lesquelles  il  convient  de  lancer  des  études  poussées  pour  éliminer,  réduire  ou
compenser les impacts, afin de se conformer aux obligations règlementaires dans des
conditions acceptables de moyens techniques et financiers.
Cet  indicateur  est  donc  un  outil  ambivalent.  D’une  part,  il  cherche  à  évaluer  la
vulnérabilité écologique des milieux naturels face à de grands projets d’infrastructures
linéaires perçus comme des risques potentiels pour la biodiversité. À l’inverse, en tant
qu’outil  conçu  à  destination  des  aménageurs,  dans  un  contexte  de  durcissement  des
exigences sociétales et réglementaires en matière de protection de l’environnement, il
contribue  à  penser  la  biodiversité  comme  un  risque  à  la  fois  opérationnel,  financier,
juridique et de réputation pour ces projets (Vandevelde, 2013).
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Cet outil s’inscrit donc avant tout dans une « logique instrumentale » dans la mesure
où  l’évaluation  qu’il  propose  tend  à  sécuriser  les  objectifs  des  maîtres  d’ouvrage  de
grands  projets  d’infrastructures  linéaires.  Cependant,  en  tant  qu’outil  scientifique,
conçu dans le cadre d’une recherche-action menée  à la  faveur d’un doctorat, il relève
également d’une intentionnalité normative puisqu’il a été initialement conçu comme un
outil dont le but en soi consistait à délivrer une évaluation scientifique opérante. Enfin
il relève aussi d’une intentionnalité substantive car il est susceptible de participer, sur le
long  terme,  d’une  meilleure  prise  de  décision  des  aménageurs  en  matière
environnementale (Fiorino, 1989 ; Stirling, 2006 ; Vandevelde, 2013).
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Le  projet  Seine-Nord  Europe,  qui  a  servi  de  fondement  à  l’élaboration  de  cet
indicateur,  constitue  un  parfait  exemple  de  cette  évolution.  En  effet,  ce  grand  projet
d’infrastructure  linéaire  est  un  grand  projet  d’aménagement  de  transition.  Tout
d’abord, il s’agit d’un projet porté par un maître d’ouvrage public, Voies navigables de
France (VNF), dont l’étude d’impact, réalisée par des bureaux d’études pour le compte
de ce maître  d’ouvrage,  date  de  2006.  Il  s’agit  donc  d’une  étude  d’impact  de  l’avant-
Grenelle. D’autre part, ce grand projet d’aménagement devait initialement être réalisé
dans le cadre d’un contrat de partenariat public-privé. Une partie de sa conception, sa
construction et sa gestion auraient été déléguées à une entreprise privée. La procédure
de  dialogue  compétitif,  pour  laquelle  deux  candidatures  ont  été  retenues,  celle  de
l’entreprise Bouygues Construction et celle d’un groupement issu d’un partenariat entre
les entreprises Vinci et Eiffage, aurait dû aboutir à la désignation d’un maître d’ouvrage
délégué  en  2011.  Cependant,  la  procédure  a  récemment  été  abandonnée  en  raison
d’incertitudes concernant le bouclage financier de l’opération, qui résultent notamment
des carences de l’étude d’impact et des études de faisabilité financière.
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Dans le cadre du travail de thèse qui l’a vu naître, l’élaboration de cet indicateur est
intervenue  après  celle  d’une  base  de  données  destinée  à  offrir  une  meilleure
connaissance de l’aire d’étude environnementale du projet. Initialement, cet outil était
simplement conçu pour permettre un repérage scientifique, c’est-à-dire résultant d’une
analyse  et  garant  d’une  forme  d’objectivité,  des  zones  écologiquement  les  plus
vulnérables  comprises  dans  l’aire  d’étude  environnementale  du  projet  Seine-Nord
Europe. Il  s’agissait  donc avant tout  de  construire un indicateur  synthétique d’avant-
projet fondé sur la base de données du projet Seine-Nord Europe et destiné à mettre en
évidence de manière efficace les zones comprises dans l’aire d’étude environnementale
du projet, les plus susceptibles d’être impactées par l’infrastructure, pour lesquelles il
existe de forts enjeux de préservation de la biodiversité.
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En  dépit  de  l’élargissement  des  objectifs  initiaux,  cet  indicateur  est  donc  pour
l’instant  un  simple  outil  théorique  construit  dans  le  cadre  d’un  travail  de  recherche,
mais  qui  pourrait  être  amené  à  servir  d’outil  de  réflexion  aux  maîtres  d’ouvrage  de
grands projets d’infrastructures linéaires en cette période d’incertitudes.
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Dans cet article, nous dresserons tout d’abord  un état  de l’art des principaux types
d’indices  et  d’indicateurs  de  biodiversité  existants.  Nous  nous  attacherons  à  la
chronologie de leur émergence afin de mettre en évidence le changement de paradigme
qui  a  présidé  à  leur  évolution.  Nous  montrerons  ensuite  qu’il  existe  des  besoins
d’indicateurs  de  développement  durable  dans  le  domaine  de  l’aménagement.  Nous
présenterons  brièvement  le  projet  Seine-Nord  Europe  sur  lequel  nous  nous  sommes
appuyés pour concevoir notre indicateur. Enfin, nous présenterons notre indicateur de
développement  durable  en  nous  attachant  à  mettre  en  évidence  la  méthode  qui  a
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