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REVUE GÉNÉRALE ET ANALYSE PROSPECTIVE
Actualités en diabétologie
The latest data in diabetology
D. Chevenne
a
, M. Fonfrède
b,*
a
Laboratoire de biochimie hormonologie, hôpital Robert-Debré et groupe hospitalier de ParisSaint-Joseph,
48, boulevard Serrurier, 75019 Paris, France
b
Laboratoire de biochimie métabolique, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 4783, boulevard de lHopital,
75651 Paris cedex 13, France
Reçu le 15 février 2007 ; accepté le 4 mars 2007
MOTS CLÉS
Diabète gestationnel ;
Microalbuminurie
Résumé En 2002, les auteurs avaient présenté dans cette revue les différents marqueurs bio-
logiques du diabète essentiels à la prise en charge de la maladie. Dans le présent article les
auteurs font un point non exhaustif sur les « nouveautés » concernant le diabète : diabète ges-
tationnel et microalbuminurie. En ce qui concerne le diabète gestationnel le point le plus
important est la publication du rapport de la Haute Autorité de santé sur ce sujet. Il nexiste
toujours pas de consensus international sur la méthode de dépistage. Les différentes épreuves
sont présentées. En ce qui concerne la microalbuminurie le point le plus important est la mise
en évidence dune albumine non immunoréactive dans les urines. Des études ont montré que
la mesure de lalbuminurie totale (immunoréactive et non immunoréactive) permettait de
dépister la néphropathie diabétique plus précocement que lactuelle méthode de détermina-
tion par immunodosage.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
KEYWORDS
Gestational diabetes;
Microalbuminuria
Abstract In 2002, we have described some biological markers of diabetes. In this article we
present some non-exhaustive news about diabetes concerning gestational diabetes and micro-
albuminuria. Unfortunately there is no international consensus for gestational diabetes
screening. The different tests are presented. About microalbuminuria, the new ghost albumin
is presented. This non-immunoreative albumine is founded in urines of non-diabetic and dia-
betic subjects and its evaluation could be an earlier marker for the screening of nephropathy.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Immuno-analyse et biologie spécialisée 22 (2007) 95100
*
Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (M. Fonfrède).
0923-2532/$ - see front matter © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.immbio.2007.03.001
available at www.sciencedirect.co m
jo u r n a l h omepage: ht tp : / / f rance.els e v i e r. c o m / direct/IMMBIO /
Introduction
Le diabète, principalement le diabète de type 2 est consi-
déré depuis quelques années comme un des fléaux du troi-
sième millénaire. On comptait 230 millions de diabétiques
en 2006 et 350 millions sont attendus en 2035, soit 120 mil-
lions de plus en une génération, alors que les prévisions de
1996 étaient de 300 millions pour 2035.
Laugmentation de la prévalence fait même parler
dépidémie. Dans ce contexte il est toujours utile de faire
un point sur les connaissances biologiques et sur les para-
mètres pouvant apporter une aide dans la prise en charge
de la maladie. En 2002 nous avions dans cette revue fait un
« état des lieux » des principaux marqueurs utiles et utilisa-
bles au quotidien. Nous présentons ici une actualité qui ne
se veut pas exhaustive avec les modifications ou nouveautés
les plus importantes depuis 2002 à savoir :
les dernières recommandations concernant le diabète
gestationnel ;
la découverte dune albumine urinaire non immunoréac-
tive dite albumine fantôme.
Diabète gestationnel
Pour lOrganisation mondiale de la santé (OMS), le diabète
gestationnel est défini par une intolérance au glucose
conduisant à une hyperglycémie de sévérité variable, débu-
tant ou diagnostiquée pour la première fois au cours de la
grossesse [14]. Cette définition sapplique quel que soit le
traitement utilisé et la persistance ou non de lhyperglycé-
mie dans le post-partum. Le diabète gestationnel doit donc
être différencié dune grossesse se déroulant chez une
femme ayant un diabète connu antérieurement, le plus sou-
vent de type 1 mais aussi de type 2 ou MODY. Cependant, le
diagnostic dun diabète gestationnel nexclut pas la pré-
sence dune hyperglycémie avant la grossesse et qui
naurait pas été diagnostiquée.
Alors que les critères diagnostiques du diabète sucré pro-
posés par lOMS en 1999 sont acceptés et appliqués partout,
il nen va pas de même pour le diabète gestationnel. Les
normes proposées par lOMS sont loin de faire lunanimité
et il existe plusieurs critères concernant aussi bien le dépis-
tage, le diagnostic et le traitement, tous diversement suivis
par les diabétologues et les obstétriciens (Tableau 1).
Comme le soulignent en conclusion plusieurs rapports sur
ce sujet dont celui, récent et très documenté, de la Haute
Autorité de santé (HAS), les données de la littérature scien-
tifique ne permettent pas de conclure sur les meilleures
stratégies de dépistage et de diagnostic du diabète gesta-
tionnel ni sur leur modalité de réalisation [3,17].
Le diabète gestationnel est une des complications les
plus fréquentes de la grossesse atteignant selon les pays
et les ethnies, lâge et lindice de masse corporel (IMC),
une prévalence allant de 1 à 25 % [1,5,18,19]. En Europe,
la prévalence chez les femmes caucasiennes est denviron
2 % [5,18]. Cependant ces chiffres sont à prendre avec pré-
caution tant les critères de diagnostic peuvent varier dune
étude à lautre et influer sur la prévalence [1].
Les principales complications liées au diabète gestation-
nel sont la macrosomie (avec une prévalence de 15 à 30 %),
lhypertension gravidique et la prééclampsie, et le risque
pour la femme de développer un diabète de type 2 dans
les années suivant laccouchement. Ces risques sont diver-
sement pris en compte pour établir des critères diagnosti-
ques et des stratégies de dépistage.
La notion de diabète gestationnel remonte à 1946 et les
premiers critères diagnostiques, basés sur une hyperglycé-
mie provoquée par voie orale (HGPO) de trois heures avec
ingestion de 100 g de glucose, sont publiés en 1964 par
OSullivan et Mahan [23]. Ces critères ont ensuite été repris
et modifiés par différents auteurs pour tenir compte,
notamment, de lévolution des techniques de dosage.
Tableau 1 Critères diagnostiques couramment utilisés pour le dépistage et le diagnostic du diabète gestationnel
Stratégie en deux étapes : dépistage et diagnostic si dépistage positif
Critères ADA (American Diabetes Association)
O'Sullivan Carpenter et Coustan
HGPO50 g
Dépistage
HGPO
a
100 g
Diagnostic
b
HGPO
a
75 g
Diagnostic
b
Glycémie g/l / mmol/l
T0 0,95/5,3 0,95/5,3
T60' 1,30 ou 1,40/7,2 7,8 1,80/10 1,80/10
T120' 1,55/8,6 1,55/8,6
T180' 1,40/7,8
Stratégie en une étape
Critères ADA HGPO (voir ci-dessus) ou HGPO 75 g
Critères OMS 1999
HGPO
a
75 g
Glycémie g/l / mmol/l
T0
ou 1,26/7
T120' 1,40/7,8
Le diagnostic de diabète gestationnel requiert deux glycémies supérieures ou égales aux valeurs indiquées pour lHGPO 100 ou 75 g.
a
À jeun, le matin.
b
Le test diagnostic est réalisé en cas dépistage positif.
D. Chevenne, M. Fonfrède96
Ainsi, en 1982, Carpenter et Coustan proposaient de nou-
veaux critères diagnostiques [6], aujourdhui encore en
vigueur et recommandés par lAmerican Diabetes Associa-
tion (ADA) [2] en abaissant les valeurs seuils de glycémie
proposées antérieurement (Tableau 1).
Le diagnostic est généralement effectué entre la 24
e
et
la 28
e
semaine daménorrhée, sauf en cas de facteur de
risque de diabète gestationnel justifiant un dosage plus pré-
coce. Il repose soit sur une seule HGPO de 75 g ou 100 g de
glucose réalisée à jeun, soit en deux étapes, comprenant
une première HGPO de dépistage avec 50 de glucose (le
jeûne nest pas nécessaire), dit test de OSullivan, suivie,
en cas de positivité, par une deuxième HGPO de 75 ou
100 g. Outre ces HGPO, certains auteurs préconisent un
test pragmatique basé sur un petit déjeuner classique com-
portant au moins 25 g de glucides avec mesure de la glycé-
mie à jeun et à la deuxième heure [8]. Pour les seules
recommandations internationales identifiées au nombre de
11 par lHAS dans son rapport, sept seuils différents de gly-
cémies sont proposés pour lHGPO 75 g, deux pour lHGPO
100 g et deux pour le test de dépistage [17].
Les seuils définis par létude de OSullivan et Mahan [23]
et modifiés ensuite par différents auteurs reposaient sur
lanalyse du risque de développer un diabète après la gros-
sesse, ce qui est critiquable car ne prenant pas en compte
les complications périnatales. Les valeurs de lOMS sont,
elles, basées sur des risques microvasculaires (rétinopa-
thie,) et macrovasculaires sur une population générale.
Plusieurs études prospectives et rétrospectives ont corrélé
les seuils glycémiques avec la morbidité périnatale principa-
lement la macrosomie et la fréquence des césariennes.
Cependant, ce critère de jugement est loin dêtre parfait.
La macrosomie est la complication la plus fréquente du dia-
bète gestationnel (15 à 30 % des grossesses) mais ne lui est
pas spécifique, ainsi moins de 10 % de lensemble des macro-
somies seraient dues au diabète gestationnel. La relation
entre niveau de glycémie et taux de macrosomie reste mal
évaluée. Une étude en cours, lHyperglycemia and Adverse
Pregnancy Outcome, devrait pouvoir répondre à cette ques-
tion [28]. Lhypertension artérielle est plus fréquente chez
les femmes ayant un diabète gestationnel mais le lien de
causalité nest pas formellement établi. Une étude brési-
lienne portant sur une cohorte de 4977 femmes a identifié
7,2 % de diabète gestationnel en utilisant les critères OMS et
2,4 % avec ceux de lADA (HGPO 75 g Tableau 1). Les risques
relatifs (ajustés pour lâge, lIMC,) étaient de 1,45 (OMS) et
1,29 (ADA) pour la macrosomie, 1,94 et 2,28 pour la préé-
clampsie, 1,59 et 3,10 pour les décès périnataux [26].
Soixante-treize pour cent des femmes diagnostiquées dia-
bète gestationnel par les critères OMS étaient considérées
comme non diabétiques avec les critères ADA ; à linverse,
18 % des femmes diagnostiquées DG avec les critères ADA
ne létaient pas avec ceux de lOMS [26].
Il nexiste pas de consensus sur une stratégie de dépis-
tage, faute détudes de bonne qualité [3,17,29]. Jusquà la
moitié du deuxième trimestre de grossesse, les glycémies à
jeun et postprandiales sont plus basses que la normale, puis
un état dinsulinorésistance se développe progressivement
entraînant un diabète gestationnel chez les femmes dont la
fonction pancréatique endocrine est altérée [14,17]. Un
dépistage systématique ou ciblé sur les femmes à risque,
est donc préconisé entre la 24
e
et la 28
e
semaine daménor-
rhée ou plus tôt, lorsque le risque est élevé [2,14,17].
Cependant, il nexiste pas détude indiquant que cette
période est optimale, en identifiant les femmes qui seraient
à même de bénéficier le plus dun traitement. La question
dun dépistage systématique ou ciblé reste débattue [3,17,
30]. Un dépistage systématique diminue le nombre de faux
négatifs mais accroît les faux positifs sans bénéfice certain.
Lefficacité des traitements et les valeurs glycémiques à
atteindre pour diminuer le taux de complications restent
aussi à déterminer avec précision. Sur la macrosomie et
ses complications, lefficacité du traitement par linsuline
ou par la diététique seule nest pas clairement démontrée
[3,17]. Linsulinothérapie diminuerait lincidence de la
macrosomie uniquement chez les femmes ayant une hyper-
glycémie importante et un essai récent incluant diététique,
contrôle de la glycémie avec ou sans insuline a montré une
efficacité pour réduire la morbinatalité chez les femmes
ayant un diabète gestationnel modéré [3,13,17]. Concer-
nant lhypertension et la prééclampsie, aucune étude per-
tinente ne permet dévaluer lefficacité de la prise en
charge du diabète gestationnel [17].
En 2007, le diabète gestationnel est une pathologie dont
les critères de diagnostic, de dépistage et de prise en
charge demeurent mal définis et controversés faute
détudes de bonne qualité. Certaines sont actuellement en
cours et devraient enfin pouvoir apporter des données fia-
bles [28]. Devant cette situation, à linverse de certaines
organisations comme lADA ou lOMS, lUS Preventive Servi-
ces Task Force et lHAS sabstiennent de faire des recom-
mandations [3,17].
Quoi de neuf sur la microalbuminurie ?
Depuis la publication de Viberti en 1981 [29] montrant
que des concentrations dalbumine non détectables par
les bandelettes ou les méthodes colorimétriques usuelles
permettaient de prédire le développement de la néphro-
pathie diabétique, la microalbuminurie est devenue un
marqueur indispensable à la prise en charge des diabéti-
ques de type 1 et de type 2. Dabord considéré comme
marqueur prédictif de la néphropathie, ce paramètre
est vite devenu un marqueur de risque cardiovasculaire
indépendant des autres facteurs de risque. Trente à qua-
rante pour cent des diabétiques développent une néphro-
pathie dont la microalbuminurie est le signe le plus pré-
coce. Les traitements par inhibiteurs de lenzyme de
conversion et/ou bloqueurs du récepteur de langioten-
sine se sont révélés être rénoprotecteurs et ralentissent
lévolution de la maladie. Le dépistage est donc essentiel
puisque les traitements de latteinte rénale sont effica-
ces si ce dépistage est fait suffisamment tôt. Encore plus
que pour les autres paramètres urinaires, la phase préa-
nalytique pour la détermination de la microalbuminurie
est des plus importantes.
Conditions préanalytiques et expression
des résultats
La microalbuminurie est définie comme une excrétion
dalbumine comprise entre 20 et 200 μg/min ou 30 et
Actualités en diabétologie 97
300 mg par 24 heures [16]. Lexcrétion urinaire dalbumine
est variable : elle suit un rythme circadien [20,25] et les
variations sont dues entre autres à lexercice, lalimenta-
tion et la posture. Le gold standard [16] est dutiliser les
urines de 24 heures afin dexprimer la microalbuminurie
en milligramme par 24 heures. Compte tenu de la difficulté
dobtenir des urines de 24 heures, un recueil minuté (en
général les urines de la nuit) avec une albuminurie expri-
mée en microgramme par minute est utilisable. Lexpres-
sion en milligramme par litre sur un échantillon est un pis-
aller car sujette au phénomène de dilutionconcentration
des urines au cours de la journée. La recommandation de
la NABM (Nomenclature des actes de biologie médicale)
dexprimer les résultats par rapport à la créatininurie per-
met de réduire la difficulté dinterprétation due à une dilu-
tionconcentration, mais outre quelle augmente le prix de
lanalyse [16], lexpression de la microalbuminurie en milli-
gramme dalbumine par gramme de créatinine ou en milli-
gramme dalbumine par millimole de créatinine reste beau-
coup moins utilisable en termes de dépistage dautant plus
que des valeurs usuelles en fonction de lâge, du sexe et de
lorigine ethnique doivent être prises en compte [24]. La
sensibilité et la spécificité de cette expression sont insuffi-
santes. Lorsque le dosage est fait sur un échantillon uri-
naire, il est admis quune concentration supérieure à
20 mg/l est pathologique. Afin de limiter les variations de
dosage dues à la conservation, lorsquune détermination sur
échantillon est seulement réalisable il convient dans la
mesure du possible de travailler sur les urines fraîchement
émises [12]. De récentes études ont montré que la microal-
buminurie est stable sept heures à température ambiante
et au moins dix jours à +4 °C ou 20 °C. En revanche, il a
été noté que la congélation à plus long terme entraîne une
diminution de lalbumine dautant plus importante que la
concentration initiale est faible. De plus, du fait de la
variabilité intra-individuelle, en cas de dépistage positif, il
convient de répéter lexamen au moins trois fois entre trois
et six mois [14,25].
Le Tableau 2 rassemble ces différents modes dexpres-
sion ainsi que les valeurs usuelles en fonction du sexe.
Méthodes de dosage
Sil est bien admis quune classique bandelette dont le seuil
de détection de lalbumine est à 150 mg/l est inutilisable
(VPP 93,7 % VPN 73,7 %) [16], néanmoins, pour un dépistage
rapide et à grande échelle de la microalbuminurie lutilisa-
tion de bandelettes spécifiques avec ou sans appareil de
lecture est tentante. Si les valeurs prédictives positives
sont excellentes (une recherche positive est en général
confirmée par un dosage au laboratoire) les valeurs prédic-
tives négatives sont insuffisantes pour un dépistage [25]. Le
Tableau 3 présente les résultats de ces bandelettes dans
une population témoin et une population diabétique.
En ce qui concerne le laboratoire, la plupart des métho-
des de dosage de lalbumine urinaire utilisent un immuno-
dosage, que ce soit limmunonéphélémétrie, limmunotur-
bidimétrie, les méthodes Elisa ou la radio-immunologie.
Elles ont toutes fait leurs preuves en termes de sensibilité
analytique et de reproductibilité (Tableau 4). Il faut toute-
Tableau 2 Définition et classification de la microalbuminurie
Urines de
24 heures
Recueil minuté Échantillon du matin
Albumine Albumine Albumine Albumine/créatinine
mg/24 heures μg/minute mg/l mg/mmol mg/g
Normal < 30 < 20 20 Homme < 2,5 < 20
Femme < 3,5 < 30
Microalbuminurie 30299 20199 20199 Homme 2,525 20200
Femme 3,535 30300
Macroalbuminurie > 300 > 200 > 200 Homme > 25 > 200
Femme > 35 > 300
Tableau 3 Valeurs prédictives des bandelettes dites « microalbuminurie » [11]
< 30 mg/l (%) < 30 mg/g créatinine (%)
HPLC 0 0
Diabétiques Bandelettes 16,317,4 36,542,9
Immunodosage 21 36,6
Témoins Bandelettes 0,9 5,6
Immunodosage 3,7 0
Exprimée par le pourcentage de faux négatifs par rapport à lHPLC.
Tableau 4 Performances analytiques de quelques méthodes [4]
Méthode Reproductibilité (CV %) Limite de détection
Immunodosage (Beckman array) 4,2 % à 12,1 mg/l 2 mg/l
5,3 % à 45 mg/l
Immunodosage (Dade Behring turbitimer) 4,1 % à 10,6 mg/l 6 mg/l
2,2 % à 77,9 mg/l
RIA 9,2 % à 12,2 mg/l 16 μg/l
4,8 % à 33 mg/l
D. Chevenne, M. Fonfrède98
fois noter que, à un niveau international, des comparaisons
effectuées sur des urines ont montré des différences entre
techniques révélant une difficulté de transférabilité des
résultats. Cela peut sexpliquer par le fait que, certaines
méthodes sont calibrées avec une albumine sérique diluée
et dautre avec une albumine urinaire. Selon le calibrateur
utilisé, les différences sont suffisamment importantes pour
faire douter le clinicien [16]. On a ainsi pu montrer quavec
les réactifs et les méthodes couramment utilisés certains
sujets classés normoalbuminuriques dans un site étaient
classés microalbuminuriques dans un autre. Un groupe de
travail de lInternational Federation of Clinical Chemistry
(IFCC) a été initié en 2005 pour répondre à ce problème. Il
est logique de penser que la standardisation de la microal-
buminurie permettra une prise en charge plus efficace des
sujets diabétiques comme cela a été le cas avec lHbA1c.
Albumine fantôme
Considérations physiopathologiques
Lalbumine urinaire (66 KDa) existe sous de multiples for-
mes. Chez les rongeurs il a été décrit que lalbumine est
métabolisée durant sa filtration rénale aboutissant à
lexcrétion dun mélange de protéine intacte et de frag-
ments. Le même phénomène a été décrit chez lhomme
[10,11] et attribué à une transformation de lalbumine par
les enzymes lysosomales situées au niveau tubulaire [21].
De plus cette dégradation se produirait de façon exagérée
chez les sujets diabétiques.
Il existe donc dans lurine :
une albumine intacte avec ses ponts disulfures et
immunoréactive ;
une albumine modifiée ayant perdu ses épitopes donc
non immunoréactive ;
des fragments dalbumine correspondant à des chaînes
clivées par action enzymatique.
Cest la mise en évidence de la deuxième forme chez de
nombreux sujets qui a amené certains auteurs à parler
dalbumine « fantôme ».
Considérations analytiques
La difficulté de la mise en évidence de la totalité de lalbu-
mine excrétée tient au fait quil nexiste pas de consensus sur
une méthode de dosage. La grande majorité des méthodes
utilisent un immunodosage, mais lanticorps utilisé est diri
contre lalbumine rique et non lalbumine urinaire, et lon
mesure donc lalbumine intacte immunoréactive et des agré-
gats de plus de 12 kDa également immunoréactifs [20]. La
première méthodologie utilisée [22,24] pour mettre en évi-
dence lalbumine non immunoréactive par perte de petits
peptides est la chromatographie dexclusion haute perfor-
mance (CLHP) sur sephadex G-100 et G-50. Les premiers tra-
vaux ont permis de mettre en évidence une quantité dalbu-
mine dite totale plus élevée que lalbumine immunoréactive
chez des sujets non diabétiques et diabétiques [9,11,15,22].
Par la suite des études contradictoires ont été publiées. Nous
ne citerons que les plus importantes. Les premiers travaux
étaient basés sur lhypothèse que laugmentation systéma-
tique de lalbumine « CLHP » était due à une albumine modi-
fiée de même taille. Or, une méthode de séparation plus fine
[27] tenant compte du rayon hydrodynamique et de la forme
de la molécule, suivie dune spectrométrie de masse des
composés élués dans le pic de lalbumine a montré que le
pic dit « albumine totale » était en fait composé dalbumine,
mais également de glycoprotéines en particulier lα-1-glyco-
protéine acide et lα-1-antitrypsine, ces protéines représen-
tant 20 à 30 % de lalbumine dite fantôme.
Une autre récente étude par électrophorèse automati-
sée [7] sur puce utilisant une technologie de séparation
microfluidique et une détection par fluorescence a
confirmé la présence dune quantité dalbumine urinaire
plus importante que lalbumine immunoréactive confirmant
ainsi les premières hypothèses. On voit donc que peu de
temps après la première publication sur ce sujet il reste
encore des incertitudes analytiques.
Considérations cliniques
Le paragraphe précédent montre que la « vraie » nature de
lalbumine urinaire nest pas encore parfaitement éclaircie
[7,9,27]. Dans le même esprit, les études cherchant à confir-
mer lintérêt de doser lalbumine par chromatographie plu-
tôt que par immunodosage sont nombreuses et encore
contradictoires. En effet, les premiers travaux ont mont
que lalbumine « CLHP » permettait de dépister la phropa-
thie diabétique en moyenne 3,9 ans plus précocement [9,22]
que ne le font les résultats obtenus par immunodosage
(Tableau 6). Dautres études montrent que 15 à 30 % des
sujets considérés normaux avec un immunodosage de lalbu-
mine urinaire sont classés au stade de microalbuminurie en
CLHP [20]. On pourrait imaginer quune simple relation entre
les deux modes de dosage résoudrait ce problème. En fait, il
nexiste pas de relation directe entre la concentration
dalbumine urinaire mesurée par une méthode immunolo-
gique et une méthode chromatographique [7,20]. Des urines
de patients à des concentrations respectives (immunodosage
de < 20 mg/l, 90 mg/l, et 204 mg/l) puis mesurées par la
méthode électrophorétique par puce ont montré que
laugmentation est en moyenne de 51 % (entre 3 et 145 %)
mais, comme avec la chromatographie il ny a pas de rela-
tion donc pas de conversion possible. Il semble que la diffé-
rence entre les deux dosages diminue quand la concentration
en albumine augmente [24]. Le Tableau 5 présente les résul-
tats de plusieurs auteurs.
Tableau 5 Exemples détudes comparatives de la prévalence de la microalbuminurie déterminée par HPLC vs immunodosage
Étude Population Nombre de sujets Pourcentage (%)
de microalbuminurie
par immunodosage
Pourcentage (%)
de microalbuminurie
par HPLC
Comper et al. Diabétique 97 30,9 61,9
Polkinghorne Témoins 10010 5,8 20,6
Diabétique 861 21,5 46
Actualités en diabétologie 99
1 / 6 100%

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