènements sanglants tout au long de leur histoire. Ainsi, lorsque les textes sacrés de l’islam – en premier lieu le Coran, suivi par les dits et faits de Mahomet (les hadiths) – sont mis en avant pour démontrer le caractère fondamentalement belliqueux de cette religion, la réponse immédiate sera que les autres livres sacrés, et notamment ceux du christianisme et du judaïsme, regorgent eux aussi de passages violents. Le plus souvent, cet argument met fin à toute discussion concernant le fait de savoir si la violence et l’intolérance sont propres à l’islam. A la place d’une telle discussion, la réponse par défaut devient : ce n’est pas l’islam en tant que tel mais plutôt les griefs et les frustrations des musulmans – sans cesse exacerbées par des facteurs économiques, politiques et sociaux – qui conduisent à la violence. Que cette manière de voir les choses s’accorde parfaitement avec l’épistémologie « matérialiste » de l’Occident sécularisé ne la rend que plus indiscutable. Par conséquent, avant de condamner le Coran et les hadiths parce qu’ils incitent à la violence et à l’intolérance, les juifs sont invités à considérer l’histoire des atrocités commises par les Hébreux, telles que les rapportent leurs propres textes sacrés ; les chrétiens seraient bien avisés de se pencher sur les violences que leurs prédécesseurs ont commis au nom de la foi, aussi bien contre les nonchrétiens que contre leurs coreligionnaires. Autrement dit, juifs et chrétiens devraient se souvenir qu’avant de critiquer il vaut mieux balayer devant sa porte. Mais est-ce réellement le cas ? L’analogie avec les autres textes sacrés est-elle légitime ? La violence des Hébreux dans les temps anciens, et la violence des chrétiens au moyen-âge, peut elle se comparer à, et excuser, la persistance de la violence musulmane à l’ère moderne ? Tout comme Armstrong, un grand nombre d’écrivains, d’historiens et de théologiens éminents ont défendu cette conception « relativiste ». Par exemple, John Esposito, directeur du centre Alwaleed bin Talal pour l’entente islamo-chrétienne à l’université de Georgetown, s’interroge : Comment se fait-il que nous posions sans cesse la même question [au sujet de la violence de l’islam] et que nous ne posions pas cette question à propos du christianisme et du judaïsme ? Les juifs et les chrétiens ont commis des actes de violence. Nous avons tous un côté transcendant et un côté obscur… nous avons notre propre théologie de la haine. Au sein du christianisme et du judaïsme majoritaire, nous avons tendance à être intolérants ; nous souscrivons à une théologie exclusiviste : eux contre nous2[2]. Un article de Philip Jenkins, professeur d’humanités à Pennsylvania State University, intitulé Dark Passages, dessine cette position avec le plus de force. Il s’agit de montrer que la Bible est plus violente que le Coran. En ce qui concerne le fait d’ordonner des actes violents et des massacres, l’idée simpliste que la Bible serait supérieure au Coran se révèle totalement fausse. En réalité, la Bible déborde de « textes de terreur », pour reprendre un terme forgé par le théologien américain Phyllis Trible. La Bible contient bien plus de versets glorifiant la violence ou y exhortant que le Coran, et la violence biblique est souvent bien plus extrême, et marquée par une sauvagerie plus indiscriminée… si les textes fondateurs structurent la religion toute entière, alors le judaïsme et le christianisme méritent une condamnation sans appel comme religions de la sauvagerie3[3]. Plusieurs histoires tirées de la Bible ainsi que de l’histoire judéo-chrétienne, illustrent le propos de Jenkins, mais deux en particulier – l’une censée être représentative du judaïsme, l’autre du christianisme – sont régulièrement mentionnées et méritent par conséquent un examen plus attentif. La conquête du pays de Canaan par les Hébreux, vers 1200 avant JC, est souvent caractérisée comme un « génocide », et est devenue pratiquement emblématique de la violence et de l’intolérance biblique. Dieu a dit à Moïse : Mais dans les villes de ces peuples dont l'Éternel, ton Dieu, te donne le pays pour héritage, tu ne laisseras la vie à rien de ce qui respire. Car tu dévoueras ces peuples par interdit, les Héthiens, les Amoréens, les Cananéens, les Phéréziens, les Héviens, et les Jébusiens, comme l'Éternel, ton Dieu, te l'a ordonné, afin qu'ils ne vous apprennent pas à imiter toutes les abominations qu'ils font pour leurs dieux, et que vous ne péchiez point contre l'Éternel, votre Dieu. (Deutéronome 20:16) Josué battit tout le pays, la montagne, le midi, la plaine et les coteaux, et il en battit tous les rois; il ne laissa échapper personne, et il dévoua par interdit tout ce qui respirait, comme l'avait ordonné l'Eternel, le Dieu d'Israël. (Josué 10:40) En ce qui concerne le christianisme, dans la mesure où il est impossible de trouver des versets du Nouveau Testament qui incitent à la violence, ceux qui souscrivent à l’idée que le christianisme est aussi violent que l’islam s’appuient sur des évènements historiques, tels que les croisades qui furent menés par les chrétiens européens entre le 11ème et le 13ème siècle. Les croisades furent effectivement violentes et conduisirent à des atrocités, selon les critères du monde moderne, commises sous la bannière de la croix et au nom du christianisme. Après avoir pris d’assaut les remparts de Jérusalem en 1099, par exemple, il est dit que les Croisés massacrèrent presque tous les habitants de la cité sainte. Selon la chronique médiévale Gesta Danorum « Le massacre fut si grand que nos hommes pataugeaient dans le sang jusqu’aux chevilles. » A la lumière de ce qui précède, Armstrong, Jenkins, Esposito, et d’autres encore, demandent : comment les juifs et les chrétiens peuvent-ils affirmer que le Coran est la preuve de la violence de l’islam, tout en ignorant leurs propres textes et leur propre histoire ? La réponse est que de telles observations confondent l’histoire et la théologie en mettant sur le même plan les actions temporelles des hommes et ce qui est censé être la parole immuable de Dieu. L’erreur fondamentale est de confondre l’histoire judéo-chrétienne – qui est parsemée de violence – avec la théologie islamique – qui ordonne la violence. Bien évidemment, les trois religions monothéistes ont toutes eu leur lot de violence et d’intolérance envers « l’autre ». La question essentielle est donc de savoir si cette violence est ordonnée par Dieu ou bien si des hommes belliqueux ont simplement prétendu qu’il en était ainsi. La violence de l’Ancien Testament est un exemple intéressant. Dieu a clairement ordonné aux Hébreux d’annihiler les habitants du pays de Canaan et les peuples alentour. Cette violence est donc une expression de la volonté divine, pour le meilleur ou pour le pire. Néanmoins, tous les actes historiques de violence commis par les Hébreux et rapportés par l’Ancien Testament ne sont rien d’autre que cela – de l’histoire. Ils se sont produits, parce que Dieu les a commandés. Mais ils étaient attachés à un temps et à un lieu particulier et étaient dirigés contre un peuple spécifique. A aucun moment une telle violence n’est devenue la norme ou n’a été codifiée dans la loi juive. En résumé, les récits bibliques de violence sont descriptifs, pas prescriptifs. Et c’est là que la violence islamique est unique. Bien que similaire à la violence de l’Ancien Testament – ordonnée par Dieu et manifestée au cours de l’histoire – certains aspects de la violence islamique ont été codifiés dans la loi islamique et valent pour tous les temps. Ainsi, si la violence que l’on peut trouver dans le Coran a un contexte historique, sa signification ultime est théologique. Considérez par exemple les versets coraniques suivants, plus connus sous le nom de « versets de l’épée » : Une fois passés les mois sacrés, tuez les incroyants où que vous les trouviez. Prenez-les, assiégez-les, dressez-leur des embuscades. S’ils se repentent, font la prière, acquittent l’aumône, laissez-leur le champ libre, car Dieu pardonne, il a pitié. (Coran 9:5) Combattez ceux qui ne croient ni en Allah ni au Jour dernier, qui n'interdisent pas ce qu'Allah et Son messager ont interdit et qui ne professent pas la religion de la vérité, parmi ceux qui ont reçu le Livre, jusqu'à ce qu'ils versent la capitation par leurs propres mains, après s'être humiliés. (Coran 9:29) De même que les versets de l’Ancien Testament dans lesquels Dieu ordonne aux Hébreux d’attaquer et tuer leurs voisins, les versets de l’épée ont un contexte historique. Dieu donna ces commandements après que les musulmans, sous la direction de Mahomet, soient devenus suffisamment puissants pour envahir leurs voisins païens et chrétiens. Mais à la différence des anecdotes et des versets belliqueux de l’Ancien Testament, les versets de l’épée sont devenus fondamentaux pour les relations ultérieures de l’islam à la fois avec les « peuples du livre » (c’est-àdire les juifs et les chrétiens) et les « idolâtres » (hindouistes, bouddhistes, animistes, etc.), et en fait, ces versets ont lancé les conquêtes musulmanes, qui ont changé à jamais la face du monde. En se basant sur le Coran (9:5) par exemple, la loi islamique stipule que les idolâtres et les polythéistes doivent se convertir à l’islam ou bien être tués ; simultanément, le Coran 9:29 est la source première des pratiques discriminatoires bien connues pratiquées par les musulmans envers les chrétiens et les juifs conquis et vivant sous la souveraineté islamique. En fait, en se basant sur les versets de l’épée ainsi que sur d’innombrables autres versets et paroles attribuées à Mahomet, les savants islamiques, sheikhs, muftis et imams, ont tous, à travers les âges, atteint un consensus – un consensus contraignant pour la communauté musulmane toute entière selon lequel l’islam doit être en guerre perpétuelle avec le monde non-islamique jusqu’à ce que le premier subjugue le second. En effet, il est très largement admis par les savants musulmans que les versets de l’épée, parce qu’ils figurent parmi les dernières révélations au sujet des rapports de l’islam avec les non-musulmans, ont à eux seuls abrogés presque 200 versets antérieurs, et plus tolérants, du Coran, tels que « pas de contrainte en religion » (Coran 2:256). Le célèbre savant musulman Ibn Khaldun (1332-1406), admiré en Occident pour ses vues « progressistes », apporte aussi un démenti à l’idée que le jihad serait une guerre défensive : Dans l’institution religieuse islamique, la guerre sainte est une prescription religieuse en raison de l’universalité de l’appel en vue d’amener la totalité des hommes à l’islam de gré ou de force. C’est pourquoi le califat et la souveraineté temporelle y ont été établis de telle façon que ceux qui en ont la charge puissent exercer leur force dans les deux domaines à la fois. Pour les autres institutions religieuses [chrétiennes et juives], leur mission n’y est pas universelle, pas plus que la guerre sainte n’y est prescrite, sauf seulement pour se défendre. Celui donc qui y est en charge de la religion ne s’occupe en rien de la conduite des affaires politiques. La souveraineté temporelle échoit seulement à quelqu’un de façon accidentelle et pour des raisons autres que religieuses c’est-à-dire en vertu des exigences de l’esprit de corps qui porte naturellement à rechercher le pouvoir. Ils ne sont pas chargés, en effet, de se rendre maître des nations comme c’est le cas de l’institution religieuse islamique. Il est seulement requis d’eux qu’ils observent leur religion en privé4[4]. Les savants modernes sont en accord avec cette description. Dans The Encylopaedia of Islam, l’article « Jihad » par Emile Tyan affirme que « l’expansion de l’islam par les armes est un devoir religieux pour les musulmans en général… le jihad doit continuer à être mené jusqu’à ce que le monde entier soit dominé par l’islam… l’islam devrait être complètement transformé avant que la doctrine du jihad puisse être éliminé ». Le juriste irakien Majid Khaduri (1909-2007), après avoir affirmé que jihad et guerre étaient synonymes, écrit « le jihad est considéré par tous les juristes, pratiquement sans exception, comme une obligation collective pour l’ensemble de la communauté musulmane5[5]. » Et, bien entendu, les manuels de droit islamique écrits en arabe sont encore plus explicites6[6]. Lorsque les versets violents du Coran sont juxtaposés avec leurs équivalents dans l’Ancien Testament, on peut voir que les premiers se distinguent par l’usage d’un langage qui transcende le temps et l’espace et qui incite les croyants à attaquer et tuer les incroyants aujourd’hui tout autant qu’hier. Dieu a commandé aux Hébreux de tuer les Hittites, les Amorites, les Canaanites, les Perizzites, les Hivites et les Jésubites – des peuples particuliers, liés à un lieu et à un temps particulier. A aucun moment Dieu n’a donné aux Hébreux, et par extension à leurs descendants juifs, un ordre sans limitation de temps et de lieu de combattre et de tuer les gentils. A l’inverse, bien que les ennemis originels de l’islam aient, comme ceux du judaïsme, eu une existence historique (c’est-àdire les Byzantins et les Zoroastriens), le Coran les désigne rarement par leurs noms propres. Au lieu de cela, les musulmans sont enjoints de combattre les peuples du livre « jusqu'à ce qu'ils versent la capitation par leurs propres mains, après s'être humiliés » et de « tuer les incroyants où que vous les trouviez. » Les deux conjonctions arabes « jusque » (hata) et « où que » (haythu) montrent le caractère perpétuel et omniprésent de ces commandements : il y a toujours des « peuples du livre » qui doivent être « entièrement soumis » (particulièrement sur le continent américain, en Europe, et en Israël) et des « idolâtres » qui doivent être tués « où qu’ils soient » (particulièrement en Asie et en Afrique sub-saharienne). En fait, la caractéristique principale de presque tous les commandements violents que l’on peut trouver dans les textes sacrés de l’islam, c’est leur nature générique et illimitée, dans le temps et l’espace. « Et combattez-les [les incroyants] jusqu'à ce qu'il ne subsiste plus d’idolâtrie, et que la religion soit entièrement à Allah. » (Coran 8:39) De la même manière selon une tradition bien attestée qui apparaît dans les hadiths, Mahomet aurait déclaré : J’ai reçu le commandement de faire la guerre au genre humain jusqu’à ce que tous attestent qu’il n’y a de dieu que Dieu et que Mahomet est le messager de Dieu ; et qu’ils fassent la prière, et acquittent l’aumône. S’ils font ainsi, leur vie et leurs propriétés sont sauves7[7]. [C’est moi qui souligne] Cet aspect linguistique est crucial pour comprendre l’exégèse des textes sacrés qui traitent du sujet de la violence. Et à nouveau, il est nécessaire de répéter que ni les textes juifs ni les textes chrétiens – l’Ancien et le Nouveau Testament, respectivement – n’énoncent de tels commandements perpétuels et illimités. En dépit de cela, Jenkins se lamente sur le fait que : Les commandements de tuer, de commettre des nettoyages ethniques, d’institutionnaliser la ségrégation, de craindre et de haïr les autres races et les autres religions… se trouvent tous dans la Bible, et se répètent bien plus fréquemment que dans le Coran. Nous pouvons, à chaque fois, argumenter au sujet de la signification de ces passages, et notamment pour savoir s’ils doivent être considérés comme pertinents pour les temps ultérieurs. Mais il n’en demeure pas moins que ces mots sont là, et que leur inclusion dans les saintes écritures signifie qu’ils sont, littéralement, canonisés, au même titre que dans les textes musulmans. On s’interroge sur ce que Jenkins a à l’esprit lorsqu’il emploie le mot « canoniser ». Si par canoniser il veut dire que de tels versets sont considérés comme faisant partie du canon des écritures judéochrétiennes, il a incontestablement raison ; à l’inverse, si par canoniser il veut dire ou laisser entendre que ces versets font partie de la Weltanschauung judéo-chrétienne, il a totalement tort. Cependant, il n’est pas nécessaire de s’appuyer sur des arguments purement exégétiques et philologiques : à la fois l’histoire et les évènements récents apportent un démenti au relativisme de Jenkins. Alors que durant le premier siècle de son histoire le christianisme se diffusa par le sang de ses martyrs, durant son premier siècle d’existence l’islam se répandit par la conquête et le carnage. En fait, du premier jour jusqu’à aujourd’hui, l’islam – à chaque fois qu’il l’a pu – s’est répandu par la conquête, comme en témoigne le fait que la plus grande partie de ce qui est maintenant connu comme le monde musulman, ou dar-al-islam, fut conquis par l’épée de l’islam. Il y a là un fait historique, attesté par les historiens musulmans les plus autorisés. Même la péninsule arabique, la « patrie » de l’islam, fut conquise avec force violence et massacres, comme le montrent les guerres de Ridda qui suivirent la mort de Mahomet et durant lesquelles des dizaines de millier d’arabes furent passés au fil de l’épée par le premier calife Abu Bakr pour avoir abandonné l’islam. Par ailleurs, en ce qui concerne l’explication standard utilisée de nos jour pour excuser la violence islamique – à savoir que celle-ci est le produit de la frustration des musulmans vis-à-vis de l’oppression politique ou économique dont ils sont victimes – il est nécessaire de poser la question : qu’en est-il de tous les chrétiens opprimés dans le monde d’aujourd’hui, des juifs, des hindous, des bouddhistes ? Où donc est leur violence exercée au nom de leur foi ? Le fait n’est pas contestable : bien que le monde musulman se taille la part du lion en matière de gros titres dramatiques – violence, terrorisme, attaques suicides, décapitation - il n’est certainement pas la seule partie du monde à souffrir de pressions à la fois internes et externes. Par exemple, bien que pratiquement toute l’Afrique sub-saharienne soit actuellement en proie à la corruption, à l’oppression et à la pauvreté, en termes de violence, de terrorisme, et de chaos pur et simple, la Somalie – qui se trouve être le seul pays sub-saharien qui soit entièrement musulman – l’emporte de loin sur tous les autres. De plus, les principaux responsables de la violence en Somalie, qui appliquent partout où ils le peuvent des mesures législatives intolérantes et draconiennes – les membres du groupe jihadiste Al-Shabab – revendiquent et justifient toutes leurs actions en se référant à l’islam. Au Soudan également, le gouvernement islamiste de Khartoum mène contre les chrétiens et les polythéistes un véritable génocide qui aboutit à la mort de près d’un million « d’infidèles » et « d’apostats ». Que l’Organisation de la Conférence Islamique ait apporté son soutien au président soudanais Hassan Ahmad al-Bashir, qui est recherché par la Cour Pénale Internationale, est par ailleurs révélateur du fait que l’organisation islamique approuve la violence envers les nonmusulmans et ceux considérés comme insuffisamment musulmans. L’Amérique latine et les pays d’Asie non musulmans ont aussi leur part de régimes oppressifs, autoritaires, de pauvreté, et de tout ce dont souffre le monde musulman. Pourtant, à la différence de ce qui se produit presque quotidiennement dans le monde islamique, nul n’entend parler de Chrétiens, de Bouddhistes, ou d’Hindous pratiquants qui lanceraient des véhicules bourrés d’explosifs dans les bâtiments officiels de gouvernements oppressifs (par exemple les gouvernements communistes de Cuba ou bien de la Chine), tout en brandissant leurs écritures saintes et en hurlant « Jésus [ou Bouddha, ou Vishnu] est grand ! » Pourquoi ? Il est un dernier point qui est souvent négligé – soit par ignorance soit par malhonnêteté – par ceux qui affirment que la violence et l’intolérance sont, d’une manière générale, également présentes dans toutes les religions. Outre la parole divine contenue dans le Coran, le comportement de Mahomet – son exemple ou Sunna – est une source extrêmement importante de la législation islamique. Les musulmans sont encouragés à suivre l’exemple de Mahomet dans toutes les circonstances de la vie : « vous avez dans le Messager d'Allah un excellent modèle [à suivre] » (Coran33:21). Et la ligne de conduite de Mahomet envers les non musulmans est dépourvue d’ambiguïté. Par exemple, argumentant de manière sarcastique contre le concept d’islam modéré, Oussama Ben Laden – qui bénéficie du soutien de la moitié du monde arabo-musulman si l’on en croit un sondage de la chaîne Al-Jazeera – décrit ainsi l’exemple (sunna) donné par le prophète : Notre prophète a fait preuve de « modération » lorsqu’il était à Médine, en ne restant pas plus de trois mois sans mener des raids ou sans envoyer des raids sur les terres des infidèles pour prendre leurs forteresses, saisir leurs biens, leurs vies, leurs femmes8[8]. En fait, en se basant à la fois sur le Coran et sur la sunna, voler et piller les infidèles, réduire leurs enfants en esclavage et transformer leurs femmes en concubines sont des activités légitimes9[9]. Et le concept de sunna – qui donne son nom à près de 90% du milliard et demi de musulmans – signifie essentiellement que tout ce qui a été fait ou approuvé par Mahomet, le spécimen d’homme le plus parfait qui ait existé, est valable pour les musulmans aujourd’hui tout autant qu’hier. Ceci ne signifie pas, bien sûr, que la grande masse des musulmans vivent seulement pour piller et violer. Cela signifie en revanche que les personnes qui sont naturellement inclines à de telles activités, et qui se trouvent aussi être musulmanes, peuvent aisément justifier leurs actions en se référant à la sunna du prophète – et le font ; à la manière, par exemple, dont Al-Quaeda a justifié ses attaques du 11 septembre 2001, durant lesquelles des innocents, y compris des femmes et des enfants, ont été tués : Mahomet a autorisé ses partisans à faire usage de catapultes durant le siège de la ville de Ta’if en 630 – les habitants de la ville avaient refusé de se rendre – bien qu’il ait su que des femmes et des enfants y étaient abrités. De même, lorsqu’on l’a interrogé pour savoir s’il était permis de lancer des raids de nuit ou de mettre le feu aux fortifications des infidèles si des femmes et des enfants étaient parmi eux, le prophète aurait répondu : « Ils [les femmes et les enfants] sont issus de leurs rangs [les infidèles]10[10]. » Bien que centré sur la loi et potentiellement formaliste, le judaïsme n’a pas d’équivalent de la sunna : les dits et les faits de patriarches, bien qu’ils soient décrits dans l’Ancien Testament, n’ont jamais fait partie de la loi juive. Ni les pieux mensonges d’Abraham, ni la perfidie de Jacob, ni l’irascibilité de Moïse, ni l’adultère de David, ni les infidélités de Salomon n’ont jamais servi d’exemple pour les juifs ou les chrétiens. Leurs faits et gestes étaient compris comme des actes historiques, perpétrés par des hommes faillibles, qui le plus souvent étaient punis par Dieu pour leur comportement moins qu’idéal. En ce qui concerne le christianisme, l’essentiel de la loi de l’Ancien Testament a été abrogée ou accomplie – selon la perspective que l’on adopte – par Jésus. « Œil pour œil » fut remplacé par « tendre l’autre joue. » Aimer entièrement Dieu et son prochain devint la loi suprême (Matthieu 22:38-40). Qui plus est, la sunna de Jésus – comme dans : « qu’aurait fait Jésus à ma place ? » - est caractérisée par la passivité et l’altruisme. Le Nouveau Testament ne contient absolument aucune exhortation à la violence. Pourtant, certains essayent de dépeindre Jésus comme ayant en un ethos militant semblable à celui de Mahomet, en citant le verset dans lequel le premier – « qui parlait à la foule en paraboles et ne leur disait rien sans employer de paraboles » (Matthieu 13:34) – déclare : « Ne pensez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre: je suis venu apporter, non la paix, mais l'épée » (Matthieu 10:34). Mais le contexte de cette déclaration montre clairement que Jésus ne commandait pas de commettre des violences contre les non-chrétiens mais était plutôt en train de prédire qu’il existerait de la discorde entre les chrétiens et leur entourage – une prédiction qui ne s’est révélée que trop vraie, les premiers chrétiens, bien loin de prendre l’épée, mourant passivement en martyr, comme cela leur arrive encore trop souvent dans le monde musulman. D’autres soulignent la violence prédite dans le Livre de la Révélation, en négligeant, une fois encore, de prendre en compte le fait que le récit est descriptif – sans même parler du fait qu’il est, à l’évidence, symbolique – et par conséquent qu’il peut difficilement être prescriptif pour les chrétiens. En tout état de cause, comment peut-on sérieusement comparer cette poignée de versets du Nouveau Testament qui mentionnent le mot « épée » aux centaines d’injonctions coraniques et de déclarations de Mahomet qui commandent clairement aux musulmans de prendre une épée très réelle contre les non-musulmans ? Sans se laisser démonter par tout cela, Jenkins se lamente sur le fait que, dans le Nouveau Testament, les juifs « projettent de lapider Jésus, ils complotent pour le tuer ; en retour Jésus les appelle des menteurs, des enfants du Diable. » Il reste à savoir si être appelé « enfants du Diable » est plus offensant que de se voir traiter de descendants de singes et de porcs – ce qui est la manière dont le Coran désigne les juifs11[11]. Mais en dehors des noms d’oiseaux, cependant, ce qui importe ici est que, tandis que le Nouveau Testament n’ordonne pas aux chrétiens de traiter les juifs comme des « enfants du Diable », la loi islamique, en se fondant notamment sur le Coran 9:29, fait obligation aux musulmans de soumettre les juifs, et, en fait, tous les non-musulmans. Cela signifie-t-il qu’aucun de ceux qui se définissent comme chrétiens ne peut être antisémite ? Non, bien entendu. Mais cela signifie que les chrétiens antisémites sont des oxymores vivants – pour la simple raison que le christianisme, textuellement et théologiquement, bien loin d’enseigner la haine et l’animosité, insiste sans ambiguïté sur l’amour et le pardon. Savoir si tous les chrétiens suivent ces injonctions n’est pas vraiment la question, pas plus que de savoir si tous les musulmans se conforment à l’obligation de faire le jihad. La seule question est : que commandent les religions ? Par conséquent, John Esposito a raison d’affirmer que « Les juifs et les chrétiens ont commis des actes de violence. » En revanche il a tort d’ajouter : « nous [les chrétiens] avons notre propre théologie de la haine. » Rien dans le Nouveau Testament n’enseigne la haine – certainement rien qui puisse se comparer aux injonctions coraniques telles que : « Nous vous désavouons, vous et ce que vous adorez en dehors d'Allah. Nous vous renions. Entre vous et nous, l'inimitié et la haine sont à jamais déclarées jusqu'à ce que vous croyiez en Allah, seul. » (Coran, 60:4). Et c’est à partir de ce point qu’il est le mieux possible de comprendre les croisades – des événements historiques qui ont été totalement déformés par les nombreux défenseurs influents de l’islam. Karen Armstrong, par exemple, s’est pratiquement bâti une carrière en dénaturant les croisades. Elle écrit, par exemple, que « l’idée selon laquelle l’islam s’est imposé par l’épée est une fiction occidentale, forgée durant la période des croisades, lorsque c’étaient en fait les chrétiens d’Occident qui menaient une violente guerre sainte contre l’islam. » Qu’une ancienne nonne condamne férocement les croisades en regard de tout ce que l’islam a pu faire ne rend sa critique que plus vendeuse. Des affirmations comme celles-ci ignorent le fait que, depuis les débuts de l’islam, plus de 400 ans avant les croisades, les chrétiens avaient remarqué que cette religion nouvelle se répandait par l’épée12[12]. Et effectivement, des historiens musulmans faisant autorité et écrivant des siècles avant les croisades, tels que Ahmad Ibn Yahya al-Baladhuri (892) et Muhammad ibn Jarir at-Tabari (838-923) indiquent clairement que l’islam s’est propagé par la force. Le fait demeure : les croisades furent une contre-attaque vis-à-vis de l’islam, et non pas une agression injustifiée comme le dépeignent Armstrong et d’autres historiens révisionnistes. L’éminent historien Bernard Lewis explique bien les choses : Même la croisade chrétienne, qui est souvent comparée au jihad musulman, était une réponse différée et limitée au jihad et aussi en partie une imitation de celui-ci. Mais à la différence du jihad, son but premier était la défense ou la reconquête des territoires chrétiens perdus ou menacés. A quelques exceptions près, elle fut limitée aux guerres victorieuses pour la reconquête du sud-ouest de l’Europe, et aux guerres infructueuses pour reconquérir la Terre Sainte et pour arrêter l’avancée des Ottomans dans les Balkans. Par comparaison, le jihad musulman était conçu comme illimité, comme une obligation religieuse qui perdurerait jusqu’à ce que le monde entier se soit converti à l’islam ou bien soit soumis à la loi musulmane13[13]. Qui plus est, les invasions musulmanes et les atrocités commises contre les chrétiens étaient en augmentation dans les décennies qui précédèrent le lancement des croisades en 1096. Le calife fatimide Abu Ali Mansur Tariqu’l-Hakim (qui régna de 996 à 1021) profana et détruisit nombre d’églises importantes – telles que l’église Saint Marc en Egypte ou l’église du Saint Sépulcre à Jérusalem – et pris des mesures encore plus oppressives que les règles habituelles concernant les chrétiens et les juifs. Puis, en 1071, les Turcs Seldjoukides écrasèrent les Byzantins lors de la bataille décisive de Manzikert et, en pratique, conquirent une grande partie de l’Anatolie byzantine, préparant la voie pour la prise de Constantinople des siècles plus tard. C’est dans ce contexte que le Pape Urbain II lança son appel à la croisade : Des confins de Jérusalem et de la ville de Constantinople nous sont parvenus de tristes récits ; souvent déjà nos oreilles en avaient été frappées, des peuples du royaume des Persans [c’est-à-dire les Turcs musulmans]… , a envahi en ces contrées les terres des chrétiens, les a dévastées par le fer, le pillage, l'incendie, a emmené une partie d'entre eux captifs dans son pays, en a mis d'autres misérablement à mort, a renversé de fond en comble les églises de Dieu, ou les a fait servir aux cérémonies de son culte. Bien que la description faite par Urbain II soit historiquement exacte, le fait demeure : quelle que soit la manière dont on interprète ces guerres – comme offensives ou défensives, justes ou injustes – il est évident qu’elles n’étaient pas fondées sur l’exemple de Jésus, qui enjoignait à ceux qui le suivaient : « Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous persécutent. » (Matthieu, 5:44). Et de fait, il fallu des siècles de débats théologiques, de Saint Augustin à Thomas d’Aquin, pour justifier la guerre défensive – sous le nom de « guerre juste ». Ainsi, il semblerait que ce soient les Croisés – et non pas les jihadistes – qui aient été peu fidèles à leurs saintes écritures (d’un point de vue littéral) ; ou, inversement, ce sont les jihadistes – pas les Croisés – qui ont scrupuleusement suivi les prescriptions de leurs textes sacrés (là aussi d’un point de vue littéral). Qui plus est, tout comme les récits violents de l’Ancien Testament, les croisades sont par nature des évènements historiques, et non pas la manifestation d’une vérité biblique profonde. Bien loin de révéler quoique ce soit d’intrinsèque au christianisme, les croisades, ironiquement, permettent de mieux comprendre l’islam. Car ce que les croisades ont démontré une fois pour toutes c’est que, quels que soient les enseignements de la religion – et en fait, dans le cas des croisades dites chrétiennes, en dépit de ces enseignements – l’homme est souvent prédisposé à la violence. Mais ceci amène à poser la question : si c’est ainsi que se comportèrent des chrétiens – à qui il est demandé d’aimer, de bénir, et de faire du bien à ceux qui les haïssent, les maudissent et les persécutent – ne doit-on pas s’attendre à bien pire de la part des musulmans qui, tout en partageant la même propension à la violence, reçoivent en plus de la part de la divinité l’ordre d’attaquer, de tuer, et de piller les infidèles ? aire la guerre, vivre la guerre, voir la guerre : trois temporalités et trois niveaux d’analyse dans l’approche par la culture de guerre de ce quasi demi-siècle. Notre réflexion d’histoire culturelle sur la période considérée s’inscrit ici précisément dans le cadre de l’approche par la culture de guerre (violence, haine, consentement, eschatologie de la guerre) [1][1]On renvoie au débat historiographique sur la notion : S.…. Si les renouvellements historiographiques nationaux sur l’étude du phénomène guerrier dans les sociétés occidentales et japonaise ne sont pas comparables, force est de reconnaître un déplacement des études sur les relations des sociétés à la guerre. Au fond, ce qui a intéressé l’historien, c’est sans doute, en règle générale, davantage le dialogue institué au sein du couple société-guerre que l’étude anthropologique du phénomène guerrier en soi. C’est cette relation des sociétés à la guerre qui fait surgir de nouveaux problèmes et pousse à la quête d’objets d’étude inédits [2][2]Jacques Le Goff, Pierre Nora (dir.), Faire de l’histoire,…. Le troisième terme de la problématique de la question d’agrégation ne saurait être oublié : l’intitulé de la question aurait-elle, au fond [3][3]Stéphane Audoin-Rouzeau, Henry Rousso (dir.), « Bibliographie…, valeur d’hypothèse, à savoir que la guerre a marqué davantage les sociétés que la paix, toutes générations confondues ? Elle suggère, au contraire, l’évaluation des nouvelles formes et normes de la paix dans le système international, tout comme l’émergence de nouvelles conflictualités. Aussi s’en tient-on ici à examiner quelques objets et problématiques récents des fronts historiographiques pionniers, sans souci d’inventaire exhaustif. 2 Faire la guerre conduit à entrer dans des temporalités humaines et sociales, techniques et professionnelles, qui ressortissent de l’activité guerrière dans les sociétés d’Occident et du Japon. Le registre de l’historien invite à dater le début et la fin, l’entrée et la sortie de la guerre, partant de l’idée que les représentations de celle-ci s’exercent à deux moments. Elles jouent avant un conflit, par un travail d’anticipation inséré dans l’imaginaire des sociétés, comme après celle-ci (à travers la commémoration, le deuil). C’est, d’une part, le processus complexe de l’anticipation, d’emboîtement de la mémoire et des marques des conflits précédents qui enchaînent les comportements une génération plus tard, à l’instar de l’image du franc-tireur du conflit de 1870 au début de la guerre de 1914, ou du souvenir de l’invasion et de l’occupation par l’adversaire (l’Allemand pour l’Alsacien, les troupes noires en Allemagne [4][4]Jean-Yves Le Naour, La honte noire. L’Allemagne et les troupes……). La thèse de Jean-Jacques Becker sur l’entrée en guerre des Français en 1914 a montré le chemin à nombre d’études [5][5]Jean-Jacques Becker, 1914. Comment les Français sont entrés en…. La problématique est désormais classique. Aussi bien a-t-elle été appliquée à d’autres aires géographiques et culturelles (le Portugal en 1914 dans l’étude de Nuno Texeira en 1998, le colloque de Nanterre sur les sociétés européennes et la guerre en 1988 [6][6]Nuno Severiano Texeira, L’Entrée du Portugal dans la Grande…), ainsi qu’à d’autres segments chronologiques du sujet avec les débuts de la seconde guerre mondiale dans l’historiographie politique et des relations internationales. C’est moins une lecture politique qu’idéologique de l’entrée en guerre de l’État qui s’invite dans la question. La défense de la paix, au prix de la grève et du sabotage de la mobilisation, anime le débat du mouvement ouvrier international, des associations luttant pour la paix avant 1914 comme avant 1939. C’est donc l’interrogation, politique comme sociale, de la résistance ou de l’acceptation de la guerre (à aucun prix) comme de la paix (à tout prix) qui est posée. À l’instar de la guerre de 1914-1918, nombreux sont les conflits acceptés, consentis, c’est-à-dire assumés pendant le déroulement du conflit par les sociétés, et refusés après qu’ils se soient déroulés. L’intensité de l’acceptation et du refus varient naturellement selon les moments, les pays, les groupes sociaux, les individus. 3 À l’autre terme chronologique de la question, les sorties de guerre ont attiré l’œil de l’historien depuis une dizaine d’année, isolant une temporalité propre dans l’histoire des sociétés face à la guerre. C’est surtout sous l’angle des mobilisations et des démobilisations militaires, culturelles, économiques, mémorielles que les recherches se sont précisées. Curieusement, une certaine étanchéité des analyses portées sur la Première Guerre mondiale et la Deuxième Guerre mondiale caractérise l’historiographie européenne sur cette question des mobilisations-démobilisations. Elle tend à s’atténuer dans les travaux les plus récents, qui soulignent les continuités d’un conflit mondial à l’autre, tenues par des conflits intermédiaires (la question polonaise entre la Russie-URSS et l’Allemagne par exemple, la place particulière des empires dans ces conflits…). Le regard comparé sur les entrées et les sorties de ces deux conflits relie des expériences de guerre très diverses selon les lieux et les « fronts », les moments et les contextes. Cette démarche fonde évidemment la nécessité de multiplier les études de cas, variant les perspectives et montrant la singularité des expériences de guerre. 4 Les notions de mobilisation-démobilisation-remobilisation se révèlent alors très fécondes pour entrer dans la mémoire des conflits. La mémoire d’un conflit, avant d’être le propre d’une expérience individuelle et collective, est d’abord une propriété d’État et une appropriation publique, nationale ou internationale. Au fond, les enjeux de la mémoire officielle imposent une mobilisation culturelle sans cesse renouvelée des sociétés. Celles-ci sont travaillées par les fêtes nationales, puis internationales (le 8 mai pour 1945), par le phénomène commémoratif, avec ses double processus d’inclusion et d’exclusion, d’appropriation et d’oubli sélectifs. On passe ostensiblement de l’étude du deuil officiel à celle du deuil privé, dont le trait d’union est l’expression et la signification publique : doit-on parler de sociétés en deuil, d’un deuil national eu égard au poids démographique des morts et à l’hommage qui leur est rendu ? L’étude des monuments aux morts est ici révélatrice des jeux de mémoire dans les sociétés occidentales. Très présents en Grande-Bretagne et en France après 1918, moins nombreux en Allemagne après la Première Guerre mondiale, absents en URSS après 1921, ils sont une butte témoin des politiques de la mémoire. L’étude du héros, du sacrifice au combat véhicule un système de valeurs complet et un système de représentations, dans les sociétés occidentales comme au Japon. La mémoire de la bataille englobe parfois jusqu’au souvenir de la guerre toute entière, Verdun pour la France, la Somme pour l’Allemagne et la Grande-Bretagne après 1916, Stalingrad pour l’Allemagne et l’URSS après 1942… 5 Problématique nouvelle ou revisitée, l’historiographie des conflits s’est attachée à étudier la reconstruction, la réparation, tant la destruction économique, matérielle, humaine, écologique [7][7]Jean-Paul Amat, La forêt et la guerre sur les champs de… paraît désormais caractériser la forme adoptée par la guerre. Les avant-gardes culturelles et artistiques ne s’y sont d’ailleurs pas trompées. On attache classiquement le thème traditionnel des réparations aux dommages et aux coûts des guerres, depuis les travaux d’histoire économique encouragés par la fondation Carnegie dans les années 1920 jusqu’aux thèses de l’école des relations internationales conduite par Pierre Renouvin, Jean-Baptiste Duroselle et leurs successeurs. C’est par exemple la thèse de Denise Artaud [8][8]Denise Artaud, La Question des dettes de guerre interalliées et…, ou les travaux d’histoire économique encouragés par le Comité d’histoire économique et financière. L’analyse changera d’échelle, du local à l’international, des reconstructions économiques européennes après 1945 à celle des villes. Le concept des occupations et des reconstructions a démontré sa validité pour le sujet [9][9]Dominique Barjot, Rémi Baudoui, Danièle Voldman (dir.), Les…. Le thème de la reconstruction de l’ordre politique international, ou du système international, s’établit, lui, sous l’angle de la fabrication de la paix. Comment faire et peut-on faire la paix après les deux conflits mondiaux ? De l’histoire revisitée des traités d’après-guerres aux conséquences économiques et politiques de la guerre et de la paix, la problématique de la restauration, du relèvement, est traditionnelle chez l’historien [10][10]Pierre Gerbet, Le Relèvement, 1944-1949, « Politique étrangère…. C’est l’objet de récents travaux collectifs et individuels [11][11]Claude Carlier, Georges-Henri Soutou (dir.), 1918-1925 Comment…. À la frontière du sujet, on n’omettra pas l’observation des institutions internationales qui se mettent à l’œuvre, ni celle des milieux internationaux qui sculptent la paix, autour de la SDN et de l’ONU entre autres [12][12]Marie-René Mouton, La Société des Nations et les intérêts de la…. La notion de reconstruction s’applique tout particulièrement aux institutions politiques. La guerre entraîne des changements de régime et des transitions, démocratiques ou autoritaires, en passant par des occupations marquantes pour la mémoire des peuples, vaincus et vainqueurs. Le concept s’applique aussi à l’homme, d’ailleurs investi par les idéologies de l’entre-deux-guerres s’acharnant à « construire l’homme nouveau », là où d’autres sociétés s’efforçaient de réparer les corps et les esprits. Sans filer la métaphore à l’excès, le regard historien s’arrête ici aux réparations du corps social et aux réparations médicales du corps physique blessé : des « gueules cassées » de Sophie Delaporte aux pupilles de la nation, orphelins de la grande guerre d’Olivier Faron [13][13]Sophie Delaporte, Les Gueules cassées, les blessés de la face…, les sociétés ont tenté de réparer le tissu social et humain après les grandes déchirures guerrières. 6 C’est cette saisie du réel humain, à travers celle de l’expérience de guerre individuelle et collective, qui a orienté un large pan des historiographies nationales sur le phénomène guerrier : étude de la communauté (nationale)-minorité (ethno-confessionnelle) en guerre, du groupe social, professionnel ou politique (l’ouvrier, la femme, le paysan, le soldat), de la société en somme. L’histoire des femmes en guerre a donné des études inédites, dans la diversité de leurs engagements sur les fronts de l’arrière, de l’usine, de la résistance [14][14]Mechtild Gilzmer, Christine Levisse-Touzé, Stefan Martens…. Ce regard traque les combinaisons humaines du groupe fait-défait, cristallisé-dissout dans et par la guerre. Le village, le canton, la région en constituent l’échelle géographique et le cadre culturel, jusqu’au régiment avec son recrutement à base géographique. A l’identique, la réinvention du lien communautaire est à l’œuvre dans les « groupes primaires » combattants, de l’unité élémentaire combattante (section-compagnie) jusqu’au régiment. L’approche est le fait des sociologues américains – Morris Janowitz et les unités élémentaires de la Wehrmacht en 1944 sur la base de l’enquête sociologique [15][15]Pascal Vennesson, Théodore Caplow, Sociologie militaire, Paris,…, avant de l’être plus récemment des historiens de la Grande Guerre. Loin de disparaître systématiquement en se démobilisant, le groupe survit et reste mobilisé en recréant cette sociabilité originelle dans des associations d’anciens combattants de la guerre, de telle armée, de telle unité, ou de tel front, une fois la paix revenue. L’association d’anciens combattants mobilise le souvenir, la mémoire de l’expérience commune, à travers des rites ou des commémorations. C’est, indifféremment, le groupe d’anciens combattants (A. Prost), le corps francs, en tous cas une « génération du feu », c’est-à-dire une classe d’âge ayant partagé la même expérience fondatrice d’une identité commune [16][16]Antoine Prost, Les Anciens combattants et la société française…. Elle est appréhendée, par l’historien, au travers notamment de la littérature du témoignage, pour l’expérience concentrationnaire de la déportation comme pour celle du combat [17][17]Annette Wieviorka, L’Ère du témoin, Paris, Plon, 1998, 186 p.…. En définitive, les changements d’échelle d’analyse ne modifient pas le débat de fond sur la cohésion de la société en guerre. Par exemple, le régime de Weimar échoue ainsi largement pour avoir laissé échapper cette cohésion d’après-guerre, que tisse à nouveau l’hitlérisme. 7 On accordera une place toute particulière aux processus d’épuration dans les sociétés sortant de guerre. Leur fonction est double : effacer de la mémoire la division, la souffrance, la guerre civile autant que construire une société nouvelle sur un pacte nouveau. Ici, chaque société réagit différemment en rapport à son expérience de guerre et à la cohésion maintenue ou disloquée de la nation au cours de l’épreuve guerrière. La guerre intègre ou désintègre celleci. Épuration, déportation, élimination apparaissent graduellement dans les après-guerres, métamorphosant la violence de guerre en violence politique. Évoquons enfin la fonction d’exorcisme de la mémoire par le procès international des responsables de la guerre : Leipzig contre les 700 responsables allemands de la Grande Guerre, Nüremberg en 1945-46 pour l’Allemagne et Tokyo en 1946-48 pour le Japon. On sait que ces procès pour l’histoire ont un retentissement très divers sur la mémoire des peuples. Largement gommés par Moscou en URSS après 1946, niés et refoulés jusqu’à l’oubli au Japon, ils ont été surinvestis en Allemagne, mémorisés (ce qui ne veut pas dire intériorisés comme le montrent les négationnismes « de tous poils ») au sein des sociétés d’Europe occidentale. Ce sont là des jeux classiques d’amnésie ou d’hypermnésie des peuples. 8 Cette dimension fait entrer dans l’analyse des opinions publiques, centrée sur les mécanismes d’encadrement et de contrôle à l’ère des masses. Le questionnement est double sur la base d’une histoire propre des représentations de la guerre sous ses formes sensibles (archéologie du matériel de guerre, productions d’objets de fonction pratique ou commémorative [18][18]« L’archéologie et la Grande Guerre », dans 14-18 Aujourd’hui.…, arts plastiques) et des mécanismes de censure, de propagande et d’autocensure dans les sociétés. Aussi bien s’agit-il d’une censure officielle que de processus sociaux d’autocensure et de propagande spontanés : ce qu’on dit et ce qu’on ne dit pas entre soi et aux siens de son expérience de guerre [19][19]Sébastien Laurent (dir.), Archives secrètes, secret…. Une gigantesque production d’images, d’écrits et de signes atteste des représentations de la guerre dans les sociétés [20][20]Laurent Gervereau et alii (dir.), Voir ne pas voir la guerre.…. 9 La place des populations civiles et non combattantes, et les nouvelles formes de conflictualités en découlant, constitue une quatrième entrée problématique du sujet. À une échelle démographique jamais connue, le « non-combattant » est entré sur le champ de bataille au XXe siècle. Déplacés, réfugiés, déportés, migrants écrivent un pan de l’histoire de ce demi-siècle guerrier, non comme un volet des migrations internationales de travail ou de la colonisation qui retenaient traditionnellement l’attention, mais comme un facteur des conflits. Si la question des déportés et des réfugiés a précocement intéressé l’historiographie de la Seconde guerre mondiale, elle a, à rebours, conduit à des travaux inédits sur la Première guerre mondiale. La thèse d’habilitation récente de Philippe Nivet le montre pour la Grande Guerre [21][21]Philippe Nivet, Les « Boches du Nord ». Les réfugiés français…. Le sujet des déportés est sans doute mieux connu que celui des déplacés et des réfugiés dans les historiographies nationales. Encore les déplacements massifs pendant et après la Seconde guerre mondiale ont-ils été étudiés, pour le front est de l’Allemagne et pour la Russie, plus que pour l’Europe occidentale ou le Japon en Chine et Asie. L’unité de compte est le million (7 millions d’Allemands déplacés après 1944 jusqu’au début des années 1950, bien plus pour la Russie en incluant les déportations des peuples) [22][22]Voir infra Nicolas Werth.. L’unité est aussi le million pour la Première guerre mondiale avec 2 millions de Français déplacés, à l’intérieur du pays, schématiquement du Nord vers le Sud. Il faudrait y inclure, aux marges géographiques du sujet, les migrations internes et externes des empires détruits après 1918, à l’instar de l’empire ottoman avec les 2,1 millions de Grecs et Turcs échangés entre les nouveaux États de Grèce et Turquie. Leur intérêt ne réside pas simplement dans cette mesure démographique, car une forme dégradée de la guerre ou du combat accompagne l’épisode de la migration ou du déplacement forcé. 10 En effet, les après-guerres sont riches d’exemples de conflits larvés entre États, groupes ethniques et confessionnels, à propos du découpage frontalier issu des traités de guerre. On regardera tantôt du côté des territoires déchirés entre revendications comme ceux situés entre Pologne et Allemagne après 1918 (Posnanie et Haute-Silésie en 1919-1922), ou ceux situés entre Grèce et Turquie en 1920-1922 dans les détroits et en Thrace orientale, qui font rejouer les différends issus des guerres balkaniques de 1912-1913. Il y a là possibilité d’étude des contacts entre populations, et aussi découverte de modes d’interventions internationaux inédits avec des interpositions à caractère humanitaires que la communauté internationale a cru découvrir après 1989, au nom du droit d’ingérence humanitaire, mais qui n’en était qu’une redécouverte et une systématisation [23][23]Olivier Forcade, « Interventions françaises dans le cadre des…. Sous l’égide d’une organisation internationale, il s’agit d’une interposition militaire avec des contingents internationaux pour éviter une guerre ouverte entre deux États ou deux communautés : c’est ainsi le cas inédit de l’intervention franco-anglo-italienne en Haute-Silésie en 1920-1922, entre Polonais et Allemands, avant un plébiscite de rattachement du territoire à l’un ou l’autre. Il y a là un volet militaro-diplomatique et humanitaire témoignant d’une nouvelle forme de conflictualité dont l’usage s’enracine après 1945 avec la multiplication des interventions de l’ONU, plus encore après la guerre froide. 11 Le volet humanitaire s’attache au sujet avec la découverte de l’humanitaire par les organisations internationales, de la SDN à l’ONU, et par les États [24][24]Olivier Forcade, « Les missions humanitaires et d’interposition…. Dans le vocabulaire des Lumières, le terme signalait l’attention portée à la misère du monde avec la volonté d’y remédier. Le mot entre dans le vocabulaire diplomatique dans les années 1830-1860 avec l’intervention à des « fins d’humanité » de la France pour soulager les souffrances des maronites chrétiens persécutés dans l’empire ottoman. Première intervention de cette nature (alimentaire-sanitaire et de police internationale), elle fait jurisprudence au XIXe siècle. Ce type d’intervention est reconduit après 1918, par exemple à l’égard de 200 000 Russes blancs, décombres des armées Wrangel et Denikine installés près de Salonique fin 1919, pris en charge par des congrégations religieuses (Dames de la Charité) et des comités nationaux de la Croix rouge qui les évacuent en Europe progressivement. Dans les années 1920, la SDN développe des modes d’intervention limités d’aide alimentaire et sanitaire. C’est après 1945 que le problème d’assistance aux populations déplacées donne lieu à la création d’un organisme d’assistance aux déplacés et réfugiés puis à l’OIR (office international des réfugiés) en 1951, dépendant de l’ONU. Plus qu’un discours médical nouveau, c’est une attention politique, puis de police internationale, qui pousse à considérer comme un problème inédit lié aux conflits et aux crises la prise en compte des populations civiles. Elle conduit à des modes d’intervention encadrés part le droit et progressivement par des organisations internationales, reconnaissant juridiquement la personnalité du réfugié. C’est une donnée nouvelle des conflits de ce demisiècle, alors que le civil était victime non reconnue en fait et en droit dans les conflits antérieurs. 12 L’orientation sociétale et culturelle du sujet n’invalide pas une lecture politique. La guerre est la grande affaire de l’État. Au fond, c’est l’absence d’État qui provoque la guerre dans les sociétés ethnographiques et l’État qui la déclenche dans les sociétés occidentales et japonaise. La totalisation de la guerre englobe jusqu’aux formes et aux pratiques politiques après la guerre, introduisant une violence verbale, physique et idéologique inédite. La violence de guerre a contaminé la violence politique. Le champ politique a été affecté par l’activité guerrière. De même, la cohésion des sociétés en guerre s’est souvent perdue, défaite après la guerre. Les opinions publiques ont alors dénoncé, a posteriori, une guerre qu’elles avaient subie, certes, mais aussi faite. 13 Les subversions du cadre chronologique et géographique sont alors tentantes. Une frontière du sujet s’établit à l’appréhension des empires coloniaux dans la guerre. Les importations des expériences de guerre antérieures aux guerres balkaniques dans la Première ou la Seconde guerres mondiales sont multiples. Les guerres de Cuba de 1898, des Boers 1899-1902, russojaponaise de 1904-1905 anticipent des situations de 1914-1918 ; la guerre en Asie, les conflits en Europe à l’instar de l’Espagne, expérimentent des conflictualités consacrées à partir de 1939. Mais le poids des deux guerres mondiales et l’enjambement de l’une à l’autre confèrent aux autres conflits une importance intermédiaire. La démarche introduit une tension diachronique dans un sujet synchronique. La notion même « d’entre-deux-guerres » est débattue puisque la continuité du phénomène guerrier est frappante pour la Russie-URSS (au delà même de 1945), sinon en Allemagne (à travers la défaite refusée des années 1920). 14 Les liens entre le Premier et le Second conflit mondial démontrent une étanchéité et une porosité entre les deux événements. Des pratiques sont conservées d’un conflit à l’autre et rejouent. Les massacres de Sénégalais à Lyon en juin 1940 vengent le souvenir de l’occupation par des troupes françaises noires en Rhénanie en 1923. Ce processus caractérise surtout des « sorties de guerre » que la chronologie échoue fréquemment à dater précisément. La guerre peut se poursuivre, voire se radicaliser une fois les combats terminés et les traités signés. L’Allemagne, cristallisant la violence politique et guerrière contre le « Rouge » et le « Juif » pour dénoncer le « coup de poignard dans le dos », en est le premier cas. Le second cas est celui de la Russie après 1917, mettant en œuvre une « gestion guerrière du social » par le pouvoir bolchevik, qui ne touche à son terme qu’à la fin des années 1940. Dans ces processus, insistons sur le rôle clé joué par les soldats (les anciens soldats, en fait), notamment en Allemagne et en URSS : ils furent l’un des vecteurs de la trace longue de la brutalisation des sociétés européennes – tout au moins de certaines d’entre elles – par l’activité guerrière de tout ce premier vingtième siècle. Les religions sont à même, par leur force d’incitation morale, de promouvoir, voire d’instaurer la paix sur terre. Les religions se sont aussi souvent structurées en institution avec une loi (droit canon, Charia…), une morale, un « siège social », un patrimoine financier, une hiérarchie pyramidale (pape et évêques ; patriarche et pope…) Si cette organisation centralisée fut établie pour échapper aux prises de pouvoirs dynastiques, celle-ci a contribué à faire des religions des institutions. On retrouve de plus dans « institution » la notion d’acte fondateur, très importante dans le cas des religions révélées par un prophète. Il faut toutefois noter que les grandes religions monothéistes n’ont pas toutes atteint le même degré d’institutionnalisation : la religion musulmane a hiérarchisé ses serviteurs, des imams jusqu’au calife ; la religion juive se retrouve autour des institutions reçues par Moïse mais peu développées du fait de la diaspora ; les cultes protestants se sont établis sur le déni des institutions temporelles de l’Église. Quoi qu’il en soit, les instances religieuses et leur hiérarchie ont une force d’influence considérable pour instaurer la paix en argumentant à partir de la morale initiale. Cette morale initiale peut toutefois tout aussi bien servir les intérêts guerriers (croisades, Djihad). Le clergé catholique se devait à une époque d’être le garant de la paix régnant au sein de son royaume. Cet impératif a pu le conduire à mener des guerres de conquête pour étendre la « Jérusalem terrestre » en cours de constitution. L’allégeance à l’institution religieuse a toujours été considérée comme une nécessité pour assurer la paix. Les luttes contre les hérétiques et les cathares ; l’inquisition espagnole et le principe de l’excommunication ont été menés au nom de l’unité de l’Église. Toutefois, l’origine de la réforme protestante se trouve précisément dans cette critique de l’Église en tant qu’institution, les fidèles n’ayant pas besoin d’intermédiaire terrestre pour communiquer avec leur dieu. Les institutions religieuses sont aujourd’hui plutôt perçues comme régulatrices des pulsions de leurs ouailles. Au moment de la prise d’otage des journalistes français en Iraq (Aubenas, Chesnot, Malbrunot), l’État français s’est adressé immédiatement aux responsables français du culte musulman pour influer sur leur libération. Les institutions religieuses (de quelque religion monothéiste qu’elles soient) cautionnent rarement officiellement l’intégrisme, mais préfèrent au contraire rassembler les courants sous un dogme unitaire. Toutefois, les institutions religieuses et leurs représentants peuvent faire l’éloge de la guerre, morale puisque sainte. Dans ce cas, le pouvoir politique ressort le principe de laïcité pour contrecarrer des signes martiaux. On craint le pouvoir d’influence que peuvent détenir certains « fondés de pouvoir » de leur religion : le gouvernement anglais instaure des mesures de rétorsion judiciaires contre les imams prêchant le Djihad, le gouvernement français s’est élevé contre des imams et les mouvements religieux sectaires sont étroitement surveillés. Les institutions religieuses possèdent donc aussi bien un potentiel de paix que de guerre. Elles peuvent jouer les pacificateurs. Elles peuvent aussi être utilisées pour justifier la guerre. L’intolérance religieuse aujourd’hui “ Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte ou l’accomplissement des rites. ” ARTICLE 18 DE LA DÉCLARATION UNIVERSELLE DES DROITS DE L’HOMME (1948). VOTRE pays vous accorde-t-il la liberté de religion ? La plupart des nations clament haut et fort leur adhésion à ce noble principe, inscrit dans de nombreuses déclarations internationales. On estime cependant que des centaines de millions de personnes vivant dans des pays où l’intolérance et la discrimination sont de dures réalités ne jouissent pas de cette liberté fondamentale. En revanche, beaucoup appartiennent à des sociétés multiraciales, multiethniques ou multireligieuses où la liberté est garantie par la loi et où la tolérance semble faire partie intégrante de la culture du pays. Toutefois, même dans ces pays, certaines personnes voient parfois leur liberté religieuse menacée. Angelo d’Almeida Ribeiro, ancien Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme (ONU), a écrit : “ La pratique de l’intolérance et de la discrimination fondées sur la religion ou la conviction se produit quasiment dans tous les systèmes économiques, sociaux et idéologiques et dans toutes les régions du monde. ” De même, dans Liberté de religion et de conviction : un rapport mondial (angl.), publié en 1997, Kevin Boyle et Juliet Sheen dressent le constat suivant : “ Persécution des minorités religieuses, [...] proscription de croyances et discrimination omniprésente [...] sont des réalités quotidiennes à la fin du XXe siècle. ” Les minorités ne sont cependant pas les seules victimes de la discrimination religieuse. Abdelfattah Amor, Rapporteur spécial sur l’intolérance religieuse auprès des Nations unies, estime qu’“ aucune religion n’est à l’abri d’une violation [de la liberté religieuse] ”. Il est donc probable que, là où vous vivez, certaines religions doivent régulièrement faire face à l’intolérance et aux préjugés. Des formes de discrimination diverses La discrimination religieuse peut prendre des formes variées. Certains pays n’autorisent tout simplement qu’une seule religion, qui constitue de fait une religion d’État. D’autres promulguent des lois destinées à entraver l’activité de certaines religions. Il arrive également que des lois soient interprétées de manière arbitraire. Imaginez, par exemple, à quels abus pourrait donner lieu ce projet de loi israélien qui propose de punir l’importation, l’impression, la diffusion et la possession de brochures ou de documents “ contenant un encouragement à la conversion religieuse ”. Comment s’étonner, après cela, de lire dans un grand quotidien (International Herald Tribune) : “ En Israël, les Témoins de Jéhovah sont harcelés et attaqués. ” Dans la ville de Lod, leur Salle du Royaume a été envahie trois fois et saccagée deux fois par des fanatiques ultraorthodoxes. La police a refusé d’intervenir. Le livre Liberté de religion et de conviction cite d’autres exemples d’intolérance : “ L’hérésie et les hérétiques ne sont pas seulement des images du passé. [...] Le rejet, la persécution et le traitement discriminatoire de ceux qui ont choisi une voie différente restent un aspect majeur de l’intolérance. Les Aḥmadiyya pakistanais et les [baha’is] égyptiens, iraniens et malais peuvent en témoigner, tout comme les Témoins de Jéhovah de plusieurs pays d’Europe de l’Est, de Grèce et de Singapour. ” De toute évidence, la liberté religieuse est menacée dans de nombreuses régions du monde. Au vu de ce bilan, Federico Mayor, directeur général de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture, fait observer que le monde à l’émergence duquel on est en train d’assister “ n’inspire pas un enthousiasme immodéré. [...] Le vent de la liberté souffle sur les braises de la haine ”. Confirmant ces craintes, le directeur du Centre des droits de l’homme de l’université d’Essex (Royaume-Uni) écrit : “ Tout indique que, dans le monde moderne, l’intolérance religieuse [...] se répand plutôt qu’elle ne régresse. ” La montée de l’intolérance constitue une menace pour la liberté religieuse, peut-être la vôtre. Mais en quoi cette liberté est-elle importante ? Les enjeux “ La liberté religieuse est une condition fondamentale pour qu’une société puisse être qualifiée de libre. [...] Sans la liberté de religion et le droit de propager sa foi, il ne peut y avoir aucune liberté de conscience ni aucune démocratie digne de ce nom ”, note le sociologue Bryan Wilson (Les valeurs humaines dans un monde en mutation [angl.]). Comme un tribunal français l’a récemment rappelé, “ la liberté de croyance est un des éléments fondamentaux des libertés publiques ”. Par conséquent, que vous soyez croyant ou non, vous devriez vous sentir concerné par la protection de la liberté religieuse. La politique d’un pays en matière de liberté religieuse rejaillit sur sa réputation et sur sa crédibilité. Dans un rapport présenté en 1997 lors d’une réunion de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, qui compte 54 États membres, on pouvait lire : “ Dans la constellation des droits de l’homme, la liberté de religion est l’une des valeurs les plus élevées ; elle touche au cœur même de la dignité humaine. Aucun système qui viole ou permet la violation systématique de cette liberté ne peut légitimement revendiquer l’appartenance à la communauté des États justes et démocratiques qui respectent les droits fondamentaux de l’homme. ” La liberté de religion peut être comparée aux fondations d’un édifice. Les autres libertés — civile, politique, culturelle et économique — reposent sur elle. Lorsque les fondations sont sapées, l’édifice entier est ébranlé. Ce que Francesco Margiotta-Broglio résume ainsi : “ Dès lors que la liberté [religieuse] est bafouée, d’autres libertés ne tardent pas à être menacées. ” Si l’on veut protéger les autres libertés, il faut d’abord garantir la liberté de religion. Pour déterminer le meilleur moyen de protéger une chose, il est indispensable de la comprendre. Quelles sont les racines de la liberté de religion ? Comment a-t-elle été établie, et à quel prix ? [Illustration, page 4] L’intolérance religieuse a une longue histoire derrière elle.