La hernie discale lombaire CONSEIL D'ADMINISTRATION DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE CHIRURGIE ORTHOPÉDIQUE ET TRAUMATOLOGIQUE (SOFCOT 2019) Président . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Premier vice-président . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Deuxième vice-président . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Ancien président . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Secrétaire général . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Secrétaire général adjoint et secrétaire de l'AOT . . . . . . . . . . . . Trésorier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Président de l'AOT (Académie d'orthopédie et de traumatologie) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Président du CFCOT (Collège français des chirurgiens orthopédistes et traumatologues) . . . . . . . . . . . Président du SNCO (Syndicat national des chirurgiens orthopédistes) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Président d'Orthorisq . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Représentants des sociétés associées et partenaires SFA . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . AFCP . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . SFCM/GEM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . SFCR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . SFHG . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . SOFEC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . SOFOP . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . GETRAUM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 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Didier MAINARD Philippe TRACOL Stéphane BOISGARD Christian DELAUNAY Franck FITOUSSI Alexandre POIGNARD Olivier COURAGE Philippe VALENTI Hervé THOMAZEAU Bernard LLAGONE Christian DELAUNAY Christel CONSO Carlos MAYNOU Pierre MOUTON Jean-Charles LE HUEC Michel BONNIN Philippe VALENTI Stéphanie PANNIER Thierry BÉGUÉ Valérie DUMAINE Philippe ROSSET Tewfik BENKALFATE Roger BADET Gérard BOLLINI Didier MAINARD Philippe MASSIN Luc FAVARD Jean-François KEMPF Patricia THOREUX Louis DAGNEAUX Rémi KOHLER CAHIERS ET CONFÉRENCES D'ENSEIGNEMENT DE LA SOFCOT Conseil scientifique des Conférences d'enseignement et d'OTSR (Orthopædics and Traumatology Surgery and Research) Président de l'APCORT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bernard AUGEREAU-VACHER Président de l'AOT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Philippe VALENTI Secrétaire général de la SOFCOT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 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Raphaël SERINGE et Jérôme COTTALORDA Retrouvez la collection des Cahiers d'enseignement de la SOFCOT sur le site http://www em-consulte com/produits/livres → téléchargez les chapitres à l'unité ou les livres électroniques Cahiers d'enseignement de la SOFCOT Collection dirigée par Denis Huten, Rémi Kohler, Matthieu Ehlinger, Mickael Ropars La hernie discale lombaire Sous la direction de Henry-François Parent, Jean-Luc Barat, Régis Levasseur Avec la collaboration de : J ALLAIN, L AVOYAN, J -L BARAT, F BENTAHAR, A BLAMOUTIER, C CISTAC, R COMPAGNON, B DEBONO, F DEVIÈRE, V DUBUS, A DURAND, H DUVAL, P GARÇON, M HÄFNER, G HAYEK, M HUNEIDI, T JOSSEAUME, R LEVASSEUR, S LITRICO, O LUCAS, C MASSON, S MAZAS, H -F PARENT, A PETIT, G ROCHE-LEBOUCHER, Y RONZI, J SALES DE GAUZY, J -M VITAL, R WAGNER, S WOLFF Elsevier Masson SAS, 65, rue Camille-Desmoulins, 92442 Issy-les-Moulineaux cedex, France La hernie discale lombaire, dirigé par Henry-François Parent, Jean-Luc Barat, Régis Levasseur. © 2019 Elsevier Masson SAS ISBN : 978-2-294-76286-4 e-ISBN : 978-2-294-76423-3 Tous droits réservés. Les praticiens et chercheurs doivent toujours se baser sur leur propre expérience et connaissances pour évaluer et utiliser toute information, méthodes, composés ou expériences décrits ici. Du fait de l'avancement rapide des sciences médicales, en particulier, une vérification indépendante des diagnostics et dosages des médicaments doit être effectuée. Dans toute la mesure permise par la loi, Elsevier, les auteurs, collaborateurs ou autres contributeurs déclinent toute responsabilité pour ce qui concerne la traduction ou pour tout préjudice et/ou dommages aux personnes ou aux biens, que cela résulte de la responsabilité du fait des produits, d'une négligence ou autre, ou de l'utilisation ou de l'application de toutes les méthodes, les produits, les instructions ou les idées contenus dans la présente publication. Tous droits de traduction, d'adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays. 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Abréviations AINS ALIF ANAES Anti-inflammatoire non stéroïdien Anterior lumbar interbody fusion Agence nationale de l'accréditation et de l'évaluation en santé ASA American Society of Anesthesiologists CCAM Classification commune des actes médicaux CCI Commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux CIF Classification internationale du fonctionnement CLIN Comité de lutte contre les infections nosocomiales CNAM Caisse nationale de l'assurance maladie CRP Protéine C réactive CT Computerized tomography EIFEL Échelle d'incapacité fonctionnelle pour l'évaluation des lombalgies ENMG Électro-neuro-myographie ERAS Enhanced recovery after surgery ESA Espaces subarachnoïdiens ESTIMET Évaluation médico-économique de la stimulation médullaire multicolonnes EVA Échelle visuelle analogique FABQ Fear Avoidance Belief Questionnaire FAV Fistules artérioveineuses FIL Foramen intervertébral lombaire HAS Haute Autorité de santé IASP International Association for the Study of Pain IDE Infirmière diplômée d'État IBODE Infirmière de bloc opératoire IL Interleukines IMC Indice de masse corporelle IPP Incapacités permanentes partielles IRM Imagerie par résonance magnétique LCS Liquide cérébrospinal LCVA Ligament commun vertébral antérieur LCVP Ligament commun vertébral postérieur LLVP Ligament longitudinal vertébral postérieur LRPO Lombo-radiculalgies postopératoires LTR Lésions tissulaires réversibles LVP Ligament vertébral postérieur MACSF Mutuelle d'assurances du corps de santé français MCS Mental component score MED MKDE MMP NMDA NSTC OIT ODI OMS PCV PEM PES PLIF PMSI PSP RAAC RRa Rtms SAP SBST SDRA SFAR SF2H SFCR SFO SFMT SF36 SIMS SME SSPI STIR TCC TDM TENS TEP-scan TLIF TNFα UNILIF Microendoscopic discectomy Masso-kinésithérapeutes diplômés d'État Matrix metalloproteinase N-méthyl-D-aspartate Neurostimulation électrique transcutanée Organisation internationale du travail Oswestry Disability Index Organisation mondiale de la santé Plaques cartilagineuses vertébrales Potentiels évoqués moteurs Potentiels évoqués somesthésiques Posterior lumbar interbody fusion Programme de médicalisation des systèmes d'information Potentiels sensitifs périphériques Récupération améliorée après chirurgie Risque relatif ajusté sur l'âge Stimulation magnétique transcrânienne répétitive Processus articulaire supérieur STaRT Back screening tool Syndrome de détresse respiratoire aiguë Société française d'anesthésie et de réanimation Société française d'hygiène hospitalière Société française de chirurgie rachidienne Société française des ostéopathes Société française de médecine du travail Short Form-36 Société d'imagerie musculosquelettique Stimulation médullaire épidurale Salle de soins postinterventionnelle Short TI inversion recovery Thérapies cognitivo-comportementales Tomodensitométrie Transcutaneous electric nerve stimulation Tomographie par émission de positons couplée au scanner Transforaminal lumbar interbody fusion Tumor necrosis factor α Arthrodèse lombaire mini-invasive par voie unilatérale 3 Anatomie, physiopathologie et évolution naturelle des hernies discales lombaires J.-M. VITAL, M. HUNEIDI, S. MAZAS Introduction Dans ce chapitre, nous décrirons successivement : l'anatomie du disque normal, les causes de hernies discales, les types anatomiques des hernies, leurs conséquences neurologiques (qui sont dues à des causes à la fois mécaniques et chimiques) et, enfin, leur évolution naturelle. Le disque intervertébral lombaire a la forme d'une lentille biconvexe, constituée de fibrocartilage avec une partie centrale, le nucleus pulposus, qui provient de la notochorde, et en périphérie l'annulus fibrosus qui vient du mésoderme. La distinction entre ces deux portions du disque n'est pas nette sur le plan macroscopique. Elle apparaît mieux en histologie et elle existe principalement sur le plan chimique. En fait, on parle plutôt maintenant de complexe disco-épiphysaire puisque l'on associe à l'annulus fibrosus les plateaux cartilagineux ou plaques cartilagineuses vertébrales (PCV) (figure 1.1). Anatomie du disque intervertébral normal [1, 2] L'annulus fibrosus est formé de 7 à 15 lamelles concentriques, en bulbe d'oignon, constituées de fibres de collagène de types 1 et 2 et disposées à 120° d'une couche à l'autre. Il existe aussi quelques cellules ainsi qu'une matrice. Il est à noter que les lamelles postérieures sont moins nombreuses, ce qui pourrait expliquer la présence de Listel marginal Nucleus pulposus Plaque cartilagineuse vertébrale Figure 1.1 Anatomie du disque. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Annulus fibrosus fissures (et donc de hernies discales) plus fréquentes dans cette région. On considère que l'annulus fibrosus est le plus fort ligament intervertébral et participe à la stabilisation du segment mobile de Junghanns, qui comprend disques, massifs articulaires et l'ensemble des ligaments intervertébraux. Le nucleus pulposus est une masse gélatineuse centrale plutôt située à l'arrière du centre du disque. Il est très hydrophile car riche en protéoglycanes, macromolécules hydrophiles, ce qui lui permet d'assurer une fonction d'amortissement. Il est parfaitement stabilisé par l'annulus fibrosus. Les PCV sont constituées de couches de cartilage hyalin, de 1 à 1,5 mm d'épaisseur avec une zone criblée centrale qui permet les passages liquidiens. Il existe une zone de faiblesse entre l'os sous-chondral et cette PCV avec un faible amarrage fibrillaire, ce qui crée donc une possibilité d'arrachement de la plaque en même temps que la hernie discale chez l'enfant en croissance, nous y reviendrons. Les disques lombaires sont de plus en plus hauts en partant du disque L1-L2 jusqu'au disque L5-S1. Il faut savoir qu'il existe une lordose discale de 15 à 20° au niveau L5-S1 et une lordose de 10 à 12° au niveau L1-L2 car le bord antérieur du disque est plus haut que le bord postérieur (figure 1.2). Sur le plan histologique et chimique, on notera qu'il y a peu de cellules dans le disque intervertébral (9000/ mm3 au niveau de l'annulus fibrosus contre seulement 3000/mm3 au niveau du nucleus pulposus). Il existe donc des fibroblastes à la périphérie de l'annulus fibrosus ainsi que des cellules chondrocytaires au centre de ce même annulus fibrosus, ces cellules produisent des protéoglycanes. Il existe quelques grosses cellules vacuolaires dans le nucleus pulposus, qui sont des reliquats de la notochorde. On trouve dans le disque intervertébral des collagènes de sept types ; le type 1 se situe en périphérie de l'annulus fibrosus et le type 2 au centre de celui-ci, avec une transition qui se fait de façon progressive. 4 J.-M. Vital, M. Huneidi, S. M Z S 10 à 12° 15 à 20° Causes des hernies discales L'origine des hernies discales est principalement mécanique. Cependant, on sait qu'un facteur chimique peut venir s'ajouter au facteur mécanique. On constate également une augmentation de fréquence de ces hernies discales sous l'effet du stress, pour des raisons génétiques et, de façon plus récente, en rapport avec des anomalies de l'équilibre sagittal. Causes mécaniques L'interrogatoire d'un patient présentant une hernie discale lombaire fait régulièrement apparaître une cause mécanique, avec notamment un faux mouvement en rotation (rotation qui est certainement le mouvement qui expose le plus à la déchirure des fibres de l'annulus fibrosus). Rannou et al. [4] ont rappelé, dans leur article, les causes mécaniques de hernies et ont démontré que la flexion et l'inclinaison associées à la compression entraînaient plus régulièrement des lésions de l'annulus fibrosus qu'une compression pure. Il existe un lien entre les phénomènes mécaniques et chimiques dans ce type de lésions. En effet, on sait que l'hyperpression sur le disque va entraîner une diminution de la production des protéoglycanes ainsi que la production de matrice extracellulaire. Les fissures discales sont étudiées depuis très longtemps, notamment par Kelsey et al. [5] en 1984, qui notaient que le mécanisme de flexion et de rotation dans la vie quotidienne pouvait entraîner une fissure. Plus récemment [6], une étude expérimentale, en 2017, a pu préciser la topographie de ces fissures qui sont le plus souvent radiaires et qui iront se diriger en régions postéro-latérale (75 %), médiane (8 %), foraminale et extraforaminale (10 %), latérale (6 %) et antérieure (1 %) (figure 1.3). Génétique Figure 1.2 Lordose discale variable selon les niveaux. De très nombreuses études ont démontré qu'il existait un facteur génétique expliquant la dégénérescence discale [7, 8] et incontestable dans l'apparition non pas 1% 6% 10 % 8 % 75 % A B C Figure 1.3 Topographie des fissures et des hernies discales (A), antérieure (1 %), latérale (6 %), foraminale (6 %) et extraforaminale (4 %), postérolatérale (75 %), médiane (8 %). Hernie postérolatérale (B). Hernie extraforaminale (C). Source : d'après Lavignolle B. Le disque intervertébral. In. Anatomie de la colonne vertébrale, nouveaux concepts. Montpellier : Sauramps Médical ; 2016 [2]. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Le disque intervertébral n'est vascularisé que pendant l'enfance et essentiellement à sa périphérie. L'innervation sensitive n'existe qu'au niveau de l'annulus postérieur et elle se fait par le nerf sinu-vertébral de Luschka avec un rameau méningé qui se distribue à l'annulus fibrosus, au ligament longitudinal dorsal et à la dure-mère. Il existe un vieillissement naturel du disque (ou dégénérescence discale) qui apparaît dès la 2e décennie. Le point de départ est un problème inflammatoire avec présence de métalloprotéases (matrix metalloproteinase-3 [MMP3]), de cytokines, de facteurs de croissance. En fait, il existe un lien entre les problèmes mécaniques et l'augmentation des pressions sur le disque, ce qui entraîne d'un côté une diminution de la production des protéoglycanes et de l'autre une augmentation de la production des MMP3 [3]. Il faut savoir, à l'inverse, qu'une augmentation modérée de la pression sur le disque a un effet plutôt favorable avec augmentation de la production des protéoglycanes. natomie, physiopathologie et évolution naturelle des hernies discales lombaires de la dégénérescence discale mais de la hernie discale lombaire elle-même. L'explication de tous ces phénomènes passerait par une polymorphie et une anomalie des gènes encodant le collagène, notamment 9 et 11, qui est un constituant important de l'annulus fibrosus. Équilibre sagittal La classification récente de Roussouly a permis de reconnaître des types de 1 à 4 : les types 1 et 2 ont une faible incidence pelvienne, donc une faible lordose lombaire, qui explique des contraintes très importantes sur la colonne des corps vertébraux et des disques intervertébraux. De nombreuses études, notamment celle de Mardare et al. [9], ont pu mettre en lumière un lien direct entre la classification de Pfirmann, évaluant la déshydratation discale, et le type 1 ou 2 de Roussouly. Bae et al. [10] ont, quant à eux, démontré que, dans les types 1 et 2, il y avait plus de hernies discales hautes que des hernies discales basses L4-L5 et L5-S1 (40 % de hernies discales hautes pour les types 1 et 25 % pour les types 2). Stress Dans la pratique quotidienne, on note de façon régulière, dans le discours des patients présentant une hernie discale lombaire, une période de stress et de vie familiale ou professionnelle compliquée. Engel-Yeger et al. [11] ont bien démontré, par ailleurs, que la surcharge émotionnelle augmentait le retentissement sur sa vie quotidienne du porteur de hernie discale. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Anatomopathologie des hernies discales énominations (figure 1.4) Il existe de nombreuses dénominations des hernies discales tenant compte de leur position : • dans le plan horizontal avec description des hernies médianes, postéro-latérales, foraminales, extraforaminales ; • dans le plan sagittal avec description des hernies « non migrées » (c'est-à-dire en regard du disque) ou migrées vers le haut ou vers le bas. Daghighi et al. [12], sur 1200 cas de hernies migrées étudiées en imagerie par résonance magnétique (IRM), ont démontré que les migrations s'effectuaient le plus souvent vers le bas et en situation postéro-latérale. La protrusion peut être considérée comme le 1er stade de la hernie discale. Le plus souvent, elle n'a aucun caractère pathologique puisqu'elle correspond à un léger affaissement du disque. Les Anglo-Saxons parlent de « bulging disc » ou « disque bombant ». 5 On oppose par ailleurs les hernies séquestrées, qui sont séparées du disque, aux hernies non séquestrées ainsi que les hernies préligamentaires situées en avant de l'annulus fibrosus postérieur et les hernies transligamentaires, en général intracanalaires, qui ont perforé l'annulus postérieur. opographie des hernies discales lombaires Les hernies lombaires peuvent se situer dans une des différentes portions du canal radiculaire, qui comprend de haut en bas : l'espace rétro-discal puis le récessus latéral, qui est en dedans du pédicule de la vertèbre qui a le numéro de la racine circulant dans ce récessus, enfin, le foramen intervertébral qui se situe entre les deux pédicules adjacents. La figure 1.5 montre qu'une hernie discale L4-L5 postéro-latérale entraînera une compression de la racine L5 dans l'espace rétrodiscal et dans le récessus latéral. Mais si cette hernie est foraminale ou extraforaminale, elle comprimera la racine L4, située dans la partie haute du foramen intervertébral. La hernie médiane dite « sténosante » est une situation particulière. Elle complique assez régulièrement un tableau de malformation congénitale de la charnière lombo-sacrée (anomalie de Bertolotti) (figure 1.6). Elle est constituée le plus souvent d'un gros fragment préligamentaire médian, compressif pour la queue de cheval et n'ayant pas tendance à se résorber puisqu'en continuité avec le disque et, par ailleurs, souvent associé à l'ébauche d'un canal lombaire étroit (figure 1.7). B : protrusion C : hernie séquestrée non migrée A : normal D : hernie séquestrée migrée E : hernie transligamentaire non séquestrée F : hernie transligamentaire séquestrée Figure 1.4 Différents types de hernies discales. Source : d'après Lavignolle B. Le disque intervertébral. In. Anatomie de la colonne vertébrale, nouveaux concepts. Montpellier : Sauramps Médical ; 2016 [2]. 6 J.-M. Vital, M. Huneidi, S. M Z S À côté des hernies molles décrites, les plus fréquentes, il existe des hernies dites « calcifiées » ou « dures ». Calcifiées comme les ostéophytes observés au niveau des articulaires postérieures dans le cadre de l'arthrose mais il peut s'agir, si le sujet est jeune, d'images correspondant à un arrachement du listel marginal (ou limbus). L'anatomie explique parfaitement la mécanique de cet arrachement (figure 1.8) : les fibres de l'annulus fibrosus sont très adhérentes au listel qui, lui-même, est beaucoup moins adhérent au corps vertébral. Une contrainte qui occasionnerait une déchirure discale chez le jeune adulte entraînera un décollement du listel, comme un décollement épiphysaire. Takata et al. [13] ont décrit trois types principaux : décollement du listel seul, décollement associé à un arrachement osseux et décollement à l'aplomb du ligament longitudinal dorsal (figure 1.9). Vertèbre L4 Racine L4 Vertèbre L5 Racine L5 Figure 1.5 Une hernie discale L4-L5 foraminale migrée vers le haut entraîne une compression de la racine L4, tandis qu'une hernie L4-L5 postérolatérale entraîne une compression de la racine L5. A B A Figure 1.7 Hernie médiane sténosante L4-L5 (flèche) (A, B). B © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 1.6 Hernie médiane et migrée vers le bas (flèche) sur anomalie de charnière lombo-sacrée (Bertolotti) (A, B). natomie, physiopathologie et évolution naturelle des hernies discales lombaires Dernière situation particulière anatomique : les hernies sur spondylolisthésis dégénératif (il s'agit là de lésions tout à fait exceptionnelles) ou par lyse isthmique, préférentiellement en L5-S1. Au niveau de ce disque olisthésique, on sait qu'on assiste surtout à un étirement de l'annulus fibrosus et, beaucoup plus rarement, on trouvera une hernie sous-ligamentaire mais qui est très latérale [14]. En réalité, il faut noter que, dans ces spondylolisthésis lytiques de L5, les hernies se situent plutôt au niveau sus-jacent L4-L5 (figure 1.10). Conséquences neurologiques La hernie peut donc entraîner une compression radiculaire. Depuis les travaux de Spengler et Freemann en 1979 [15], on sait que la compression pure d'un nerf entraîne des dysesthésies mais pas de douleur. Cette compression sera évidemment plus agressive sur le ganglion spinal, très sensible aux problèmes mécaniques. Nous savons depuis de nombreux travaux sur le sujet, notamment ceux de Goupille et al. [16], qu'il faut une inflammation associée à une compression pour qu'il y ait douleur. Cela a été prouvé expérimentalement en apposant des fragments de nucléus sur la racine de l'animal, ce qui entraîne une inflammation. On obtient le même résultat en injectant du tumor 7 necrosis factor α (TNF-α), facteur pro-inflammatoire avec une réponse douloureuse plus marquée pour le ganglion spinal. Olmaker et al. [17] ont bien étudié l'effet de la pression sur le nerf : si cette pression est entre 50 et 200 mm de mercure, on observe un œdème intraneural et si cette compression est prolongée, on observe une déformation des nœuds de Ranvier avec une invagination de la gaine de myéline [18]. La compression peut être veineuse avec œdème avant que l'ischémie artérielle n'apparaisse. Si cette compression est sévère, dès les premières semaines, on observe une hémorragie intraneurale, une inflammation et une fibrose péri-intraneurale, surtout si la compression est prolongée. Si la racine est peu mobile, en cas de fibrose postopératoire ou de canal lombaire étroit, la compression due à la hernie discale surajoutée aura évidemment un effet plus important. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Listel marginal ou limbus Figure 1.8 Le listel étant moins adhérent au corps vertébral qu'à l'annulus, il peut se décoller et reculer vers le canal rachidien. A Figure 1.10 Hernie discale en L4-L5 au-dessus d'un spondylolisthésis par lyse isthmique de L5 (flèche). B Figure 1.9 Les trois types de décollement du listel marginal de Takata [13]. A. Type I. B. Type II. C. Type III. C 8 J.-M. Vital, M. Huneidi, S. M Z S L'imagerie par tenseur de diffusion des racines, selon Wu et al. [19], permet d'évaluer le retentissement radiculaire selon la durée et l'intensité de la compression. Tous ces phénomènes de compression radiculaire entraîneront donc une sémiologie très caractéristique, qui va être douloureuse dans les territoires présentés sur la figure 1.11, mais avec parfois aussi des déficits sensitifs, moteurs et réflexes selon les différentes racines, rappelés dans le tableau 1.1. évolution le plus souvent favorable. Les métalloprotéases produites par les cellules du tissu de granulation autour de la hernie et par les chondrocytes participent à cette résorption. Benoist [23] a établi un algorithme (figure 1.14) démontrant la cascade des événements allant jusqu'à la résorption. Les cytokines pro-inflammatoires (interleukines 6 [IL-6] et TNF-α), sécrétées par Évolution naturelle On sait qu'elle est favorable dans plus de 90 % des cas, d'après les travaux anciens et très classiques de Weber [20]. Parallèlement à cette évolution clinique favorable, on observe une disparition ou une régression des images en IRM ou en scanner des hernies dans 50 à 60 % des cas en six à 12 mois, phénomène partiel ou complet, surtout observé pour les hernies exclues (figures 1.12, 1.13). Ce phénomène de résorption herniaire a été très largement étudié [21-24]. Si la hernie est préligamentaire, ce risque de résorption est plus faible et doit probablement survenir du fait d'une déshydratation, modérée mais incontestable. Par contre, si la hernie est exclue, il y a afflux des macrophages induit par les chémokines libérées localement. Le tissu de prolifération vasculaire avec néoangiogenèse participe à cette résorption. On note, dans la région herniaire, la présence de facteurs de croissance, notamment de croissance fibroblastique et des substances pro-inflammatoires, comme la phospholipase A2 ou les cytokines. Ces éléments inflammatoires sont à la fois agents de la douleur mais aussi de la résorption, entraînant cette Figure 1.11 Territoires radiculaires sensitifs au membre inférieur (A, B). Trajet douloureux (et déficit sensitif) Déficit moteur Réflexe diminué ou aboli L3 Fesse Face antérieure de la cuisse Face interne du genou Quadriceps fémoral (extension du genou) et tibia antérieur (flexion dorsale du pied) Dérobement du genou Rotulien L4 Fesse Face extérieure de la cuisse Face antérieure du genou Face antéro-interne de la jambe L5 Fesse Face postérieure de la cuisse Face externe de la jambe Dos du pied et gros orteil Extenseurs des orteils Péroniers latéraux et partiellement tibial antérieur Marche sur les talons difficile ou impossible Steppage S1 Fesse Face postérieure de la cuisse Face postérieure de la jambe Talon, plante du pied et 5e orteil Triceps sural (flexion plantaire du pied) Marche sur les pointes difficile ou impossible Achilléen © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Tableau 1.1 Signes cliniques selon les racines concernées. natomie, physiopathologie et évolution naturelle des hernies discales lombaires Figure 1.12 Résorption partielle d'une hernie discale L4-L5 gauche (A, B). Figure 1.13 Résorption totale d'une hernie discale L3-L4 gauche (A, B). © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Hernie discale épidurale Réaction immunologique Néovascularisation Macrophages TNF α Interleukine 6 Protéases Dégradation discale Figure 1.14 Mécanismes à la fois de la douleur et de la résorption discales. Source : d'après Benoist [23]. Prostaglandine E2 Souffrance radiculaire 9 10 les macrophages et les cellules endothéliales du tissu de granulation, stimulent la production de collagénase (MMP1) et de la stromélysine (MMP3) qui favorisent le processus de destruction du fragment hernié. La résorption est plus importante si cette hernie est volumineuse. Il existe de petites hernies discales qui resteront stables en imagerie mais avec une clinique qui s'améliorera. D'ailleurs, cette amélioration clinique précède souvent la résorption radiologique. Ce schéma d'évolution favorable, autant sur le plan clinique qu'anatomique, peut ne pas s'observer dans plusieurs circonstances : • chez les jeunes (ou teenagers), la hernie, le plus souvent préligamentaire, touche des disques très hydratés et la résorption décrite est beaucoup plus rare, conduisant à des indications chirurgicales plus fréquentes que chez l'adulte [25] ; • dans le cas de hernie « dure » par arrachement du limbus, la résorption, si l'enfant n'a pas été opéré, ne se faisant pas, peut conduire à un rétrécissement du canal central, localisé au segment intervertébral touché ; • La hernie sténosante, compliquant souvent un canal lombaire étroit, le plus souvent séquestrée mais préligamentaire, conduit-elle aussi assez régulièrement à la chirurgie de recalibrage, dissectomie et parfois arthrodèse, qui peut être non rigide. Déclaration d'intérêts Les auteurs de ce chapitre déclarent n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé ences [1] Rannou F, Mayoux-Benhamou MA, Poiraudeau S, Revel M. Disque intervertébral et structures voisines de la colonne lombaire : anatomie, biologie, physiologie et biomécanique. In : EMC. Elsevier Masson SAS, Paris : Appareil locomoteur ; 2004. 15-840-A-10. [2] Lavignolle B. Le disque intervertébral. In. Anatomie de la colonne vertébrale, nouveaux concepts. Montpellier : Sauramps Médical ; 2016. [3] Handa T, Ishihara H, Ohshima H, Osada R, Tsuji H, Obata K. Effects of hydrostatic pressure on matrix synthesis and matrix metalloproteinase production in the human lumbar intervertebral disc. Spine 1997 ; 22 : 1085–91. [4] Rannou F, Corvol M, Revel M, Poiraudeau S. Disk degeneration and disk herniation : the contribution of mechanical stress. Joint Bone Spine 2001 ; 68 : 543–6. [5] Kelsey JL, Githens PB, White AA. An epidemiologic study of lifting and twisting on the job and risk for acute prolapsed lumbar intervertebral disc. J Ortho Res 1984 ; 2 : 61–6. 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BLAMOUTIER Introduction Si la notion de douleur du nerf sciatique, nerf ischiatique à l'époque, date depuis plus de 250 ans [1], la chirurgie de la hernie discale est beaucoup plus récente, à peine 100 ans. Les premiers opérateurs n'avaient pas compris initialement les liens entre le disque intervertébral et la compression radiculaire. Les voies d'abord initialement très délabrantes se sont affinées avec le temps pour devenir de moins en moins agressives, voire ponctuelles. Cependant, hormis certaines thérapeutiques intradiscales, le principe thérapeutique de base est toujours resté le même : la suppression de visu du conflit discoradiculaire. C'est la voie d'accès à ce conflit qui a changé depuis 100 ans. Le but de ce chapitre est de rappeler les étapes techniques clés de cette évolution en rappelant les articles princeps. Notre propos n'est pas d'évaluer ces techniques ou de les comparer, surtout par rapport aux toutes dernières proposées. Quatre étapes chronologiques sont distinguées. Les prémices jusqu'en 1929, puis la compréhension du mécanisme en 1930, l'apparition de la microchirurgie en 1977 et, enfin, les techniques endoscopiques à la fin du XXe siècle. masse qui était analysée comme étant un enchondrome. Cette erreur était en partie due à la méconnaissance de la structure du disque, annulus fibrosus et nucleus pulposus. Durant 20 ans, une quinzaine de cas identiques allaient être publiés dans la littérature avec toujours le diagnostic d'enchondrome. Découverte (1927 à 1930) C'était une équipe française de Paris avec le neurologue Alajouanine et le chirurgien Petit-Dutaillis qui comprirent le principe du conflit discoradiculaire. Ils avaient été aidés pour cela par les travaux de Schmoll, anatomophatologiste allemand. Ils présentaient deux cas dont le premier avait été opéré en 1927 [3]. La technique chirurgicale était la même que celle employée par Oppenheim. Ils notaient le 20 décembre 1930 [4] : « nous avons montré que ces curieuses formations doivent être considérées comme le résultat d'une hernie de la pulpe centrale du disque au travers de ce dernier, hernie favorisée soit par un traumatisme, soit par des altérations pathologiques du disque. Ces deux causes pouvant d'ailleurs combiner leurs effets ». C'était la base de la physiopathologie du conflit discoradiculaire. Leurs travaux n'avaient pas vraiment eu de suite et probablement la barrière de la langue avait fait qu'ils n'avaient pas été compris par les auteurs américains. Prémices (1909 à 1929) Confirmation (1934 à 1945) Les premiers auteurs à avoir décrit une technique chirurgicale, qui va durer 25 ans, étaient Oppenheim et Krause en 1909 [2]. Ils avaient opéré deux patients d'un canal lombaire étroit manifestement décompensé par une hernie discale et entraînant des troubles neurologiques. La technique consistait en une laminectomie large sur deux ou trois niveaux. Les auteurs constataient alors une strangulation antérieure du sac dural. Pour y accéder, ils faisaient une durotomie postérieure puis, écartant les racines de la queue de cheval, ils constataient une masse antérieure. Ils ouvraient la dure-mère en avant et faisaient l'ablation de cette Deux équipes américaines allaient pendant dix ans confirmer (sans vraiment les citer) les travaux précédents mais en publiant des séries conséquentes de patients. Mixter et Barr en 1934 [5] rapportaient une série de 19 patients opérés d'une hernie discale dont onze lombaires. La technique était toujours la même. C'est cet article qui est considéré, encore actuellement dans la littérature internationale, comme étant le début de la chirurgie de la hernie discale. Pendant dix ans, ils allaient augmenter leur nombre de patients et affiner la technique. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés A. Bl moutier Love et Camp [6] en 1937 publiaient une série de 50 patients. Ils insistaient sur la rareté du diagnostic. En effet, durant une même période, avant 1935, seuls onze patients opérés de « tumeur de la moelle épinière » sur 471 avaient une hernie lombaire. Ils proposaient une nouvelle technique et étaient considérés comme les initiateurs de la chirurgie moderne. En effet, même si l'abord cutané restait large, ils proposaient lors des hernies latérales une voie d'abord unilatérale avec une laminectomie partielle et surtout un abord extradural. À partir de cette période, l'évolution de la technique chirurgicale allait vers la diminution de la taille de la voie d'abord jusqu'à la dure-mère. Pendant 30 ans, jusque dans les années 1970, on ne constatait pas de progrès notoire ni de publication majeure. On restait à la technique conventionnelle, même si l'abord cutané avait diminué et l'abord intracanalaire était extradural. Apparition de la microchirurgie et ses évolutions (1977 à nos jours) Depuis le début de la décennie 1970, plusieurs auteurs pensaient que la diminution de la voie d'abord et du traumatisme musculaire et osseux permettrait d'obtenir un meilleur résultat clinique et une réhabilitation plus rapide. Les progrès de l'industrie pouvaient permettre d'envisager ces possibilités techniques. Cependant, pour diminuer la taille de la voie d'abord et voir le fond de la plaie, il fallait de nouveaux outils. La magnification optique et l'amélioration de l'éclairage grâce à un microscope permettaient de répondre à ce challenge. C'était l'apparition de la microchirurgie. Il était possible de réduire le traumatisme musculaire et de permettre une dissection plus fine du conflit. Yasargil [7] en 1977 publiait un court article d'une page. C'était un chirurgien d'origine Turque ayant fait ses études à Zurich. Il publiait une série de 105 cas et avait commencé en 1967 à utiliser le microscope. L'incision faisait 2,5 à 3 cm. Le muscle était détaché du périoste et maintenu par un écarteur. Si l'abord entre les lames faisait moins de 1 cm, il faisait une fenestration du ligament jaune sans laminectomie. Le microscope était alors placé. Il réalisait en fin d'intervention une suture de l'annulus et du ligament jaune. Son idée était : « la technique microchirurgicale permet l'amélioration de la visualisation et de la précision du traitement des hernies discales lombaires ». Dans le même livre, Caspar, chirurgien américain [8], proposait une technique à propos d'une série de 102 patients pour diminuer les lésions sur les tissus mous. Il utilisait aussi le microscope. L'incision faisait 3 cm et le muscle était décroché de l'épineuse. Un spé- culum était placé puis enfin le microscope. Il notait les mêmes avantages que Yasargil avec la possibilité pour l'assistant de suivre l'opération. Williams, en 1979 [9], à propos d'une série de 530 patients, proposait également une technique microchirurgicale avec l'utilisation du microscope. L'incision était de 3 cm et l'abord musculaire se faisait avec l'index jusqu'à la lame. Un écarteur spécifique était placé. L'abord était strictement interlamélaire. L'annulus et le ligament jaune n'étaient pas suturés en fin d'intervention. Vingt ans plus tard, toujours avec le même esprit de diminuer le traumatisme musculaire, est apparu le concept de la chirurgie vidéo assistée. Popularisée par Foley et Smith [10] en 1997, elle consistait à réaliser un abord transmusculaire après une incision cutanée de 2 cm. Des tubes métalliques de grandeur croissante étaient introduis. Un endoscope spécial était fixé sur le plus gros des tubes de 18 mm de diamètre. Celui-ci était fixé à la table par un bras articulé. Avec des instruments classiques, on pouvait réaliser l'intervention. Les techniques étaient popularisées sous le nom de microendoscopic discectomy (MED). En France, Destandau [11] en 1999 utilisait un spéculum avec plusieurs portes d'accès dans lesquelles on pouvait introduire un arthroscope standard et réaliser la même intervention. Techniques percutanées (1967 à nos jours) Toujours à la recherche de la diminution de taille de la voie d'abord, et d'une meilleure visualisation du conflit discoradiculaire, la réalisation des techniques percutanées était logique. Retracer l'historique est compliqué tant le nombre de techniques proposées a été important, dont bon nombre d'entre elles n'ont plus cours de nos jours. echniques intradiscales de décompression « indirecte » Contrairement au principe de base de la chirurgie classique de la hernie discale : visualisation et suppression de la hernie, plusieurs auteurs avaient imaginé la suppression du conflit de manière indirecte en traitant la hernie par voie intradiscale. Smith et al. [12] proposaient chez 75 patients dont 22 déjà opérés, en 1967, l'injection d'une enzyme, la chymopapaïne, extraite de papaya latex. Elle avait une action protéolytique sur le nucleus et pouvait ainsi lyser la hernie discale. Très populaire durant plus de 30 ans, la technique a été arrêtée, entre autres du fait des complications allergiques gravissimes. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 12 Historique des techniques chirurgicales Bien d'autres techniques intradiscales (mise en place d'une fibre laser, à ultrasons, d'injection de produits divers : corticoïdes, alcool, etc.) allaient être proposées à la place de la papaïne, souvent sans véritable lendemain. Constatant que la voie latérale du disque proposée par Smith était plutôt simple et peu dangereuse, deux équipes publiaient quasi simultanément une technique d'ablation du nucleus à travers une canule réalisant ainsi une nucléotomie. Kambin et Gellman [13] avait commencé en 1973 cette technique et publié ses résultats en 1983. Hijikata et al. [14] publiaient une série en 1975. Le principe était de réaliser par une voie postéro-latérale une fenestration du disque puis l'ablation manuelle, avec des pinces introduites à travers une canule, d'une partie du nucleus et de diminuer la pression intradiscale entraînant de fait la diminution de l'irritation de la racine. Onik et al. [15] en 1985 réalisaient une nucléotomie automatisée avec un shaver placé en intradiscal. Cette technique se perfectionnait avec les progrès de l'industrie en matière d'optique et, en 1983, Hausmann et Forst [16] réalisaient la première nucléoscopie pour vérifier le disque dans le même temps qu'une intervention classique à ciel ouvert. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés echniques d'endoscopie avec visualisation directe par voie foraminale ou interlamaire Ici, la technique princeps visualisation/ablation du conflit était de retour. La description par Kambin et al., en 1990, du triangle de sécurité [17] ouvrait la voie de la foraminoscopie puis permettait d'abord de traiter les hernies discales purement foraminales. Avec l'évolution et la maîtrise des techniques, les hernies exclues ou non, foraminales et intracanalaires, pouvaient être atteintes par la foraminoscopie [18, 19]. Dès lors des techniques de full endoscopy pouvaient être réalisées aussi bien par voie foraminale que par voie interlaméllaire [20, 21]. Évolution de la prise en charge en postopératoire Le premier patient qui avait été opéré par PetitDutaillis avait été levé au 15e jour après l'opération et était resté sept semaines à l'hôpital. Depuis 1996, Carragee et al. [22] insistaient sur le fait que les patients pouvaient être levés très précocement et proposaient une hospitalisation courte et une 13 reprise de travail rapide. Depuis 30 ans [23, 24], les hernies discales lombaires pouvaient dans certaines conditions être pratiquées en ambulatoire. Si les techniques percutanées et mini-invasives ont certainement aidé pour réaliser une prise en charge en hospitalisation ambulatoire, la technique conventionnelle a pu également être employée. Les progrès de l'anesthésie mais aussi de l'éducation thérapeutique proposée aux patients ont eu un rôle essentiel. Conclusion L'évolution technique depuis 1909 jusqu'à nos jours a été spectaculaire. La diminution du traumatisme cutané, musculaire et osseux proposée en 1977 avec la microdiscectomie a été une avancée sur le plan technique. L'apparition de l'endoscopie confirmait tous les progrès. Cependant, depuis 40 ans, l'amélioration des résultats cliniques reste toujours discutée et aucune méthode n'est véritablement considérée comme étant la technique de référence du traitement des hernies discales lombaires. Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé ences [1] Cotugno D. De Ischiade nervosa. 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Il existe également une irritation chimique de la racine nerveuse au contact du matériel discal ainsi que des phénomènes d'ischémie vasculaire intraneurale, en particulier dans le mécanisme de compression chronique. En pratique clinique, les racines nerveuses touchées sont L5 et S1 pour les sciatiques, L4 et L3 pour les cruralgies. Ces racines nerveuses prennent en charge des dermatomes (zones cutanées de sensibilité) et des myotomes (groupes musculaires) particuliers où va s'exprimer la symptomatologie clinique. La douleur lombaire semble impliquer plusieurs structures : le disque intervertébral, en particulier sa structure externe : l'annulus (du fait de la présence de fibres nerveuses nociceptives), le ligament vertébral commun postérieur, les muscles paraspinaux et les articulations interapophysaires postérieures. La sciatique d'origine discale est fréquente ; c'est pour cette raison qu'elle a été qualifiée de « commune » par Stanislas de Sèze dès 1939. Le conflit entre la hernie discale lombaire et la racine nerveuse concernée va provoquer, d'une part, un syndrome lombaire comportant une douleur et un enraidissement et, d'autre part, un syndrome monoradiculaire comportant un trajet douloureux dans le membre inférieur ainsi qu'une atteinte potentielle motrice, sensitive et possiblement réflexe de la racine concernée, réalisant le tableau clinique de lombosciatique (pour L5 et S1) ou lombocruralgie (pour L3 et L4). Une volumineuse hernie discale lombaire basse, en particulier médiane, peut aussi comprimer plusieurs racines nerveuses, réalisant un syndrome de la queue de cheval, rare indication chirurgicale urgente à ne pas manquer. Il faut cependant bien garder à l'esprit qu'il n'y a pas toujours de corrélation entre le type de hernie discale (localisation, volume) et la gravité du tableau cliLa hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés nique, ce qui donne toute sa place à l'examen clinique que le praticien devra s'efforcer de répéter au fil de l'évolution. Cet examen clinique comporte une analyse du rachis lombaire, des membres inférieurs et de recherche de signes pouvant conforter le diagnostic de sciatique ou cruralgie par hernie discale ou faire discuter les diagnostics différentiels. Symptomatologie Syndrome lombaire La notion d'antécédent de lombalgie isolée ou de lombosciatique (ou cruralgie) est déjà souvent présente à l'interrogatoire d'un patient consultant pour une sciatique. Les circonstances déclenchantes sont souvent caractéristiques : soulèvement ou port de charges lourdes, mouvements de cisaillement ou torsion du rachis (taillage de haie, etc.), réalisation de longs trajets en véhicules, en mettant des chaussures ou en enfilant des bas ou un pantalon, etc. La douleur lombaire avec irradiation radiculaire peut être provoquée par les mouvements de flexion, d'extension ou d'inclinaisons latérales du rachis lombaire, voire de rotation axiale. La lombalgie peut survenir immédiatement ou progressivement, quelques jours après l'effort, ainsi que la radiculalgie qui peut n'apparaître que quelques jours après le début de la lombalgie. La sciatique est fréquemment précédée de plusieurs épisodes de lombalgies. On constate l'absence de fièvre et d'altération de l'état général. Examen du rachis lombaire Douleur lombaire Il s'agit d'une lombalgie en barre, plus ou moins intense, souvent à la limite lombosacrée, médiane ou latéralisée dans l'angle sacro-iliaque, de rythme mécanique, irradiant vers le membre inférieur et accompagnée d'une raideur invalidante. R. L va Raideur avec contracture paravertébrale lombaire On palpe habituellement et on visualise parfois la contracture lombaire en position debout ou assise, responsable d'une raideur rachidienne dite « segmentaire ». Cette palpation provoque surtout une douleur au niveau des deux derniers étages lombaires, parfois assez localisée, parfois un peu plus diffuse. Toute tentative de mobilisation de ce segment rachidien en flexion, en extension et en inclinaison latérale pourra provoquer des douleurs lombaires, voire radiculaires [2]. Attitude antalgique Dans le plan sagittal, le rachis lombaire peut perdre sa lordose physiologique, jusqu'à l'apparition d'une cyphose irréductible (attitude antalgique statique), voire une proclinorachie ; l'extension du rachis étant souvent très douloureuse. La flexion antérieure du rachis est vite limitée par le déclenchement d'une douleur que le patient essaie de limiter en effectuant une légère rotation axiale du rachis. Dans le plan frontal, on constate le plus souvent une inflexion croisée (du côté non douloureux) avec courbure de compensation au dessus, classiquement plus fréquente dans les sciatiques L5 comparativement à S1. L'inflexion directe (du côté douloureux) est assez rare. Cette déviation latérale peut apparaître uniquement lors d'un mouvement de flexion antérieure. Le signe de la cassure s'observe lorsque la flexion latérale opposée ne se produit qu'au dessus du segment lombaire bloqué (attitude antalgique en dynamique) (figure 3.1). Comme nous l'avons vu, si l'examinateur essaie de réduire cette déviation, il va provoquer une douleur lombaire et possiblement radiculaire. u Mesures cliniques de la mobilité du rachis lombaire Distance main-sol (ou doigt-sol) C'est la mesure en centimètres, entre le bout des doigts et le sol chez un patient en position debout, membres inférieurs tendus. Il n'est pas rare de mesurer 40 à 50 cm en cas de lombosciatique, comparativement à 10, voire 0 cm (ou même une valeur négative) chez les sujets normaux, selon leur degré de souplesse lombaire et sous-pelvienne. Indice de Schöber Il permet d'évaluer la mobilité du rachis lombaire en flexion antérieure [3]. On marque 10 cm entre l'épineuse de L5 et au-dessus sur la ligne des épineuses chez un patient en position debout ; puis on lui demande de toucher ses pieds avec ses mains (comme dans la distance main-sol), membres inférieurs tendus (flexion antérieure du rachis). On mesure la nouvelle valeur, par exemple 15 cm (soit un indice de Schöber à 10 + 5 cm). Sa valeur habituelle varie de 10 + 3 à 6 cm selon les individus ; en dessous de 3 cm (pour certains auteurs : 4 cm), il témoigne d'une atteinte pathologique de la mobilité antérieure du rachis. Si l'on veut inclure la mobilité de L5-S1 dans la mesure, on repère les « fossettes de Vénus » qui marquent le niveau des épines iliaques postéro-supérieures puis l'examinateur trace un trait entre les deux. Il procède de la même manière que pour le Schöber mais va partir d'un point situé 5 cm sous cette ligne (sur le sacrum) et tracer un second point 15 cm plus haut. Cet indice modifié a été décrit par Macrae en 1969, dénommé l'indice de Schöber-Macrae [4]. Inclinaisons latérales Elles peuvent être mesurées (en centimètres) par la distance entre le majeur et le sol, avant et après inclinaison. Manœuvre d'hyperextension du rachis lombaire Figure 3.1 Flexions latérales physiologiques (à gauche) et signe de la cassure (patient à droite). Vue postérieure des patients. Elle est souvent limitée et douloureuse. Elle teste la mobilité des articulaires postérieures en l'absence de conflit discoradiculaire. Les autres amplitudes articulaires du rachis lombaire sont également limitées, comme les inclinaisons latérales et les rotations (très pourvoyeuses de lésions discales). Il est également utile d'apprécier les paramètres sous-pelviens en mesurant la distance talon-fesse et les angles poplités. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 18 19 Hernie discale lombaire : aspects cliniques Particularités cliniques à rechercher L'absence de syndrome rachidien en présence de radiculalgie fait rechercher une sciatique non discale (cf. chapitre 6) ou une hernie discale rompue et exclue, cette dernière pouvant aussi être responsable d'une disparition brutale du syndrome lombaire concomitante de l'installation d'un déficit moteur radiculaire sévère nécessitant une prise en charge en urgence. Les hernies discales foraminales peuvent aussi donner ce type de présentation clinique. Une raideur lombaire globale, avec des douleurs de rythme inflammatoire parfois intenses, doit faire évoquer une tumeur intrarachidienne, une spondylodiscite infectieuse, une spondyloarthropathie axiale et demander rapidement une IRM rachidienne. Une lombalgie globale avec des douleurs de rythme mécanique, pouvant irradier en dorsal, peut traduire une lésion musculoaponévrotique, en particulier après un traumatisme lombaire. Un syndrome lombaire apparaissant en position debout et à la marche évoque une hernie foraminale ou une implication de l'arc postérieur (en particulier avec kyste synovial de l'articulation interapophysaire postérieure). Une lombalgie provoquée par la palpation du quart interne de la crête iliaque, descendant vers la fesse et la face postérieure de cuisse, sans irradiation vers la jambe évoque une pathologie de la région iliolombaire. Syndrome radiculaire Examen des membres inférieurs : topographie Il s'agit d'une atteinte monoradiculaire motrice, sensitive et réflexe dans la très grande majorité des cas. On demande au patient de décrire le trajet douloureux avec son doigt. Il suit différents territoires selon la racine atteinte (tableau 3.1). La localisation distale Tableau 3.1 Topographie des trajets et atteintes neurologiques motrices, sensitives et réflexes selon la racine nerveuse atteinte. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Territoire douloureux et déficit sensitif Déficit moteur Réflexe Ilio psoas (L1 à L3) : flexion de la cuisse sur le bassin en position assise Quadriceps fémoral : extension du genou et flexion de la cuisse sur le bassin (impossibilité de monter un escalier, dérobement du genou, chute) Tibial antérieur : flexion dorsale du pied (releveurs) Rotulien L2 Pli inguinal L3 Fesse Face antéro-interne de cuisse jusqu'au genou L4 Fesse Face antérolatérale de cuisse Face antérieure de genou Face antéro-interne de jambe jusqu'à la cheville L5 Fesse Face postéro-externe de la cuisse Face postéro-externe ou externe de la jambe En avant de la malléole externe Dos du pied Gros orteil et parfois sur le deuxième orteil Pli inguinal possible (partie externe) Extenseurs des orteils : – flexion dorsale du pied (releveurs) – marche sur les talons Long extenseur de l'hallux : extension du gros orteil (releveur ou flexion dorsale) Long et court fibulaires (péroniers latéraux) : flexion plantaire, abduction et rotation latérale du pied Tibial antérieur (partiellement) : flexion dorsale (releveur) et adduction du pied Moyen glutéal (fessier) : abduction de la cuisse S1 Fesse Face postérieure de la cuisse Face postérieure du mollet Tendon d'Achille En arrière de la malléole externe Sous la plante des pieds, le long du bord externe Vers les deux derniers orteils Pli inguinal possible (partie interne) Triceps sural : flexion plantaire ; marche sur la pointe des pieds Fléchisseurs des orteils Tibial postérieur Grand glutéal (fessier) : extension de la cuisse Achilléen R. L va de la douleur permet souvent d'identifier la racine touchée. Typiquement, la racine L3 dolorise la face interne de cuisse, L4 la face antérieure de cuisse, L5 le gros orteil et S1 le bord latéral du pied ainsi que le petit orteil. Une sensation d'étau au niveau de la cheville s'observe surtout lors d'une atteinte L5 et parfois S1. Aussi, une irradiation (« flèche ») inguinale est souvent rapportée lors d'une atteinte L5 (partie inguinale externe) et moins lors d'une atteinte S1 (partie inguinale interne). La sensation plus ou moins douloureuse peut être ressentie sous forme de paresthésies (fourmillements, picotements, sensation de peau cartonnée), de décharges électriques ou de dysesthésies (sensations anormales provoquées par un stimulus ou le contact). Le caractère impulsif à la toux, à l'éternuement (signe de Déjérine) ou à la défécation doit être recherché en faveur d'un conflit discoradiculaire. La manœuvre de Valsalva (expiration à glotte fermée) provoque une hyperpression abdominale qui peut aussi déclencher la radiculalgie, de manière moins constante. L'intensité de la douleur est à évaluer à l'aide d'une échelle visuelle analogique (EVA), cotée de 0 (pas de douleur) à 10 (maximum de la douleur). Il n'y a pas, à l'heure actuelle, de définition consensuelle concernant le caractère hyperalgique d'une sciatique mais, en pratique clinique, on évoque cette situation lorsque la radiculalgie résiste à un traitement morphinique bien conduit (meilleur rapport efficacité/tolérance) pendant une durée d'au moins 48 heures, ou que le patient ne peut pas se verticaliser. Le premier examen clinique à réaliser est celui de l'analyse de la marche. Classiquement, une radiculalgie ne provoque pas de boiterie. Sinon, il faudra s'assurer de l'absence de coxopathie, d'atteinte sacro-iliaque ou de gonarthrose chez les sujets plus âgés. Ensuite, le testing musculaire de chaque racine doit être effectué de manière rigoureuse et comparative (tableaux 3.1, 3.2). Il faut demander au patient de marcher sur les talons (pour tester L5 qui commande les releveurs du pied) ou sur la pointe des pieds (pour tester S1 qui commande les fléchisseurs du pied). L'absence de déficit moteur franc permet d'envisager le traitement médical avec sérénité. En cas d'atteinte L5, on constate souvent une parésie isolée du long extenseur de l'hallux (releveur du gros orteil en ancienne nomenclature) avec un testing à 4 qui nécessitera une surveillance, mais qui n'empêche pas la poursuite du traitement médical. En cas de cruralgie, on teste l'extension du genou et la flexion de la cuisse. L'examen de la sensibilité portera sur la recherche de la perte de sensibilité superficielle au tact au doigt ainsi qu'à la douleur en testant avec une épingle. La u Tableau 3.2 Cotation des déficits musculaires. Grades Niveaux de force motrice Grade 0 Pas de mouvement ni de contraction musculaire Grade 1 Contraction musculaire sans mouvement Grade 2 Mouvement possible dans le plan horizontal Grade 3 Mouvement possible contre la pesanteur (plan horizontal et vertical) 3 + :amplitude complète contre la pesanteur mais pas contre résistance 3– : position non constamment contenue contre la pesanteur Grade 4 Mouvement contre résistance avec une force diminuée 4 + : mouvement complet dans l'amplitude 4– : résistance moindre (opposition légère) Grade 5 Force normale sensibilité thermique est testée en utilisant des tubes remplis d'eau chaude et d'eau froide (avec de la glace). Les troubles peuvent être complets (anesthésie) ou partiels (hypoethésie) ou plus rarement à titre de sensation exagérée (hyperesthésie). Il faut cependant garder à l'esprit qu'un dermatome ou un myotome donné peut être innervé par plusieurs racines nerveuses, ce qui explique que la compression d'une seule racine nerveuse peut ne pas entraîner de signes moteurs ou sensitifs détectables cliniquement ou tout au moins s'exprimer de façon majeure [5] et que les territoires sont parfois un peu différents selon les individus. Les réflexes ostéotendineux rotuliens et achiléens seront aussi recherchés. La perte ou l'asymétrie d'un réflexe concordant avec le côté et le trajet douloureux : L4 pour le rotulien et S1 pour l'achilléen, est un élément assez spécifique (> 90 %) en faveur d'une cruralgie ou d'une sciatique par hernie discale. On recherche surtout un syndrome de la queue de cheval se traduisant par une anesthésie en selle et des troubles sphinctériens : perte des urines et des matières ou rétention aiguë d'urine. En cas de doute, on recherche un résidu postmictionnel par échographie de vessie (« bladder scan ») au lit du malade. Le diagnostic différentiel de la rétention aiguë d'urine peut aussi être secondaire à la prise de morphinique et l'alitement, ce que le praticien non spécialiste doit bien garder à l'esprit. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 20 Hernie discale lombaire : aspects cliniques 21 Les pouls vasculaires sont à rechercher de manière systématique aux membres inférieurs, particulièrement au niveau pédieux dans le cadre du diagnostic différentiel de claudication vasculaire. La reproduction de la douleur lors d'une épreuve d'effort sur tapis de marche avec baisse concomitante de la pression transcutanée d'oxygène (TcPO2) reste cependant la preuve diagnostique la plus fiable d'une artériopathie oblitérante symptomatique des membres inférieurs. Il faut aussi se souvenir que les claudications d'origine radiculaire ou vasculaire sont douloureuses alors que celles d'origine médullaire sont indolores. Signes cliniques cherchant à reproduire la radiculalgie Signe de la sonnette C'est la pression exercée par le pouce de l'examinateur à un travers de doigt en dehors de la ligne des épineuses (surtout entre L4 et L5) qui provoque une irradiation douloureuse « en éclair », reproduisant le trajet douloureux radiculaire. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Signe de Lasègue radiculaire Il est sensible (> 80 %) mais peu spécifique (40 %) : patient en décubitus dorsal. On cherche à reproduire ou déclencher la douleur sciatique en élevant le membre inférieur tendu du côté de la sciatique, de manière lente et progressive. Certains auteurs recommandent de pratiquer une dorsiflexion du pied avec une rotation interne du pied et/ou une flexion de la nuque pour augmenter la mise en tension des racines nerveuses lombaires L5 et S1 (figure 3.2). Ce signe n'a de valeur que si la sciatique est provoquée pour un angle inférieur à environ 70°. Au-delà, il peut s'agir d'un simple manque de souplesse sous-pelvienne. On utilise parfois le terme de Lasègue serré pour décrire une douleur sciatique provoquée rapidement par l'élévation, pour un angle inférieur à 30° environ (valeur arbitraire). La manœuvre de Lasègue apprécie en partie la souplesse sous-pelvienne. Il n'a de valeur qu'après avoir testé la normalité des articulations coxo-fémorale et sacro-iliaque homolatérales. Signe de Lasègue radiculaire controlatéral (ou croisé) Il est peu sensible (25 %) mais très spécifique (90 %) : c'est le déclenchement de la radiculalgie lors de l'élévation du membre inférieur tendu controlatéral. Il traduit souvent une hernie discale assez conséquente. Figure 3.2 Recherche du signe de Lasègue. Test de Bragard Dans les mêmes conditions que le Lasègue, le membre inférieur où siège la sciatique est placé en élévation à la limite non douloureuse (genou en extension). L'examinateur exerce une flexion dorsale du pied qui va alors provoquer la douleur radiculaire. Si la douleur se situe exclusivement au mollet, il faudra penser à éliminer une thrombophlébite surale ou une lésion du muscle triceps sural. Signe de Léri Chez un patient en décubitus ventral ou latéral, on fléchit le genou à 90° et on étend la racine du membre vers l'arrière, ce qui reproduit l'irradiation douloureuse face antérieure de cuisse liée à une cruralgie L4 (valable aussi pour L3), en l'absence de coxopathie (figure 3.3). Signe de la corde de l'arc (« bowstring test » des Anglo-Saxons) Le patient est en décubitus dorsal, l'examinateur va fléchir le membre inférieur douloureux sur la hanche, genou en extension complète. Lorsque la douleur apparaît, l'examinateur laisse fléchir le genou, ce qui atténue la douleur. Il applique ensuite une pression à la partie haute du creux poplité avec ses pouces, afin de comprimer le nerf sciatique. Si cette manœuvre reproduit la sciatique ou entraîne des paresthésies dans le territoire du sciatique, elle traduit l'existence d'un conflit discoradiculaire aux dépens de L5 ou S1. L'examen doit être comparatif. R. L va u Figure 3.3 Recherche du signe de Léri. Figure 3.4 Recherche du signe de Slump. « Slump test » Tableau 3.3 Signes cliniques les plus sensibles et les plus spécifiques en faveur d'une sciatique par hernie discale lombaire. Il s'effectue chez un patient en position assise, les bras croisés dans le dos. Il va fléchir successivement son rachis en dorso-lombaire puis en cervical ; il va étendre son genou puis réaliser une flexion dorsale de la cheville (côté douloureux), en s'arrêtant à l'une des étapes si elle reproduit la sciatique (figure 3.4). L'examinateur peut majorer passivement la flexion cervicale ou lombaire (la flexion de la nuque provoque la tension du fourreau dural mobile). Si le test reproduit la sciatique, l'examinateur demande au patient de relever la tête afin de relâcher la tension exercée sur la dure-mère, ce qui doit atténuer la douleur. Un manque de souplesse ou une lésion des ischiojambiers peut se traduire par un trajet douloureux tronqué jusqu'au genou. Il faut noter que ce test peut être retrouvé chez des sujets sains. Le test doit être comparatif. Il peut être positif en cas de hernie discale lombaire en conflit avec le nerf sciatique ou en cas de lésion de la dure-mère. Le test peut aussi être effectué avec les deux membres inférieurs en extension, réalisant alors le signe du tripode, le patient jetant alors les bras en arrière et relevant son rachis cervical afin de relâcher la tension. La sensibilité de ce test varie de 40 à 80 % et la spécificité de 58 à 83 % selon les auteurs [6, 7]. Signe de Christodoulides C'est la reproduction de la douleur radiculaire L5 lors de la réalisation de la manœuvre de Léri [8]. Il semble traduire souvent l'existence d'une hernie discale L4-L5 latérale. La manœuvre de Léri provoquant alors une mise en tension du plexus lombaire avec hyperlordose et rétrécissement des foramens. Les points de Valleix ne possèdent pas de valeur sémiologique pertinente (palpation du nerf sciatique dans la fosse ischio-trochantérienne et à d'autres endroits). Signes cliniques les plus sensibles Signes cliniques les plus spécifiques Signe de Lasègue homolatéral (64 à 92 %) Parésie (93 %) Topographie symptomatique typique d'un dermatome (89 %) Atrophie musculaire (50 à 94 %) Sciatique plus forte que la lombalgie (82 %) Abolition d'un réflexe (93 %) Signe de Lasègue controlatéral (90 %) Source : d'après [9]. Au final, il existe donc des signes cliniques sensibles et spécifiques en faveur d'une sciatique par hernie discale (tableau 3.3) [9]. Cependant, il faut bien rappeler qu'aucun signe clinique n'est prédictif de manière certaine de l'évolution de la sciatique. Dans une étude comparative de traitement conservateur versus chirurgie, il a été rapporté que le traitement chirurgical semblait donner de meilleur résultat chez les patients dont la sciatique était provoquée par la position assise [10]. Récemment, Genevay et al. ont publié cinq critères cliniques pour diagnostiquer une sciatique par hernie discale : • une douleur de trajet monoradiculaire dans le membre inférieur ; • un signe de Lasègue inférieur ou égal à 60° (pour L5 et S1) ou un signe de Léri positif (pour L3 et L4) ; • un réflexe achiléen aboli de manière unilatérale ; • une diminution de la force motrice unilatérale ; • une douleur dans le membre inférieure rapportée par le patient [11]. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 22 Hernie discale lombaire : aspects cliniques © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Ils sont plus destinés à pouvoir homogénéiser les populations étudiées à des fins de recherche clinique. Lorsque le praticien constate une discordance des signes cliniques et que l'organicité de la symptomatologie est mise en doute (contexte de conflits avec l'entourage, sur le plan professionnel, etc.), il existe des manœuvres cliniques pour démasquer les simulateurs. Le praticien procède à une auscultation pulmonaire pour mettre le patient à 90° entre son tronc et ses membres inférieurs (si doute sur un Lasègue en décubitus dorsal) ou procéder à un examen du genou en position assise au bord du lit (tête baissée) avec mise en extension complète du membre inférieur. En cas de conflit discoradiculaire lombaire, le patient va spontanément faire reculer son tronc en arrière pour éviter l'étirement de la racine nerveuse L5 ou S1 (figure 3.5). 23 Figure 3.5 Manœuvre cherchant à dépister une majoration d'un signe de Lasègue. Formes cliniques Syndrome de la queue de cheval graphie de vessie (« bladder scan ») au lit du malade, mais il faut bien garder à l'esprit qu'il n'y a alors pas d'hypoesthésie périnéale en selle associée. Le cône médullaire se termine en T12-L1, seules les racines nerveuses sont présentes au niveau du rachis lombaire. Il n'y aura jamais de compression médullaire à ce niveau. Une sciatique bilatérale avec claudication douloureuse (neurogène, simulant une claudication vasculaire) ou une parésie flasque des membres inférieurs d'apparition assez rapide doit faire rechercher une compression de la queue de cheval. Le syndrome complet associe des troubles sphinctériens (incontinence urinaire ou rétention indolore avec mictions par regorgement ; perte de la sensation de passage de l'urine ; impuissance ; perte involontaire des matières fécales avec hypotonie du sphincter anal) et une anesthésie périnéale en selle. L'imagerie lombaire, idéalement une IRM en urgence, sinon un scanner, démontrant l'origine discale doit immédiatement faire poser l'indication chirurgicale de décompression (idéalement dans les six heures après le début du tableau clinique, au plus tard dans les 12–24 heures). Il s'agit d'une grosse hernie discale médiane, souvent exclue en bloc ou en plusieurs fragments obturant le canal rachidien, à l'étage L4-L5 ou L5-S1. Il peut aussi s'agir d'un tableau clinique débutant soit par une hypoesthésie en selle sans troubles sphinctériens, soit par une hypoesthésie isolée du gland ou de la vulve qui devront alors nécessiter une surveillance très rapprochée par le clinicien et conduire à une prise en charge du même type que le syndrome complet (imagerie et chirurgie), en cas d'aggravation. La prise de morphinique peut parfois mimer un syndrome de la queue de cheval par l'existence d'une rétention urinaire, objectivée et mesurée par une écho- Sciatique paralysante Elle se définit par un déficit moteur au testing musculaire inférieur ou égal à 3 (au minimum pas de mouvement, au maximum mouvement possible contre la pesanteur mais, pas contre, résistance). Elle est classiquement une indication chirurgicale en urgence après mise en évidence du conflit discoradiculaire concordant à l'imagerie si elle est diagnostiquée précocement. Elle concerne le plus souvent le territoire L5 avec une atteinte de l'appareil extenseur du pied (extenseurs des orteils et long extenseur de l'hallux) ainsi que le long et le court fibulaire (rotation latérale du pied). Elle peut aussi toucher moins fréquemment le territoire S1 avec le triceps sural et le fléchisseur des orteils (marche sur la pointe des pieds impossible). Cependant, il faut bien distinguer la situation d'une paralysie déjà installée et en voie d'amélioration ou d'absence de dégradation qui ne constitue plus une indication chirurgicale en urgence, d'une paralysie qui s'aggrave progressivement, et récente, devant bénéficier d'un geste chirurgical le plus rapidement possible. De plus, du fait de la complexité des mécanismes en jeu (compression mécanique de la racine, phénomènes vasculaires associés, etc.), la récupération du déficit moteur après la chirurgie n'est jamais garantie, même dans les conditions optimales de prise en charge qu'il faut bien évidemment toujours appliquer. Il semblerait que, dans les mécanismes impliquant plutôt une ischémie radiculaire, c'est-à-dire le constat d'une paralysie massive (testing musculaire à 0), étendue, touchant L5 mais aussi le tibial R. L va antérieur et faisant suite à un début hyperalgique, la chirurgie en urgence ne soit recommandée que lorsqu'il existe un conflit discoradiculaire concordant associé et que la douleur sciatique persiste. Il a été noté alors qu'il n'y a pas de corrélation entre le volume de la hernie et le tableau clinique associé. Aussi, si la paralysie massive s'installe et que la douleur disparaît, la chirurgie ne semble alors plus en mesure de favoriser la récupération du déficit moteur [12]. Dans tous les cas, il faut examiner et tester le patient de manière très rapprochée, ainsi que rechercher l'apparition d'un syndrome de la queue de cheval. Sciatique hyperalgique En pratique clinique, bien qu'il n'y ait pas de définition précise de ce terme, elle correspond à une sciatique qui résisterait à au moins 48 heures d'un traitement morphinique bien conduit (progressif et à la posologie la plus adaptée concernant le rapport efficacité/ tolérance), c'est-à-dire à une EVA de la douleur qui resterait supérieure à 7, ce qui reste une situation peu fréquente en pratique. Le malade craint les efforts de toux et de défécation, il reste souvent alité (nécessitant alors les précautions d'usage de prévention des thromboses veineuses). Elle peut alors engendrer plus rapidement une démarche d'exploration d'imagerie afin d'objectiver un conflit discoradiculaire concordant avec la clinique. En cas d'absence de concordance entre la clinique et l'imagerie, une appréciation plus globale de la situation psychologique ou médico-sociale du patient doit être envisagée. Hernie discale exclue Le clinicien doit y penser quand un déficit moteur s'installe brutalement ou que la radiculalgie prédomine avec une disparition du syndrome douloureux lombaire. Formes cliniques selon l'âge Chez l'enfant et l'adolescent, elle est souvent déclenchée par un effort violent. Le syndrome lombaire est au premier plan avec un signe de Lasègue souvent très serré, y compris en controlatéral. L'IRM doit être l'examen de choix (diagnostic différentiel tumoral). Le recours à la chirurgie est beaucoup plus fréquent du fait de l'évolution moins favorable que chez l'adulte et les résultats sont meilleurs [13]. u Chez le sujet âgé, les déviations lombaires sont parfois moins faciles à apprécier du fait de la présence d'une arthrose déjà évoluée. L'arthrose interapophysaire postérieure est très souvent associée au mécanisme de compression de la racine nerveuse par la hernie discale. Sciatiques post-chirurgicales Elles font l'objet d'un chapitre dédié dans cet ouvrage. Sciatique bilatérale ou à bascule Une sciatique tronquée (ne descendant pas en dessous du genou) à bascule ou bilatérale chez un sujet jeune doit faire envisager le diagnostic de spondylo-arthropathie, en l'absence de conflit discoradiculaire. Diagnostics différentiels Les tableaux cliniques pouvant se confondre avec une sciatique commune concernent principalement : • les atteintes sacro-iliaques (inflammatoire ou infectieuse), les fissures ou les fractures du sacrum par insuffisance osseuse ; • une coxopathie qui peut projeter la douleur vers le haut de la fesse et la partie postérieure de cuisse, mais aussi parfois vers le bas ; • des tendinopathies, en particulier du moyen glutéal (anciennement moyen fessier) avec une douleur reproduite en abduction contrariée du membre inférieur ; • une atteinte diaphysaire fémorale (ostéosarcome, ostéomyélite) qui peut mimer une radiculalgie sciatique ou crurale. Il faut alors toujours penser à demander au moins des radiographies des fémurs entiers (face et profil) en cas de normalité des explorations d'imagerie du rachis et du bassin ; • les douleurs projetées des articulaires postérieures vers la fesse et le haut de la cuisse en postérieur ; • les claudications vasculaires, y compris touchant les artères glutéales (à explorer par le Doppler et une épreuve de marche avec mesure de la TcPO2) ; • le syndrome de Maigne (douleurs projetées à partir de la charnière dorso-lombaire) avec présence du « point de crête », de douleur dans l'aine et de cellulalgie localisée au pincé-roulé dans la partie inférieure de l'abdomen ou supéro-interne de la cuisse. La racine L1 se projette sur la face latérale de la cuisse ; • la méralgie paresthésique touchant le nerf cutané latéral de la cuisse avec la classique douleur en forme de raquette sur la face antéro-latérale de la cuisse ; © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 24 Hernie discale lombaire : aspects cliniques • la cruralgie diabétique ; • l'hématome du psoas, rapidement évoqué par la présence d'un psoïtis et de la prise concomitante d'anticoagulants, chez un patient habituellement plus âgé. Le scanner lombaire et pelvien confirmera le diagnostic ; • les causes de sciatique non discale qui seront détaillées dans un chapitre dédié dans cet ouvrage : méningoradiculites (Lyme), tumeurs du rachis et du bassin, etc. avec éventuelle fièvre et altération de l'état général. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Conclusion L'appréciation clinique de la sciatique par hernie discale est au premier plan. Les examens locomoteur et neurologique sont la clé de l'évaluation de la sévérité de la sciatique. Ils conditionnent la prise en charge thérapeutique du patient. Le temps de dialogue et d'explication de la pathologie au patient permet d'envisager une prise en charge plus sereine et la moins agressive possible de la sciatique par hernie discale, par décision médicale partagée. La physiopathologie comportant des phénomènes de compression aigue ou chronique, d'étirement, de modification de vascularisation des racines nerveuses, plus ou moins en lien directement avec une hernie discale lombaire rend compte de la disparité de la symptomatologie et de l'examen clinique des patients. Il faut bien rappeler qu'aucun signe clinique n'est prédictif de l'évolution favorable ou défavorable de la sciatique ou de la cruralgie par hernie discale lombaire. Aussi, le praticien n'hésitera pas à répéter l'examen clinique lorsqu'il existe des atypies afin d'être précis sur le cadre nosologique et pour décider au mieux de son attitude thérapeutique. Enfin, le praticien devra toujours tenir compte de l'amélioration naturelle progressive (80 à 90 % à trois mois) plutôt en dents de scie (un jour mieux, un jour plus douloureux) de la sciatique par hernie discale pour ne pas se précipiter vers une prise en charge plus agressive trop rapidement. Réfé 25 ences [1] Revel M. Sciatiques et autres lomboradiculalgies discales. In : EMC. Paris : Elsevier Masson SAS ; 2004. Appareil locomoteur. 15-840-D-10. [2] Poiraudeau S, Foltz V, Drapé JL, Fermanian J, LefèvreColau MM, Mayoux-Benhamou MA, et al. Value of the bell test and the hyperextension test for diagnosis in sciatica associated with disc herniation : comparison with Lasègue's sign and the crossed Lasègue's sign. Rheumatology (Oxford) 2001 ; 40 : 460–6. [3] Schöber P. Lendenwirbelsaüle und Kreuzshmershen MMW 1937 ; 84 : 336–8. [4] Macrae IF, Wright V. Measurements of low back movement. Ann Rheumat Dis 1969 ; 28 : 584–9. [5] De Luigi AJ, Fitzpatrick KF. 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Les sciatiques liées à des causes tumorales ou infectieuses et autres sont dénommées symptomatiques. Afin d'orienter le clinicien vers les causes non discales de sciatiques, les signes cliniques souvent présents dans ce contexte doivent être connus. Signes cliniques orientant vers une sciatique non discale Ils doivent attirer l'attention immédiate du clinicien en présence d'une sciatique ou d'une cruralgie : • un antécédent de cancer (surtout si l'âge se situe entre 20 et 50 ans), • un amaigrissement, une altération de l'état général, • de la fièvre, des frissons, des sueurs nocturnes, • une symptomatologie de rythme inflammatoire (horaire douloureux à prédominance nocturne), • l'absence de syndrome lombaire et des signes de mise en tension des racines (Lasègue, Léri…), • le caractère bilatéral de la sciatique (surtout L5) ou de la cruralgie, • l'atteinte de plusieurs dermatomes ou myotomes, • une claudication douloureuse (sténose canalaire ou vasculaire) ou non (origine médullaire), • l'existence de troubles sphinctériens ; la recherche d'un syndrome de la queue de cheval est systématique à l'examen clinique. La symptomatologie peut être frustre avec simplement une moindre sensibilité au passage de l'urine, • un déficit moteur s'aggravant sans douleur doit faire rechercher une atteinte médullaire, tronculaire ou plexique. Il faut se souvenir également dans les diagnostics différentiels qu'une boiterie d'esquive va plutôt orienter vers une coxopathie, une tendinopathie pelvitrochanterienne, une atteinte sacro-iliaque, bien que certaines hernies foraminales semblent pouvoir en être parfois responsable. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Étiologies Sciatiques radiculaires non discales D'origine tumorale Tumeurs du rachis et du sacrum Les métastases de nombreux cancers [1], les myélomes, les lymphomes, les chordomes, les sarcomes pagétiques, devenus exceptionnels, peuvent se révéler ou donner au cours de leur évolution des sciatiques symptomatiques par expansion tumorale dans les foramens et/ou fracture vertébrale ainsi qu'au sacrum. Des tumeurs bénignes sont aussi rarement impliquées : ostéochondrome, ostéoblastome et ostéome ostéoïde. Des sarcomes et tumeurs des gaines nerveuses ont aussi été rapportés. Tumeurs intrathécales Une douleur nocturne évoque un neurinome, parfois accompagnée de lésions cutanées dans le cadre d'un syndrome de von Recklinghausen. Le diagnostic est parfois long à établir avant que la lésion ne soit visible en IRM ou produise un élargissement des trous de conjugaison. Des cancers d'origine digestive ou urologique, des sarcomes peuvent donner des métastases intrathécales sur les racines de la queue de cheval (l'analyse du LCR dosant une hyperprotéinorachie et parfois permettant d'isoler des cellules tumorales). D'autres tumeurs concernent la queue de cheval : épendymomes du filum terminale, lipomes, paragangliomes, hémangiomes, hémangioblastomes, chémodectomes et kystes dermoïdes. Métastases épidurales (épidurite tumorale) Plusieurs cancers peuvent se révéler par, ou se compliquent d'épidurites tumorales responsables de sciatique. Un bas débit dans les veines épidurales pourrait favoriser cette localisation. R. Leva eu D'origine infectieuse La maladie de Lyme est une cause rare de méningoradiculite chronique qui peut se révéler par une atteinte sciatique 3 à 6 semaines après la morsure de tique et l'érythème chronique migrant, soit à la phase tertiaire (très rarement). Des cas de syndrome de la queue de cheval ont également été décrits [2]. C'est cependant la paralysie faciale, en particulier bilatérale qui est évocatrice de cette maladie. Le diagnostic est effectué par sérologie et analyse PCR (polymerase chain reaction) du LCR (liquide céphalo-rachidien). Le traitement antibiotique est efficace à la phase primaire. Les méningoradiculites d'origine herpétique (avec atteinte génitale) peuvent s'exprimer par des sciatiques en phase prémenstruelle chez la femme et surviennent quelques jours avant les signes cutanés qui peuvent toucher le même dermatome. Elles régressent spontanément et sont rarement déficitaires. Le zona est une cause de sciatiques plus chroniques avec sémiologie neuropathique mais peut aussi donner des sciatiques déficitaires qui peuvent perdurer plusieurs mois [3]. Les signes cutanés apparaissent secondairement quelques jours plus tard et des atteintes partielles de la queue de cheval ont aussi été rapportées. Des cas de sciatiques liées au virus de l'immunodéficience humaine (VIH) ont également été rapportés [4]. Des épidurites infectieuses dans le cadre d'une tuberculose, d'une brucellose et d'infections à germes banals comme le staphylocoque peuvent donner des sciatiques symptomatiques. L'IRM permet alors d'objectiver une atteinte de l'espace épidural antérieur ou postérieur. Par traction ou compression sur les racines nerveuses et/ou hyperpression péridurale Plusieurs causes ont été décrites dans ce cadre nosologique : • les sténoses lombaires avec claudication douloureuse et soulagement par la position penchée en avant (signe du caddie) ; une imagerie scanner ou IRM permet alors d'objectiver l'étroitesse du canal lombaire. Elles sont souvent associées à des discopathies dégénératives qui décompensent la sténose jusqu'alors bien tolérée ; • après une chirurgie du rachis, la racine peut être comprimée dans une brèche durale et réaliser ainsi une hernie transdurale (nécessitant la réintervention). Des cas de migration transdurale de hernie discale au sein de la racine ont aussi été rapportés [5] ; • une hernie gazeuse (post-chirurgie ou venant d'un vide discal) ; • un spondylolisthésis (anto- ou rétrolisthésis) peut provoquer une sciatique souvent bilatérale et majorée par la verticalisation ainsi que la marche ; • des arachnoïdites de différentes étiologies : posttraumatiques induisant des hémorragies, postponction lombaire ou chirurgie, secondaires à une hémorragie sous-arachnoïdienne cérébrale ou révélant des métastases cérébrales, post-infections méningées (tuberculose, cryptococcose, syphilis), cathéters à demeure, injection de méthotrexate dans l'espace sous arachnoïdien… ; • des kystes de différente nature : – des ligaments jaunes, ainsi que des hématomes des ligaments jaunes, – synoviaux aux dépens des articulaires postérieures, avec souvent existence d'une sciatique dès la verticalisation, – méningés. Leur implication dans une symptomatologie de sciatique est démontrée par la disparition de la sciatique après leur ponction sous scanner, – péri-radiculaire (de Tarlov) ; c'est un kyste de la racine du nerf formé de poches remplies de LCR. Leur localisation privilégiée est le sacrum ; • une lipomatose épidurale. Il n'y a pas de concordance entre la clinique et l'importance de la lipomatose à l'imagerie (IRM). Les facteurs de risque sont une obésité, une corticothérapie et un éthylisme. Des lipomes et angiolipomes extraduraux peuvent aussi provoquer des sciatiques. Par anomalies du retour veineux Elles miment cliniquement une sténose lombaire mais celle-ci est absente à l'imagerie. Il faut alors penser aux mécanismes pouvant induire une hyperpression veineuse focale ou plus diffuse : • atrésie de la veine cave inférieure, avec dilatation des veines lombaires ascendantes visible à l'IRM ; • varices péridurales antérieures qui peuvent comprimer le ganglion spinal ; elles pourraient être responsables de très rares cas d'embolie pulmonaire de tissu discal ; • fistules artérioveineuses dans les foramens, à partir des anastomoses entre les artères et les veines radiculaires, pouvant donner des sciatiques bilatérales, en particulier à l'étage L5 où la pression veineuse est déjà plus élevée qu'ailleurs. Sciatiques non radiculaires Cordonales Les compressions médullaires postérieures (depuis le rachis cervical), les scléroses en plaques, les malformations vasculaires avec atteinte de la moelle inférieure © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 28 Sciatiques non discales (défaut de vascularisation par l'artère spinale postérieure), les kystes épidermoïdes du cône médullaire, les grosses calcifications du ligament jaune, le tabès, les déficits sévères en vitamine B12 (sclérose combinée (syndrome pyramidal et cordonal postérieur) de la moelle avec syndrome neuro-anémique) et d'autres étiologies tumorales en sont les principales causes. L'atteinte se situe fréquemment à la partie terminale de la moelle épinière en T12, L1, L2. Les douleurs sont la plupart du temps fulgurantes, survenant au repos, sur un segment de membre, à type de décharges électriques, de brulures, de paresthésies, de broiement, de sensation d'étau, et très évocatrices d'une atteinte médullaire lorsqu'elles sont bilatérales. L'examen neurologique objective un déficit de la sensibilité proprioceptive (altération de sens de position du gros orteil, hypoallesthésie testée au diapason) homolatéral à la lésion, une ataxie (signe de Romberg), une diminution de la sensibilité thermique et du tact épicritique, parfois un syndrome pyramidal. La tension maximale du rachis (type manœuvre de Slump) peut déclencher des douleurs électriques (signe de Lhermitte). Plexiques © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Elles ont été décrites chez les femmes atteintes d'endométriose avec des douleurs rythmées par les cycles. Les autres étiologies comportent : les kystes de l'ovaire, les métastases de cancers pelviens, l'anévrisme de l'artère iliaque en pré-rupture qui peut toucher plusieurs racines. Une imagerie du bassin de type IRM recherchera l'atteinte des racines dans le plexus lombaire. Un électromyogramme avec vitesse de conduction nerveuse peut aussi aider au diagnostic lésionnel. La compression du plexus lombaire en fin de grossesse peut aussi entraîner transitoirement une souffrance. Tronculaires Plusieurs conflits et lésions anatomiques peuvent provoquer une compression ou un étirement du tronc du nerf sciatique : • avec le ligament iliolombaire (dont certaines fibres vont de l'apophyse transverse de L5 jusqu'à l'aile iliaque) ; il peut en résulter un étirement des racines de L5 à la sortie du foramen L5-S1 appelé aussi syndrome du tunnel lombosacré, rarement diagnostiqué. Il a été aussi décrit dans les suites de chirurgie agressive de la partie haute du sacrum ; • avec les muscles piriformes (syndrome du piriforme), obturateur interne, jumeaux et ischio-jambiers, dans le cadre d'un syndrome de la traversée glutéale. Pour le piriforme, les relations anatomiques entre le muscle et 29 nerf sont dorénavant mieux connues et variables selon les individus [6]. Les adhérences du nerf à ce muscle peuvent entrainer des douleurs sciatiques classiquement en position assise prolongée et en flexion-adduction-rotation interne lors de la flexion initiale de la cuisse sur le bassin (manœuvre de Lasègue), puis la douleur s'atténue en abduction-rotation externe en fin de flexion. Concernant le muscle obturateur interne, la sciatique apparait lors des mouvements de rotation interne de la hanche (tension passive) ou en rotation externe contre résistance (tension active), en position assise ou en procubitus cuisse fléchie à 90°. Les adhérences du sciatique à la corde des ischio-jambiers peuvent survenir à distance d'un traumatisme entraînant une avulsion à leur insertion commune, réalisant un syndrome de Puranen, mais aussi sans lésion connue, nécessitant parfois une neurolyse ; • par un syndrome tumoral de la région fessière : tumeurs primitives (rhabdomyosarcome, myxome…), des métastases ou par tumeur du nerf lui-même (schwanomme), détectables en IRM. Le déficit moteur peut être alors au premier plan. De rares cas de volumineuses hernies péritonéales passant au travers de la grande échancrure sciatique ont aussi été rapportés ; • plus bas par compression du nerf tibial (sciatique poplité interne) au creux poplité par un kyste de Baker, reproduisant un trajet S1 au mollet et la plante du pied. Un trajet L5 peut être reproduit par une atteinte des nerfs fibulaires (péroniers) superficiel ou profond. Des lésions artérielles par ischémie du tronc du nerf sciatique ou de ses racines (occlusion de l'aorte sous rénale ou des artères iliaques) peuvent aussi reproduire des douleurs de type sciatique. Le terrain est habituellement un patient tabagique avec une artériopathie connue. Le doppler ou l'angio-IRM établiront le diagnostic suspecté. Des anévrysmes de l'aorte habituellement rompus peuvent aussi être responsables de sciatiques plutôt bilatérales. Des vascularites systémiques de type artérites gigantocellulaires de la maladie de Horton peuvent se révéler par des sciatiques chez des sujets âgés présentant un syndrome inflammatoire. Les autres vascularites, en particulier celle d'origine rhumatoïde deviennent exceptionnelles du fait des progrès thérapeutiques dans ces pathologies. Conclusion En conclusion, les sciatiques d'origine non discale sont beaucoup moins fréquentes que celles d'origine purement discale (environ moins de 1 % et plus de 99 %, respectivement). Cependant, le diagnostic étiologique de ces sciatiques non discales doit être posé rapidement 30 R. Leva eu car il entraine une prise en charge thérapeutique ciblé différente des sciatiques d'origine discale (nécessité d'une chirurgie tumorale ou d'une antibiothérapie). L'examen attentif de la symptomatologie et des signes cliniques, associé à une imagerie adéquate (le plus souvent une IRM) permet alors de retrouver l'étiologie. Enfin, le pronostic de ces sciatiques non discales est parfois plus réservé quand il rentre dans le cadre des pathologies tumorales malignes. Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé [2] Bouvier F, Daluzeau N, Barbery P, Mansour V. Cauda equina syndrome disclosing Lyme disease. Presse Med 1996 ; 25 : 1258. [3] Wendling D, Langlois S, Lohse A, Toussirot E, Michel F. Herpes zoster sciatica with paresis preceding the skin lesions. Three case-reports. Joint Bone Spine 2004 ; 71 : 588–91. [4] Bileckot R, Masson C, Ntsiba H, Mbongo JA, Biendo M, Yala F, et al. Prospective study of rheumatic manifestations in human immunodeficiency virus infection. Apropos of 26 cases in Congo. Rev Rhum Mal Osteoartic 1991 ; 58 : 163–8. [5] Ozdemir N, Yilmaz HS, Acar UD, Tektas S. Intraradicular lumbar disc herniation : report of two cases and review of the literature. Br J Neurosurg 2004 ; 18 : 637–43. 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Alors que le bilan radiographique standard sert essentiellement à éliminer une cause secondaire, l'imagerie contemporaine par scanner et IRM vise à authentifier la hernie, permettre une corrélation radioanatomoclinique, et tenter de prévoir son évolution pour adapter au mieux la thérapeutique. En postopératoire, l'IRM injectée est l'examen incontournable aussi bien à la recherche de complications aiguës, que de récidive herniaire plus tardive. Définition et classifications Classifications des saillies discales Il existe de nombreux termes dans la littérature pour décrire les variations morphologiques du disque intervertébral en imagerie. Avec le vieillissement et la dégénérescence de l'annulus, le disque va perdre sa concavité postérieure physiologique, puis va s'étaler de façon globale et harmonieuse. C'est ce que l'on appelle Normal Bombement Figure 5.1 Classification des hernies discales. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés le bombement discal ou débord discal global (bulging disk des Anglo-Saxons). Ces bombements sont fréquents et s'accentuent avec l'âge. Le conflit avec les racines nerveuses est rare, correspondant le plus souvent à un rétrécissement de l'émergence radiculaire sur un canal lombaire rétréci. La hernie discale se définit, elle, comme un débord discal focal en dehors des limites du disque intervertébral. Par « focal », on entend intéressant moins de 25 % (90°) de la circonférence de la périphérie du disque en coupe axiale [1]. Les bombements discaux asymétriques, souvent présents dans les déformations rachidiennes, ne sont pas considérés comme des hernies. La hernie contient du nucléus pulposus en quantité variable, mais peut aussi contenir des fragments d'annulus, de ligament vertébral postérieur, des morceaux de plaque cartilagineuse, des fragments osseux ou d'arrachement d'un angle postérieur de corps vertébral [1, 2]. En fonction de la morphologie du débord, on va pouvoir distinguer (figure 5.1) : • la protrusion discale (disc protrusion) : hernie à base d'implantation large. On l'appelle aussi hernie discale à large base ou hernie sessile. Ce terme de protrusion a pu être source de confusion en France où « la protrusion » désignait anciennement des saillies discales globales [3]. Les protrusions discales sont assez peu spécifiques, et fréquemment trouvées (30 %) dans des cohortes de patients non symptomatiques [4–6] ; Protrusion (base d'implantation large) Extrusion (base d'implantation étroite) Exclusion 32 T. Josseaume Topographie À l'étage lombaire, les hernies discales sont majoritairement d'origine L4-L5 et L5-S1 (90 %), rarement L3-L4 (7 %) ou L2-L3 (3 %) [9, 10]. Dans un plan axial, on va pouvoir distinguer trois localisations (figure 5.2) • Paramédiane (ou postérolatérale), cas le plus fréquent (80 %) [3, 11]. La hernie est à ce niveau le plus souvent en conflit avec l'émergence durale de la racine sous-jacente au disque se dirigeant vers le récessus latéral (une hernie discale paramédiane L4-L5 comprimera la racine L5). • Médiane (10 %), plus rare en raison du ligament vertébral postérieur qui constitue une zone de résistance médiane. Selon son volume, la saillie est asymptomatique ou conflictuelle avec les émergences durales à l'origine de radiculalgies uni- ou bilatérales. • Latérale (10 %), foraminale, ou extraforaminale. La hernie foraminale se développe dans le foramen. La hernie extraforaminale siège en avant du foramen, et peut être en conflit avec le trajet postforaminal de la racine. Le conflit se fait avec la racine sus-jacente au disque (une hernie discale extraforaminale L4-L5 comprimera la racine L4). Une volumineuse hernie paramédiane peut comprimer les racines sus- et sous-jacente au disque (par exemple une volumineuse hernie paramédiane L4-L5 est susceptible d'être en conflit avec les racines L4 et L5) (figure 5.3). Dans un plan sagittal, la hernie peut migrer en hauteur On peut estimer cette migration en millimètre par rapport au disque d'origine. Majoritairement, la migration est caudale (dans 70 % des cas [12]). Aux étages lombaires hauts, les migrations crâniales sont un peu plus fréquentes (entre 41 et 56 %). De même, l'incidence des migrations crâniales augmente avec l'âge. En cas de migration importante, il peut être difficile d'identifier le disque natif. Une hernie qui se place audessus du plan des pédicules provient généralement du disque sus-jacent [13]. Comme en regard du disque, les hernies migrées se localisent essentiellement dans l'espace paramédian (75 %) [12] en raison du septum médian, zone d'adhérence du ligament longitudinal postérieur au mur postérieur des corps vertébraux, qui cloisonne l'espace sous-ligamentaire. Hernie sous- ou extraligamentaire L'espace préligamentaire, ou sous-ligamentaire est un espace clos limité en arrière par le complexe ligamentaire postérieur. Le complexe ligamentaire postérieur est formé médialement par le ligament longitudinal vertébral postérieur (LLVP) (qui adhère aux fibres externes de l'annulus en regard des disques), et latéralement par la membrane épidurale (structure membranocelluleuse continue plus déformable que le ligament, qui s'attache à la verticale des pédicules) [14]. L4 L4 L5 L5 L4 L4 A Hernie médiane Hernie paramédiane ou postéro latérale Hernie foraminale Hernie post foraminale Figure 5.2 Topographie des hernies dans un plan axial. L4 L4 L5 L5 L5 B C L5 D Figure 5.3 Conflits discoradiculaires en fonction de la situation anatomique et de la taille de la hernie. . Normal. B. Hernie L4-L5 postéro-latérale droite en conflit avec la racine L5 droite. C. Hernie L4-L5 foraminale droite en conflit avec la racine L4 droite. D. Volumineuse hernie L4-L5 postérolatérale et foraminale droite en conflit avec les racines L4 et L5 droites. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés • l'extrusion discale (disc extrusion) : hernie pédiculée, à base d'implantation étroite (par rapport au plus grand diamètre de la hernie). Ainsi les hernies discales migrées en hauteur appartiennent essentiellement à ce groupe de hernie ; les extrusions discales sont plus souvent symptomatiques que les protrusions [6]. Elles sont rarement présentes (5 %) chez les patients asymptomatiques [4, 5, 7] ; • l'exclusion (séquestration) : perte de la continuité d'un fragment avec le disque d'origine. Plus une hernie est volumineuse (plus de 75 % d'occupation du canal) ou a migré et plus elle a de probabilité d'être exclue. Une hernie migrée de plus de 6 mm vers le haut, ou de plus de 12 mm vers le bas présente une très forte probabilité d'être exclue (85 et 98 % respectivement) [8]. 33 Imagerie des hernies discales lombaires © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Une hernie est sous-ligamentaire si elle reste contenue dans l'espace préligamentaire. Extraligamentaire si elle a rompu et franchi le complexe ligamentaire postérieur. Elle siège alors dans l'espace épidural antérieur (la migration épidurale latérale est rare, la migration épidurale postérieure exceptionnelle). Une hernie est transligamentaire si elle se situe de part et d'autre du complexe ligamentaire postérieur (figure 5.4). Connaître cette topographie herniaire peut avoir une double utilité : • premièrement, prédictive sur l'évolution de la hernie. Le matériel discal dans l'espace épidural entraîne une réaction inflammatoire qui favorise sa résorption [15] ; • deuxièmement, dans le choix de la technique opératoire. Certaines techniques de microchirurgie comme la décompression discale percutanée ont des indications optimales dans les hernies qui restent sous-ligamentaires, mais ces techniques sont de moins en moins utilisées. Au temps de la nucléolyse percutanée, une discographie préopératoire permettait de classer ces hernies en hernie contenue et non contenue. Une hernie est contenue si elle respecte les fibres toutes périphériques de l'annulus, ou le ligament vertébral postérieur. Le disque conserve une résistance à la pression d'injection, et il n'existe pas de fuite. Les hernies non contenues peuvent être sous- ou extraligamentaire. Dans les hernies sousligamentaires, le produit de contraste intradiscal fuit dans l'espace sous-ligamentaire, le produit restant dans Hernie contenue Hernie rétroligamentaire la concavité de la face postérieure du corps vertébral. Dans les hernies extraligamentaires, il y a une fuite épidurale du produit de contraste. Actuellement, les indications de la discographie sont devenues exceptionnelles et sont abordées dans un autre chapitre. Le complexe ligamentaire postérieur peut être parfois distingué sur le scanner, mais insuffisamment pour se prononcer sur le caractère sous- ou extraligamentaire d'une hernie. En IRM, en revanche, on distingue assez facilement le LLVP sur les coupes sagittales en pondération T2 et T1. Malgré beaucoup d'espoir [16], l'IRM ne permet toujours pas une appréciation fiable de la position de la hernie par rapport au complexe ligamentaire postérieur [10, 17]. Oh et al. [10] décrivent cinq critères IRM suggérant fortement la position extraligamentaire de la hernie : • la réduction du canal médullaire de plus de 50 % dans un plan axial (sensibilité [Se] : 46 %, spécificité [Sp] : 82 %) ; • une hétérogénéité de signal de la hernie en T2 (Se : 35 % ; Sp : 82 %) ; • des contours mal définis (Se : 15 % ; Sp : 96 %) ; • interruption de la ligne postérieure continue couvrant la hernie en T1 (Se : 57 % ; Sp : 78 %) ; • et ligne sombre en T1 et T2 intraherniaire (Se : 30 % ; Sp : 90 %) (figure 5.5). Le cumul de ces cinq critères permet une Se de 75 %, et une Sp de 76 %, loin d'être parfaite. A B C D Hernie non contenue sous ligamentaire Hernie transligamentaire Figure 5.4 Position de la hernie par rapport au complexe ligamentaire postérieur : sous-ligamentaire, rétroligamentaire ou transligamentaire. Figure 5.5 Signes de hernies extraligamentaires à l'IRM. Coupes axiales T2 (A, D) et sagittales T1 (B) et T2 (C). , B. xtrusion discale volumineuse, hétérogène en T2 avec des contours mal définis, des lignes sombres intraherniaires (flèche) et une interruption du LLVP en T1 (tête de flèche). C, D. spect bourgeonnant de la hernie sur la séquence sagittale T2, et lignes sombres intraherniaires (flèches). 34 T. Josseaume Retentissement de la hernie discale sur le sac dural et les racines nerveuses La compression radiculaire est un des mécanismes à l'origine de la souffrance radiculaire. Elle est trouvée chez 83 % des patients symptomatiques (et chez seulement 22 % des patients asymptomatiques) [18]. Cette compression radiculaire peut être classée en quatre grades : • 0 : persistance d'un liseré graisseux entre la hernie et la racine ; • 1 : contact de la hernie avec la racine sans la dévier ; • 2 : déviation de la racine sans la comprimer ; • 3 : comprimer la racine en la déformant ou en la rendant indistincte du matériel discal (classification de Pfirmann) [19] (figure 5.6). Il existe une bonne corrélation de cette classification IRM avec les constatations peropératoire. Imagerie Recommandations de l' gence nationale de l'accréditation et de l'évaluation en santé ( N ) Selon les recommandations de l'ANAES sur la « Prise en charge diagnostique et thérapeutique des lombalgies et lombosciatiques communes de moins de trois mois d'évolution » [20], il n'y a pas lieu (excluant les lombalgies symptomatiques ou les urgences) (tableau 5.1) de demander d'examens d'imagerie dans les sept premières semaines d'évolution, sauf quand les modalités Grade 0 Grade 1 Grade 2 La racine est refoulée par la hernie Grade 3 La racine est déformée Figure 5.6 Schéma des quatre grades de la classification de Pfirmann. Tableau 5.1 Indications de l'imagerie. Selon les recommandations de l'ANAES, il n'y a pas lieu de demander d'examen d'imagerie dans la lombosciatique commune sauf s'il existe : Des arguments cliniques faisant suspecter une sciatique symptomatique Traumatisme Antécédent de pathologie tumorale Altération de l'état général Symptômes d'horaires inflammatoires Fragilité immunitaire, risques infectieux Une forme grave Syndrome de la queue de cheval Sciatique hyperalgique (résistante aux opiacées) ou paralysante (déficit moteur < 3) Douleurs s'aggravant malgré un traitement médical bien conduit Douleurs persistant plus de deux semaines malgré le traitement médical du traitement choisi (comme manipulation et infiltration) exigent d'éliminer formellement toute étiologie spécifique. L'absence d'évolution favorable conduira à raccourcir ce délai. Les examens d'imagerie permettant la mise en évidence du conflit discoradiculaire (IRM, tomodensitométrie [TDM]) ne doivent être prescrits que dans le bilan précédant la réalisation d'un traitement chirurgical ou radioguidé (infiltration épidurale par exemple). Ce traitement n'est envisagé qu'après un délai d'évolution d'au moins quatre à huit semaines. Cet examen peut être, au mieux, une IRM, à défaut, un scanner en fonction de l'accessibilité à ces techniques. Radiographie standard Son apport diagnostique direct est mineur dans la hernie discale. L'objectif premier est de rechercher des arguments en faveur d'une lombosciatalgie secondaire (origine tumorale, infectieuse, inflammatoire ou traumatique). Selon les recommandations de l'ANAES, ce bilan ne doit être prescrit qu'en cas de doute diagnostique ou en cas de résistance au traitement médical bien conduit après deux à trois semaines de traitement [11, 20, 21]. Ce bilan comprend un cliché de face (cliché dorsolombo-pelvi-fémoral de de Sèze) et un cliché de l'ensemble du rachis lombaire de profil en charge. Les clichés de face et de profil centrés sur le disque L5-S1 sont réalisés en complément si besoin. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés À noter que la migration herniaire n'est pas un signe fiable d'hernie extraligamentaire (Sp : 40 %). En revanche, l'aspect bourgeonnant de la hernie, qui semble resserré en regard du complexe ligamentaire postérieur et peut s'apparenter à une extrusion, a une faible sensibilité (23 %) mais une bonne spécificité (83 %). 35 Imagerie des hernies discales lombaires On recherchera des facteurs favorisants une lombosciatique comme une étroitesse canalaire constitutionnelle, un spondylolisthésis par lyse isthmique, une dystrophie vertébrale de croissance, ou une anomalie transitionnelle de la charnière lombo-sacré (sacralisation de L5). Par ailleurs, on évaluera l'importance des remaniements dégénératifs lombaires à type de discarthrose, arthrose interapophysaire postérieure, spondylo- ou rétrolisthésis dégénératif, canal lombaire rétréci. Les hernies de topographie foraminale ou extraforaminale sont aussi de diagnostic plus ardu [22] et une étude systématique des foramens s'impose devant des cruralgies. On sera attentif au refoulement et à la disparition de la graisse foraminale qui se voient mieux sur les reconstructions sagittales. TD © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés L'acquisition se fait sans injection, de la charnière dorsolombaire au sacrum et permet des reconstructions dans les trois plans de l'espace. Des reconstructions axiales dans le plan de chaque disque et des reconstructions sagittales sont réalisées en routine. L'utilisation de deux filtres de reconstruction, osseux et tissus mous, permet une analyse optimale des structures rachidienne. La hernie se traduit le plus souvent comme une masse tissulaire de la même densité que le disque (50-90 UH). Sa visibilité est favorisée par le contraste naturel de la graisse épidurale ou foraminale, quand elle est présente (figure 5.7). Lorsque la hernie est volumineuse, elle peut comprimer complètement le sac dural et être confondue avec lui, notamment sur un canal lombaire étroit, et peut passer alors inaperçue (figure 5.8). A E A B C D Figure 5.7 Exemples de hernies discales au scanner. . Hernie paramédiane droite L5- 1 à migration descendante, refoulant et comprimant la racine 1 droite (flèche). B, D. Hernie foraminale droite L4-L5 (têtes de flèche). Noter la disparition de la graisse foraminale. C. Hernie foraminale L4-L5 gauche (flèche). B C F G Patient 1 D H Patient 2 Figure 5.8 Exemples de hernies discales volumineuses chez deux patients. Coupes axiales et sagittales en scanner (A à D) et axiales et sagittales IRM en pondération T2 (E à H). Patient 1 : volumineuse hernie discale L3-L4 difficile à distinguer au scanner ( , B), la hernie occupant une grande partie du canal médullaire. Diagnostic beaucoup plus facile en IR ( , F). À noter un rétrécissement canalaire sévère avec disparition du signal liquidien du LC périradiculaire sur la coupe axiale T2 ( ). Patient 2 : volumineuse hernie discale L3-L4 visible au scanner en regard du disque (C, D). n revanche, la migration herniaire bien visible en IR (H) (flèche) est difficilement distinguable et sous-évaluée sur le scanner (D). 36 T. Josseaume ensibilité TD -IR Il est maintenant admis que l'IRM est supérieure pour la recherche d'un conflit discoradiculaire [23]. Le scanner reste un examen très performant dans la détection des hernies symptomatiques [3, 11, 20, 23, 24], sans différence significative avec l'IRM. L'IRM est plus performante que le scanner pour évaluer la compression radiculaire [24]. Le scanner peut être préféré en raison de son coût plus faible, de sa disponibilité et de sa bonne analyse des structures denses (calcifications discales ou herniaires, ostéophytes, anomalie du listel). Dans certains cas, les performances du scanner sont diminuées et l'IRM devra être préférée en première intention : • canal lombaire étroit : la diminution de la graisse épidurale rend l'interprétation du scanner plus difficile ; • obésité : qui diminue la qualité du scanner ; • antécédents de cure de hernie discale : supériorité de l'IRM ; • niveau clinique imprécis ou symptomatologie atypique : l'IRM permettra de mieux détecter les diagnostics différentiels. A B D E IR La recherche de hernies discales nécessite la réalisation de séquences sagittales et axiales en pondération T2 et T1. Le plan sagittal permet une bonne visibilité des hernies, d'étudier leur rapport au disque, et d'apprécier l'étendu de la migration (figure 5.9). Les séquences dans le plan axial apprécient mieux le refoulement du canal par la hernie, et les conflits nerveux (contact ou refoulement de racines). En T1, la hernie est de signal identique au disque (hyposignal), et se distingue mal du liquide dural. En revanche, en regard du foramen, il existe un contraste naturel entre l'hypersignal T1 de la graisse foraminale et la racine. Ainsi la séquence sagittale T1 permet une bonne détection des hernies foraminales, avec un remplacement de la graisse épidurale foraminale par l'hyposignal herniaire. En T2, la hernie est de signal plus variable, souvent proche du disque, mais parfois en hypersignal, notamment dans le cas de migration ou d'exclusion. La séquence T2 est la plus sensible pour la détection des hernies dans les plans sagittal et axial. C'est une séquence plus anatomique, les hypersignaux pouvant correspondre à de l'œdème, ou à de la graisse. Les séquences T2 avec saturation de la graisse (fat sat) (short TI inversion recovery [STIR], densité de proton [DP]) vont permettre une analyse plus fine des anomalies de signal médullaire du rachis osseux, notamment dans la détection de remaniements inflammatoires (Modic 1) ou tumoraux. C Figure 5.9 Hernies discales en IRM, coupes axiales T2 et sagittale T1. . xtrusion discale L5- 1 à migration ascendante, paramédiane droite. B. La hernie est bien visible sur la séquence sagittale T1, en hyposignal au sein de la graisse en hypersignal T1 (flèche). C. Protrusion discale L5- 1 médiane et paramédiane droite, refoulant l'émergence de la racine 1 droite (flèche). D. Protrusion discale L4-L5 foraminale gauche. . xtrusion discale L4-L5 postforaminale droite. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Les hernies extraforaminales se recherchent sur les reconstructions axiales, en étant attentif aux asymétries de la graisse péridiscale. 37 Imagerie des hernies discales lombaires Les séquences T2 peuvent être acquises en « volume » comme au scanner, permettant des reconstructions dans les trois plans avec une valeur diagnostique identique aux séquences classiques [3]. La séquence de myélo-IRM donne des images de type radiculographique avec un fort contraste entre le liquide cérébrospinal (LCS) en fort hypersignal et les autres structures en hyposignal. La séquence est réalisée en position couchée et ne permet pas une étude dynamique comme dans la saccoradiculographie. Cette séquence est moins performante que les séquences standard [25, 26] et est de moins en moins utilisée. L'injection de gadolinium n'a pas d'intérêt en l'absence d'antécédents chirurgicaux. Elle peut être utile en cas de doute diagnostique (neurinome), ou à la recherche de critère d'exclusion herniaire. Cas particuliers des hernies discales Hernie exclue Son intérêt diagnostique repose sur son évolution souvent rapide avec une résorption en quelques semaines ou mois, a fortiori si le fragment est extraligamentaire. Les signes directs sont rares, correspondant à la visualisation d'un intervalle sain entre la hernie et son disque d'origine. Les signes indirects en faveur d'une exclusion sont : • une migration de plus de 6 mm vers le haut, ou de plus de 12 mm vers le bas [8] ; • une prise de contraste en IRM entourant la hernie discale [27] ; • une taille antéro-postérieure de la hernie occupant plus de 75 % du canal [8] ; • un hypersignal T2 de la hernie, présent dans 80 % des cas [25]. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Hernie discale intradurale Les hernies discales intradurales sont rares (0,04 à 0,3 %) [28–30]. La migration du nucléus dans l'espace intradural nécessite une perforation de l'annulus, du A B LLVP et de la dure-mère. Le mécanisme est mal connu. Il serait favorisé par la présence d'adhérences entre le sac dural et le LLVP, secondaires à des antécédents chirurgicaux ou infectieux [29]. L'étage le plus souvent atteint est L4-L5 (55 %) suivi de L3-L4 (16 %) [29]. Le tableau clinique le plus fréquent est celui d'un syndrome de la queue de cheval ou d'une atteinte pluriradiculaire. Le caractère intradural de la hernie est difficile à positiver à l'imagerie, et le diagnostic est le plus souvent découvert lors de la chirurgie. Au scanner et à l'IRM, il existe le plus souvent une volumineuse hernie discale, effaçant le sac dural, et venant au contact de l'arc postérieur. Le syndrome de masse est en hyposignal T1 et T2 en IRM [30]. La visibilité d'une large brèche du LLVP à l'IRM pourrait être un signe évocateur [28]. Après injection de gadolinium, la hernie intradurale se rehausse en périphérie. Hernie épidurale postérieure (figure 5.10) Exceptionnellement, la hernie peut migrer dans l'espace épidurale postérieur, en arrière du sac dural. Cliniquement, la hernie épidurale postérieure est fréquemment responsable d'une polyradiculopathie, et parfois d'un syndrome de la queue de cheval. Le fragment provient le plus souvent du disque L3-L4 (42 %) [31]. Le diagnostic de hernie épidurale postérieure peut être ardu, l'imagerie pouvant évoquer d'autres lésions de l'espace épidural postérieur comme les tumeurs malignes, les hématomes, ou les abcès. En IRM, la lésion est souvent hypo- ou iso-intense au disque en T1 et, dans 80 % des cas, en hypersignal T2 [27]. Le rehaussement en anneau est évocateur et permet d'éliminer le diagnostic de tumeur [32]. Certains auteurs utilisent la discographie comme imagerie discriminante. La fuite du produit de contraste du disque directement dans le canal rachidien, réalisant un équivalent de myélographie, confirme la rupture de l'annulus et du LLVP à l'origine de la migration herniaire [32]. C D Figure 5.10 Hernie exclue épidurale postérieure L4-L5, coupes axiale T2 (A), sagittale T2 (B), sagittale T1 (C) et sagittale T1 gadolinium (D). . Volumineuse hernie postérieure occupant la quasi-totalité du sac dural. B. Noter le relatif hypersignal T2 de la hernie, fréquent dans les hernies exclues. C, D. Isosignal au disque en T1 (C) et rehaussement en anneau de la hernie (D). 38 T. Josseaume Image gazeuse Les hernies peuvent contenir une bulle gazeuse, provenant d'un vide discal propagé à travers la fissure de l'annulus. Le diagnostic est évident au scanner mais plus difficile en IRM. L'hyposignal du gaz sur toutes les pondérations peut être interprété comme une hernie déshydratée ou calcifiée. Calcifications Les hernies discales calcifiées, comme les calcifications discales, sont essentiellement présentes à l'étage thoracique. Elles concernent des sujets souvent âgés, sur des hernies anciennes [33, 34]. Comme pour les images gazeuses, le diagnostic est aisé au scanner, mais difficile en IRM (figure 5.11). ponction lombaire, risque infectieux et hémorragique), et liées au produit de contraste (risque exceptionnel d'allergie ou de crise d'épilepsie, risque de myélite toxique en cas d'injection de produit de contraste inadapté) [35]. L'avantage de la saccoradiculographie sur les autres techniques d'imagerie est de permettre une analyse en orthostatisme du patient. On sensibilise cette analyse par des clichés en flexion et extension de profil, afin de révéler des conflits intermittents dynamiques ou des rétrécissements canalaires. utres techniques Saccoradiculographie (myélographie) et myéloscanner (figure 5.12) Figure 5.12 Saccoradiculographie et myéloscanner. . accoradiculographie. Cliché de trois quarts gauche centré sur L4-L5. Élargissement de la racine L5 gauche en tromblon (flèche). B. yéloscanner. Coupe axiale centrée sur le disque L4-L5. mputation de la gaine radiculaire de L5 gauche (flèche). A B C D E F G H Patient 1 Patient 2 Figure 5.11 Air et calcifications au scanner et en IRM, chez deux patients. Coupes axiales et sagittales scanner (A à D) et axiales et sagittales IRM en pondération T2 (E à H). Patient 1 : hernie discale ancienne calcifiée L5- 1 bien visible au scanner, l'hyposignal en IR est moins spécifique. À noter une bulle de gaz discal à la base de la hernie (B) (flèche) qui ne se voit pas en T2 (F). Patient 2 : gaz discal au scanner au sein de la protrusion discale L2-L3, non visible en IR (examens réalisés le même jour). © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés La saccoradiculographie consiste à opacifier le canal rachidien avant la réalisation de clichés standard. Une simple ponction lombaire à l'aiguille fine permet l'injection du produit de contraste. Les clichés radiologiques sont réalisés de face, de trois quarts et de profil, couchés et en orthostatisme. Les complications potentielles de cette technique sont celles liées à la ponction lombaire (syndrome post- Imagerie des hernies discales lombaires La hernie se voit indirectement par son empreinte sur le sac dural et le segment initial des racines nerveuses (émergence radiculaire et récessus latéral). L'étude des racines se fait étage par étage en comparant chaque côté afin de détecter une angulation anormale, un refoulement de la gaine radiculaire, ou un élargissement suivi d'une interruption de la gaine radiculaire. En revanche, les segments radiculaires au-delà de la réflexion leptoméningée (partie inférieure du récessus latéral et le foramen intervertébral) ne sont pas visibles [25]. Ainsi la saccoradiculographie est incapable de détecter les hernies foraminales latérales ou des hernies de petites tailles qui se développent latéralement par rapport au fourreau dural et qui ne le refoulent pas. Un scanner pourra être réalisé secondairement (myéloscanner), afin de bénéficier du contraste canalaire pour rechercher des hernies ou des conflits, notamment en cas de contre-indication à l'IRM. La saccoradiculographie est indiquée quand le scanner et l'IRM ne retrouvent pas de conflit discoradiculaire franc, et qu'un traitement chirurgical est envisagé. Elle permet aussi un complément d'informations dynamiques aux bilans des sténoses canalaires acquises multifactorielles [21, 25]. Elle est donc d'indication exceptionnelle dans le cadre des hernies discales lombaires standard. Pour l'imagerie postopératoire, la myélographie n'a aucune utilité en raison de la fréquence des images d'amputation radiculaire liées à la cicatrisation, mimant une récidive herniaire [36]. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Discographie et discoscanner C'est une technique invasive, nécessitant la mise en place sous guidage radiologique d'une aiguille dans le centre du disque à analyser pour l'opacifier. Dans un disque sain, le contraste va se limiter au nucleus. Dans les discopathies, le produit de contraste va opacifier l'ensemble du disque, et suivre les trajets herniaires. Un scanner (discoscanner) peut être réalisé secondairement afin de bénéficier de la résolution spatiale du scanner pour visualiser les hernies. Un délai de plusieurs heures doit séparer la discographie du scanner, afin que les fuites de contrastes épidurales soient résorbées, et qu'il ne reste que l'opacification discale et herniaire. Jusque dans les années 2000 le discoscanner gardait un intérêt diagnostique, notamment dans la recherche des hernies postforaminales, ou dans la recherche de récidive sur site opératoire [37]. Actuellement, l'imagerie non invasive par IRM est plus performante dans le diagnostic de hernie discale, et la discographie est devenue une technique archaïque dans cette indication [38]. 39 Toutefois, chez les patients opérés ayant une contreindication à l'IRM, le disco-scanner peut avoir une utilité dans la recherche de récidive herniaire quand le scanner n'est pas discriminant [39]. Corrélation radioclinique La douleur radiculaire ne révèle pas d'une simple compression du nerf. Il s'y associe aussi des remaniements inflammatoires au contact de la hernie, qui vont favoriser l'irritation nerveuse. Cette réaction inflammatoire va être d'autant plus favorisée qu'il existe un contact entre le nucléus et l'espace épidurale, notamment dans les extrusions discales et les hernies exclues [15]. Les études faites sur l'imagerie des sujets asymptomatiques et leur suivi dans le temps, montrent une forte corrélation entre la présence d'extrusion discale et/ou d'une compression nerveuse sévère et la présence de radiculalgies. Parallèlement, il existe une faible corrélation entre la clinique et la présence d'un débord discal global ou d'une protrusion discale ; ces anomalies étant fréquemment retrouvées chez des patients asymptomatiques [4–7]. Les facteurs de bonne corrélation radioclinique sont : • l'extrusion discale ; • la déformation de la racine (grade 3 de la classification de Pfirmann). Les images peu corrélées à la clinique sont : • la compression nerveuse légère ou modérée (grades 1 et 2 de la classification de Pfirmann) ; • la dégénérescence discale ; • le bombement discal. Évolution de la hernie discale en imagerie Près de deux tiers des hernies régressent spontanément en quelques semaines, à plusieurs mois [40–44]. Ces régressions spontanées sont d'autant plus fréquentes que la hernie est volumineuse, à type d'extrusion, exclue, extraligamentaire, ou en hypersignal T2 [40, 42, 45, 46]. En revanche, il n'existe pas de facteurs prédictifs fiables à l'imagerie de l'évolution clinique. La taille de la hernie, sa topographie, ou le degré de dégénérescence des disques ne sont pas corrélés à l'évolution clinique. Ainsi la proportion de radiculalgies discales qui guérissent sous traitement médical est la même, que la hernie discale soit petite ou volumineuse, sous- ou extraligamentaire ou exclue [25, 47–50]. 40 T. Josseaume A B C D E F Diagnostics différentiels Kystes intraspinaux (figure 5.13) Les kystes intraspinaux et extraduraux sont rares et regroupent trois entités différentes : le kyste d'origine discal, antérieur à contact discal. Les kystes ligamentaires : du ligament longitudinal vertébral postérieur (de topographie antérieure), et du ligament jaune (flavum) (de topographie postérieure). Enfin, les kystes d'origine articulaire, postérieurs issus des articulations interapophysaires postérieures. Ces kystes intraspinaux sont aussi décrits dans la littérature en fonction de leur histologie. On distingue ainsi les kystes synoviaux (synovial cyst) chez lesquels il existe un épithélium synovial et une communication articulaire. Ce sont les kystes d'origine interapophysaire postérieure. Les pseudokystes synoviaux ou kystes mucoïdes (ganglion cyst), eux, ne contiennent pas de cellule épithéliale synoviale. Ce sont les kystes d'origine discale, du LLVP et du ligament jaune. G H Figure 5.13 Exemples de kystes intraspinaux : kyste discal (A, B), kyste interapophysaire postérieur (C, D) et kyste du ligament jaune (E à H). . Coupe sagittale T2. B. Coupe axiale T2. Kyste discal L4-L5 paramédian gauche en hypersignal liquidien T2. C. Coupe axiale T2. Kyste interapophysaire postérieur L5- 1, de topographie foraminale, à l'origine d'un conflit avec la racine L5 droite. D. Coupe sagittale TIR. n visualise la communication articulaire du kyste. Noter l'arthropathie interapophysaire postérieure évoluée avec épanchement intraarticulaire et remaniements œdémateux de l'os adjacent (têtes de flèches). , F. Coupes sagittale et axiale T2. Volumineux kyste postérieur au contact du ligament jaune et de l'articulation interapophysaire postérieure L5- 1 droite. Le niveau dans le kyste peut témoigner d'antécédent hémorragique intrakystique. G. Coupe axiale T1 gadolinium. Fin rehaussement périphérique en anneau du kyste. H. Coupe axiale au scanner après ponction et opacification du kyste par voie transligamentaire avant infiltration. Il n'existe pas de communication avec l'articulation adjacente. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés La régression du volume herniaire n'est pas forcément une condition à l'amélioration clinique et beaucoup de patients guérissent sous traitement médical, sans modification à l'imagerie. Cela explique aussi la fréquence des hernies chez les sujets asymptomatiques. Toutefois, plusieurs auteurs décrivent une évolution clinique plus favorable quand la hernie diminue de taille de façon significative [40, 45]. Dans ces cas-là, l'amélioration clinique a souvent précédé la modification de la hernie montrée par l'imagerie [40]. Parallèlement, l'absence de modification entraîne, dans 50 % des cas, de mauvais résultats cliniques [40]. Facteurs prédictifs d'une régression spontanée d'une hernie discale : • hernie discale extraligamentaire et/ou exclue [40, 46] ; • hernie discale volumineuse (taille > 10 mm ou supérieur à un tiers du canal) [42, 43, 51] ; • hypersignal T2 relatif de la hernie [46, 51] ; • prise de contraste périphérique de la hernie [46]. Facteurs de mauvais pronostics : petite taille de la hernie [40, 43]. Imagerie des hernies discales lombaires Tous ces kystes peuvent être à l'origine de radiculalgies par compression nerveuse. Kystes d'origine discale Les kystes discaux sont rares et intéressent les sujets jeunes (30-40 ans), essentiellement les hommes, en regard de disques peu dégénératifs [52, 53]. Ils sont uniquement décrits à l'étage lombaire [54]). Cette pathologie semble plus présente en Asie du Sud-Est (Japon et Corée du Sud) [52]. Ils se placent au contact du disque et sont de signal liquidien à l'IRM, cerclés par une fine prise de contraste en cas d'injection [55, 56]. Un scalloping osseux de voisinage peut être présent [54]. Il existe toujours une communication avec le disque qui peut être confirmée par une discographie. Leur étiologie est mal connue. Ils pourraient être le témoin d'un traumatisme discal avec constitution d'un hématome épidural partiellement résorbé [55], ou la conséquence d'une dégénérescence du mur postérieur du disque laissant passer du liquide discal, s'approchant du phénomène de formation des kystes périméniscaux en regard du genou [56, 57]. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Kystes du LLVP 41 Kystes du ligament jaune Ce sont des kystes intraspinaux postérieurs qui, à la différence des kystes interapophysaires postérieurs, ne communiquent pas avec une articulation et ils ne contiennent pas d'épithélium synovial à l'histologie. Ils sont rares et leur imagerie est très proche des kystes interapophysaires postérieurs [68]. Tumeurs Schwannome (neurinome) À la différence de la hernie, le schwannome présente un rehaussement franc après injection de gadolinium. Par ailleurs, il érode les contours vertébraux adjacents. Méningiome Le méningiome intradural extramédullaire présente une implantation large sur la dure-mère et distend les espaces sous-arachnoïdiens. Le rehaussement est homogène. Les méninges adjacentes sont en queue de comète. Il est fréquemment calcifié. Racines conjointes (figure 5.14) Très rares, les kystes du LLVP sont décrits chez des sujets jeunes (17 à 30 ans), masculins et sportifs [58–61]. La sémiologie IRM est identique aux kystes discaux, avec une image ronde ou ovalaire, de signal kystique avec un hypersignal T2, et une fine couronne de rehaussement. Ces kystes se localisent contre la face postérieure d'un corps vertébral, adjacent au disque et sont latéralisés à droite ou à gauche. À la différence du kyste d'origine discal, il n'y a pas de communication discale [62]. Il s'agit d'une anomalie d'émergence de deux racines dans une même gaine qui peut mimer une hernie paramédiane en regard du récessus latéral. Cette variation prédomine à l'étage L5-S1 avec une racine conjointe L5 et S1. La séparation des racines s'effectue à hauteur du foramen intervertébral. Cette variation est asymptomatique et le diagnostic se fait par l'analyse attentive des racines sur les coupes axiales. Kystes arthrosynoviaux intraspinaux (figure 5.15) Il s'agit des kystes d'origine articulaire interapophysaire postérieure, développés en regard du récessus médial et supérieur de l'articulation. Ce sont les kystes intraspinaux les plus fréquents [63]. Leur topographie postérieure et leur continuité avec une articulation interapophysaire postérieure permettent de les distinguer des hernies discales [64]. On les retrouve majoritairement à l'étage L4-L5, au contact d'articulations dégénératives [65–67]. Dans 40 % des cas, il existe un spondylolisthésis arthrosique. Leur signal peut être variable mais le plus souvent liquidien avec un rehaussement de la paroi du kyste [63]. Dans les cas difficiles, une arthrographie sous scanner permet de confirmer le diagnostic et de réaliser une infiltration, voire une rupture du kyste. Plexus veineux rétrovertébral Les ectasies veineuses vont parfois jusqu'à constituer de véritables varices épidurales, à l'origine d'un effet de masse, et peuvent être à l'origine de lombalgies, voire de radiculalgies. Le signal de ces pseudotumeurs est variable en IRM en fonction du flux et de l'existence d'une éventuelle thrombose, prenant parfois un aspect pseudokystique. Elles sont très souvent méconnues à l'IRM et diagnostiquées en peropératoire [69, 70]. Kyste arachnoïdien périradiculaire et kyste de Tarlov Ce sont des dilatations des gaines périradiculaires. Les kystes arachnoïdiens sont préférentiellement au niveau des racines lombaires, le plus souvent bilatéraux. 42 T. Josseaume Les kystes de Tarlov siègent au niveau sacré, réalisant un scalloping au niveau du canal sacré. Leur diagnostic est facile en IRM avec un signal identique au LCS. Postopératoire normal (figures 5.16, 5.17) L'IRM est l'imagerie de référence dans l'étude de la hernie opérée, aussi bien en postopératoire récent que tardif. Parties molles postérieures En postopératoire immédiat, la zone de défect osseux et le trajet chirurgical au sein des parties molles et des muscles paraspinaux sont le siège d'une infiltration œdémateuse et hémorragique, de signal bas ou intermédiaire en T1, hyperintense en T2 et prenant le contraste après injection de gadolinium. Une collection liquidienne peut aussi s'observer dans la zone opérée, sans valeur pathologique. Ces anomalies vont régresser progressivement sur plusieurs mois [71, 72]. space épidural A D B E C F Figure 5.14 Exemples de racines conjointes L5-S1 gauches chez deux patients. , D. symétrie de la graisse préforaminale L5- 1 gauche faisant suspecter une hernie discale (flèches) B, C, , F. n suit la séparation des racines L5 (flèches) et 1 (têtes de flèches) gauches sur les coupes sous-jacentes, permettant le diagnostic de racine conjointe L5- 1 gauche. Diagnostic plus aisé en IR . à C. Patient 1, coupes axiales T2. D à . Patient 2, coupes axiales en scanner. A B Dans l'espace épidural, le trajet opératoire provoque la formation d'une masse épidurale antérieure : la cicatrice fibreuse ou cicatrice épidurale. Elle est de densité intermédiaire au scanner (entre l'intensité du sac dural et le disque), et en IRM en hyposignal T1, et le plus souvent hypersignal T2. Après injection, cette cicatrice fibreuse se rehausse de façon homogène, ce qui permet de la distinguer d'une récidive herniaire. Ce rehaussement s'analyse beaucoup mieux en IRM qu'en scanner. Ces modifications sont toujours présentes les six premiers mois en IRM [73]. Après six mois, la cicatrice fibreuse peut évoluer vers l'atrophie rétractile, à l'origine d'une rétraction-distension du sac dural ou des gaines radiculaires. Rarement elle évolue vers l'hypertrophie. Avant l'avènement de l'IRM, on pensait que la cicatrice fibreuse pouvait être responsable chez certains patients de douleurs postopératoires, neuropathiques, apparaissant après un intervalle libre de deux à trois mois. Les études IRM récentes contredisent ce postulat, l'imagerie ne permettant pas de différencier une cicatrice péridurale postopératoire « normale » de celle associée à une symptomatologie douloureuse [74]. Pour certains auteurs, les cicatrices épidurales volumineuses (occupant plus de 25 % du sac dural en coupe C Figure 5.15 Dilatation d'un plexus veineux. Coupes sagittales STIR (A), T1 (B) et axiale T2 (C). , B. atériel sous-ligamentaire en arrière de L3 en hypersignal TIR semblant en continuité avec le disque L2-L3 en pondération T1 (flèche). C. n coupe axiale, l'image correspond à une dilatation d'un plexus veineux droit (flèche). © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Cicatrice fibreuse 43 Préopératoire Imagerie des hernies discales lombaires 5 semaines J15 postopératoire A B E E C D F G F © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 5.16 Remaniements postopératoires normaux et fantôme herniaire : évolution à J15 et cinq semaines. Coupes axiales en pondération T2 (A, B, E), T1 (C, F) et T1 gadolinium (D, G). Préopératoire : extrusion discale L4-L5 médiane et paramédiane droite et gauche, à migration descendante en conflit avec la racine L5 gauche. J15 postopératoire : remaniements postopératoires normaux avec une collection liquidienne sous-cutanée, sans prise de contraste pariétale significative (flèches noires), des remaniements œdémateux et hémorragiques sur le trajet cicatriciel (flèches blanches), et une masse épidurale en hyposignal T1 prenant le contraste de façon assez homogène correspondant à la cicatrice fibreuse (têtes de flèches). Fantôme herniaire avec un defect de rehaussement focal sur le site de la hernie opérée, de taille un peu réduite (flèches larges). À noter que la cicatrice fibreuse et le fantôme herniaire sont non discernables sur la séquence T1 (C). Cinq semaines postopératoire : diminution de taille de la collection sous-cutanée (flèches noires). Disparitions des remaniements œdémateux et hémorragiques remplacés par du tissu cicatriciel prenant le contraste (flèches blanches). Diminution de taille de la cicatrice fibreuse (têtes de flèches) et du fantôme herniaire (flèches larges). axiale) seraient plus souvent présentes chez des patients avec des douleurs postopératoires, bien qu'elles soient aussi retrouvées chez des patients asymptomatiques [75–78]. Les douleurs neuropathiques restent d'étiologie indéterminée, probablement de cause vasculaire. Fantôme herniaire En postopératoire précoce, le site de résection de la hernie discale prend fréquemment la forme d'un syndrome de masse occupant la place de la hernie, de signal intermédiaire en T1 et variable en T2, avec un rehaussement périphérique [73, 79]. Ce fantôme herniaire (ou poche herniaire) est visible chez près de 80 % des patients à 24 heures de l'intervention [80, 81], puis l'image va régresser progressivement, présente chez 38 à 47 % des patients à six semaines, et ne persiste que chez 10 à 33 % des patients à trois mois [80–83]. Cette image fantôme est difficilement discernable d'une récidive dans les trois à six premiers mois [84]. Sa fréquence en postopératoire immédiat rend très délicate l'interprétation d'une éventuelle récidive herniaire, d'autant plus que la compression radiculaire persiste fréquemment (67 % à 24 heures, 24 % à six semaines de la chirurgie). L'hypersignal relatif T2 du syndrome de masse (hypersignal T2 plus intense que le signal du muscle) est de bon pronostic, disparaissant le plus souvent dans les trois mois [80, 81]. Sa présence devant une suspicion de récidive herniaire précoce doit inciter à la prudence. Racines La prise de contraste radiculaire et arachnoïdienne est retrouvée chez 20 % des patients les six premiers mois, sans corrélation clinique [73]. Elle est moins fréquente chez les patients asymptomatiques passé ce délai 44 T. Josseaume Préopératoire Complications Hématome épidural compressif (figure 5.18) C D E Figure 5.17 Remaniements postopératoires normaux : évolution à J15 et cinq semaines. Coupes sagittales en pondération T2 (A, B, D), et T1 gadolinium (D, E). Même patient que pour la figure 5.16. Bilan préopératoire : extrusion discale L4-L5 à migration descendante. J15 postopératoire : remaniements postopératoires classiques avec une collection liquidienne sous-cutanée, sans prise de contraste pariétale significative (flèches noires), des remaniements œdémateux et hémorragiques sur le trajet cicatriciel (flèches blanches) et une prise de contraste du disque opéré longeant les plateaux vertébraux (têtes de flèches). Cinq semaines postopératoire : diminution de taille de la collection sous-cutanée (flèches noires). Disparitions des remaniements œdémateux et hémorragiques remplacés par du tissu cicatriciel prenant le contraste (flèches blanches). Persistance de la prise de contraste discale périphérique (têtes de flèches). [72, 79]. De même, l'augmentation de calibre radiculaire persistante à plus de six mois est plus corrélée à des rachialgies persistantes. Disque et corps vertébral Les anomalies de signal des corps vertébraux des zones de curetages sont visibles jusqu'à 18 mois chez 20 % des patients, sans symptômes associés [73, 82]. Ces anomalies épargnent le tiers antérieur de la vertèbre. De même l'annulus postérieur prend le contraste en regard de la zone curetée, pendant 6 à 18 mois chez 20 % des patients. Complications infectieuses Spondylodiscite C'est une complication rare après discectomie lombaire simple (0,2 %). L'IRM permet un diagnostic précoce, mais aux premiers stades de la spondylodiscite la distinction avec les remaniements postopératoires normaux est parfois difficile. Les anomalies de signal (hyposignal T1, hypersignal T2, rehaussement) des plateaux en regard de la zone de discectomie sont peu discriminants des remaniements postchirurgicaux. En revanche, l'atteinte du tiers antérieur du plateau, un décollement et un rehaussement du ligament vertébral commun antérieur sont très évocateurs [84]. De même, la présence de collections liquidiennes rehaussées en périphérie (abcès) est à rechercher en paravertébral, discal ou épidural [88]. Le TEP-scan peut être une alternative à l'IRM avec une valeur prédictive négative de 100 %. La spécificité est bonne, même sur des chirurgies récentes, de moins de six mois (75 % de spécificité) [89]. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés B 5 semaines J15 postopératoire A C'est une complication rare mais gravissime (0,1 à 0,2 % d'hématome épidural compressif en postopératoire) [85, 86]. L'hématome épidural peut survenir dans les 48 heures suivant le geste chirurgical, rarement plus tard. Cliniquement, l'hématome compressif se manifeste par l'apparition de lombalgies intenses, puis d'une mono- ou polyradiculopathie déficitaire, d'aggravation progressive, pouvant entraîner des paralysies importantes (syndrome de la queue de cheval). C'est une urgence chirurgicale absolue. L'IRM montre une collection hématique extra- ou sous-durale, marquant un effet de masse sur le sac dural. Cette collection est de signal variable en fonction de l'âge de l'hématome (hypersignal T1 au stade aigu), le plus souvent l'hématome est de signal hétérogène T1 et T2. À noter que les hématomes épiduraux postopératoires asymptomatiques sont très fréquents (58 % d'hématomes marquant une empreinte sur le sac dural sur des IRM systématiques à moins de cinq jours) [86]. Le caractère pathogène de l'hématome est bien corrélé à la sévérité de la compression radiculaire ou du fourreau dural. En revanche, il n'y a pas de corrélation entre la clinique et le volume de l'hématome [87]. Imagerie des hernies discales lombaires A B D E 45 C Figure 5.18 Hématome épidural compressif. Coupes sagittales STIR(A), T2 (B) et T1 gadolinium (C), et coupes axiales T2 (D) et T1 gadolinium (E). Hématome épidural postopératoire compressif L3-L4. Hématome (flèches) en hypersignal T2 hétérogène et hyposignal T1, sans prise de contraste. Il exerce un important effet de masse, le sac dural étant fortement comprimé (têtes de flèches) avec une perte de visibilité du LC périradiculaire (D, ). Abcès épiduraux ou des parties molles En cas d'infection superficielle du site opératoire, le diagnostic peut être clinique avec des phénomènes inflammatoires ou des écoulements cicatriciels. L'IRM injectée permet de confirmer le diagnostic en montrant des collections abcédées spécifiques d'un processus infectieux. Ces collections sont en hypersignal franc liquidien en T2 et hyposignal T1 avec, après injection de produit de contraste, un rehaussement périphérique. Le centre purement liquidien reste en hyposignal [84]. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Pseudoméningocèle C'est une complication rare de la chirurgie discale, plus fréquente après reprises chirurgicales (3 à 14 %). La plaie accidentelle de la dure-mère va entraîner une fuite de LCS, formant une collection extradurale dans les parties molles, postérieures le plus souvent. En IRM, la collection présente des contours nets, de signal proche du LCS, sans prise de contraste périphérique. Quand la lésion est close, son signal peut différer de celui du LCS (contenu plus riche en protéine). La pseudoméningocèle est le plus souvent asymptomatique. Elle peut parfois être responsable de céphalées, lombalgies, d'incarcération radiculaire ou de surinfection [90, 91]. Récidive de hernie discale (figure 5.19) Les récidives symptomatiques varient de 3 à 18 % selon les séries [92, 93], et surviennent essentiellement à l'étage opéré (80 %). Lors de suivis systématiques en imagerie sur une période de deux ans, 20 % des patients ont présenté une récidive herniaire. À noter que près de la moitié des récidives herniaires étaient asymptomatiques [94]. Il existe des facteurs favorisants le risque de récidive : disque d'épaisseur et de signal normal en préopératoire, microdiscectomie, faible volume de matériel retiré, importante résection annulaire [92, 95, 96]. L'imagerie est identique à la hernie discale. On observe une masse à contours nets, nodulaire ou polyploïde, refoulant le sac dural. Son signal peut être très variable, le plus souvent il est proche du disque ou en discret hyposignal T2 [97]. La hernie est fréquemment entourée d'un liseré de démarcation en hyposignal T2. La hernie est en continuité avec le disque, sauf dans les cas d'hernies exclues, dont la fréquence est plus importante en postopératoire [97]. En cas d'injection, la hernie ne prend pas le contraste initialement. L'imagerie doit être réalisée assez rapidement après l'injection, car il existe un rehaussement tardif du matériel herniaire (20 à 30 minutes après l'injection), pouvant mimer une fibrose cicatricielle. La cicatrice épidurale, ou cicatrice fibreuse, présente des contours moins bien définis, et le plus souvent pas d'effet de masse (parfois il peut exister un effet de masse dans le cas de cicatrice épidural hypertrophique) [98]. Son signal est intermédiaire, plutôt plus intense en T2 que le disque. Après injection, la fibrose se rehausse précocement. 46 T. Josseaume A B D E C Figure 5.19 Récidive herniaire. Coupes sagittales T1 ( ), T2 (B) et T1 gadolinium (C), et coupes axiales T1 (D) et T1 gadolinium ( ). Récidive herniaire L4-L5. La hernie est en continuité avec le disque et de signal identique, en relatif hyposignal T2 (B). D. n T1, la hernie ne se différencie pas d'une cicatrice fibreuse. . C'est l'absence de rehaussement du syndrome de masse, avec un fin rehaussement périphérique qui permet le diagnostic de récidive herniaire. C B D E Figure 5.20 Cicatrice fibreuse. Coupes sagittales T2 ( ), et T1 gadolinium (B), et coupes axiales T2 (C), T1 (D) et T1 gadolinium ( ). ntécédent de chirurgie discale L4-L5 gauche. uspicion clinique de récidive herniaire. , C. n T2, syndrome de masse paramédian gauche (flèches), refoulant la racine L5 gauche dont les contours sont difficiles à distinguer (têtes de flèche). D. n regard de la zone opérée, le disque, la racine et la fibrose sont indiscernables en T1. B, . C'est la séquence T1 gadolinum qui permet le diagnostic avec un rehaussement homogène de la cicatrice fibreuse (flèches). Il n'y a pas de récidive herniaire. La racine L5 (têtes de flèches) est bien visible au sein de la cicatrice fibreuse. En postopératoire précoce (moins de six mois), la distinction entre une récidive herniaire et une image de fantôme discal est parfois difficile [84]. L'utilisation de séquences T1 injectées facilite la distinction entre la fibrose cicatricielle et la hernie discale (sensibilité de 96 à 100 %) [97]. Cette injec- tion n'est pas indispensable pour faire le diagnostic, avec des sensibilités bonnes et des séquences classiques sans injection (86–95 %) [97, 98]. Toutefois, l'injection de gadolinium reste très largement recommandée dans l'imagerie postchirurgicale (figure 5.20). © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés A Imagerie des hernies discales lombaires Conclusion L'imagerie contemporaine est très performante dans la détection des hernies discales, leur description morphologique et leurs éventuels impacts sur les racines adjacentes. Elle ne permet toujours pas une corrélation radioclinique parfaite et la clinique demeure l'élément majeur du diagnostic et de la décision thérapeutique. La justification par le clinicien de sa demande d'imagerie est essentielle pour guider le choix de la technique d'imagerie, et doit mentionner au minimum le type de douleurs radiculaires (une cruralgie ne s'explore pas comme une sciatique en IRM), les critères d'urgences et les antécédents de chirurgie discale (qui peuvent nécessiter des séquences IRM avec injection de gadolinium). Bien que l'IRM soit supérieure au scanner dans la pathologie discale, le scanner reste un examen performant et qui reste d'actualité dans cette pathologie, notamment en raison des délais de rendez-vous ou de disponibilité géographique de l'IRM. Pour l'imagerie postopératoire précoce ou tardive, l'IRM est l'examen de référence, le plus souvent avec des séquences avec injection de gadolinium. Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Réfé ences [1] Williams AL, Murtagh FR, Rothman SL, Sze GK. Lumbar disc nomenclature : version 2.0. AJNR Am J Neuroradiol 2014 ; 35 : 2029. [2] Milette PC. The proper terminology for reporting lumbar intervertebral disk disorders. AJNR Am J Neuroradiol 1997 ; 18 : 1859–66. [3] Vandermarcq P, Ardilouze P. Rachis lombosacré. Pathologie discale. EMC. In : Radiodiagnostic. Paris : Elsevier Masson SAS ; 2007. 31-673-E-10. [4] Jensen MC, Brant-Zawadzki MN, Obuchowski N, Modic MT, Malkasian D, Ross JS. Magnetic resonance imaging of the lumbar spine in people without back pain. N Engl J Med 1994 ; 331 : 69–73. [5] Stadnik TW, Lee RR, Coen HL, Neirynck EC, Buisseret TS, Osteaux MJ. Annular tears and disk herniation : prevalence and contrast enhancement on MR images in the absence of low back pain or sciatica. Radiology 1998 ; 206 : 49–55. 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DEVIÈRE Introduction L'objectif de ce chapitre n'est pas de détailler la réalisation technique des pratiques électro-neuromyographiques (ENMG) et de potentiels évoqués somesthésiques (PES) et moteurs (PEM). Il m'a paru plus utile d'aborder, d'une part, les éléments généraux qui déterminent la prescription de ces techniques, c'est-à-dire la nécessité de bien poser les indications et les questions pour le prescripteur, et, d'autre part, les stratégies d'expertise par type d'examen électrophysiologique dans les pathologies radiculaires dégénératives lombo-sacrées afin de bien répondre aux questions pour le neurophysiologiste ; en somme, rester pragmatique sans être trop technique. Prérogatives pratiques à la prescription de l'ENMG Phénomène dégénératif rachidien L'expression symptomatique du phénomène dégénératif rachidien comporte l'association variable de rachialgie, de névralgie, d'ataxie et de déficit sensitivomoteur par compression radiculaire et/ou médullaire. Il n'y a pas de corrélation parfaite entre la gravité du tableau clinique et la gravité de la dégénérescence arthrosique. Le tableau clinique peut être silencieux et asymptomatique avec une dégénérescence d'installation très lente et déjà très évoluée alors que des formes dégénératives modérées peuvent être associées à un déficit clinique parfois sévère. La lésion radiculaire survient par l'effet mécanique du processus dégénératif intracanalaire ou par la sténose du trou de conjugaison. La lésion médullaire peut être secondaire à une La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés compression mécanique en cas de production ostéophytique qui réduit le canal rachidien (associées aux protrusions discales postérieure et postéro-latérales et ostéophytique des uncus). L'ENMG éventuellement associée aux PES et/ou PEM ont toute leur place dans l'évaluation des altérations radiculaires et médullaires, et ce d'autant plus que l'examen clinique est pauvre, ou que l'expression symptomatique est discordante avec l'examen clinique et/ou anatomique radiologique. Qu'attendre de l'exploration électrophysiologique ? L'objectif principal de l'exploration électrophysiologique est de localiser et de quantifier l'atteinte radiculaire, voire médullaire cordonale postérieure. L'ENMG est donc indiqué en situation de discordance anatomoclinique, en situation de persistance symptomatique névralgique et/ou de déficit clinique postopératoire ou évocatrice de somatisation (pré- ou postopératoire) pour objectiver ou non le processus lésionnel, en situation d'intrication pathologique tronculaire, plexique, radiculaire et/ou polyneuropathique. Les PES sont indiqués en cas de besoin d'évaluer la part intracanalaire ou foraminale de l'atteinte radiculaire et à visée pronostique sur l'efficacité d'un traitement antalgique par stimulation électrique cordonale postérieure. Considérations anatomiques Une mauvaise interprétation anatomique des anomalies éléctrophysiologiques peut être la source de confusion, voire d'incompréhension dans le raisonnement électroclinique. La racine ventrale motrice et la racine dorsale sensitive intracanalaires rachidiennes se F. Devière rejoignent au niveau du foramen intervertébral pour former le nerf spinal. Le nerf spinal se sépare rapidement en branche ventrale et en branche dorsale. Les branches ventrales se regroupent en plexus nerveux sensitivomoteurs. Dans le cadre des radiculopathies traumatiques post-herniaires, l'atteinte lésionnelle est soit intracanalaire au niveau des racines ventrales et/ou dorsales (ganglionnaire ou préganglionnaire), soit en région foraminale, soit en région extraforaminale (postganglionnaire). La baisse d'amplitude des réponses sensitives est alors en rapport avec une atteinte foraminale ou extraforaminale (ganglionnaire ou postganglionnaire). L'analyse anatomique de la topographie des anomalies sensitives et motrices permettra par ailleurs d'éliminer des diagnostics différentiels par atteinte extracanalaire du nerf spinal ou encore plus distale dans le plexus nerveux. Sur le plan sensitif, seuls les potentiels évoqués par stimulation dermatomale seront anormaux en cas d'atteinte intracanalaire préganglionnaire. Une dénervation active dans les muscles paravertébraux n'est pas observée en cas de lésion plexique et n'est pas discriminante pour déterminer la topographie foraminale, intra- ou extracanalaire. Par ailleurs, la variabilité anatomique des ganglions rachidiens lombaires (très distaux intraforaminaux, ou très proximaux intracanalaires) rend parfois délicat l'analyse topographique du site lésionnel proximo-distal sur les racines et le tronc spinal à un étage donné. Avoir le souci d'être informatif et répondre au besoin du médecin demandeur L'ENMG doit répondre aux questions du site lésionnel, du caractère récent ou ancien de la lésion en fonction de la présence ou non de signes de réinnervation, du caractère évolutif ou séquellaire en fonction des modifications ou non des paramètres de surveillance entre deux examens espacés de plusieurs mois et, enfin, de qualifier et quantifier les lésions sur les fibres sensitives et motrices (perte axonale et/ou lésions démyélinisantes). L'ENMG doit aussi orienter vers des diagnostics différentiels, mettre en évidence les pathologies intriquées (syndromes canalaires, atteinte plexique ou polyneuropathique) et l'hypothèse d'un mécanisme physiopathologique. De façon générale, le pronostic sera plutôt favorable s'il n'y a pas de diminution de l'amplitude des réponses motrices et sensitives vers le dixième jour et en l'absence de signe de dénervation active au repos dans les muscles (potentiels lents de dénervation et de fibrillation) vers la troisième semaine. ENMG Étude de la conduction motrice et sensitive Les atteintes radiculaires d'origine dégénératives sont particulièrement fréquentes aux étages L4, L5 et S1 et plus rarement à l'étage lombaire haut (L1, L2 et L3). L'innervation des troncs nerveux est pluriradiculaire. Pour l'étude de la région lombaire haute, la stimulodétection comportera sur le plan moteur une analyse du nerf fémoral (L3-L4) et sur le plan sensitif une étude du nerf cutané latéral de la cuisse (L2-L3) et du nerf saphène interne (L4). L'étude de détection à l'aiguille analysera les muscles psoas iliaque (L2), vaste médial et portion haute du grand adducteur (L3), vaste latéral (L4) et tibial antérieur (L4-L5). L'étude de la région radiculaire lombo-sacrée comportera une analyse des branches fibulaire et tibiale postérieure du nerf sciatique sur le plan moteur et des nerfs fibulaire superficiel et sural sur le plan sensitif. L'étude de détection à l'aiguille analysera au moins un muscle proximal et un muscle distal par racine : moyen fessier et long péronier (et/ou tibial postérieur et/ou extenseur propre du gros orteil) pour la racine L5 et grand fessier et gastrocnemius medialis ou lateralis pour la racine S1. Analyse des ondes tardives Par stimulation distale : ondes F L'onde F est un potentiel d'action global musculaire évoqué généré dans la zone initiale de l'axone par stimulation antidromique axonale distale supra-maximale d'un nerf moteur qui survient après la réponse direct dite « M ». La dénomination « F » vient du fait que les premières descriptions ont été effectuées sur les muscles du pied (« Foot » en anglais) par Magladery et Mac Dougal en 1950. Elles sont de réalisation simple et non invasive mais de faible sensibilité. La latence de l'onde F est allongée en cas de lésion démyélinisante et l'amplitude de l'onde F est augmentée en cas d'atteinte centrale pyramidale. La morphologie est variable d'une stimulation à l'autre, contrairement aux réflexes d'axone. La latence des ondes F doit être interprétée en fonction de la taille du patient. L'absence de réponse F doit être interprétée de manière prudente sur certains nerfs comme le nerf fibulaire car ces réponses ne sont pas constantes chez le sujet sain. La contraction légère du muscle augmente la probabilité de présence de l'onde F. L'utilité des ondes F dans les radiculopathies est controversée. L'impact du ralentissement du petit segment démyélinisé en région radiculaire est faible par rapport à la grande longueur du nerf exploré. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 52 Apport des explorations neurophysiologiques dans les pathologies radiculaires lombo-sacrées d'origine dégénérative Par stimulation intermédiaire : réflexe H Le réflexe H est évoqué par stimulation des fibres sensitives des fuseaux neuromusculaires du groupe Ia (volée afférente vers la moelle épinière) avec production d'un potentiel postsynaptique excitateur des motoneurones α avec réponse musculaire (volée efférente). La stimulation concomitante des fibres Ib produit une inhibition postsynaptique qui est à l'origine de la faible amplitude et de la faible durée de la réponse H en comparaison avec la réponse M directe. La réponse H (comme la réponse F) ne renseigne que sur une petite population de fibres nerveuses du nerf exploré et n'est pas spécifique du processus lésionnel. Le nerf exploré empreinte par ailleurs plusieurs racines nerveuses, ce qui rend l'interprétation délicate, sauf pour les réflexes H soléaire et palmaire (fléchisseur radial du carpe) assez spécifiques des racines S1 et C7 respectivement. La comparaison droite/gauche est importante pour l'interprétation des résultats du fait de la grande variabilité des amplitudes et latences en fonction des patients. Par stimulation étagée : ondes A Les ondes A traduisent des éphapses axono-axonales proximales ou un processus de réexcitation par lésions myéliniques ou nodales. Par des techniques de modulation de l'intensité de stimulation, il est possible d'avoir des informations sur l'excitabilité des fibres myélinisées et la régénération des fibres de petit calibre. Elles peuvent prédire le risque de développer une neuropathie (neuronopathie, polyneuropathie ou radiculopathie). Elles n'ont pas encore d'intérêt spécifique démontré dans les pathologies dégénératives rachidiennes à l'origine de radiculopathies traumatiques. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés PES La technique des PES consiste à stimuler un gros tronc nerveux distal (analyse globale de la voie sensitive afférente) ou des récepteurs cutanés au sein d'une zone dermatomale (analyse topographique plus spécifique) et de recueillir les réponses évoquées de la volée afférente aux endroits stratégiques (racines nerveuses, corne postérieure de la moelle, jonction médullo-bulbaire, cortex primaire et secondaire) à l'aide d'aiguille sous-cutanée placée sur le trajet de cette volée afférente en fonction du site stimulé. Les PES sont complémentaires à l'analyse ENMG dans les pathologies radiculomédullaires par l'étude centrale cordonale postérieure, par l'analyse préganglionnaire de la racine sensitive et par la spécificité radiculaire étudiée en cas de stimulation dermatomale. 53 De façon générale, un retard de latence et un étalement de la réponse évoquée traduisent un processus lésionnel démyélinisant alors qu'une diminution de l'amplitude sans retard de latence ni étalement plutôt une perte axonale. Cette vision reste simpliste car un bloc de conduction par démyélinisation étendue peut aussi être à l'origine d'une baisse d'amplitude, voire une abolition de la réponse. Une atteinte périphérique au ganglion rachidien aura préalablement été évaluée par l'ENMG (baisse d'amplitude sensitive) pour l'interprétation du résultat des PES. Une rareté des ondes F ou une normalité des conductions nerveuses sensitives périphériques associées à une abolition des PES sont en faveur d'une composante lésionnelle radiculaire proximale préganglionnaire, médullaire ou intracrânienne. Une faible altération des résultats en PES associée à des conductions sensitives périphériques nettement altérées sont en faveur d'une atteinte purement périphérique. La spécificité des PES par stimulation dermatomale peut être utile en complément de l'examen de détection à l'aiguille pour déterminer le niveau lésionnel radiculaire. La stimulation tronculaire (nerf tibial par exemple) n'est pas localisatrice sur le plan radiculaire car elle empreinte plusieurs racines (L5-S1). Les limites des potentiels évoqués sont nombreuses, ce qui explique encore en partie sa faible utilisation : le niveau d'exigence technique élevé ; la coopération du patient qui doit être particulièrement détendu ; une anomalie focale et partielle peut ne pas être vue car « noyée » dans la longueur explorée et du fait du faible nombre de fibres stimulées ; la possibilité d'une lésion plexique sous-jacente difficile à objectiver, y compris avec l'ENMG. Il faut donc toujours comparer les deux côtés : l'altération sera retenue comme significative si la différence de latence droite/gauche est de plus de 10 % et d'amplitude de plus de 50 %. Il faut, par ailleurs, interpréter les latences des réponses en fonction de la taille du patient. PEM Ils consistent à stimuler le cortex cérébral puis, dans la zone rachidienne, les racines nerveuses au niveau des foramen intervertébraux, ce qui permet d'obtenir un temps de conduction total, un temps de conduction périphérique (moins la conduction radiculaire intracanalaire) et par la soustraction des deux un temps de conduction central (plus la conduction radiculaire intracanalaire). Cette technique est peu utilisée car très peu spécifique du niveau radiculaire et peu sensible du fait de la faible quantité de fibres étudiées. Les PEM ont, en revanche, plus d'intérêt dans l'évaluation médullaire des myélopathies cervicarthrosiques. F. Devière Diagnostics différentiels Atteintes plexiques La cause la plus fréquente est l'infiltration tumorale d'origine locale (colorectale, utérine, vésicale, ganglionnaire, osseuse). L'équivalent du syndrome de Parsonage-Turner du membre supérieur est possible au niveau du plexus lombo-sacré. Les cause traumatiques, infectieuses, postradiques ou compressives par hématome (psoas ou rétropéritonéale) sont plus rares. Atteintes tronculaires Les syndromes canalaires tronculaires des membres inférieurs sont plus rares qu'aux membres supérieurs mais doivent être recherchés en l'absence de cause radiculaire : nerf fibulaire commun au col du péroné, du nerf cutané latéral de la cuisse sous l'épine iliaque antéro-supérieure dans la traversée de l'arcade fémorale et du nerf tibial au tunnel tarsien sont les plus fréquents. L'atteinte isolée non traumatique et progressive du tronc sciatique est rare. Les causes tumorales comportent le périneurome du sujet jeune indolore et progressif, les schwannomes douloureux, voire le lymphome. Atteintes polyneuropathiques Quelques pathologies plus diffuses doivent être recherchées en situation de tableau douloureux (vascularite) et/ou déficitaire (neuropathies multifocales à blocs de conduction persistants avec atteinte des nerfs aux membres inférieurs et sclérose latérale amyotrophique). Conclusion Les techniques électrophysiologiques décrites ci-dessus sont souvent sensibles isolément mais peu spécifiques de territoire ou du processus lésionnel sous-jacent. Elles deviennent utiles en les combinant pour gagner en spécificité et donc en informativité sur les plans pronostique et topographique. Pour ce faire, il est utile d'optimiser sa pratique sur le plan technique pour rendre l'examen fiable et indolore pour le patient donc utile et supportable. Il faut par ailleurs orienter son examen électrophysiologique en fonction des données anamnestiques et cliniques selon une véritable expertise électroclinique avant de conforter ou non les résultats avec les données de l'imagerie anatomique. Ces dernières précisent alors, le plus souvent, le mécanisme étiologique. Il semble difficile de se priver aujourd'hui de l'apport de l'analyse électrophysiologique compte tenu des intrications pathologiques radiculaires, plexiques et tronculaires et de sa complémentarité avec les résultats d'imagerie. En dehors de la corrélation anatomo-clinico-fonctionnelle, l'évaluation électrophysiologique permet d'informer sur la sévérité de l'atteinte et donc de répondre aux interrogations pronostiques et/ou de redresser certaines hypothèses diagnostiques. La sécurisation qu'elle apporte aux prescripteurs est essentielle dans la bonne prise en charge du patient « moderne » qui est soucieux de comprendre les enjeux thérapeutiques pour participer pleinement aux processus décisionnels. Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Pour en savoir lus Fournier E. L'électromyographie sans douleur, 1998, 2008. Éditions Lavoisier 2014. Wilbourn AJ, Aminoff MJ. AAEM minimonograph 32 : the electrodiagnostic examination in patients with radiculopathies, American Association of Electrodiagnostic Medicine. Muscle Nerve 1998 ; 21 : 1612–31. Fisher MA. Electrophysiology of radiculopathies. Clin Neurophysiol 2002 ; 113 : 317–35. Haig AJ, Tong HC, Yamakawa KS, Quint DJ, Hoff JT, Chiodo A, et al. The sensitivity and specificity of electrodiagnostic testing for the clinical syndrome of lumbar spinal stenosis. Spine (Phila Pa 1976) 2005 ; 30 : 2667–76. Dillingham TR. 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Le praticien en charge du patient souffrant de sciatique doit tenir compte du profil psychologique du patient et des facteurs socioprofessionnels potentiellement impliqués afin de dédramatiser la situation et du fait qu'une hernie discale lombaire ait parfois été diagnostiquée à l'imagerie, source d'angoisse supplémentaire. La mise en place du traitement médical doit toujours s'effectuer sous surveillance rapprochée de l'examen clinique. Information du patient Il faut bien expliquer au patient que l'histoire naturelle de la hernie discale avec sciatique évolue favorablement dans la plupart des cas. En effet, environ 90 % des sciatiques traitées uniquement par antalgiques sont soulagées à 3 mois [1]. Plus de 80 % des patients avec parésie initiale ont parfaitement récupéré à un an sans chirurgie [4]. Les déficits sensitifs peuvent récupérer plus tardivement (50 % à un an). Plus des trois quarts des hernies discales ont partiellement ou complètement régressé à un an en IRM [5]. Surtout, il n'y a pas de différence en termes d'évolution douloureuse ou fonctionnelle entre les stratégies médicales ou chirurgicales à un an [3]. Il faut bien expliquer au patient que le diagnostic de sciatique par hernie discale est initialement clinique avec prise en charge médicale initiale par traitements antalgiques pendant au moins 6 à 8 semaines, sans La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés nécessité d'avoir recours à une imagerie. Ce n'est que passé ce délai que d'autres stratégies plus invasives pourront être envisagées avec réalisation d'une imagerie (scanner ou IRM lombaire) si la sciatique reste très invalidante. Malheureusement, beaucoup trop de patients en situation clinique non compliquée, vont demander directement de passer une imagerie IRM ou scanner à leur médecin traitant, source d'angoisse lorsqu'elle conclue à : « volumineuse hernie discale… ». Or, l'imagerie discale lombaire ne permet pas de prédire l'évolution clinique de la hernie car le mécanisme de la douleur sciatique fait intervenir d'autres phénomènes que le volume seul de la hernie (mécanismes de compression et d'étirement de la racine nerveuse, d'inflammation pour résorber la hernie, d'ischémie vasculaire…) et la hernie discale a une prévalence élevée dans la population générale sans sciatique (20 à 36 %), surtout après 40 ans [6]. Ainsi, il faut rassurer le patient, surtout s'il est de nature anxieuse, en restant vigilant sur le plan de l'examen clinique. Une fois ces informations données dans le contexte de l'examen clinique, la décision thérapeutique médicale sera partagée avec le patient afin d'obtenir la meilleure adhésion possible aux recommandations et au traitement médical conservateur. Toutefois, le niveau d'information au patient ne modifie pas l'évolution naturelle de la sciatique. Son impact sur l'observance et l'adhésion au traitement n'est pas encore vraiment connu. Repos relatif, activités physiques et recommandations posturales Les études cliniques ont démontré que le repos au lit n'apportait aucun bénéfice comparativement au fait de conseiller la poursuite de rester actif, lui-même sans risque de complications y compris à court terme [1,2,7]. En pratique clinique, seuls les patients vraiment soulagés par la position allongée ou ne pouvant pas se verticaliser à cause de la douleur en période initiale aigüe, pourront en bénéficier sur une période R. Levasseu , F. Bentaha , C. Masson la plus courte possible mais les thérapeutes doivent garder à l'esprit que c'est plutôt l'activité modérée et adaptée qui apportera le soulagement. D'autres auront au contraire des difficultés à rester en décubitus et passeront quelques nuits à dormir dans un fauteuil en attendant l'amélioration. Le travail comportant des contraintes physiques de port de charges fera l'objet de recommandations particulières. Il faudra aussi s'enquérir du niveau de pénibilité et de stress ressentis au travail par le patient qui sont à la fois un facteur déclenchant et un facteur de chronicité de la douleur, qui se transforme alors plutôt en souffrance. En effet, il existe plus de symptomatologie sciatique chez les patients ayant une faible satisfaction au travail et des tâches répétitives contraignantes [8]. Il faudra toujours prendre en compte cette dimension afin de ne pas entrer dans une escalade thérapeutique souvent mise en échec dans ce contexte. Ceux qui sont exposés à de longs trajets en voitures devront aussi ralentir leur activité. Dans tous les cas, il faudra bien conseiller de : • ne pas porter de charges lourdes (que l'on pourra fixer arbitrairement supérieures à 5 kg) ; en effet, le simple port d'un sac ou panier de plusieurs kilos peut suffire à déclencher une douleur sciatique ; • plier les genoux en gardant le dos droit lorsque l'on ramasse un objet à terre (et non pas fléchir le rachis en avant en gardant les membres inférieurs tendus !) ; • éviter tous les mouvements de rotation du rachis (comme lors d'une taille de haie...) ou de flexion avec charges, très pourvoyeurs de lésion discale ; • éviter la position assise prolongée lors des voyages en voiture ou autres moyens de transport ; se mettre en position debout et étirer son rachis au minimum toutes les heures ; • réaliser les gestes prudemment lors du laçage de chaussure ou lorsque l'on enfile des bas ou un pantalon ; • il n'y a pas de recommandations spécifiques concernant les positions durant le sommeil mais il est souhaitable d'avoir un matelas de bonne qualité. Il faudra également favoriser la reprise de l'activité de manière progressive et adaptée afin d'éviter la chronicisation de la situation et le déconditionnement à l'effort, enjeu majeur surtout lorsqu'il existe un environnement de pénibilité ressentie au travail [9]. Aussi, s'il existe un facteur déclenchant par port de charges lourdes ou de travaux répétitifs avec le rachis, des mesures préventives doivent être envisagées sur le lieu de travail afin d'éviter les récidives, en impliquant le médecin du travail. Règles hygiéno-diététiques Le surpoids (indice de masse corporelle, IMC entre 25 et 30) et l'obésité (IMC > 30) sont des facteurs de risque de sciatique [10]. Un régime hypocalorique associé à une activité physique régulière et adaptée (afin d'éviter une perte de masse osseuse liée au régime hypocalorique isolé) seront à mettre en place dès que la situation aigüe sera maitrisée. Les activités physiques comme la marche à pied, la natation douce (sans restriction de type de nage), le vélo (y compris d'appartement) sont à encourager. Le tabagisme est un facteur de risque indépendant de hernie discale lombaire [11]. Il devra aussi être pris en charge, en proposant éventuellement une consultation spécifique en addictologie. Le tabagisme actif entraîne une diminution de la microcirculation qui peut aussi favoriser les processus douloureux au niveau des disques lésés [12]. Le diabète et les dyslipidémies sont aussi plus fréquemment associés aux sciatiques et doivent être équilibrés par les mesures hygiéno-diététiques dans tous les cas et pharmacologiques si nécessaires [12]. Traitements pharmacologiques Bien qu'ils soient largement prescrits, les antalgiques et les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ont un niveau de preuve d'efficacité scientifiquement limité voire absent dans le traitement de la sciatique, en partie du fait de l'absence d'études cliniques de bonne qualité [13,14]. Les antalgiques Leur prescription doit être graduelle (de palier 1 à palier 3), en gardant à l'esprit de ne pas débuter avec des doses trop fortes, afin d'optimiser le rapport efficacité tolérance de la molécule choisie. Habituellement, les antalgiques de palier 1 ne sont pas suffisamment efficaces et il faut recourir d'emblée à des paliers 2 puis ensuite des paliers 3 si nécessaire. Les antalgiques de palier 1 comme le paracétamol pourront être prescrits à la dose habituelle de 3 g/j jusqu'à 4 g/j maximum (en respectant l'espacement de prise d'au moins 6 heures), en surveillant la tolérance hépatique. Le néfopam, analgésique central non morphinique (Acupan®), peut également être utilisé en seconde intention, à la dose d'une ampoule de 20 mg toutes les 4 à 6 heures au maximum, pendant une durée limitée, à l'appréciation du prescripteur et en évitant son utilisation chez les sujets de plus de 65 ans (risque de syndrome confusionnel). Il a aussi des effets © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 56 © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés raitement médical de la sciatique par hernie discale lombaire atropiniques (bouche sèche, nausées, tachycardie et rétention urinaire). Les antalgiques de palier 2 comprennent la codéine et le tramadol. Des risques de dépendance avec le tramadol doivent limiter sa prescription dans la durée. Les autres molécules comprenant des associations : paracétamol, poudre d'opium, caféine pourront aussi être utilisés selon les règles de bon usage évaluant le rapport efficacité/tolérance. Les antalgiques de palier 3 morphiniques peuvent être utilisés d'emblée si la douleur est évaluée supérieure à 7 sur une échelle visuelle analogique (EVA de 0 à 10). Une titration morphinique initiale peut être utilisée. La dose de morphine utilisée doit être adaptée selon le rapport efficacité/tolérance. Là aussi, les doses initiales doivent être adaptées et augmentées progressivement afin d'éviter les phénomènes de nausées et d'intolérances digestives. Les morphiniques d'action lente doivent être utilisés matin et soir avec des interdoses de morphiniques d'action rapide. L'appréciation de la douleur doit être réalisée de manière rapprochée, habituellement avec une EVA. Leur utilisation au long cours n'est pas recommandée et le thérapeute doit être vigilant concernant la prévention du ralentissement du transit [14]. Il faut veiller à un bon état d'hydratation, en particulier chez les patients plus âgés avec une fonction rénale plus fragile, chez qui un certain état de somnolence accompagne la sédation douloureuse, responsable rapidement de déshydratation et d'insuffisance rénale fonctionnelle. Le néfopam et les morphiniques peuvent entraîner une rétention urinaire (mesurable à l'échographie au lit du malade « bladder scan »), source de confusion possible chez le clinicien avec un syndrome de la queue de cheval. L'absence d'anesthésie en selle ou des organes génitaux externes permettra d'orienter vers l'étiologie médicamenteuse et dans les situations les plus complexes, l'absence de conflit disco pluriradiculaire à l'imagerie IRM. La résistance à un traitement morphinique bien conduit (dose optimale tolérée) pendant 48 h pourrait définir la sciatique hyperalgique, tout comme l'impossibilité de diminuer progressivement le traitement morphinique après la phase aigüe, situations peu fréquentes. L'impossibilité du patient à se verticaliser du fait de la douleur correspond aussi à une situation de sciatique hyperalgique et peut justifier une hospitalisation si le patient ne peut pas être géré à domicile. Dans ce cas, il faudra bien réévaluer les facteurs psychosociaux et professionnels possiblement aggravant dans cette situation, avant d'envisager une chirurgie, sous peine d'échec thérapeutique. 57 Les anti-inflammatoires non stéroïdiens Ils font partie des antalgiques de palier 1. Il faut privilégier la voie orale et le traitement court, ne dépassant pas 1 à 2 semaines si possible. Il est recommandé d'utiliser un protecteur gastrique (inhibiteur de pompe à protons en pratique, à prendre le matin). L'utilisation des voies intraveineuse et intramusculaire est à proscrire, compte tenu des complications potentielles et de la iatrogénie. Les AINS peuvent être utilisés en complément des antalgiques. Il est préférable de les prescrire à demi-dose chez les patients plus âgés en recommandant une bonne hydratation. Ils semblent avoir une efficacité surtout sur la lombalgie et plus limitée sur la sciatique [15]. Ils sont contre-indiqués chez les patients traités par anticoagulants anti-vitamine K et les insuffisants rénaux. Il faut également les surveiller de manière étroite chez les patients sous morphiniques et inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC), sous peine de provoquer une insuffisance rénale grave (par déshydratation et action conjuguée néfaste des IEC et AINS sur la fonction rénale). Les médicaments à éviter La corticothérapie orale n'a pas sa place à titre antalgique. La prégabaline n'a pas démontré son efficacité thérapeutique dans la sciatique lombaire par hernie discale, de même que les antiépileptiques, les antidépresseurs, les décontracturants musculaires. Les infiltrations rachidiennes de glucocorticoïdes Les infiltrations intradurales sont dorénavant proscrites. Les infiltrations épidurales de glucocorticoïdes permettent un effet antalgique plus rapide dans le premier mois [16,17]. Leurs indications ne sont clairement pas codifiées. L'indication de l'infiltration rachidienne peut être l'existence d'une sciatique persistante après échec des traitements pharmacologiques bien conduits : jusqu'à l'antalgique maximum toléré pendant au moins 3 à 4 semaines délivré par le médecin traitant et aussi potentiellement dans la situation où les AINS ne peuvent pas être utilisés. Un avis rhumatologique peut alors être sollicité pour la réalisation du geste. Selon les dernières recommandations publiées par la Société française de rhumatologie en 2018 concernant le rachis lombaire [18], la voie préférentielle actuelle est la voie épidurale par le hiatus sacro-coccygien, après guidage clinique ou par imagerie. En pratique R. Levasseu , F. Bentaha , C. Masson quotidienne, le repère échographique est aisé et non irradiant, contrairement au scanner ou à la radioscopie. La seule molécule ayant une AMM en France pour l'infiltration rachidienne est l'acétate de prednisolone (Hydrocortancyl®, 5 ml/125 mg), corticostéroïde particulaire (en suspension). Son injection accidentelle dans un vaisseau participant à la vascularisation médullaire expose à un risque d'infarctus médullaire et de paraplégie essentiellement. C'est pour cette raison qu'il faut proscrire l'injection par voie foraminale, même sous guidage par imagerie. Les deux autres voies possibles dans les situations simples sont la voie interépineuse (après repère clinique ou par imagerie) réalisable en consultation ou interlamaire (après repère par imagerie) très peu utilisée. En revanche, un antécédent de chirurgie lombaire permet une infiltration par le hiatus sacro-coccygien mais exclut la voie postérieure interépineuse ou interlamaire, du fait de complications neurologiques graves qui ont été décrites. Selon les habitudes des « écoles de Rhumatologie » qui les enseignent, le nombre des infiltrations ne dépasse pas trois au total (sur environ une année) et peuvent être espacées au minimum de 48 heures. Si un seul geste est envisagé, 125 mg (5 ml) d'acétate de prednisolone peut être injecté. Si deux ou trois infiltrations sont envisagées, il vaut mieux alors n'injecter que 50 à 75 mg d'acétate de prednisolone à chaque fois. Avant d'envisager ce geste, le praticien s'assurera de l'absence d'infection intercurrente. La prise d'anticoagulants (AVK, héparine, anticoagulants oraux) ou d'anti-agrégants plaquetaire doit être recherchée. La prise d'acétyl-salicilique permet une infiltration. La prise d'anticoagulants doit bien faire peser l'utilité du geste dans ce contexte, vu le bénéfice escompté. Si après décision médicale partagée, le geste est envisagé alors que le patient est traité par un anticoagulant, les règles d'arrêt et de reprise du traitement selon la molécule concernée doivent être appliquées (tableau 7.1), en concertation avec le cardiologue ou le neurologue prescripteur initial s'il y a nécessité de poursuivre une anticoagulation pendant la durée d'arrêt des AVK ou autres molécules. Si ces règles ne sont pas respectées, le risque lié à la réalisation du geste est la survenue d'un hématome épidural avec syndrome de la queue de cheval, aux conséquences potentiellement très graves. Autres thérapeutiques sans niveau de preuve d'efficacité Les manipulations vertébrales sont à éviter en cas de sciatique. Il faut noter que de nombreuses lombalgies simples peuvent se transformer en véritable sciatique Tableau 7.1 Conduite à tenir avant l'infiltration rachidienne en fonction des anticoagulants prescrits aux patients. Traitements antiagrégant ou anticoagulant en cours Conduite à tenir avant l'infiltration rachidienne Aspirine L'infiltration peut être réalisée en continuant le traitement par aspirine Anti-agrégants plaquettaires : clopidogrel Arrêt au moins 5 jours avant l'infiltration par le hiatus ou interépineuse et reprise le lendemain du geste Anti-vitamines K (AVK : coumadine, fluindione) Arrêt jusqu'à obtenir un INR < 1,5 et reprise des AVK 24h après le geste Anticoagulants oraux : AOD : anti-IIa (dabigatran, Pradaxa®) et anti-Xa : rivaroxaban (Xarelto®), apixaban (Eliquis®) Arrêter 5 jours avant l'infiltration et reprise 24 h après le geste Héparines de bas poids moléculaire (HBPM) Arrêt 12 h avant le geste et reprise 12 h après après une séance de manipulation. La kinésithérapie n'est pas recommandée à la phase aigüe [19]. Les tractions vertébrales sont inefficaces. L'ostéopathie, l'acupuncture, la balnéothérapie, l'homéopathie et la mésothérapie n'ont pas démontré leur efficacité. Le port de corset rigide n'est plus trop utilisé, de même que la ceinture de maintien lombaire, qui, si elle est utilisée, peut l'être sur une période courte, lors de la réalisation d'efforts. Il n'y a pas de niveau de preuve concernant l'application de chaleur locale ou de froid en région lombaire sur l'effet antalgique, mais cette mesure simple et souvent appréciée des patients peut être appliquée. Cependant, il ne faut pas réitérer une application de chaleur trop fréquemment et trop longtemps (on peut recommander une application matin et soir de 20 minutes) afin d'éviter une dermite des chaufferettes. La stimulation électrique transcutanée du nerf (TENS) sciatique peut être utilisée lorsque la douleur se chronicise et que l'intervention chirurgicale n'est pas réalisable. La technique percutanée est moins utilisée en France [20]. L'hypnose est une possibilité d'aide thérapeutique potentielle dans les situations de sciatique chronique © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 58 raitement médical de la sciatique par hernie discale lombaire et de souffrance au travail. Les techniques d'hypnose ou de relaxation pourraient être évaluées, en particulier dans les situations où la sédation douloureuse initiale n'est pas rapidement optimale et chez les patients anxieux. 59 Stratégie thérapeutique en pratique La prise en charge initiale est assurée par le médecin omnipraticien (référent, traitant) pendant les 3 à 4 premières semaines, en l'absence de complications (figure 7.1). Il met en place le traitement antalgique pharmacologique Sciatique commune Déficit moteur ≤ 3 Hyperalgique Syndrome de la queue de cheval Patient ne pouvant pas se verticaliser En urgence immédiate : Imagerie (IRM ou scanner) © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Chirurgie Paracétamol Morphine AINS ± hospitalisation si prise en charge à domicile impossible Discussion d'infiltration(s) épidurale(s) de glucocorticoïdes Chirurgie à discuter si évolution défavorable après 3 à 6 semaines, surtout s'il existe un déficit moteur associé Sans déficit moteur Non hyperalgique Antalgiques AINS Avis rhumatologique Discussion d'infiltration(s) épidurale(s) de glucocorticoïdes Chirurgie envisageable si évolution défavorable après 6 à 8 semaines Figure 7.1 Algorithme de la place du traitement médical dans la prise en charge thérapeutique des formes cliniques de sciatique par hernie discale lombaire. R. Levasseu , F. Bentaha , C. Masson ainsi que les règles hygiéno-diététiques posturales. Cette stratégie initiale ne nécessite pas de bilan exhaustif, elle est basée sur l'histoire et l'examen cliniques. Si la sciatique persiste sans paralysie au bout de 3 à 4 semaines, un avis rhumatologique peut être envisagé pour discuter une infiltration épidurale par le hiatus sacro-coccygien ou voie interépineuse lors de la consultation ainsi que la poursuite du traitement pharmacologique bien conduit. Le rhumatologue peut réaliser 3 infiltrations au total, possiblement espacées d'une semaine environ à chaque fois. La question de l'utilité d'une imagerie IRM ou scanner lombaire peut se discuter à ce stade, avant la réalisation de l'infiltration, si l'histoire et l'examen cliniques ne sont pas caractéristiques. Un avis chirurgical peut être sollicité si une concordance entre l'examen clinique et l'imagerie (scanner ou IRM lombaire) est prouvée, après échec du traitement médical à partir de 6 à 8 semaines d'évolution environ (valeur approximative arbitraire selon les données relatives à l'évolution naturelle de la hernie et de la pratique clinique). En effet, il est consensuel dans la littérature et en pratique de poursuivre le traitement conservateur pendant au moins 6 à 8 semaines avant d'envisager une imagerie (IRM ou scanner) puis éventuellement une solution chirurgicale après décision médicale partagée, dans les sciatiques sans paralysie ni syndrome de la queue de cheval (qui, elles, nécessitent une prise en charge urgente) [19,21]. Lorsque le patient tolère la douleur et la gêne occasionnée en poursuivant le traitement antalgique, et qu'il n'existe pas de déficit moteur, il peut prendre la décision de ne pas avoir recours à la chirurgie. Si la sciatique reste hyperalgique et déficitaire sur le plan moteur à 3 ou 4 sur 5 au bout de 3 à 4 semaines de traitement conservateur, il devient alors légitime de proposer la chirurgie (figure 7.1). Il faut rappeler que lorsque la chirurgie est envisagée après 8 à 12 semaines de symptomatologie sciatique, environ 10 % des patients en instance de chirurgie s'améliorent encore spontanément dans les 2 semaines après la prise de décision [3]. Quand hospitaliser un patient ? À l'heure actuelle, l'hospitalisation est nécessaire en cas de situation paralysante de type syndrome de la queue de cheval ou de déficit moteur ≤ 3 sur 5 d'installation rapide avec réalisation d'une imagerie en urgence (IRM) et avis chirurgical en urgence. La sciatique avec un déficit moteur coté à 3 + ou 4 peut aussi faire l'objet d'une hospitalisation selon le contexte afin de surveiller étroitement l'évolution déficitaire, surtout s'il existe aussi une difficulté à gérer le traitement antalgique. La réalisation d'une infiltration rachidienne peut se réaliser en consultation, avec l'utilisation éventuelle d'un appareil d'échographie pour le repérage selon la technique. La surveillance clinique quotidienne du patient portera sur la demande de marcher sur la pointe des pieds (pour tester la force motrice de S1) et sur les talons (L5) et de s'enquérir du bon fonctionnement des sphincters, à côté de la prise en charge antalgique adaptée et des recommandations posturales. Le coût d'une journée d'hospitalisation en France (de l'ordre de plus de 1 000 euros, versus quelques euros pour le traitement journalier antalgique seul) doit faire réfléchir à la bonne démarche thérapeutique, en évitant également d'envoyer les patients aux urgences sans motif de type complication neurologique grave ou suspicion de diagnostic différentiel de type sciatique non discale d'origine néoplasique. Conclusion Le traitement médical de la sciatique par hernie discale lombaire non compliquée est efficace dans la très grande majorité des cas. Il devra s'effectuer après décision médicale partagée et avoir bien expliqué la nature habituellement favorable de son évolution, en privilégiant les thérapeutiques non agressives. La stratégie actuelle relègue clairement les infiltrations péridurales de corticoïdes en seconde intention avec des règles de voie d'injection mieux définies. Dans les formes chroniques « résistantes » au traitement médical, la preuve du conflit disco-radiculaire concordant entre la clinique et l'imagerie doit être établie, ainsi que l'évaluation des facteurs psychologiques et socioprofessionnels, avant d'envisager des stratégies plus agressives. Déclaration d'intérêts Les auteurs de ce chapitre déclarent n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé ences [1] Vroomen PC, de Krom MC, Wilmink JT, Kester AD, Knottnerus JA. 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RONZI Introduction Définitions La Classification internationale du fonctionnement (CIF) [1] est composée de trois notions importantes : • la déficience qui se définit par un problème des structures anatomiques ou des fonctions organiques sous forme d'une diminution ou d'une perte de fonction importante ; • la limitation d'activité qui se traduit par toute réduction (résultant d'une déficience), partielle ou totale de la capacité d'accomplir une activité d'une façon normale, ou dans les limites considérées comme normales pour un être humain ; • la restriction de participation qui se définit par le désavantage social pour un individu donné qui résulte d'une déficience ou d'une limitation d'activité et qui limite ou interdit l'accomplissement d'un rôle normal (en rapport avec l'âge, le sexe, les facteurs sociaux et culturels). Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), la rééducation se définit comme un ensemble de techniques visant à aider un thérapeute à réduire les déficiences et les limitations d'activités d'un patient. La réadaptation, quant à elle, est un ensemble de moyens mis en œuvre pour aider le patient à s'adapter à ces limitations d'activité lorsqu'elles deviennent stabilisées et persistantes. Enfin, la réinsertion est l'ensemble de mesures médico-sociales visant à optimiser le retour dans la société en évitant les processus d'exclusion. Recommandations actuelles pour la prise en charge de la lombalgie commune La prise en charge d'un patient lombalgique doit être multidimensionnelle. Elle inclut la dimension biomédicale, psychologique et sociale du patient : c'est le modèle bio-psycho-social d'Engel [2]. Ainsi, rééduquer un patient lombalgique ne se limite pas à soulager La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés la douleur mais doit tenir compte des conséquences personnelles, familiales et socioprofessionnelles de cette pathologie. C'est donc une approche multidisciplinaire qui inclut des médecins (généralistes, spécialistes, médecins du travail), masso-kinésithérapeutes diplômés d'État (MKDE), ergothérapeutes, enseignants en activité physique adaptée, psychologue, diététicienne, infirmière diplômée d'État (IDE) et assistante sociale. Le patient est au cœur et acteur de sa prise en charge. Le traitement principal repose sur l'activité physique et la mobilité. Il a été démontré que l'activité physique modérée permet un retour plus rapide à l'activité professionnelle. Les recommandations européennes [3, 4] et internationales [5, 6] prônent le maintien ou la reprise des activités habituelles et professionnelles en cas de lombalgie. Elles recommandent également l'utilisation d'échelles spécifiques telles que le questionnaire STaRT Back screening tool (SBST) [7] ou encore l'Örebro Muskuloskeletal Pain Screening Questionnaire (ÖMPSQ) [8], validés en français, afin de prédire le risque d'une évolution vers une incapacité fonctionnelle chronique. Cette stratification du risque permet, en recherchant les facteurs de risque, d'avoir une approche personnalisée de la prise en charge du patient lombalgique. Par exemple, un patient qui sera considéré à faible risque se verra orienté vers une prise en charge simple, en libéral, avec un maintien des activités de la vie quotidienne et une auto-rééducation de la lombalgie. A contrario, un patient avec un risque élevé de passage à la chronicité ou déjà avec une lombalgie chronique bénéficiera d'une prise en charge intensive et multidisciplinaire (programme de rééducation supervisé en institution par exemple). Déconditionnement physique accompagnant le patient lombalgique chronique L'inactivité physique résultant de la lombalgie chronique entraîne un ensemble de conséquences physiques 64 L. Avoy n, G. Roche-Lebouche , . Dubus, . Ronzi (telles que la perte de la flexibilité du rachis lombaire, perte des capacités musculaires et de la force musculaire du tronc, désadaptation cardiorespiratoire, etc.), psychiques (anxiété, dépression, etc.) et sociales (désinsertion sociale, arrêt de travail, etc.) qu'on appelle le déconditionnement physique et psychosocial. Ce phénomène s'autoentretient et fragilise le patient en dégradant sa qualité de vie (figure 8.1) [9]. La désadaptation qui en résulte est renforcée par les différentes croyances des patients, la kinésiophobie (définie par les peurs et les craintes reliées à la douleur entraînant un évitement des activités considérées comme pouvant provoquer ou augmenter la douleur, ou pouvant aggraver une lésion), le catastrophisme (défini par une attitude pessimiste, prévoyant le pire et dramatisant la situation en se focalisant sur les aspects désagréables de la douleur, entraînant une réponse inadaptée à la douleur), ou encore la surprotection rachidienne. Il est possible de casser le cercle vicieux du déconditionnement physique et adoptant une stratégie de prise en charge orientée vers la reprise progressive de la mobilité (restauration de la flexibilité lombopelvienne, renforcement musculaire, étirements, activités physiques adaptées, etc.), et de gestion de la douleur, sans pour autant chercher à tout prix à la faire disparaître. 2 1 Impotence 2 Impotence 3 Rééducation en complément du traitement médical. Traitement conservateur Quand proposer la rééducation ? 1 Restauration d'une mobilité Douleur 3 B Figure 8.1 Cercle vicieux du déconditionnement physique et prises en charge possibles. A. La douleur entraîne l'immobilisation qui, à son tour, entraîne l'impotence majorant la douleur et l'immobilisation, etc. . Deux champs d'action possibles pour casser le cercle vicieux. Première action sur la douleur, en diminuant la lombalgie, une certaine mobilité est restaurée et entraîne la diminution de l'impotence qui soulage la douleur, et permet une mobilité plus importante. La deuxième action est de restaurer d'emblée une mobilité qui va diminuer l'impotence et faire régresser la douleur permettant une meilleure mobilité. Source : d'après [9]. En cas de lombalgie aiguë, les recommandations européennes et la Haute Autorité de santé (HAS) préconisent d'identifier les drapeaux rouges faisant évoquer une pathologie grave sous-jacente. En effet, la lombalgie dite « commune » est un diagnostic d'élimination. Dans l'immense majorité des cas, la guérison est spontanée en quelques semaines (quatre à six semaines). Il convient donc d'informer et de rassurer le patient et de maintenir le plus possible les activités de la vie quotidienne et l'activité professionnelle du patient. L'imagerie médicale n'est donc pas systématique. En ce qui concerne les tractions, les massages, l'électrothérapie, la neurostimulation électrique transcutanée (NSTC), l'acupuncture ou encore la thérapie comportementale, ils n'ont pas démontré leur efficacité et ont un faible niveau de preuve. Les séances de kinésithérapie en libéral ont peu d'intérêt à ce stade-là. En cas de lombalgie subaiguë (quatre semaines à trois mois) La lombalgie est dite « subaiguë » lorsqu'elle dure plus d'un mois. Il est nécessaire de réévaluer le patient sur le plan clinique afin de s'assurer de l'absence de © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Immobilisation A Douleur Plusieurs autres échelles existent pour évaluer un patient lombalgique chronique. Il est bien sûr utile d'évaluer la douleur grâce à l'échelle visuelle analogique (EVA) et appréhender son retentissement fonctionnel et psychologique. Les paramètres physiques tels que la flexibilité lombopelvienne, la force musculaire lombaire et abdominale peuvent être évalués par les tests de Sorensen et d'Ito et les amplitudes du rachis. L'autoquestionnaire de Dallas évalue la répercussion de la lombalgie dans les activités quotidiennes, les activités professionnelles et de loisirs, évalue l'anxiété, la dépression et la sociabilité. D'autres échelles peuvent être utilisées comme la Fear Avoidance Belief Questionnaire (FABQ), l'Échelle d'incapacité fonctionnelle pour l'évaluation des lombalgies (EIFEL), ou encore l'Échelle de catastrophisme. Ces échelles sont validées en français [10, 11]. En cas de lombalgie aiguë (moins de quatre semaines) Douleur Impotence Échelles d'évaluation du patient lombalgique Rééducation en complément du traitement médical et après chirurgie complications et d'approfondir l'évaluation en utilisant les échelles de stratification du risque de passage à la chronicité et de l'incapacité prolongée (ou encore les drapeaux jaunes). On peut proposer au patient une rééducation active. Elle peut se faire soit avec un MKDE libéral (à raison de trois séances par semaine, pendant cinq semaines), ou alors en centre de rééducation spécialisée. Il n'y a aucune contreindication à la mobilisation chez ces patients-là. Les étirements, le renforcement musculaire global, des muscles de la sangle abdominale et des muscles du dos, la balnéothérapie, les activités physiques adaptées sont autant de propositions et font partie intégrante de la rééducation intensive proposée dans le cadre d'une restauration fonctionnelle du rachis. La rééducation peut se faire en groupe comme en individuel en s'adaptant au cas par cas et aux difficultés rencontrées (figure 8.2). N'oublions pas dans cette prise en charge l'aspect social et psychologique du patient (modèle bio-psycho-social). Il faudra faire appel, si nécessaire, à une psychologue ou à une assistante sociale pour compléter la prise en charge globale de l'individu. Notre équipe [12] a réalisé une étude comparant trois interventions différentes : kinésithérapie libérale, programme de rééducation lombaire supervisé en centre spécialisé et une combinaison de ces deux propositions. Nous avons montré que les différentes prises en charge proposées étaient équivalentes en termes d'efficacité sur le retour au travail des patients inclus. Ordonnance médicale Fait à Le Nom, Prénom du patient, date de naissance © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Motif : lombalgie chronique commune avec syndrome de déconditionnement à l'effort 15 séances de rééducation, à raison de 3 séances par semaine pour : 1) Bilan ostéo-articulaire du rachis et des membres inférieurs 2) Rééducation active du rachis et des membres inférieurs avec : – Travail passif et actif des étirements du rachis et de la chaine postérieure des membres inférieurs. – Renforcement musculaire des muscles spinaux, abdominaux et des membres inférieurs. – Travail proprioceptif – Travail en endurance – Apprentissage de l'auto-rééducation pour un travail personnel à domicile. Cachet : Signature : Figure 8.2 Ordonnance-type de kinésithérapie libérale. 65 En cas de lombalgie chronique (plus de trois mois) La lombalgie devient chronique au-delà de trois mois d'évolution. Sa prévalence est de 10 % à trois mois et de 6 % à six mois. En premier lieu, il est utile de réévaluer la clinique, demander éventuellement l'avis du chirurgien, informer des risques de la chirurgie et de ses résultats en tenant aussi compte des autres thérapeutiques disponibles. L'information du patient est primordiale. Les soins sont coordonnés de façon multidisciplinaire et la prise en charge est globale. Le réseau est un préalable essentiel à la bonne prise en charge du patient. Ici encore, le repos au lit n'est pas recommandé. Un faible niveau de preuve concerne également la physiothérapie, la NSTC, les massages, les tractions vertébrales, la contention lombaire. En revanche, on peut proposer une prise en charge de courte durée à type de manipulation ou de mobilisations passives manuelles du rachis, ou encore les thérapies cognitivo-comportementales, et les interventions éducatives brèves encourageant au retour à une activité normale. Les exercices physiques sous supervision sont recommandés. Il n'y a pas de preuve pour un type d'exercice physique en particulier. La balnéothérapie est recommandée et a un effet antalgique et fonctionnel à court terme. Par ailleurs, la prise en charge par le MKDE tend aujourd'hui vers un consensus qualitatif et quantitatif. Au début de la prise en charge, un bilan diagnostique kinésithérapique est réalisé. L'aspect qualitatif se trouve dans les techniques effectuées. Les techniques antalgiques ne sont pas au cœur des séances. Ce sont des exercices physiques à type d'étirements, de renforcement musculaire et la gymnastique qui doivent être privilégiés. L'aspect quantitatif fait référence au nombre de séances prescrites, qui est de 15 séances pouvant être reconduites. Il ne faut pas dépasser 30 séances sans une réévaluation préalable. Rééducation dans le contexte postopératoire d'une hernie discale simple Dans beaucoup de pays occidentaux, les programmes de réhabilitation postopératoire sont recommandés pour diminuer la convalescence post-chirurgicale. Ne pas en proposer semblerait non éthique pour certains cliniciens. Selon la médecine fondée sur les preuves, la restriction d'activités n'est pas nécessaire après une première chirurgie du disque lombaire [13]. Les techniques de rééducation viennent en complément de la chirurgie et renforcent les résultats fonctionnels de la chirurgie rachidienne. L. Avoy n, G. Roche-Lebouche , . Dubus, . Ronzi Les objectifs de la rééducation postopératoire sont d'accélérer la récupération fonctionnelle, d'assurer la mobilité précoce, prévenir les changements dégénératifs, de diminuer la douleur, d'augmenter l'endurance et de raccourcir la période d'arrêt de travail. Rééducation en postchirurgie immédiate Des études de réhabilitation après une première chirurgie pour hernie discale simple ont montré que la rééducation précoce et intense a des effets bénéfiques sur la douleur, l'invalidité et la mobilité lombaire [14]. Le programme commence dès J15 postopératoire et a de meilleurs résultats sur l'incapacité fonctionnelle, et ce même jusqu'à 12 mois après la chirurgie, que le groupe contrôle. Les auteurs n'ont pas mis en évidence d'effets indésirables de l'entraînement précoce. La séance de rééducation dans cette étude durait 40 à 60 minutes, et était effectuée deux fois par semaine pendant quatre semaines, en libéral. Un autre programme [15] a été testé une semaine après l'opération et comporte trois phases. Une phase précoce où le patient apprend les exercices et les réalise jusqu'à ce qu'il puisse les faire sans douleur. La deuxième phase a pour objectif l'amélioration de la mobilité et le mouvement du rachis dans les différentes directions et amplitudes, et si possible sans douleur. Les exercices sont intensifiés et une résistance progressive est introduite pour accentuer le renforcement musculaire. L'objectif est la rééducation des mouvements physiologiques et la réduction de la kinésiophobie. Enfin, la phase finale tend à la restauration du mouvement physiologique et la réintégration des patients dans la vie active. Des instructions ergonomiques liées au poste de travail et l'entraînement ergonomique sont réalisés pour faciliter la réintégration des patients sur leur lieu de travail. Ce programme comporte 20 sessions de 30 minutes, réparties sur 12 semaines. Les auteurs ont montré une amélioration significative des patients suivant ce programme. La rééducation en postopératoire d'une hernie discale peut donc être démarrée assez précocement (dès J2 pour certaines études), en respectant la douleur et les capacités de chaque patient et sans que cela entraîne des complications. Il n'y a aucune contreindication au mouvement. La littérature montre des programmes d'exercices diverses et variés comparés aux programmes standard de kinésithérapie et il n'y a pas de préférence à avoir sur un tel ou tel type d'exercice. Il faut retenir que le bon traitement est le mouvement. Rééducation à moyen et plus long termes de la chirurgie Quand la rééducation n'a pas démarré immédiatement après la chirurgie, quelle qu'en soit la raison, il n'est pas trop tard pour la débuter. D'ailleurs, la littérature scientifique est plus abondante sur des programmes débutant quatre à six semaines après la chirurgie qu'en postopératoire immédiat. Il n'y pas de consensus sur le meilleur moment pour débuter une rééducation. Prenons l'exemple du programme de stabilisation dynamique lombaire qui dure quatre semaines [16]. Les exercices d'étirements, d'inclinaison du bassin, le renforcement du tronc et des muscles abdominaux sont effectués au domicile du patient. Ce dernier effectue cinq à 15 répétitions, sur une durée de 45 minutes selon sa tolérance et sa performance. Un livret d'exercices écrits est également remis. L'intensité est progressivement croissante. Les exercices réalisés avec une intensité élevée sont plus efficaces sur le statut fonctionnel du patient et permettent un retour rapide au travail [17]. Récupération améliorée après chirurgie (RAA ) La HAS définit la RAAC comme une « approche de prise en charge globale du patient favorisant le rétablissement précoce de ses capacités après la chirurgie » (synthèse du rapport d'orientation publié en 2016). Ce programme s'inscrit dans un projet d'établissement et concerne toutes les équipes pendant les phases pré-, per- et postopératoires du patient. Ce dernier est acteur de sa prise en charge et participe activement aux décisions médicales. Les quatre principes clés sont : la préparation et l'engagement du patient dans sa réhabilitation, dès l'indication de la chirurgie ; la réduction des conséquences du traumatisme chirurgical (douleur, stress physique et psychologique) ; l'autonomisation du patient dès le jour de la chirurgie et l'anticipation de l'organisation des soins et du retour au domicile. De tels programmes s'appliquent également dans la chirurgie du rachis et permettent de diminuer la durée de l'hospitalisation et d'améliorer la récupération postopératoire. La médecine physique et de réadaptation en préchirurgie s'inscrit donc dans le programme de récupération améliorée après la chirurgie, en préparant le patient physiquement à la chirurgie et en anticipant la rééducation postopératoire. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 66 Rééducation en complément du traitement médical et après chirurgie Quid de la méthode McKenzie ? ette méthode a été mise en place par Robin McKenzie dans les années 1950 et est fondée sur le phénomène de centralisation de la douleur grâce aux mouvements répétés du rachis dans une certaine direction. n effet, selon sa théorie, le nucleus pulposus possède, à l'intérieur du disque intervertébral, 6° de liberté de mouvement et sa position dépendrait de la posture du patient et de la direction des mouvements du rachis. Le but du traitement est de réduire, de façon mécanique, la hernie discale. ette technique active de reproduire les exercices en autonomie. Le thérapeute, après un interrogatoire et un examen physique standardisés, détermine la ou les directions préférentielles dans laquelle le patient doit être mobilisé et définit ainsi le programme d'auto-traitement. ne revue systématique de la littérature avec une méta-analyse des études randomisées et contrôlées évaluant l'efficacité de la méthode McKenzie a été réalisée par Machado et al. en 2006 [18] et conclut que la méthode McKenzie est plus efficace que la thérapie passive dans le cadre de lombalgies aiguës mais n'est pas cliniquement significative. l y a moins de preuves sur son efficacité dans le cas de lombalgies chroniques. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Prévention et suivi des patients Afin de prévenir la survenue de lombalgie, pour la population générale, l'activité physique est recommandée. Une information sur le modèle bio-psycho-social peut être intéressante à réaliser. Le port de la contention lombaire n'est pas un moyen de prévention. En milieu de travail, les exercices physiques sont recommandés. Les ceintures lombaires et orthèses plantaires ne sont pas recommandées. Les interventions ergonomiques portant exclusivement sur l'environnement physique ne peuvent être recommandées. Des adaptations du poste de travail et une modification des conditions de travail peuvent être recommandées pour faciliter le retour à l'emploi. Les stratégies des programmes de rééducation sont axées vers une restauration du mouvement et donc une récupération des capacités physiques préexistant à l'état lombalgique. L'intensité et la quantité des exercices pratiqués pendant le programme sont importantes. En effet, tout comme pour un sportif qui cherche à améliorer sa condition physique pour répondre aux requis de son sport, l'état physique diminué du patient lombalgique nécessite un travail inten- 67 sif et régulier pour revenir à son état de base. Dès que les capacités physiques sont normalisées, les exigences de la vie quotidienne suffisent à leur maintien. Les consignes données à la sortie du programme sont donc simples, visant à préserver la flexibilité lombopelvienne et l'endurance. La flexibilité s'entretient par une gymnastique quotidienne courte d'étirements des membres inférieurs. L'endurance s'entretient par la pratique d'une activité physique ou de loisir, une à deux fois par semaine. Le traitement ne s'arrête pas à l'issue du programme. Les patients sont revus en consultation, l'équipe médicale et paramédicale dans l'intervalle de ces dates est toujours disponible et cela fait partie intégrante du traitement. Conclusion La rééducation active pluridisciplinaire est un complément incontournable de la prise en charge pré- et postchirurgie de la lombalgie. Surtout en phase postopératoire, la littérature ne met pas en évidence d'effets indésirables liés à l'activité physique. Il n'y a donc pas de contre-indication au mouvement chez ces patients. Les soins coordonnés multi-professionnels permettent de répondre à des exigences d'une médecine de plus en plus personnalisée et d'une prise en charge du patient dans sa globalité. Les structures régionales d'appui et d'expertise viennent en ce sens appuyer les acteurs de santé. Leurs missions ont pour buts principaux de soutenir la qualité, l'efficience de l'offre globale de santé, la pertinence des soins et l'optimisation des parcours de soins. Remerciements Au Dr Luc Bontoux pour sa relecture attentive, son expertise et ses remarques pertinentes pour la rédaction de ce chapitre. Déclaration d'intérêts Les auteurs de ce chapitre déclarent n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé ences [1] Guerdan V. La classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF, OMS) : usages dans le domaine de l'éducation. ALTER Eur J Disabil Res/Rev Eur Rech Handicap 2013 ; 7 : 1–2. 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BLAMOUTIER Introduction La chirurgie de la hernie discale lombaire existe depuis un siècle, mais c'est en 1977 que la technique chirurgicale à ciel ouvert s'est affinée avec l'apparition de la microdiscectomie [1–3]. L'intérêt de cette technique était la diminution de la taille de la voie d'abord et de mieux visualiser les éléments nerveux par un grossissement optique (microscope) et un éclairage focalisé. L'objectif était d'améliorer le résultat fonctionnel en diminuant le traumatisme musculaire et en réalisant une dissection plus précise de la hernie et de la racine. Actuellement, plusieurs techniques à ciel ouvert sont décrites et varient à quelques détails près. On distingue : • la microchirurgie. Initialement, elle était réalisée à l'aide d'un microscope opératoire avec une voie d'abord de 2,5 à 3 cm environ, transfixiante ou non, à travers le muscle avec un écarteur différent selon les auteurs : spéculum, lame, etc. ; • la technique conventionnelle. Elle était réalisée à l'origine sans magnification optique et apport lumineux. Actuellement, la plupart des opérateurs utilisent des lunettes grossissantes ou une source lumineuse frontale. La voie d'abord est un peu plus grande en fonction de l'écarteur utilisé (3 à 5 cm) et le muscle est détaché de l'épineuse ; • la MED [4]. La magnification optique et l'éclairage étaient assurés par un endoscope fixé sur un tube. La voie d'abord passe à travers le muscle par une cicatrice de 2 cm. Cependant, les grands principes restaient les mêmes pour réaliser la suppression du conflit discoradiculaire qui est la base de l'opération : • abord a minima, unilatéral, interlamellaire ; • éclairage amélioré avec grossissement optique ou non ; La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés • visualisation prudente du conflit discoradiculaire ; • dissection du nerf avec ablation de la hernie discale associée ou non à une excision discale. Si les techniques actuelles permettent d'obtenir le plus souvent un bon résultat, l'autre paramètre important est la pertinence de l'indication chirurgicale. Les règles de base doivent être respectées [5] et sont les suivantes : • prédominance de la douleur radiculaire par rapport à la lombalgie. Cependant, certaines hernies discales peuvent avoir des expressions purement lombalgiques mais sont rares ; • parfaite corrélation radioclinique : la douleur doit être expliquée par une IRM ou un scanner récent, habituellement de moins de deux mois. Le conflit discoradiculaire doit être visualisé. Une radiographie standard est nécessaire pour repérer les éventuelles anomalies transitionnelles ; • échec de toutes les autres thérapeutiques médicales ; • information du patient à propos du rapport bénéfice escompté, risques encourus. Au terme de ce bilan, l'anatomie de la hernie et sa situation par rapport à la racine doivent être parfaitement connues : • sa taille • le sus- ou sous-décalage par rapport au disque ; • sa situation par rapport au foramen ; • l'existence d'une sténose associée. Les indications sont : • en urgence absolue : le syndrome de la queue de cheval ; • en urgence : la paralysie radiculaire inférieure à 3 strict au testing musculaire ; • les douleurs persistantes au-delà de six à huit semaines d'un traitement médical bien conduit. La technique comporte sept étapes. Toutes doivent être respectées et, à chacune d'entre elles, des risques parfois majeurs peuvent survenir. A. Bl moutier Étape 1 : anesthésie Le premier temps de la check list de la HAS [6] est effectué avant la réalisation de l'anesthésie. L'intervention dans l'immense majorité des cas est réalisée sous anesthésie générale avec une hypotension en fonction des comorbidités du patient. L'anesthésie locale ou locorégionale est très rarement utilisée lors des interventions à ciel ouvert, contrairement aux méthodes de « full endoscopy ». L'antibioprophylaxie, habituellement réalisée par l'anesthésiste, suit le protocole de la Société française d'anesthésie et de réanimation (SFAR) [7]. Il préconise : • céfazoline 2 g en intraveineuse lente 30 min avant l'incision ; • en cas d'allergie, vancomycine 30 mg/kg sur une heure, une heure et demi avant l'incision. Danger isque d'infection du site opératoire si l'antibioprophylaxie est mal faite. Étape 2 : installation Étape essentielle, elle est réalisée par l'infirmière de bloc opératoire (IBODE) sous le contrôle du chirurgien [8]. Plusieurs positions sont possibles : les deux plus fréquentes sont le génu pectoral et le décubitus ventral. Dans tous les cas, il faut vérifier l'absence de point de compression (figure 9.1) : • oculaire : risque de cécité définitive ; • abdominal : risque de saignements épiduraux par compression des veines lombaires ; • cubital et l'absence d'étirement du plexus brachial : risque de paralysie. Figure 9.1 Position genu pectoral et contrôle des points d'appui. La tête, surtout chez les personnes âgées, doit être dans l'axe du corps afin d'éviter la rotation du cou et la compression des vaisseaux vertébraux. Une fois la position du patient contrôlée par le chirurgien, la détersion cutanée et le champage stérile sont effectués selon les règles propres à chaque établissement en respectant les recommandations de la Société française d'hygiène hospitalière (SF2H) [9]. Danger Compression d'un nerf, des yeux ou de l'abdomen. Étape 3 : incision cutanée Le « time out » ou deuxième temps de la check list est réalisé avant l'incision. La voie d'abord cutanée est variable selon la technique employée, l'écarteur utilisé, la présence ou non de magnification optique (microscope, lunettes grossissantes) avec amélioration de l'éclairage par lampe frontale. De nombreux écarteurs peuvent être utilisés, de taille variable de 2 à 3 cm de large (figure 9.2). Le repérage cutané est réalisé en palpant les reliefs anatomiques des épineuses et des crêtes iliaques postérieures (figure 9.3). L'espace L4-L5 est situé juste en dessous de la ligne horizontale joignant les deux crêtes iliaques postérieures. La confrontation avec une radiographie standard de profil est utile en regardant la projection des ailes iliaques par rapport au disque. Sur la radio de face, on s'assure qu'il n'y a pas d'anomalie transitionnelle. Un contrôle à l'amplificateur de brillance est le plus souvent réalisé. L'incision de 4 à 5 cm est centrée sur la ligne médiane dans la technique conventionnelle. L'aponévrose postérieure du muscle multifidus est incisée sur l'épineuse, ou un peu décalée. Le muscle est décollé à l'aide d'une rugine de Cobb, séparé de l'épineuse pour accéder à l'espace interlamellaire (figure 9.4). Des hémostases Figure 9.2 Largeur des écarteurs. Taylor : 3 cm ; quadrant : 2 cm ; Williams : 2 cm. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 72 echniques chirurgicales d'ablation d'une hernie discale postéro-latérale intracanalaire lombaire à ciel ouvert 73 autres en cherchant toujours le contact osseux jusqu'à celui de 18 mm qui permet de placer l'endoscope et le bras articulé fixé préalablement à la table (figure 9.5). Danger rreur d'étage, passage intracanalaire avec le et lésions des racines. D Étape 4 : ouverture du ligamentum flavum © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 9.3 Repérage du niveau de l'incision après repérage des crêtes iliaques postérieures. L'incision cutanée dessinée est pour un abord de type MED. Le ligamentum flavum est nettoyé (figure 9.6). À partir de cette étape, les différentes techniques se ressemblent beaucoup. L'objectif est l'accès à la dure-mère et au conflit discoradiculaire. Figure 9.4 Abord en technique conventionnelle avec la rugine de Cobb et l'écarteur de Taylor. Figure 9.5 Mise en place de l'endoscope lors de la technique MED. peuvent être nécessaires lors de cette étape. À cet instant, les systèmes de magnification optique peuvent être utilisés ou non. Certains les utilisent dès l'incision cutanée. Dans la microchirurgie, l'incision de 2,5 à 3 cm est le plus souvent médiane et, selon l'écarteur, le muscle est transfixié ou décollé de l'épineuse. Lors du MED, l'incision de 2 cm est décalée de 1 ou 2 cm du côté de la hernie (figure 9.3). Elle est en regard de l'épineuse en L5-S1, 1 cm en dessous en L4-L5. La broche guide est introduite très progressivement, en transmusculaire, jusqu'au contact osseux de la lame crâniale. C'est le temps dangereux de l'opération avec le risque de passer à travers le ligamentum flavum. Une radio est toujours réalisée pour contrôler la position de la broche en arrière de la lame. Puis les tubes de taille et diamètre croissants sont introduits les uns après les Figure 9.6 Le ligamentum flavum lors d'un abord en technique conventionnelle avec l'écarteur quadrant. Les deux orifices servent à insérer une lumière froide. A. Bl moutier L'ouverture est réalisée au bistouri froid ou avec une petite spatule dans le sens des fibres du ligament. Il faut être très progressif et prudent car la dure-mère peut adhérer au ligament sans espace graisseux. Dès que l'on voit le bleuté de la dure-mère, on la décolle (figure 9.7) avec une spatule mousse. Le ligament est enlevé à la Kerrison. Il est prudent d'avoir selon la taille de la hernie un espace interlamellaire d'au moins 1 cm. Selon la situation de la hernie (sus- ou sous-décalée ou volumineuse), une laminectomie partielle est réalisée. Danger Plaie de la dure- mère. Étape 5 : exploration du canal, visualisation du conflit discoradiculaire compris où est la racine du fait du risque de blessure ou d'étirement. Une fois l'anatomie bien comprise, on peut récliner sans traction excessive la racine avec un écarteur ad hoc (figure 9.9). Il faut se méfier des éventuelles anomalies d'émergence radiculaire. Danger Blessure de la racine ou plaie de la dure-mère lors de la dissection du conflit discoradiculaire. Étape 6 : ablation de la hernie L'ablation de la hernie discale doit se faire par son épaule et jamais par l'aisselle car le risque de troubles neurologiques est accru. Après quelques hémostases à la bipolaire, si nécessaire, le ligament commun vertébral C'est à cette étape que le grossissement optique et l'éclairage focalisé ont tout leur intérêt. On libère à la spatule la dure-mère des éléments osseux (articulaires, lames) et des éventuelles adhérences fibreuses de façon à donner de la mobilité au sac dural. Si le canal est étroit latéralement, à la Kerrison, on enlève la capsule articulaire ou on réalise une arthrectomie partielle. Dès lors, on repère la racine soulevée par la hernie qui peut être exclue ou non (figure 9.8). La visualisation de la racine à son émergence est indispensable avant tout geste d'ablation de la hernie. La palpation du bord interne du pédicule à l'aide d'un crochet mousse permet de bien conceptualiser le trajet de la racine. Il est interdit de retirer la hernie sans avoir Figure 9.8 Repérage de la racine et de la hernie, ici exclue. Figure 9.7 Ouverture du ligamentum flavum à la spatule mousse lors d'un MED. Figure 9.9 Écartement du sac dural et de la racine et visualisation de la hernie. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 74 echniques chirurgicales d'ablation d'une hernie discale postéro-latérale intracanalaire lombaire à ciel ouvert © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés postérieur (LCVP) est incisé au bistouri froid, le plus souvent en croix (figure 9.10). Si la hernie est exclue, les fragments sont enlevés prudemment ayant toujours en vue la racine. Il arrive parfois que certains fragments médians et descendants exclus ne puissent pas être retirés par l'épaule. En agrandissant l'espace par une laminectomie de la vertèbre inférieure, on peut faire glisser ces fragments vers la partie caudale et les enlever à distance de l'aisselle. Les saignements des veines épidurales peuvent être gênants et difficiles à contrôler. L'utilisation de compresses hémostatiques (Surgicel®), ou de type Patti, l'hémostase à la pince bipolaire et l'utilisation d'eau oxygénée sont nécessaires. L'excision discale est plus souvent réalisée (figure 9.11), elle n'est pas systématique en cas de fragment exclu et isolé sans bombement discal associé [10]. Lorsqu'elle est réalisée, elle nécessite l'utilisation de pinces de différentes tailles (2 à 5 mm) avec des angulations variées (coudées vers le haut, vers le bas et droite). On ne peut pas réaliser d'ablation complète du disque mais une simple excision discale avec l'ablation des fragments de la hernie et de la portion du nucleus pulposus adjacente. On arrête l'excision lorsqu'après trois ou quatre tentatives, les pinces ne rapportent plus de fragments discaux. Lors de ces manœuvres, il faut être particulièrement attentif et ne pas pousser trop loin les pinces en avant. Elles peuvent franchir le ligament commun vertébral antérieur. Le risque est une plaie vasculaire (aorte, veine cave ou vaisseaux iliaques) qui peut provoquer le décès du patient. Il ne faut pas faire de curetage discal au niveau des plateaux Figure 9.10 Incision du LCVP après visualisation de la racine. 75 sous-chondraux. Un geste trop agressif peut entraîner des discopathies inflammatoires. Danger Plaie des gros vaisseaux. Étape 7 : controle final et fermeture Une fois la hernie retirée, l'écarteur est ôté. On vérifie avec un crochet mousse la liberté de la racine (figure 9.12) et l'absence de séquestre résiduel, surtout vers la ligne médiane vers le haut ou le long du Figure 9.11 Ablation de la hernie. Le sac dural est maintenu à distance. Figure 9.12 Vérification finale. 76 A. Bl moutier Danger aisser un séquestre. Suites opératoires Le lever est précoce, quatre ou six heures après l'intervention avec l'aide des kinésithérapeutes ou des infirmières. La surveillance neurologique des membres inférieurs et du périnée est répétée régulièrement par les infirmières. Le drain est contrôlé pour bien vérifier l'absence de LCS car il peut y avoir une brèche durale passée inaperçue. Les anticoagulants ne sont pas systématiques et dépendent surtout des facteurs de comorbidité du patient. En revanche, des bas à varice sont classiquement prescrits. La sortie peut être faite le soir si l'hospitalisation en ambulatoire avait été prévue. Lors d'une hospitalisation traditionnelle, la sortie se fait souvent le lendemain ou le surlendemain après l'ablation du drain. La position assise peut être immédiatement proposée et une ceinture lombaire est le plus souvent inutile. Conclusion Le plus souvent, la réalisation de l'ablation d'une hernie discale ne pose pas de problème technique compliqué. Cependant, certaines circonstances avec une anatomie particulière peuvent rendre l'intervention plus délicate. La vigilance reste de mise durant tous les gestes et toutes les phases de l'opération car les conséquences peuvent parfois être dramatiques, voire mortelles. Le respect des bonnes indications associé à une technique rigoureuse est essentiel pour espérer avoir un bon résultat. Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé ences [1] Yasargil MG. Microsurgical operation of herniated lumbar disc. Adv Neurosurg 1977 ; 4 : 81. [2] Caspar W. A new surgical procedure for lumbardisc herniation causing less tissue damage through a microsurgical approach. Adv Neurosurg 1977 ; 4 : 74–80. [3] Williams RW. Microlumbar discectomy. A conservative surgical approach to the virgin herniated lumbar disc. Spine 1978 ; 3 : 175–82. [4] Blamoutier A. Surgical discectomy for lumbar disc herniation : surgical techniques. Orthop Traumatol Surg Res 2013 ; 99(1 Suppl) : S187–96. [5] Foley K, Smith M. Microendoscopic discectomy. Tech Neurosurg 1997 ; 3 : 301–7. [6] Haute Autorité de santé. Check-list « Sécurité du patient au bloc opératoire ». Version 2016. On line. [7] Martin C. 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Un drain aspiratif ou non peut être posé, mais il n'est pas obligatoire en l'absence de saignement. Il est interdit en cas de brèche durale ou exceptionnellement en écoulement libre sous stricte surveillance. La fermeture de l'aponévrose, de la souspeau et de la peau est classique. Le temps III de la check list est effectué. 77 Technique entièrement endoscopique pour le traitement des hernies discales R. WAGNER, M. HÄFNER Introduction Le traitement chirurgical des hernies discales lombaires est passé de la chirurgie ouverte de la colonne vertébrale à la chirurgie tubaire puis aux techniques entièrement endoscopiques. Le développement d'instruments endoscopiques, d'appareils optiques et de pompes d'irrigation ainsi que l'amélioration de la qualité de l'imagerie permettent le traitement des pathologies cervicales, thoraciques et lombaires de la colonne vertébrale. La chirurgie endoscopique du rachis présente notamment comme avantages de réduire les lésions tissulaires, les traumatismes musculaires, les pertes de sang et le tissu cicatriciel et de raccourcir l'hospitalisation. Limitée dans le passé au traitement des hernies discales contenues, cette technique peut maintenant être utilisée pour traiter tous les différents types de syndromes de compression et de pathologies lombaires, y compris les hernies discales avec ou sans sténose foraminale ou centrale. Approche endoscopique transforaminale et interlamaire Les hernies discales peuvent : se produire dans différentes zones du canal rachidien, être localisées au niveau intra- ou extraforaminal et déplacer les nerfs qui traversent ou qui sortent de la colonne lombaire (figures 10.1, 10.2). En fonction de l'évaluation préopératoire de l'anatomie du patient et des résultats radiologiques et cliniques, la chirurgie endoscopique peut être effectuée par voie transforaminale ou interlamaire (figure 10.3). La chirurgie transforaminale peut être pratiquée pour les hernies discales dans toutes les zones de la colonne lombaire, y compris le récessus latéral, pour la sténose foraminale ou centrale. Contre-indications à l'approche transforaminale Certaines pathologies observées sur les radiographies peuvent entraîner des difficultés lors d'une approche transforaminale et pourraient parler en faveur d'une technique interlamaire. Ces résultats radiologiques incluent les anomalies au niveau des racines nerveuses sortantes, comme une racine nerveuse sortant trop bas ou une racine nerveuse double, une crête iliaque élevée pour L5-S1, des hernies discales fortement migrées (figure 10.2), une sténose spinale primaire ou secondaire, une déformation grave, y compris une scoliose ou un spondylolisthésis (grade 2 ou plus). 3 2 1 Migration haute (crâniale) Migration basse (crâniale) Zone cachée Migration basse (dorsale) Migration haute (caudale) 4 3 2 1 5 Figure 10.1 Hernie discale. A. Médian ou paramédian. B. Foraminal. C. Extraforaminal. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 10.2 Description de la migration. 78 R. W gn , M. Hä n Transpédiculaire Controlatéral Transforaminal standard (TESSYS® ) Intra-extraforaminal (dorsolatéral) Intradiscal Extrême latéral 14 12 10 8 cm 8 10 12 14 cm A B 3 1 2 1 = Technique transforaminale, dorsolatérale et extrême latérale 2 = Technique controlatérale 3 = Technique transpédiculaire Figure 10.3 Approches. Les hernies discales fortement migrées ainsi que les pathologies des zones cachées nécessitent une planification préopératoire claire et structurée. Parmi les autres avantages, figurent la possibilité de séparer la table pour ouvrir la zone neuroforaminale et la réduction de la pression sur les veines abdominales. Planification préopératoire Chirurgie endoscopique transforaminale Étapes chirurgicales : approche transforaminale standard Position du patient La chirurgie peut être effectuée en décubitus ventral ou latéral. Le décubitus latéral présente des avantages chez les patients obèses et peut être utile en chirurgie sous analgo-sédation ou anesthésie locale, puisque le signe de Lasègue peut être testé pendant la chirurgie. Mise en place de l'aiguille La chirurgie commence par l'insertion de l'aiguille et son positionnement dans la zone de la pathologie. Chez les patients présentant une pathologie caudale ou paramédiane, l'aiguille vise le récessus latéral, dans le sens crânio-caudal. La première mise en place se fait sous contrôle radiologique latéral, la pointe de l'aiguille touche le processus articulaire supérieur (SAP) puis est avancée dans le neuroforamen. Le contrôle radiologique antéro-postérieur doit aider à la mise en place intraforaminale de l'aiguille, sur la radiographie latérale, l'aiguille doit être extradiscale (figure 10.4). Dilatation des tissus Un guide-broche est inséré, suivi d'une incision cutanée et d'une dilatation progressive de la peau et des tissus mous. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés L'examen physique doit aider à localiser la racine nerveuse affectée. En cas de problèmes dégénératifs multiples de la colonne lombaire, l'examen peut être combiné à un blocage sélectif des racines nerveuses pour définir le niveau symptomatique. Une IRM de la colonne lombaire est nécessaire pour déterminer la position exacte de la hernie discale et la traversée ou la sortie de la racine nerveuse, ainsi que les organes péritonéaux dans les niveaux supérieurs de la colonne lombaire. Un computerized tomography (CT)-scan supplémentaire peut être utile pour déterminer les calcifications des hernies discales chroniques. Pour exclure l'instabilité, on utilise un examen supplémentaire aux rayons X ou une radiographie en flexion et en extension. 79 Technique entièrement endoscopique pour le traitement des hernies discales Alésage et foraminotomie Des alésoirs à couronne ou des forets à os à coupe latérale peuvent être utilisés pour agrandir le foramen et ainsi créer suffisamment d'espace pour la chemise de travail introduite ultérieurement (diamètre : 7,5 mm). Insertion de la chemise de travail Dorsal Dure-mère et racine traversante Arc dit "de Wagner" Crânial Facette articulaire supérieure Caudal La chemise de travail est insérée et son bord le plus saillant est tourné dans la direction de la racine nerveuse sortante pour éviter un éventuel contact (figure 10.5). Insertion de l'endoscope L'endoscope et la chemise de travail sont insérés avec leur ouverture tournée vers l'arrière. Le SAP, le pédicule et la paroi postérieure de la vertèbre caudale peuvent être visualisés. Le pédicule doit être identifié, suivi d'une préparation de l'os du SAP et de la partie caudale de la paroi postérieure du corps vertébral. L'arc dit « de Wagner » doit être visualisé (figure 10.6). Pédicule Espace discal Figure 10.6 Arc de Wagner. Identification de la racine nerveuse traversante Identification de l'espace épidural La racine nerveuse traversante doit être identifiée et la hernie discale doit être visualisée au centre de l'image endoscopique. L'espace épidural peut être visualisé et inspecté de l'extrémité caudale à l'extrémité crânienne. Résection de la hernie discale La hernie discale ou le fragment peut être réséqué(e) ; en cas de hernie discale contenue, le ligament longitudinal postérieur peut être incisé. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Confirmation de la décompression et fin de l'intervention chirurgicale Figure 10.4 Placement de l'aiguille. Après la décompression, la racine nerveuse traversante doit flotter librement. La racine nerveuse sortante est détachée du récessus latéral. Le flottement libre de la graisse épidurale est un signe indirect de décompression. Les instruments sont retirés et la peau est suturée. Hernie discale intraforaminale et dorsolatérale Figure 10.5 Placement du tube de travail. Pour le traitement des hernies discales intraforaminales et dorsolatérales, une approche presque hori zontale permet une plus grande mobilité dans la zone du neuroforamen. L'approche est plus médiane à environ 8 à 10 cm de la ligne des apophyses épineuses. La chemise de travail doit être positionnée au milieu du foramen dans le plan AP (figures 10.7 à 10.9). La racine nerveuse traversante est identifiée, décompressée puis suivie vers la ligne axillaire de la racine 80 R. W gn , M. Hä n Hernies discales migrées Figure 10.7 Approche dorso-latérale. Dans les hernies discales migrées caudales ou crâniennes (figure 10.2), la position exacte du fragment doit être évaluée avant de décider de l'approche. Au niveau de L5-S1, les possibilités d'accès sont limitées et souvent des techniques interlamaires sont utilisées. Les niveaux lombaires plus élevés permettent une direction caudo-crânienne de l'approche. La direction crânio-caudale est souvent utilisée en combinaison avec une résection pédiculaire partielle ou une approche transpédiculaire, en particulier pour les pathologies de zones cachées ou les hernies discales hautement migrées (figures 10.10, 10.11). Alternativement, une approche controlatérale est possible. Chirurgie endoscopique interlamaire Figure 10.8 Position du tube de travail. La fenêtre interlamaire est la plus grande au niveau de L5-S1, alors que le neuroforamen est souvent très petit. Deux types de hernie discale doivent être différenciés, le type postérolatéral et le type foraminal. Chez les patients plus jeunes, une déchirure du ligament jaune est possible, alors que la sténose nécessite souvent une laminoplastie et la restauration de l'anatomie en premier lieu. Figure 10.9 Rotation de l'endoscope en intra-opératoire. Contra lateral Hernies discales médianes Pour le traitement des hernies discales médianes, une approche plus horizontale et plus latérale est utilisée. L'incision cutanée se situe entre 13 et 18 cm de la ligne des apophyses épineuses. Il faut garder à l'esprit qu'une approche plus latérale rend le triangle de Kambin plus petit et présente un risque plus élevé de compromettre la racine nerveuse sortante. Aux niveaux supérieurs de la colonne lombaire, le risque de lésion organique rétropéritonéale doit être pris en compte, le point d'entrée est donc déplacé en position plus médiale. Standard transforaminal Figure 10.10 Hernie discale migrée caudale. Figure 10.11 Zone cachée. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés nerveuse sortante. L'endoscope est maintenant tourné en même temps que la chemise de travail avec le bord saillant tourné vers la racine du nerf sortant. Il faut garder à l'esprit que la direction de la vue a changé de 180° et que, par conséquent, le côté droit et le côté gauche de l'image endoscopique sont inversés. Technique entièrement endoscopique pour le traitement des hernies discales L'approche interlamaire a pour avantage de présenter une orientation anatomique familière semblable aux techniques tubaires. La manipulation de l'endoscope, de la chemise de travail et d'autres instruments, tels que les fraises ou les sondes bipolaires, met souvent à l'épreuve les compétences manuelles du chirurgien. Une aide supplémentaire sous forme d'un bras de maintien ou d'un assistant peut être nécessaire. Étapes chirurgicales de l'approche interlamaire Mise en place de l'aiguille ou du guide Le positionnement initial de l'aiguille ou du guide (non canulé) se fait sur le bord osseux proximal de la fenêtre interlamaire. Une radiographie latérale est nécessaire pour confirmer clairement le bon segment. Un guide-broche est inséré par l'aiguille. Pour les hernies de type foraminal, le pédicule supérieur est la première orientation anatomique, tandis que pour le type postérolatéral, c'est le pédicule inférieur (figure 10.12). Dilatation des tissus mous Les dilatateurs sont ensuite insérés à travers le guide. La chemise de travail peut être enfin introduite. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Mise en place de l'endoscope L'endoscope est inséré avec son ouverture tournée vers la zone médiale puis tourné dans la direction crânienne (type foraminal) ou caudale (type postéro-latéral). Le pédicule de la vertèbre supérieure (type foraminal) ou de la vertèbre inférieure (type postéro-latéral) est identifié puis préparé à la fraise diamantée. 81 Ouverture du ligament jaune Le ligament jaune est ouvert à l'aide d'un dissecteur à bout rond ou d'un rongeur Kerrison et la graisse épidurale est identifiée. Préparation de l'espace intervertébral La graisse épidurale peut être en partie enlevée avec la sonde de coagulation bipolaire pour mieux identifier la racine nerveuse. Extraction du fragment ou de la hernie discale La hernie discale est identifiée et le ligament postérieur incisé. Le fragment de disque peut être extrait jusqu'à ce que la racine nerveuse soit complètement libérée. Fin de la chirurgie et suture de la peau La racine nerveuse est examinée dans le sens caudocrânien, l'endoscope tourné dans le sens latéral pour visualiser le foramen. Ensuite, les instruments sont retirés et la peau est suturée. Traitement postopératoire Les patients sortent avec une orthèse dorsale et il leur est conseillé d'éviter de soulever des objets lourds et de faire des mouvements de flexion ou de flexionrotation de la colonne lombaire. Des exercices isométriques sont réalisés après le retrait de la suture cutanée. Après quatre semaines, un entraînement des muscles abdominaux et dorsaux à poids du corps est possible, ainsi que des activités sportives simples, comme la natation ou le vélo. Après six semaines, le patient peut pratiquer tous les sports comme avant la chirurgie. Complications Figure 10.12 Positionnement de type postérolatéral. Parmi les complications peropératoires figurent la lésion directe des structures neurales ou vasculaires ainsi que la perforation du sac dural. La plupart des lésions durales peuvent être traitées de façon conservatrice par l'alitement seul ou avec en plus un patch de sang en intraopératoire. Les déchirures durales symptomatiques doivent être examinées et fermées secondairement en fonction de l'emplacement et de la taille. Les complications vasculaires sont très rares. Un CT-scan abdominal doit être effectué pour le diagnostic. Un réexamen est très rarement nécessaire. R. W gn Les complications postopératoires précoces comprennent l'hématome du muscle psoas, la formation de kystes contenant du LCS et l'infection. Les infections sont traitées avec des antibiotiques et contrôle des paramètres sanguins. L'hypoalgésie peut être hyperalgésie, la conséquence d'une manipulation d'un ganglion spinal. Elle est traitée avec des analgésiques et des corticoïdes. En cas de douleur postopératoire persistante pendant plus de deux semaines ou de parésie, une IRM de contrôle doit être conseillée. En cas de déficit moteur, un réexamen chirurgical postopératoire est nécessaire. Les complications retardées ou tardives consistent en des hernies discales récurrentes et une instabilité potentielle. Les instabilités postopératoires graves doivent être traitées par arthrodèse. Le réexamen chirurgical peut être réalisé avec la même approche, selon des principes similaires à ceux de la chirurgie ouverte. Pour éviter les lésions des structures neurales, il faut d'abord préparer l'os, puis séparer le tissu nerveux et retirer le disque touché. Déclaration d'intérêts R. Wagner est membre du corps professoral de joimax® GmbH et perçoit des frais d'enseignement. M. Häfner est employée par joimax® GmbH. Pour en savoir lus Caspar W. A new surgical procedure for lumbar disk herniation causing less tissue damage through a microsurgical approach. Adv Neurosurg 1977 ; 4 : 74–7. Hermantin FU, Peters T, Quartararo L, Kambin P. A prospective, randomized study comparing the results of open discectomy with those of video-assisted arthroscopic microdiscectomy. J Bone Joint Surg Am 1999 ; 81(7) : 958–65. Ruetten S, Komp M, Godolias G. An extreme lateral access for the surgery of lumbar disc herniations inside the spinal canal using the full-endoscopic uniportal transforaminal approach-technique and prospective results of 463 patients. Spine (Phila Pa 1976) 2005 ; 30 : 2570–8. 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Deux situations sont à étudier : l'infection des parties molles de la plaie et l'infection osseuse et du disque (spondylodiscite) ; • les complications vasculaires sont en rapport avec l'excision discale. Ce sont les plus redoutables avec la plaie des vaisseaux iliaques, de la veine cave ou de l'aorte. Elles peuvent aboutir au décès du patient ; • les exceptionnelles lésions de l'arbre urinaire. La récidive de la hernie discale est traitée dans un autre chapitre, elles sont à la limite de la complication. En effet, l'évolution naturelle d'une hernie est sa tendance à la disparition et à la récidive. On distingue la récidive précoce, toujours difficile à différencier d'un séquestre oublié, ou les récidives tardives survenant après un intervalle libre clinique. Le taux de survenue des complications est variable selon les équipes. Plusieurs facteurs ont été mis en avant, comme la notion de courbe d'apprentissage ou le type de technique utilisé. Courbe d'apprentissage Habituellement on commence par la technique conventionnelle ou la microchirurgie, puis ensuite par les techniques tubulaires (MED) et/ou la full endoscopy. Wiese et al. [1], en 2004, ont comparé deux groupes de patients opérés par un chirurgien ayant pratiqué plus de 500 procédures et par sept chirurgiens ayant réalisé entre 50 et 100 interventions. Le La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés taux de complications variait respectivement de 2,2 à 10,7 %. L'apprentissage, en commençant par la technique la plus simple qui permet de bien comprendre les facteurs anatomiques, nous paraît effectivement important. À l'inverse, à propos d'une série de 1205 patients, Pechlivanis et al. trouvaient plus de complications chez des patients opérés par des chirurgiens ayant entre trois et six ans d'expérience que ceux opérés par des chirurgiens ayant moins de trois ans de pratique [2]. Le pourcentage de complications selon la technique choisie, microchirurgie, technique conventionnelle, MED ou percutanée (full endoscopy), reste un élément discuté. Shriver et al. [3], en 2015, avaient réalisé une méta-analyse en retenant 42 articles. Le taux global de complications était respectivement (pour technique conventionnelle, MED, full endoscopy) de 12,5, 13,3 et 10,8 % avec un taux de réinterventions de 7,1, 3,7 et 10,2 %. Le seul élément significatif était le risque de complications neurologiques plus élevé avec les méthodes percutanées que par MED. Une autre métaanalyse en 2018, réalisée par Alvi et al. [4], à propos de 14 articles portant sur 1707 patients, comparaient la technique conventionnelle, la microchirurgie, la MED et la full endoscopy. La MED était associée à un plus grand nombre de complications, particulièrement pour les brèches durales. C'était la technique conventionnelle qui avait le taux de révisions le plus faible. Cependant, la conclusion de l'article était que les différentes techniques mini-invasives étaient globalement comparables à la technique conventionnelle. Cette notion était confirmée par une autre méta-analyse de Ruan et al. en 2016 [5]. Ils concluaient que les différentes techniques du « mini-open » étaient comparables à la technique conventionnelle tant pour le taux de complications ou de réopérations. Ils s'appuyaient sur l'étude de sept articles à propos de 1389 patients. Cependant, la discectomie par full endoscopy était associée à un taux de complications et récidives de hernie plus important mais pas de manière significative. En 2018, Nubukpo-Guménu et al. [6] revoyaient, dans une étude rétrospective sur 22 ans, 10 433 ptients A. Bl moutier opérés dans le même centre de chirurgie selon la technique de Destandau par Endospine®. Ils notaient un taux de complications de 11,39 % incluant les récidives. Le risque de brèche durale était de 1,91 % et les lésions radiculaires de 0,17 %. Clark et al. [7], de l'équipe de Foley, comparaient, en 2017, la MED aux autres techniques conventionnelles et ne trouvaient pas de différence significative. Il ressort de l'ensemble de ces articles qu'il n'y a pas de façon formelle une technique supérieure aux autres. La technique conventionnelle et la microchirurgie restant actuellement parfaitement adaptée au traitement de la hernie discale lombaire. Complications neurologiques Comme pour toutes les interventions de chirurgie du rachis, l'exérèse d'une hernie discale peut provoquer des troubles neurologiques. On distingue plusieurs causes possibles : • en peropératoire, un traumatisme avec un étirement de la racine, voire sa section ou une brèche durale, peut survenir ; • en postopératoire, la survenue d'un hématome épidural ou une récidive précoce peut provoquer des troubles neurologiques parfois très graves (syndrome de la queue de cheval, paralysie pluriradiculaire). La survenue d'une brèche, qui peut passer inaperçue en peropératoire, peut provoquer dans les suites un méningocèle ou une fistule de LCS. Cette fuite, si elle n'est pas très vite diagnostiquée, peut entraîner, certes très rarement, des hématomes intracrâniens ou une pneumocéphalie. C'est une complication redoutable pouvant entraîner le décès du patient. Rohde et al. [8], à propos d'une série de 1546 patients traités pour hernie discale, avaient noté chez 44 patients (2,8 %) une persistance ou une aggravation des douleurs radiculaires associées ou non à des troubles moteurs ou sensitifs ou sphinctériens. La cause principale de réopération était la récidive ou l'oubli de matériel discal (22 cas), un hématome épidural (6 cas), une décompression inadéquate (2 cas) et une brèche durale (1 cas). Dans les 13 derniers autres cas, les auteurs n'avaient pas trouvé de cause évidente et le trouble neurologique était attribué à un étirement trop important de la racine lors de la première intervention. La prudence lors de l'écartement de la racine pour accéder au disque et à la hernie est cruciale. Ces gestes peuvent être réellement difficiles lorsqu'il existe une fibrose intense (récidive d'une hernie déjà opérée) ou une anomalie d'émergence radiculaire qui est suspectée sur l'IRM préopératoire en comparant l'anatomie des racines. De même, la survenue de saignements abondants peut compliquer l'intervention. L'hémostase par coagulation bipolaire, tampon hémostatique, etc. étant, dans certaines situations, très délicate et traumatisante pour le nerf. La majorité des déficits majeurs neurologiques surviennent surtout après la chirurgie thoracique ou cervicale, beaucoup plus rarement lombaire [9]. L'adjonction de matériel d'ostéosynthèse augmente le risque des déficits [9, 10]. L'ostéosynthèse est réalisée surtout lors d'interventions pour spondylolisthésis, scoliose ou sténose, beaucoup plus rarement lors de la chirurgie discale, diminuant ainsi le risque de complications neurologiques. La survenue d'une paraplégie d'origine ischémique en rapport avec une lésion d'une artère radiculo-médullaire provenant de L5 ou S1 (artère de Desproges-Gotteron) a été suspectée lors d'infiltration foraminale [11] mais à notre connaissance aucune publication récente n'a relaté cette complication après chirurgie. Le type de technique employée n'est pas anodin. Pour Shriver et al. [3], l'aggravation ou l'apparition d'un déficit neurologique dans le cadre de la chirurgie de la hernie discale survient dans 1,3, 3 et 1,6 % des patients en fonction de la technique (technique conventionnelle, MED, full endoscopy). Les hématomes survenant respectivement dans 0,5, 1,2 et 0,6 %. L'hématome épidural reste rare dans le cadre d'une chirurgie pour hernie discale. Aono et al. [12] n'en avaient trouvé aucun sur 1568 patients opérés d'une discectomie lombaire. Lors de leur étude à propos de 6356 cas d'intervention sur le rachis, le taux global d'hématome était de 0,41 %, principalement sur les laminectomies thoraciques. Ils insistaient sur l'urgence de l'évacuation de l'hématome pour obtenir une récupération. Cependant, la survenue d'un hématome peut être également asymptomatique. Modi et al. [13] avaient mené une étude prospective après microchirurgie. Une IRM était réalisée 24 heures après l'opération chez tous les patients. Un hématome était présent chez 13 des 88 patients étudiés (14,6 % des cas) et onze étaient asymptomatiques. Seuls deux patients avaient une douleur sciatique mais qui n'avait pas nécessité de réintervention. Les facteurs de risque de la survenue d'un hématome varient selon les études qui ont été réalisées sur des séries de patients opérés de chirurgies lombaires avec ou sans instrumentation. Il ne s'agissait donc pas de hernie discale simple. L'âge, supérieur à 50 ans, la présence d'une coagulopathie préopératoire ou une intervention sur plusieurs niveaux (donc rarement une hernie discale) étaient notés. La pose de drains ne permettait pas d'éviter la survenue de l'hématome [13–15]. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 84 © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Complications de la chirurgie de la hernie discale Les brèches durales sont également étudiées dans un autre chapitre. Elles peuvent compliquer l'intervention d'exérèse d'une hernie discale mais peuvent passer inaperçues, ce qui nécessite, surtout en présence d'un drainage, une surveillance rigoureuse en postopératoire. Elles ne doivent pas être considérées comme anodines. Strömqvist et al. [16] avaient utilisé le registre suédois de la chirurgie du rachis et avaient étudié 64 431 interventions entre 2000 et 2015. La survenue d'une brèche, toutes interventions confondues, était de 5 % et pour la hernie discale de 2,8 %. Ils notaient un taux de douleurs résiduelles radiculaires et un Oswestry Disability Index (ODI) plus élevés ainsi qu'un Short Form36 (SF36) mental component score (MCS) plus bas étaient notés à un an de la chirurgie chez des patients ayant une brèche durale. Les facteurs de risque étant l'âge élevé et une chirurgie préalable. Takahashi et al. [17], à propos de 544 hernies discales, notaient un taux de brèche durale de 2 %, allant jusqu'à 18,6 % en cas de kyste synovial. Guerin et al. [18] avaient étudié durant un an 1326 patients consécutifs opérés dans le service de chirurgie du rachis du CHU de Bordeaux. Ils notaient que 51 patients (3,84 %) avaient eu une brèche durale identifiée et 13 d'entre eux ont eu des complications dont sept une fistule de LCS et deux un pseudo-méningocèle. Ils insistaient sur la réparation immédiate et la plus étanche possible de la brèche durale. Wong et al. [19], lors d'une étude de niveau, ont comparé le nombre de brèches survenues chez des patients opérés avec des techniques mini-invasives et une chirurgie à ciel ouvert et notaient que les patients opérés à ciel ouvert avaient deux fois plus de risques d'avoir une brèche. Ce résultat est à pondérer avec la méta-analyse d'Alvi [4] qui trouvait un taux plus important de brèches durales avec la MED par rapport à la technique conventionnelle. Lorsqu'une brèche survient lors des techniques de full endoscopy, la suture est habituellement impossible, ce d'autant que le patient est souvent opéré sous anesthésie locale. Cependant, Shin et al. [20] ont proposé une technique de réparation sans conversion. Lorsque la brèche est passée inaperçue, une incarcération des racines peut se faire de façon accidentelle en postopératoire. Cela peut être une des causes de douleur ou de paralysie postopératoire sans cause évidente à l'IRM [21]. Shu et al. [22], après une chirurgie percutanée, décrivaient le cas d'une incarcération radiculaire dans une méningocèle. La survenue d'une brèche durale peut avoir des répercutions au niveau cérébral. Un pneumo-encéphale a été décrit après une chirurgie où la brèche n'avait pas été suturée [23] de même qu'une hémorragie intracrânienne pouvant entraîner la mort du patient [24]. La 85 surveillance du drain, même s'il n'y a pas de notion de brèche, doit toujours être rigoureuse. La moindre suspicion d'un écoulement de LCS doit immédiatement alerté. Il faut clamper et retirer le Redon. Une céphalée, des nausées, une photophobie ou une raideur de nuque, même minimes, doivent faire pratiquer un scanner crânien à la recherche d'un hématome hémisphérique ou cérébelleux. Complications infectieuses On distingue trois types d'infection qui peuvent être associés : • l'infection des parties molles. C'est l'infection de la voie d'abord, des muscles et de la graisse sous-cutanée. La forme la plus grave et très rare étant la survenue d'un abcès et d'une épidurite ; • l'infection du disque. Habituellement associée à une atteinte des corps vertébraux adjacents : c'est la spondylodiscite ; • l'infection du LCS, avec la survenue d'une méningite ou, beaucoup plus rarement, d'une ventriculite ou d'une encéphalite. Les facteurs de risque de l'infection en chirurgie du rachis peuvent varier d'une étude à l'autre. Cependant, sont classiquement trouvés : le tabac, l'alcool, le diabète, l'obésité, l'utilisation de corticoïdes, la notion de chirurgie antérieure. Certains facteurs de risque sont liés à la technique chirurgicale (mise en place d'une ostéosynthèse, durée de l'intervention, mise en place d'une greffe). Ils sont beaucoup plus rares dans le cadre d'une hernie discale classique qui ne nécessite pas ce type de chirurgie [25, 26]. Les germes les plus classiques sont le staphylocoque doré mais, en fait, tous les germes peuvent être trouvés, y compris des germes à croissance lente comme le Propionibacterium acnes [27, 28]. La technique chirurgicale joue également un rôle. Shriver et al. [3] trouvaient un taux de complications infectieuses de respectivement 2,1, 1,2 et 0,5 % selon la technique employée : technique conventionnelle, MED, full endoscopy. Kaliaperumal et al. [29], lors d'une étude rétrospective à propos de 3063 patients et utilisant trois techniques différentes, notaient un taux de spondylodiscite de 0,18, 0,09 et 0,07 % en fonction de la technique employée. Il s'agissait dans les trois groupes toujours de microchirurgie avec une antibioprophylaxie par céfuroxime. Le groupe 1 était une microchirurgie classique, le groupe 2 avait en plus une irrigation d'antiseptique dans le disque et le dernier groupe avait deux préparations cutanées et utilisait de nouveaux instruments lors de l'abord discal. Cependant, même avec la full endoscopy, le risque de A. Bl moutier spondylodiscite existe. Il était de 0,12 % pour Ahn et al. [30] lors d'une série de 9821 patients. Shousha et al. [31] notaient à propos d'une série de 4350 patients quatre infections postopératoires en utilisant une procédure par tubes. nfection des parties molles Le diagnostic de l'infection des parties molles est habituellement aisé. Quelques jours après l'intervention apparaissent de la fièvre, une cicatrice inflammatoire, un écoulement, des douleurs lombaires et une augmentation de la protéine C réactive (CRP). La radiographie est normale. Il est néanmoins conseillé de faire une IRM pour vérifier l'absence de spondylodiscite ou d'un abcès épidural. Des hémocultures sont réalisées lorsque la fièvre est supérieure à 38,5 °C. Le traitement doit être mis en place sans retard. La chirurgie consiste en l'excision des parties molles infectées et un lavage abondant. Cinq prélèvements à visée bactériologique sont effectués. La fermeture est réalisée sur un drain de Redon et la mise en place d'une antibiothérapie adaptée est faite dès les prélèvements effectués selon les protocoles du Comité de lutte contre les infections nosocomiales (CLIN) de l'établissement. La durée de l'antibiothérapie, lorsqu'il s'agit uniquement d'une infection des parties molles, est de dix jours à trois semaines en fonction de l'évolution clinique et biologique. Spondylodiscite Plus rare que l'infection des parties molles, le taux de survenue est, selon les séries, de 0,1 à 0,2 % toute technique confondue [29, 30]. Le délai de survenue est variable, de quelques jours à plusieurs mois en fonction de la virulence du germe. Les spondylodiscites à P. acnes peuvent être diagnostiquées au-delà de deux mois, voire des années [33]. Le diagnostic clinique est suspecté devant l'aggravation d'une lombalgie avec une irradiation sciatique quelques jours ou semaines après l'intervention. Il existe également une fièvre mais parfois la lombalgie peut être isolée. Les examens biologiques montrent une augmentation de la CRP mais qui n'est pas toujours très importante, surtout en cas d'infection à germe à virulence atténuée (Staphylococcus epidermidis, P. acnes). La cicatrice est habituellement non inflammatoire. Le diagnostic radiologique a été étudié au chapitre radiologie. La radiographie standard sert de référence pour l'évolution ultérieure. Le scanner est intéressant en montrant les érosions des plateaux sous-chondraux si elles n'existaient pas auparavant dans le cas d'une discopathie préexistante. C'est l'IRM avec injection de gadolinium qui est l'examen le plus important [33]. Elle montre dès le 15e jour un hyposignal T1 et un hypersignal T2 et en STIR, avec une prise de contraste en T1 lors de l'injection de gadolinium particulièrement au niveau discal. L'apparition des phénomènes inflammatoires, surtout dans la partie antérieure du disque, est très évocatrice. Il est également cherché une épidurite, un épaississement des parties molles antérieures et un abcès épidural. Le diagnostic peut parfois être difficile avec une discopathie inflammatoire Modic 1 mais, dans ces cas, les images d'épaississement des parties molles, d'abcès n'existent pas et il n'y a habituellement pas d'image intradiscale. La tomographie par émission de positons couplée au scanner (TEP-scan) est un examen qui a un grand intérêt pour faire le diagnostic de spondylodiscite, particulièrement avant quinze jours, où il semble être supérieur à l'IRM [34]. Le diagnostic bactériologique est essentiel. Il est obtenu par la ponction biopsie radioguidée, par les hémocultures ou parfois par un nouvel abord chirurgical. Cependant, les cultures peuvent rester négatives. C'est tout l'intérêt, lors de la biopsie, d'adresser des prélèvements en histologie à la recherche de lésions évocatrices de processus infectieux. Il est trouvé des amas de polynucléaires neutrophiles dans les discites aiguës et des cellules inflammatoires diverses dans les discites subaiguës [35]. Le traitement est avant tout médical. Il consiste à la mise en place d'une antibiothérapie [36] pour une durée habituelle de six semaines associée à la mise en place d'un corset. Cependant, le traitement médical peut être insuffisant et un traitement chirurgical est alors nécessaire. L'indication chirurgicale est discutée lors de l'apparition de complications neurologiques, d'instabilité mécanique avec l'apparition d'une cyphose au niveau du disque atteint ou l'apparition d'un abcès épidural sous traitement antibiotique. Le traitement chirurgical consiste habituellement en un temps postérieur avec ostéosynthèse associé ou non à un curetage antérieur avec greffe associée [37, 38]. Certaines équipes [39] proposent même d'emblée une ostéosynthèse percutanée postérieure plutôt que la mise en place d'un corset. nfection du CS Le risque de méningite existe, même s'il est très rare. Il survient lors de la conjonction d'une brèche durale, dont certaines peuvent passer inaperçues, et d'une infection du site opératoire. La précocité du diagnostic © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 86 Complications de la chirurgie de la hernie discale est essentielle pour éviter l'apparition de complications encore plus graves comme les ventriculites. Au moindre doute, il faut faire une ponction lombaire, réaliser une IRM injectée lombaire et cérébrale, mettre en route le traitement antibiotique et discuter d'une reprise chirurgicale dont l'objectif est double : traiter l'infection locale et fermer la brèche. Complications vasculaires Les complications vasculaires sont les plus redoutables car elles peuvent entraîner le décès du patient pendant l'intervention. Leur fréquence est faible, de l'ordre de 1 à 5 pour 10 000 opérations [40, 41] pouvant aller jusqu'à 2,4 % avec un taux de mortalité variant de 10 à 65 %, voire 100 % [41]. L'étage L4-L5 puis L5-S1 sont les plus souvent concernés [42]. Le mécanisme est la lésion directe d'un vaisseau par un instrument, le plus souvent la pince à disque. Le passage à travers le ligament commun vertébral antérieur n'est pas toujours ressenti par le chirurgien. Il peut y avoir, sur le plan anatomique, des hiatus d'origine dégénérative dans le ligament commun vertébral antérieur (LCVA) qui ne fait plus alors office de rempart [43]. Tous les vaisseaux peuvent être atteints [42]. Les artères iliaques, droite puis gauche (44 %), et la veine iliaque gauche (15 %) sont les plus fréquemment lésées. L'aorte et la veine cave peuvent être également lésées dans environ 10 % des cas. Le type de lésions est variable : lacération, pseudoanévrisme, fistule artérioveineuse ou association des deux dernières possibilités. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés acérations Elles surviennent dans la moitié des cas [42] et peuvent toucher l'artère, la veine ou les deux en même temps. Le diagnostic est réalisé habituellement dans les 24 premières heures. Lorsque le diagnostic est posé durant l'intervention, les principaux signes comme l'apparition d'une hypotension, d'une tachycardie, d'une hypercapnie, voire d'un choc hypovolémique, imposent l'arrêt immédiat de l'intervention et le retournement du patient. Néanmoins, le tableau n'est pas toujours aussi bruyant car la constitution d'un hématome rétropéritonéal peut contenir le saignement. En salle de réveil, la survenue d'une douleur et d'une masse abdominale, de la chute de l'hémoglobine est hautement suspecte [41]. Un saignement majeur non contrôlé impose une exploration en urgence par laparotomie. La solution la plus préférable, si elle est possible, est la réalisa- 87 tion d'une angiographie immédiate. Celle-ci permet de faire le diagnostic lésionnel, surtout au niveau des artères, et la mise en place d'un stent ou d'un ballon [44]. Les plaies veineuses sont beaucoup plus difficiles à traiter à ciel ouvert et la mise en place d'implants est souvent impossible. Ces dernières techniques sont les plus employées depuis une quinzaine d'années. La présence d'un chirurgien vasculaire pouvant réaliser au bloc opératoire l'angiographie améliore considérablement le pronostic. Caunaud et al. [45], à propos de sept patients dont trois avec des lésions de lacération aiguë, avaient réalisé un traitement par des méthodes endovasculaires dans tous les cas avec succès et sans mortalité. Fistules artérioveineuses (FAV) ou pseudo-anévrismes Ils surviennent dans l'autre moitié des cas des lésions vasculaires. Les FAV et les pseudo-anévrismes peuvent être associés dans 13,8 % des cas [42]. Le diagnostic est plus tardif, au-delà de la 24e heure. Il peut être réalisé à très long terme, plus de dix ans après la chirurgie [46, 47]. La présentation clinique est une insuffisance cardiaque avec une tachycardie, des œdèmes des membres inférieurs, une claudication intermittente, un souffle intra-abdominal, voire un choc après la rupture d'un pseudo-anévrisme ou une embolie artérielle, exceptionnellement pulmonaire [48]. Le diagnostic est posé grâce, dans un premier temps, à des examens non invasifs : Doppler, angioscanner ou IRM. L'artériographie est demandée à visée préopératoire pour définir la meilleure stratégie. La mise en place d'un stent est habituelle. Lésions de l'arbre urinaire Les lésions de l'uretère peuvent survenir lors d'une dissectomie. Le diagnostic est suspecté devant des douleurs abdominales et confirmé par l'échographie et l'urographie intraveineuse. Elles peuvent conduire à une néphrectomie selon l'importance de la plaie [49]. Les lésions de la vessie sont exeptionnelles. Siasios et al. [50] en avaient reçencées 18 entre 1960 et 2016. Elles sont graves avec un taux de mortalité de 12,9 %. Conclusion Si le nombre des complications et les difficultés techniques rencontrées lors de ce type d'interventions restent rares, il est des circonstances où la situation peut devenir critique. Certaines difficultés techniques (fibrose intense, anomalie d'émergence radiculaire, 88 saignement intense) ou la survenue d'événements tels qu'une plaie vasculaire ou une brèche durale peuvent entraîner des complications engageant le status neurologique, voire le pronostic vital. C'est une information que le patient doit connaître. Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé ences [1] Wiese M, Krämer J, Bernsmann K, Ernst Willburger R. The related outcome and complication rate in primary lumbar microscopic disc surgery depending on the surgeon's experience : comparative studies. Spine J 2004 ; 4 : 550–6. [2] Pechlivanis I, Kuebler M, Harders A, Schmieder K. 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La survenue est variable selon le type de chirurgie, 0,3 à 17,4 % [1–6] mais elle augmente avec l'âge et en cas d'adhérence comme lors d'une réintervention ou certaine pathologie comme les kystes articulaires. En matière de hernie discale, l'incidence est estimée à 1,8 à 3,1 % [5, 7] mais, dans la reprise d'une microdiscectomie, elle est de 17,4 % [5]. Dans la plupart des cas, la brèche peut passer sans conséquence mais il ne faut pas minimiser son importance. Elle peut aboutir à des complications graves comme une méningite ou un hématome intracrânien. Il ne faut donc pas économiser le moindre effort pour éviter les brèches (l'incidence des brèches n'est pas le même pour tous les chirurgiens). Une brèche peut survenir lors de l'utilisation d'un instrument coupant (rongeur de Kerisson, pince à disque), un instrument puissant (fraise) ou un implant (vis ou cage) ou lors d'une traction par inadvertance de la dure-mère ou de la racine comme en cas d'une grosse hernie discale ou d'une hernie adhérente ancienne. Enfin, un fragment ou un pic osseux peut être à l'origine d'une brèche. Pour éviter une brèche, il faut être minutieux, patient, et appliquer une technique chirurgicale rigoureuse. Il faut prendre le temps de décoller la dure-mère et éviter les mouvements brusques ou forcés et, à chaque geste, il faut avoir toujours à l'esprit la possibilité d'un dérapage et ses conséquences graves. Le diagnostic de la brèche se fait le plus souvent en peropératoire par la mise en évidence d'une fuite du LCS. La brèche peut parfois intéresser uniquement la dure-mère sans toucher l'arachnoïde qui fait une petite hernie perlée à travers cette brèche mais sans écoulement du LCS. L'arachnoïde est très fragile et la moindre manipulation risque de la déchirer. Une brèche peut aussi passer inaperçue pendant l'intervention et elle n'est diagnostiquée que dans les suites. Le liquide peut s'extérioriser dans le drain (s'il a été utilisé), par l'orifice du drain ou à travers la cicatrice. La fuite peut rester à l'intérieur et se manifester par une collection liquidienne sous-cutanée ou par des signes d'hypotension intracrânienne (céphalées orthostatiques, vertiges, La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés nausées, diplopie, acouphènes, vision trouble, etc.). Plus rarement, une brèche peut entraîner une douleur radiculaire par hernie ou « trapping » d'une radicelle à travers la brèche. Enfin, elle peut aussi être découverte par des complications plus graves comme la méningite ou un hématome intracrânien qui peut survenir suite à une soustraction rapide d'une quantité importante de LCS. La dure-mère est un tissu conjonctif fibreux dense à fibres non orientées. Elle cicatrise difficilement et sa fermeture se fait par le développement à son contact d'un tissu conjonctif cicatriciel (fibrose). L'écoulement du LCS à travers la brèche empêche cette cicatrisation et empêche même la fabrication de caillot et donc le colmatage naturel, d'où la nécessité de fermer dans la mesure du possible cette brèche et empêcher l'écoulement du LCS. Si la brèche est découverte en peropératoire, il faut essayer de la fermer de façon la plus étanche possible. Traitée de cette manière, les conséquences de la brèche sont exceptionnelles [8]. L'idéal est de pouvoir suturer cette brèche et de parfaire l'étanchéité par une autogreffe (graisse, muscle ou aponévrose) ou un tissu de collagène maintenu en place par un point de suture ou par une colle de fibrine. Dans ce cas, l'utilisation de la colle n'est même pas obligatoire et le résultat est identique avec ou sans colle [9]. Il faudra, dans la mesure du possible, éviter une communication directe entre l'espace sous-arachnoïdien et l'espace mort ou vide créé par le geste chirurgical. La suture se fait par un fil fin 4 ou 5/0 de soie ou de polypropylène (Prolène®) et une aiguille petite, fine et ronde. Pour pouvoir suturer une brèche, il faut bien l'exposer et nous sommes souvent obligés d'agrandir l'ouverture osseuse autour de cette brèche en s'aidant d'un bon éclairage et, éventuellement, d'une magnification optique (microscope ou loupe avec lampe frontale). Il faut moduler l'aspiration pour éviter d'aspirer les radicelles à travers la brèche et, dans ce cas, il faut absolument réintégrer les radicelles à l'aide d'un instrument à extrémité mousse. Il faudra bien sûr éviter de prendre les radicelles dans la suture. Pour faciliter la suture, la mise du patient en position de Trendelenburg peut aider à diminuer la pression liquidienne au niveau de la brèche et diminuer la fuite du LCS ou des radicelles. G. Hayek La suture de la brèche est faisable si celle-ci est facilement accessible, comme dans les cas d'une brèche postérieure. Une bonne partie des brèches n'est pas accessible à la suture. Il faut toujours tenter de rendre la suture possible en s'agrandissant ou en améliorant l'exposition mais il est vrai que les brèches au niveau de l'aisselle ou de l'épaule de la racine ou les brèches antérieures ne sont pratiquement pas suturales. Dans ces cas, il faut essayer de fermer la brèche par un bouchon extérieur appliqué sur l'orifice à l'aide d'un fragment de muscle, de graisse, d'aponévrose ou de collagène. Ce bouchon doit être maintenu au contact de la brèche en l'encastrant sous l'os, ou en l'appliquant par un point de suture à la dure-mère ou un point tendu par-dessus entre les tissus adjacents (ligaments ou muscles). Il faudra compléter l'étanchéité par de la colle de fibrine. La colle seule peut être efficace mais, souvent, que transitoirement avec récidive de la fuite en postopératoire. Encore une fois, il ne faut pas qu'il y ait une communication directe entre la cavité intrathécale et l'espace mort. En cas de brèche antérieur, il faut glisser le fragment de tissu en avant du fourreau dural et s'aider de la colle de fibrine. Le problème de drainage de la cavité chirurgicale est discutable. Il faut éviter le drainage aspiratif dans la mesure du possible mais, si la brèche a été bien fermée, un drain aspiratif peut être laissé en place [3] et, dans ce cas, il faut qu'il soit bien surveillé et le clamper en cas d'apparition de liquide clair dans le drain. En tous cas il est conseillé de le retirer le plus rapidement possible. Si la brèche n'a pas été suturée, il faut éviter le drainage ou alors non aspiratif et qui sera retiré rapidement ou en cas de présence de liquide clair dans le drain. Il est indispensable par la suite de mener une bonne fermeture des quatre plans. La fermeture musculaire est indispensable pour diminuer ou supprimer l'espace mort en arrière de la brèche et essayer de rapprocher, voire de coller les muscles sur la brèche. Dans la voie unilatérale inter-myoépineux, il ne faut pas hésiter à suturer le muscle au ligament inter-épineux. La fermeture de l'aponévrose doit être étanche, éventuellement avec un surjet passé. En cas d'une éventuelle fuite persistante ou récidivante au niveau de la brèche, une aponévrose bien étanche gardera le liquide en sousaponévrotique permettant d'augmenter la pression épidurale, ce qui limitera cette fuite. En tout cas, une fermeture étanche empêchera la formation d'un pseudoméningocèle sous-cutané visible et palpable gênant le patient. Après une bonne fermeture sous-cutanée, la fermeture cutanée doit aussi être étanche, éventuellement par un surjet intradermique à points d'entrée rapprochés. Si, malgré la fermeture peropératoire de la brèche, la fuite du LCS s'est poursuivie ou si la brèche n'a été découverte qu'en postopératoire, le traitement dépend de la présentation clinique ou de la façon de découverte. S'il s'agit d'une fuite du liquide dans le drain, il faudra retirer le drain et fermer par un point cutané l'orifice de sortie du drain. Toute fuite extériorisée doit être fermée rapidement pour éviter une méningite, mais la fermeture doit être réalisée dans des conditions strictes de stérilité. En cas de collection sous-cutanée, tant que la peau est bien fermée et étanche, nous pouvons tenter d'attendre et voir l'évolution avec un pansement compressif s'il n'y a pas ou peu de signes d'hypotension intracrânienne. Une bonne partie de ces collections finissent par se résorber si la fuite fini par se tarir. Si la collection persiste ou s'aggrave ou en cas de signes sévères d'hypotension intracrânienne, il faut réintervenir chirurgicalement pour fermer la brèche comme il a été décrit précédemment. Si cette collection persiste, la paroi finit par s'organiser et former un pseudo-méningocèle. Dans ce cas, il faut reprendre chirurgicalement pour ouvrir le méningocèle et fermer son collet comme pour la fermeture de la brèche décrite précédemment en rajoutant par-dessus une greffe (graisse, muscle, aponévrose, collagène) avec de la colle de fibrine et en maintenant la greffe par un point de suture direct ou un point d'appui puis rapprocher les parois du méningocèle le plus possible pour supprimer cet espace mort. En cas de signes d'hypotension intracrânienne sans collection visible cliniquement, il faudra vérifier par IRM et, si un pseudo-méningocèle est retrouvé, le traiter comme décrit au précédent paragraphe, sinon un « blood patch » peut être tenté. En cas de douleur radiculaire par piégeage (entrapement) d'une racine, il est aussi nécessaire de réintervenir pour réintégrer la racine et fermer la brèche si la douleur persiste malgré les mesures conservatrices. Si la brèche est antérieure et la fistule persiste malgré tous ces différents traitements, cette brèche peut être fermée en passant par l'intérieur du fourreau dural, comme dans la technique des hernies discales intradurales. Il faudra réaliser une laminectomie puis une ouverture médiane postérieure du fourreau dural et, après avoir refoulé et protégé les racines, découvrir et refermer la brèche puis refermer la dure-mère en arrière. Lorsque, exceptionnellement, et malgré toutes les tentatives de fermeture et les procédés adjuvants, la fuite persiste toujours, on peut mettre en place un drainage lombaire externe, mais uniquement dans © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 92 © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Traitement de la brèche méningée un milieu neurochirurgical pour retirer, à l'aide d'une seringue électrique, environ 120–240 ml par jour. Ce drainage ne doit pas dépasser cinq jours, au-delà, les risques de méningite augmentent progressivement. Le maintien en position allongée après l'intervention est prescrit par beaucoup de chirurgiens, mais cette mesure est discutée et certains permettent le lever précoce comme s'il n'y avait pas eu de brèche [10–14]. La durée est variable (un à trois jours) mais souvent déterminée par la procédure chirurgicale, la taille de la brèche, la qualité de la réparation et des symptômes postopératoires. Il est vrai que la position debout augmente la pression hydrostatique au niveau de la brèche et risque d'entretenir la fuite, mais l'éventuelle cicatrisation et la fermeture complète d'une brèche ne sont pas acquises avant une dizaine de jours [15]. Il n'y aura donc pas de différence entre un levé le lendemain ou à trois jours. Par ailleurs, le repos au lit a ses inconvénients avec les risques thromboemboliques et les risques pulmonaires ainsi qu'un mauvais effet psychologique pour un patient qui devait sortir le jour ou le lendemain de l'intervention. Nous autorisons nos malades à se lever comme s'il n'y avait pas eu de brèche. Le repos au lit n'est prescrit qu'en cas de signes d'hypotension intracrânienne, mais il s'agit rarement d'un repos strict. L'acétazolamide (Diamox®) qui inhibe la production du LCS peut avoir un effet pour diminuer la pression intrathécale et donc diminuer l'écoulement à travers la brèche. Son utilisation est fréquente mais uniquement comme adjuvant aux différents traitements cités précédemment. L'acétazolamide seul n'est habituellement pas suffisant pour guérir une brèche. Son utilisation prolongée peut entraîner des troubles hydroélectrolytiques. L'antibiothérapie préventive en cas de brèche est aussi discutée mais souvent elle n'est pas conseillée ou alors l'antibiothérapie préventive utilisée habituellement lors de l'induction peut simplement être prolongée pendant 24 heures. Comme nous avons vu précédemment, deux types de matières synthétiques peuvent être utilisés pour la réparation d'une brèche méningée : la colle et le tissu de collagène. À l'origine, ces substances sont utilisées pour l'hémostase. La colle est une association de fibrinogène et de thrombine (d'origine bovine ou humaine, purifiés, stérilisés et viralement inactivés) mélangés lors de l'utilisation entraînant la transformation du fibrinogène en fibrine et la formation immédiate d'un thrombus qui adhère aux tissus. Ce bouchon de fibrine évolue vers un tissu collagéneux. Plusieurs produits sont commercialisés Tisseel®, Tissucol®, Bériplast®, etc. 93 Le tissu de collagène (Pangen®) a un effet sur l'hémostase car, au contact des plaquettes, le collagène provoque leur agrégation entraînant la formation d'un caillot de fibrine. Pour être utilisé dans l'étanchéité du LCS, il faut que ce produit puisse adhérer à la surface de la dure-mère, infiltrer les interstices et remplir l'espace mort autour de la brèche pour éviter le passage du liquide. Il n'y a actuellement pas de produit idéal qui remplit toutes ces fonctions. Le meilleur choix est la combinaison du collagène et de la fibrine. Le seul produit commercialisé avec ces deux composantes est le Tachosil®, sinon peut aussi être utilisée une association de Pangen® et du Tissucol®. La chirurgie mini-invasive est de plus en plus utilisée dans la chirurgie du rachis. Au départ, elle était réputée pour comporter plus de risque de brèche que la chirurgie classique mais, finalement, les publications montrent quasiment le même taux d'incidence. En revanche, la suture directe est difficile mais les conséquences ou les complications d'une brèche sont moins fréquentes grâce à la petite ouverture et la voie transmusculaire. L'espace mort est réduit car les muscles reprennent leur place à la fermeture [14, 16, 17]. Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé ences [1] Cammisa Jr. JT, Girardi FP, Sangani PK, Parvataneni HK, Cadag S, Sandhu HS. Incidental durotomy in spine surgery. Spine (Phila Pa 1976) 2000 ; 25 : 2663–7. [2] Jones AA, Stambough JL, Balderston RA, Rothman RH, Booth Jr. RE. Long-term results of lumbar spine surgery complicated by unintended incidental durotomy. Spine (Phila Pa 1976) 1989 ; 14 : 443–6. [3] Khan MH, Rihn J, Steele G, Davis R, Donaldson 3rd WF, Kang JD, et al. 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Tous droits réservés 94 95 Hernies discales lombaires et chirurgie ambulatoire B. DEBONO Introduction et contexte général La première publication concernant les discectomies lombaires en ambulatoire a été proposée par une équipe anglaise en 1987 [1]. Il s'agissait d'une simple étude de faisabilité et la majorité des travaux qui ont été proposés les deux décennies suivantes provenaient des États-Unis. Deux équipes distinctes ont publié les premières études étayées dès 1994 [2, 3]. Même si le contexte initial était principalement lié au modèle économique américain, le corpus des articles s'est rapidement enrichi de travaux scientifiques démontrant la faisabilité et la sécurité de ces protocoles ambulatoires [4, 5]. Cependant, en Europe et particulièrement en France, les publications à ce sujet demeurent rares [6, 7]. De fait, même si des équipes étaient favorables à ce concept et si des praticiens avaient déjà démarré cette activité de façon isolée, il a longtemps existé des obstacles au développement de ce type de prise en charge. En France, par exemple, le système de remboursement des établissements (les bornes basses qui imposaient une durée de séjour minimale pour une facturation optimale de l'acte) a constitué un frein et leur abolition en 2013 a marqué l'essor de l'ambulatoire dans le rachis (qui concernait 0,4 % de toutes les interventions rachidiennes cette même année) [8]. Néanmoins, d'autres facteurs avaient été identifiés, en particulier organisationnels au sein des établissements de santé, mais également une hypothétique défiance des patients envers leur surveillance à domicile, voire les inquiétudes des médecins quant aux complications non maîtrisées dans un contexte de plaintes médico-légales croissantes [5, 9]. Il est aussi probable que, comme lors de tout changement de paradigme, une certaine résistance à l'innovation puisse être un frein au développement initial de ce type de prise en charge. forte incitation au virage ambulatoire a été menée par notre groupe de santé [10, 11]. Il est d'abord primordial d'instaurer un schéma raisonné de parcours patient en homogénéisant et fluidifiant les protocoles de soins, ce qui n'est pas forcément simple lorsque l'on touche à des pratiques variables en termes de drainage, de premier lever, de prescription de kinésithérapeutes, etc. (figure 13.1). Mais c'est précisément ce travail de fond qui est à réaliser de façon multidisciplinaire en amont du démarrage de cette activité [9]. Nous nous sommes reposés sur le soutien d'une unité de RAAC, des infirmières dédiées présentes 24 h/24 pour créer le lien avec le malade. Elles créent un véritable débriefing le jour de la décision de la date opératoire une fois que le patient a été vu par le chirurgien et les anesthésistes et lui font rencontrer l'équipe Exemple d'application dans un établissement de santé Nous avons récemment publié deux études concernant ce type de prise en charge pour les hernies discales lombaires au sein de notre établissement, où une La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 13.1 Application de e-santé dédiée à la surveillance au domicile des patients opérés d'une hernie discale lombaire en ambulatoire (smartphone patient et terminal infirmier). B. De ono de rééducation. Dès la sortie, elles sont le lien entre patient et établissement, soit au téléphone, soit par le biais d'une application mobile de e-santé, afin de rassurer le patient et/ou ses proches, et de ne pas faire reposer le passage à l'ambulatoire sur les médecins généralistes et services de villes une fois que le patient a quitté la clinique. Pour résumer le travail réalisé dans notre institution, il s'agit de notre learning-curve réalisée dès la fin des bornes basses : au cours d'une période de trois ans, 201 patients ont répondu aux critères de la microdiscectomie lombaire ambulatoire (même sélection que pour l'hospitalisation classique, en se limitant aux scores de l'American Society of Anesthesiologists [ASA] 1 et 2, patient vivant à moins de 60 minutes de la clinique et avec un adulte présent à ses côtés pour le retour à domicile). Une consultation chirurgicale a été organisée six semaines après l'intervention et une enquête téléphonique de satisfaction tardive concernant la prise en charge ambulatoire a été réalisée après six mois. Le temps total moyen d'hospitalisation était de 10 heures et 12 minutes. Sur les 201 patients, un seul (0,5 %) est resté jusqu'au lendemain en raison d'une crise d'anxiété. Aucun patient n'a contacté l'unité de RAAC pendant la première nuit, et aucune complication n'est survenue. Tous les patients ont été revus par leur chirurgien en consultation vers le 45e jour : le score moyen de l'EVA a été considérablement réduit. Lors de ce suivi postopératoire précoce, 87,5 % des patients étaient (très) satisfaits de cette intervention. Au jour 180 de l'enquête, les scores moyens sur l'EVA n'étaient pas significativement différents des données du jour 45. En ce qui concerne le retour aux activités normales de la vie quotidienne, 120 patients (60 %) n'avaient aucune limitation, 72 patients (36 %) avaient des limitations mineures ou majeures et 8 (4 %) étaient atteints d'incapacité. Lors de cette évaluation finale, 8 % des patients (n = 16) étaient très satisfaits, 73 % étaient satisfaits (n = 46], 11 % (n = 22) étaient partiellement satisfaits et 8 % (n = 16) n'étaient pas satisfaits de la procédure ambulatoire. Depuis cette étude, l'ambulatoire a été appliqué à presque tous les patients programmés pour une discectomie lombaire. Nous avons développé pour les autres pathologies rachidiennes une prise en charge RAAC, qui utilise les même règles pré-, per- et postopératoires. Éducation des patients L'éducation préopératoire est un point clé du cheminement ambulatoire [12]. Le principe même est que les patients devraient recevoir en amont de la chirurgie, éventuellement dans une structure dédiée, des détails sur l'intervention chirurgicale, la durée prévue de leur séjour à l'hôpital, l'organisation du retour à domicile et l'analyse de leur futur ordonnance type, les exigences en matière d'arrêt de travail, de rééducation, et les détails de leur rétablissement [13]. Les techniques découlant des principes de RAAC (enhanced recovery after surgery [ERAS]) sont essentielles pour réduire l'anxiété du patient et la qualité du retour à domicile. Les patients n'absorbent pas toute l'information initiale qui leur est donnée par leur médecin et la rétention de l'information est très variable d'une personne à l'autre. L'éducation préopératoire est un moyen idéal de réduire les lacunes dans la compréhension des étapes futures de l'intervention ambulatoire [14]. Analyse de la littérature Le recul global sur les hernies discales lombaires en ambulatoire est désormais assez ancien, et de nombreuses études, en particulier par des équipes américaines, ont analysé la morbi-mortalité de cette prise en charge qui présente un bon profil de sécurité. Les taux de complications précoces varient de 1 à 15,8 % dans la littérature récente [5, 15–18]. Un hématome postopératoire retardé (avec le risque du syndrome de la queue de cheval) demeure la principale préoccupation du chirurgien, mais il apparaît généralement entre quatre et six heures après la chirurgie, avant le congé du patient [19, 20]. Dans l'analyse d'une large série, Pugely et al. [21] retrouvent même un taux de complications inférieur à l'hospitalisation classique, en particulier du fait de l'éducation du patient et de la bonne optimisation de la filière de soin dédié à ce type de prise en charge. Dans cette étude comprenant 4310 patients, les auteurs ont utilisé des scores de propension pour optimiser le niveau statistique : le taux global de complications était plus élevé chez les patients hospitalisés (5,4 versus 3,5 % ; p = 0,0068). Sans surprise, en ajustant leur comparaison avec des régressions logistiques multivariées, ils retrouvaient comme facteur de risque l'âge, le diabète, la présence d'une infection préopératoire de la plaie, la transfusion sanguine, la durée de l'intervention mais, une fois encore, il s'agit d'hospitalisation classique. Ce sont tous des facteurs de risque indépendants de complications à court terme après une discectomie lombaire. D'un point de vue de l'évolution tardive et des résultats fonctionnels, après six mois, le contrôle quotidien de la douleur et la capacité à reprendre la vie quotidienne et/ou professionnelle sont comparables aux travaux concernant les procédures en hospitalisation classique [16]. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 96 Hernies discales lombaires et chirurgie ambulatoire Intégration de la e-santé © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Les médecins et les patients sont de plus en plus sensibilisés à la surveillance à domicile de la e-santé, en termes de facilité d'utilisation et de sécurité des soins [22], avec une efficacité bien démontrée dans la gestion des maladies chroniques. Cependant, peu d'auteurs ont évalué l'observance et l'efficacité des patients dans la prise en charge postopératoire externe aiguë [23]. Nous avons pu publier récemment un travail consacré à une application mobile dédiée à la surveillance des patients en ambulatoire, fournie par notre établissement lors de la consultation de RAAC préopératoire [10]. L'application fonctionne sur un principe de check-list que le patient remplit à sa guise (douleurs, saignement, signes urinaires, signes neurologiques, etc.) et déclenche en fonction des paramétrages réalisés en amont des alertes reçues 24 h/24 par les infirmières de l'unité RAAC (figure 13.2). En fonction de la gravité des alertes, le patient est recontacté immédiatement pour la décision, voire pour être adressé aux urgences. Dans notre étude de 2016 [10], qui portait sur 60 patients opérés de hernies discales 97 lombaires en ambulatoire, 36 patients ont rempli la check-list initiale (ce premier contact est demandé à tous les patients dans les 24 premières heures et remplacent l'appel téléphonique du lendemain) sans autre contact pendant les 15 premiers jours postopératoires. Cinq patients ont même oublié leur première connexion obligatoire, ce qui a fait que 41 patients (68,3 %) n'ont pas déclenché d'alarme urgente dans les 15 jours postopératoires. En ce qui concerne les 19 autres (31,7 %), 29 alarmes ont été déclenchées, dont 25 dans les 48 premières heures. La plupart des demandes concernaient la prise en charge des analgésiques (72,4 %) et toutes les questions sauf une (prescription de la pharmacie du patient) ont été réglées par téléphone sans déclencher une nouvelle consultation, ni entraîner une hospitalisation en urgence. Ce taux élevé de connexions dans les premiers jours a été rapporté pour d'autres pathologies et correspond au modèle de l'amélioration postopératoire initiale de toute discectomie lombaire. Ce type de suivi rassure le patient et ses proches, décharge la médecine de ville, permet des enquêtes et des évaluations à distance, avec une acceptation par les patients qui est excellente. Figure 13.2 Synoptique des étapes du parcours patient pour une chirurgie ambulatoire de hernie discale lombaire. B. De ono Autres applications de l'ambulatoire en chirurgie rachidienne Appliquer l'ambulatoire à d'autres procédures est déjà proposé par d'autres équipes. Des auteurs ont publié leurs résultats concernant des fusions postérieurs dans le rachis dégénératif, avec des taux de complications et des taux de satisfaction comparables à ceux de l'hospitalisation traditionnelle [24, 25]. Il faut aussi noter que, pour certains auteurs anglo-saxons, le concept d'ambulatoire ne se limite pas à une hospitalisation sur le jour ouvrable (« day-surgery ») mais également un séjour de 23 heures, ce qui est très différent mais induit une certaine ambiguïté dans l'analyse des publications dans ce domaine [26]. Cela dit, l'ambulatoire est aussi proposé pour les discectomies cervicales par voie antérieure [7, 27]. Cette intervention, par sa bonne tolérance et ses suites généralement simples d'un point de vue rachidien, semble une bonne candidate pour être réalisée en ambulatoire. De fait, elle est proposée depuis plusieurs années par les auteurs anglo-saxons et, récemment, une équipe française a publié un des premiers travaux européens sur le sujet [28]. Les résultats semblent convaincants, mais ce type d'intervention reste sous le coup de la complication redoutée de tous, l'hématome cervical suffocant. Certes, cela reste une évolution exceptionnelle, mais néanmoins une expérience défavorable vécue par une équipe fait oublier tous les succès et les innovations qui accompagnent les autres bons résultats, etc. À chacun au final de positionner son activité selon sa zone de confort [29]. Enfin, des auteurs mettent en évidence la bonne tolérance de l'ambulatoire pour la chirurgie de décompression lombaire pour les personnes âgées, sans doute par le côté organisationnel qui optimise la prise en charge périopératoire des patients fragiles, et évite ainsi les syndromes de glissements. Il est enfin à noter que, pour les auteurs américains, le raccourcisse ment de la durée d'hospitalisation devient un point crucial, essentiellement pour des contraintes économiques, qui dominent la décision de passer à ce type de prise en charge. C'est sans doute une explication à cette avance académique. À la suite de Kehlet [30], qui a montré que ce type de prise en charge visait avant tout la sécurité et la qualité des résultats cliniques, puis secondairement la diminution de la durée de séjour, il est probable que l'ambulatoire trouve sa place dans le paysage français de la chirurgie du rachis, au sein de l'acceptation plus large de la RAAC qui suit exactement les mêmes règles. Au-delà de l'ambulatoire : la récupération améliorée après chirurgie Pour nous, ambulatoire et RAAC sont deux facettes d'un même concept et suivent les mêmes règles. La RAAC (ou ERAS) est au final beaucoup plus prometteuse que l'ambulatoire dans le champ d'activité de la chirurgie du rachis. Il est à noter que les promoteurs de ce changement de paradigme préfèrent insister sur le côté « amélioration de soins » que sur le côté « rapidité de prise en charge », ce qui fait que les termes initiaux de fast tracking sont moins privilégiés que ERAS (enhancement : amélioration). Introduite en 1997 par Kehlet [31], la RAAC propose une approche multimodale et factuelle des soins périopératoires. Grâce à l'amélioration globale des protocoles de soins et à la fluidité du cheminement du patient, le premier objectif de la RAAC est donc l'amélioration des résultats chirurgicaux et de l'expérience du patient, avec un impact final sur la réduction de la durée du séjour [32]. Les techniques RAAC consistent à optimiser chaque étape pré-, intra- et postopératoire, plaçant le patient dans une position centrale et proactive de sa prise en charge (figure 13.3). Les programmes ERAS se développent avec succès dans la plupart des domaines de la chirurgie et offrent des résultats qui justifient le buzz entourant ce concept. La chirurgie du rachis a Figure 13.3 Principes fondamentaux de l'ambulatoire et de la RAAC. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 98 Hernies discales lombaires et chirurgie ambulatoire finalement été considérée tardivement dans le processus par cette nouvelle méthode multimodale. Après la première étude en langue allemande de Fleege et al. [12] démontrant la valeur de l'éducation préopératoire des patients, Wang et al. ont publié la première série consécutive de fusion lombaire en détaillant des points clés importants, notamment les aspects anesthésiologiques et techniques de la RAAC [24]. Wainwright et al. proposent des méthodes supplémentaires pour l'application des protocoles RAAC en chirurgie rachidienne complexe [13]. En synergie avec l'ambulatoire (au final, une « RAAC extrême »), nous avons sans doute devant nous le standard de la prise en charge des chirurgies rachidiennes modernes : • un patient proactif au centre de sa prise en charge ; • une combinaison d'interventions de soins unimodales fondées sur des données probantes pour réduire la douleur et améliorer le rétablissement ; • un changement multidisciplinaire des paradigmes organisationnels ; • et un processus itératif d'amélioration axé sur les données (c'est-à-dire l'évaluation permanente de toute la filière). © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Ce qu'il faut retenir Les clés du succès de la chirurgie ambulatoire : – le succès de la chirurgie ambulatoire n'est finalement pas lié à la technique elle-même mais à son organisation en amont et en aval ; – une réflexion multidisciplinaire sur chaque étape (jeune, éducation, anesthésie, mobilisation, antalgie, etc.) est nécessaire ; – la procédure est centrée sur le patient qui joue un rôle clé à chaque étape de sa prise en charge ; – une unité dédiée d'infirmières spécialisées permet de garder en permanence le lien avec les patients rentrés à domicile ; – des techniques de e-santé peuvent optimiser la qualité de cette prise en charge (application mobile). Conclusion L'ambulatoire est donc désormais partie prenante de la chirurgie rachidienne, en particulier pour les discectomies lombaires. Les procédures multimodales sont sécures et donnent d'excellents résultats en termes de morbi-mortalité, contrôle des douleurs et satisfaction du patient. L'hypothèse initiale selon laquelle une optimisation d'étapes de soins unimodales pour améliorer la prise en charge réduira par la suite le besoin d'hos- 99 pitalisation et la morbidité semble être confirmée. La position centrale du patient est un point clé dans ce changement de paradigme qui affecte tous les acteurs de la chaîne de soins de santé. L'apport de la e-santé peut être d'un intérêt majeur pour sécuriser le patient, augmenter la qualité de la prise en charge, et ne pas reporter les charges de patients rentrés au domicile sur la médecine de ville. La RAAC, qui selon nous englobe l'ambulatoire et en définit les règles, commence à se développer pour la chirurgie du rachis, ce qui devrait permettre d'élaborer des guidelines pour une large mise en œuvre de ces protocoles, qui soient bénéfiques pour les patients, les soignants, les institutions et les payeurs. Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. 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BARAT Conseils et principes • L'intitulé complet du ou des codes de la classification commune des actes médicaux (CCAM) notés par le chirurgien doit être intégralement retranscrit dans le titre du compte-rendu opératoire sans rien ajouter. • Le code de la hernie discale est LFFA002 (287,85 €). On peut ajouter YYYY 012 (19,29 €), supplément pour radiographie peropératoire. • Les actes thérapeutiques sur les vertèbres au chapitre 12.02.01 ne peuvent pas être facturés avec un acte thérapeutique sur les disques intervertébraux au chapitre 12.02.02 ni avec les actes thérapeutiques sur le système nerveux central spinal du sous-chapitre 01.03. • Par exemple, le code LFFA002 (exérèse d'une hernie discale) ne peut pas être cumulé avec le code LFAA001 (recalibrage unilatéral) (367,97 €). L'exérèse de la hernie discale comprend l'ouverture du récessus latéral ou du foramen intervertébral. • Certains codes font doublons, il est alors conseillé de choisir celui qui rapporte le plus. Par exemple, pour une récidive de hernie discale avec ostéosynthèse, LFFA007 est valorisé 459,46 € ; on peut coter LHCA010 (ostéosynthèse de la colonne vertébrale avec exploration du contenu canalaire) valorisé 490,46 €. • On peut, s'ils sont réalisés, cumuler deux actes sur les vertèbres, l'acte le moins rémunérateur est remboursé à 50 %. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés • Si le niveau n'est pas précisé, cela veut dire, quel que soit le nombre d'étages : exemple laminectomie vertébrale sans exploration du contenu intradural par abord postérieur ou postéro-latéral LHFA016 (316,92 €). • Si le nombre est précisé et que l'on traite deux niveaux, on peut coter le deuxième sur 2. • Pour la hernie discale, le repérage radiologique est coté YYYY 012, mais pour un recalibrage, il n'est pas proposé et, s'il est réalisé, vous pouvez coter YYYY 033 (19,29 €). • Si laminectomie ou recalibrage à un niveau et hernie discale à un niveau différent, on ne peut pas coter la hernie. Coter alors un recalibrage unilatéral en plus (LFAA001) car, chez ces patients, vous êtes le plus souvent contraints à réaliser un recalibrage. • S'il existe une hernie foraminale et une sténose sur deux niveaux sus- et sous-jacents coter hémilaminectomie et recalibrage : LFAA001 et LHFA016/2. Il faut garder à l'esprit que la Caisse nationale de l'assurance maladie (CNAM) ne se fonde que sur le texte et reste sourde à toutes explications chirurgicales et/ou anatomiques. Déclaration d'intérêts Les auteurs de ce chapitre déclarent n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. 103 Pour résumer : les indications chirurgicales dans la radiculalgie par hernie discale H.F. PARENT, J.L. BARAT, R. LEVASSEUR Indications chirurgicales Hernie discale et douleur Hernie discale et radiculalgie rebelle au traitement médical et restant hyperalgique • Échec des traitements médicaux : antalgiques, antiinflammatoires non-stéroïdiens, morphiniques, infiltrations épidurales. • Délai d'au moins 6 semaines d'évolution et sans être en phase d'amélioration. • Bonne concordance entre la clinique et l'imagerie scanner ou IRM (hernie discale concordante en termes de coté et de niveau). Hernie discale et radiculalgies chroniques Chirurgie proposée si persistance d'une gêne régulière significative dans la vie quotidienne et rebelle au traitement médical, même si non hyperalgique, avec persistance du conflit discoradiculaire sur une nouvelle imagerie concordante avec la clinique Hernie discale et déficit sévère ≤ 3/5 Déficit de moins de 48 h et queue de cheval Situation d'urgence chirurgicale. Déficit de moins de 3 semaines Chirurgie proposée en urgence relative surtout en cas de douleur résiduelle avec discussion et information du rapport bénéfice/risque. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Déficit ancien sans douleur résiduelle Prudence dans les indications qui peuvent être discutées au cas par cas. Si le déficit est complet, l'indication chirurgicale ne semble pas pertinente. Modalités opératoires d'une hernie discale Geste de libération simple • Privilégier le mini-invasif. • En cas de reprise, un abord classique paraît plus adapté. Arthrodèse associée • N'est pas le geste à proposer d'emblée en cas de sciatique par hernie discale. • Certaines situations peuvent mener à la réflexion d'une arthrodèse associée : – hernie foraminale surtout si associée à un foramen déjà étroit, – deuxième récidive de hernie discale, – hernie discale dans un canal rétréci déjà opéré avec massif articulaire déjà fragilisé par le geste antérieur, – hernie discale compliquant un spondylolisthésis par lyse isthmique, – hernie discale et dislocation rotatoire au cours d'une scoliose (peu fréquent). 107 Récidives de hernie discale lombaire S. LITRICO Introduction La récidive de hernie discale est définie comme la survenue d'une nouvelle hernie au même niveau, et du même côté que la hernie initiale. Il peut s'agir de récidive très précoce ou survenant plusieurs années après l'épisode initial. Compte tenu de son incidence élevée, la récidive apparaît comme la principale complication de la chirurgie des hernies discales. La recherche de solutions techniques autour du geste de discectomie ainsi que la connaissance des facteurs de risque de récidive doivent permettre d'en limiter la survenue. Lorsqu'elle survient et qu'une nouvelle chirurgie est nécessaire, le choix du geste le plus adapté se révèle parfois difficile. Incidence et taux de réintervention La récidive est la première cause de réintervention chez les patients opérés d'une hernie discale lombaire. Dans une analyse rétrospective portant sur 13 654 patients opérés d'une hernie discale lombaire, Heindel et al. [1] retrouvaient un nouveau geste chirurgical effectué sur le même niveau dans 3,95 % des cas à trois mois et 12,2 % dans les quatre ans. Une étude rétrospective de cohorte pratiquée par Leven et al. [2] et portant sur 810 patients montrait un taux de réintervention de 15 % à huit ans. Parmi ces patients, 62 % étaient réopérés pour récidive, 25 % pour une autre complication et 11 % pour une hernie survenant à un autre niveau. La récidive peut survenir très précocement, comme le montre l'étude rétrospective portant sur 9310 patients et qui retrouve 1,2 % de récidive survenant alors que le patient est toujours hospitalisé [3]. Ces travaux montrent l'importance du risque de récidive après chirurgie de hernie discale lombaire, parfois dans des délais très courts, ce qui peut susciter l'incompréhension chez le patient mal informé en préopératoire. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Enfin, il a été démontré que la récidive herniaire pouvait être très souvent asymptomatique. Lebow et al., sur une série de 108 patients, retrouvent une récidive sur l'IRM systématique dans près de 25 % des cas à deux ans pour un taux de récidive clinique de seulement 10 % [4]. Facteurs de risque de récidive Le tabagisme, l'obésité, une activité professionnelle physiquement lourde sont des facteurs de risque généralement reconnus [5–7]. Il semblerait que l'âge soit plutôt associé à un taux moins élevé de récidive [2]. Sur le plan local, le type de hernie module également le risque. Ainsi, les protrusions sont associées à un plus fort taux de récidive que les hernies exclues [7]. Les anomalies transitionnelles à type de sacralisation de L5 sont également reconnues comme un facteur de risque [8]. L'influence de la technique chirurgicale a également été étudiée. Historiquement, le geste de discectomie s'accompagnait d'un curetage intradiscal dans le but de supprimer tout séquestre discal susceptible de provoquer une récidive précoce. Ce geste particulièrement agressif pour les plateaux cartilagineux provoquait un nombre important de discopathies inflammatoires responsables de lombalgies chroniques invalidantes. La tendance actuelle est donc plutôt à une résection limitée aux fragments herniaires responsables de la compression radiculaire sans exploration intradiscale extensive. Cette méthode limite le risque de discopathie postdiscectomie mais augmente discrètement le taux de récidive herniaire. Dans une méta-analyse portant sur 13 359 patients, Mac Girt et al. montrent ainsi un taux moyen de récidive de 7 % pour les discectomies limitées contre 3,5 % pour les discectomies agressives [9]. En revanche, ils retrouvent une incidence de lombalgies chroniques plus importante dans le groupe discectomie agressive. D'autres auteurs retrouvent un taux équivalent de récidive entre les deux techniques [10, 11]. S. Litrico Une méta-analyse portant sur les discectomies par méthode endoscopique retrouve un taux de récidive de 3,6 % mais le caractère rétrospectif de la plupart des études incluses minore probablement de taux réel [12]. Alvi et al. ont comparé, dans une méta-analyse regroupant 14 études et 1707 patients, les techniques mini-invasives aux approches conventionnelles. Ils concluent que les techniques tubulaires exposent à un plus grand risque de récidive [13]. Dans ces techniques, la courbe d'apprentissage joue un rôle important et il a été montré que le taux de récidive diminuait avec l'expérience du chirurgien [14]. Diagnostic Cliniquement, la réapparition d'une douleur sciatique sur le même territoire douloureux doit faire évoquer la récidive. Les caractéristiques de la douleur restent d'allure plutôt mécanique : majoration aux efforts, aux changements de position, sédation au repos. Au contraire, une douleur de tonalité neuropathique (brûlures, picotements, hypoesthésie ou hyperesthésie douloureuse associée, recrudescence nocturne) évoquera plutôt une fibrose postopératoire ou une lésion radiculaire sans compression résiduelle. Dans tous les cas, c'est l'IRM sans et avec injection de gadolinium qui permettra de préciser l'origine des douleurs. Même si elle reste la référence, l'IRM n'est pas d'interprétation aisée en situation postopératoire, notamment précoce. La persistance d'un sac herniaire au contact de la racine est en effet une image habituelle dans les semaines qui suivent le geste opératoire. Bien que l'injection de sels de gadolinium soit recommandée, son caractère discriminant entre fibrose et récidive reste modéré [15]. La corrélation entre la réapparition de phénomènes douloureux intenses et l'existence d'une image compressive est essentielle pour établir le diagnostic. La fibrose cicatricielle est plutôt responsable de douleurs neuropathiques et l'IRM montre alors un rehaussement du tissu cicatriciel périradiculaire. Malgré les précautions prises pour affirmer le diag nostic de récidive, la confusion avec des phénomènes cicatriciels fibrotiques reste importante. Plusieurs études montrent qu'un taux non négligeable de patients réopérés ne présente pas de nouvelle hernie [16, 17]. Traitement préventif Dans le but de limiter le risque de récidive, des techniques de fermeture du défect annulaire ont été développées. Dans une étude randomisée contrôlée comparant 500 patients avec fermeture du défect annulaire par système de suture et 250 patients sans fermeture, Bailey et al. n'ont pas pu mettre en évidence d'avantage significatif à ce système [18]. Un autre essai randomisant 553 patients avec un défect annulaire de grande taille montre au contraire un taux à deux ans de réintervention pour récidive de 5 % pour le groupe suture contre 13 % pour le groupe contrôle (p = 0,001) [19]. Une autre étude met en avant l'efficience médicoéconomique des systèmes de fermeture annulaire lors de défects supérieurs à 6 mm [20]. Une méta-analyse portant sur quatre études montre un intérêt significatif des dispositifs de réparation annulaire sur le taux de récidive sans augmentation du taux de complication [21]. Les études portant sur ces dispositifs restent cependant relativement limitées et il reste à ce jour difficile de conclure sur leur intérêt réel. Par ailleurs, les systèmes actuels possèdent une résistance limitée à la pression d'expulsion intradiscale. D'autres procédés de restauration de l'annulus comme l'utilisation de glue biodégradable sont actuellement à l'étude [22]. Prise en charge des récidives de hernie discale Lorsque la récidive herniaire est avérée et symptomatique, se pose alors la question du traitement. Une récidive douloureuse n'est pas systématiquement synonyme de réintervention. Plusieurs travaux montrent qu'une prise en charge conservatrice peut être tout à fait effective dans un nombre important de cas de récidive, même précoce [23, 24]. La résurgence de séquestres discaux peut parfois provoquer une nouvelle crise douloureuse qui cèdera sous traitement médicamenteux adapté. Ce n'est qu'en cas de persistance des troubles ou d'apparition de signes neurologiques déficitaires qu'il faudra, au même titre qu'un épisode inaugural, envisager une chirurgie. En cas de reprise chirurgicale, il faut alors choisir le type de réintervention entre une nouvelle discectomie ou une chirurgie de fusion. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 108 © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés écidives de hernie discale lombaire Il est couramment admis qu'une nouvelle discectomie est proposée en cas de récidive avec sciatalgie prédominante alors que la fusion est plutôt réservée aux situations d'instabilité, de récidives multiples ou de lombalgies sévères associées [25–27]. Une nouvelle discectomie en zone cicatricielle nécessite souvent un abord plus large et le risque de lésion facettaire, donc de déstabilisation secondaire, est à considérer. De plus, cette technique n'élimine pas le risque d'une nouvelle récidive. Enfin, le résultat clinique après nouvelle discectomie est généralement moins bon que lors du geste initial comme en atteste plusieurs travaux portant sur les scores cliniques post opératoires [28, 29]. A contrario, la réalisation d'une arthrodèse s'accompagne de tous les risques inhérents à la technique : pseudarthrose, mobilisation secondaire des implants, syndrome adjacent. Plusieurs études comparant discectomie simple à arthrodèse en cas de récidive de hernie discale montrent des résultats équivalents en termes de douleur, fonction et qualité de vie avec une morbidité et un coût plus important pour les arthrodèses [30, 31]. Dans une revue systématique avec métaanalyse, Kerezoudis et al. confirment que les deux techniques ont des résultats similaires, y compris le même taux de seconde réintervention [32]. Dans une étude portant sur les récidives de hernies dans le cadre d'accident du travail, les patients opérés pour arthrodèse avaient un taux de reprise du travail bien moins important que ceux opérés pour nouvelle discectomie simple [33]. Au final, et malgré ces éléments d'orientation, la technique de prise en charge chirurgicale des récidives reste sujette à controverse et les pratiques restent hétérogènes comme le montre l'enquête réalisée aux États-Unis auprès d'une population de chirurgiens du rachis et qui retrouvait une probabilité de désaccord entre deux chirurgiens sur l'attitude à adopter : 22 % en cas de première récidive et 69 % en cas de seconde récidive [34]. En cas de fusion, la chirurgie postérieure (posterior lumbar interbody fusion [PLIF]) ou transforaminale (transforaminal lumbar interbody fusion [TLIF]) est le plus souvent proposée du fait de la facilité d'accès au fragment herniaire. Certains auteurs proposent cependant des chirurgies par voie antérieure (anterior lumbar interbody fusion [ALIF]) afin d'éviter 109 l'abord direct de la zone cicatricielle et les complications potentielles qui en découlent. Mamuti et al. étudient rétrospectivement 35 patients opérés pour récidive de hernie par voie antérieure et retrouvent une amélioration de la sciatalgie, des lombalgies et une bonne fusion chez l'ensemble des patients à deux ans [35]. Dans une méta-analyse portant sur sept études, Phan et al. montrent des résultats satisfaisants tant sur le plan global, avec une amélioration du score d'Oswestry de 50,4 %, que sur la sciatalgie avec une réduction de l'EVA radiculaire de 37 %. Le taux de complication reste bas et dominé par les procidences d'implants [36]. Dans les situations de récidives avec lombalgies prédominantes, en l'absence d'atteinte articulaire postérieure associée et de discopathies multiples, une chirurgie de remplacement discal par prothèse peut éventuellement être proposée. En cas de discectomie simple, l'utilisation des techniques mini-invasives, tubulaires ou endoscopiques, semble apporter des résultats similaires aux techniques conventionnelles [37]. La figure 16.1 résume la stratégie chirurgicale en cas de récidive herniaire avérée et résistante au traitement conservateur. Conclusion La récidive représente la principale complication de la chirurgie de la hernie discale lombaire. Les facteurs favorisants doivent être recherchés et ce risque expliqué au patient lors de la consultation préopératoire. Les évolutions techniques de la chirurgie de la hernie discale, notamment les techniques mini-invasives, n'ont pas permis de réduire la survenue des récidives. Les techniques de sutures des défects discaux semblent montrer un intérêt mais leur efficacité n'est pas encore clairement établie. En cas de survenue, la prise en charge d'une récidive nécessite une analyse au cas par cas pour établir la stratégie la plus adaptée et le recours à l'arthrodèse n'est pas systématique. Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. 110 S. Litrico Récidive herniaire 1re récivive Radiculalgies prédominantes 2e récidive Lombalgies prédominantes Chirurgie instrumentée Instabilité ? Hernie migrée ? Rétrecissement canalaire ? Non Oui Oui Discectomie simple Arthrodèse postérieure Non Arthrodèse antérieure (prothèse discale) Réfé ences [1] Heindel P, Tuchman A, Hsieh PC, Pham MH, D'Oro A, Patel NN, et al. Reoperation Rates After Single-level Lumbar Discectomy. Spine (Phila Pa 1976) 2017 ; 42 : E496–501. [2] Leven D, Passias PG, Errico TJ, Lafage V, Bianco K, Lee A, et al. Risk Factors for Reoperation in Patients Treated Surgically for Intervertebral Disc Herniation : A Subanalysis of Eight-Year SPORT Data. J Bone Joint Surg Am 2015 ; 97 : 1316–25. [3] Vinas-Rios JM, Sanchez-Aguilar M, Medina Govea FA, Von Beeg-Moreno V, Meyer F. DWG Registry-group. 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Tous droits réservés Figure 16.1 Stratégie chirurgicale en cas de récidive herniaire. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés écidives de hernie discale lombaire [12] Yin S, Du H, Yang W, Duan C, Feng C, Tao H. Prevalence of Recurrent Herniation Following Percutaneous Endoscopic Lumbar Discectomy : A Meta-Analysis. Pain Physician 2018 ; 21 : 337–50. [13] Alvi MA, Kerezoudis P, Wahood W, Goyal A, Bydon M. Operative Approaches for Lumbar Disc Herniation : A Systematic Review and Multiple Treatment Meta-Analysis of Conventional and Minimally Invasive Surgeries. World Neurosurg 2018 ; 114 : 391–407. e2. [14] Staartjes VE, de Wispelaere MP, Miedema J, Schröder ML. Recurrent Lumbar Disc Herniation After Tubular Microdiscectomy : Analysis of Learning Curve Progression. World Neurosurg 2017 ; 107 : 28–34. [15] Mullin WJ, Heithoff KB, Gilbert Jr TJ, Renfrew DL. Magnetic resonance evaluation of recurrent disc herniation : is gadolinium necessary ? 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La présence d'un déficit lors d'une radiculalgie modifie radicalement l'approche de la prise en charge de cette pathologie : une notion d'urgence intervient et le temps de la réflexion, si souvent de mise dans cette pathologie dont l'évolution est généralement favorable, peut être remis en cause. Plusieurs questions se posent : • la réalité et l'importance du déficit parfois difficile en cas d'hyperalgie ou chez la personne âgée ; • le caractère pluri- ou monoradiculaire avec la notion ou non de queue de cheval ; • le délai réel d'apparition du déficit ; • l'urgence à opérer ou non ; • quelle information donner sur les chances de récupération ou non après la chirurgie ; • la notion de bénéfice/risque est importante à aborder dans un contexte où le médico-légal est très important. Physiopathologie et mécanisme du déficit Jean-Marc Vital a, dans cette monographie, bien décrit le mécanisme de survenue du déficit (voir Chapitre 1, Anatomie, physiopathologie et évolution naturelle des hernies discales lombaires). On retiendra qu'il y a plusieurs causes : • mécanique par compression de la racine, plus agressive sur le ganglion spinal ; • inflammatoire ; • vasculaire avec une compression veineuse avant que l'ischémie s'installe. La compression est d'autant plus importante que la mobilité est réduite par une cicatrice postopératoire ou un canal étroit associé. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Facteurs favorisants et hernie discale à risque Une étude récente de Krishnan et al. [2] a étudié deux groupes de patients avec et sans déficit (inférieur à 3/5) et a retrouvé des facteurs favorisants de manière significative l'apparition d'un déficit : le terrain, notamment le diabète, la hernie en L3-L4, les hernies exclues et migrées vers le haut, les grosses hernies médianes et le canal étroit associé. L'âge, le sexe, le tabac et la sévérité de la douleur n'étaient pas des facteurs favorisants. Un autre article publié par Ma et al. en 2018 [3] étudie le risque de pied tombant (muscle jambier antérieur inférieur à 3/5) au décours d'une sciatique par hernie discale à partir d'une série de 236 patients dont 23 % avaient un pied tombant. Les facteurs retenus étaient comparables : le diabète, la hernie calcifiée, les épisodes récidivés, les hernies extraforaminales (la fragilité du ganglion rend ce type de hernie plus sensible au déficit). Le canal étroit réduit de plus de 50 % par la hernie par rapport à celle qui occupe moins de 25 % était également un facteur de risque. Diagnostic La paralysie apparaît en général précocement dans l'évolution douloureuse avant 15 jours dans près de 80 % des cas et même peut être aiguë avec une hernie discale d'emblée paralysante. L'interrogatoire est fondamental pour définir la date précise du début de l'apparition du déficit. Il est fréquent que la douleur cède ou devienne moins importante quand le déficit apparaît. Lorsque ce dernier est brutal d'emblée ou d'apparition secondaire avec disparition de la douleur, il évoque davantage un problème vasculaire. Le déficit est le plus souvent monoradiculaire. Apprécier le déficit n'est parfois pas si simple car, si la douleur est importante, on peut le surestimer et il faut donc savoir soulager le patient et refaire l'examen neurologique. L'étude de la marche, quand cela est possible, est essentielle pour noter les déficits en fait importants mais qui peuvent paraître minimes à l'examen couché. 114 H. Parent La marche sur les talons et pointes permet de mettre en évidence un déficit L5 ou S1 très facilement. Ce n'est que debout que l'on peut vraiment apprécier une faiblesse du moyen fessier. Un piège est la découverte en postopératoire au premier lever d'un déficit qui était en fait déjà présent en préopératoire. Un déficit quadricipital, même faible, peut être très invalidant par défaut de verrouillage du genou. Un des pièges est l'hospitalisation en urgence d'un patient hyperalgique et qui peut se paralyser au cours de l'hospitalisation en attente d'une chirurgie. Le personnel qui est habituellement formé à la surveillance neurologique postopératoire doit également faire cette même surveillance rapprochée en préopératoire. La personne âgée (patients de plus en plus nombreux à accéder à la chirurgie) peut être d'examen difficile également avec des petits déficits passés inaperçus en préopératoire (se mettre sur la pointe des pieds et les talons peut être difficile chez quelqu'un d'âgé). Le tableau 17.1 rappelle les signes cliniques selon les racines concernées. Le réflexe rotulien est habituellement dépendant de L4, le muscle psoas dépend principalement de L3. soigneux. Il faut rechercher une anesthésie en selle ou hémiselle. Le plus souvent, l'atteinte radiculaire est bilatérale mais pas tout le temps. La recherche de troubles sphinctériens est indispensable et il n'est pas simple de faire la part des choses en cas d'hyperalgie ou de prise de morphiniques qui peuvent donner des troubles sphinctériens. Il faut rechercher des petits signes sensitifs comme la sensation cotonneuse au niveau des fesses chez le patient couché. La suspicion d'un syndrome de la queue de cheval doit, au moindre doute, inciter à prescrire une imagerie en urgence. Autant il n'y a pas de consensus évident pour le degré d'urgence en cas de déficit moteur, autant la présence d'un syndrome de la queue de cheval est une urgence absolue et toutes les heures comptent. Foruria et al. [4], à propos d'une série de 18 syndromes de la queue de cheval par hernie discale, montrent que les patients opérés après 48 heures conservent des troubles sphinctériens malgré la chirurgie. Parmi les facteurs favorisant : les grosses hernies médianes, la présence d'un canal étroit [3]. Syndrome de la queue de cheval Imagerie Il s'agit d'un syndrome pluri radiculaire avec atteinte de la fonction sphinctérienne. Les troubles sphinctériens isolés sont rares mais nécessitent un examen très Une IRM, ou un scanner, est suffisant pour poser le diagnostic de hernie discale. Il faut se méfier dans les queues de cheval par compression d'une énorme hernie Déficit sensitif Déficit moteur Réflexe diminué ou aboli L3 Fesse Face antérieure de la cuisse Face interne du genou Quadriceps fémoral (extension du genou) et tibia antérieur (flexion dorsale du pied) Dérobement du genou Rotulien L4 Fesse Face extérieure de la cuisse Face antérieure du genou Face antéro-interne de la jambe L5 Fesse Face postérieure de la cuisse Face externe de la jambe Dos du pied et gros orteil Moyen fessier +++ Extenseurs des orteils Péroniers latéraux et partiellement tibial antérieur Marche sur les talons difficile ou impossible Steppage S1 Fesse Face postérieure de la cuisse Face postérieure de la jambe Talon, plante du pied et 5e orteil Triceps sural (flexion plantaire du pied) Marche sur les pointes difficile ou impossible Achilléen © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Tableau 17.1 Signes cliniques selon les racines concernées. Hernie discale paralysante © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 17.1 Volumineuse hernie discale responsable d'un syndrome de la queue de cheval, sous-estimée au scanner (A) et remplissant presque tout le canal à l'IRM (B). discale qui, comblant tout le canal, peut de façon étonnante ne pas être vue au scanner (figure 17.1). L'IRM semble donc plus performante dans ce contexte. Traitement Quand et qui opérer : que dit la littérature ? Ce qu'écrivait Mazda [1] en 1997 est-il toujours vrai ? Il vaut mieux : • opérer pour le résultat clinique sur la douleur ; • opérer avant la troisième semaine d'apparition du déficit ; 115 • opérer si aggravation du déficit avec persistance de douleur ; • une chirurgie urgente devant un déficit récent. La littérature est très partagée et même contradictoire dans l'attitude à adopter en cas de sciatique paralysante. Un seul consensus bien établi est que la présence d'un syndrome de la queue de cheval est une urgence absolue. Luire [5] fait en 2014 une analyse de la littérature et il en conclut qu'à un an il n'y a pas de différence significative entre la chirurgie et le traitement médical : 80 % de récupération dans les deux cas. Le principal point à retenir de cette étude est que les patients peuvent choisir entre une intervention chirurgicale pour obtenir un soulagement symptomatique précoce (y compris un déficit moteur le cas échéant) et s'ils sont incapables de tolérer leurs symptômes, ils peuvent choisir en toute sécurité de poursuivre un traitement non opératoire pendant un certain temps avec une probabilité raisonnable d'amélioration et possibilité de proposer ultérieurement l'opération si elles ne s'améliorent pas suffisamment. La présence d'un déficit moteur stable ne doit pas effrayer les patients en leur faisant croire qu'ils ont « besoin » d'être opérés s'ils sont capables de tolérer leurs symptômes. Balaji et al. [6], en 2014, à propos d'une revue de la littérature concernant la récupération après chirurgie, retrouvent sept études identifiées avec un total de 354 patients. Une récupération complète a été observée chez 38,4 % des patients après la chirurgie et 32 % après un traitement non opératoire. L'âge et l'importance du déficit moteur ont été identifiés comme facteurs pronostiques significatifs dans certaines des études. D'autres auteurs, en revanche, nous incitent à intervenir rapidement en cas de déficit important inférieur à 3. Ondra et al. [7] dans un article récent de niveau de preuve 3 étudient un groupe de 330 patients avec déficit par hernie discale, opérés en les divisant en deux groupes : ceux opérés ou non dans les 48 premières heures. La différence en termes de récupération est significativement plus importante dans le groupe opéré tôt pour les déficits important (0 à 3) mais sans différence pour les déficits minimes à 4/5. Il en est de même pour la récupération des troubles sensitifs importants. Ruth et al. [8], en 2016, analysent les résultats de la chirurgie de hernie discale réalisée moins de 24 heures après l'arrivée du déficit aigu et ils concluent que, pour les 76 patients sur 526 opérés en moins de 24 heures, la récupération neurologique est la meilleure et les auteurs proposent une chirurgie urgente en cas d'apparition aigu du déficit. Dubuisson et al. [9], en 2013, à propos d'une série de 24 patients avec un déficit sévère évoluant depuis 20 jours en moyenne et pour lesquels la chirurgie a été H. Parent proposée à la fin de la consultation et réalisée dans les 48 heures, montraient que le délai opératoire ne semblait pas influencer le degré de récupération motrice. Mais, dans la discussion de cet article, ils analysent cinq séries de la littérature et la seule série prospective conclut que le degré de récupération de la fonction motrice est inversement lié à sa sévérité et à la durée du déficit moteur ! Viswanathan et al. [10], à propos d'une série prospective de 70 patients opérés d'une sciatique déficitaire, ont montré que la récupération était significativement moins bonne en cas de diabète, si le déficit initial était complet, et d'autant plus que la durée est longue depuis les symptômes initiaux. Ces deux dernières références donnent donc la préférence à une intervention au plus vite en cas de déficit moteur. Il existe pour finir un consensus relatif entre les chirurgiens du rachis : en cas de paralysie, si on opte pour la chirurgie, elle doit être pratiquée dès que possible et, en cas de déficit ancien complet, sans douleur, il semble que la chirurgie n'apporte rien. En l'absence de données scientifiques consensuelles, si un déficit est gênant, même ancien, d'autant plus que le patient reste douloureux, l'indication opératoire semble donc indiquée en ayant une discussion sur les bénéfices/risques. L'expérience montre que des surprises peuvent survenir dans les deux sens : récupération même après chirurgie tardive ou absence de récupération après chirurgie précoce. Particularité du traitement chirurgical En présence d'un déficit neurologique, faut-il avoir une technique chirurgicale particulière ? Une compression importante doit pousser à une dissection prudente car il ne faut pas aggraver le déficit par la chirurgie. L'exérèse de la hernie par abord bilatéral est parfois nécessaire. En cas de canal étroit, il faut parfois choisir un abord bilatéral large, nécessitant un recalibrage important sans être déstabilisant. Dans certains cas, il faut certainement privilégier un abord transforaminal pour exciser en toute sécurité une énorme hernie médiane mais cela imposera une arthrodèse associée. Ce qu'il faut retenir Le déficit peut être sur- ou sous-estimé en cas d'hyperalgie et si le patient ne peut être mis debout. L'examen neurologique est indispensable à toutes les étapes avec relevé écrit des examens. Proposition d'arbre décisionnel – Queue de cheval : intervention en urgence et toutes les heures comptent. – Déficit moteur aigu < 3/5 : intervention en urgence. – Déficit plus ancien (supérieur à trois semaines) : – si douleur : intervention proposée, – sans douleur : discussion bénéfice/risque au cas par cas, – et quand la chirurgie est décidée, le plus vite possible. Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé ences [1] Mazda K. Les sciatiques paralysantes. Cahier d'enseignement de la SOFCOT sous la direction d'Alain Deburge 1997 ; 63 : 111–3. [2] Krishnan V, Rajasekaran S, Aiyer SN, Kanna R, Shetty AP. Clinical and radiological factors related to the presence of motor deficit in limbar disc prolapse : a prospective analysis of consecutive cases with neurological deficit. Eur Spine J 2017 ; 26 : 2642–9. [3] Ma J, He Y, Wang A, Wang W, Xi Y, Yu J, et al. Risk Factors Analysis for Foot Drop associated with lumbar disc herniation : An Analysis of 236 patients. World Neurosurg 2018 ; 110 : e1017–24. [4] Foruria X, Ruiz de Gopegui K, García-Sánchez I, Moreta J, Aguirre U, Martínez-de Los Mozos JL. Cauda equina syndrome secondary to lumbar disc herniation : Surgical delay and its relationship with prognosis. Rev Esp Cir Ortop Traumatol 2016 ; 60 : 153–9. [5] Lurie JD. Recovery of motor deficits after disc herniation : commentary on Overdevest et al. Spine J 2014 ; 14 : 1825–7. [6] Balaji VR, Chin KF, Tucker S, Wilson LF, Casey AT. Recovery of severe motor deficit secondary to herniated lumbar disc prolapse : is surgical intervention important ? A systematic review. Eur Spine J 2014 ; 23 : 1968–77. [7] Petr O, Glodny B, Brawanski K, Kerschbaumer J, Freysclag C, Pinggera D, et al. Immediate versus delayed surgical treatment of lumbar disc herniation for acute motor deficits : the impact of surgical timing on functional outcome. Spine (Phila Pa 1976) 2017 juin 27 . [8] Albert R, Lange M, Brawanski A, Scebesch KM. Urgent discectomy : clinical features and neurological outcome. Surg Neurol Int 2016 ; 7 : 17. [9] Dubuisson A, Borlon S, Scholtes F, Racaru T, Martin D. Paralysing lumbar disc herniation : a surgical emergency ? Reflexion about a series of 24 patients. Neurochirrugie 2013 ; 59 : 64–8. [10] Viswanathan VK, Shanmuganathan R, Aiyer SN, Kanna R, Shetty AP. Factors Affecting Early and 1-Year Motor Recovery Following Lumbar Microdiscectomy in Patients with Lumbar Disc Herniation : A Prospective Cohort Review. Asian Spine J 2018 Oct ; 24. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 116 117 Hernies lombaires, une topographie spéciale : les hernies foraminales J.-M. VITAL, M. HUNEIDI Introduction Les hernies foraminales (ou latérales) se situent dans le foramen intervertébral lombaire (FIL) qui, par définition, est la portion du canal rachidien par laquelle sort le nerf rachidien pour quitter la colonne vertébrale. Ce FIL est resté longtemps peu accessible aux explorations radiologiques et à la chirurgie décompressive. McNab [1] l'a ainsi intitulée « zone cachée », cachée par les éléments de l'arc postérieur ou arc neural (isthme, lame, massif articulaire). La fréquence de ces hernies foraminales est plus faible que les hernies postéro-latérales voire médianes. Elle est diversement appréciée : 10 % pour Abdullah et al. [2], uniquement d'après des données de scanner qui peuvent donner de faux positifs, 5 % pour Williams et al. [3] et 4 % pour Courant et al. [4] sur une série du service avec vérification chirurgicale. Rappels anatomiques : contenant/ contenu du FIL L'anatomie du FIL est complexe car il s'agit d'une véritable porte ouverte entre le canal rachidien et la région extrarachidienne, et ce pour l'ensemble des éléments neurologiques et vasculaires qui vont y converger. Ainsi les nerfs rachidiens quittent le cul-de-sac duremérien et circulent dans le canal radiculaire [5] qui comprend le récessus latéral (portion du canal central limité en dehors par le pédicule de la vertèbre qui a le même numéro que la racine), puis le FIL, limité par les deux pédicules adjacents encadrant le segment mobile intervertébral. Il existe donc cinq FIL de chaque côté, droit et gauche, le premier situé entre les pédicules de L1 et de L2 encadrant la racine L1, le dernier entre les pédicules de L5 et de S1 encadrant la racine L5. Les limites supérieure et inférieure du FIL [6] (figure 18.1) sont constituées par les pédicules qui n'ont pas tous la même forme : les pédicules de L1 sont ovalaires et verticaux et vont devenir de plus en plus obliques en bas et en dehors de L2 à L5 ; on peut donc La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés L4 L4 L5 Figure 18.1 Coupe sagittale du FIL. À gauche, on voit le ganglion à sa partie haute. À droite, la flèche rouge correspond au FIL fixe, la flèche jaune au FIL mobile. dire qu'il y a un vrai trou de conjugaison sagittal en L1-L2 qui devient un canal de conjugaison en L4-L5 et L5-S1. Le contact pédiculaire des racines est plus long en lombaire bas (de 18 à 25 mm en moyenne) qu'en lombaire haut, ce qui explique le plus grand risque de compression foraminale des racines lombaires basses, par hernie discale notamment. Les limites antérieure et postérieure doivent être distinguées en deux portions [6] (figure 18.1) : • la 1re est supérieure et fixe puisqu'elle est constituée en avant par la partie latérale du corps vertébral, recouverte par la partie latérale du ligament longitudinal dorsal, en arrière par l'isthme (pars interarticularis) et la partie antérieure de la lame ; • la 2e est inférieure et mobile, et limitée en avant par le disque sous-jacent et en arrière par l'articulaire supérieure de la vertèbre sous-jacente dans sa partie la plus latérale ; ce massif articulaire est recouvert par la capsule articulaire et le ligament jaune qui sont en continuité ; • la partie fixe est plus large que la partie mobile, ce qui donne une forme générale au FIL en poire inversée ou auriculaire. Sur une coupe horizontale (figure 18.2), on peut distinguer, dans le trajet des structures nerveuses, une portion intraforaminale dans le canal rachidien 118 J.-M. Vital, M. Huneidi Figure 18.2 Les trois portions du FIL. : intraforaminale ; B : foraminale pure ; C : extraforaminale. Figure 18.3 Limites du toit du FIL de plus en plus latérales au fur et à mesure qu'on descend de L1 à L5 expliquant les difficultés d'abord du foramen L5-S1. Anatomopathologie des hernies foraminales Si l'on considère la position de la hernie discale dans le plan horizontal, elle peut être décrite comme étant : • intraforaminale : avec sa partie médiane se projetant en dedans du pédicule mais avec sa partie latérale débordant dans le foramen ; • foraminale pure : se projetant strictement entre les deux pédicules ; • foraminale et extraforaminale avec sa partie latérale qui déborde des pédicules ; • et, enfin, extraforaminale pure. Il est intéressant de noter ces différentes positions de hernies dans la série du service [4] : • intraforaminale et foraminale : 25 % ; • foraminale pure : 20 % ; • foraminale et extraforaminale : 30 % ; • extraforaminale pure : 14 %. Dans le sens vertical, le niveau L3-L4 où il y a naturellement plus de mobilité, notamment en inclinaison, est plus touché proportionnellement par des hernies latérales que par des hernies intracanalaires. La hernie discale latérale L5-S1 est rare, voire exceptionnelle pour Abdullah et al. [2]. Dans notre série [4], nous retrouvons une atteinte L5 dans 26 % des cas, L4 dans 38 % des cas, L3 dans 32 % des cas et, enfin, L2 dans 4 % des cas. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés (récessus latéral) où circulent les racines sensitives et motrices, une portion foraminale à proprement parler, à l'aplomb des pédicules, où se situent le ganglion spinal et, enfin, une portion extraforaminale, en dehors des pédicules, où le nerf rachidien constitué va se diviser en ses deux branches, dorsale et ventrale, mixtes. La partie postérieure ou toit de la région foraminale est osseuse et comprend, nous l'avons déjà dit, l'isthme, la lame et le massif articulaire sous-jacent. Il faut noter que la limite latérale de ce toit s'étend de façon variable de haut en bas : en L1-L2, elle est paramédiane et se projette à l'aplomb du bord médial du pédicule alors qu'en L5-S1 elle se projette à l'aplomb du bord latéral du pédicule : on peut donc dire que le toit osseux est plus recouvrant près de la charnière lombo-sacrée (figure 18.3). À propos du contenu, l'élément principal est le ganglion spinal qui est semblable à « de la substance grise » rejetée en périphérie ; il s'agit d'un renflement fusiforme et globuleux situé sur la racine postérieure, très riche en cellules (cellules de gros diamètres branchées sur les fibres Aβ qui véhiculent la sensibilité profonde ainsi que des cellules de petits diamètres branchées sur des fibres de petits calibres C et Aδ, qui, elles, véhiculent douleurs, sens du tact et de la température). On retrouve des veines autour de ce ganglion, notamment les veines émissaires lombaires, qui font communiquer les systèmes veineux intracanalaire et extracanalaire intra-abdominal. Les artères segmentaires suivent les racines, avec notamment l'artère de Desproges-Gotteron qui accompagne la racine l5 et vascularise le cône médullaire. On retrouve enfin tout un réseau de ligaments complexes qui stabilisent le ganglion dans la partie haute du FIL. Hernies lombaires, une topographie spéciale : les hernies foraminales Figure 18.4 Protrusion foraminale (A) hernie séquestrée sousligamentaire (B). Le type anatomopathologique (figure 18.4) de la hernie elle-même est très discuté ; il semblerait qu'il change selon qu'il s'agit d'une hernie foraminale ou extraforaminale. Au niveau extraforaminal, il s'agit souvent d'une hernie sous-annulaire mais séquestrée, c'est-à-dire venant facilement à l'incision de l'annulus et séparée du nucléus [7]. Les hernies intraforaminales et foraminales sont souvent transannulaires et migrées vers le foramen à partir de l'orifice postéro-latéral. Au niveau foraminal pur, on observe souvent un prolapsus de l'annulus induré, signe plutôt d'une discarthrose évoluée que d'une vraie hernie. De toute façon, pour qu'il y ait compression radiculaire, il faut une migration automatiquement vers le haut pour comprimer la racine ou le ganglion, tous deux situés à la partie haute fixe du FIL. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Signes cliniques L'âge moyen est en général plus élevé que pour les hernies intracanalaires (50 ans) avec un sex-ratio en faveur des hommes (deux tiers des hernies foraminales touchent l'homme). Le début de la crise est souvent brutal. Il n'y a pas de caractère spécifique des douleurs si l'on compare les radiculalgies causées par une compression intracanalaire et foraminale. Néanmoins, le territoire de la douleur ou de l'éventuel déficit sensitivo-moteur dépend étroitement de la topographie de la douleur : • une compression du foramen L5-S1 a une expression métamérique sciatique L5 avec douleurs ou troubles sensitifs intéressant la fesse, la face postérieure de la cuisse, la face latérale de la jambe et passant ensuite sur le dos du pied jusqu'au gros orteil ; 119 • une compression du foramen L4-L5 entraîne une cruralgie avec douleur fessière passant devant la cuisse, le genou, la face antéro-interne de la jambe et allant parfois jusqu'au gros orteil ; • une compression du foramen L3-L4 entraîne une cruralgie L3 avec une douleur s'étendant à la face antéro-interne de la cuisse et passant par le genou ; • les compressions L2-L3 et L1-L2 entraînent des cruralgies plus hautes, à proximité du pli de l'aine ; • la racine S1, a priori, ne peut pas être intéressée par une pathologie foraminale. À noter qu'en cas de compression foraminale L4-L5, il peut être observé un territoire douloureux atypique, dans la région fessière, sur la face latérale de la cuisse puis dans le territoire L5 jusqu'au gros orteil. Il s'agit finalement d'un territoire à cheval sur les mématères L4 et L5 ; l'hypothèse d'une compression du nerf furcal, qui est un nerf naissant de la racine L4 et accompagne la racine L5, peut être à retenir. La douleur persistante au repos serait caractéristique, selon Yamaha et al. [8], des hernies foraminales. Les signes de tension radiculaire, comme le signe de Lasègue (30 %) et l'impulsivité à la toux (25 %), sont moins souvent observés que dans les hernies intracanalaires. La lombalgie est rarement au premier plan. Les signes neurologiques sont en revanche plus fréquents, hypoesthésie une fois sur trois, déficit moteur une fois sur quatre touchant selon la racine atteinte les releveurs de la cheville (atteinte L5 et L4), le quadriceps (atteinte L4) mais jamais le triceps sural. Enfin, le syndrome classique postural avec aggravation de la douleur en extension qui ferme le foramen intervertébral et amélioration en position assise ne s'observe que dans 18 % des cas. L'augmentation de la douleur en inclinaison homolatérale s'observe dans 20 % des cas. Certains auteurs décrivent une amélioration spontanée de la douleur en position de décubitus latéral opposé à la sciatique et avec hyperflexion de la hanche et du genou du côté de la sciatique. Explorations complémentaires Clichés simples lombaires de la charnière lombosacrée de face et profil Ils peuvent avoir leur importance. En effet, on pourra noter une inclinaison unilatérale des plateaux vertébraux (s'intégrant ou non dans une scoliose dégénérative). Cette image s'observe souvent au niveau L3-L4 J.-M. Vital, M. Huneidi et L4-L5 pour créer une discopathie asymétrique qui réalise toutes les conditions anatomiques pour réduire les dimensions du foramen du côté de l'inclinaison. Le cliché de profil permettra de diagnostiquer le spondylolisthésis par lyse isthmique compliqué très rarement par une protrusion discale foraminale venant aggraver la compression sous le crochet isthmique. Saccoradiculographie (figure 18.5) C'est un examen de moins en moins réalisé qui a un intérêt modéré puisque l'arachnoïde qui est opacifié s'interrompt au pôle proximal du ganglion qui n'est donc pas exploré. Cet examen n'a été retrouvé positif que trois fois 40 dans la série de Courant [4] sur hernie foraminale opérée. M lombaire C'est l'examen qui a permis le premier de bien approcher les compressions radiculaires foraminales [9]. La coupe axiale foraminale où n'apparaît pas le pédicule est essentielle ; le contraste graisseux naturel autour du ganglion spinal facilite l'analyse de la région. L'image de comblement foraminal attire l'attention sur la région, surtout s'il est asymétrique. Le problème est de distinguer la hernie discale et son caractère transligamentaire ou non du ganglion qui est souvent hypertrophié et surtout horizontalisé dans le cas de la hernie discale comprimant pratiquement toujours la racine de bas en haut. Figure 18.5 Explorations radiologiques du FIL avec injection ; saccoradiculographie explorant mal le FIL (A), discographiescanner (B). magerie par résonance magnétique nucléaire (figure 18.6) C'est un examen beaucoup plus complet, pratiquement essentiel dans l'exploration du FIL, qui permet des coupes anatomiques dans le plan horizontal (comme le scanner) et surtout dans le plan sagittal à l'aplomb du pédicule avec possibilité de comparaison entre le côté droit et le côté gauche. On n'oubliera pas les coupes coronales qui, pour être strictement dans le plan des racines lombo-sacrées, doivent être obliques en bas et en arrière de 5 à 30° en fonction de l'obliquité du sacrum. La cause du comblement foraminal sera mieux analysée que par le scanner, notamment sur les coupes sagittales où la racine est visible sous le pédicule. L'analyse de l'annulus fibrosus et du ligament longitudinal dorsal permet de suspecter une hernie transligamentaire [10]. L'aspect irrégulier de la hernie poussera à la même conclusion. A B C D Figure 18.6 Hernie foraminale et extraforaminale en coupe axiale scannographique (A), en coupe axiale en IRM (B). Hernie foraminale et extraforaminale en coupe coronale (C) et en coupe sagittale en IRM (D). © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 120 Hernies lombaires, une topographie spéciale : les hernies foraminales L'horizontalisation de la racine de face, écrite par Rosenblum [11], évoque fortement la présence d'une hernie foraminale soulevant le ganglion. L'injection de gadolinium peut être indiquée dans les hernies extraforaminales volumineuses qui peuvent faire hésiter avec un schwanomme : le rehaussement sera moins marqué pour la hernie et plus périphérique (figure 18.7). Lee et al. [12], dans un article récent, rappellent les critères faisant suspecter sur l'IRM une hernie foraminale : • contour discal irrégulier en régions foraminale et extraforaminale ; • diminution de la graisse épidurale ; • augmentation de la taille du ganglion ou du nerf rachidien ; • horizontalisation du ganglion ou du nerf rachidien sur les coupes coronales. Les limites de l'IRM se situent en région extraforaminale qui n'est vraiment explorée que sur des coupes horizontales. Les deux explorations qui vont être décrites peuvent suppléer ce défaut. iscographie couplée au scanner (figure 18.5) Elle a, dans notre expérience, surtout été proposée dans les récidives de hernie. Une fissure discale allant vers le foramen fera fortement évoquer une hernie dans la région. La reproduction de la douleur lors de l'injection est aussi un élément positif dans le diagnostic. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés eurographie Elle a surtout été décrite par les Japonais, notamment par Kuronabe et al. [13]. L'injection de produit opaque dans la gaine du nerf rachidien en région extraforaminale s'est réalisée initialement sous amplificateur de 121 brillance ; il faut apprécier le test de reproduction de la douleur et reconnaître l'amputation du nerf opacifié s'il y a compression. Cette infiltration du nerf rachidien et du ganglion peut aussi se faire sous scanner et donnera des renseignements plus précis [14]. MG et, exceptionnellement, l'étude des P S Ils peuvent être réalisés dans les cas où le diagnostic anatomique par les examens complémentaires précités reste difficile en comparaison avec la clinique observée. Nous voudrions insister sur l'étude des potentiels sensitifs périphériques (PSP) bien décrite par Héraut [15] qui est réalisée lors de l'ENMG et qui permet de fixer le niveau lésionnel par rapport au ganglion spinal où siège le centre trophique des corps cellulaires des neurones sensitifs et proprioceptifs. On peut recueillir les PSP des nerfs suraux dont le contingent principal est représenté par la racine S1, les PSP des nerfs musculocutanés dont le contingent principal est représenté par la racine L5 et les PSP des nerfs saphènes internes dont le contingent principal est représenté par la racine L4. On compare l'amplitude de la surface et la morphologie de ces PSP par rapport au côté opposé sain. Dans le cadre de lésion supraganglionnaire, les PSP sont normaux puisqu'il n'existe pas de discontinuité entre le centre trophique et l'axone périphérique. À l'inverse, s'il y a une atteinte ganglionnaire ou infraganglionnaire, les PSP sont altérés du fait de la dégénérescence wallérienne. On peut donc dire en résumé qu'une atteinte des PSP périphériques, principalement sur le musculocutané ou sur les saphènes internes, signe une atteinte ganglionnaire en L4-L5 ou en L3-L4. La publication récente d'Ando et al. [16] confirme ces notions électriques. Moyens thérapeutiques raitement médical classique Associant antalgiques, anti-inflammatoires et rééducation, plutôt en cyphose pour ouvrir les foramens, ce traitement a été proposé avec un certain succès, mais des résultats moins constants que pour les hernies postéro-latérales. nfiltrations d'anti-inflammatoires Figure 18.7 Hernie extraforaminale en coupe axiale (A) et après injection de gadolinium (B). Notamment par voie foraminale (figure 18.8), elles peuvent être proposées avec des résultats assez réguliers qui sont intéressants quand on verra la difficulté 122 J.-M. Vital, M. Huneidi Depuis cette publication de Berger et al. [14], beaucoup de choses ont changé puisqu'en particulier le produit Altim®, qui était le plus utilisé, n'est plus commercialisé. Les radiologues du groupe de la Société d'imagerie musculosquelettique (SIMS) ont fait très récemment une communication recommandant pour l'injection foraminale uniquement l'utilisation de la Dexaméthasone® avec vraiment des limites d'indication pour les injections foraminales sur les sujets déjà opérés puisqu'il y aurait risque d'aggravation ou de paraplégie post-injection [17]. echniques percutanées technique pour bien décomprimer cette zone cachée de McNab [1]. La série bordelaise de Berger et al. [14], un peu ancienne, est rétrospective et concerne 160 patients ayant bénéficié d'une injection périradiculaire iodée et d'hydrocortisone. Cette série comprenait des névralgies cervico-brachiales, des douleurs intercostales et surtout des cruralgies et des sciatiques. Il est distingué cinq groupes de lésions infiltrées : • groupe 1 : rétrécissement foraminal dégénératif ; • groupe 2 : hernie postéro-latérale à extension foraminale, foraminale pure ou extraforaminale ; • groupe 3 : fibrose postopératoire qui, à l'époque, n'était pas une contre-indication à ces injections et pour laquelle d'ailleurs il n'a pas été observé à Bordeaux de complication ; • groupe 4 : atteinte mixte à la fois dégénérative et herniaire ; • groupe 5 : absence d'anomalie radiologique visible mais territoire radiculaire faisant fortement évoquer une lésion ou une atteinte irritative dans le foramen considéré. Dans cette série, 64 % des patients ont eu un soulagement de plus de trois semaines, les meilleurs résultats sans surprise étant obtenus pour les hernies pures. Seuls 15,6 % de l'ensemble des patients ont dû être opérés. Les tests de reproduction de la douleur ont été garants, parmi ces échecs, d'un bon résultat chirurgical. Il s'agit donc là d'un bon moyen de sélection à la chirurgie. echniques chirurgicales mini-invasives Elles se sont beaucoup développées à partir de 2010 : • Hitchon et al. [20] à cette époque proposent une résection isthmique partielle au travers d'un tube chez 40 patients ; • Enyo et al. [21] sur une étude biomécanique sur pièce cadavérique montrent que, si la résection articulaire ou de l'isthme est supérieure à 50 %, il y a risque d'instabilité ; • Lee et al. [22] et Zekaj et al. [23] s'intéressent au niveau L5-S1 toujours difficile d'accès, le dernier auteur proposant une voie interlamaire controlatérale pour accéder au foramen L5-S1 dans neuf cas ; • Yokosuka et al. [24], en 2016, montrent les limites de l'utilisation du tube endoscopique si le foramen est trop fermé par de l'arthrose ou par une scoliose ; • enfin, Naderi et Onen [25], en 2018, proposent par endoscopie une laminotomie dite « vers le bas » avec résection partielle de la zone cachée avec un risque de lyse isthmique. echniques chirurgicales à foyer ouvert La décompression chirurgicale du foramen est, on l'a compris, rendue difficile par la présence de structures osseuses qui constituent le toit de cette zone cachée © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 18.8 Infiltration sous scanner, ganglion (flèche blanche), hernie (flèche noire). Elles ont commencé à être développées dans les années 1990, époque à laquelle Bonafé et al. [18] proposent, dès 1993, la réalisation de chémonucléolyse ou de nucléotomie, avec un meilleur résultat pour la chémonucléolyse. Disworth [19] utilise un endoscope transforaminal en 1998. L'utilisation d'aiguilles comme dans la chémonucléolyse est plus facile en L5-S1 du fait de la présence de la crête que celle de tube proposé dans la nucléotomie ou la foraminoscopie. Hernies lombaires, une topographie spéciale : les hernies foraminales © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés de McNab. Dans les hernies extraforminales, le seul abord possible est extrarachidien et n'entraînera aucun sacrifice articulaire. Par contre, si la hernie est foraminale, voire intraforaminale, il faudra se poser la question de l'éventuel sacrifice articulaire. Lofrese et al. [26], en 2017, ont fait une revue de l'ensemble des techniques, et donc des corridors permettant de conduire à la hernie, tant pour la chirurgie mini-invasive que pour la chirurgie à foyer ouvert. On peut travailler par voie endocanalaire classique en se positionnant à l'opposé de la hernie pour une topographie foraminale et intraforaminale (figure 18.9). Pour les hernies extratraforaminales pures ou foraminales à développement extraforaminal, la voie de Wiltse, dans l'espace naturel graisseux situé entre le multifidus et le longissimus, est préférable au même titre que la voie d'O'Brien qui est encore plus latérale et se situe entre l'autre espace naturel graisseux, entre longissimus et iliocostal (figure 18.10). Nous décrivons de façon un peu plus précise cette voie latérale de Wiltse qui sera conduite le plus souvent au travers d'un tube. Le repérage du niveau à l'amplificateur de brillance est capital en utilisant une broche qui se rapproche du foramen. On travaille entre les deux transverses correspondant aux pédicules limitant le foramen. Le bord inférieur de la transverse supérieure peut être partiellement rongé et on sait que la racine est à proximité de cette transverse supérieure, la hernie est toujours située dans l'aisselle de la racine et il est préférable de travailler dans cette région axillaire plutôt qu'à proximité directe du nerf dont la position peut être modifiée. Les deux principales difficultés de cet abord extrarachidien sont le repérage du nerf et la présence de vaisseaux (plexus veineux foraminaux émissaires, artère radiculaire, qu'il faut souvent microcoaguler). Après incision de l'annulus périphérique, on enlève le plus souvent un gros fragment séquestré et un 123 nettoyage discal classique est réalisé tout en sachant que ce nettoyage discal ne passe jamais le milieu du disque. Pointillart et al. [27] ont décrit l'abord à foyer ouvert dit « voie de la crête ». Il s'agit d'une voie qui permet de se porter dans le foramen en suivant la limite latérale de l'isthme et qui permet aussi un contrôle médial. Cela finit donc par être une voie combinée, à la fois intracanalaire et extracanalaire, voie combinée plutôt utilisée dans les hernies foraminales à développement extraforaminal (figure 18.11). Enfin, on ne peut pas terminer le traitement chirurgical sans évoquer la possibilité d'arthrodèse. Il est des formes où la hernie est associée à une discopathie asymétrique avec rétrécissement dégénératif du foramen et ce n'est guère que l'arthrectomie totale qui permettra une décompression correcte. Il faut alors, dans ce cas-là, envisager un vissage encadrant la décompression et il est assez facile de poser une cage par cette voie transforaminale qui aura permis de décomprimer et de compléter l'arthrodèse intersomatique par la cage (technique dite TLIF) (figure 18.12). Une voie antérieure extrapéritonéale avec pose de cage antérieure ou antérolatérale a été réalisée par certains mais dans un petit nombre de cas, notamment par Strum et al. [28] en L3-L4 et par Perves et Morvan [29]. Pour résumé les techniques chirurgicales à foyer ouvert, on proposera une voie extrarachidienne si la hernie est extraforaminale et une voie intracanalaire si la hernie est intracanalaire à prolongement foraminal. On peut discuter d'une voie combinée dans les hernies purement foraminales en n'hésitant pas à faire une arthrodèse si le sacrifice articulaire a été important. Une arthrectomie isolée sans arthrodèse n'a pas sa place dans cet arsenal thérapeutique. Figure 18.9 Ablation d'une hernie discale lombaire par voie endocanalaire. 124 J.-M. Vital, M. Huneidi Figure 18.10 Voie d'abord en dedans du multifidus (A), entre multifidus et longissimus selon Wiltse (B) avec un espace graisseux dissécable au doigt, entre longissimus et ilio-costal (C). D'après O'Brien. Figure 18.11 Limites latérales en blanc du toit du FIL, ce toit est de plus en plus large au fur et à mesure qu'on descend vers la charnière lombo-sacrée (A, B). Les résultats chirurgicaux sur la douleur sont moins bons que dans les hernies intracanalaires opérées [4]. Concernant la radiculalgie, il persiste des douleurs résiduelles dans un tiers des cas. Lejeune et al. [30] confirment la même impression comparant le résultat de 100 patients opérés d'une hernie postéro-latérale et de hernies latérales. Donaldson et al. [31], chez des sujets plus âgés, rappellent les résultats parfois incomplets. Le retard diagnostique et l'atteinte du ganglion spinal doivent expliquer en partie ce phénomène. Le développement des techniques mini-invasives réduit évidemment le taux d'arthrodèse. On sait depuis Farcy que l'arthrectomie doit toujours être partielle et concerner surtout la partie supérieure et médiale de l'articulaire supérieure de la vertèbre sous-jacente [32] (figure 18.13). Récidives [33] On comprend la possibilité de récidives ou de radiculalgies résiduelles du fait de la complexité de cette région. Le taux de récidives pures est peut-être plus faible que dans les hernies intracanalaires mais il faut considérer encore une fois que le ganglion est un organe fragile qui peut être exposé à des sténoses dégénératives associées et, très souvent, ces récidives sont traitées par un élargissement chirurgical du foramen avec arthrectomie totale et arthrodèse par vis et par cage. Déclaration d'intérêts Les auteurs de ce chapitre déclarent n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 18.12 Décompression par voir transforaminale avec pose de cage et vissage (TLIF) (A à C). Hernies lombaires, une topographie spéciale : les hernies foraminales 125 Figure 18.13 Résection de la partie antérieure et médiale de l'articulaire supérieure de la vertèbre Inférieure (A, B). © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Réfé ences [1] McNab I. Negative disc exploration ; an analysis of the causes of nerve root involvment in 68 patients. J Bone Joint Surg 1971 ; 53 : 891–903. [2] Abdullah AF, Ditto EW, Bird EB, Williams R. Extreme lateral lumbar disc herniations. Clinical syndrome and special problem of diagnostic. J Neurosurg 1974 ; 41 : 229–34. [3] Williams AL, Haughton VM, Daniels DL, Thornton RS. CT recognition of lateral lumbar disk herniation. Am J Radiol 1982 ; 139 : 345–7. [4] Courant C, Vital JM, Senegas J, Baulny D, Lavignolle B, Grenier N. Hernies foraminales lombaires. Aspects radiologiques et thérapeutiques (à propos de 40 cas). Rev Chir Ortho 1991 ; 77 : 336–43. [5] Vital JM, Lavignolle B, Grenier N, Rouaix F, Malgat R, Senegas J. Anatomy of the lumbar disk herniation. Anat Clin 1983 ; 5 : 141–51. [6] Vital JM. Foramen intervertébral lombaire. In : Cahiers d'Enseignement de la SOFCOT ; 2000. [7] Patrick BS. Extreme lateral ruptures of lumbar intervertebral discs. 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Tous droits réservés 126 127 Hernie discale intrathécale J.-L. BARAT, A. DURAND Introduction La hernie discale intrathécale a été décrite pour la première fois par Dandy [1] en 1942. Plus d'une centaine de cas ont été décrits depuis [2, 3], mais cela reste une pathologie rare (0,04 à 0,33 % des hernies discales), de diagnostic difficile avec une grande incidence de syndrome de la queue de cheval. La chirurgie reste problématique, en particulier pour un chirurgien qui n'est pas préparé à une exploration intrathécale. Présentation clinique La symptomatologie clinique dépend de la localisation et du niveau de la hernie. Il n'y a pas de différence dans la présentation clinique entre la hernie extradurale et la hernie discale intrathécale. Au niveau lombaire, c'est une sciatique plus ou moins associée à des déficits neurologiques sensitifs moteurs ou réflexes. L'incidence d'un syndrome de la queue de cheval est plus élevée [4] : de l'ordre de 0,5 à 1 % dans la hernie en général, il est présent dans plus de 30 % dans la hernie discale intrathécale. Le ligament vertébral postérieur (LVP) associé à la dure-mère offre une résistance à l'exclusion massive du nucléus, la rupture du LVP et la déhiscence de la dure-mère permettent l'exclusion de fragments discaux plus volumineux. Certains évoquent le relargage par le nucleus de substance chimique potentiellement toxique pour les racines [4]. Au niveau thoracique ou cervical, la hernie discale intrathécale est à l'origine de myélopathie progressive [5]. Un syndrome de Brown-Séquard est retrouvé dans la moitié des cas. Les troubles débutent souvent par une monoparésie spastique puis peuvent s'associer : douleur, paraparésie, syndrome pyramidal, ataxie et troubles sphinctériens. Physiopathologie La migration intrathécale du nucleus pourrait être liée à des adhérences entre le LVP et la dure-mère [6] comme cela a été montré par des études sur cadavres. Un antécédent de chirurgie discale au même niveau avec une récidive, une anesthésie péridurale ou des La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés anomalies congénitales locales sont souvent évoquées. Ces adhérences semblent plus fréquentes au niveau L4-L5. Un processus inflammatoire avec une érosion progressive associé à la pulsativité physiologique du LCS entraîne un amincissement de la dure-mère. Le LVP et la dure-mère adhérente finissent par se perforer, laissant une issue facile au nucleus. Imagerie Différentes techniques d'imagerie ont été utilisées pour affirmer le caractère intrathécal du fragment discal. Cependant, le diagnostic final est souvent fait en peropératoire [7]. L'IRM est le gold standard de la neuro-imagerie. L'image habituelle est celle d'une volumineuse hernie occupant une grande partie du canal rachidien avec un hyposignal en séquences T1 et T2. Deux signes sont plus caractéristiques : la perte de continuité du LVP sur les séquences sagittales, et sous forme d'un bec sur les coupes axiales en T2 avec un aspect triangulaire de la hernie. Après injection, il y a une prise de gadolinium en anneau de la hernie. Cette prise de contraste est liée aux granulations du tissu inflammatoire autour de la hernie et à sa néovascularisation. Toutefois, l'imagerie peut être très similaire à une hernie extradurale classique. Il faut évoquer les diagnostics différentiels, les lésions médullaires et rachidiennes : kyste arachnoïdien, métastase, lipome, neurofibrome méningiome, tumeur épidermoïde [8]. L'injection de produit de contraste n'est pas habituelle pour un diagnostic de hernie discale mais, pour mettre en évidence une hernie discale intrathécale, elle doit être réalisée. Sur le plan médullaire, la compression est le plus souvent localisée entre T4 et T7 en raison de la cyphose thoracique. Le diagnostic radiologique est plus facile. On observe une angulation de la moelle, antérieure au niveau thoracique ou postérieure en cervical, limitée à un ou deux segments vertébraux. Il existe un effacement des espaces subarachnoïdiens (ESA) antérieurs et un élargissement des ESA postérieurs (figures 19.1 et 19.2) La radiculographie associée au myéloscanner est d'un intérêt non négligeable. Elle peut montrer un blocage du produit de contraste, une amputation avec un 128 J.-L. Barat, . Duran Figure 19.3 Hernie discale L4-L5 : aspect en bec intradural en coupe axiale. Figure 19.1 Hernie intradurale T7-T8 : angulation antérieure de la moelle. Figure 19.4 Hernie L4-L5 : empreinte intradurale sur le myéloscanner. Figure 19.2 IRM : hernie T7-T8 médiane en coupe axiale. aspect de lésion intradurale (figure 19.3), mais sans toutefois permettre d'affirmer la nature de la compression [9]. Le myéloscanner en coupe axiale retrouve cet aspect de bec intrathécal (figure 19.4). Mut et al. [10] ont proposé une classification des hernies discales intrathécales en deux types : A et B. Le type A est une hernie discale migrée dans le sac dural. Le type B est une hernie incluse dans la gaine radiculaire au niveau préganglionnaire. Cependant, cette classification est fondée sur des constatations peropératoires. Certains ont eu recours à une myélographie peropératoire pour affirmer le diagnostic avant de Stratégie opératoire Un traitement chirurgical rapide est la meilleure garantie d'une bonne récupération. La difficulté est de faire le diagnostic en préopératoire. En peropératoire, certaines constatations permettent de suspecter la migration intradurale. La dure-mère est tendue et très adhérente au LVP. La palpation au dissecteur de la méninge fait suspecter une masse intradurale. La fibrose et l'aspect de masse intradurale associés à un disque vide sont des signes évocateurs d'une migration intrathécale du disque [13]. L'utilisation du microscope opératoire est primordiale pour l'exploration intradurale et pour éviter un traumatisme radiculaire ou médullaire. Une incision © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés procéder à l'ouverture durale [11]. L'association à une bulle d'air intracanalaire est retrouvée dans 2 % des cas [12]. Hernie discale intrathécale durale médiane ou paramédiane permet une exploration plus aisée. Le fragment discal est facilement retrouvé et extirpé (figures 19.5, 19.6). La brèche durale antérieure (figure 19.7) sera suturée si possible Figure 19.5 Vue per-opératoire : hernie discale L4-L5 au sein des racines. 129 mais cela est souvent difficile avec un risque neurologique. Il faut alors mettre en place un patch de reconstruction durale. Un décubitus de 48 heures est conseillé en postopératoire. L'évolution est le plus souvent favorable sans fuite méningée ni autre complication. Le pronostic est dépendant de la durée et de l'importance des symptômes préopératoires (simple radiculopathie ou syndrome de la queue de cheval). Dans le cas d'un syndrome de la queue de cheval, la récupération peut être longue et incomplète. Le pronostic est relié à l'importance des signes neurologiques et à la rapidité du geste de décompression qu'il est préférable de réaliser dans les premières 48 heures. Les patients avec un syndrome de la queue de cheval présentent souvent des douleurs neuropathiques séquellaires. La récupération est souvent plus importante sur le plan moteur que sur le versant sensitif. Les atteintes radiculaires simples récupèrent rapidement, témoignant qu'une exploration intradurale sous microscope n'est pas agressive pour les racines. Dans le cas particulier des hernies médullaires, l'évolution peut se faire vers une syringomyélie. Celle-ci est attribuée aux adhérences et au trouble de la circulation du LCS. La mise en place d'un patch en avant et en arrière de la moelle pourrait limiter cette évolution. Conclusion © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 19.6 Vue opératoire : hernie T7-T8 en avant du cordon médullaire. La hernie discale intrathécale est une pathologie rare de diagnostic difficile souvent posé en peropératoire. L'IRM reste l'examen de référence mais les signes ne sont pas caractéristiques. Le traitement est chirurgical par voie intrathécale sous microscope. L'évolution est dépendante du niveau lésionnel, de l'importance des troubles neurologiques préopératoires et de la précocité du geste chirurgical. Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé Figure 19.7 Hernie T7-T8 : brèche de la dure-mère après l'exérèse de la hernie. ences [1] Dandy WE. Serious complications of ruptured intervertebral disks. JAMA 1942 ; 119 : 474–7. [2] Lesoin F, Duquennoy B, Rousseaux M, Servato R, Jomin M. Intradural rupture of lumbar intervertebral disc : report of three cases with review of the literature. Neurosurgery 1984 ; 14 : 728–31. [3] Park YS, Hyun SJ, Kim KJ, Jahng TA. Multiple Intradural Disc Herniations Masquerading as Intradural Extramedullary Tumors : A Case Report and Review of the Literature. Korean J Spine 2016 ; 13 : 30–2. J.-L. Barat, . Duran [4] Ducati LG, Silva MV, Brandão MM, Romero FR, Zanini MA. Intradural lumbar disc herniation : report of five cases with literature review. Eur Spine J 2013 ; 22 : S404–8. [5] Vallée B, Mercier P, Menei P, Bouhour F, Fischer C, Fournier D, et al. Ventral transdural herniation of the thoracic spinal cord : surgical treatment in four cases and review ofliterature. 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Il convient de la distinguer du débord harmonieux du disque qui correspond plus à une évolution de la discopathie dégénérative. Ce débord peut être important et il est parfois difficile de le différencier d'une exclusion herniaire médiane. L'analyse clinique et radiologique seront déterminantes dans le choix de la voie d'abord chirurgicale. Tableau clinique On peut distinguer trois modes de présentation d'une hernie discale médiane : • la radiculalgie aiguë : compte tenu de la position médiane, le conflit peut être uni- ou bilatéral. La symptomatologie sera volontiers à bascule en cas d'atteinte bilatérale. Le volume herniaire est parfois important, pouvant être responsable d'un syndrome de la queue de cheval constituant une urgence diagnostique et thérapeutique ; • la claudication : similaire à une véritable sténose du canal lombaire, cette forme caractérisée par un volume herniaire important est révélée par une limitation du périmètre de marche, une douleur radiculaire à la marche sous forme d'une véritable claudication radiculaire. Il peut parfois s'agir d'une véritable sensation de faiblesse des membres inférieurs à la marche ; • la lombalgie aiguë : il s'agit du tableau clinique le plus difficile, une hernie survient rarement sur un disque sain. Il est souvent difficile, dans ces situations cliniques, d'avoir des certitudes sur le lien de cause à effet entre la lombalgie aiguë et la présence d'une hernie. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Différencier une hernie discale médiane d'un débord discal lié à une discopathie Les premiers éléments peuvent se retrouver à l'interrogatoire, malgré qu'il s'agisse toujours d'une phase essentielle de la consultation, les critères discriminants sont à l'imagerie. À l'interrogatoire On cherchera des éléments orientant vers un tableau douloureux récent, de début brutal et inhabituel. Dans le cas d'une hernie médiane sans conflit radiculaire responsable d'un tableau de lombalgie aigu, on cherchera à différencier l'épisode actuel, des douleurs habituelles. Critères radiologiques Les termes hernie discale, protrusion discale et bombement discal sont souvent utilisés de manière interchangeable dans la littérature et dans les comptes rendus médicaux. Ces termes doivent être utilisés de manière adaptée. Un groupe de travail commun de la société nord-américaine du rachis (North American Spine Society) avec les sociétés américaines de radiologie du rachis et de neuroradiologie définit la hernie comme « un déplacement localisé ou focal du matériau discal au-delà des limites de l'espace intervertébral » [1]. Les éléments permettant de distinguer une hernie médiane d'un débord discal lié à une discopathie évoluée sont résumés dans le tableau 20.1 (figures 20.1, 20.2) [2]. Prise en charge chirurgicale Lors d'une intervention de cure de hernie discale, la réalisation ou non d'une discectomie reste un débat non encore tranché. Toutefois, en 2015, Ran et al. [3] ont publié une méta-analyse qui tend à penser que 132 O. Lu as Tableau 20.1 Critères radiologiques discriminant une hernie discale d'un débord d'une discopathie (d'après [2]). Sous-ligamentaire Aspect en coupe axiale Débord hamonieux symétrique s'étendant vers les foramens Débord souvent asymétrique médian à limite plus nette et moins étendue Signal Signal du débord identique au reste du disque (figure 20.2) Signal herniaire différent de celui du disque souvent en hyposignal T1 et en T2 (figure 20.1) Ligament longitudinal dorsal (visible sous forme d'une ligne en hyposignal T1 recouvrant le disque) Pas de signe de rupture Pas de signe de rupture [2] Rupture du ligament longitudinal postérieur [2] Absent Présent (figure 20.1) Lignes en hyposignal T1 et en T2 traversant la hernie Figure 20.1 Séquences T2 en coupes sagittale et axiale (A, B) montrant une hernie discale L4-L5. Noter le signal diminué du fragment herniaire comparé au signal discal (flèche). Figure 20.2 Séquences T2 en coupes sagittale et axiale (A, B) montrant un débord herniaire L5-S1. Le signal discal et celui du débord herniaire sont identiques. Il s'agit donc d'une discopathie évoluée. La coupe axiale montre un conflit radiculaire S1 bilatéral (flèches). limiter le geste chirurgical au retrait de la hernie sans discectomie s'accompagne d'un taux de récidives et de complications équivalent aux procédures avec discectomie, mais serait associé à une incidence plus faible Extraligamentaire des lombalgies récurrentes et un taux de satisfaction des patients plus élevé. Des essais contrôlés randomisés prospectifs de haute qualité sont nécessaires pour évaluer fermement ces deux procdures. Dans le cas des hernies médianes, la discussion porte essentiellement sur la technique à utiliser puisque les indications restent identiques à celle décrite pour toutes les hernies. Il existe cependant un cas particulier : en cas de hernie discale médiane sans conflit radiculaire franc responsable uniquement d'une lombalgie. Dans ce cas, il est légitime de proposer une solution chirurgicale en cas de lombalgie récente évoluant depuis plus de trois mois et résistante au traitement médical. Dans les autres cas de figures, la discussion porte sur la voie d'abord. Nous disposons de plusieurs solutions, le développement des techniques mini-invasives, notamment grâce au développement des écarteurs tubulaires, conduit souvent à recommander une voie d'abord unilatérale transmusculaire. Les données de la littérature sont parfois discordantes et ne permettent pas réellement d'établir une nette supériorité de cette voie comparée à un abord conventionnel. Arts et al. [4], en 2011, ont démontré par une étude prospective randomisée qu'il n'y avait pas de différence significative entre l'abord transmusculaire tubulaire et l'abord conventionnel en termes de récupération fonctionnelle ou de résultat clinique. Righesso et al. [5], en 2007, avaient retrouvé des résultats identiques, avec cependant une différence significative dans la durée d'hospitalisation et la taille de l'incision cutanée en faveur de l'abord transmusculaire grâce à un écarteur tubulaire. Toutefois, la différence de durée d'hospitalisation était de deux heures (26 versus 24 heures), etc. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Discopathie responsable d'un débord discal 133 Hernie discale médiane Le choix d'un abord conventionnel ou tubulairetransmusculaire n'est donc qu'une affaire d'habitude et de préférence du chirurgien. Le véritable sujet de discussion dans la hernie médiane siège donc dans le choix d'un abord uni- ou bilatéral. La décision sera donc fonction de la présentation clinique (figure 20.3). Il paraît intéressant de différencier plusieurs tableaux cliniques : • lombosciatique unilatérale : il s'agit du cas le plus simple, un abord unilatéral conventionnel ou transmusculaire est recommandé comme pour toute hernie ; • lombosciatique bilatérale avec conflit radiculaire bilatéral identifié : dans ces cas, il paraît logique d'utiliser un abord conventionnel médian inter-myo-épineux bilatéral. On fera en sorte de préserver l'apophyse épineuse en abordant le canal par un abord d'un côté puis de l'autre ; • tableau de lombalgie sans radiculopathie : l'objectif dans ces cas est de retirer le matériel discal à l'origine de l'inflammation épidural ainsi que de diminuer la tension réalisée par la hernie sur le ligament longitudinal dorsal aussi à l'origine de la lombalgie. Dans ce cas, un abord tubulaire transmusculaire oblique permet un accès plus large et une exérèse herniaire satisfaisante. Un abord médian unilatéral conventionnel (figure 20.4A) permet, lui aussi, une bonne décompression, mais il est logique de penser que cet abord se révèle plus contraignant sur le sac dural si l'on souhaite réaliser un retrait des fragments les plus médians. Du fait d'un abord oblique, la voie transmusculaire est plus aisée et moins contraignante sur les structures neurologiques lors du retrait des fragments dépassant la ligne médiane (figure 20.4B). Un autre intérêt des écarteurs tubulaires est que leur orientation peut être modifiée durant l'intervention. En positionnant l'écarteur plus oblique vers la ligne médiane, il est possible de réaliser un recalibrage controlatéral en passant au-dessus du sac dural. Dans ce cas, il sera souvent nécessaire d'utiliser une fraise pour réséquer la base de l'apophyse épineuse. Figure 20.4 Représentation de la zone de travail dans le canal rachidien selon la voie d'abord conventionnelle inter-myoépineux (A) ou oblique transmusculaire à travers un écarteur tubulaire (B). Présence d'une hernie discale médiane symptomatique justifiant d'une prise en charge chirurgicale U O N I NO Abord oblique transmusculaire de préférence pour permettre un evidement de la hernie maximum © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Existence d'une radiculalgic associée ? OUI Douleur radiculalgic uni-latérale ? NON OUI Abord inter-myo-épineux bilatéral en essayant de préserver l'apophyse épineuse Abord oblique transmusculaire OU Abord inter-myoépineux unilatéral Figure 20.3 Arbre décisionnel établissant l'abord chirurgical optimal en fonction de la présentation clinique. 134 O. Lu as Conclusion Réfé Malgré la pluralité des présentations cliniques, la hernie discale médiane représente surtout une difficulté dans le choix de la stratégie chirurgicale avec un abord uni- ou bilatéral. Il est essentiel de bien distinguer une hernie médiane d'un débord discal pour éviter quelques surprises lors de l'intervention. En effet, il est toujours fâcheux de se retrouver face à un débord discal alors que l'on s'attendait à trouver un fragment herniaire. Dans le cas d'un débord, il sera nécessaire de le fragmenter alors qu'un fragment discal est plus simple à retirer et quasiment en un seul bloc, le curetage de la poche herniaire se faisant à l'aide d'un crochet boutonné. Cette situation est d'autant plus fâcheuse quand on s'attendait à réaliser une décompression bilatérale en retirant un fragment central. Dans ces cas, l'abord oblique permet une décompression souvent plus aisée vers la ligne médiane. Cela explique peut-être l'attrait croissant pour cette voie d'abord. [1] Schroeder GD, Guyre CA, Vaccaro AR. The epidemiology and pathophysiology of lumbar disc herniations. YSSPS 2015 Oct ; 1 : 1–6. Elsevier. [2] Oh KJ, Lee JW, Yun BL, Kwon ST, Park KW, Yeom JS, et al. Comparison of MR imaging findings between extraligamentous and subligamentous disk herniations in the lumbar spine. AJNR Am J Neuroradiol 2013 ; 34 : 683–7. [3] Ran J, Hu Y, Zheng Z, Zhu T, Zheng H, Jing Y, et al. Comparison of discectomy versus sequestrectomy in lumbar disc herniation : a meta-analysis of comparative studies. Park P, editor. PLoS ONE 2015 ; 10. e0121816. [4] Arts MP, Brand R, van den Akker ME, Koes BW, Bartels RH, Tan WF, et al. Tubular diskectomy vs conventional microdiskectomy for the treatment of lumbar disk herniation : 2-year results of a double-blind randomized controlled trial. Neurosurgery 2011 ; 69 : 135–44. [5] Righesso O, Falavigna A, Avanzi O. Comparison of open discectomy with microendoscopic discectomy in lumbar disc herniations : results of a randomized controlled trial. Neurosurgery 2007 ; 61 : 545–9. ences Déclaration d'intérêts © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. 135 Hernie discale et canal étroit H. PARENT Introduction Une hernie discale peut compliquer un canal étroit préexistant. Plusieurs situations peuvent se rencontrer : une hernie discale survient sur un canal étroit vierge ou sur un canal étroit déjà opéré. Le bilan d'un canal étroit découvre à l'imagerie une hernie discale qui participe à la réduction du canal. Y a-t-il des particularités cliniques ? La gestion du geste chirurgical est-elle différente ? Faut-il absolument exciser la hernie au cours du traitement chirurgical du canal lombaire étroit ? L'excision d'une hernie discale au cours du traitement chirurgical du canal lombaire étroit estelle déstabilisante pouvant imposer une arthrodèse complémentaire ? La littérature n'individualise pas cette entité particulière. On peut quand même faire quelques remarques. Particularités cliniques Le tableau clinique peut être classique, brutal et n'avoir rien de particulier et c'est celui d'une sciatique ou cruralgie monoradiculaire ; c'est l'imagerie qui précisera que le canal étroit est associé. On peut imaginer que la hernie n'a pas besoin d'être volumineuse pour être symptomatique. La présence d'un canal étroit associé est régulièrement citée comme facteur de risque d'une complication neurologique associée [1, 2]. Le tableau clinique peut être celui d'un canal étroit avec la triade classique de lombalgie, radiculalgies mal systématisées éventuellement bilatérales avec claudication intermittente et c'est l'imagerie qui mettra en évidence une hernie discale associée. Imagerie La découverte d'un canal étroit associé à la hernie discale au cours d'un scanner de première intention doit conduire à demander une IRM qui devient alors toujours indispensable pour mieux analyser la sévérité, l'étendue du canal étroit avec des incidences myélographiques. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés La télémétrie est souvent nécessaire pour le bilan de l'équilibre du rachis et surtout des clichés dynamiques à la recherche d'une instabilité, même si ceux-ci peuvent être d'interprétation discutable en cas d'hyperalgie. Traitement médical Il doit toujours être tenté de première intention sauf en cas de déficit moteur associé ou de syndrome de la queue de cheval (plus fréquent dans ce contexte). Il est souvent insuffisant et le traitement chirurgical est plus souvent nécessaire. Traitement chirurgical, particularités En cas de radiculalgie rebelle au traitement médical sur un canal étroit asymptomatique auparavant, on peut proposer une libération du seul niveau incriminé avec un recalibrage unilatéral associé à l'excision de la hernie discale. On peut même utiliser une technique mini-invasive. Au moindre doute, si le canal est serré, il faut discuter d'un abord bilatéral du niveau incriminé. En cas du traitement chirurgical d'un canal étroit, la présence d'une hernie discale associée doit être bien analysée. Le plus souvent, une fois le canal étroit libéré, même en cas de hernie discale médiane importante, il est rarement nécessaire de faire l'excision de la hernie discale. Il faut bien sûr palper l'espace discal mais, si l'on hésite, on peut privilégier l'abstention qui, le plus souvent, est la bonne option. Une excision discale après une libération postérieure large avec des arthrectomies généreuses peut être destabilisante. Une hernie discale compliquant un canal étroit déjà opéré et qui nécessite une intervention doit faire réfléchir à la stratégie chirurgicale. Il faut alors bien analyser les massifs articulaires par scanner et savoir s'ils n'ont pas été fragilisés par la chirurgie antérieure. La hernie a-t-elle une composante foraminale et le foramen est-il rétréci ? Y a-t-il une instabilité aux clichés dynamiques ? 136 H. Parent En effet, certaines situations seront faciles à gérer et il faudra proposer un abord itératif avec excision de la hernie discale. Il faudra être économe sur l'arthrectomie éventuellement nécessaire. Mais parfois, la fragilité des articulaires, la fermeture d'un foramen, une instabilité aux clichés dynamiques pourront imposer un abord postéro-latéral selon Wiltse. Cela aura l'avantage d'un abord vierge, plus simple et moins dangereux, évitant la cicatrice opératoire. Par une arthrectomie complète, on réalisera la libération centrale et foraminale. En revanche, cet abord nécessitera une arthrodèse transforaminale avec cage et ostéosynthèse que l'on pourra même réaliser par voie mini-invasive. Dans certaines conditions anatomiques, on pourra même proposer une arthrodèse lombaire mini-invasive par voie unilatérale (UNILIF) [3]. Réfé ences [1] Krishnan V, Rajasekaran S, Aiyer SN, Kanna R, Shetty AP. Clinical and radiological factors related to the presence of motor deficit in limbar disc prolapse : a prospective analysis of consecutive cases with neurological deficit. Eur Spine J 2017 ; 26 : 2642–9. [2] Ma J, He Y, Wang A, Wang W, Xi Y, Yu J, et al. Risk factors analysis for foot drop associated with lumbar disc herniation : an analysis of 236 patients. World Neurosurg 2018 ; 110 : e1017– 24. [3] Giorgi H, Prebet R, Andriantsimiavona R, Tropiano P, Blondel B, Parent HF. Minimally invasive transforaminal lumbar interbody fusion with unilateral pedicle screw fixation (UNILIF) : morbidity, clinical and radiological 2-year outcomes of a 66-patient prospective series. Eur Spine J 2018 ; 27 : 1933–9. Déclaration d'intérêts © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. 137 Hernie discale et scoliose S. WOLFF L'association hernie discale et scoliose n'a jamais fait l'objet de publication spécifique. Cette association de deux pathologies fréquentes du rachis est réputée rare. Pour préciser cette fréquence, nous avons extrait de notre registre d'observations (hôpital Jacques Cartier, Massy) tous les enregistrements où coexistaient une scoliose et une hernie discale. N'ont été retenues que les hernies discales de type focales ; les protrusions discales ont été exclues. Le recueil des données s'est effectué de façon prospective entre 2003 et 2018, avec une étude rétrospective de l'association : outre le type de hernie et son traitement, ont été recueillis le type de scoliose et son angulation. Pendant ces 15 années, 13 667 patients ont été examinés. Ainsi, 2213 patients adultes (> 18 ans) présentaient une scoliose et 2620 une hernie discale. L'association clairement identifiée des deux a été retrouvée 49 fois. Dans 85 % des cas, il s'agissait d'une scoliose lombaire et pour 80 % des cas inférieure à 30°. Discussion Notre étude confirme la rareté d'association des scolioses avec des hernies discales. La fréquence des scolioses dans une population adulte est d'environ 8 % [1] avec une augmentation du taux au fil de la vie. La fréquence des scolioses parmi nos patients atteints de hernies discales est de 2,2 % : nettement moins que dans la population générale. L'âge constitue probablement un biais statistique. La fréquence des hernies discales dans une population d'adulte est de 2 % [2]. La fréquence des hernies discales chez les patients porteurs d'une scoliose est, dans notre série, de 1,87 %. On peut donc dire que la scoliose n'entraîne pas de risque supplémentaire d'avoir une hernie discale. Par ailleurs, chez les patients atteints de hernie discale, une scoliose est rarement observée. L'association est particulièrement rare en cas de scoliose thoracique. La physiopathologie exacte des hernies discales et des scolioses reste en grande partie méconnue : dans ces deux maladies, une origine génétique est impliquée avec plusieurs gènes intéressés [3, 4]. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Rien n'indique dans l'étude génétique qu'il y ait une origine commune de ces deux affections. Y a-t-il des particularités de prise en charge des hernies discales associées à une scoliose ? Si la hernie est associée à une scoliose thoracique La prise en charge ne sera pas différente des cas habituels. Si la hernie est située sous une courbure lombaire ou thoraco-lombaire Le traitement ne sera pas non plus différent mais, en cas de chirurgie ultérieure de la scoliose, il faudra tenir compte de la première intervention, évaluer le disque et discuter d'une arthrodèse incluant le disque déjà opéré. Peut-on opérer une hernie discale sous une scoliose ? Il faut surtout distinguer une vraie hernie discale sur un disque horizontal à distance d'une courbure, d'une modification du contour discal (protrusion) dans une zone intéressée par la scoliose [5] : une telle déformation associée à une sténose latérale est fréquente dans les scolioses dégénératives ou dans la zone jonctionnelle d'une déformation idiopathique. La classification utilisée la plus fréquemment [6] ne tient pas compte de l'existence d'une scoliose ou de l'orientation des plateaux vertébraux. Il s'agit d'une question de définition : dans ces cas, on parlera volontiers de discopathies avec sténose latérale. La décision de ne faire qu'une décompression sans arthrodèse (limitée ou étendue) expose au risque d'une progression de la déformation [7, 8]. La décompression seule peut être proposée dans les courbures de moins de 20° [9]. Les longues arthrodèses exposent à un risque accru de discopathie [10]. Mais ce syndrome 138 S. Wolff Conclusion Les hernies discales ne sont pas plus fréquentes parmi les scolioses. L'association est particulièrement rare avec les scolioses thoraciques. Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé ences [1] Carter OD, Haynes SG. Prevalence rates for scoliosis in US adults : results from the first National Health and Nutrition Examination Survey. Int J Epidemiol 1987 ; 16 : 537–44. [2] Younes M, Béjia I, Aguir Z, Letaief M, Hassen-Zrour S, Touzi M, et al. Prevalence and risk factors of disk-related sciatica in an urban population in Tunisia. Jt Bone Spine Rev Rhum 2006 ; 73 : 538–42. [3] Mayer JE, Iatridis JC, Chan D, Qureshi SA, Gottesman O, Hecht AC. Genetic polymorphisms associated with intervertebral disc degeneration. Spine J 2013 ; 13 : 299–317. [4] Sharma S, Gao X, Londono D, Devroy SE, Mauldin KN, Frankel JT, et al. Genome-wide association studies of adolescent idiopathic scoliosis suggest candidate susceptibility genes. Hum Mol Genet 2011 ; 20 : 1456–66. [5] Aebi M. The adult scoliosis. Eur Spine J 2005 ; 14 : 925–48. [6] Fardon DF, Milette PC. Combined Task Forces of the North American Spine Society, American Society of Spine Radiology, and American Society of Neuroradiology. Nomenclature and classification of lumbar disc pathology. Recommendations of the Combined task Forces of the North American Spine Society, American Society of Spine Radiology, and American Society of Neuroradiology. Spine (Phila Pa 1976) 2001 ; 26 : E93–113. [7] Brodke DS, Annis P, Lawrence BD, Woodbury AM, Daubs MD. Reoperation and revision rates of 3 surgical treatment methods for lumbar stenosis associated with degenerative scoliosis and spondylolisthesis. Spine (Phila Pa 1976) 2013 ; 38 : 2287–94. [8] Cho KJ, Kim YT, Shin SH, Suk SI. Surgical treatment of adult degenerative scoliosis. Asian Spine J 2014 ; 8 : 371–81. [9] Ploumis A, Transfledt EE, Denis F. Degenerative lumbar scoliosis associated with spinal stenosis. Spine J 2007 ; 7 : 428–36. [10] Harding IJ, Charosky S, Vialle R, Chopin DH. Lumbar disc degeneration below a long arthrodesis (performed for scoliosis in adults) to L4 or L5. Eur Spine J 2008 ; 17 : 250–4. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés jonctionnel n'entraîne pas de hernie discale focale mais des sténoses centrales ou latérales. 139 Hernie discale et spondylolisthésis C. CISTAC Introduction L'association d'un spondylolisthésis et d'une hernie discale peut poser des problèmes diagnostiques et thérapeutiques. Problèmes diagnostiques car devant l'association d'une sciatique L5 et d'un spondylolisthésis L5-S1, il n'est pas toujours évident de déterminer l'origine de la radiculalgie : • hernie discale L4-L5, surtout si elle est migrée vers le bas ; • conflit radiculaire avec spondylolyse et nodule de Gill ; • hernie discale L5-S1, surtout si elle est migrée vers le haut. Le problème thérapeutique qui en découle : fautil traiter électivement la hernie ou systématiquement traiter les deux, que celle-ci soit à l'étage listhésique ou sus-jacent. La bibliographie est peu informative, relativement ancienne et apporte surtout des arguments épidémiologiques, mais ne permet pas de définir un consensus chirurgical. Au niveau du listhésis La fréquence de l'association est relativement homogène, selon les publications puisque Meyerding [1] rapporte 80 cas d'association de sciatalgie à un spondylolisthésis (dans une série de 745 cas allant de 1918 à 1939), dont 43 présentaient une hernie discale, tous traités par fusion. Rothman et al. [2] relatent 6 % de hernies associées à un spondylolisthésis, dans une série de 253 patients, et rapportent des taux de 4 % dans les travaux de Wiltse, Briggs et Keats. Poussa et Tallroth [3] publient trois cas de hernies discales associées à un spondylolisthésis, en raison de ce qu'ils considèrent cela comme une association rare. Une étude plus récente, de Dai [4], portant surtout sur la dégénérescence discale, avec IRM et groupe La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés contrôle, a permis de mettre en évidence la plus grande fréquence des lésions au niveau du disque listhésique, et que celle-ci était corrélée avec l'âge des patients, mais pas le degré de glissement (moyenne : 16,3 %, 4 à 67 % dans la série). Deutman et al. [5] considèrent que, sur une série de 31 patients présentant une sciatique associée à un spondylolisthésis, la saillie de tissu discale dans le foramen est rendue responsable de la sciatalgie. Schlenzka et al. [6] rapportent une étude IRM et discographique sur 27 adolescents porteurs de spondylolisthésis et trouve 100 % de disques pathologiques. Au niveau sus-jacent Les résultats sont assez discordants : • avec fréquence élevée dans l'étude discographique de Henson et al. [7] (30 % de hernies discales), et de Rothman [2], 21 % dans une étude scannographique ; • absence de différence significative dans les études de Rijk et al. [8], Dai [4] et Szypryt et al. [9]. Cette étude a fait l'objet d'une présentation au congrès de la Société française de chirurgie du rachis en 2008 à Bordeaux, et une analyse interactive de dossiers avait été soumise à la salle, trois dossiers caractéristiques ont été proposés à la discussion. Cas n° 1 Une femme de 42 ans présente une sciatique L5 gauche résistant au traitement médical prolongé. À l'imagerie, on observe la présence d'un spondylolisthésis L5-S1 grade 1 par lyse isthmique, et une hernie discale foraminale L5-S1 gauche (figure 23.1). Les questions proposées et les réponses de la salle ont été : • cure hernie discale : 8 % ; • cure hernie discale + reconstruction isthmique : 11 % ; • cure hernie discale + fusion : 81 %. 140 C. Cista Figure 23.2 Spondylolisthésis L5-S1 stade1, avec hernie discale L4-L5 gauche migrée vers le bas (A à C). Cas n° 2 Cas n° 3 Un homme de 44 ans présente une sciatique L5 gauche résistant au traitement médical prolongé (figures 23.2, 23.3). Les questions proposées et les réponses de la salle ont été : • cure hernie discale L4-L5 : 44 % ; • cure hernie discale L4-L5 + fusion L4-S1 : 44 % ; • cure hernie discale L4-L5 + reconstruction isthmique L5 : 12 %. Un homme de 29 ans présente une sciatique L5 droite résistant au traitement médical prolongé, dans le cadre d'un accident de travail, avec spondylolyse L3, L4 et L5 (figure 23.4). Les questions posées et les réponses de la salle ont été : • cure hernie discale L5-S1 : 52 % ; • cure hernie discale L5-S1 + reconstruction isthmique : 8 % ; © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 23.1 Hernie à l'étage listhésique (A à E). Hernie discale et spondylolisthésis 141 © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 23.3 Hernie discale L5-S1 migrée vers le haut et vers le foramen (A à D). Figure 23.4 Hernie discale L5-S1 migrée vers le haut et vers le foramen (A, B). • cure hernie discale L5-S1 + fusion L5S1 : 14 % ; • cure hernie discale L5-S1 + fusion L3-S1 : 25 %. Le patient a subi une discectomie simple, a eu des suites simples, mais a récidivé une sciatique droite six mois après l'intervention. L'IRM pratiquée a mis en évidence une récidive pulpaire au sein d'une petite fibrose non compressive (figure 23.5). Les questions proposées à la salle et les réponses ont été : • cure hernie discale : 25 % ; • cure hernie discale + fusion L5-S1 : 55 % ; • cure hernie discale + fusion L3-S1 : 20 %. Figure 23.5 Aspect de récidive pulpaire. Le patient a subi une discectomie + fusion L5-S1 en août 1996, il a repris ses activités à six mois, a été revu en 2005 et avait des activités normales, avec des lombalgies tout à fait minimes (figure 23.6). Contrôle à dix ans. 142 C. Cista Réfé Figure 23.6 Aspect à 9 ans de recul (A, B). Conclusion L'analyse des réponses laisse penser que le seul consensus qu'il est possible de dégager, est la justification d'une fusion lors du traitement d'une hernie discale au niveau de l'étage listhésique. La dispersion des réponses, avec approximativement autant de réponses pour la fusion et la non-fusion, en cas de hernie à l'étage adjacent, ne permet pas de définir un consensus. ences [1] Meyerding HW. Low backache and sciatic pain associated with spondylolisthesis and protruded intervertebral disc. J Bone Joint Surg 1941 ; 23 : 461–70. [2] Rothman SLG, Glenn WV. CT multiplanar reconstruction in 253 cases of lumbar spondylolysis. Am J Neuroradiol 1984 ; 5 : 81–90. [3] Poussa M, Tallroth K. Disc herniation in lumbar spondylolisthesis. Acta Orthop Scand 1993 ; 64(1) : 13–6. [4] Dai LY. Disc degeneration in patients with lumbar spondylolysis. J Spinal Disorders 2000 ; 13(6) : 478–86. [5] Deutman R, Diercks RL, Team de Jong, van Woerden HH. Isthmic spondylolisthesis with sciatica The role of disc. Eur Spine J 1995 ; 4 : 136–8. [6] Schlenzka D, Poussa M, Seitsalo S, Österman K. Intervertebral disc changes in adolescents with isthmic spondylolisthesis. J Spinal Disorders 1991 ; 4 : 344–52. [7] Henson J, Mccall IW, O'Brien J. Disc damage above a spondylolisthesis. Br J Radiol 1987 ; 60 : 69–72. [8] Pc Rijk, Deutman R, Team De Jong. Van Woerden HH. Spondylolisthesis with Sciatica. Clin Orthop Relat Res 1996 ; 326 : 146–52. [9] Szypryt EP, Twining P, Mulholland RC, Worthington BS. The prevalence of disc degeneration with neural arch defects of the lumbar spine assessed by MRI. Spine (Phila Pa 1976) 1994 ; 14(9) : 977–81. Déclaration d'intérêts © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. 143 Hernie discale et prothèse discale J. ALLAIN Introduction Certaines discopathies responsables de lombalgies s'accompagnent de protrusions discales intracanalaires potentiellement conflictuelles avec les racines nerveuses voir de véritables hernies discales (figures 24.1 et 24.2). Elles peuvent alors poser le problème de la stratégie de leur prise en charge chirurgicale. Par ailleurs, dans la pratique quotidienne, la frontière sémantique des analyses radiographiques entre une simple protrusion discale liée à une perte de hauteur de l'espace intersomatique et une véritable hernie n'est pas toujours parfaitement claire. Quoi qu'il en soit, certaines hernies s'accompagnent de lombalgies exclusives ou très prédominantes mais le résultat d'une discectomie isolée reste dans ce contexte très incertain. Enfin, le traitement chirurgical par discectomie seule de récidives de réelles hernies discales témoignant de la sévérité de la maladie discale causale expose au risque Figure 24.1 Discopathie L5S1 avec protrusion discale ne contreindiquant pas l'arthroplastie. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés de récidives itératives (3e épisode et plus) et peut donc sur le plan théorique justifier d'un geste radical incluant une discectomie radicale suivie de l'implantation d'une prothèse. La technique chirurgicale sera ici adaptée à cette situation particulière d'une hernie intracanalaire mais finalement peu différente de la pratique habituelle. Historique L'utilisation d'un abord antérieur pas laparotomie puis laparoscopie pour traiter les pathologies discales et en particulier les hernies L5-S1 n'est pas nouvelle. Sa technique conventionnelle et ses résultats ont déjà été décrits en 1968 par Hodgson et Wong [1] qui réalisaient des arthrodèses par abord antérieur dans ce contexte. Obenchain, en 1991, rapporta le Figure 24.2 Double discopathie L4-L5 et L5-S1. En L4-L5, signal Modic 1 avec hernie compatible avec une arthroplastie. J. All in premier la pratique d'une discectomie cœlioscopique pour hernie discale L5-S1 [2]. La première série de discectomies cœlioscopique pour hernie discale fut rapportée par Beurier et Cunci, chirurgiens français, en 1994 [3], puis Cloyd et d'autres équipes précisèrent la technique chirurgicale de cette intervention en 1995 [4,5]. Les premières tentatives d'associer au geste de discectomie un remplacement discal datent de 1955 où Cleveland introduisait dans l'espace intersomatique des billes de ciment (réalisées manuellement en peropératoire) puis par Fernstöm [6] en 1964 qui utilisait des billes d'acier afin de combler le vide discal créé par la discectomie. Le recours aux réelles arthroplasties discales modernes date lui des années 1980 à Berlin-est par Karen Buttner-Janz avec l'implantation de la prothèse SB Charité [7]. Par la suite, de nombreux modèles furent mis au point et utilisés dans la pathologie dégénérative discale (Prodisc, Maverick, Mobidisc, Mobidisc L). Néanmoins, pour tout ces auteurs, l'arthroplastie discale est avant tout un traitement de la discopathie et non pas de la hernie discale. Technique Pour nous, après l'exposition du rachis, l'implantation d'une arthroplastie discale comporte systématiquement trois temps opératoires : • réalisation d'une discectomie subtotale, les parties toutes latérales de l'annulus fibrosus devant être conservées afin de limiter les risques de blessure des veines iliaques d'autant qu‘elles participent à la stabilisation du segment instrumenté ; • ouverture et excision à la pince de Kerisson du grand ligament vertébral postérieur (sauf dans les rares cas où la hauteur discale est strictement normale et où il n'y a aucune protrusion endocanalaire du disque à l'imagerie, cf. ci-dessous) afin de visualiser la dure mère et d'explorer le canal vertébral à la recherche d'un fragment discal compressif éventuel ; • détermination de la taille, de la hauteur et de la lordose de l'implant puis fixation de celui-ci sous contrôle scopique. L'ouverture et l'excision du grand ligament vertébral postérieur ne sont pas systématiques pour tous les opérateurs. Néanmoins, nous pensons que ce geste permet de restaurer plus facilement la hauteur discale, limite le risque de fracture du coin postéro-inférieur de la vertèbre sus-jacente lors de l'impaction de la prothèse grâce à une meilleure ré-ouverture de l'espace intersomatique postérieur et que cette technique est la garant d'une bonne mobilité de l'étage instrumenté, ce qui reste dans tous les cas le but de l'implantation d'une arthroplastie. Seuls les cas de discopathie à hauteur de l'espace intersomatique conservée, sans aucune hernie ou même protrusion endocanalaire de tissu discal et avec une bonne mobilité sur les radiographies dynamiques pré-opératoires peuvent à notre avis dédouaner le chirurgien de l'ouverture du grand ligament vertébral postérieur. En cas de hernie vraie, celle-ci sera donc visualisée après ouverture du ligament puis retirée sous contrôle visuel ou grâce à un optique spécifique de vidéoscopie, classiquement à la pince à disque et surtout, dans le canal, avec un crochet et une curette dont la concavité est tournée vers le sac dural pour éviter sa blessure (figure 24.3A, B et C). Le tissu discal intracanalaire pourra être disséquée et/ou libérée de ses éventuelles adhérences à l'aide du crochet ou d'une curette angulée glissés au contact du mur vertébral postérieur. Lorsque la hernie est foraminale (figure 24.4), son exérèse devra être prudente car la visualisation de la racine y est difficile d'autant qu'un abondant saignement peut venir en cas de blessure des vaisseaux accompagnant la racine dans son trajet foraminal. Résultats Les résultats de l'ablation isolée des hernies discales lombaires par abord antérieur ont été décrits il y a bien longtemps par Beurrier [3]. Si elle était efficace sur les radiculalgies, ses effets sur les lombalgies semblaient beaucoup moins satisfaisants. Les résultats spécifiques de séries d'arthroplasties discales lombaires pour discopathie avec hernie discale ne sont pas rapportés dans la littérature mais la série de Beurier [3] et la chirurgie de la hernie discale cervicale prouve si besoin était l'efficacité du geste par voie antérieure sur la compression radiculaire par du tissu discal. Par ailleurs, l'évolution des douleurs radiculaires des séries de patients opérés par arthroplastie confirme ces résultats [8] (figure 24.5). On peut donc logiquement espérer traiter la lombalgie liée à la discopathie et la radiculalgie liée à une hernie discale associée par l'implantation d'une prothèse discale. Indications de prothèse discale en cas de hernie discale La symptomatologie clinique liée à une hernie discale lombaire est le plus souvent de type radiculaire, représentée classiquement par une sciatique ou une © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 144 Hernie discale et prothèse discale 145 © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 24.3 A, B, C. Contrôle peropératoire fluoroscopique d'une discectomie avec herniectomie par voie antérieure. cruralgie. Cette situation ne correspond donc pas à l'indication classique des arthroplasties discales. Le décret du 7 décembre 2011 du Journal officiel de la République française stipule ainsi que l'indication aux arthroplasties est la lombalgie discogénique, chronique et invalidante (…) et identifie, parmi leurs contre-indications, les radiculalgies prédominantes et les hernies discales exclues (ce qui est une évidence). On peut donc retenir comme indication validée par nos tutelles le patient lombalgique exclusif ou avec une lombalgie prédominant sur une radiculalgie présentant une discopathie avec une hernie discale non exclue. Par ailleurs, le cas des discopathies sévères avec plusieurs antécédents de discectomie pour hernies représente aussi parfois une très bonne indication aux arthroplasties afin d'éviter les ré-interventions itératives sources de brèches durales, de lésions radiculaires, d'infections, de lésions musculaires postérieures d'aggravation progressive et de lombalgies invalidantes. Indications d'arthrodèse lombaire en cas de hernie discale Dans les cas recensés précédemment à propos des arthroplasties discales, la réalisation d'une discectomie isolée risque d'aboutir à un échec. Principalement, soit du fait du risque de récidive de hernies, soit par crainte de lombalgies séquellaires invalidantes. Toutefois, dans certains cas, le recours à une arthroplastie discale n'est pas logique, voir contre-indiqué. Une arthrodèse lombaire segmentaire peut alors être 146 J. All in chaînes ganglionnaires aorto-iliaques…), c'est tout particulièrement l'aspect des facettes articulaires qui pourra amener le chirurgien à recourir aux arthrodèses plutôt qu'aux arthroplasties. La présence d'une arthrose facettaire ou d'une franche asymétrie de leur orientation, pourvoyeuse d'un dysfonctionnement prothétique, doit éliminer la solution des arthroplasties au bénéfice des arthrodèses lombaires. Conclusion Figure 24.4 Hernie discale foraminale. Certaines discopathies lombaires associées à de véritables hernies discales responsables de lombalgies prédominantes sur les radiculalgies et certaines récidives de réelles hernies discales peuvent justifier d'un geste de discectomie radicale qui ne peut être réalisée que par voie antérieure, suivie de l'implantation d'une prothèse discale. La technique chirurgicale comportera l'ouverture du grand ligament vertébral postérieur suivi d'une exploration canalaire puis de l'herniectomie. Bien que non spécifiquement isolées dans les séries de la littérature, les résultats des arthroplasties discales pour discopathie incluant une hernie discale (non exclue) nous paraissent dans notre expérience peu différents des cas de discopathie isolée. Déclaration d'intérêts Les auteurs de ce chapitre déclarent n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Figure 24.5. Évolution des EVA lombalgie et radiculalgie après arthroplastie discale [8]. réalisée. Elle le sera le plus souvent par voie postérieure, abord le plus classique pour pratiquer l'ablation de la hernie discale, mais reste possible par un abord antérieur pur (en particulier pour L5S1), oblique, ou latéral (disques sus-jacents). L'abord antérieur, oblique ou latéral aura ici l'intérêt de réaliser une discectomie extensive sous contrôle visuel. En dehors des contre-indications classiques des abords antérieurs lombaires interdisant les techniques d'arthroplasties discales (obésité morbide, antécédent de chirurgie aorto-iliaque avec implantation de prothèse, anévrysme aortique non opéré, irradiation des ences [1] Hodgson AR, Wong SK. A description of a technic and evaluation of anteriour spinal fusion for deranged intervertebral disckland spondylolisthesis. Clin Orthop 1968 ; 56 : 133–62. [2] Obenchain TG. Laparoscopic lumbar discectomy-case report. J Laparo Endoscopy Surg 1991 ; 145–9. June 1-3. [3] Beurier J, Cunci B. Discectomie L5-S1 sous contrôle laparoscopique. Rachis 1994 ; 6 : 99–106. [4] Cloyd DW, Obenchain TG, Savin M. Transperitoneal laparoscopic approach to lumbar discectomy. Surg Endosc 1995 ; 9 : 826–9. [5] Slotman GJ, Stein SC. Laparoscopic laser lumbar discectomy : operative technique and case report. J Laparo Endoscopy Surg 1991 ; 1(3) : 145–9. June. [6] Fernstöm U. 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Ces deux entités sont rares chez l'enfant et l'adolescent, bien qu'elles aient beaucoup de points communs, notamment en termes d'étiologie et de symptomatologie, nous discuterons ces deux pathologies dans des chapitres distincts pour la clarté de l'exposé. Hernie discale (isolée) Épidémiologie La hernie discale est rare chez le sujet jeune. Sa topographie est majoritairement L4-L5 et L5-S1. La première description chez le sujet en croissance a été faite par Mixter et Barr en 1934, Wahren en 1945 a écrit la première publication de chirurgie chez un patient de 12 ans. La hernie survient au moment de la poussée pubertaire ou après. Son pic de fréquence se situe dans la tranche 15–18 ans. Avant l'âge de 10 ans, seuls neuf cas ont été publiés. S'il ne semble pas exister de prédominance selon le sexe, les filles sont susceptibles de faire une hernie plus tôt en raison d'une maturation précoce par rapport aux garçons (11–15 ans pour les filles et 13–17 ans pour les garçons). associées à type de spina bifida occulta, vertèbre transitionnelle (sacralisation ou lombalisation), spondylolisthésis ou sténose du récessus [4]. Classification La hernie est classée en trois types : la protrusion discale qui correspond à un bombement du disque dans le canal, l'extrusion qui correspond à un passage du contenu discal à travers l'annulus fibrosus, avec un respect de la continuité du disque, la séquestration qui correspond à une expulsion du matériel discal sans connexion avec le disque d'origine. En fonction de la localisation, on distingue des formes : centrale, paracentrale, foraminale et extraforaminale (figures 25.1, 25.2). Chez l'enfant, la forme la plus fréquente est la protrusion discale centrale ou paracentrale. Présentation clinique La présentation clinique se rapproche de celle de l'adulte. Dans 60 % des cas, on retrouve un antécédent traumatique [5]. Les symptômes apparaissent dans les heures suivant le traumatisme, avec initialement des lombalgies puis des radiculalgies. Ainsi, 88 % des sujets se présentent avec une lombalgie isolée ou associée, 35 % présentent une sciatique [6]. La douleur s'exacerbe en flexion, contrairement à la spondylolyse qui est une cause fréquente de lombalgie Étiologie La survenue d'une hernie est favorisée par le port répété ou inadapté de charges lourdes, par des chutes durant les activités sportives ou par un surmenage sportif. L'atteinte de l'annulus fibrosus est liée à une augmentation de la pression intradiscale, elle permet le passage de fragments de disque. La pression augmente dans les mouvements de flexion et de rotation ou en cas de compression axiale. Il existe un facteur familial prédisposant. Treize à 57 % des parents du 1er degré ont un antécédent de hernie discale [3]. On peut retrouver des anomalies La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 25.1 Hernie foraminale L5-S1 gauche, fille de 14 ans, avec lombo-sciatique gauche. Coupes IRM para-sagittale (A) et axiale T2 (B). 148 J. Sale De Gauzy, R. Com a non reprises dans les limites de la douleur. Concernant le sport, il est préférable au départ d'éviter les mouvements de flexion-extension et les sauts qui augmentent la pression intradiscale. Concernant l'injection épidurale de corticoïdes, ses effets sont peu connus chez le jeune. La mise en place d'un corset peut être proposée, mais ne doit pas être systématique en raison de son retentissement sur la musculature lombaire. chez le jeune mais qui est responsable d'une douleur qui s'exacerbe en extension. La manœuvre de Lasègue est douloureuse dans 90 % des cas. La hernie peut être responsable d'un trouble postural, avec notamment une attitude scoliotique qui est retrouvée dans 18 % des cas [6]. Le syndrome postural disparaît à la résolution de la hernie [5]. Une rétraction des muscles ischiojambiers, avec un angle poplité inférieur à 45°, est fréquente, surtout en cas de lombalgie importante. Diagnostic différentiel La fracture du ring apophysaire est une forme frontière avec la hernie isolée. Elle doit toujours être suspectée chez le jeune. Parmi les causes de lombalgies chez le jeune, on peut citer : le spondylolisthésis, l'épiphysite vertébrale de la région thoraco-lombaire avec cyphose jonctionnelle (Scheuermann lombaire). Les autres diagnostics qui peuvent être évoqués sont : un syndrome du muscle piriforme, une infection ou une tumeur. Imagerie Le bilan initial comporte souvent des radiographies de face et de profil. Elles permettent d'évaluer un trouble statique ou de retrouver une anomalie associée comme un spondylolisthésis, une spina bifida occulta ou une fracture apophysaire. L'IRM est l'examen de choix pour le diagnostic de hernie discale. Traitement Traitement conservateur Sauf cas particulier avec atteinte neurologique, le traitement de première intention doit être conservateur. Il associe repos, physiothérapie, traitement antalgique et anti-inflammatoire avec parfois un myorelaxant pendant quelques semaines. Puis les activités peuvent être Traitement chirurgical Le traitement chirurgical est indiqué en cas d'échec du traitement médical bien conduit ou d'un déficit neurologique. Le syndrome de la queue de cheval est heureusement extrêmement rare chez l'enfant. Sur le plan technique, la discectomie est plus difficile chez le sujet jeune. Le disque est souvent bien hydraté et moins facile à extraire, notamment au stade de protrusion. Une exposition large est utile afin d'éviter un étirement de la racine. En cas de hernie paracentrale, une hémi-laminotomie ou une hémi-laminectomie est souvent suffisante. Une hernie centrale nécessite une laminotomie bilatérale ou une laminectomie complète. Les techniques endoscopiques sont peu utilisées chez l'enfant. Les quelques résultats rapportés dans la littérature sont mitigés, soulignant le risque de décompression incomplète. La chirurgie ouverte reste la technique standard chez l'enfant. Une fusion associée à la discectomie n'est pas recommandée, sauf dans les cas particuliers d'instabilité. Résultats La littérature montre que l'enfant répond moins bien au traitement médical que l'adulte [3, 6]. Plusieurs raisons ont été évoquées : le disque a une moindre tendance à dégénérer et à se résorber, l'existence d'une fracture associée du listel non diagnostiquée, le manque d'observance du traitement médical de la part des enfants et des adolescents. Dans une série de 28 patients, Cahill et al. rapportent des résultats intéressants du traitement conservateur pour la douleur, mais ces patients ont finalement été opérés [7]. Les résultats à court terme de la chirurgie sont excellents. À un an, on retrouve 90 % d'excellents ou bons résultats [4, 6, 8]. Quatre patients sur 87 ont nécessité une reprise en moyenne 14 mois après la chirurgie initiale [7]. Parisini et al. rapportent dans une série de 129 patients, 95 % d'excellents et bons résultats en postopératoire immédiat, à 12 ans de recul, 87 % des 98 patients revus gardent ce même résultat [9]. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 25.2 Hernie paracentrale L4-L5 gauche, fille de 16 ans avec lombo-sciatique gauche. Coupes IRM para-sagittale (A) et axiale T2 (B). 149 Hernie discale du jeune Smorgick et al. trouvent un bon ou excellent résultat dans 65 % des cas neuf ans après la chirurgie [10]. Cependant, la qualité du résultat se dégrade avec le temps. Luukkonen et al. trouvent à six ans de recul une persistance de symptômes dans sept cas sur 12, associé à un rétrécissement canalaire [11]. Une récidive des douleurs n'est pas rare. Pour Papagelopoulos et al., parmi 72 patients opérés, 39 (54 %) gardent un inconfort et une limitation des activités. À 28 ans de recul, 20 patients (28 %) ont nécessité une autre intervention [5]. Dans la littérature le taux de réopérations est compris entre 0 et 28 % [6]. Fracture du listel Le listel débute son ossification entre 4 et 6 ans, il est séparé du corps vertébral par une bande de cartilage hyalin, il fusionne avec le corps vertébral entre 18 et 25 ans. Il est solidement attaché à l'annulus par les fibres de Sharpey. Ainsi la jonction entre le listel et le corps vertébral représente une zone de faiblesse qui peut être traumatisée en aigu ou avec des épisodes micro-traumatiques répétés [12]. L'association fracture du listel-hernie discale est fréquente chez l'adolescent et le jeune adulte : 28 % dans la série de Chang et al. [1], 31 % dans la série de Seo et al. [2]. La localisation est lombaire basse, 43 % en L4-L5 et 49 % en L5-S1, 49 et 7 % au niveau lombaire supérieur. Cette localisation, identique aux hernies discales isolées, fait suspecter un mécanisme similaire. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Épidémiologie La majorité des fractures du listel surviennent entre 15 et 25 ans : 25 % dans la 2e décade, 44 % dans la 3e et 31 % dans la 4e, avec des extrêmes entre 16 et 39 ans [13]. Les garçons sont plus fréquemment atteints avec un sex-ratio de 3:1, qui s'explique par la pratique plus fréquente d'activités sportives à risque chez les garçons. La fréquence des fractures du listel est difficile à estimer, d'autant qu'il existe des formes frontières ténues entre hernie discale et fracture du listel. D'après la littérature, la fracture du listel représente 5 à 8 % des patients qui présentent une hernie discale. Chez l'enfant, le taux est de 5 à 28 %. Cependant, la fréquence semble sous-estimée chez l'adulte jeune [2], avec parfois un diagnostic erroné de calcification discale, d'ossification du ligament longitudinal postérieur ou d'ostéophyte. Dans une série de 140 hernies discales entre 19 et 25 ans, Seo et al. trouvent 43 cas (31 %) entre 19 et 25 ans de fracture du listel, chez l'adulte jeune, ils recommandent, en complément de l'IRM, la réalisation systématique d'un scanner pour rechercher une fracture du listel associée [2]. Étiologie Une cause traumatique est retrouvée dans 50 à 60 % des cas [4, 12]. Un accident de sport est la cause la plus fréquente. Il peut aussi s'agir de microtraumatismes. Pendant la phase d'ossification, les exercices responsables d'une compression associée à un stress en extension ou en flexion fragilisent la zone du listel et peuvent aboutir à une fracture de fatigue et à une avulsion [12]. Une autre hypothèse est la fragilisation entraînée par la dégénérescence du disque intervertébral, ce qui explique l'association fracture et hernie et sa survenue chez l'adulte. Pour certains, de telles lésions peuvent survenir chez l'adulte après fusion du listel au corps vertébral [4, 13], pour Savini et al. [14], il s'agit de lésions de l'adolescent ou de l'adulte jeune qui se sont consolidées et qui se dévoilent à l'âge adulte. Classification La classification de Takata et al. [15] est la plus utilisée (figure 25.3). Le type 1 correspond à une séparation entre le listel et la vertèbre sans atteinte osseuse, le type 2 associe une fracture entre le listel postérieur et le corps vertébral, le type 3 correspond à une fracture de petite taille latéralisée. Les types 1 et 2 se retrouvent plus chez le sujet jeune, alors que le type 3 est plus fréquent chez l'adulte. D'autres classifications ont été décrites en fonction de la mobilité du fragment ou de la taille et de la localisation du fragment. Présentation clinique Le patient présente un antécédent traumatique aigu ou chronique. La symptomatologie est identique à celle de la hernie discale isolée, elle est souvent plus sévère en raison de la majoration de la compression par le Type I Type II Figure 25.3 Classification de Takata d'après [15]. Type III 150 J. Sale De Gauzy, R. Com a non fragment osseux. L'irradiation sciatique peut être bilatérale et s'accompagner d'une claudication intermittente. La manœuvre de Lasègue est douloureuse pour un angle faible. Imagerie Le diagnostic peut être difficile sur les radiographies quand le fragment est peu volumineux ou peu ossifié. Selon les séries, le diagnostic est fait sur les radiographies dans 16 à 69 % des cas (figure 25.4). Le scanner est l'examen de choix, il permet le diagnostic et évalue la taille, la forme et la localisation du fragment. L'exploration de la lésion par IRM est moins utilisée car la discrimination entre fragment osseux, disque et ligament longitudinal postérieur est moins performante (figure 25.5). Traitement Traitement conservateur L'indication dépend de la taille du fragment, de sa localisation et de la symptomatologie. Un fragment central ou un fragment latéral de petit volume peuvent faire l'objet d'un traitement orthopédique selon les mêmes principes que pour une hernie discale isolée. Le traitement associe : repos, antalgiques, anti-inflammatoires, rééducation, physiothérapie, limitation des activités physiques et corset. Figure 25.4 Radiographie de rachis de profil, fille de 14 ans lombosciatique depuis trois semaines suite à une chute de 2 mètres. Fragment vertébral (flèche). L'indication chirurgicale est plus fréquente en cas de fracture du listel qu'en cas de hernie discale isolée. Il existe une controverse sur la résection de la hernie, du fragment osseux ou des deux associés. S'il est laissé en place, le disque peut comprimer la racine ou bien dégénérer et être responsable de douleurs d'origine discale. Beaucoup préconisent l'ablation du fragment osseux et de la hernie. Pour d'autres, une discectomie permettant une décompression est suffisante. Si le fragment osseux est mobile, il est préférable de le réséquer, s'il est immobile il faut apprécier s'il est responsable d'un conflit ou pas [12, 13]. La voie d'abord postérieure est la technique de choix. Il est nécessaire de réaliser une hémi-laminectomie ou une hémi-laminotomie. Elle doit être bilatérale si le fragment est central. L'ablation du fragment osseux est techniquement plus difficile que l'ablation d'une hernie. Il est important de réaliser une planification préopératoire avec détermination de la taille et de la localisation du fragment. Il n'est pas nécessaire de réaliser de fusion intersomatique, sauf cas particulier. Figure 25.5 Fracture du listel postérieur type 2 de Takata. Garçon de 14 ans, lombosciatique d'apparition brutale, non traumatique, hyperalgique avec déficit sensitif. Coupe axiale TDM (A), coupes sagittales TDM et IRM (B, C). © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Traitement chirurgical Hernie discale du jeune Résultats Les résultats des traitements, chirurgical et conservateur, sont identiques à 15 ans de recul [16]. Il n'y a cependant pas de résorption spontanée du fragment osseux. Les résultats du traitement chirurgical des fractures du listel sont identiques à ceux des hernies discales isolées. Conclusion La hernie discale est rare chez le jeune, elle est fréquemment associée à une fracture du listel, d'où l'intérêt en cas de doute de réaliser un scanner. Le traitement conservateur est moins efficace que chez l'adulte. Le traitement chirurgical est techniquement plus difficile, qu'il s'agisse d'une hernie isolée ou associée à une fracture du listel. Déclaration d'intérêts Les auteurs de ce chapitre déclarent n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé ences © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés [1] Chang CH, Lee ZL, Chen WJ, Tan CF, Chen LH. Clinical Significance of Ring Apophysis Fracture in Adolescent Lumbar Disc Herniation. Spine (Phila Pa 1976) 2008 ; 33 : 1750–4. [2] Seo YN, Heo YJ, Lee SM. The Characteristics and Incidence of Posterior Apophyseal Ring Fracture in Patients in Their Early Twenties With Herniated Lumbar Disc. Neurospine 2018 ; 15 : 138–43. [3] Dang L, Liu Z. A review of current treatment for lumbar disc herniation in children and adolescents. Eur Spine J 2010 ; 19 : 205–14. [4] Epstein NE, Epstein JA. Limbus lumbar vertebral fractures in 27 adolescents and adults. 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Chez le sportif, le délai opératoire habituel peut varier : • plus court, en cas d'urgence (déficit moteur, queue de cheval), ou de pressions extérieures de l'entourage ; • parfois plus long, du fait de tergiversations également dues en grande part à l'environnement (clubs, fédérations, etc.). C'est ainsi que, chez le sportif, la décision opératoire sera souvent parasitée par de nombreux éléments extérieurs : • enjeux économiques et sportifs ; • pressions diverses ; • interférences de l'entourage ; • échéances de calendrier. Données de la littérature Dans une étude réalisée sur 21 sportifs compétiteurs [5], opérés pour discectomie et admis au centre de rééducation de Cap Breton, Savalli et al. font état de 19 patients (90 %) qui ont repris le sport et 18 (85 %) la compétition. La reprise de la compétition n'a pas été possible pour deux patients, du fait de douleurs lombaires résiduelles (9,5 %). Dans cette série, la reprise de l'entraînement est intervenue en moyenne à 133 jours (60–281) et pour onze sportifs (55 %) dans les quatre premiers mois postopératoires. La reprise de la compétition a été effective en moyenne à 175 jours (100–286). Parmi les opérés, 55 % ont repris la compétition dans les six premiers mois. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés La reprise s'est effectuée au niveau antérieur pour 48 % des opérés et à un niveau moindre pour 33 %. De Lecluse et al. ont rapporté une série de dix sportifs de compétition [1] opérés d'une lomboradiculalgie, avec des résultats similaires. Neuf ont repris leur sport, en moyenne trois mois après l'intervention. Cinq ont repris la compétition en moyenne à 5,5 mois postopératoire. Cette étude conclut que, globalement, un sportif opéré par discectomie a plus de trois chances sur quatre de reprendre des activités sportives, une chance sur deux de reprendre la compétition et plus d'une chance sur trois de retrouver son niveau antérieur. L'expérience de la Clinique du sport à Paris confirme les données des études précédentes. Notre série comprend dix sportifs compétiteurs (judo, football, tennis, volley, équitation) avec une moyenne d'âge de 27,5 ans (17–40). Neuf ont repris le sport, huit au niveau compétition et sept au niveau antérieur. La reprise de l'entraînement s'est effectuée en moyenne au 3e mois et la compétition vers le 5e mois (2–10). Une récidive précoce (judoka pris dans une altercation à j + 3 semaines, soit avant le délai de cicatrisation discale) a nécessité une réintervention suivie d'un bon résultat. La reprise précoce de la compétition à deux mois a été le fait d'un cavalier professionnel. Il n'existe pas de vérité absolue en matière de suites opératoires. À la Clinique du sport à Paris, le protocole de suivi postopératoire est adapté au cas par cas pour chaque sportif et, notamment pour le haut niveau, dans une gestion commune de l'équipe médico-chirurgicale et du staff sportif. Schématiquement, les quatre premiers mois postopératoires s'articulent ainsi : • le 1er mois : retour à une vie quotidienne normale, sans effort ; • à partir du 2e mois : début de la rééducation et reprise des sports de non contact (vélo, natation) ; • à partir du 3e mois : reprise des sports de non contact (vélo, natation) ; • à partir du 4e mois : reprise des sports de contact. P. Garçon Au final, et selon les données de la littérature [6, 7], la chirurgie discale permet chez le sportif compétiteur : • une reprise du sport, dans près de 90 % des cas, avec un retour à la compétition dans environ 85 % ; • un retour au niveau antérieur possible dans un cas sur deux, d'autant plus que le niveau est élevé ; • la reprise de l'entraînement en moyenne vers le 4e mois ; • le retour à la compétition vers le 6e mois. Conditions de la reprise sportive La reprise du sport est soumise à de nombreux facteurs pronostiques, pré-, per- et postopératoires [3]. Les facteurs préopératoires, hormis la durée d'évolution des symptômes, très variable chez le sportif, ne sont pas spécifiques de l'activité sportive. Toutefois, parmi les facteurs préopératoires de bon pronostic, rappelons : • la cohérence du tableau radioclinique, surtout quand la radiculalgie prédomine sur la lombalgie ; • le jeune âge. À l'opposé, seront prédictifs d'un moins bon résultat : • l'importance de la durée d'évolution des symptômes préopératoires ; • les antécédents chirurgicaux, au même étage, ou à un autre niveau ; • un déficit moteur ou, a fortiori, un syndrome de la queue de cheval. Certaines constatations peropératoires (racine très inflammatoire, saignement important, brèche duremérienne) n'augurent pas d'une reprise sportive facile mais ne sont pas, non plus, propres à la pratique sportive. En revanche, de nombreux facteurs postopératoires [4] pourront avoir une influence sur les conditions du retour au sport : • l'état d'esprit du sportif est un atout, sa motivation étant en général au-dessus de la moyenne ; • la qualité de la prise en charge en rééducation, très variable, et qui ne fait pas l'objet d'un franc consensus ; • le type de sport pratiqué, notamment s'il s'agit de sport de contact (rugby, foot, basket, judo, etc.) dont la reprise sera gérée plus prudemment et avec plus d'exigence en termes de préparation physique [8] ; • enfin, et surtout, la notion de douleur lombaire résiduelle. Chez le sportif, un score d'EVA supérieur ou égal à 3 est un élément de mauvais pronostic (16 % de chance de reprise de la compétition). Rééducation du sportif opéré Elle est variable, autant selon les auteurs qu'en fonction du sport pratiqué [9]. Globalement, elle doit permettre d'accompagner le sportif dans sa convalescence et plutôt de le freiner que de le stimuler. L'objectif principal est de restaurer un capital musculaire de qualité, plus ou moins amoindri autant pendant les périodes de déconditionnement préopératoire et de repos postopératoire, que par l'acte chirurgical en lui-même, aussi peu invasif soit-il. Skall et al. [6] ont démontré la supériorité d'un programme de rééducation intensif et dynamique de renforcement des muscles du tronc, débuté à cinq semaines de l'intervention, avec des résultats statistiquement meilleurs à ceux d'un programme de rééducation traditionnel doux. Kjellby-Wendt et Styf [10] ont montré l'intérêt d'une rééducation précoce, avec des exercices en flexion passive à partir de la 4e semaine et flexion active à la 7e semaine. Critères de reprise du sport Le délai de cicatrisation discale est une donnée non négociable. Il est en moyenne de six semaines, pendant lesquelles toute contrainte en cyphose, tant dans la vie quotidienne que dans les exercices de rééducation, est proscrite. Cette période de six semaines incompressibles est le délai minimum requis avant d'envisager une reprise de la compétition, quel que soit le sport pratiqué [2]. La récupération des qualités analytiques du rachis (souplesse, endurance, bonne musculature) est également fondamentale avant la reprise du sport [11]. Des tests iso-cinétiques [12, 13] ont été proposés pour objectiver la récupération musculaire, à l'image de ce qui existe pour le genou. Enfin, le type de sport pratiqué doit aussi être pris en compte. Les sports peu contraignants pour le rachis (course, vélo, natation) seront repris plus précocement que les activités associées à des contraintes importantes (sports de contact, sports de combat) [7]. Programme type de reprise du sport après chirurgie discale Si le programme de reprise d'un sportif est affaire de cas particulier, il est néanmoins possible de dessiner un calendrier type : • à partir de la 3e semaine : reprise en douceur pour limiter les effets du déconditionnement musculaire ; © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 154 etour au sport après chirurgie discale lombaire • entre la 4e et 6e semaine: reprise des exercices de cardio training (vélo d'intérieur) et des exercices actifs en rééducation ; • à partir de la 6e semaine : reprise de la natation ; • à partir du 2e mois : reprise du jogging ; • à partir du 3e mois : reprise des sports sans contact ; • à partir du 4e mois : reprise des sports avec contact ; • à partir du 6e mois : reprise de la compétition. Profil du candidat idéal à la chirurgie Lorsque la chirurgie constitue une bonne option en cas de conflit disco-radiculaire rebelle chez le sportif, voici le profil type du candidat à un bon résultat : • sportif jeune, de haut niveau ; • sans antécédent ; • motivé ; • prise en charge précoce ; • bonne corrélation radioclinique ; • lésion à un seul étage ; • absence de lombalgie résiduelle ; • rééducation adaptée. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés En conclusion Il n'existe pas de dogme ou de norme s'agissant de critères de reprise du sport après chirurgie discale (14 ,15). C'est une affaire de cas par cas. Le délai incompressible et non négociable est celui de la cicatrisation discale. Il importe également que le sportif ne ressente plus aucune limitation dans sa vie quotidienne et que les activités de base (vélo, jogging, rameur) aient été reprises sans difficulté, avant d'envisager la reprise spécifique. Le type de sport est bien évidemment également à considérer, la prudence étant à la mesure des contraintes mécaniques associées à chaque discipline. Un programme de réathlétisation sera nécessaire avant la reprise de certains sports, techniques ou de contact (rugby, tennis, judo). La douleur lombaire résiduelle est un frein à la reprise de la compétition mais ne constitue pas une contre-indication absolue. Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé 155 ences [1] De Lecluse J, Leang R, Bouchet T, Herman S. Cure chirurgicale des hernies discales chez le sportif. Évolution à moyen terme à propos de 10 cas. J Traumatol Sport 1999 ; 16 : 72–6. [2] Overley SC, McAnany SJ, Andelman S, Patterson DC, Cho SK, Qureshi SA, et al. Return to play in elite athletes after lumbar microdiscectomy : A meta-analysis. Spine (Phila Pa 1976) 2016 ; 41 : 713–8. [3] Reiman MP, Sylvain J, Loudon JK, Goode A. 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Définition Selon la définition officielle de l'International Association for the Study of Pain (IASP), « la douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite dans ces termes ». Et « La douleur chronique est une douleur persistant au-delà du temps habituel de guérison ». Douleur périoperatoire Pour améliorer la prise en charge de la douleur périoperatoire, il est préférable d'informer le patient oralement en pré-, puis en postopératoire. L'intensité de la douleur est évaluée et chiffrée, utilisant une échelle numérique ou verbale. Cette évaluation est faite en préopératoire, en salle de soins postinterventionnelle (SSPI). Le niveau de douleur est un critère de sortie de SSPI [1]. L'évaluation est poursuivie régulièrement en postopératoire. La prise en charge intègre la surveillance, la prévention et le traitement des effets indésirables. La prescription à la demande n'est pas recommandée [2]. L'analgésie multimodale fondée sur la combinaison de plusieurs analgésiques, permet d'obtenir une association au moins additive, voire synergique. L'analgésie multimodale a ainsi pour but d'associer différentes molécules ayant un mécanisme d'action différent dans l'espoir de renforcer l'analgésie postoLa hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés pératoire et/ou diminuer les besoins en analgésiques et leurs effets indésirables. L'infiltration cicatricielle est une technique d'analgésie locale. Elle consiste à administrer un agent analgésique directement dans les berges de la cicatrice chirurgicale et dans les masses musculaires afin de bloquer la transmission des influx douloureux par les terminaisons distales. Cette infiltration, à l'aide d'anesthésiants à effet prolongé type ropivacaïne, respectera les recommandations concernant les doses maximales d'anesthésiques locaux. Elle pourrait limiter l'apparition d'une composante neuropathique lombaire [2]. La douleur périoperatoire partage avec la douleur inflammatoire le risque de développement d'un état d'hypersensibilité liée à la douleur avec l'apparition d'une hyperalgésie et d'une allodynie. Les trois principales conséquences de l'hyperalgésie postopératoire sont la majoration des douleurs postopératoires, la majoration de la consommation d'opioïdes ou d'analgésiques postopératoires et l'incidence accrue des douleurs chroniques résiduelles. L'hyperalgésie postopératoire est la traduction clinique des phénomènes de sensibilisation du système nerveux qui exacerbent la douleur périoperatoire. Les fortes doses préopératoires d'opioïdes majorent la douleur, l'hyperalgésie et favorisent le développement de la tolérance aiguë à la morphine. Limiter la consommation d'opioïdes peropératoires permet de réduire le risque de tolérance aiguë à la morphine en postopératoire immédiat. Le récepteur N-méthyl-D-aspartate (NMDA) est impliqué dans les phénomènes de sensibilisation du système nerveux, l'administration d'un inhibiteur du récepteur NMDA permet de limiter l'hyperalgésie postopératoire. La kétamine est l'antagoniste compétitif du récepteur NMDA le plus efficace dans cette indication. La gabapentine en prémédication permet d'obtenir un effet d'épargne morphinique et une réduction des scores de douleur en postopératoire. Concernant la chirurgie ambulatoire, il faut développer une stratégie spécifique de l'évaluation et du traitement de la DPO à domicile. Pour la prise en 158 J.-L. Barat Douleur chronique postchirurgicale La douleur chronique postchirurgicale est définie par une douleur persistant plus de deux mois après une chirurgie, sans étiologie identifiée et sans continuité avec un problème préopératoire. Son incidence est difficile à estimer. Il faut donc prendre en compte la possibilité d'une chronicisation de la douleur postchirurgicale. Les facteurs de risque de chronicisation sont l'intensité de la douleur préopératoire, sa durée d'évolution, la présence de trouble moteur mais aussi la technique opératoire. Comme pour la préexistence d'une douleur préopératoire, une forte douleur périoperatoire, en particulier neuropathique, est prédictive d'un risque élevé de douleur chronique postchirurgicale. Diagnostiquer et prendre en charge rapidement une douleur neuropathique postopératoire est incontournable. Le questionnaire DN4 est l'outil de dépistage de référence (tableau 27.1) [3]. Évaluation de la douleur séquellaire Après une chirurgie d'hernie discale, la douleur radiculaire disparaît rapidement, l'évolution de la lombalgie est dépendante de l'état rachidien du patient. L'importance de la compression radiculaire, sa rapidité d'apparition, son temps d'évolution, la présence d'une atteinte motrice conditionnent la persistance ou la réapparition de douleur radiculaire et l'évolution vers une douleur neuropathique. La douleur neuropathique après chirurgie nécessite un bilan, comme cela est évoqué dans les chapitres précédents, pour éliminer toute récidive ou instabilité rachidienne nécessitant une prise en charge ciblée. Le diagnostic de douleur neuropathique est avant tout clinique et repose sur la reconnaissance d'une symptomatologie et de signes particuliers, qu'il faut savoir rechercher à l'interrogatoire et lors de l'examen clinique. L'évaluation et la prise en charge du patient se fait au mieux dans un centre pluridisciplinaire. De nombreux outils sont validés, le questionnaire DN4 est l'outil diagnostique le plus couramment utilisé. Il comprend dix items repartis en quatre questions, les deux premières reposent sur l'interrogatoire et recherchent la présence ou l'absence de sept symptômes douloureux. Les deux dernières s'appuient sur un examen standardisé de la sensibilité dans le territoire douloureux. Un score d'au moins 4/10 permet d'orienter vers le diagnostic de douleur neuropathique avec une spécificité de 89,9 %. Les patients atteints de douleur neuropathique justifient d'une prise en charge dans la première année de leur histoire douloureuse pour éviter un passage à la Tableau 27.1 Questionnaire DN4 : un outil simple pour rechercher les douleurs neuropathiques. Pour estimer la probabilité d'une douleur neuropathique, le patient doit répondre à chaque item des quatre questions par « oui » ou par « non ». Question 1 : la douleur présente-t-elle une ou plusieurs des caractéristiques suivantes ? Oui Non 1. Brûlure ◻ ◻ 2. Sensation de froid douloureux ◻ ◻ 3. Décharges électriques ◻ ◻ Question 2 : la douleur est-elle associée dans la même région à un ou plusieurs des symptômes suivants ? Oui Non 4. Fourmillements ◻ ◻ 5. Picotements ◻ ◻ © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés charge des patients en ambulatoire, les éléments prédictifs de la DPO et de la tolérance aux analgésiques prescrits à domicile sont appréciés et les modalités de l'analgésie orale sont expliquées dès la consultation spécialisée préopératoire (chirurgie, anesthésie). Les ordonnances d'antalgiques sont alors remises au patient. Ces ordonnances d'antalgiques précisent les horaires de prise d'antalgiques systématique et les conditions de recours aux antalgiques de niveau plus élevé si nécessaire. Gestion de la douleur après chirurgie de la hernie discale 6. Engourdissements ◻ ◻ 7. Démangeaisons ◻ ◻ 159 Question 3 : la douleur est-elle localisée dans un territoire où l'examen met en évidence : Oui Non 8. Hypoesthésie au tact ◻ ◻ 9. Hypoesthésie à la piqûre ◻ ◻ Question 4 : la douleur est-elle provoquée ou augmentée par : 10. Le frottement Oui Non ◻ ◻ Oui = 1 point ; non = 0 point. Score du patient : /10. Mode d′emploi : lorsque le praticien suspecte une douleur neuropathique, le questionnaire DN4 est utile comme outil de diagnostic. Ce questionnaire se répartit en quatre questions représentant dix items à cocher : – – – – le praticien interroge lui-même le patient et remplit le questionnaire ; à chaque item, il doit apporter une réponse par oui ou par non ; à la fin du questionnaire, le praticien comptabilise les réponses, 1 pour chaque oui et 0 pour chaque non ; la somme obtenue donne le score du patient, noté sur 10. Si le score du patient est égal ou supérieur à 4/10, le test est positif (sensibilité à 82,9 %, spécificité à 89,9 %). Source : d'après [3]. chronicité. Il est établi que des techniques comme la stimulation médullaire sont d'autant plus efficaces que le geste est réalisé tôt. La prise en charge doit se faire dans une unité d'évaluation et de traitement de la douleur. Ce centre fonctionne sur un modèle pluridisciplinaire. La douleur est évaluée sous toutes ses facettes et la modalité thérapeutique ne peut pas être unique. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Traitement de la douleur neuropathique raitement pharmacologique Les douleurs neuropathiques ne répondent pas aux antalgiques usuels (anti-inflammatoires non stéroïdiens [AINS], paracétamol, salicylés). D'autres classes pharmaceutiques ont fait la preuve de leur efficacité sur la base d'études contrôlées dans le traitement de ces douleurs. Il s'agit notamment des antidépresseurs et des antiépileptiques (duloxétine, carbamazépine, prégabaline, gabapentine, etc.). Au terme de plusieurs années de controverses, la plupart des auteurs considèrent que la douleur neuropathique peut être améliorée par les opioïdes forts. Cependant, les effets indésirables rendent compte d'un nombre élevé d'arrêts thérapeutique précoces. Par ailleurs, l'utilisation des morphiniques en périopératoire entraîne des comorbidités et réhospitalisation et des problèmes de tolérance aiguë. Les traitements locaux : la capsaïcine est utilisée dans les douleurs neuropathiques en patch. Cependant, l'HAS [4] considère que la capsaïcine n'apporte pas d'amélioration du service médical rendu dans la prise en charge des douleurs neuropathiques non diabétiques, et chez les patients en échappement thérapeutique aux traitements disponibles et recommandés. raitement médical non pharmacologique Techniques de neurostimulation NSTC L'intérêt de la NSTC (ou transcutaneous electric nerve stimulation [TENS]) pour soulager les douleurs chroniques a été rapporté pour la première fois par Wall et Sweet en 1967 [5]. La NSTC agit selon le principe de la théorie du gate control [6] : la stimulation des fibres afférentes de gros calibre (fibres A) inhibe l'activité des fibres de fin calibre an niveau de la corne dorsale de la moelle. C'est une technique simple d'utilisation sans effet indésirable dont la meilleure indication est la radiculopathie chronique. Stimulation magnétique transcrânienne répétitive (rTMS) La rTMS est une technique de stimulation du cortex qui consiste à appliquer un champ magnétique à la surface du scalp [7]. C'est une technique non invasive J.-L. Barat et totalement indolore. Les effets analgésiques pourraient faire intervenir un renforcement des systèmes de contrôle inhibiteurs intracorticaux de la douleur [8]. Autres prises en charge médicales Rééducation La rééducation s'inscrit dans un programme global de réentraînement à l'effort associé à une rééducation cognitive et visuomotrice. Autres prises en charge La psychothérapie a son importance dans le traitement de la douleur neuropathique compte tenu de la comorbidité associée à des troubles dépressifs et anxieux et de difficultés fréquentes d'adaptation à la douleur. Les thérapies cognitivo-comportementales (TCC) sont validées en douleur chronique [9]. L'hypnose, les techniques de relaxation, l'acupuncture peuvent également être un intérêt chez certains patients neuropathiques. raitement chirurgical : la stimulation médullaire épidurale (SME) La stimulation électrique médullaire est un instrument thérapeutique majeur dans le traitement de la douleur neuropathique postchirurgicale. Son mécanisme de base reste la théorie du « portillon » décrite par Wall en 1965 et Melzack en 1967 [5, 6]. De nouvelles formes d'ondes, de nouvelles électrodes et de nouvelles cibles permettent de couvrir un champ plus large d'indications. Comme nous l'avons déjà évoqué, la sélection du patient doit se faire avec rigueur et par une équipe pluridisciplinaire expérimentée. Le principe est d'implanter une électrode de stimulation en épidural. En fonction de l'indication et du type d'électrode, l'implantation se fera par voie percutanée ou chirurgicale. L'implantation chirurgicale se fait par un mini-abord interépineux dorsal, elle permet de mettre en place des électrodes larges de 8 à 32 plots (électrodes multicolonnes) selon les indications. L'implantation percutanée est moins invasive et se fait par ponction épidurale en L2-L3 pour monter une électrode filaire en thoracique. Par la suite, est réalisée une phase test d'une dizaine de jours. En cas de réponse positive à la stimulation, un stimulateur est implanté de façon définitive en sous-cutané. Selon le niveau de stimulation utilisé, il sera mis en place un système rechargeable. Il est fourni au patient une télécommande qui lui permet de gérer sa stimulation selon les programmes mis en place par le médecin. Il existe maintenant des systèmes (électrodes et générateurs) compatibles IRM. Un registre SME sur l'efficacité de la stimulation médullaire a été mis en place. Il a inclus 414 patients avec un suivi de deux ans : 60 % des patients ont une réduction significative de la douleur avec une diminution de la consommation des traitements dont les morphiniques. Les complications sont de trois ordres : • les complications biologiques : infection (d'autant qu'il y a une phase de test avec une électrode externalisée), hématome, ou fuite de LCS ; • les complications liées au matériel : migration d'électrode, déconnection, fracture d'électrode, dysfonctionnement du générateur implanté ; • douleurs du site d'implantation du stimulateur, perte d'efficacité, stimulation intermittente ou paresthésies inconfortables (de nouvelles formes de courant permettent de ne plus ressentir les paresthésies : haute densité ou burst). Stimulation médullaire et composante douloureuse lombaire Une nouvelle génération d'électrodes multicolonnes est actuellement proposée dans la composante douloureuse lombaire. Une étude : évaluation médico-économique de la stimulation médullaire multicolonnes (ESTIMET) est la première étude multicentrique, prospective, randomisée, analysant l'efficacité clinique et l'impact médico-économique de la SME multicolonnes chez des patients souffrant de lomboradiculalgies postopératoires (LRPO) réfractaires, avec une composante lombaire significative [10]. La stimulation médullaire multicolonnes permet de soulager ces patients qui présentent des douleurs radiculaires mais aussi lombaires. hérapie intrathécale La pharmacothérapie intrathécale utilisant une pompe à perfusion continue reste peu utilisée dans les douleurs chroniques neuropathiques en dehors des douleurs cancéreuses. Les produits injectés sont : les opiacés seuls ou en association, la clonidine, la bupivacaïne, la ropivacaïne, le baclofène, le ziconotide, etc. Les indications, la pose et le suivi nécessitent une prise en charge pluridisciplinaire. La prise en charge des douleurs chroniques après chirurgie d'une hernie discale doit recourir à une évaluation minutieuse de la douleur, les possibilités thérapeutiques sont multiples et nécessitent une prise en charge multidisciplinaire. Un patient douloureux peut © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 160 Gestion de la douleur après chirurgie de la hernie discale être considéré comme un patient difficile mais les possibilités thérapeutiques existent : l'écoute et l'observation restent incontournables. Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé ences © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés [1] Comité douleur-anesthésie locorégionale et le comité des référentiels de la Sfar. Formalized recommendations of experts 2008. Management of postoperative pain in adults and children. An Fr d'Anesth Reanim 2008 ; 27 : 1035–41. 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Ce constat a justifié la rédaction de recommandations de bonne pratique (HAS, 2013) [3]. En France, les lombo-radiculalgies sciatiques et crurales par hernie discale peuvent être reconnues au titre de la maladie professionnelle indemnisable [4]. En revanche, les critères restrictifs de reconnaissance conduisent à une sous-estimation du nombre de lombalgies en lien avec l'activité professionnelle. Des bases de données complémentaires permettent de surveiller leur évolution (enquêtes, Programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI), maladies à caractère professionnel, etc.) [5, 6]. La lombalgie génère des coûts humains et sociaux considérables en termes de douleur et d'inconfort sur le lieu de travail et dans la vie quotidienne ainsi qu'en termes de qualité de vie liée à la santé [7]. De plus, la lombalgie génère un handicap responsable de coûts directs (consommation de soins, indemnités journalières, etc.) et indirects (absentéismes, baisse de productivité et de qualité de la production, etc.) importants [8]. La lombalgie compte ainsi parmi les six principaux problèmes de santé en termes de coûts pour la société qui sont estimés entre 19,6 et 118,8 milliards de dollars par an (coûts directs et indirects) [9]. Pathologie discale et activité professionnelle Plusieurs études épidémiologiques ont montré une relation entre la discopathie dégénérative (hernie discale, amincissement du disque) visualisée par l'imagerie et les facteurs physiques professionnels, tels que le port de charges lourdes, la flexion du tronc ou les vibrations du corps entier [10]. La manutention manuelle de La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés charges lourdes génère une compression interne importante, ainsi que des forces de cisaillement et de torsion sur les vertèbres et les structures intervertébrales. Ces forces sont générées activement par contractions des muscles paravertébraux et passivement par les tissus conjonctifs paravertébraux [11]. L'évaluation directe des forces internes est techniquement impossible en dehors des études expérimentales exceptionnelles sur les pressions intradiscales [12]. En pratique, la charge biomécanique au cours des principales activités physiques sont décrites selon au moins trois dimensions : intensité des efforts ou des forces exercées, répétitivité des efforts et durée (cumulative) de la tâche. Par exemple, l'effort de tirer des chariots ou des palettes de manutention induit des forces de compression comprises entre 300 et 800 kg pour une traction de 200 Newton. L'exposition aux vibrations du corps entier est associée à un risque de lésions discales, plus particulièrement pour les fréquences comprises entre 2 et 10 Hertz, correspondant à la fréquence de vibration des engins de chantier par exemple. L'exposition aux vibrations est inhérente à de nombreux emplois dans lesquels les travailleurs conduisent des engins ou utilisent des machines vibrantes [10]. Données épidémiologiques Un observatoire des troubles musculo-squelettiques d'origine professionnelle a été mis en place depuis 2002, à l'initiative de Santé publique France et en collaboration avec l'université d'Angers. Avec 3,5 millions d'habitants et 1,3 million de travailleurs – soit 5,7 % de la population française – la région des Pays de la Loire est représentative de la population active française en termes de secteurs d'activités, de professions et d'expositions professionnelles. Les analyses des données recueillies par cet observatoire mettent en évidence un taux d'incidence moyen de hernies discales opérées de 1,6 % entre 2007 et 2010. En termes de catégorie socio-professionnelle, l'observatoire met en évidence un risque relatif ajusté sur l'âge (RRa) de chirurgie pour hernie discale de 1,5 (1,4–1,8) chez les hommes ouvriers, notamment de type A. Petit industriel ou artisanal et de la manutention, du magasinage et du transport. Chez les femmes, l'excès de risque s'observe chez les employées (RRa = 1,3 [1,4–1,8]), et notamment chez les employées civiles et agents de services de la fonction publique, les employées de commerce et les personnels des services directs aux particuliers. Les secteurs d'activités les plus à risque sont, chez les hommes, la construction et, chez les femmes, le transport et l'entreposage, l'hébergement et la restauration, et les activités de ménage [5, 6]. Chez les hommes actifs, l'incidence des hernies discales opérées varie de 0,7 ‰ (0,5–0,8) dans le secteur de la construction et de 0,6 ‰ (0,5–0,8) dans celui des transports à 0,2 ‰ (0,1–0,4) dans les services sociaux et l'immobilier (p < 0,0001). Concernant l'incidence des lombo-radiculalgies par hernies discale reconnues en maladie professionnelle, leur taux varie de 0,6 ‰ (0,5–0,7) dans la construction et de 0,4 ‰ (0,3–0,5) dans l'agriculture à 0,1 ‰ (0,1–0,1) dans l'immobilier (p < 0,0001). Chez les femmes actives, l'incidence des hernies discales opérées varie de 0,6 ‰ (0,3–0,8) dans le secteur des transports et de 0,5 ‰ (0,3–0,8) dans ceux de la santé et de la restauration à 0,2 ‰ (0,1–0,2) dans l'immobilier (p < 0,0001). Concernant l'incidence des lombo-radiculalgies par hernies discales reconnues en maladie professionnelle, leur taux relativement faible varie en fonction des secteurs d'activité, avec un maximum de 0,2 ‰ (0,1–0,2) dans l'industrie manufacturière (p < 0,0001) [6]. Indemnisation des lombalgies et hernies discales en lien avec l'activité professionnelle En France, une maladie est dite « professionnelle » si elle est la conséquence directe de l'exposition habituelle d'un travailleur à un risque physique, chimique, biologique, ou résulte des conditions dans lesquelles il exerce son activité professionnelle. L'article L.461-1 du code de la Sécurité sociale stipule que pour être reconnue comme professionnelle et donner lieu à réparation, une maladie doit, soit figurer dans l'un des tableaux de maladies professionnelles, soit être identifiée comme ayant un lien direct avec l'activité professionnelle par le système complémentaire de reconnaissance des maladies professionnelles. Le système d'assurance maladie français prévoit, depuis 1999, la reconnaissance de la lombo-radiculalgie par hernie discale au titre de la maladie professionnelle, selon les tableaux 97 (exposition professionnelle à des vibrations transmises au corps entier) et 98 (exposition professionnelle à des manutentions de charges lourdes) du régime général. Des tableaux similaires sont prévus pour le régime agricole, à savoir les tableaux 57 et 57bis, respectivement [4]. Ces tableaux de maladies professionnelles sont relativement restrictifs puisqu'ils exigent : • une évolution des symptômes pendant au moins trois mois et la mise en évidence d'une hernie discale d'étage concordant avec la radiculalgie par une imagerie en trois dimensions (TDM ou IRM) ; • une durée d'exposition aux risques (vibrations ou port de charges) pendant au moins cinq ans et un délai de prise en charge (compris entre la fin de l'exposition au risque et la 1re constatation médicale) de six mois ; • une liste limitative des travaux, c'est-à-dire une liste fermée des professions prises en compte (tableau 28.1). Bien qu'imparfaits, les tableaux de maladies professionnelles jouent un rôle important pour la prévention et l'indemnisation des affections en lien avec le travail. Ces tableaux sont établis par un consensus tripartite entre législateur, employeurs et salariés. La liste des maladies professionnelles indemnisables et les critères de reconnaissance varient considérablement d'un pays à l'autre et sont le reflet des caractéristiques sociales et culturelles du pays [13]. En 2012, parmi les pays membres de l'Organisation internationale du travail (OIT), les lombalgies et lombo-radiculalgies étaient l'une des affections qui présentait la plus grande hétérogénéité de critères de reconnaissance en maladie professionnelle ; elles comptaient également parmi les principales maladies indemnisables dans certains pays tels que le Danemark, le Japon et la Corée [14]. En France, les lombo-radiculalgies par hernie discale représentaient 7 % du total des maladies professionnelles reconnues au cours de l'année 2016. Les séquelles et l'incapacité en lien avec ces maladies professionnelles sont plus importantes que lorsque que la lombo-radiculalgie survient dans un autre contexte, avec une durée moyenne des arrêts de travail d'un an et un taux de 46 % des incapacités permanentes partielles (IPP) supérieures à 10 % (seuil donnant lieu au versement d'une rente) [15]. Concernant la sinistralité de la lombalgie au sens large (avec ou sans hernie discale objectivée) en milieu professionnel, ce sont les accidents de travail qui prédominent. L'assurance maladie prévoit en effet une reconnaissance au titre de l'accident de travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise (article L.411-1 du code de la Sécurité sociale). En 2016, 167 000 accidents de travail avaient pour motif une lombalgie, soit 20 % de l'ensemble des accidents de travail et 25 % si l'on considère les accidents avec © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 164 ncidence socio-professionnelle et coût social de la hernie discale 165 © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Tableau 28.1 Tableau n° 98 du guide des maladies professionnelles. Affections chroniques du rachis lombaire provoquées par la manutention manuelle de charges lourdes. Désignation de la maladie Délai de prise en charge Liste limitative des travaux susceptibles de provoquer ces maladies Sciatique par hernie discale L4-L5 ou L5-S1 avec atteinte radiculaire de topographie concordante Radiculalgie crurale par hernie discale L2-L3 ou L3-L4 ou L4-L5, avec atteinte radiculaire de topographie concordante 6 mois (sous réserve d'une durée d'exposition de 5 ans) Travaux de manutention manuelle habituelle de charges lourdes effectués : – dans le fret routier, maritime, ferrovière, aérien – dans le bâtiment, le gros œuvre, les travaux publics – dans les mines et carrières – dans le ramassage d'ordures ménagères et de déchets industriels – dans le déménagement, les garde-meubles – dans les abattoirs et les entreprises d'équarrissage – dans le chargement et le déchargement en cours de fabrication, dans la livraison, y compris pour le compte d'autrui, le stockage et la répartition des produits industriels et alimentaires, agricoles et forestiers – dans le cadre des soins médicaux et paramédicaux incluant la manutention de personnes – dans le cadre du brancardage et du transport des malades – dans les travaux funéraires arrêts de travail indemnisés (deux mois d'arrêt de travail en moyenne pour les accidents de travail). Ces chiffres sont en progression régulière au cours de la dernière décennie puisque leur part est passé de 13 à 20 % entre 2005 et 2015. Ces affections représentaient également 15 % des accidents de trajet en 2016 [15]. Au final, l'ensemble de ces accidents de travail et maladies professionnelles représentent un coût direct de plus d'un milliard d'euros par an pour la branche accident de travail/maladie professionnelle de l'assurance maladie, soit l'équivalent du coût de l'ensemble des autres troubles musculo-squelettiques. Ces coûts se décomposent en 120 millions d'euros liés aux soins, 580 millions d'euros liés aux indemnités journalières et 300 millions d'euros liés à l'indemnisation des séquelles sous forme de rente ou de capital. Les coûts indirects sont estimés à au moins trois à cinq fois les coûts directs [15]. Recommandations La Société française de médecine du travail (SFMT) et la HAS ont élaboré des recommandations pour la « Surveillance médico-professionnelle du risque lombaire chez les travailleurs exposés à des manipulations de charges » [3]. Ces recommandations abordent les différentes situations de prévention primaire, secondaire et tertiaire à destination des travailleurs exposés à des manutentions manuelles de charges lourdes avec ou sans antécédents de hernie discale et/ou de chirur- gie du rachis. Il est notamment recommandé de délivrer une information concernant le risque lombaire et la lombalgie car elle améliore les connaissances et fait évoluer positivement les représentations (« peurs et croyances ») et les comportements inadaptés (évitement du mouvement) liés à la lombalgie (grade B) ; expliquer et dédramatiser les éventuels termes médicaux et techniques compte tenu de l'absence de parallélisme anatomoclinique en cas de lombalgie commune ; délivrer une information rassurante quant au pronostic ; encourager à la poursuite ou à la reprise des activités physiques et, si possible, du travail en tenant compte des caractéristiques de la situation de travail et des possibilités d'aménagement du poste de travail (grade A) ; accompagner l'information d'un support écrit conforme aux préconisations actuelles (par exemple le « Guide du dos ») (grade A). Il est rappelé que le professionnel de santé soit attentif au contenu du message délivré (grade B), compte tenu de son impact potentiel sur les représentations et le comportement du travailleur. En l'absence de valeur prédictive de l'imagerie sur la survenue ultérieure d'épisodes lombalgiques, il n'est pas recommandé de faire pratiquer des examens d'imagerie lombaire à l'embauche (grade A). En cas d'antécédents de lombalgie commune « simple », c'està-dire n'entraînant pas d'incapacité fonctionnelle dans la vie privée et/ou au travail, il n'est pas recommandé d'émettre une contre-indication médicale à l'embauche sur un poste à risque lombaire. Dans les cas complexes 166 A. Petit [4] [5] [6] [7] [8] [9] [10] Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé ences [1] Balagué F, Mannion AF, Pellisé F, Cedraschi C. Non-specific low back pain. Lancet 2012 ; 379 : 482–91. [2] Parent-Thirion A. European Foundation for the Improvement of Living and Working Conditions. Fourth European Working Conditions Survey. In : Dublin : European Foundation for the Improvement of Living and Working Conditions ; 2007. [3] Roquelaure Y. Petit A et les 22 membres du groupe de travail. Surveillance médico-professionnelle du risque lombaire pour les travailleurs exposés à des manipulations de charges. In : [11] [12] [13] [14] [15] Société française de médecine du travail et Haute Autorité de santé ; Octobre 2013. INRS, editor. Les maladies professionnelles. Guide d'accès aux tableaux du régime général et du régime agricole de la Sécurité sociale. In : INRS ED 835. Paris : INRS ; 2016. p. 360. Fouquet N, Ha C, Bodin J, Chotard A, Bidron P, Ledenvic B, et al. Surveillance des lombalgies et de leurs facteurs de risque professionnels dans les entreprises des Pays de la Loire. Bull Epidemiol Hebd 2010 ; 5(6) : 48–51. Surveillance de la lombalgie en lien avec le travail : comparaison de quatre sources de données et perspectives pour la prévention. Saint-Maurice : Santé publique France ; 2018. p. 18. Burton AK, Balagué F, Cardon G, Eriksen HR, Henrotin Y, Lahad A, et al. Chapter 2. European guidelines for prevention in low back pain. Eur Spine J 2006 ; 15(Suppl 2) : S136–68. Becker A, Held H, Redaelli M, Strauch K, Chenot JF, Leonhardt C, et al. Low back pain in primary care : costs of care and prediction of future health care utilization. Spine (Phila Pa 1976) 2010 ; 35 : 1714–20. Dagenais S, Caro J, Haldeman S. A systematic review of low back pain cost of illness studies in the United States and internationally. Spine J 2008 ; 8 : 8–20. Williams FM, Sambrook PN. Neck and back pain and intervertebral disc degeneration : role of occupational factors. Best Pract Res Clin Rheumatol 2011 ; 25(1) : 69–79. Woldstad C, Ayoub MM, Smith JL. Models in manual materials handling. editor, In : Kumar S, editor. 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Chez les travailleurs lombalgiques exposés aux manipulations de charges, il est recommandé que la périodicité du suivi soit déterminée par le médecin du travail en fonction de la persistance de la lombalgie, son retentissement psychosocial et professionnel et l'évaluation des risques de la situation de travail. En cas de lombalgie persistante ou récidivante, il est recommandé (grade B) d'évaluer les facteurs pronostiques, à savoir les facteurs psychologiques et comportementaux (« drapeaux jaunes ») susceptibles d'influencer le passage vers la chronicité et les facteurs socio-économiques et professionnels (drapeaux « bleus » et « noirs ») susceptibles d'influencer l'incapacité prolongée et de retarder le retour au travail. 167 Aspects médico-légaux C. CISTAC Introduction La chirurgie de la hernie discale est certainement le geste de la chirurgie du rachis qui est le plus pratiqué. Il n'en reste pas moins que, même s'il s'agit d'un geste de réalisation technique relativement simple et courante, celui-ci expose son auteur à des risques médicolégaux qui ne sont pas anodins. Il faut d'emblée préciser ce que comporte ce risque médico-légal : un sinistre est défini par les assureurs depuis la loi About du 30 décembre 2002, comme étant une réclamation d'un patient (sinistre « base-réclamation » par opposition au sinistre « base-fait générateur »). Il y a donc une nuance entre les risques médicaux, représentés par les différentes complications, qui ont été exposées dans différents articles [1, 2], mais qui ne déboucheront pas forcément sur une réclamation du patient, et les risques médico-légaux, puisqu'il peut y avoir une procédure secondaire à une réclamation d'un patient, en dehors de toute complication médicale ou de toute faute (résultat jugé insuffisant par exemple). Un chirurgien peut ainsi présenter une sinistralité significative, en dehors de tout contexte de faute. Nous examinerons donc les causes les plus fréquentes de conflit dans la chirurgie de la hernie discale lombaire, avant d'évoquer l'information à apporter au patient. Motifs les plus fréquents de conflits dans la chirurgie de la hernie discale Une synthèse de la sinistralité des chirurgiens du rachis adhérents de la Mutuelle d'assurances du corps de santé français (MACSF) a fait l'objet de communications aux congrès de la Société française de chirurgie rachidienne (SFCR) de 2016 et 2017 [3, 4]. Cette institution assure approximativement trois quarts des neurochirurgiens et la moitié des chirurgiens du rachis orthopédistes. La sinistralité des chirurgiens du rachis est élevée, puisqu'ils sont confrontés à un peu plus d'une réclamation par an, alors que le taux de sinistralité toutes spécialités chirurgicales confondues est d'un sinistre tous les deux ans. La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Les motifs de réclamation relevés sont, par ordre de fréquence : • infection postopératoire : 28 cas ; • douleur résiduelle : 24 cas ; • séquelle neurologique : 22 cas ; • brèche méningée : 6 cas ; • défaut d'information : 4 cas ; • autres : 5 (une erreur de localisation, un hématome, un oubli de matériel, une migration de matériel et un syndrome de détresse respiratoire aiguë [SDRA]). Le rachis lombaire concentre plus de 80 % des réclamations, ce qui n'est pas surprenant considérant la plus grande fréquence de cette chirurgie. Les sinistres sont cependant moins grave, puisque, sur une échelle de gravité de 1 à 5, les sinistres de gravité 4 et 5 représentent 28 % des sinistres en lombaire, mais 55 % en dorsal et 34 % en cervical. Les procédures issues de ces réclamations ont été : • 51 réclamations en Commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CCI) ; • 30 réclamations au civil ; • 14 réclamations amiables ; • trois réclamations civiles + CCI ; • une réclamation ordinale ; • une réclamation administrative. L'issue du sinistre a été : • 27 mises hors de cause ; • 27 rapports d'expertises favorables ; • 20 dossiers en cours ; • 18 dossiers sans suite ; • cinq transactions amiables ; • un rapport d'expertise défavorable ; • un CCI en cours avec rapport favorable ; • un CCI en cours avec rapport défavorable. Globalement, deux tiers des dossiers environ connaissent une issue favorable, avec plutôt une tendance vers une augmentation de cette proportion, et également une fréquence plus importante de rejets en CCI de demandes liées à l'état antérieur (douleurs résiduelles) et l'échec de la chirurgie. Il faut préciser que les cinq transactions amiables représentaient des dossiers pour lesquels la faute du chirurgien était indiscutable : • une maladresse chirurgicale (section radiculaire reconnue par le chirurgien) ; C. Cista • un syndrome de la queue de cheval par hématome postopératoire avec retard au diagnostic et reprise tardive ; • une indication non justifiée d'arthrodèse trop précoce au vu du dossier ; • une complication infectieuse prise en charge avec un mois de retard ; • une mauvaise gestion d'une complication infectieuse (responsabilité partagée avec l'établissement). Enfin, les chirurgiens ne sont pas tous égaux devant le risque médico-légal, puisque 3 % des sociétaires concentrent à eux seuls 11,3 % de la sinistralité. Il s'agit d'un phénomène qui est international, puisqu'une étude réalisée à partir de la base nationale des plaintes juridiques américaines (national practitionner data bank), en se focalisant sur les médecins ayant une fréquence ou une gravité importante, a montré que 1,8 % des médecins américains responsables de 50 % des 83 368 588 200 $ versés aux victimes sur les 25 dernières années [5]. Une analyse par la MACSF de l'exercice des chirurgiens concernés a permis d'identifier des causes récurrentes à cette sinistralité excessive : • un nombre d'actes supérieur à la moyenne de la spécialité : plus de 1000 actes/an en chirurgie du rachis, alors que la moyenne serait de 800 actes/an ; • un nombre d'actes très inférieur à la moyenne de la spécialité : 40 actes/an ; • exercice sur plus de deux sites ; • pourcentage important de reprises de patients mécontents de confrères ; • un problème de communication avec les patients ; • une multiplicité d'activités autres que l'activité médicale : directeur d'établissement de santé, fonctions d'élu, directeur d'entreprise. Informations à donner en préopératoire au patient à opérer de la façon la plus complète Même si le défaut d'information ne constitue pas le motif de plainte le plus fréquent, il s'agit régulièrement du « maillon faible » des dossiers d'expertise. Il semblerait que les chirurgiens ne soient pas égaux devant ce risque, puisque si la MACSF qui assure essentiellement des chirurgiens libéraux ne semble confrontée à des mises en cause pour défaut d'information que dans 4 % des cas, un autre organisme assurant plus de chirurgiens et d'établissements hospitaliers publics rapporte dix condamnations pour défaut d'informations, sur 44 condamnations dans des affaires concer- nant la neurochirurgie [6]. Il n'est pas possible à ce stade de préciser si cette différence est due à la juridiction en cause, ou à la qualité d'information délivrée par ces deux catégories de praticiens [6]. Il faut par ailleurs souligner que la reconnaissance d'un défaut d'information est à l'origine d'une « double peine », puisque les jurisprudences récentes ont abouti à des condamnations, d'une part, d'une perte de chance de ne pas avoir pu se soustraire à une complication et, d'autre part, à une indemnisation d'un préjudice moral d'impréparation, le patient n'ayant pu se préparer à l'éventualité de la survenue de la complication [7]. Une publication récente [8] a analysé 201 décisions de justice relatives à ce problème. La traçabilité de cette information doit être sans faille, car depuis l'arrêt Hedreul-Cousin de 1997, la charge de la preuve de la délivrance de l'information est imposée au chirurgien. Il faut donc envisager, d'une part, la forme de l'information et, d'autre part, son contenu. Forme de l'information Celle-ci doit être orale avant tout, comme cela est stipulé dans les recommandations de l'HAS [9], et souligné dans plusieurs décisions de justice. Le paradoxe est que la preuve de cette information orale ne peut être apportée de manière formelle, et qu'il faut donc compléter cet entretien oral par des éléments objectifs de preuve de la délivrance de l'information, qui peuvent être : • des schémas annotés ; • des notices d'information (de la SFCR par exemple), concernant la pathologie et le traitement ; • un courrier au médecin traitant, dicté devant le patient, dont un exemplaire est adressé au patient, reprenant les principaux risques exposés, et décrivant les autres alternatives thérapeutiques ; • un document de consentement éclairé signé de préférence après un délai de réflexion. Il faut pouvoir apporter la preuve d'une réelle volonté d'information du patient, et ne surtout pas se limiter à la délivrance par le secrétariat d'une notice impersonnelle et d'une signature d'un document générique. La traçabilité de tous ces moyens d'information est certainement l'élément essentiel de prévention des procédures pour défaut d'information et sa qualité contribue largement à la bonne gestion d'une plainte [10–12]. Contenu de l'information Elle doit être le plus large possible. L'article L1111-2 du code de la santé publique précise que le patient doit être informé « des risques fréquents et graves normalement prévisibles ». © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 168 spects médico-légaux La tendance récente des juridictions est plutôt extensive, puisque la Cour de cassation [13] a jugé que devait être porté à la connaissance du patient « un risque grave scientifiquement connu à la date des soins comme étant en rapport avec l'intervention ou le traitement envisagé constitue, même s'il ne se réalise qu'exceptionnellement, un risque normalement prévisible ». De même le conseil d'État [14] stipule que « la circonstance qu'un risque de décès ou d'invalidité répertorié dans la littérature médicale ne se réalise qu'exceptionnellement ne dispense pas les médecins de le porter à la connaissance des patients ». Outre les risques de l'acte lui-même, il convient également d'informer le patient des autres alternatives thérapeutiques, afin qu'il puisse se faire une idée objective du rapport bénéfice/risque de l'acte envisagé. Va-t-on vers une obligation de résultats dans cette chirurgie fonctionnelle ? © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Cela ne semble pas être la tendance actuelle, avec au contraire une augmentation des rejets de demandes liées à l'état antérieur (douleurs résiduelles), notamment dans le cadre des CCI. Il faut pour cela insister particulièrement sur la nécessité d'un dossier ayant une traçabilité sans faille, notamment concernant l'évaluation fonctionnelle du patient en préopératoire, son information et la qualité du suivi en postopératoire. 169 Déclaration d'intérêts L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé ences [1] Garreau de Loubresse C. In : Le risque neurologique en chirurgie du rachis. Conférences d'enseignement de la Sofcot, Masson Elsevier ; 2013. [2] Taddie M. Complications de la chirurgie du rachis. Masson Elsevier ; 2015. [3] Augu A. Regards sur la sinistralité des chirurgiens du rachis de 1/2012 à 6/2015. Lyon : Communication SFCR ; juin 2016. [4] Housselstein T. Rapport commission mixte MACSF/SFCR. Lille : Communication SFCR ; juin 2017. [5] Journal of Safety On line first LWW 6/2/10. [6] Sham P. Anorama du risque médical. Rapport complet. In : SHAM ; 2017. [7] Cour de Cassation. 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DUVAL Note des coordinateurs La France compte de nombreux ostéopathes et certains patients souffrant de radiculalgies par hernie discale sont parfois vus en première intention par ces professionnels. Ils sont devenus des acteurs souvent sollicités dans la prise en charge de cette pathologie fréquente. Il nous paraissait important de donner la parole à un ostéopathe. Le texte de madame Duval nous éclaire sur leur approche, rappelle que leur pratique a des limites et n'a pas de fondement scientifique bien établi. Elle nous rappelle que, dans leur formation, on leur enseigne des « drapeaux rouges » qui sont des situations où ils doivent renvoyer directement et sans attendre vers la médecine traditionnelle allopathique. Elle insiste aussi sur l'importance de l'approche multidisciplinaire de cette pathologie H.-F. PARENT, J.-L. BARAT, R. LEVASSEUR Introduction Commençons d'abord par définir ce qu'est l'ostéopathie. Le terme d'ostéopathie a été inventé en 1890 par Still [1], médecin américain convaincu de la relation étroite qui existait entre l'anatomie humaine et le fonctionnement du corps et impressionné des résultats obtenus par une médecine alternative. Il crée la première école d'ostéopathie en 1892 à Kirksville. Littlejohn [2] apporte l'ostéopathie en Europe avec la création de la British School of Osteopathy en 1917, école toujours existante et qui délivre le premier diplôme universitaire européen reconnu. L'Angleterre est alors le berceau de l'ostéopathie en Europe. Celle-ci arrivera en France en 1932 grâce à Lavezzari qui donne les premiers enseignements. En 1952, Geny crée la Société française des ostéopathes (SFO) avec les Drs Piedalu, Mieg et Lescure dont les cours sont réservés aux kinésithérapeutes et médecins. Une définition de l'ostéopathie a été donnée par l'OMS en 2010 à la suite d'une longue concertation La hernie discale lombaire © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés des représentants des nations concernées : « L'ostéopathie (également dénommée médecine ostéopathique) repose sur l'utilisation du contact manuel pour le diag nostic et le traitement. Elle prend en compte les relations entre le corps, l'esprit, la raison, la santé et la maladie. Elle place l'accent sur l'intégrité structurelle et fonctionnelle du corps et la tendance intrinsèque de l'organisme à s'autoguérir. Les ostéopathes utilisent une grande variété de techniques thérapeutiques manuelles pour améliorer les fonctions physiologiques et/ou soutenir l'homéostasie, altérées par des dysfonctions somatiques (les structures du corps), c'est-à-dire une altération ou une dégradation de la fonction des composantes concernées du système somatique : les structures squelettiques, articulaires et myofasciales, ainsi que les éléments vasculaires, lymphatiques et neurologiques corrélés. Les ostéopathes utilisent leur connaissance des relations entre la structure et la fonction pour optimiser les capacités du corps à s'autoréguler et à s'autoguérir. Cette approche holistique de la prise en charge du patient est fondée sur le concept que l'être humain constitue une unité fonctionnelle dynamique, dans laquelle toutes les parties sont reliées entre elles. Après avoir contextualisé l'ostéopathie aujourd'hui, nous présenterons les spécificités de l'ostéopathie dans la définition de sa lésion ou dysfonction et, plus spécifiquement, en lien avec la hernie discale avant de présenter le diagnostic ostéopathique, l'intérêt des traitements ostéopathiques en accompagnement du traitement médical sans nécessité d'intervention chirurgicale dans la prise en charge éventuelle des hernies discales ainsi que l'intérêt d'une ostéopathie à titre préventif. L'ostéopathie aujourd'hui L'ostéopathie a pris beaucoup d'ampleur aujourd'hui avec une démographie qui a été galopante depuis les années 2000 avec aujourd'hui plus de 20 000 praticiens. L'ostéopathie est pratiquée par des professionnels de santé et par des non-professionnels de santé, ce qui crée le trouble chez les patients. H. Duva Les formations dispensées, très disparates tant par leur type d'enseignement que par leur qualité, ont subi une réingénierie de la formation aboutissant à l'agrément de certaines écoles répondant aux exigences réglementaires du nouveau référentiel de décembre 2014 [3]. L'ostéopathie est plébiscitée par les patients. Pour le monde médical, en raison de la faiblesse de preuves scientifiques et de publications validées, cette pratique a été plus longue à intégrer mais les choses tendent à évoluer aujourd'hui. L'essentiel des pratiques est empirique. Mais l'ostéopathie est fondée sur l'anatomie, la physiologie, la pathologie et la biomécanique, sciences pour lesquelles la validation scientifique existe. Définissons les termes pour mieux comprendre. est d'ailleurs admise par le monde médical. Il est bien évident pour chacun que pour qu'une fonction soit optimale, il faut que la structure soit en bon état. Une bonne structure génère une bonne fonction et son corollaire : une altération du corps humain, d'une de ses composantes ou « dys-structure » va générer une « dys-fonction ». La différence de ce principe communément admis est que l'ostéopathie ne se limite pas à la recherche de l'amélioration et de l'optimisation de l'état de la structure en souffrance, mais qu'elle va aussi aller chercher ailleurs, à distance, et sur différents systèmes, qu'ils soient musculaires, ligamentaires, tendineux, fasciaux ou viscéraux par des liens qui sont mécaniques, neurologiques ou vasculaires. Présentation de la lésion ostéopathique et de la dysfonction ostéopathique Potentiel d'autoguérison Deux termes sont utilisés communément, celui de lésion ostéopathique et celui de dysfonction ostéopathique. L'ostéopathie dans son concept reconnaît trois grands principes qui, une fois présentés, permettront de définir les notions de lésion et de dysfonction ostéopathiques. Trois grands principes attachés à l'ostéopathie Être humain en tant qu'unité fonctionnelle dynamique Comme le donne la définition de l'OMS, vue plus haut, l'être humain est considéré comme une entité dynamique et indivisible. L'être humain est un tout, ce qui sous-entend qu'une perturbation à un endroit du corps aura un impact sur le voisinage. Ainsi, le dysfonctionnement d'une articulation, par exemple, va nécessairement impacter le fonctionnement des tissus environnants qu'ils soient musculaires, ligamentaires, tendineux ou fasciaux ainsi que les articulations suset sous-jacentes. L'ostéopathe recherche les altérations locales ou à distance, les restrictions de mobilité. L'ostéopathie intègre l'individu dans sa globalité sans réduire son analyse à la seule zone de plainte du patient en tenant compte de l'incidence psycho-émotionnelle. Relation structure-fonction Le second principe est celui de la relation qui existe entre le corps humain en tant que structure et la fonction : la structure génère la fonction. Cette relation Le corps connaît en permanence une autorégulation pour être en équilibre. Il est en homéostasie. Le corps essaie de maintenir un état de santé qui soit optimal, et ce sans contrôle volontaire de l'individu. L'ostéopathe, par son traitement appliqué en cas de difficulté, joue le rôle de catalyseur et le corps fait le reste grâce à ses capacités naturelles pour retrouver son équilibre. Caractéristiques de la lésion (ou dysfonction ostéopathique) et de la manipulation structurelle La lésion se caractérise par une perte des qualités de souplesse et d'élasticité du tissu conjonctif. L'ostéopathie s'intéresse au tissu conjonctif qui est présent dans toutes les structures de l'organisme humain et qui tient en son siège les récepteurs neurologiques. Ces lésions tissulaires réversibles (LTR) sont organisées au sein du tissu, ce sont des lésions structurelles qui, dans le temps s'auto-entretiennent et s'organisent. La modification structurelle est la cause de l'altération de la fonction. Ces altérations se retrouvent localement ou à distance. C'est ainsi que la lésion ostéopathique originelle n'est pas nécessairement sur la zone de la plainte évoquée par le patient, il faut aller la solliciter pour qu'elle s'exprime. La manipulation structurelle articulaire utilisée pour traiter la LTR n'est en aucun cas un geste forcé mais un geste mécanique respectant les amplitudes physiologiques dont les paramètres suivants peuvent être réglés finement : ajustement de la vitesse, de la masse et de l'amplitude. La manipulation est exercée au plus près du tissu lésé. On utilise ce qu'il convient d'appeler des techniques le plus souvent directes, sans © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 172 Ostéopathie : sa juste place, quels traitements ? bras de levier (ou très court). Qu'il s'agisse d'un travail articulaire, viscéral, crânien ou sur tout autre type de tissu musculaire, ligamentaire ou tendineux, l'objectif est le même, les principes d'application sont identiques et adaptés à la zone du corps présente sous la main. Ces différentes manipulations sont et doivent être non douloureuses. Les lésions dégénératives évoluées ou traumatiques ne relèvent pas du domaine de compétence de l'ostéopathe et nécessitent d'adresser le patient vers la médecine traditionnelle allopathique. L'ostéopathe pourra travailler sur les conséquences fonctionnelles environnementales de ces lésions mais sans aucune action à proprement parler sur le tissu touché (fracture, arthrose, etc.). pplication du raisonnement ostéopathique à la hernie discale : analyse © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Pour l'ostéopathe, la lésion structurelle principale siège au niveau du disque considéré par les ostéopathes comme répartiteur de contraintes. La conséquence de la lésion à ce niveau entraîne la perturbation de la fonction du disque avec des modifications du comportement des structures environnantes à savoir les vertèbres sus- et sous-jacentes, le pourtour ligamentaire, musculaire et le tissu viscéral par les relations anatomophysiologiques mécaniques, neurologiques et neurovasculaires. Le corps va dans un premier temps s'adapter, entraînant ainsi des modifications structurelles sur les tissus environnants qui vont lui permettre de gérer le dysfonctionnement discal. Nous verrons plus loin l'intérêt des différentes prises en charge ostéopathiques (préventive ou en complément du traitement médical). Examens complémentaires et ostéopathie Les examens complémentaires médicaux permettent d'évaluer l'état de la structure et de mettre en évidence la hernie discale. Ils seront toujours utiles à l'ostéopathe lorsqu'ils existent et qu'ils lui sont présentés, surtout dans le cadre de la hernie discale diagnostiquée. En effet, lorsque ce dernier veut avoir une action précise sur la zone, il sera intéressant pour lui de connaître l'importance et le type de hernie en présence, avec son objectivation postérieure, latérale, droite, gauche, etc. D'un point de vue général, il est toujours enrichissant de voir l'état osseux ou articulaire du patient 173 avant d'appliquer un traitement ou, le cas échéant, de réorienter le patient. Expression de la lésion, dysfonction ostéopathique et spécificité vertébrale Les articulations vertébrales présentent la particularité de trouver leur équilibre dans ce qu'il convient de présenter comme un trépied articulaire formé par les processus articulaires postérieurs d'une part, les corps vertébraux et le disque intervertébral d'autre part. Pour l'ostéopathe, la présence d'une lésion sur une de ces structures entraînerait une altération du fonctionnement de cet ensemble indissociable et une restriction de la mobilité physiologique. Le dysfonctionnement et ses manifestations minimes ressentis par le patient peuvent être pris en charge par l'ostéopathe dans l'objectif de limiter l'aggravation de la lésion et de rendre la liberté à ce complexe articulaire en restaurant la souplesse et l'élasticité aux différents tissus conjonctifs abordés. Si les microtraumatismes se répètent, le cumul des petites lésions entraînera une expression lésionnelle franche pour le patient. Diagnostic ostéopathique L'ostéopathie est une profession de première intention, l'ostéopathe peut recevoir le patient sans filtre médical et parfois fréquemment sans examens complémentaires. L'importance et la qualité du diagnostic différentiel sont alors essentielles pour éviter toute erreur dans la prise en charge ostéopathique. En effet, le praticien doit être capable d'identifier la plainte du patient avec discernement, de déterminer (s'il existe) le facteur déclenchant qui doit être cohérent avec la plainte et comprendre l'installation de la lésion au travers de son interrogatoire et de ses tests. Il est indispensable et primordial pour lui de savoir identifier ce qui ne relève pas de sa pratique et qui nécessite de réadresser le patient vers la médecine traditionnelle. L'ostéopathe doit être capable de repérer ce que nous appelons dans le langage ostéopathique « les drapeaux rouges » qui limitent ou interdisent la pratique ostéopathique par opposition aux « drapeaux verts » qui justifient sa pratique (http:// semiosteo.ch/index.php?title=Catégorie:Rachis) (tableau 30.1). L'ostéopathe doit savoir rester dans son champ de compétences, ne pas poser de diagnostic et trouver les techniques adaptées à la lésion identifiée. 174 H. Duva Tableau 30.1 Diagnostic ostéopathique. Drapeaux rouges Signes à savoir repérer : - déficit neurologique - trouble sphinctérien - sciatique à caractère hyperalgique - fièvre, altérations de l'état général Infection exemple : spondylodiscite Spondylarthropathie Fracture Drapeaux verts Lombalgie commune Lombosciatalgie Lombo-cruralgie Syndrome rachidien et douleur mécanique Le patient qui consulte peut arriver par trois voies : • il a déjà été reçu par un médecin qui lui a conseillé d'aller consulter un ostéopathe ; • spontanément car il connaît un ostéopathe en qui il a confiance ; • parce que son réseau (ami, kinésithérapeute) lui a conseillé d'aller consulter en ostéopathie. Grandes lignes du diagnostic ostéopathique dans le cadre de la hernie discale Le diagnostic ostéopathique débute dès le premier contact avec le patient dans la salle d'attente : observer sa façon de se lever, de se déplacer (première évaluation de la fonction). On évalue aussi d'entrée le stress associé du patient à l'expression de son visage, une moiteur à la poignée de main, etc. La consultation démarre avec un interrogatoire classique du patient et une anamnèse fine qui permettent de déterminer si le patient va pouvoir bénéficier d'un soin ostéopathique ou s'il doit être réorienté vers le médecin. Ensuite, l'ostéopathe observe la peau à la recherche de cicatrices, la posture, les éventuelles déviations rachidiennes avant de passer aux tests de mobilité (accompagnés de tests neurologiques si nécessaire) et à l'observation de la marche afin d'avoir un examen dynamique qui lui permet de repérer très rapidement les secteurs de restriction de mobilité. Il terminera son bilan par la palpation pour évaluer la qualité tissulaire, la sensibilité du patient et des tests de résistance (test ostéopathique spécifique, permettant de repérer les tissus en LTR) afin de repérer les zones en lésion qui s'expriment. Prise en charge ostéopathique en complément du traitement médical avec diagnostic de hernie discale posé Le but de l'ostéopathe est de travailler l'ensemble des tissus qu'il va trouver en restriction afin de rendre souplesse et élasticité à ces différents tissus, ce qui permet de retrouver mobilité et liberté sur les différentes zones lésionnelles et faciliter ainsi la diminution de l'inflammation. Après avoir fait son anamnèse, son bilan et s'être assuré que le patient relève bien de son domaine de compétences, l'ostéopathe va s'intéresser en premier lieu à la zone de la plainte du patient ou il aura trouvé une lésion. Ci-dessous la progression de l'exploration des différentes zones sur lesquelles le praticien va travailler en fonction des liens mécaniques, neurologiques et vasculaires. Les techniques utilisées sont variables selon les zones (figure 30.1). Il peut travailler avec un massage transversal profond réalisé par voie viscérale sur le ligament longitudinal antérieur en regard de la zone herniaire. Celui-ci est exercé jusqu'à sédation de la douleur (épuisement des nocicepteurs). Il s'attache au travail du tissu conjonctif musculaire et fascial local et à distance. Il est aussi possible de réaliser des techniques douces en regard de la zone de la hernie. Chaque ostéopathe pourra utiliser les techniques de son choix dans la recherche de lésions ostéopathiques à distance pour lever le maximum de tensions environnantes. Il est important de ne pas négliger la masse viscérale qui présente souvent des points douloureux. Un travail vibratoire ainsi que de mise en tension du tissu conjonctif de la cavité abdominale permettra © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Qui adresse le patient ? Spondylolisthésis Ostéopathie : sa juste place, quels traitements ? 175 de hernies discales ou souffrant de lombalgies récurrentes. En effet, le travail d'entretien et de libération de zones en tension, en restriction, permettra d'avoir une optimisation de la fonction et ainsi éviter les récidives ou les épisodes de lumbagos. La liberté de l'ensemble des tissus quelle que soit leur nature permet une meilleure vascularisation et ainsi une meilleure fonction. Le patient entretiendra lui aussi par des exercices la souplesse de son rachis. L'ostéopathie présente cet intérêt de traiter le patient sur la zone douloureuse mais aussi à distance tant sur le système viscéral que lombaire, sacro-iliaque, coxal, rachidien dans son ensemble jusqu'aux membres inférieurs afin de permettre une bonne réharmonisation de l'individu et de sa fonction et ainsi éviter ou limiter les phénomènes de blocage. © 2019, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Figure 30.1 Techniques utilisées selon les zones. d'entraîner une détente. Il est aussi important de vérifier la bonne ampliation thoracique grâce à une liberté diaphragmatique totale. La recherche lésionnelle et le travail de l'ostéopathe pourront s'étendre sur l'ensemble du rachis et des membres inférieurs. À l'issue de la séance, il est très intéressant et pertinent de conseiller au patient de pratiquer des exercices vers l'extension lombaire, exercices à réaliser pluri-quotidiennement pour entretenir une liberté articulaire retrouvée et ainsi réharmoniser le complexe lombo-pelvien [4, 5]. Les effets attendus sur le patient sont la diminution, voire la sédation de la douleur ainsi que le retour à une vie normale avec récupération d'une fonction optimale et retour à terme à une activité sportive grâce aux qualités de souplesse et d'élasticité du tissu conjonctif retrouvées. Les séances suivantes se dérouleront selon la progression autorisée par la diminution de l'inflammation et la récupération des amplitudes. Le rythme sera propre à chaque patient et fonction de l'évolution et du bilan du praticien. Intérêt d'une ostéopathie préventive L'intérêt d'une prise en charge préventive est essentiel chez les patients ayant connu des épisodes antérieurs Intérêt d'une prise en charge pluridisciplinaire Le travail de l'ostéopathe est d'autant plus intéressant lorsqu'il s'effectue en concertation et en confiance avec le médecin. Dans le cadre d'une hernie discale ne présentant pas d'urgence médicale, proposer d'essayer de traiter les symptômes par cette thérapie alternative nous semble important. Par ailleurs, il nous semble judicieux d'avoir une prise en charge conjointe avec de la kinésithérapie, ces deux thérapies étant complémentaires. Il en est de même avec la podologie. Cette complémentarité est au service du patient et de son amélioration à long terme, que ce soit en complément d'un traitement médical, en postopératoire ou à titre préventif. Conclusion L'ostéopathie a sa place dans la prise en charge des patients souffrant de hernies discales. Elle permet d'offrir au patient une alternative aux traitements médicaux plus classiques dans la mesure où l'ostéopathe reste dans son champ de compétences. Elle présente un réel intérêt dans les prises en charge en complément du traitement médical par son mode de raisonnement qui prend en compte l'ensemble de l'individu et a fortiori dans une vision préventive qui, grâce à l'optimisation de la fonction de l'individu, évitera récidives ou aggravation en impliquant le patient dans sa prise en charge. 176 H. Duva L'auteur de ce chapitre déclare n'avoir aucun conflit en relation avec ce travail. Réfé ences [1] Still AT. Autobiography of Andrew Taylor Still. Kirksville, 1897. [2] Littlejohn JM. Notes sur les principes de l'ostéopathie. Maidstone, 1974. [3] https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2014/12/12/ AFSH1427626D/jo dernière consultation le 06/01/2019. [4] Erhard RE, Delitto A, Cibulka MT. 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