destinataire, il n'est que de relever dans la littérature les différentes dénominations attribuées à
ces deux instances pour comprendre le malaise et la difficulté qu'ont les auteurs à fonder leur
problématique à partir d'une véritable thé0rie du/des sujet(s).
F. Jacques (1979), encore lui, parle de locuteur et d'allocutaire: «on définira le locuteur comme
celui qui dans la référence au réel fait référence à soi comme sujet de l'énonciation, et l'allocutaire
comme celui à qui s'adresse 1'énonciation et dont la marque est présente dans la structure
profonde de l'énonciation» pour aussitôt—quelques phrases après - utiliser d'autres termes sans
spècifier d'ailleurs quels en sont les statuts et leurs rapports avec les précédents : «cependant le
processus par lequel les interlocuteurs se marquent alternativement au titre d'émetteurs et de
récepteurs du message n'est pas un processus aussi simple qu'on l'a cru.»
D'autre part, si Vignaud (1976) parle bien d'orateur-sujet et d'auditeur-spectateur, il ajoute : «mon
projet étant d'insister sur la présence du discours comme phénomène spécifique, je n'envisage
donc pas la constitution d'une problématique du sujet telle qu'elle s'inscrit dans le champ défini
par le psychanalyste» bien que, selon lui, «les interrogations sur la notion du sujet et le rôle
discursif de celui-ci ne peuvent ignorer—je l'ai dit—les approfondissements des psychanalystes».
D'ailleurs, dans son paragraphe « comment parle le discours argumentatif», s'il décrit les
éléments lexicologiques, les formes d'énonciation, les types d'opérateurs, le procès, les
enchaînements, les sources du discours, il manque singulièrement quelque chose comme le(s)
destinataire(s), ... aussi spectateurs soient-ils.
Quant aux psychosociologues, ils sont quasiment unanimes pour utiliser le paradigme de la
théorie de l'information et pour reprendre les termes d'émetteurs et/ou de sources du message et
de récepteurs. Ainsi, Zajonc (Psychologie sociale théorique et expérimentale, 1967), définit-il le
problème : «il est commode d'analyser la communication en y distinguant abstraitement (on est
tout de suite dans le problème
(2) !) les trois éléments suivants : comportement de 1'émetteur,
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comportement du récepteur, types de messages échangés entre eux.» Par ailleurs, TM. Newcomb
(1970), dans son article sur 1'«ébauche d'une théorie des actes de communication», écrit : «tout
acte de communication est considéré comme une transmission par un émetteur à un récepteur
d'information constituée par des stimuli distincts». Ainsi «l'acte de communication le plus simple
sera celui où une personne A transmet de l'information à une personne B à propos d'une certaine
chose X».
On retrouve d'ailleurs le couple émetteur-récepteur sous une forme déguisée chez Jakobson
(1969) lorsqu'il parle des six facteurs liés à la production d'une communication. D'ailleurs, il écrit
dans ses Essais de linguistique générale : «Mais le problème essentiel pour l'analyse du discours
est celui du code commun à l'émetteur et au receveur et sous-jacent à l'échange des messages.»
Enfin, nous terminerons l'illustration de ce que nous avons énoncé par une citation de Ducrot
(1980) : «En quoi consiste ce portrait de l'énonciation apporté par l'énoncé : d'abord il pose deux
personnages (il peut s'agir en fait de deux groupes de personnages) reliés à cette énonciation. Il
lui donne d'une part un auteur que j'appelle «locuteur», et il la présente d'autre part comme
adressée à quelqu'un que j'appelle «allocutaire». Il faut souligner le fait que ces deux êtres n'ont
pas de réalité empirique en entendant pas là que leur détermination fait partie du sens de l'énoncé,
et ne saurait s'effectuer si on ne comprend pas ce sens (alors que l'auditeur et le sujet parlant
peuvent se découvrir par la simple considération physique de la parole)», et il spécifie plus loin
en parlant des actes allocutoires : «il m'a semblé d'autre part que ces actes n'ont pas
nécessairement le locuteur comme auteur et qu'ils ne sont pas nécessairement adressés à
l'allocutaire. Ce qui m'a amené à définir la notion de personnages allocutoires (énonciateurs ou