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Techniques Chirurgicales - Chirurgie Vasculaire

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Encyclopédie Médico-Chirurgicale 43-008
43-008
Substituts vasculaires
N Chakfé
F Dieval
F Thaveau
S Rinckenbach
O Hassani
G Camelot
B Durand
JG Kretz
Résumé. – Avec leur introduction dans les années 1950, les substituts vasculaires ont inauguré la chirurgie
vasculaire moderne. De nombreux concepts ont été proposés par les fabricants avec des succès variables. À
l’heure actuelle, la greffe veineuse autologue reste le substitut vasculaire de choix pour les revascularisations
des artères de petit calibre. Les substituts vasculaires synthétiques sont principalement construits à partir de
deux biomatériaux : le polytétrafluoroéthylène sous forme microporeuse et le polyéthylène téréphtalate sous
forme textile. Les substituts synthétiques sont performants pour les revascularisations des artères de moyen et
gros calibres, mais offrent encore des résultats médiocres pour les revascularisations des artères de petit
calibre. Il est important de connaître les différents concepts de substituts vasculaires et leurs évolutions pour
permettre un choix optimal en pratique clinique.
© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : prothèses vasculaires, chirurgie vasculaire.
Introduction
La première utilisation d’un substitut artériel en chirurgie vasculaire
réalisée en 1951 par Oudot consistait en l’implantation d’une
allogreffe artérielle chez l’homme [115]. En 1952, Voorhees et al [158] ont
réalisé le premier pontage vasculaire synthétique en implantant une
prothèse textile poreuse. Ces premières étapes inaugurèrent la
chirurgie vasculaire moderne, basée sur la technique du pontage.
De très nombreux substituts vasculaires ont été ensuite développés
à partir des années 1950 pour répondre aux besoins des chirurgiens,
principalement pour le traitement des pathologies athéromateuses
occlusives et anévrismales. Ces substituts ont utilisé des matériaux
et des concepts divers, avec des fortunes diverses. En effet, le
substitut vasculaire idéal devait répondre simultanément à trois
impératifs : une faible thrombogénicité, une bonne cicatrisation et
une bonne stabilité à long terme. En 1991, Parodi et al [116]
proposaient un nouveau type de substitut vasculaire pour le
traitement des lésions anévrismales de l’aorte abdominale sousrénale. Ce substitut, appelé endoprothèse, avait pour but d’exclure
les anévrismes par voie endovasculaire en réalisant un endopontage.
Malgré les développements technologiques permanents dont sont
l’objet les prothèses et endoprothèses, ces substituts vasculaires
n’offrent pas encore toujours des performances cliniques idéales
dans certaines applications. Nous proposons dans le présent article
Nabil Chakfé : Professeur des Universités, faculté de médecine, Strasbourg.
Florence Dieval : Maître de conférences, Université de Haute-Alsace, Mulhouse.
Fabien Thaveau : Interne, faculté de médecine, Strasbourg.
Simon Rinckenbach : Chef de clinique, faculté de médecine, Strasbourg.
Othman Hassani : Praticien hospitalier, faculté de médecine, Strasbourg.
Gabriel Camelot : Professeur des Universités, faculté de médecine, Besançon.
Bernard Durand : Professeur des Universités, Université de Haute-Alsace, Mulhouse.
Jean-Georges Kretz : Professeur des Universités, faculté de médecine, Strasbourg.
Groupe européen de recherche sur les prothèses appliquées à la chirurgie vasculaire, service de chirurgie
vasculaire, Hôpitaux universitaires de Strasbourg et Faculté des sciences et techniques, Université de HauteAlsace, Mulhouse, Hôpital civil, 1, place de l’Hôpital, BP 426, 67091 Strasbourg cedex, France.
de décrire les différents types de prothèses vasculaires qui ont été
ou qui sont encore actuellement disponibles sur le marché en
analysant leurs performances, et d’en préciser les principales
indications.
Substituts vasculaires
SUBSTITUTS BIOLOGIQUES
Deux types de substituts biologiques peuvent être distingués selon
qu’ils aient été l’objet d’un traitement ou non : les substituts
biologiques vrais et les substituts biologiques traités.
¶ Substituts biologiques vrais
Il s’agit de matériel vivant et viable qui n’a subi aucun traitement
susceptible de le rendre inerte. Ces substituts incluent les autogreffes
artérielles ou veineuses et les homogreffes.
Autogreffe veineuse
L’autogreffe veineuse a été utilisée par Kunlin dès 1949 [90] pour
réaliser le premier pontage en veine saphène autologue. À l’heure
actuelle, ce substitut est toujours le meilleur substitut pour la
réalisation des pontages sur les artères de petit calibre. La veine
grande saphène est la veine la plus utilisée, que ce soit sous la forme
d’un greffon inversé ou d’un greffon in situ. Le greffon inversé est
prélevé dans le tissu sous-cutané après ligature et section de toutes
ses branches collatérales. Avant d’être anastomosé, il est inversé
pour supprimer le jeu des valvules. Ce greffon peut être ainsi utilisé
dans une multiplicité de sites d’implantation. À l’inverse, le greffon
veineux saphène in situ est laissé en place dans le tissu sous-cutané
sans être disséqué sur l’ensemble de son trajet. La crosse de la
grande veine saphène est disséquée et sectionnée au ras de la veine
fémorale, puis anastomosée sur une des artères du trépied fémoral.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Chakfé N, Dieval F, Thaveau F, Rinckenbach S, Hassani O, Camelot G, Durand B et Kretz JG. Substituts vasculaires. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier
SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales - Chirurgie vasculaire, 43-008, 2003, 12 p.
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Substituts vasculaires
Son extrémité distale est ensuite disséquée et libérée des tissus
environnants pour pouvoir être anastomosée sur l’artère receveuse
en distalité. Le jeu des valvules doit alors obligatoirement être
supprimé par l’utilisation d’un instrument spécifique qui va
sectionner toutes les valvules par voie endoveineuse : le
valvulotome. Le greffon veineux in situ ne peut donc être utilisé
que pour la réalisation de pontages fémoropoplités ou
fémorojambiers, mais a pour avantage d’offrir une meilleure
congruence de calibre, ainsi qu’une meilleure trophicité pariétale par
le respect des adhérences tissulaires périveineuses.
La supériorité du greffon veineux autologue sur les autres matériaux
est principalement attribuée à sa surface luminale endothélialisée.
Les échecs de ces greffons peuvent être secondaires au
développement d’une sténose hyperplasique au niveau d’une
anastomose ou du corps sur des zones traumatisées par les clamps
ou le dévalvuleur. La technique de prélèvement des greffons veineux
doit être la plus atraumatique possible pour réduire le risque
d’ischémie pariétale et de souffrance endothéliale [ 1 2 6 ] . Les
thromboses plus tardives sont le plus souvent secondaires à la
progression de la maladie athéromateuse sur le greffon ou sur le
réseau artériel d’aval. La dégénérescence anévrismale des greffes
veineuses autologues est très rare en l’absence de lésion
athéromateuse [148] . Ces dilatations sembleraient survenir plus
fréquemment lorsque le greffon veineux est utilisé en tant que patch
d’angioplastie [145]. Les greffons veineux utilisés pour la réalisation
de pontages aortorénaux présenteraient des dilatations précoces et
importantes dans près d’un tiers des cas [143], avec une fréquence
accrue chez l’enfant [144] . Les veines du membre supérieur ne
semblent pas présenter de tendance plus marquée à la dilatation
malgré leurs parois plus fines [7, 151]. Des anévrismes athéroscléreux
sont décrits sur les greffons veineux autologues après de longues
périodes d’implantation, avec une incidence comprise entre 1 et
12,5 % à 10 ans [5, 42, 45, 148, 156]. L’utilisation des veines fémoropoplitées
autologues a été proposée, à la fois en chirurgie de revascularisation
et en chirurgie des infections de pontage avec des résultats
superposables à ceux de la veine saphène interne [137].
Autogreffe artérielle
L’autogreffe artérielle constitue théoriquement le substitut artériel
idéal du fait de ses capacités de cicatrisation et de ses
caractéristiques mécaniques [169]. Cependant, son utilisation est
limitée par le nombre réduit des sites de prélèvement. Ses
principales indications sont la reconstruction des artères rénales
pour hypertension rénovasculaire et pour anévrismes périphériques,
et plus exceptionnellement les reconstructions artérielles en milieu
infecté.
Homogreffe veineuse
L’homogreffe veineuse a été utilisée comme voie d’abord pour
hémodialyse [73], pour la réalisation de pontages fémoropoplités [139]
et aortocoronariens [13] avec des résultats variables. Les résultats en
termes de perméabilité ont été décevants dans certaines séries de
pontages sous-inguinaux [41, 161]. Ces taux de perméabilité pourraient
être améliorés par la mise en œuvre de protocoles thérapeutiques
associant une anticoagulation au long cours et des traitements
antiagrégants plaquettaires [18]. Leur principale complication à
distance est leur manque de stabilité structurelle. En effet,
l’homogreffe veineuse est le plus souvent obtenue lors d’un stripping
pour cure de varices ou, plus rarement, lors d’un prélèvement sur
un cadavre. La veine étant ainsi souvent le siège d’une pathologie
variqueuse au moment du prélèvement, celle-ci évolue fréquemment
vers la dilatation anévrismale. L’incidence des anévrismes
développés sur les homogreffes veineuses varie entre 5,2 et 12 % [41,
97]
et a pu atteindre un maximum de 58 % à 5 ans dans une série [155].
Homogreffe artérielle
L’homogreffe artérielle a été développée au début des années 1950.
Elle a permis la première implantation en position aortique [115] et a
suscité de nombreux travaux sur ses méthodes de conservation
2
Techniques chirurgicales
. Elle a été abandonnée après l’introduction des premières
prothèses textiles synthétiques et la constatation de leur évolution
quasi constante vers la dégradation à long terme [149, 150]. Leur
détérioration est probablement secondaire aux phénomènes de rejet
chronique survenant après leur implantation et aux techniques de
conservation qui sont encore vraisemblablement perfectibles. À
l’heure actuelle, la technique de conservation utilisée est la
cryopréservation [62], car elle permet notamment de respecter un
délai de quarantaine protégeant le receveur d’une éventuelle
infection virale. Le suivi régulier des homogreffes artérielles est
encore indispensable pour dépister les complications dégénératives,
comme en témoignent les premiers cas de dilatations anévrismales
rapportés, certains dès 22 mois d’implantation [10]. À l’inverse, cette
dégénérescence ne semble pas être un phénomène obligatoire
puisqu’un cas d’homogreffe artérielle fonctionnelle après 40 ans
d’implantation a été décrit [70]. À l’heure actuelle, leur principale
indication est le traitement des infections de prothèse avec
rétablissement immédiat de la continuité vasculaire in situ [10] et les
revascularisations distales pour sauvetage de membre en l’absence
de matériel autologue disponible [4].
[52, 98]
¶ Substituts biologiques traités
Il s’agit de conduits sanguins traités pour garantir leur inertie sur le
plan biologique et qui ne sont donc pas viables. Il s’agit de
bioprothèses.
Hétérogreffe bovine
Ce substitut a d’abord été préparé à partir d’artères carotides de
bœuf et de veau selon une méthode décrite par Rosenberg et al [130]
(fig 1). L’artère était traitée à la ficine, puis le squelette de collagène
était réticulé. Des méthodes de préparation associant des traitements
tels que la réticulation au glutaraldéhyde et l’addition de charges de
surface ont été proposées pour prévenir les faiblesses structurelles
de ces substituts qui généraient des dilatations [103, 134]. Pour la
réalisation de pontages sous-inguinaux, leurs performances cliniques
semblent se situer entre celles des prothèses en polytétrafluoroéthylène expansé (ePTFE) et celles des veines autologues
inversées [78] . Leur utilisation pour la réalisation de fistules
d’hémodialyse n’a pas été non plus convaincante [75] . L’artère
mammaire interne a également été utilisée, de même que le
péricarde, sous une forme tubulée [111] ou sous forme de patch [12].
Veine ombilicale humaine traitée
La veine ombilicale humaine traitée était obtenue à partir de la veine
du cordon ombilical de nouveau-nés. Un mandrin était introduit
dans sa lumière pour la redresser, puis elle était réticulée par un
traitement au glutaraldéhyde [38] ou au dialdéhyde d’amidon [101]. La
veine ombilicale ainsi traitée était ensuite insérée dans une mantille
de polyéthylène téréphtalate (téréphtalate de polyéthylène glycol)
(PET) afin de tenter d’en augmenter la résistance mécanique
intrinsèque et de favoriser l’encapsulation fibreuse. Les meilleurs
résultats cliniques ont été obtenus par Dardik, le concepteur de la
prothèse Dardik-Biograftt. Ce substitut artériel a été cependant
décevant du fait de son évolution fréquente vers la dilatation ou le
développement d’anévrismes. La fréquence de cette complication se
situait entre 3 et 65 % dans les différentes séries [15, 16, 39, 40, 54, 72, 85, 102,
108, 141, 146]
, même si Dardik, le promoteur de la prothèse, estimait que
cette fréquence était largement surestimée, notamment en ce qui
concernait les résultats de la deuxième partie de son expérience [37].
La majorité des chirurgiens a abandonné ce substitut du fait de ses
résultats cliniques.
Prothèses hybrides
L’idée de leur concepteur, Sparks, était de créer une néoartère
autogène par l’infiltration tissulaire de deux filets de PET placés
autour d’un mandrin de silicone et enfouis dans le tissu sous-cutané
de la zone du pontage. Après un délai de maturation de quelques
Techniques chirurgicales
Substituts vasculaires
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SUBSTITUTS SYNTHÉTIQUES
*
A
Depuis leur apparition au début des années 1950, peu de matériaux
ont été utilisés pour leur construction. Le polytétrafluoroéthylène et
le PET se sont largement imposés comme matériaux pour leur
construction, du fait de leur résistance à la dégradation dans
l’organisme. De nombreux concepts ont été élaborés pour proposer
un substitut artériel idéal. La multiplicité actuelle des modèles
prouve que ce but n’est pas encore atteint.
¶ Prothèses en polytétrafluoroéthylène
Le polytétrafluoroéthylène a été développé sous forme textile et
microporeuse.
Polytétrafluoroéthylène textile
Il a été proposé en 1963 par Edwards [48] sous forme de prothèses
tissées ou tricotées. Ces prothèses ont été abandonnées suite à
l’observation d’effilochages sur les lignes d’anastomose.
Polytétrafluoroéthylène microporeux
*
B
*
C
1
Hétérogreffe bovine traitée.
A. Macroscopie.
B. Microscopie électronique à balayage (grossissement original × 30) : face externe.
C. Microscopie électronique à balayage (grossissement original × 30) : surface luminale.
semaines, le mandrin était retiré et le pontage était réalisé en
anastomosant les deux extrémités du néoconduit ainsi formé sur les
artères en amont et en aval de l’obstacle artériel [142]. Ce concept a
dû cependant être très rapidement abandonné du fait de sa très
mauvaise stabilité mécanique à long terme, responsable de
dilatations et de ruptures. En effet, l’infiltration tissulaire du PET
étant constituée essentiellement de collagène en l’absence de tissu
élastique et de cellules musculaires lisses, ce néoconduit ne possédait
aucune des propriétés élastiques de l’artère normale lui permettant
de résister mécaniquement au débit sanguin pulsé. Plus tard, ce
concept a été reproposé en réalisant une maturation chez le mouton
pour réaliser la prothèse Cordis Omniflow [87]. Ce substitut a été
proposé pour réaliser des pontages artériels périphériques [88], des
fistules d’hémodialyse [ 1 6 2 ] ou des patchs d’angioplastie
carotidiens [123].
Le ePTFE a été commercialisé dans les années 1970 [99]. Il a connu un
succès croissant comme substitut des artères de petit calibre,
notamment pour les pontages fémoropoplités et axillofémoraux. Ce
matériau se présente sous forme de nodules transversaux reliés entre
eux par des microfibrilles longitudinales. Le ePTFE est fabriqué à
partir de poudre de polytétrafluoroéthylène mélangée à un solvant,
le naphtalène. Ce mélange est ensuite compacté sous de très hautes
pressions, puis extrudé à travers une filière produisant un tube droit
compact. La structure microporeuse est obtenue par l’exposition du
polytétrafluoroéthylène extrudé à une température supérieure à celle
du point de fusion (au minimum 327 °C) pour que les cristallites
s’organisent en une structure microporeuse. Ce procédé, le frittage,
accroît fortement la résistance mécanique. Cette structure
microporeuse de base a pu être modifiée pour permettre de proposer
différents types de modèles. Certains modèles se caractérisent par la
présence d’une fine couche de ePTFE enroulée sur la surface externe
pour en augmenter la résistance mécanique (fig 2). Dans certains cas,
la surface interne du substitut est recouverte de carbone pour en
diminuer la thrombogénicité [2, 9] (fig 3). Ces prothèses sont
disponibles avec un support externe annelé ou spiralé afin
d’augmenter leur résistance à la plicature et à la compression
externe. La réalisation de modèles sous différentes formes
géométriques, telles que les diamètres dégressifs pour la réalisation
des fistules d’hémodialyse ou la réalisation d’une collerette distale
générant un effet vortex au niveau des anastomoses, a été proposée
pour créer des conditions hémodynamiques optimales dans des
indications d’utilisation particulières.
Ces substituts se sont imposés comme les meilleurs pour le
remplacement des vaisseaux de petit calibre en l’absence de greffon
veineux autologue, malgré leur faible compliance et leur faible
infiltration cellulaire [30, 66]. En effet, chez l’homme, contrairement à
ce qui est observé chez l’animal, l’infiltration cicatricielle n’intéresse
que la partie la plus externe de la paroi et la surface luminale n’est
recouverte que par un fin film de fibrine organisée, même après de
longues durées d’implantation. Certaines équipes ont proposé
d’améliorer la cicatrisation de ces prothèses par leur
endothélialisation. Les premières études chez l’homme ont semblé
encourageantes [74] mais n’ont pour l’instant pas permis de proposer
cette application à grande échelle. Cependant, des résultats cliniques
plus récents devraient permettre de déboucher sur la réalisation de
premiers essais comparatifs contrôlés [43] . Les autres voies de
recherche pour permettre d’améliorer la cicatrisation de ces
prothèses portent sur l’infiltration peropératoire de différents types
cellulaires [53].
Certains travaux ont démontré une moindre infectabilité des
prothèses en ePTFE par rapport aux prothèses en PET [131, 135, 152] et
aux veines ombilicales humaines traitées [ 1 3 1 ] . Des essais
d’immobilisation d’antibiotiques à la surface de prothèses en ePTFE
par l’intermédiaire de benzalkonium ont été réalisés pour en
diminuer l’infectabilité [71, 122]. Ces travaux n’ont cependant jamais
débouché sur des applications cliniques.
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C
2 Prothèse en polytétrafluoroéthylène expansé comportant un enrubannage externe
et bifurquée.
A. Macroscopie.
B. Microscopie électronique à balayage (grossissement original × 250) : face externe.
C. Microscopie électronique à balayage (grossissement original × 250) : surface luminale.
Des cas de dilatations anévrismales, compliquées de rupture dans
un cas, ont été rencontrés sur les premiers modèles qui ont été
commercialisés [21, 104, 128]. Les deux fabricants de l’époque ont alors
amélioré les caractéristiques physiques des prothèses en augmentant
l’épaisseur de leur paroi pour l’un et en ajoutant un enrubannage
externe en ePTFE pour l’autre [21]. Plus récemment, nous avons
rapporté un cas de dilatation précoce d’une telle prothèse sans que
son analyse physicochimique nous ait permis de conclure quant à
son mécanisme [26]. Des déchirures prothétiques sur des lignes
d’anastomose, notamment sur les anastomoses proximales des
pontages axillofémoraux, ont également été décrites [65] . Ces
4
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Prothèse en polytétrafluoroéthylène expansé ne comportant pas d’enrubannage externe, droite.
A. Macroscopie.
B. Microscopie électronique à balayage (grossissement original × 250) : face
externe.
C. Microscopie électronique à balayage (grossissement original × 250) : surface
luminale.
déchirures pouvaient être secondaires à des lésions créées par la
fabrication (lignes de faiblesse longitudinales créées lors du
processus d’extrusion) ou par les manipulations (lésions de clamps
artériels). L’analyse chimique d’explants de prothèses en ePTFE
implantées chez l’homme a conclu à la bonne biostabilité de ce
matériau [68].
¶ Prothèses en polyéthylène téréphtalate
Les prothèses textiles en PET représentent actuellement le substitut
le plus utilisé pour les artères de gros et moyen calibre. Les
structures textiles ont été introduites par Voorhees et al [158] .
Cependant, ces premières structures utilisaient des polymères peu
stables jusqu’à l’utilisation du PET. Les prothèses actuellement
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A
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C
4
Prothèse en polyester tricotée incorporant des fibres texturées.
A. Macroscopie.
B. Vue en microscopie électronique à balayage de la surface externe.
C. Vue en microscopie électronique à balayage de la surface interne. La structure
de tricot chaîne incorpore des fibres texturées sur la face externe (effet de velours
externe).
*
B
utilisées représentent l’évolution de différents concepts qui se sont
succédés dans le temps. Le premier concept était d’augmenter la
porosité des prothèses pour en favoriser la cicatrisation et
l’encapsulation. Ces premières prothèses étaient construites sous
forme de tricots trame et ont été abandonnées du fait de leur
mauvaise stabilité, responsable de dilatations et de ruptures. Le
deuxième concept était d’incorporer des fibres texturées à la
structure pour promouvoir la cicatrisation et la réendothélialisation
de la surface luminale de la prothèse. Il s’agit de l’effet velours. Les
prothèses à velours externe présentaient une meilleure encapsulation
externe et un meilleur ancrage tissulaire. En revanche, les prothèses
qui ont été produites grâce à des fibres cylindriques et trilobées pour
créer un effet velours sur les faces interne et externe (structure
appelée « double velours ») étaient instables mécaniquement et
sensibles à la dégradation chimique. Le troisième concept a été
d’augmenter la résistance mécanique des prothèses par la
généralisation des tricots chaîne et des structures tissées [24]. Ces
prothèses à tricot chaîne comportant des fibres texturées ont montré
une excellente capacité de cicatrisation et une grande stabilité
mécanique (fig 4).
Les étapes de la fabrication des structures textiles sont les suivantes.
Le fil est formé par l’association de monofilaments de masse linéique
et de géométrie variables obtenus par passage de polymère fondu
dans une filière. Ces fils sont ensuite étirés et éventuellement
texturés par l’application d’un traitement thermique ou chimique
qui va donner un effet de bouclettes aux filaments. La structure
textile est ensuite obtenue par tissage ou tricotage (fig 5). Les
techniques de tissage et de tricotage sont multiples. Elles peuvent
utiliser plusieurs fils, et ainsi procurer un aspect plus ou moins
compact ou plus ou moins duveteux à la prothèse. La structure est
alors compactée par un traitement chimique qui va réduire la
porosité de la structure en créant un gonflement des fils. La prothèse
est ensuite gaufrée par un traitement le plus souvent thermique pour
donner une compliance longitudinale et radiale à la prothèse. Le
résultat de ce traitement va créer le cosselage. Enfin, la prothèse est
nettoyée de tous les agents chimiques intervenant dans les
différentes étapes de la fabrication, puis stérilisée.
Les prothèses en PET peuvent être construites sous forme de tubes
ou sous forme bifurquée. Il est également possible de disposer sur
leur face externe un support spiralé qui a pour but de prévenir les
plicatures et la compression externe (fig 6).
Le développement le plus récent qui a été apporté à ces prothèses a
consisté à les imprégner d’une matrice biodégradable pour les
rendre immédiatement étanches au moment de leur implantation et
ainsi éviter leur précoagulation. Des prothèses imprégnées de
collagène [67], d’albumine [94] ou de gélatine [29, 95] sont actuellement
commercialisées (fig 7). Il n’a cependant pas été prouvé que cette
imprégnation diminuait la thrombogénicité et améliorait la
cicatrisation des prothèses [29, 67, 94, 95]. La vitesse de dégradation des
matrices protéiques n’est pas reproductible entre les modèles
animaux et humains, ce qui doit rendre prudent pour transférer à
l’homme les résultats des études de cicatrisation obtenus chez
l’animal [27]. Ces prothèses n’ont pas prouvé leur supériorité clinique
sur les prothèses précoagulées en termes de perméabilité, de
réduction des pertes sanguines et des transfusions périopératoires,
et d’infectibilité [23, 25, 28] . L’utilisation de matrices résorbables
synthétiques pourrait représenter une voie d’avenir pour le concept
d’imprégnation, compte tenu des réticences de plus en plus
importantes liées aux risques d’infection des produits biologiques.
Les matrices d’imprégnation ont également été proposées pour
conférer un rôle anti-infectieux à la prothèse en y permettant la
fixation peropératoire d’antibiotiques, notamment la rifampicine [56,
57, 93]
. Les résultats expérimentaux ont fait proposer d’utiliser ces
prothèses en clinique en milieu infecté [69]. Une autre alternative de
traitement anti-infectieux des prothèses en PET a consisté à proposer
un recouvrement à l’argent du PET [81] (fig 8). Ce traitement n’a pas
encore prouvé son efficacité et serait expérimentalement moins
efficace que l’imprégnation à la rifampicine [59] . La fixation
d’héparine sur une matrice d’imprégnation a également été
proposée pour réduire la thrombogénicité de la surface luminale,
avec des résultats encourageants [44]. Une autre voie de recherche
pour réduire la thrombogénicité du PET a consisté à réaliser un
traitement de surface par du carbone (fig 9) ou des dérivés
fluorés [34].
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Prothèse en polyester tissée.
A. Macroscopie.
B. Vue en microscopie électronique à balayage de la surface externe.
C. Vue en microscopie électronique à balayage de la surface interne. Il s’agit d’une
toile uniquement constituée de filaments plats.
6
Prothèse en polyester tricotée comportant un support externe.
Des complications dégénératives telles que des dilatations, des
ruptures ou des faux anévrismes ont été rapportées et analysées
6
Prothèse en polyester tricotée imprégnée de collagène.
A. Macroscopie.
B. Vue en microscopie électronique à balayage de la surface externe.
C. Vue en microscopie électronique à balayage de la surface face interne.
dans la littérature, avec des manifestations et des fréquences
variables selon le type de construction des prothèses. Les prothèses
tissées présentent la meilleure stabilité à long terme, ce qui fait que
leurs cas d’explantation pour dilatation ou rupture sont rares. Cette
stabilité est liée à leurs bonnes caractéristiques observées lors de la
réalisation des tests mécaniques. La tendance à s’effilocher aux
anastomoses des premiers modèles n’est pas retrouvée sur les
nouvelles générations. Les premiers tricots trame, qui étaient réalisés
par un tricotage ne faisant intervenir qu’une seule fibre de liage,
présentaient une mauvaise stabilité dimensionnelle qui s’est
manifestée par des élongations, des dilatations, des ruptures et des
faux anévrismes anastomotiques [11, 80, 92, 113, 114]. Les tricots chaîne font
appel à une technique de tricotage faisant intervenir plusieurs fils.
Ces fils forment des boucles qui sont entrelacées les unes avec les
autres de sorte que chaque fil présente un trajet en zigzag dans la
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Prothèse en polyester tricotée recouverte de sels d’argent.
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Prothèse en polyester tricotée recouverte de carbone.
structure textile. Les structures le plus souvent utilisées sont les
structures locknit et reverse locknit. Ces structures offrent une très
bonne stabilité dimensionnelle, n’ont pas de tendance à l’effilochage
aux anastomoses et présentent une résistance élevée à l’arrachement
des sutures. Cependant, des cas sporadiques de rupture de prothèses
en tricot chaîné ont été rapportés dans la littérature, sous la forme
d’un phénomène dégénératif global de leur structure avec
dégradation des fibres et présence de nombreuses déchirures et
ruptures [11] ou sous la forme de ruptures longitudinales survenant
sans processus dégénératif diffus de la structure textile [14, 31, 36, 109, 153,
159, 163, 167, 170]
. Nous avons pu montrer que ces ruptures longitudinales
survenaient sur deux zones spécifiques de la structure textile qui
pouvaient être considérées comme des zones de faiblesse, la ligne
de remaillage et la ligne guide, et que ces ruptures étaient prévisibles
sur la base de tests in vitro réalisés sur des prothèses vierges [47].
Cette fragilité des premières prothèses velours était également liée à
la présence de filaments trilobaires dans leur structure [154]. Ces
filaments s’étant avérés très sensibles à la dégradation, ils ont alors
été remplacés par des filaments cylindriques qui présentaient une
meilleure biostabilité dans le temps [110]. Des cas de déchirures avec
la formation de faux anévrismes ont été rapportés avec la première
génération de prothèse construite à base de tricots trame comportant
un support externe [ 11 2 ] . Ces ruptures étaient probablement
secondaires à des irrégularités de mise en place du support externe
générant des contraintes mécaniques exagérées sur la structure
textile. Les causes de ces échecs font probablement intervenir des
facteurs favorisants de la dégradation des structures textiles à
plusieurs niveaux. Ces facteurs de détérioration peuvent survenir
lors des différentes étapes de la fabrication de la prothèse, mais
peuvent être aussi liés au concept même de la structure textile ou à
des facteurs généraux de dégradation du polymère in vivo [121].
¶ Prothèses en polyuréthane
Les chercheurs ont porté un grand intérêt au polyuréthane du fait
de leur espoir de pouvoir fabriquer des prothèses présentant des
propriétés mécaniques, et notamment une compliance, plus proches
de celles des artères, contrairement à ce qui était obtenu avec le
ePTFE et le PET. Cependant, les résultats des études expérimentales
réalisées pour étudier l’intérêt de ce matériau pour réduire
l’hyperplasie néo-intimale ont été contradictoires [17, 82]. Les premières
prothèses en polyuréthane qui ont été réalisées sous la forme d’une
structure à pores fermés ont été retirées de la commercialisation au
vu des résultats d’études expérimentales et cliniques non
concluantes [96, 171]. À l’heure actuelle, une prothèse composite de
*
B
*
C
10
Prothèse en polyuréthane.
A. Macroscopie de la surface externe.
B. Vue en microscopie électronique à balayage de la surface externe.
C. Vue en microscopie électronique à balayage de la surface interne. La structure
de la prothèse est constituée d’un enroulement de fils de polyuréthane renforcé par
une mantille externe de polyéthylène téréphtalate tricoté.
polyuréthane et de silicone est commercialisée. Elle est réalisée par
l’enroulement de filaments de polyuréthane sur un mandrin, avec
un comblement de ses interstices par de la gélatine et un
renforcement par une mantille externe de PET (fig 10). Les études
expérimentales de cette prothèse implantée comme pontage
artériel [ 3 ] ou comme fistule d’hémodialyse [ 1 6 6 ] ont été
encourageantes. Cette prothèse a été étudiée en clinique comme
fistule d’hémodialyse où elle se montrait supérieure au ePTFE en
termes de facilité d’hémostase et de formation de séromes, mais
avait un taux de perméabilité moindre [107]. D’autres types de
prothèses en polyuréthane ont été étudiés en clinique avec des
résultats inconstants [6, 55].
7
43-008
Substituts vasculaires
Choix d’un substitut vasculaire
La chirurgie de revascularisation s’applique schématiquement à
deux types d’artères : des artères de gros et moyen calibre pour la
chirurgie de l’ensemble de l’aorte et du carrefour aortique, et des
artères de petit calibre pour la chirurgie de revascularisation sousinguinale, des artères viscérales et des troncs supra-aortiques. Ces
deux types de chirurgie requièrent des substituts artériels dont nous
pouvons présenter les principaux critères de choix de la façon
suivante.
CRITÈRES DE CHOIX D’UNE PROTHÈSE VASCULAIRE
¶ Thrombogénicité
La thrombogénicité d’une prothèse doit être la plus faible possible
lorsqu’elle est utilisée pour des revascularisations nécessitant des
substituts de diamètre inférieur ou égal à 6 mm et qui présentent de
surcroît un faible débit intraluminal du fait du lit d’aval le plus
souvent réduit. Fiore et al [51] ont comparé la perméabilité à 30 jours
de différents types de prothèses implantées en remplacement de la
veine cave supérieure ou de la veine cave inférieure chez le chien et
ont conclu à une thrombogénicité des tubes en PET plus grande que
celle des prothèses en ePTFE. Goldman et al [60] ont comparé la
thrombogénicité de pontages fémoropoplités en PET, en ePTFE et
en veine saphène autologue réalisés chez l’homme, par la mesure
de la rétention de plaquettes marquées après 1, 3 et 7 jours
d’implantation. L’indice moyen de thrombogénicité des prothèses
en ePTFE était significativement inférieur à celui des prothèses en
PET, ces deux indices étant significativement supérieurs à celui des
veines autologues. Shoenfeld et al [ 1 4 0 ] ont comparé la
thrombogénicité de prothèses en PET, en ePTFE et en veine
ombilicale humaine traitée, par l’évaluation de la fixation
plaquettaire sur un modèle de shunt ex vivo. Ils ont conclu à une
thrombogénicité du PET plus importante que celle du ePTFE, ainsi
qu’à une majoration de l’activation plaquettaire dans le circuit en
présence de PET. Eldrup-Jorgensen et al [ 4 9 ] ont évalué la
thrombogénicité de prothèses de 4 mm de diamètre en PET, en
ePTFE et en veine ombilicale humaine traitée, par l’étude de
l’activation plaquettaire sur des shunts ex vivo de différents débits.
Ils ont également montré que le PET activait l’agrégation
plaquettaire de manière bien plus importante que le ePTFE et la
veine ombilicale humaine, quel que soit le débit du shunt. Callow et
al [20] ont également conclu à la thrombogénicité du PET plus
importante que celle du ePTFE sur un shunt ex vivo. Cependant,
une réduction de la thrombogénicité des prothèses en PET
imprégnées peut être obtenue par la fixation directe d’agents
antithrombotiques, soit directement [106], soit par l’intermédiaire
d’une matrice d’imprégnation résorbable [125]. Ces techniques n’ont
pas réellement encore fait la preuve de leur efficacité en clinique. Il
est donc clair qu’aucun substitut artériel synthétique ne présente les
qualités d’antithrombogénicité des substituts autologues, encore
faut-il que ces derniers soient traités, conservés et manipulés de la
manière la moins traumatisante pour en préserver l’endothélium.
En l’absence de substitut biologique autologue pour les pontages de
petits calibres, il est habituel de privilégier l’utilisation des substituts
en ePTFE.
¶ Cicatrisation
La cicatrisation et l’incorporation des prothèses vasculaires sont un
phénomène complexe et encore incomplètement connu. L’un des
principaux facteurs favorisants de la cicatrisation des prothèses est
leur porosité, ce facteur étant déterminant pour permettre la
recolonisation tissulaire. L’importance de la porosité a été
rapidement mise en évidence avec les travaux de Wesolowski et
al [165], ce facteur étant toujours pris en compte pour la construction
des nouveaux substituts vasculaires. Sur les modèles expérimentaux,
la cicatrisation et l’incorporation tissulaire des prothèses vasculaires
sont satisfaisantes puisqu’elles génèrent une capsule interne
8
Techniques chirurgicales
constituée de collagène et couverte d’un néoendothélium
biologiquement fonctionnel. Cependant, ce résultat n’est jamais
observé chez l’homme, chez qui la cicatrisation se résume à
l’incorporation de la partie externe de la prothèse dans la capsule
externe sans recolonisation complète de la structure prothétique et
de la capsule interne. La surface luminale ne possède donc jamais
les propriétés antithrombotiques de l’endothélium vasculaire [27, 32, 66,
165]
. Il ne semble pas exister de différences notables en matière de
cicatrisation entre les différents types de prothèses synthétiques.
Ainsi, le potentiel de cicatrisation ne nous semble pas pouvoir être
pris en compte comme critère de choix entre les substituts
vasculaires.
¶ Infectabilité
L’infectabilité et la résistance à l’infection du biomatériau constituant
une prothèse vasculaire sont deux éléments importants dans des
indications à haut risque infectieux telles que les pontages infrainguinaux, pontages qui sont le plus souvent réalisés pour une
indication de sauvetage de membre dans un contexte d’ulcérations
ou de nécroses distales surinfectées. Les principales études qui ont
comparé l’infectabilité des prothèses en PET à celle des prothèses en
ePTFE ont conclu à une meilleure résistance à la colonisation
bactérienne des prothèses en ePTFE. Rosenman et al [131] ont étudié
l’adhésion in vitro de staphylocoques dorés marqués à l’indium sur
des prothèses en PET, en ePTFE et en veine ombilicale humaine
interposées dans un circuit pulsé. L’adhésion bactérienne était la
plus faible sur les prothèses en ePTFE, celle-ci étant respectivement
cinq et 50 fois supérieure sur les veines ombilicales humaines et les
prothèses en PET. Schmitt et al [136] ont étudié in vitro l’adhésion de
plusieurs souches de bactéries sur des échantillons de prothèses en
PET et en ePTFE. L’adhésion bactérienne était la plus importante
sur les prothèses en PET, quelle que soit la souche bactérienne
étudiée. Sugarman [147] a également montré que l’adhérence
bactérienne in vitro était dix à 100 fois plus importante sur les
prothèses en PET que sur les prothèses en ePTFE, l’adhésion étant la
plus importante sur les prothèses en PET tricoté velours. Des études
expérimentales in vivo ont conclu à une moindre infectabilité des
prothèses en ePTFE [133], parfois à une moindre infectabilité des
prothèses en PET [105], voire à une infectabilité variant avec la durée
d’implantation de la prothèse [58]. Il n’existe donc pas de consensus
clair sur le choix de tel ou tel type de biomatériau dans un contexte
à haut risque infectieux. Cependant, nous pouvons retenir que, en
cas d’implantation d’une prothèse en milieu infecté, il est
recommandé d’utiliser systématiquement une homogreffe artérielle,
même si des cas sporadiques de succès d’implantation de prothèses
en PET imprégnées de matrices résorbables et d’antibiotiques ont
été rapportés. Nous pouvons également recommander d’utiliser des
prothèses en ePTFE pour la réalisation de pontages prothétiques en
milieu non infecté, mais chez des patients à haut risque infectieux
du fait de lésions trophiques distales.
¶ Biostabilité
La biostabilité du matériau constituant une prothèse vasculaire est
une propriété importante pour limiter les risques tardifs de
dégénérescence pouvant conduire à des complications telles que la
dilatation et les ruptures prothétiques. Cette propriété est très
importante pour les pontages soumis à de fortes contraintes tels que
les pontages sus-inguinaux. Cette complication est beaucoup plus
rare sur les pontages sous-inguinaux du fait des moindres
sollicitations mécaniques et des taux de perméabilité plus réduits
dans cette localisation. La biostabilité d’une prothèse n’est pas
seulement le fait du biomatériau en lui-même mais aussi du concept
sous lequel il est utilisé. L’analyse de la littérature nous montre que
la biostabilité d’un modèle de prothèse n’est pas toujours prédictible.
En effet, les tests qui sont appliqués aux prothèses vasculaires avant
leur mise sur le marché sont essentiellement descriptifs et non
prédictifs [46]. Il est donc important de suivre tout nouveau modèle
de prothèse vasculaire pour détecter précocement une tendance à la
dégradation. Cette attitude entre dans le cadre général de la
matériovigilance. Nous avons pu montrer avec nos travaux qu’il est
Techniques chirurgicales
Substituts vasculaires
non seulement primordial de déclarer tous les incidents ou accidents
survenant sur des implants, mais également de les analyser pour
pouvoir déterminer les causes de leurs échecs. Cependant, malgré
l’existence de lois européennes bien définies dans le cadre de la
matériovigilance, le nombre de déclarations rapportant des incidents
ou des accidents est très largement inférieur à la réalité. La première
directive européenne sur la matériovigilance dans le domaine du
matériel médical a été prise le 20 juin 1990 (90/385/CEE, JOCE
n° L189/17) et a été modifiée le 14 juin 1993 (93/42/CEE, JOCE
n° C172, 12 juillet 1993). Cette directive établit clairement l’obligation
de déclarer tout défaut dans les caractéristiques ou les performances
d’un dispositif médical qui soit potentiellement susceptible de
conduire à la mort ou à une altération majeure de la santé des
patients. Tous ces incidents doivent être déclarés à une autorité
compétente qui devra prendre les mesures nécessaires afin
d’informer le fabricant du dispositif incriminé ou son représentant
au sein de la Communauté Européenne. Une évaluation du
dispositif est demandée, si possible en impliquant le fabricant, afin
de permettre aux autorités sanitaires d’établir les mesures de
précaution nécessaires. Les chirurgiens ont par conséquent
l’obligation de déclarer tous les incidents et de conserver les
prothèses explantées afin de permettre les investigations, qui doivent
idéalement être réalisées par un laboratoire indépendant. Il est
important de diffuser l’information sur la matériovigilance à la
communauté médicale pour permettre une augmentation du
nombre de cas déclarés. En effet, seule la collecte d’un grand nombre
d’explants permettra de fournir des données épidémiologiques
interprétables permettant de différencier des échecs sporadiques de
comportements dégénératifs plus endémiques. L’analyse structurelle
des explants médicaux doit répondre à notre sens à des impératifs
stricts de qualité et de confidentialité.
L’évolution des prothèses vasculaires s’est faite par l’introduction
permanente de nouveaux concepts (cf supra). Certains concepts ont
fait la preuve de leur efficacité, d’autres ont été abandonnés du fait
de l’insuffisance de certaines de leurs propriétés, et tout
particulièrement de leur biostabilité. Il serait idéal de pouvoir
prédire la stabilité à long terme d’une nouvelle prothèse avant
l’utilisation clinique par la réalisation de tests mécaniques, in vitro,
les plus représentatifs possibles des conditions physiologiques
auxquelles elles seront soumises après leur implantation. De telles
prédictions nécessiteront également une meilleure connaissance des
conditions physicochimiques et hémodynamiques auxquelles sont
soumis les différents matériaux utilisés pour la construction d’une
prothèse vasculaire. Chaque fois qu’un nouveau modèle ou concept
de prothèse vasculaire est utilisé en clinique humaine, celui-ci
devrait être l’objet d’une surveillance répondant à une organisation
similaire à celle des centres de pharmacovigilance. Seule cette
attitude peut permettre de dépister précocement des échecs et d’en
évaluer l’incidence et éventuellement les causes. En effet, toutes les
complications ne sont pas rapportées dans la littérature et,
lorsqu’elles le sont, c’est avec un délai moyen de 1 à 2 années. De
plus, l’analyse physicochimique systématique d’explants humains,
quelle qu’en soit la cause d’explantation, permettrait également de
dépister une évolution marquée d’un concept vers la dégradation
avant même que surviennent les premières complications cliniques.
CRITÈRES DE CHOIX D’UNE PROTHÈSE VASCULAIRE
EN FONCTION DE SON INDICATION
¶ Choix d’une prothèse dans les revascularisations
sous-inguinales
Il est admis que la veine saphène interne utilisée comme greffon
inversé ou in situ est le meilleur substitut des artères de petit calibre.
La veine saphène est donc utilisée chaque fois que possible pour les
revascularisations sous-inguinales, notamment quand l’anastomose
distale se fait sous l’articulation du genou [168]. L’utilisation première
d’une prothèse synthétique pour un pontage sus-articulaire afin de
préserver le capital veineux pour une chirurgie sous-articulaire
ultérieure est encore une option discutée. Certaines équipes n’ont
43-008
pas observé de différences de résultats entre les pontages utilisant
une greffe veineuse et ceux utilisant une prothèse en ePTFE et
préconisent le choix préférentiel du ePTFE [19], alors que d’autres
équipes recommandent celui de la veine saphène qui offrirait de
meilleurs résultats [83, 157].
Le choix du type de prothèse synthétique en l’absence de greffon
veineux utilisable pose plus de problèmes. Les performances des
prothèses en ePTFE ont été étudiées dans des études non
comparatives. Les principales études ont rapporté les taux de
perméabilité primaire suivants pour les pontages sous-inguinaux en
ePTFE : 38 % pour tous les pontages sous-inguinaux et 54 % pour
les pontages sus-articulaires à 5 ans dans la série de Veith et al [157] ;
48 % à 4 ans pour Evans et al [50] ; 40 % à 5 ans pour McAuley et
al [100] ; 30 % à 5 ans pour Charlesworth et al [33] ; 57 % pour tous les
pontages sous-inguinaux et 63 % pour les pontages sus-articulaires
à 5 ans pour Quinones-Baldrich et al [124] ; 37 % à 4 ans pour des
revascularisations distales pour sauvetage de membre pour Ascer et
al [8].
Les études non comparatives qui ont étudié les taux de perméabilité
des prothèses en PET implantées comme pontages sous-inguinaux
ont principalement été réalisées sur des séries de prothèses
comportant un support externe. Sauvage, le promoteur de ce
concept, a obtenu les meilleurs résultats [86, 138] avec des taux de
perméabilité primaire de 78 % à 7 ans pour les prothèses de 6 mm
de diamètre implantées sur l’artère poplitée sus-articulaire, ce taux
passant à 47 % pour les pontages sous-articulaires. Kremen et al [89]
observaient une perméabilité primaire de 80 % à 1 an, comme
Clifford et al [35], le taux de perméabilité à 2 ans étant de 56 % pour
ces derniers auteurs. Reichle [127] a observé plus de 50 % de
perméabilité à 7 ans avec des prothèses en PET ne comportant pas
de support externe, ce taux étant supérieur à 50 % à 6 ans pour les
pontages sous-articulaires.
Les premières études qui ont comparé les résultats cliniques des
prothèses en ePTFE à ceux des prothèses en PET étaient
rétrospectives. Rosenthal et al [132] ont obtenu les mêmes résultats
dans une comparaison d’une série de 100 prothèses en ePTFE avec
une série de 100 prothèses en PET implantées comme pontages
fémoropoplités sus-articulaires pour une indication de claudication
intermittente. Les taux de perméabilité primaire pour les prothèses
en PET et en ePTFE étaient respectivement de 57 et 65 % à 5 ans et
de 32 et 31 % à 10 ans, et n’étaient pas statistiquement différents.
Pevec et al [119] ont comparé de manière rétrospective les résultats de
38 prothèses en PET à ceux de 85 prothèses en ePTFE implantées
comme pontages fémoropoplités, 50 % des pontages de chaque
groupe étant des pontages sus-articulaires. Les taux de perméabilité
primaire pour les prothèses en PET et en ePTFE étaient
respectivement de 55 et 34 % à 3 ans et de 48 et 27 % à 6 ans, cette
différence en faveur du PET étant statistiquement significative. Les
études prospectives randomisées qui ont été réalisées plus
récemment n’ont pas montré de différence statistiquement
significative entre les pontages fémoropoplités en PET et en ePTFE [1,
63, 120, 129]
. L’utilisation de l’un ou l’autre de ces deux matériaux peut
donc être proposée indifféremment. Devine et al [44] ont obtenu de
meilleurs résultats avec une prothèse en PET incorporant de
l’héparine dans sa matrice d’imprégnation qu’avec une prothèse en
ePTFE.
Enfin, dans les indications de pontages fémorojambiers, les meilleurs
résultats sont incontestablement obtenus avec la veine autologue.
Les résultats des pontages prothétiques sont décevants, même en
cas d’utilisation de techniques d’interposition veineuse
anastomotique telles que les collerettes de Miller [84, 117]. L’utilisation
d’une homogreffe artérielle représente une alternative. Cependant,
ses résultats sont plus proches de ceux des prothèses que de ceux de
la veine saphène autologue [4].
¶ Choix d’une prothèse dans les revascularisations
sus-inguinales
Les prothèses textiles tissées ou tricots chaîne en PET se sont
largement imposées pour ce type de chirurgie. Actuellement, la
9
43-008
Substituts vasculaires
majorité des chirurgiens les utilisent sous leur forme imprégnée,
avec de bons résultats cliniques [23, 25, 28]. L’utilisation de prothèses de
gros calibre en ePTFE est plus marginale, avec cependant de bons
résultats cliniques [118]. L’utilisation de matériaux biologiques pour
ce type de chirurgie se limite au traitement des infections par des
homogreffes artérielles conservées [10].
Perspectives d’avenir
Les perspectives d’avenir des substituts incluront tout d’abord
l’amélioration des produits actuellement disponibles. Ces
améliorations devront porter sur leurs trois propriétés principales
que sont la biocompatibilité, l’antithrombogénicité et la stabilité.
L’amélioration de la biocompatibilité et de l’antithrombogénicité des
prothèses vasculaires pourrait être obtenue par des traitements de
Techniques chirurgicales
surface tels que le greffage de polymères par plasma, le greffage de
charges électriques négatives ou de carbone [76, 77, 79]. Ces propriétés
pourront être également modulées en incorporant à la prothèse au
moment de son implantation des produits actifs tels que des
éléments cellulaires ou des facteurs de croissance [22, 53, 61, 64, 164]. La
phase ultime de l’ingénierie tissulaire permettrait de produire in
vitro de véritables artères différenciées à partir d’éléments cellulaires
humains qui pourraient être réimplantées chez le patient
donneur [91].
L’amélioration de la stabilité des substituts vasculaires passera par
des meilleures connaissances des phénomènes de vieillissement des
structures polymériques à long terme, ainsi que par une
optimisation des processus de fabrication. Les programmes de
matériovigilance seront également très importants pour surveiller la
stabilité de tout nouveau concept de substitut vasculaire qui sera
introduit sur le marché.
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Encyclopédie Médico-Chirurgicale 43-225 - 26-570-A-10
43-225
26-570-A-10
Prise en charge des lymphœdèmes
des membres
S Vignes
Résumé. – La prise en charge des lymphœdèmes des membres est basée sur la physiothérapie décongestive
qui comprend le rappel des conseils d’hygiène de vie, la réalisation de drainages lymphatiques manuels, la
pose de bandages peu élastiques, l’apprentissage des autotechniques, le port de contention élastique, les
soins de peau pour éviter les portes d’entrée infectieuses, et la gymnastique spécifique. La physiothérapie
décongestive peut être réalisée lors de traitements intensifs hospitaliers avec une diminution importante de
volume, puis poursuivie en ambulatoire. On peut y associer, si nécessaire, un amaigrissement ou un suivi
psychologique. La chirurgie de résection ou de reconstruction est peu utilisée dans les lymphœdèmes des
membres en raison d’une efficacité variable, mais peut être nécessaire lors des atteintes génitales. Les objectifs
de la prise en charge sont d’obtenir, non seulement la diminution du volume du lymphœdème, mais aussi la
motivation nécessaire au suivi médical régulier et prolongé indispensable au traitement de cette maladie
chronique.
© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : lymphœdème, physiothérapie décongestive, drainage lymphatique manuel, bandages peu
élastiques, contention élastique, chirurgie lymphatique.
Introduction
Les lymphœdèmes (LO) sont la conséquence d’un
dysfonctionnement du système lymphatique. On définit les LO
secondaires à des lésions des ganglions lymphatiques, soit dans un
but diagnostique (biopsies), soit à visée thérapeutique (évidement,
radiothérapie). Ces LO se rencontrent essentiellement au membre
supérieur après traitements des cancers du sein, mais peuvent aussi
toucher les membres inférieurs après traitements de différents
cancers (col utérin, ovaire, prostate, vulve, verge, mélanome,
lymphome de Hodgkin…) [77]. À l’inverse, les LO primitifs touchent
presque exclusivement les membres inférieurs, et surviennent
préférentiellement chez le sujet jeune en dehors de toute
intervention sur les aires ganglionnaires. Les LO sont des maladies
chroniques dont la prise en charge reste symptomatique, mais qui
repose cependant sur des consensus internationaux.
Conseils pratiques et éducation
OBJECTIFS
Il s’agit de la première étape de la prise en charge des LO [28]. Elle
est indispensable pour obtenir une bonne compliance aux
traitements, et est adaptée à chaque patient. Elle débute lors de la
première consultation et est approfondie lors d’éventuelles
hospitalisations. Les objectifs sont d’expliquer la maladie et son
Stéphane Vignes : Chef de service, unité de lymphologie, hôpital Cognacq-Jay, site Broussais, 102, rue
Didot, 75014 Paris, France.
caractère chronique, de prévenir de son absence de gravité (par
comparaison aux cancers dont ont souffert la plupart des patients,
et notamment le cancer du sein), de connaître les mesures pour
éviter les complications ou l’aggravation du LO. Les différents
intervenants prenant en charge les LO peuvent y participer :
médecins, kinésithérapeutes et pédicures.
SURVENUE ET CHRONICITÉ DU LO
La survenue du LO est un événement très mal vécu, que ce soit
dans les formes primitives des membres inférieurs, notamment chez
la jeune femme où le préjudice esthétique est très important, ou dans
les formes secondaires (la plupart du temps à un cancer : sein, col
utérin, prostate…) où le LO rappelle en permanence la maladie
parfois ancienne, et que l’entourage ne connaissait pas toujours. Le
sentiment de culpabilité est souvent présent avec la recherche d’une
cause déclenchante dont le patient n’aurait pas été prévenu des
conséquences néfastes éventuelles : geste sur le membre atteint,
effort important avec le membre supérieur après le traitement d’un
cancer du sein. Dans ces situations, il faut rappeler la fréquence
d’environ 15-20 % de survenue d’un LO du membre supérieur après
cancer du sein [59] qui, une fois apparu, a une faible probabilité de
disparaître spontanément. L’acceptabilité n’en est que plus difficile,
même si les perspectives d’amélioration parfois non négligeables
sont réelles. L’adhésion et la compliance aux traitements sont
nettement dépendantes de l’acceptabilité du LO.
MESURES DE PRÉVENTION
Les mesures de prévention visent à éviter l’aggravation et les
complications du LO [33]. Les mesures classiques de préservation du
membre atteint de LO, notamment au membre supérieur après
traitement d’un cancer du sein, sont rappelées : éviter les blessures
Toute référence à cet article doit porter la mention : Vignes S. Prise en charge des lymphœdèmes des membres. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales Chirurgie vasculaire, 43-225, Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation, 26-570-A-10, 2003, 9 p.
150 620
EMC [204]
Prise en charge des lymphœdèmes des membres
43-225
26-570-A-10
même minimes, portes d’entrée infectieuses potentielles (griffures,
morsures, brûlures, piqûres d’insecte ou d’aiguille à coudre,
acupuncture), le port de charge lourde, les vêtements serrés sur le
membre atteint, les prélèvements sanguins, la prise de la pression
artérielle du côté du LO. Tous ces gestes qui comportent un risque
d’effraction cutanée doivent faire porter une protection, en
particulier des gants. Toutes ces recommandations, bien que
consensuelles, sont empiriques, et ne sont pas étayées par des études
bibliographiques [28, 42]. Par ailleurs, il est nécessaire de prévenir que
les voyages en avion peuvent déclencher ou aggraver un LO du
membre supérieur ou inférieur, en raison de la diminution de la
pression et de la réduction de l’activité musculaire. La prévention
de ces complications est basée sur le port d’une compression
élastique plus forte, ou de bandages peu élastiques [22]. L’exposition
à la chaleur est également déconseillée (pays chauds, saunas, bains
chauds) en raison du risque d’augmentation du volume du LO.
RESTRICTION D’ACTIVITÉ
Les activités physiques violentes (squash, tennis, ski) ou comprenant
des mouvements répétitifs (step, rameur, aviron) sont déconseillées.
Là encore, cette notion, bien que classique, ne repose sur aucune
certitude. En effet, dans une étude comprenant 20 femmes,
l’entraînement intensif prolongé pour une course de dragon-boat
(sorte de canoë de grande taille), n’augmentait pas le risque de
survenue de LO du membre supérieur chez des femmes traitées
pour cancer du sein par chirurgie, curage axillaire et radiothérapie
pour 65 % d’entre elles, avec un recul de 8 mois [43] . Il est
probablement nécessaire de déconseiller certains sports, mais de ne
pas totalement supprimer toute activité physique. En effet, la prise
de poids qui en découlerait serait un facteur d’aggravation du LO.
D’autre part, l’activité physique modérée permet de diminuer les
symptômes d’anxiété ou de dépression chez les femmes ayant eu un
cancer du sein, et améliore aussi la qualité de vie [56, 78]. La plupart
des auteurs recommandent donc le port de contention élastique lors
d’exercices physiques [15]. Dans une étude cas-témoins comparant
deux populations de femmes ayant subi le même traitement pour
un cancer du sein, l’une avec LO, la seconde sans LO, Johansson et
al avaient montré qu’il n’y avait pas de différence entre les deux
groupes pour des types et des intensités d’activité comparables.
Ainsi, il serait souhaitable de ne pas nécessairement diminuer
l’activité mais de la personnaliser [47].
SURVEILLANCE DU POIDS
Ce paramètre a une importance particulière dans les LO, notamment
du membre supérieur après cancer du sein [95]. L’existence d’un
surpoids en préopératoire est un facteur de risque pour l’apparition
d’un LO secondaire au traitement d’un cancer du sein. Les
hypothèses physiopathologiques comprendraient une
hypersensibilité des tissus à la radiothérapie du fait de l’épaisseur
du panicule adipeux, ou encore une très forte hausse de la pression
lymphatique après le curage ganglionnaire en raison de l’importance
du volume de tissu à drainer [59]. Un indice de masse corporelle [IMC
= poids (kg) / taille2 (m)] supérieur à 29,2 kg/m2 est associé à un
taux de 36 % de LO à 5 ans contre 12 % chez les femmes ayant un
IMC inférieur [53]. La prise de poids postopératoire pourrait être
également un facteur prédictif de la survenue du LO [73]. La prise en
charge nutritionnelle est donc fondamentale, pour favoriser un
amaigrissement bénéfique pour le LO. Alors qu’un régime
hypocalorique peut être utile, les tentatives de restriction des
triglycérides à longues chaînes, proposée pour deux femmes ayant
un LO primitif des membres inférieurs, n’ont pas abouti à des études
bien conduites pour pouvoir apprécier l’effet de telles pratiques [81].
Mesures volumétriques
Avant tout traitement, il est indispensable de mesurer le volume du
LO. La technique de référence reste la volumétrie à eau, qui permet
2
Techniques chirurgicales
Kinésithérapie
d’apprécier le volume du membre en totalité main et pied compris.
Sa mise en œuvre n’est pas simple car elle demande du matériel, du
personnel, du temps et surtout une standardisation (définition de la
hauteur mesurée, température constante de l’eau) [50]. Cette méthode,
bien que considérée comme « idéale », est peu utilisée en recherche
ou en pratique courante, au profit de mesures volumétriques
estimées par calcul. En effet, les mesures périmétriques prises à
intervalles réguliers (tous les 5 ou 10 cm) permettent de calculer un
volume en millilitres par assimilation des segments de membres à
des troncs de cônes selon la formule suivante : h(C2 + Cc + c2) / 12
p où C est la grande circonférence du cône, c la petite et h l’intervalle
entre deux mesures. Cette méthode est très fiable, et reproductible
aux membres supérieurs [37, 58] et inférieurs [10]. Il existe également
des techniques automatisées et fiables de mesures de volume, mais
dont le coût reste élevé [82].
Drainages lymphatiques manuels
(DLM)
Dès 1892, Winiwarter avait suggéré que les drainages lymphatiques
et les bandages pouvaient réduire le volume d’un LO [96]. Puis
Vodder [48] précisa les techniques de DLM qui furent reprises en 1950
par Stillwell à la Mayo Clinic [83] puis par Leduc et Földi dans les
années 1970 [ 3 5 ] . Les DLM s’intègrent actuellement dans la
physiothérapie décongestive complète (ou complexe) qui comprend
les bandages peu élastiques, les soins de peau, les exercices sous
bandages et le port de contention élastique. Malgré les différentes
techniques de ces méthodes, les DLM ont les mêmes objectifs :
stimuler le lymphangion, unité contractile lymphatique, dans une
zone atteinte par le LO, et faire circuler la lymphe d’un territoire
atteint par le LO vers un territoire sain en utilisant les voies de
dérivation. Les DLM doivent être lents et non douloureux, exercer
une pression faible (< 40 mmHg), débuter par la racine du membre
atteint pour finir en distalité (main, pied) et alterner les manœuvres
d’appel et de résorption, après avoir au préalable effectué des
manœuvres de « pompages » sur les aires ganglionnaires (inguinale,
sus-claviculaire, axillaire). La durée minimale requise est de
30 minutes. Les DLM doivent être pratiqués par des
kinésithérapeutes formés à ces techniques, à un rythme de trois à
cinq par semaine en phase d’attaque, et de deux à trois par semaine
en phase d’entretien. Ils apportent une diminution de la tension
cutanée et ont un effet relaxant. Utilisés seuls, les DLM ont peu
d’effet sur le volume du LO. En effet, dans une série récente
composée de 42 femmes ayant un LO après cancer du sein, les DLM
n’apportaient pas de bénéfice comparativement au traitement
« standard » comportant contention élastique, soins de peau,
éducation et exercices [2]. En revanche, les DLM réalisés avant les
bandages peu élastiques ont un effet synergique sur la réduction du
volume du LO [45].
Bandages peu élastiques
Les bandages représentent l’élément essentiel et fondamental de la
physiothérapie décongestive destinée à réduire le volume du LO. Il
s’agit de poser, sans les serrer, des bandes peu élastiques (c’est-àdire à étirement court) sur un capitonnage fait, soit de coton, soit de
mousse ou des deux. Après la mise en place d’un jersey sur le
membre à traiter, le coton en large bande (après avoir été dédoublé)
ou la mousse également en bandes, est posé. Sur les zones
particulièrement touchées par le LO (régions rétromalléollaires, face
externe de l’avant-bras), on peut y adjoindre des morceaux de
mousse préformée. L’étape suivante est la pose de bandes peu
élastiques de type Somost en partant des extrémités jusqu’à la racine
du membre (fig 1, 2, 3). En cas d’atteinte sous-gonale isolée, le
bandage peut s’arrêter au genou (bandage en botte). Ces bandes sont
posées en deux à quatre épaisseurs (multicouches). La technique doit
être irréprochable, car ces bandages doivent pouvoir être maintenus
24 à 36 heures sans « glisser » ni serrer. La pression exercée au repos
Techniques chirurgicales
Kinésithérapie
1
Prise en charge des lymphœdèmes des membres
Bandage de la main, avec mousse N/Nt sur l’avant-bras.
est faible, ce qui permet de les supporter (à la différence des bandes
élastiques), mais augmente nettement lors de la contraction
musculaire puisqu’ils sont peu extensibles. Lors d’un traitement
intensif en hospitalisation, ils sont renouvelés tous les jours, mais en
traitement ambulatoire, ils peuvent être faits trois fois par semaine
pendant 14 à 21 jours. Les bandages succédant aux DLM vont
permettre de réduire significativement le volume du LO. Les
différentes séries de la littérature confirment cette efficacité. Ces
études concernaient essentiellement les LO du membre supérieur
après cancer du sein. La durée de traitement variait de 2 à
4 semaines, et l’appréciation volumétrique était faite par des
mesures périmétriques. La durée d’évolution du LO était variable,
allant de moins de 1 ans à plus de 5 ans. Dans toutes les situations,
il y avait, en fin de traitement, une réduction de volume du LO
variant de 25 à 73 %, notamment en raison des méthodes de calcul
différentes [13, 23, 29, 34, 45, 52, 90]. Les non-répondeurs au traitement
semblent très peu nombreux (5 %) [34]. Un autre élément important
est le maintien à distance, 6 mois, 1 an voire 3 ans, du bénéfice
obtenu après le traitement intensif [12, 34, 52]. Plus la compliance au
traitement d’entretien (pratiques d’autobandages, DLM, port de
contention élastique) est importante, plus le bénéfice se maintient.
Des traitements plus courts sont également efficaces. Ainsi, dans une
série de 79 patients, un traitement durant en moyenne 8 jours, avait
entraîné une diminution de 44 % de l’excès de volume des LO
secondaires du membre supérieur, et de 42 % des LO du membre
inférieur [87]. L’efficacité clinique de ces techniques a également été
confirmée par la diminution in vivo de la pression capillaire
lymphatique [36] . La physiothérapie décongestive permet non
seulement de diminuer le volume du LO, mais entraîne également
une amélioration de la qualité de vie [93].
Apprentissage des autotechniques
Il est indispensable d’apprendre les techniques d’autobandages
(voire d’autodrainage), notamment en cas d’absence (ou en cas
d’éloignement géographique) de kinésithérapeutes compétents ou
d’horaires incompatibles avec des soins. Cet apprentissage s’adresse
à des personnes motivées, surtout lorsque les atteintes sont distales
(main). L’aide de l’entourage est parfois nécessaire. Les techniques
sont adaptées en fonction de la compliance espérée, car il s’agit d’un
traitement au long cours. Les techniques peuvent être simplifiées
avec la pose, par exemple, d’un bandage sur une ancienne
contention, ou au contraire réalisées dans les règles de l’art. Il est
utile, de temps à autre, de remontrer les gestes lors de séances de
réapprentissage. La pratique de ces autotechniques, associée au port
d’une contention élastique et à l’éducation permet, après un
traitement intensif pour LO secondaire à un cancer du sein, de
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26-570-A-10
2
Lissage sans traction de la bande peu élastique de type Somost d’un membre
inférieur.
3
Bandage peu élastique
complet d’un membre inférieur.
maintenir la réduction volumétrique du LO de 6 à 12 mois [18].
Parallèlement, cette prise en charge favorise l’autonomie et améliore
la qualité de vie des femmes [61].
Exercices sous bandages
Ils font partie à part entière de la physiothérapie décongestive, et
participent ainsi à la réduction de volume du LO. En effet, la
contraction musculaire permet d’augmenter le débit lymphatique et
la résorption des protéines par ouverture-fermeture des collecteurs
lymphatiques initiaux [54, 63]. Les exercices sont brefs mais répétés
dans la journée sans jamais être fatigants. Certains auteurs proposent
un travail des muscles proximaux et des territoires exempts de LO
avant les régions lymphœdémateuses, et d’autres, des exercices
contre résistance [60] . Il n’existe aucun consensus sur le type
d’exercice à pratiquer. L’exercice physique (en dehors des bandages)
est indiqué, en évitant les sports violents, car il entraîne
3
43-225
26-570-A-10
Prise en charge des lymphœdèmes des membres
4
Lymphœdème primitif
du membre inférieur droit :
papillomatose floride des
orteils.
fréquemment une sensation d’allègement du membre atteint.
Cependant, il est préférable de porter une contention élastique pour
le pratiquer [15].
Séances de repos en position surélevée
Elles sont toujours proposées en complément des DLM et des
bandages peu élastiques. Même si elles diminuent l’impression de
lourdeur du membre atteint, utilisées seules, elles ne semblent pas
apporter de bénéfice volumétrique [85]. Malgré ces résultats, elles sont
conseillées et pratiquées de préférence, sous bandages, à intervalle
régulier, et en association avec les autres éléments du traitement [15].
Soins de peau, pédicurie
Les LO représentent le facteur de risque le plus important de
survenue d’érysipèles des membres inférieurs, avec un risque relatif
estimé à 71,2 [32]. La recherche et le traitement des intertrigos
interorteils sont indispensables à la prise en charge. La prévention
est également importante, par séchage soigneux des espaces
interorteils après un bain ou une douche. Toutes les autres portes
d’entrée infectieuse sont à traiter : ulcères, plaies traumatiques,
brûlures, ainsi que les vésicules lymphatiques siégeant sur les orteils,
la cheville ou dans le creux poplité, et qui peuvent se rompre. Ces
vésicules doivent parfois être détruites par laser, mais leur
réapparition à distance est fréquente. Les soins de pédicurie sont
nécessaires pour l’entretien des ongles, souvent incarnés, ou pour la
réduction des hyperkératoses responsables de fissures, et dues à des
troubles de la statique du pied (fig 4). Au membre supérieur, toute
plaie même minime peut se compliquer d’érysipèle : soins de
manucure, griffures d’animaux, brûlures, piqûres d’aiguille à coudre.
Les érysipèles peuvent être récidivants (plus de trois épisodes) et
aggraver le volume du LO. Dans cette situation, il est parfois utile
d’instaurer une antibioprophylaxie, qu’il existe un LO du membre
inférieur ou supérieur [66, 91]. Un traitement par pénicilline à la
libération prolongée comme l’Extencillinet, à la dose de 2,4 MUI
toutes les 2-3 semaines (ou par pénicilline par voie orale), en
l’absence d’allergie à la pénicilline, est proposée par la Conférence
de Consensus sur la prise en charge des érysipèles et fasciite
nécrosante [9]. La durée de la prophylaxie n’est pas définie, mais une
durée prolongée (plus de 1-2 ans) semble nécessaire.
Contention élastique
Le terme de contention élastique est toujours utilisé, alors qu’il s’agit
en fait de compression élastique. En effet, la pression s’exerce en
permanence sur le membre à traiter en raison de la présence des
fibres élastiques, alors que l’on devrait réserver le terme de
contention aux seuls bandages peu élastiques qui exercent une
pression faible au repos mais élevée à l’effort. Après la réduction du
volume du LO obtenue par l’association DLM-bandages peu
élastiques, le port d’une contention est obligatoire. Il faut parfois
être convaincant pour la faire accepter (et porter) quotidiennement
4
Techniques chirurgicales
Kinésithérapie
par les patients. Il n’est généralement pas nécessaire de la garder la
nuit. Le type de contention doit être adapté au LO : manchon avec
ou sans mitaine (couvrant la main) pour les membres supérieurs,
bas jarret, bas cuisse, collant, hémicollant ou panty pour les
membres inférieurs. Les forces de pressions sont définies, en France,
en classe I (10-15 mmHg), II (15-20 mmHg), III (20-36 mmHg) et IV
(> 36 mmHg) ; à classes identiques, elles sont inférieures à celles des
autres pays européens. Au membre supérieur, les contentions de
classe II ou III peuvent être proposées, alors qu’au membre inférieur,
il faut privilégier une classe III ou IV (avec une éventuelle
superposition). Dans la plupart des cas, les contentions sont réalisées
sur mesure et sont changées tous les 3 à 4 mois, en raison de leur
perte d’efficacité. Les contentions élastiques seules entraînent une
diminution modeste du volume du LO, mais surtout permettent de
maintenir le résultat et d’éviter la reprise volumétrique [11, 98]. En
effet, Badger et al avaient comparé, dans une étude randomisée
comprenant 83 patients avec un LO du membre supérieur ou
inférieur, le traitement intensif de physiothérapie décongestive
pendant 18 jours suivi du port d’une contention élastique, à la
contention seule. Les résultats étaient appréciés par volumétrie à la
24e semaine. Le pourcentage de diminution d’excès de volume était
de 31 % dans le groupe physiothérapie puis contention, et de 15,2 %
dans le groupe contention seule [4]. Ce résultats confirmaient ceux
d’une étude ouverte précédente, portant sur 120 femmes ayant un
LO secondaire du membre supérieur, dans laquelle la diminution
de volume était de 14,7 % à 6 mois [11]. Dans une autre étude, la
diminution volumétrique due à la contention seule était estimée à
seulement 7 % [46].
Prise en charge psychologique
Le LO est une pathologie chronique qui est toujours mal vécue, qu’il
s’agisse des formes primitives de l’adolescent et notamment des
jeunes filles avec un problème esthétique majeur, ou des formes
secondaires en particulier du membre supérieur après cancer du
sein. Dans cette dernière situation, plusieurs sentiments différents
sont intriqués : le reproche envers le chirurgien de ne pas avoir
prévenu du risque de LO, le manque de conseils de prévention du
LO, l’impression souvent très négative de la radiothérapie, la
culpabilité d’avoir effectué un geste « interdit » comme le port de
charge lourde, et surtout l’impression de n’être pas prise en charge.
Ainsi, on retrouve plus fréquemment une anxiété, un syndrome
dépressif chez les femmes ayant un LO secondaire du membre
supérieur, comparativement aux femmes ayant eu un cancer du sein
sans LO [69, 88]. D’autres traits de personnalité ont été également mis
en évidence par le « test du Bonhomme » et le test de Rorschach :
sentiment d’infériorité, de frustration face à leur image sexuelle, de
problèmes relationnels dus à une certaine psychorigidité et une
difficulté pour exprimer leur sentiments [1]. Une prise en charge
spécifique, psychologique voire psychanalytique et/ou
médicamenteuse, peut être utile chez certains patients.
Pressothérapie
Il s’agit essentiellement de la pressothérapie pneumatique
multichambre, car la pressothérapie au mercure, développée en
France par Cartier, n’est presque plus utilisée [ 2 1 , 6 7 ] . Les
recommandations canadiennes et américaines mentionnent cette
technique, qui reste controversée et dont les indications sont
difficiles à poser en raison des résultats discordants des différentes
études [28, 42]. Dans l’étude de Swedborg, la réduction volumétrique
du LO secondaire du membre supérieur était supérieure de 18 % à
celle induite par la compression élastique seule [84]. Au contraire,
dans l’étude de Dini et al, la pressothérapie n’apportait aucun
bénéfice. Cette étude randomisée avait comparé la pressothérapie
pneumatique chez 80 femmes avec un LO secondaire du membre
supérieur qui avaient cinq séances par semaine pendant 2 heures
2 semaines consécutives, suivies de 5 semaines d’arrêt puis d’un
Prise en charge des lymphœdèmes des membres
43-225
Techniques chirurgicales
26-570-A-10
Kinésithérapie
nouveau cycle. On notait seulement une tendance non significative
une autorisation de mise sur le marché (AMM) dans le traitement
à la diminution du volume du LO [ 3 1 ] . Plus récemment, la
du LO du membre supérieur après traitement radiochirurgical du
pressothérapie multichambre a été utilisée, dans une étude
cancer du sein, en complément des méthodes physiques et surtout
randomisée, en association avec la physiothérapie décongestive
de la contention élastique adaptée ou utilisée seule chez des
intensive dans le traitement de LO du membre supérieur après
patientes ne pouvant bénéficier du traitement physique qui est le
cancer du sein. La réduction volumétrique était supérieure à la
traitement princeps du LO.
physiothérapie seule, mais le bénéfice ne se maintenait pas à j40. En
D’autres molécules ont aussi été testées dans les LO. Les O-(btraitement d’entretien, elle permettait une réduction modeste,
hydroxyéthyl)-rutosides, utilisés dans les LO primitifs des membres
comparativement aux femmes recevant des DLM et portant une
inférieurs et les LO des membres supérieurs après traitement de
contention élastique [86]. Par ailleurs, il est nécessaire de prendre en
cancer du sein, apportaient une amélioration du volume du LO, de
compte le risque d’extension du LO aux organes génitaux externes
la souplesse de la peau, une diminution de la sensation de lourdeurs
lors de la pressothérapie pour un LO des membres inférieurs [14]. La
et de tension cutanée [64, 74] . Ils réduisent l’hyperperméabilité
prudence est donc de mise ; si la pressothérapie est utilisée, elle le
capillaire uniquement des vaisseaux inflammatoires, car ils sont sans
sera avec des pressions inférieures à 40 voire 30 mmHg (des
effet sur des vaisseaux dont la perméabilité est normale [74]. Les
tentatives de pressothérapie à forte pression, 80-130 mmHg, ayant
flavonoïdes (Daflont) ou l’extrait hydroalcoolique de Ruscus
été insuffisamment évaluées [68, 76]), d’autant que les appareils tendent
aculeatus associé à des flavonoïdes (Cyclo 3t fort), dont les essais ne
à afficher des pressions inférieures à celles effectivement reçues [79].
permettent pas une évaluation précise dans le traitement des LO [27,
71]
, n’ont pas d’AMM dans le traitement du LO.
Traitement médicamenteux
AUTRES ALTERNATIVES THÉRAPEUTIQUES
Les premiers produits utilisés ont été les diurétiques , mais ils ne
sont plus recommandés ni utilisés actuellement [28, 42] en raison de
leur faible efficacité et de leurs effets secondaires potentiels.
[25]
Le zinc a été proposé dans le syndrome des ongles jaunes associé au
LO avec, dans un cas, disparition du LO en quelques mois sans
récidive après 4 ans [3], et le sélénium oral en complément de la
physiothérapie décongestive [49].
BENZOPYRONES
C’est la principale classe thérapeutique utilisée, qui comprend les
coumariniques (a-benzopyrones) et les flavonoïdes (cbenzopyrones). Ces molécules ont les propriétés pharmacologiques
communes suivantes :
– augmentation de la contractilité des capillaires lymphatiques ;
– réduction de la perméabilité des vaisseaux ;
– stabilisation de la membrane lysosomiale ;
– diminution des effets de certains médiateurs de l’inflammation,
tels les radicaux libres.
En 1993, la 5,6-benzo-[a]-pyrone, commercialisée sous le nom de
Lysedemt, avait montré un effet bénéfique sur la volumétrie et la
tension cutanée dans un essai randomisé, en double-aveugle contre
placebo, en cross-over pendant 6 mois chez 31 patientes ayant un
LO secondaire du membre supérieur après cancer du sein, et
21 patientes ayant un LO des membres inférieurs d’étiologies
variées [24]. Cependant, un autre essai avec cette même molécule
prise pendant 12 mois, ne retrouvait pas les effets précédents [19]. Une
dernière étude en 1999 comparant 400 mg de 5,6-benzo-[a]-pyrone à
un placebo pendant 12 mois, en cross-over, chez 140 femmes ayant
un LO d’un membre supérieur postmammectomie, ne mettait pas
en évidence de différence par rapport au placebo [55]. Cette molécule
avait également une toxicité hépatique potentiellement grave qui
entraîna le retrait du marché du Lysedemt en 1999.
FLAVONOÏDES
Les oligomères procyanidoliques (Endotélont) sont des composés
d’origine végétale extraits de pépins de raisins, qui renforcent le
tissu conjonctif en particulier veineux et capillaire. Leurs effets
comportent un effet lymphokinétique en accélérant la vitesse de
circulation lymphatique, une augmentation de l’activité
macrophagique et de la captation interstitielle (effet lymphagogue).
Ces effets permettent de diminuer la perméabilité capillaire et
d’augmenter la résistance vasculaire. Dans un essai en double
aveugle contre placebo comportant 63 femmes ayant un LO
unilatéral d’un membre supérieur après traitement radiochirurgical
d’un cancer du sein, les oligomères procyanidoliques à la dose de
300 mg/j pendant 6 mois amélioraient le score clinique (douleur,
tension, mobilité, paresthésies, différence périmétrique), le volume
du membre, la demi-vie et la vitesse circulatoire du colloïde en
lymphoscintigraphie [70]. L’Endotélont est le seul médicament à avoir
Traitement chirurgical
Le traitement du LO repose sur la physiothérapie décongestive. La
chirurgie lymphatique s’inscrit comme un traitement « curatif » qui
pourrait faire envisager une « guérison » du LO. Malheureusement,
malgré les différentes techniques utilisées, les indications, bien que
rares, sont difficiles à poser, et la chirurgie ne représente qu’un outil
supplémentaire dans la prise en charge [28, 92]. Il existe deux grands
types de chirurgie : la chirurgie de résection et la chirurgie de
reconstruction.
CHIRURGIE DE RÉSECTION
Ce type de chirurgie a pour objectif l’ablation de tout ou partie du
tissu atteint par le LO, ou des complications comme les
papillomatoses ou les vésicules lymphatiques dont les écoulements
peuvent être très invalidants. L’exérèse des tissus lymphœdémateux,
des zones fibrosées et de la peau peut être plus ou moins complète.
Ces techniques s’adressaient initialement aux LO d’un membre
entier, surtout inférieur, avec des lymphangiectomies superficielles
de type Servelle [80] (fig 5A, B, C). Il s’agissait de chirurgie lourde,
puisque les réinterventions étaient souvent nécessaires, les
complications fréquentes (infections, hypoesthésie) et la durée
d’hospitalisation de plusieurs mois. De plus, il n’était pas possible
de traiter le dos du pied ou le haut de la cuisse, qui restaient atteints
par le LO et obligeaient à la poursuite de la kinésithérapie et au port
de la contention élastique. Enfin, les séquelles esthétiques de ces
interventions sont majeures (fig 5D, E). Après avoir été abandonnée
dans ces indications, la chirurgie de résection reste un traitement
utile des LO des organes génitaux externes (LO pénoscrotal ou
vulvaire) [40, 62] . En effet, dans ces localisations, les drainages
lymphatiques manuels sont peu efficaces et la contention difficile à
supporter. La principale cause dans le monde est la filariose, mais il
existe des formes primitives touchant l’enfant et l’adulte, et des
formes secondaires (cancer de la marge anale, de la verge, de la
vulve, du col utérin, lymphome de Hodgkin sous-diaphragmatique).
Le préjudice est fonctionnel, avec parfois une gêne à la marche en
raison d’un volumineux scrotum accompagné d’une hydrocèle ou
du frottement des lèvres chez la femme. Des vésicules lymphatiques
peuvent aussi compliquer ce type de LO, leur rupture entraînant
des écoulements parfois très abondants et représentant une porte
d’entrée infectieuse responsable d’érysipèles des organes génitaux
externes et du pubis. La chirurgie d’exérèse-plastie large enlève
5
Prise en charge des lymphœdèmes des membres
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Techniques chirurgicales
Kinésithérapie
*
B
*
C
*
A
5
A, B, C. Lymphangiectomie totale superficielle.
D, E. Lymphangiectomie totale superficielle 35 ans auparavant pour
lymphœdème primitif bilatéral des membres inférieurs.
*
D
toutes les zones touchées par le LO : grandes lèvres, petites lèvres,
capuchon du clitoris chez la femme, réduction scrotale et/ou plastie
de la verge chez l’homme. La circoncision peut être aussi pratiquée
seule [75]. Les résultats sont très satisfaisants, avec peu de récidives,
qui peuvent cependant bénéficier d’une nouvelle résection
chirurgicale si nécessaire.
La deuxième indication est la résection, après réduction
volumétrique importante due à la physiothérapie décongestive, des
excédents cutanés parfois invalidants (gêne pour l’habillement,
esthétique…) et rendant difficiles les techniques de bandages et le
port de contention élastique. La résection se fait alors hors des trajets
lymphatiques, et toujours par exérèse-suture. Dans certaines formes
de LO très volumineux, des excisions larges du tissus sous-cutané
jusqu’au muscle ont pu être pratiquées avec de bons résultats [51].
CHIRURGIE DE RECONSTRUCTION LYMPHATIQUE
L’objectif de ces chirurgies est soit de « réparer » les voies
lymphatiques elles-mêmes, soit de transférer des ganglions à la place
de ceux enlevés à but thérapeutique ou détruits par la radiothérapie.
On définit ainsi les techniques de dérivation et les techniques de
reconstruction microchirurgicale proprement dites.
¶ Techniques de dérivation : anastomose
lymphoveineuse (ALV)
La dérivation lymphatique entraîne un court-circuit de la circulation
lymphatique, en amont d’un obstacle ou d’un blocage, dans une
structure vasculaire adjacente et perméable. C’est en 1969 que
6
*
E
Yamada décrivit le premier cette technique chez l’homme, après
l’avoir expérimenté chez l’animal [97]. Actuellement, l’ALV représente
la technique la plus communément utilisée. En effet, le rationnel de
cette intervention est l’existence au cours des LO, d’ALV spontanées
visualisées par lymphangiographie. Idéalement, l’ALV devrait être
pratiquée tôt dans l’évolution du LO avec des vaisseaux
lymphatiques fonctionnels pour l’anastomose, c’est-à-dire avant le
développement de la fibrose cutanée, de la sclérose des vaisseaux
lymphatiques, la survenue d’infections (érysipèles) ou en l’absence
d’anomalies lymphatiques étendues comme on peut les rencontrer
dans certains LO primitifs [38]. L’ALV est indiquée préférentiellement,
mais non exclusivement, aux membres inférieurs. Elle est pratiquée
sous microscope, après repérage de vaisseaux lymphatiques de bon
calibre. En général, trois à cinq (voire plus dans certaines équipes)
vaisseaux lymphatiques sont anastomosés en terminolatéral dans
une branche de la grande veine saphène selon la technique de
Degni [30] (fig 6). Les vaisseaux lymphatiques sont éventuellement
repérés par l’injection sous-cutanée d’un colorant, en aval de 10 à
15 cm de l’incision [44]. Le bénéfice de l’ALV est diversement apprécié
suivant les équipes. Pour certains auteurs, il est excellent [20, 44], pour
d’autres inconstant [39, 41, 65] voire totalement négatif [89]. Bien que dans
toutes ces études, les techniques chirurgicales soient comparables, il
existe des différences concernant la localisation du LO opéré
(membres inférieurs ou supérieurs), le caractère (primitif ou
secondaire), l’ancienneté et le stade du LO, qui rendent difficile
l’évaluation de cette technique. La décision de pratiquer une ALV
est donc difficile, et dépend de la demande du patient, de la
survenue de complications notamment infectieuses (érysipèles), de
l’expérience du chirurgien, de l’évolutivité de la maladie, du volume
Prise en charge des lymphœdèmes des membres
Techniques chirurgicales
Kinésithérapie
*
A
*
D
6
Anastomose lymphoveineuse terminolatérale selon la technique de Degni
du LO, de la réponse à la physiothérapie, et de l’état lymphatique
sous-jacent apprécié par une lymphoscintigraphie distale voire
proximale [57, 72, 94]. Un échodoppler veineux est indispensable en
préopératoire pour repérer la veine devant recevoir l’anastomose, et
détecter une insuffisance veineuse associée.
43-225
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*
B
*
C
*
E
*
F
[30]
. 1. Vaisseau lymphatique ; 2. veine recevant le vaisseau lymphatique.
7
Greffe lymphatique par
voie transpubienne pour
lymphœdème du membre
inférieur droit. 1. vaisseau
lymphatique ; 2.ganglion.
¶ Greffe lymphatique
Développée par Baumeister, elle a l’avantage par rapport à l’ALV de
ne pas entraîner de reflux veineux dans le lymphatique anastomosé.
Cette technique était initialement indiquée pour les LO secondaires
du membre supérieur après cancer du sein, puis pour les LO
secondaires des membres inférieurs. Les collecteurs lymphatiques
« donneurs », au nombre de deux (voire trois) sont prélevés sur la
cuisse, puis anastomosés à partir des vaisseaux lymphatiques
superficiels en regard du muscle jusqu’à la base du cou, dans les LO
secondaires du membre supérieur. Pour les LO unilatéraux du
membre inférieur, les vaisseaux lymphatiques du membre sain sont
anastomosés par voie transpubienne aux collecteurs ascendants du
membre atteint (fig 7). La diminution de volume du LO par rapport
au membre controlatéral atteignait en moyenne 65 % après 2 ans de
recul pour les LO secondaires. Cependant, le bénéfice ne se
maintenait à distance que pour les LO secondaires du membre
supérieur [5, 7]. La greffe lymphatique entraînait également une
diminution du nombre d’érysipèles comparativement à la période
préopératoire [7]. Les indications de ce type de chirurgie semblent
donc être les LO secondaires du membre supérieur, plutôt que les
LO du membre inférieur.
¶ Transfert ganglionnaire
Il s’agit de transférer des ganglions avec le pédicule vasculaire et le
revêtement cutané dans une zone lésée (creux axillaire) dont le
membre est atteint de LO. Plusieurs modèles expérimentaux ont
montré l’efficacité de cette technique [8, 26], mais les résultats chez
l’homme ont fait l’objet de peu de publications [7].
AUTRES TECHNIQUES CHIRURGICALES
La liposuccion a pour objectif d’enlever les tissus lymphœdémateux
sous-cutanés par aspiration. L’équipe suédoise de Brorson s’intéresse
particulièrement à cette technique, pour traiter les LO du membre
supérieur après cancer du sein. De multiples aspirations effectuées
par 20 à 30 incisions permettent de réduire le volume du LO.
Surtout, le port d’une contention élastique en postopératoire est
indispensable pour maintenir le bénéfice. En cas de doute sur
l’observance, la chirurgie n’est pas pratiquée. La force de pression
de cette contention est de 32 à 40 mmHg, correspondant en France à
une classe III forte ou IV, ce qui est très important pour un membre
supérieur. De plus, elle doit être portée en continu, y compris la
nuit, et enlevée seulement 15 minutes pour la toilette. Elle est
régulièrement réadaptée au volume du bras, changée tous les 3 mois
et portée au long cours pour maintenir le bénéfice chirurgical. Dans
une revue du même auteur, les résultats obtenus étaient très bons,
avec une diminution moyenne de l’excès de volume du LO de 106 %
(soit un volume identique au membre supérieur controlatéral) [16].
Malgré son caractère invasif, la liposuccion ne semble pas altérer
7
43-225
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Prise en charge des lymphœdèmes des membres
davantage le transport lymphatique apprécié sur la lymphoscintigraphie [17]. En pratique, cette technique ne s’est pas largement
répandue, notamment en raison de la contrainte majeure que
représente le port permanent d’une contention élastique forte.
Autres techniques
Les autres techiques : cryothérapie, traitement par micro-ondes,
électrothérapie, endermologie, n’ont pas prouvé leur efficacité dans
Techniques chirurgicales
Kinésithérapie
les études cliniques, et ne font donc pas partie des recommandations
du traitement des LO des membres [43].
Conclusion
La prise en charge des LO doit être appréhendée sur le long terme. Elle
repose sur un projet thérapeutique multidisciplinaire, dont l’élément
essentiel est la physiothérapie décongestive. L’éducation et les conseils
pratiques sont indispensables, afin d’obtenir la motivation des patients
nécessaire à la prise en charge et au suivi médical régulier et prolongé
de ces pathologies chroniques que représentent les LO.
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9
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 43-029-P
43-029-P
Revascularisation artérielle des membres
inférieurs à partir de l’aorte sous-rénale : voies
d’abord mini-invasives et laparoscopiques
X Chaufour
J Cau
JP Bossavy
A Barret
Résumé. – La chirurgie vasculaire mini-invasive et la chirurgie laparoscopique se développent depuis
quelques années et semblent, comme pour les autres spécialités chirurgicales, être une évolution inéluctable.
L’avantage de ces techniques mini-invasives est de diminuer la durée de séjour en soins intensifs et la durée
d’hospitalisation. Elles permettent d’obtenir une reprise précoce du transit, une diminution de la douleur et de
la fréquence des complications secondaires. L’apprentissage de ces méthodes nécessite un entraînement
spécifique rigoureux de la dissection vasculaire vidéoscopique et des techniques de sutures laparoscopiques
(« endoanastomose »).
© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : voies d’abord mini-invasives, chirurgie aortique vidéoassistée, laparoscopie, pontage aorto-bifémoral, endoanastomose.
Principes
Depuis quelques années se sont développées la chirurgie aortique
par voie mini-invasive, la chirurgie aortique par voie vidéoassistée
et la chirurgie aortique laparoscopique. L’apprentissage de ces
techniques moins invasives nécessite un entraînement spécifique que
nous décrivons.
La chirurgie aortique par voie mini-invasive dérive directement de
la chirurgie classique, elle se limite à une voie d’abord courte,
utilisant des écarteurs autostatiques et des clamps aortiques
positionnés en dehors de la voie d’abord. L’anastomose s’effectue
comme en chirurgie conventionnelle.
La chirurgie aortique par voie vidéoassistée consiste à réaliser toute
la dissection de l’aorte sous-rénale de façon laparoscopique, jusqu’au
temps de la suture aortique où est associée une courte laparotomie.
Elle nécessite un apprentissage spécifique et une instrumentation
adaptée à la chirurgie vasculaire. Le premier temps consiste à
réaliser une open cœlioscopie : par une courte laparotomie de 15 mm,
on introduit, sous le contrôle de la vue, un trocart de 10 mm avec
un ballonnet d’étanchéité dans la cavité péritonéale ou dans la cavité
rétropéritonéale. Le câble d’insufflation est branché sur ce même
trocart. L’optique est alors introduite dans le trocart pour
positionner sous contrôle vidéoscopique tous les autres trocarts
supplémentaires, qui sont introduits de façon percutanée. La mise
en place d’écarteurs spécifiques ou de clamps aortiques s’effectue
par les trocarts de 10 mm supplémentaires.
Xavier Chaufour : Chef de clinique-assistant des Hôpitaux.
Jérôme Cau : Chef de clinique-assistant des Hôpitaux.
Jean-Pierre Bossavy : Professeur agrégé de chirurgie vasculaire.
André Barret : Professeur de chirurgie vasculaire.
Hôpital Purpan, place du Docteur-Baylac, 31059 Toulouse cedex, France.
La chirurgie aortique totalement laparoscopique utilise les mêmes
principes que la chirurgie aortique par voie vidéoassistée, mais
aucune laparotomie n’est associée. Toute la dissection aortique et
l’anastomose vasculaire aortique sont effectuées par voie
laparoscopique, réalisant une véritable « endoanastomose ».
L’endoanastomose est effectuée par deux hémisurjets de
polypropylène 3/0 qui sont noués en intracorporel à l’aide d’un
porte-aiguille et d’une pince fenêtrée (cf infra). Des points séparés
sont réalisés de la même manière, tous les nœuds sont liés avec les
instruments endoscopiques. L’apprentissage des techniques des
endoanastomoses est indispensable. Elle doit débuter sur
pelvitrainer, sur animaux et sur cadavres frais, afin d’acquérir une
gestuelle endoscopique pour la réalisation d’anastomose vasculaire.
Techniques
VOIES MINI-INVASIVES
¶ Voie rétropéritonéale
Le patient, sous anesthésie générale, est installé en décubitus latéral
droit incomplet (décubitus latéral avec le bassin presque à plat,
genou gauche légèrement fléchi et en adduction pour détendre le
muscle psoas iliaque). Un billot, placé sous la fosse lombaire, permet
d’ouvrir l’angle entre le rebord costal et l’aile iliaque. L’opérateur
principal est du côté dorsal, l’aide opératoire est du côté ventral,
l’instrumentiste est du même côté que l’opérateur. Le moniteur est
situé à la tête du patient. Une table à pont est installée au-dessus
des cuisses du patient (fig 1A).
On réalise une incision oblique en bas et en dedans dans le
prolongement de la dixième côte vers l’ombilic. Cette incision est
étendue sur 8 à 12 cm. Les fibres du muscle grand oblique sont
dissociées et écartées sans section, de même pour le deuxième plan
Toute référence à cet article doit porter la mention : Chaufour X, Cau J, Bossavy JP et Barret A. Revascularisation artérielle des membres inférieurs à partir de l’aorte sous-rénale : voies d’abord mini-invasives et laparoscopiques.
Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales - Chirurgie vasculaire, 43-029-P, 2003, 11 p.
43-029-P
Revascularisation artérielle des membres inférieurs à partir de l’aorte sous-rénale :
Techniques chirurgicales
voies d’abord mini-invasives et laparoscopiques
*
A
2
Patient installé en décubitus pour abord mini-invasif de l’aorte sous-rénale par
voie transpéritonéale. Schéma de l’installation des valves autostatiques maintenant
l’exposition. Le clamp aortique proximal est positionné en amont de la valve supérieure.
vasculaire (fig 1B). Les jambages prothétiques sont tunnellisés en
position anatomique, afin d’être anastomosés sur les artères
fémorales, abordées de façon conventionnelle.
¶ Voie transpéritonéale
*
B
1
A. Patient installé en décubitus latéral droit pour abord de l’aorte sous-rénale par
voie rétropéritonéale. Incision cutanée de 8 cm entre l’extrémité de la dixième côte
et l’ombilic.
B. Schéma de l’installation des valves autostatiques maintenant l’exposition. Le
clamp aortique proximal est positionné en arrière de la valve supérieure. Une optique permet d’éclairer le champ opératoire et de guider les aides.
du petit oblique. L’aponévrose du muscle transverse est incisée
transversalement jusqu’à la gaine postérieure du grand droit.
Le décollement de l’espace rétropéritonéal se fait au doigt et
progresse vers la fosse iliaque. Le décollement est débuté en haut et
en dehors et progresse de haut en bas pour récliner en avant le rein
et le sac péritonéal. En profondeur, le repère est constitué par le
muscle psoas ; les doigts passent sur sa face antérieure et refoulent
en dedans le sac péritonéal. Le rein et le sac péritonéal sont
maintenus par deux valves autostatiques (mécanique ou
pneumatique) (fig 1B). L’uretère est laissé au contact du péritoine et
est refoulé en dedans avec le sac péritonéal. Certaines équipes
introduisent une optique de cœlioscopie par un trocart de 10 mm
positionné au contact de l’aile iliaque, permettant d’éclairer le champ
opératoire, qui est ainsi visualisé par toute l’équipe opératoire [26].
Le clamp aortique sera positionné par un autre orifice en dehors de
l’incision afin de ne pas gêner l’exposition. Cette voie d’abord et
cette installation permettent d’obtenir un espace suffisant pour
clamper l’aorte et réaliser une anastomose terminoterminale ou
latéroterminale avec les instruments classiques de chirurgie
2
Sous anesthésie générale, le patient est installé en décubitus dorsal,
avec mise en place d’un billot au niveau des lombes. L’opérateur
principal est du côté gauche, l’aide opératoire est en face,
l’instrumentiste est du même côté que l’opérateur. Une table à pont
est installée au-dessus des cuisses du patient. Une incision médiane
de 8 à 12 cm sous-xiphoïdienne respectant l’ombilic permet
d’inspecter la cavité péritonéale dans un premier temps. L’abord de
l’aorte sous-rénale reste conventionnel, mais est effectué sans
éviscération. Le grand épiploon est récliné vers le haut avec le côlon
transverse sous un champ humide ; ils sont maintenus par une valve
orthostatique. Les anses grêles sont maintenues à l’intérieur de la
cavité péritonéale, réclinées en dehors à la droite du patient,
maintenues par deux valves orthostatiques sous un champ humide ;
si le côlon gauche ou le sigmoïde sont volumineux, ils sont réclinés
en dehors par une autre valve orthostatique (fig 2).
Le péritoine pariétal postérieur est incisé juste en dedans de la veine
mésentérique inférieure, l’aorte sous-rénale est disséquée jusqu’à la
veine rénale gauche et est contrôlée sur une hauteur de 7 cm (fig 2).
Les clamps aortiques sont introduits par des orifices de 10 mm audessus et au-dessous de l’incision pour ne pas encombrer le champ
opératoire. Cette installation et cette voie d’abord permettent
d’obtenir un espace suffisant pour clamper l’aorte et réaliser une
anastomose terminoterminale ou latéroterminale avec les
instruments classiques de chirurgie vasculaire [6, 7, 10, 30]. Les jambages
prothétiques sont tunnellisés en position anatomique, afin d’être
anastomosés sur les artères fémorales, abordées de façon
conventionnelle.
VOIES LAPAROSCOPIQUES AVEC RÉALISATION
DES SUTURES VASCULAIRES PAR VOIE MINI-INVASIVE
La difficulté première de la voie laparoscopique est l’exposition
durable de l’aorte dans un champ opératoire stable. Du fait de
l’envahissement par les anses digestives lors de l’approche
péritonéale, les différentes équipes ont développé des écarteurs
spécifiques [1, 3].
Techniques chirurgicales
Revascularisation artérielle des membres inférieurs à partir de l’aorte sous-rénale :
voies d’abord mini-invasives et laparoscopiques
43-029-P
Les jambages prothétiques sont tunnellisés en position anatomique,
afin d’être anastomosés sur les artères fémorales, abordées de façon
conventionnelle.
Voie transpéritonéale selon Kolvenbach [20, 21]
3
Schéma de l’écarteur d’Alimi permettant la dissection de l’aorte sous-rénale par
abord cœlioscopique transpéritonéal. Patient installé en décubitus dorsal. Les anses
grêles sont réclinées et maintenues par le filet écarteur.
¶ Voie transpéritonéale
Voie transpéritonéale selon Alimi [2]
Le patient est installé en décubitus dorsal avec un billot sous la
région lombaire. L’opérateur et le premier aide sont du côté gauche
du patient, le second aide est en face. L’intervention débute par une
incision périombilicale de 10 mm pour la mise en place de l’optique
par open-cœlioscopie. Les trocarts opérateurs sont positionnés sur
une même ligne pararectale, en triangulation avec l’optique. Deux
autres trocarts sont introduits, l’un sous le rebord costal gauche,
l’autre en fosse iliaque gauche pour mettre un aspirateur et une
pince fenêtrée complémentaire. Le patient est alors mis en position
de Trendelenburg de 30°, associée à une rotation de la table à droite
de 20° afin de faire tomber les anses grêles en haut et à droite.
L’écarteur spécifique est mis en place pour récliner et maintenir les
viscères à droite.
La dissection de l’aorte se fait par voie laparoscopique. Le péritoine
pariétal postérieur est ouvert en regard de l’angle duodénojéjunal
en dedans de la veine mésentérique inférieure. L’angle
duodénojéjunal est libéré par la section du muscle de Treitz. La veine
rénale gauche est repérée. La section au ciseau coagulateur du tissu
celluloganglionnaire périaortique permet d’exposer l’hémicirconférence antérieure de l’aorte sous-rénale. Le bras longitudinal
de l’écarteur (fig 3) peut être alors abaissé, pour exposer au mieux le
bord antérodroit aortique. La dissection se poursuit vers le bas
jusqu’à l’artère mésentérique inférieure qui est contrôlée. La
bifurcation aortique ainsi que les 4 premiers centimètres des artères
iliaques primitives sont disséqués à gauche comme à droite pour
amorcer la tunnellisation.
Après héparinisation par voie générale, le clampage proximal
aortique est obtenu par un clamp spécifique (De Bakey Atraumatic
Clamp, Aesculap) introduit sous la xiphoïde à travers un trocart
souple de 10 mm. Le clampage distal est soit aortique, soit au niveau
des artères iliaques primitives si l’aorte distale est trop calcifiée. Une
minilaparotomie de 6 à 8 cm, sus-ombilicale, est réalisée après
dissection complète de l’aorte sous-rénale et clampage, l’exposition
restant la même (trocarts, écarteur et clamps restent en place).
L’anastomose est effectuée de manière conventionnelle sous contrôle
de la vue [2, 9, 10, 11, 19]. L’anastomose est soit terminoterminale après
ligature du moignon aortique, soit latéroterminale entre le niveau
des artères rénales et l’ostium de l’artère mésentérique inférieure.
Kolvenbach a développé une procédure vidéoassistée dite handassisted laparoscopic surgery (HALS), qui permet au chirurgien
d’introduire sa main non dominante dans l’abdomen pour faciliter
l’exposition et la dissection sous vidéoscopie [20, 29]. Après la création
du pneumopéritoine, on pratique une incision sus-ombilicale de
6 cm qui permet la mise en place d’un gant étanche Handport
(Handport, Smith & Nephew Surgical) [3]. L’optique est mise en
position ombilicale, les deux trocarts opérateurs sont positionnés en
triangulation en pararectal droit. La dissection de l’aorte est abordée
de la même manière que celle décrite (cf supra), mais la main
intrapéritonéale aide à la dissection et à l’exposition aortique [22, 23].
Le dispositif est ensuite retiré, un écarteur bivalvé expose l’aorte, et
l’anastomose est confectionnée par minilaparotomie, déjà décrite (cf
supra) (fig 2).
La voie d’abord transpéritonéale a l’avantage de permettre une
dissection plus aisée de la bifurcation aortique et de l’artère iliaque
commune droite que la voie rétropéritonéale ou la voie rétrocolique
transpéritonéale. Mais elle nécessite un système efficace pour
maintenir les anses digestives en dehors du champ aortique ; sinon
l’exposition ne peut être maintenue et il faut se repositionner en
permanence.
¶ Voie rétropéritonéale
Nous rapportons l’approche rétropéritonéale décrite par Edoga [8, 18].
Le patient est installé en décubitus dorsal avec un billot au niveau
de la charnière dorsolombaire et une rotation du tronc de 30° du
côté droit. L’opérateur principal est installé du côté gauche du
patient, l’aide opératoire est en face, l’instrumentiste est du même
côté que l’opérateur. Les genoux sont fléchis afin de relâcher le
muscle psoas. Le champ opératoire comprend l’abdomen, le flanc
gauche jusqu’aux muscles paravertébraux et les deux triangles de
Scarpa.
L’intervention débute par une incision cutanée verticale de 15 mm
dans le flanc gauche, entre l’épine iliaque antérosupérieure et la
douzième côte. L’aponévrose du grand oblique est incisée sur
30 mm, les trois plans musculaires sont dissociés, puis le
décollement rétropéritonéal est débuté au doigt. Un trocart à
ballonnet de 10 mm (trocart avec ballon d’étanchéité) est mis en
place dans cette incision et permet d’introduire l’optique à 30°. Un
ballon dissecteur (Preperitoneal Distension Balloon, OMS-PDBS2
Origin Medsystems) peut aider à débuter l’espace de décollement
rétropéritonéal. On insuffle progressivement du CO2 afin d’obtenir
un rétropneumopéritoine à une pression de 13-15 mmHg. Le
décollement est complété à l’aide de l’optique, puis on positionne,
sous contrôle de la vue, les deux autres trocarts opérateurs de 10 mm
afin de travailler en triangulation (fig 4). La réclinaison de la cavité
rétropéritonéale doit être prudente, car le péritoine reste accolé au
bord externe des droits : il existe donc un risque de brèche
péritonéale et donc de pneumopéritoine. La dissection s’effectue de
proche en proche au tampon monté et à la pince fenêtrée en
refoulant en dedans le sac péritonéal. Deux trocarts supplémentaires
de 10 mm sont introduits, le premier sur la ligne médioclaviculaire,
à 5 cm du ligament inguinal pour introduire un endorétracteur
intestinal (fig 4), le second sous le rebord costal sur la ligne axillaire
postérieure pour une canule d’aspiration, et ultérieurement pour le
clamp aortique supérieur. Lors de la première partie de la dissection,
Edoga cesse l’insufflation de CO2, après la mise en place d’un
suspenseur de paroi (Laparolift, Origin Medsystems) pour diminuer
ainsi le risque de pneumopéritoine par diffusion [8].
3
43-029-P
Revascularisation artérielle des membres inférieurs à partir de l’aorte sous-rénale :
Techniques chirurgicales
voies d’abord mini-invasives et laparoscopiques
4 Schéma de l’écarteur d’Edoga permettant la dissection de l’aorte sous-rénale par
abord cœlioscopique rétropéritonéal. Patient installé en décubitus dorsal avec rotation
du thorax de 30° sur la droite. Le sac péritonéal est refoulé en dedans après décollement
rétropéritonéal par un écarteur à cinq branches.
En cas de pneumopéritoine important, l’espace de dissection
rétropéritonéal est diminué ; il faut alors l’exsuffler en introduisant
une aiguille de Palmer en transpéritonéal au niveau de l’ombilic. La
dissection vasculaire, débute par l’abord de l’artère iliaque primitive
gauche, après repérage de l’uretère. La dissection est continuée
jusqu’au repérage de l’artère rénale gauche après section sur clip de
la veine hémiazygos lombaire. Le clampage aortique proximal se
fait par l’intermédiaire du trocart sous-costal gauche. Le clampage
distal se fait par le trocart inférieur, au-dessus du ligament inguinal
gauche.
Une minilaparotomie de 4 cm est centrée sur le trocart d’open
cœlioscopie entre l’aile iliaque antérosupérieure et la douzième côte.
L’anastomose proximale est effectuée sous contrôle de la vue,
l’exposition restant la même que sous laparoscopie. L’anastomose
peut être soit terminale, soit latérale. Les branches de la prothèse
sont tunnellisées, en position anatomique, et sont anastomosées au
niveau des artères fémorales communes de manière conventionnelle.
La voie d’abord rétropéritonéale a l’avantage d’éviter tout contact
avec les anses digestives, mais l’espace opératoire rétropéritonéal est
plus réduit que l’espace opératoire de la cavité péritonéale, rendant
la dissection plus difficile. De plus, l’espace de dissection
rétropéritonéal a tendance à se réduire avec le temps de
l’intervention, par diffusion du CO2 dans la cavité péritonéale,
venant majorer la difficulté opératoire (l’exsufflation du
pneumopéritoine par aiguille de Palmer n’est pas toujours efficace).
VOIE TOTALEMENT LAPAROSCOPIQUE
Actuellement, trois voies d’abord différentes sont décrites pour la
revascularisation des membres inférieurs à partir de l’aorte sousrénale par voie totalement laparoscopique. L’anastomose proximale
aortique est effectuée de façon totalement laparoscopique
(endoanastomose) [5, 12, 14, 27] :
– la voie transpéritonéale avec abord de l’aorte par décollement
colique gauche prérénal ;
– la voie mixte : transpéritonéale et rétropéritonéale ;
– la voie rétropéritonéale exclusive.
L’abord transpéritonéal direct, en décubitus dorsal, avec décollement
duodénojéjunal a été abandonné par les partisans de l’abord
totalement laparoscopique, en raison de la difficulté à obtenir une
exposition stable (envahissement du champ opératoire par les anses
grêles) [4, 5].
¶ Voie transpéritonéale
Il s’agit d’une voie transpéritonéale avec abord de l’aorte par
décollement colique gauche prérénal. Cette voie d’abord
4
5
Schéma de l’installation du patient pour abord aortique rétrocolique transpéritonéal cœlioscopique. Patient installé en décubitus latéral droit, avec le bassin vrillé en
dehors pour que les deux triangles de Scarpa soient accessibles. 1. Opérateur ; 2. aide
1 ; 3. aide 2.
cœlioscopique, étudiée par Said [27, 28] sur le cadavre humain et
développée par Coggia [12] , est similaire à celle décrite par
laparotomie.
Le patient est placé en décubitus dorsal avec un billot gonflable sous
le flanc gauche. Le bras gauche est laissé libre, le bras droit est sur
un appui-bras. Les membres inférieurs sont fléchis de 30° et fixés
parallèlement. La mise en place de deux contre-appuis, au niveau
du bord droit du thorax et du flanc, est indispensable pour
maintenir le patient qui sera soumis à une inclinaison de 45° à droite
avec la table, puis majorée de 35° par insufflation du billot gonflable
(le patient est alors en décubitus latéral droit complet) (fig 5).
Cette installation permet, grâce aux mouvements d’inclinaison de la
table opératoire, de positionner le patient, soit en décubitus latéral
droit pour l’abord de l’aorte, soit en décubitus dorsal pour les abords
fémoraux. L’opérateur et l’aide principal sont face à l’abdomen, le
deuxième aide est en face de l’opérateur (fig 5).
La mise en place du trocart optique de 10 mm se fait par open
cœlioscopie, au niveau de la ligne médioaxillaire gauche, à 3-4 cm
en dessous du rebord chondrocostal. Les cinq autres trocarts sont
introduits sous contrôle de la vue, après insufflation du
pneumopéritoine à 15 mmHg. Les deux trocarts opérateurs sont
espacés de 6 à 7 cm sur une ligne transrectale gauche parallèle à la
ligne médiane, les deux trocarts du premier aide sont introduits
respectivement : le premier en fosse iliaque gauche, le second sur la
ligne médiane 5 cm au-dessus du pubis. Le dernier trocart est
positionné sur la ligne médiane 2 cm sous la xiphoïde (fig 6).
La voie latérocolique gauche comporte un décollement colique
gauche avec abord prérénal de l’aorte. La table est inclinée à droite
au maximum (soit 45°) et le billot gonflable est insufflé pour majorer
le décubitus latéral droit de 30°. Le fascia de Toldt gauche est incisé
de l’angle colique gauche jusqu’au mésosigmoïde, permettant de
décoller tout le mésocôlon gauche. La veine génitale est repérée, la
poursuite de la dissection prérénale permet de visualiser la veine
rénale gauche qui est totalement libérée. La position du patient, en
décubitus latéral droit, permet, par gravité, de récliner des anses
intestinales sur la partie droite de la cavité abdominale (fig 7). La
mise en place de points transpariétaux permet de fixer le mésocôlon
à la paroi abdominale, réalisant ainsi un « néotablier péritonéal » qui
permet une exposition stable de l’aorte. En cas de rein volumineux,
Techniques chirurgicales
Revascularisation artérielle des membres inférieurs à partir de l’aorte sous-rénale :
voies d’abord mini-invasives et laparoscopiques
43-029-P
Le jambage gauche, préalablement lié, est laissé en place dans
l’abdomen car cette deuxième tunnellisation serait source de fuite
du pneumopéritoine.
6
Schéma du positionnement des trocarts lors de l’abord aortique rétrocolique transpéritonéal cœlioscopique. 1. Optique 30° ; 2. Ciseaux-porte-aiguille ; 3. pince fenêtrée ;
4. aspirateur ; 5. pince fenêtrée-clamp distal ; 6. écarteur-clamp proximal.
Le clampage aortique proximal et distal est effectué par des clamps
laparoscopiques (B/Braun-Aesculap ou Storz-France) (cf fig 13)
introduits par les trocarts 5 et 6 (fig 6). L’endoanastomose
aortoprothétique est effectuée par voie totalement laparoscopique
par deux hémisurjets de fil de polypropylène 3/0. Les
endoanastomoses exigent un apprentissage régulier sur pelvitrainer,
afin d’acquérir une dextérité suffisante avec les instruments
endoscopiques (manipulations de l’aiguille avec l’endo-porteaiguille, réalisation d’endoanastomose, etc). On utilise des fils
polypropylène de 3/0 de 18 cm de longueur dont l’extrémité est
nouée sur un pledget (cf fig 15) ; ceci évite la confection du nœud
initial, diminue le temps de suture et le traumatisme mécanique du
fil.
Pour des lésions occlusives, Coggia réalise une endoanastomose
aortique terminolatérale. Après une artériotomie longitudinale aux
ciseaux de Potts endovasculaire, l’endoanastomose débute par la
confection d’un point de fixation, réalisé au niveau du talon de la
prothèse. L’endoanastomose est débutée par l’hémisurjet latéral
gauche avec un fil de suture de polypropylène noué sur un pledget.
La confection du surjet est arrêtée au-delà de la pointe de la
prothèse. On réalise de même l’hémisurjet latéral droit, et les deux
hémisurjets sont alors noués en intracorporel.
Nous avons, pour notre part, comme en chirurgie conventionnelle,
pris le parti de réaliser une endoanastomose terminoterminale.
Après une transsection aortique transversale sous-rénale, une
collerette aortique de 3 cm est excisée afin de fermer le moignon
aortique distal par un surjet aller-retour de polypropylène 3/0
(fig 8A, B).
La suture vasculaire proximale est débutée sur le bord gauche de
l’aorte par un point de fixation, qui se poursuit par l’hémisurjet
postérieur (fig 8C, D). Le fil est tendu après chaque passage de
points. L’hémisurjet postérieur est arrêté au niveau du bord latéral
droit de l’aorte (fig 8E, F). L’hémisurjet antérieur complète
l’anastomose ; les deux hémisurjets sont noués en intracorporel.
7
Coupe transversale montrant l’installation du patient en décubitus droit, avec
billot gonflé majorant le décubitus droit. Le pneumopéritoine permet d’élargir l’espace
de travail dans la grande cavité péritonéale. Le mésocôlon gauche a été décollé, il tombe
à droite par gravité, réclinant les anses grêles dans le même temps. L’optique à 30° montre le champ de vision.
un point d’écartement transpariétal de fixation de la loge rénale
gauche permet de le maintenir en dehors du champ opératoire. Le
feutrage celluloganglionnaire préaortique est incisé aux ciseaux
coagulateurs afin de contrôler l’aorte sous-rénale. La visualisation
de l’aorte est facilitée par l’utilisation d’une optique à 30° ; elle doit
être circonférentielle pour en permettre le clampage proximal. La
mobilisation de la veine rénale est nécessaire pour exposer l’aorte
dans sa portion interrénale. Cette voie d’abord peut être étendue à
l’aorte sus-rénale, en réalisant un décollement rétropancréatique. La
dissection se poursuit aux artères iliaques primitives, après avoir
contrôlé l’artère mésentérique inférieure. La dissection de l’artère
iliaque primitive gauche est aisée, celle de l’artère iliaque droite est
plus délicate ; en effet, celle-ci est vue en fuite et la racine de
mésocôlon gauche limite son contrôle sur 4-5 cm au maximum.
Pour effectuer l’abord des artères fémorales, la table est remise à
plat et le billot est dégonflé. Après le temps fémoral, la table est
réinclinée sur la droite pour introduire la prothèse bifurquée par
l’un des trocarts. Le jambage droit prothétique est tunnellisé en
position anatomique avant la réalisation de l’anastomose proximale.
Le jambage gauche est ensuite tunnellisé. La table est remise à plat.
Les anastomoses distales sur les artères fémorales communes sont
réalisées de façon conventionnelle. Après déclampage, on vérifie
l’hémostase du moignon aortique distal et l’anastomose proximale
sous laparoscopie. Le mésocôlon est repositionné sous contrôle
vidéoscopique, pour isoler la prothèse. Il n’est pas nécessaire de fixer
le mésocôlon à la paroi. Le pneumopéritoine est exsufflé sur un
drain de Redon (fig 9).
Cette voie d’abord transpéritonéale rétrocolique résout les deux
problèmes essentiels que sont l’exposition et l’espace opératoire. Au
lieu d’écarteurs spécifiques, c’est la position du patient, en décubitus
latéral, qui permet, par gravité, de récliner le mésocôlon gauche et
les anses digestives hors du champ opératoire. Les anses digestives
sont ainsi exclues du champ opératoire par le mésocôlon qui tient
lieu de tablier péritonéal [12]. Le volume opératoire est important et
stable dans le temps, permettant la réalisation d’endoanastomose de
qualité.
¶ Voie mixte (transpéritonéale et rétropéritonéale) (fig 9)
Cette voie d’abord transpéritonéale et rétropéritonéale est décrite par
Dion [14, 15, 16, 17]. Elle est caractérisée par la création d’un tablier
péritonéal, qui permet d’isoler les anses intestinales de la cavité
opératoire sans diminuer le volume de cette dernière.
Le patient est installé en décubitus dorsal avec un billot sous le flanc
gauche. On introduit un trocart de 10 mm, au niveau de l’ombilic,
pour créer un pneumopéritoine maintenu à une pression intra5
43-029-P
Revascularisation artérielle des membres inférieurs à partir de l’aorte sous-rénale :
Techniques chirurgicales
voies d’abord mini-invasives et laparoscopiques
*
A
*
B
*
C
*
D
*
E
8
6
A. Vue opératoire de la suture du moignon aortique distal juste en amont de la
naissance de l’artère mésentérique inférieure. Le moignon aortique proximal est
clampé et est bien individualisé.
B. Schéma de la vue opératoire de la figure 8A. Suture à l’aide d’un porte-aiguille
et d’une pince fenêtrée. L’aspirateur sert d’écarteur.
C. Vue opératoire de l’endoanastomose aortoprothétique terminoterminale : début
de l’hémisurjet postérieur.
D. Schéma de la vue opératoire de la figure 8C. Endoanastomose aortoprothétique
terminoterminale laparoscopique : début de l’hémisurjet postérieur.
*
F
E. Vue opératoire de l’endoanastomose aortoprothétique terminoterminale : fin de l’hémisurjet postérieur.
F. Schéma de la vue opératoire de la figure 8E. Endoanastomose aortoprothétique terminoterminale : fin de l’hémisurjet postérieur.
Techniques chirurgicales
Revascularisation artérielle des membres inférieurs à partir de l’aorte sous-rénale :
voies d’abord mini-invasives et laparoscopiques
43-029-P
9
Schéma des incisions
après pontage aortobifémoral par voie transpéritonéale
rétrocolique cœlioscopique.
abdominale de 15 mmHg. Le patient est ensuite placé en position
de Trendelenburg à 10°, avec la table inclinée à droite de 20°. Une
incision verticale de 15 mm est réalisée au-dessus et en dedans de
l’épine iliaque antérosupérieure ; on dicise les trois plans
musculaires afin d’amorcer le plan du décollement rétropéritonéal
au doigt. On introduit un trocart de 10 mm, avec une optique à 0°
pour poursuivre la dissection. Un rétropneumopéritoine est créé
avec une pression d’insufflation de 15 mmHg ; puis le
pneumopéritoine est diminué à 8 mmHg pendant le temps
rétropéritonéal. Deux autres trocarts opérateurs de 5 cm sont
introduits de part et d’autre de l’optique pour la dissection
rétropéritonéale (fig 10).
Les progrès de la dissection sont suivis en parallèle par les deux
laparoscopes afin de permettre une vue simultanée de la cavité
péritonéale et du rétropéritoine. Dans l’espace rétropéritonéal, on
repère le muscle psoas dans le plan postérieur, l’aorte en avant du
muscle psoas et le bord latéral du muscle grand droit gauche dans
le plan antérieur.
Deux autres trocarts médians sont mis en place, un au-dessus de la
symphyse pubienne, et l’autre en sus-ombilical. La création du
« tablier » péritonéal débute par une incision du péritoine pariétal à
3 cm au-dessus de l’anneau inguinal interne gauche ; la dissection
se poursuit le long du bord gauche du muscle grand droit gauche.
Le bord libre du péritoine est transposé sur le côté droit de la ligne
médiane, et est fixé à la paroi par trois points transpariétaux,
réalisant ainsi un véritable « tablier » péritonéal (fig 10).
L’exposition est complétée par la mise en place de deux rétracteurs
abdominaux. La dissection de l’aorte s’effectue, après contrôle de
l’artère iliaque gauche, jusque dans sa portion sous-rénale. La
prothèse vasculaire est introduite dans la cavité rétropéritonéale et
chaque branche est tunnellisée en position anatomique aux deux
triangles de Scarpa avant la réalisation de l’anastomose proximale
afin de maintenir la prothèse en place. La partie distale de l’aorte est
occluse au niveau de l’artère mésentérique inférieure avec une pince
GIA-60 cœlioscopique (USSC Norwalk CTUSA). L’aorte est ensuite
sectionnée transversalement 15 mm en dessous du clamp proximal
et une anastomose terminoterminale est réalisée par voie totalement
laparoscopique par deux hémisurjets de fils Prolène 3-0, avec
confection du nœud en intracorporel. Les anastomoses distales sont
effectuées de manière conventionnelle sur les artères fémorales
communes.
10
Coupe en perspective du champ opératoire selon Dion. Le tablier péritonéal a été
fixé à la peau par trois points et maintient les anses digestives à droite en dehors de
l’aorte.
¶ Voie rétropéritonéale
La voie rétropéritonéale exclusive a été décrite par Said [27, 28], puis
développée par Edoga [18] (qui associe une minilaparotomie pour la
réalisation de l’anastomose vasculaire). La voie rétropéritonéale est
une alternative lorsque la voie transpéritonéale est contre-indiquée
(ventre hostile, adhérences péritonéales...) ou pour réaliser un abord
électif de l’artère iliaque primitive (pontage iliofémoral).
Le patient est placé en décubitus latéral droit comme pour l’abord
transpéritonéal rétrocolique (cf supra). L’introduction de l’optique
est réalisée par une incision de 15 mm au-dessus et en dedans de
l’épine iliaque antérosupérieure en open rétropéritonéoscopie, avec
au préalable une dissection de l’espace rétropéritonéal « au doigt »
(cf supra). Le temps essentiel est la dissection du rétropéritoine sous
vidéoscopie, jusqu’au niveau de la ligne médiane, pour éviter les
brèches péritonéales. Les autres trocarts sont positionnés au bord
externe du muscle grand droit gauche en triangulation. L’abord de
l’aorte se fait selon la procédure décrite par Edoga (cf supra). Mais
pour réaliser l’anastomose totalement laparoscopique
(endoanastomose), il est nécessaire de repositionner l’optique au
niveau du trocart transrectal sous le rebord chondrocostal, afin
d’obtenir une vue complète de l’aorte.
L’avantage majeur de la voie rétropéritonéale est l’exclusion des
viscères du champ opératoire, au détriment de la diminution du
volume de travail. Le risque de brèche péritonéale est important si
la dissection n’est pas menée pas à pas, ce qui va entraîner une
réduction de la cavité opératoire du fait du pneumopéritoine
concurrentiel, source de conversion chirurgicale quasi systématique.
Même si la voie rétropéritonéale exclusive a été abandonnée
actuellement par la plupart des équipes, elle conserve des
indications particulières à ne pas méconnaître.
Matériels
Les progrès de l’instrumentation, tels les bras-rétracteurs
autostatiques, les colonnes vidéo, les instruments cœlioscopiques
vasculaires spécifiques, ont permis le développement de la chirurgie
vasculaire mini-invasive et laparoscopique.
7
Revascularisation artérielle des membres inférieurs à partir de l’aorte sous-rénale :
Techniques chirurgicales
voies d’abord mini-invasives et laparoscopiques
43-029-P
11
12
Instruments vasculaires endoscopiques : ciseaux
coagulateurs, ciseaux de
Potts, dissecteur angle
droit, pinces fenêtrées.
Clamps
largables
(B/Braun-Aesculap) servant pour l’occlusion des
artères iliaques et de l’artère
mésentérique inférieure.
INSTRUMENTS LAPAROSCOPIQUES
La réalisation de restauration aortique par voie laparoscopique
nécessite une instrumentation standard de cœlioscopie, et des
instruments spécifiques à la chirurgie vasculaire.
¶ Instrumentation de base
Elle comprend (fig 11) :
– une optique de 0°-10 mm ;
– une optique de 30°-10 mm ;
– une source de lumière froide ;
– une colonne vidéo avec moniteur TriCDD (pour avoir une image
de qualité optimale) ;
– un insufflateur électronique ;
– un trocart de 10 mm open cœlioscopique ;
– six trocarts de 10 mm, avec pas de vis pour éviter les fuites de
CO2 ;
13
Clamp aortique à mors de type De Bakey et à crémaillère sécurisée (B/BraunAesculap) utilisé pour le clampage aortique proximal et distal.
– trois pinces à préhension fenêtrées de 5 mm, atraumatiques qui
permettent de saisir les structures digestives lors de la dissection.
Ces pinces doivent aussi être performantes pour la manipulation
des aiguilles lors de la confection de l’endoanastomose ;
– un ciseau coagulateur ;
– un crochet droit coagulateur ou une pince à coagulation bipolaire ;
– un aspirateur laveur.
¶ Instrumentation spécifique de laparoscopie vasculaire
14
Porte-aiguille à mors courbes (Microfrance-Xomed) et à poignée axiale utilisé
pour la réalisation des endoanastomoses.
utilisé pour la réalisation des endoanastomoses, mais aussi des fils
de polypropylène de taille 3/0 sur un pledget libre utilisés pour la
réalisation d’endopoints d’hémostase (fig 15).
Elle comprend :
– ciseaux de Potts laparoscopiques ;
– clamps largables (Clamps B/Braun) pour l’occlusion de l’artère
mésentérique et/ou des artères iliaques primitives (fig 12) ;
– deux clamps droits aortiques avec mors de type De Bakey, à
crémaillère sécurisée, de 10 mm de diamètre utilisés pour le
clampage aortique proximal et distal (clamps laparoscopiques
B/Braun-Aesculap ou Storz-France) (fig 13) ;
Complications
COMPLICATIONS PEROPÉRATOIRES
¶ Plaie des veines lombaires
[2, 14]
– un porte-aiguille à mors courbes (Microfrance-Xomed) et à
poignée axiale utilisé pour la confection des endoanastomoses
(fig 14) ;
C’est la complication la plus fréquente ; l’hémostase en est parfois
délicate car ces veines se rétractent rapidement en arrière vers le
rachis. Le saignement peut être minimisé en vidéoscopie, lorsque
l’on travaille en pression d’insufflation élevée, ce qui nécessite une
approche particulièrement méticuleuse de ces veines dans cette
technique.
– deux écarteurs endoscopiques 10 mm (Endoretract ;
Ethicon-France) ;
¶ Plaie des veines iliaques
– fil de polypropylène de taille 3/0, d’une longueur de 18 cm,
chacun fixé sur un pledget afin d’éviter la confection du nœud initial,
Elle est réalisée généralement, comme par voie classique, lors de la
dissection circonférentielle des artères iliaques. En cas de plaie
8
[2, 14]
Techniques chirurgicales
Revascularisation artérielle des membres inférieurs à partir de l’aorte sous-rénale :
voies d’abord mini-invasives et laparoscopiques
15
Fils de polypropylène de
taille 3/0 fixés sur un pledget
afin d’éviter la confection
du nœud initial, utilisés
pour la réalisation des endoanastomoses (B/BraunAesculap).
43-029-P
¶ Hématome intrapéritonéal
Il peut être observé après décollement rétrocolique gauche
traumatique ou après manœuvres de tunnellisation sans contrôle
visuel. Un drainage, au contact de la prothèse, doit être
systématique [12].
¶ Occlusion d’un jambage prothétique
Elle est rapportée dans la plupart des séries [2, 18, 23] ; elle est en
rapport avec la durée de clampage, la difficulté de purge et de
lavage des jambages. Le contrôle de la tunnellisation des jambages
prothétiques est souvent plus difficile et peut être responsable d’un
certain nombre d’occlusions.
Indications actuelles et résultats
importante, l’hémostase est très difficile sous laparoscopie et impose
une conversion chirurgicale dans la plupart des cas. Afin de limiter
le saignement pendant la conversion, la plaie peut être contrôlée à
l’aide d’une pince fenêtrée, ou par tamponnement.
¶ Pneumopéritoine
L’apparition d’un pneumopéritoine après abord rétropéritonéal sous
vidéoscopie [18, 27, 28] (par brèche péritonéale ou par diffusion), va
venir fermer la zone de décollement rétropéritonéal et donc la cavité
opératoire. Il n’y a pas d’intérêt à refermer les brèches péritonéales,
ceci est difficile et souvent inefficace. Il faut préférer le
positionnement d’une aiguille de Palmer dans l’hypocondre gauche
afin d’exsuffler le pneumopéritoine. Le taux de conversion est élevé.
¶ Plaie urétérale
Elle peut survenir lors de la dissection ou lors de la tunnellisation.
Dans les deux cas, un bon contrôle visuel permanent doit permettre
d’éviter cette complication [2, 8, 17].
¶ Plaie digestive
Elle peut survenir lors de la préhension des anses digestives avec
les pinces fenêtrées ou par lésions d’électrocoagulation. Elle doit être
réparée immédiatement par endosuture [2, 8].
¶ Conversion chirurgicale
Elle varie de 4,5 à 39 % des cas dans la littérature [4, 12, 17]. La cause
principale de conversion est un saignement non contrôlable. Lors de
l’approche rétropéritonéale, l’apparition d’un pneumopéritoine est
une cause fréquente de conversion, par fermeture de la cavité
opératoire. L’obésité est aussi un facteur de conversion lors de la
phase d’apprentissage. L’échec de la réalisation de l’anastomose
totalement laparoscopique est, bien évidemment, un facteur de
conversion.
COMPLICATIONS POSTOPÉRATOIRES PRÉCOCES
¶ Hématome rétropéritonéal
Il est fréquent et est dû, généralement, à un décollement excessif de
l’espace rétropéritonéal et à un défaut d’hémostase qui a été minoré
par le pneumorétropéritoine. Un drainage de la loge rétropéritonéale
doit être systématique. Ces hématomes sont à l’origine d’une
majoration des douleurs postopératoires et du temps de séjour
hospitalier [18, 27, 28].
Les indications de revascularisation artérielle des membres
inférieurs, à partir de l’aorte ou des artères iliaques primitives, sont
les mêmes que celles de la chirurgie conventionnelle. Elles restent
limitées aux lésions longues et multiples des axes artériels iliaques,
et après échec des traitements endovasculaires.
Un examen tomodensitométrique abdominopelvien sans injection
est indispensable avant d’envisager une revascularisation par voie
mini-invasive et/ou laparoscopique ; il étudie l’importance et la
localisation des calcifications aortiques et iliaques. Des calcifications
aortiques circulaires sont une contre-indication à ces techniques.
Actuellement, les partisans du « tout » laparoscopique s’opposent
aux adeptes de la chirurgie aortique vidéoassistée : la controverse
porte sur les temps de clampage et sur la difficulté de réaliser des
endoanastomoses vasculaires sous laparoscopie. Les résultats
publiés sont peu homogènes, incluant des patients non comparables
entre les différentes séries (pontage aortobifémoral, aortounifémoral, pontage iliofémoral pour des artériopathies des
membres inférieurs de grades II à IV). De plus, aucune de ces séries
ne présente de résultats de perméabilité à moyen terme.
Il n’existe pour l’instant pas d’étude prospective randomisée
comparant la voie mini-invasive, la voie vidéoassistée et la voie
totalement laparoscopique.
La voie mini-invasive s’appuie sur les bases de la chirurgie
conventionnelle ; elle reprend les mêmes voies d’abord en respectant
au maximum la paroi, en évitant l’éviscération pour l’approche
péritonéale ; la dissection et l’anastomose sont effectuées sous
contrôle de la vue en permanence. L’apprentissage dérive
directement de la chirurgie conventionnelle. La voie d’abord est
progressivement réduite avec l’expérience. De plus, cette chirurgie
ne nécessite que l’acquisition d’écarteurs autostatiques spécifiques.
Les résultats sont pour l’instant aussi satisfaisants que ceux obtenus
avec la voie vidéoassistée ou la voie totalement laparoscopique
(tableau I).
Pour les interventions totalement laparoscopiques, le taux de
conversion varie de 4,5 à 39 % selon les séries [4, 12, 17]. La durée
opératoire est toujours supérieure à celle de l’intervention par voie
conventionnelle. La durée de l’intervention décroît avec
l’apprentissage et l’expérience de l’opérateur. Le temps de clampage
varie de 43 à 286 minutes selon les séries, avec un temps de
clampage maximal pour les interventions avec anastomose
terminoterminale totalement laparoscopique. Ce temps de clampage
diminue aussi avec l’expérience, mais reste, pour l’instant, quelle
que soit la technique, supérieur à celui de la chirurgie
conventionnelle. Pour la voie vidéoassistée, les temps de clampage
sont proches de ceux de la chirurgie conventionnelle, mais les temps
d’intervention sont nettement majorés du fait de la dissection
laparoscopique (tableaux II, III).
9
Revascularisation artérielle des membres inférieurs à partir de l’aorte sous-rénale :
Techniques chirurgicales
voies d’abord mini-invasives et laparoscopiques
43-029-P
Tableau I. – Résultats de chirurgie aortique par voies mini-invasives.
AOMI
(nombre)
AAA
(nombre)
Clampage aortique
(minute)
Durée opératoire
(heure)
Conversion
(nombre)
Mortalité
(nombre)
Morbidité
Ceirvera [10]
0
11
52,8
(35-66)
2 h 10
-
0
18.2 %
Rollet [26]
12
78
70
(22-94)
3 h 15
(2 h 00-4 h 15)
-
1
12 %
AOMI : artériopathie oblitérante des membres inférieurs ; AAA : anévrisme de l’aorte abdominale.
Tableau II. – Résultats de chirurgie aortique laparoscopique avec suture vasculaire par voies mini-invasives.
AOM I
(nombre)
AAA
(nombre)
Clampage aortique
(minute)
Durée opératoire
(heure)
Conversion
(nombre)
Mortalité
(nombre)
Morbidité
Kolvenbachk [22]
29
12
43
(22-110)
2 h 45
(1 h 40-4 h 40)
3
1
5%
Alimi [2]
28
10
86
(18-70)
4 h 40
(3 h 40-6 h 40)
1
0
26 %
Arous [3]
5
0
3 h 55
(2 h 40-5 h 30)
0
0
10 %
Said [27]
0
19
4h
(3 h 50-4 h 20)
0
1
15 %
60
(45-110)
AOMI : artériopathie oblitérante des membres inférieurs ; AAA : anévrisme de l’aorte abdominale.
Tableau III. – Résultats de chirurgie aortique laparoscopique avec endoanastomose.
AOMI
Clampage aortique
(minute)
Durée opératoire
(heure)
Conversion
(nombre)
Mortalité
(nombre)
Morbidité
USIC
(jour)
Barbera [4]
43
70
(55-120)
5 h 00
5
1
6,6 %
4
Dion [7]
10
12
(40-160)
5 h 00
(4 h 00-8 h 50)
3
-
0
30 %
-
Coggia [12]
23
57
(34-90)
4 h 50
(3 h 15-7 h 50)
9
1
8,6 %
-
AOMI : artériopathie oblitérante des membres inférieurs ; AAA : anévrisme de l’aorte abdominale ; USIC : unité de soins intensifs en cardiologie.
Edoga [ 1 8 ] a fait une comparaison rétrospective des suites
postopératoires de patients opérés par voie laparoscopique avec
celles d’une série de patients opérés par voie classique. Il observe
dans le groupe « laparoscopique » une diminution significative des
temps de ventilation mécanique et de séjour en unité de soins
intensifs. Conformément aux autres études, il observe une reprise
précoce du transit et une diminution de la prise d’antalgiques [18].
Les techniques laparoscopiques nécessitent un équipement adapté à
la chirurgie vasculaire, mais surtout un apprentissage de la
cœlioscopie, peu enseignée pour l’instant dans le cursus vasculaire.
Un apprentissage de la cœlioscopie sur pelvitrainer et sur cadavre
nous paraît indispensable afin d’acquérir une dextérité nécessaire.
Cet entraînement doit conduire à réaliser des endoanastomoses
terminoterminales ou latéroterminales en moins de 25 minutes.
La plupart des équipes qui ont développé ces techniques miniinvasives ou laparoscopiques ont débuté leur expérience par la
réalisation de pontages aortobifémoraux, puis les ont appliquées au
traitement des anévrismes aortiques sous-rénaux. La mise à platgreffe aortoaortique laparoscopique reste une intervention qui
nécessite une expérience considérable. Cerveira [10] a fait une étude
rétrospective de 65 patients comparant la chirurgie conventionnelle
(n = 37), la chirurgie mini-invasive (n = 11), et la chirurgie
vidéoassistée (n = 17). Les 65 patients présentaient un anévrisme de
l’aorte abdominale limité à l’aorte sous-rénale, traité par mise à platgreffe aortoaortique. Il ne montre pas de bénéfice de la chirurgie
vidéoassistée qui a une morbidité et une durée opératoire plus
importantes que la voie mini-invasive. Pour Cerveira [10], la voie
mini-invasive est une technique applicable à la plupart des patients,
10
elle respecte les mêmes règles que la chirurgie conventionnelle et ne
nécessite pas un entraînement spécifique comme la chirurgie
laparoscopique. Elle permet de diminuer la morbidité des
laparotomies majeures et donne les mêmes avantages que la voie
vidéoassistée en postopératoire, avec un temps opératoire plus
court [10].
Une autre application de la chirurgie aortique laparoscopique est le
traitement des complications de l’exclusion endovasculaire des
anévrismes aortiques sous-rénaux. L’abord aortique laparoscopique
permet de traiter les endofuites de type II, en clippant des artères
lombaires ou l’artère mésentérique inférieure ; un banding du collet
aortique a aussi été proposé dans des cas d’endofuite de type I [13, 24].
Conclusion
Actuellement, deux méthodes de revascularisation mini-invasive
s’opposent : la voie mini-invasive et la voie vidéoassistée et/ou
totalement laparoscopique. La voie vidéoassistée ne semble pas présenter
d’intérêt par rapport à la chirurgie mini-invasive. Elle n’apporte aucun
bénéfice postopératoire et le temps opératoire est plus long. Mais elle
permet de se familiariser avec la technique du « tout laparoscopique ».
La voie totalement laparoscopique nous semble être la véritable
alternative à la chirurgie mini-invasive, car elle offre les bénéfices d’une
cœlioscopie complète. Elle permet en effet, pour des opérateurs bien
entraînés, un contrôle aortique étendu (aorte sus- et sous-rénale) ; le
champ opératoire est beaucoup plus vaste que celui qu’offre la voie miniinvasive. La place de cette chirurgie vasculaire laparoscopique reste à
définir par rapport aux techniques de chirurgie conventionnelle et de
Techniques chirurgicales
Revascularisation artérielle des membres inférieurs à partir de l’aorte sous-rénale :
voies d’abord mini-invasives et laparoscopiques
revascularisation endovasculaire. L’avenir de cette technique dépend
essentiellement de son apprentissage par le plus grand nombre. Son
application se développera, si elle peut être facilement et correctement
apprise par une majorité de chirurgiens vasculaires, afin d’obtenir des
43-029-P
temps de clampage aortique et des durées d’intervention acceptables.
On peut penser que grâce aux progrès de l’instrumentation et à
l’expérience des opérateurs, les revascularisations rénales ou digestives
seront réalisables.
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11
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 43-161-C
43-161-C
Traitement endovasculaire des varices
des membres inférieurs
M Perrin
Résumé. – La chirurgie endoluminale des varices est une technique ancienne, mais les procédures nouvelles
qui utilisent la radiofréquence et le laser ont considérablement relancé son intérêt. En effet, l’énergie
thermique qu’elles fournissent et délivrent dans la paroi veineuse permet d’obtenir une rétraction fibreuse de
la veine et son occlusion. La description du matériel et des différentes méthodes utilisées pour obtenir ce
résultat sont détaillées, ainsi que les difficultés, les incidents et accidents qui peuvent survenir lors de leur
réalisation. Les indications et contre -indications de ces interventions endoluminales restent encore sujettes à
discussion. L’évaluation des résultats est difficile en particulier pour les méthodes laser, car le matériel et les
techniques utilisées sont variables et les procédures non standardisées.
© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : varices, chirurgie veineuse, radiofréquence, laser, endolaser, chirurgie endoluminale, grande
veine saphène, Closurey.
Introduction
Le terme varices mérite d’être précisé. Une varice est une veine souscutanée dilatée en permanence qui présente des altérations
pariétales (fig 1) dont le diamètre est supérieur à 3 mm en position
debout. Elle est le plus souvent tortueuse mais le fait qu’elle est le
siège d’un reflux est rarement mentionné.
Par traitement endovasculaire on entend tout procédé thérapeutique
réalisé depuis la lumière veineuse sans exérèse de la veine
pathologique au plan anatomique, mais qui aboutit à sa suppression
au plan physiopathologique, la sclérothérapie étant de principe
exclue.
La tendance générale en matière de traitement chirurgical est
nettement en faveur des techniques mini-invasives. En pathologie
vasculaire, le traitement endoluminal a connu un important
développement dans le domaine artériel ; en pathologie veineuse, il
s’était cantonné à la mise en place de dispositifs dans les
interruptions de la veine cave inférieure [25] et le traitement des
syndromes obstructifs [19]. Le traitement endovasculaire des varices
n’avait connu jusqu’à ces dernières années qu’un développement
limité.
Historique
La destruction endoluminale de la veine pathologique peut être
obtenue par abaissement thermique (cryochirurgie) ou par
augmentation thermique. L’utilisation de la cryochirurgie dans le
Michel Perrin : Chirurgien vasculaire, ancien interne, ancien chef de clinique des Universités, ancien assistant
des hôpitaux de Lyon, 26, chemin de Décines, 69680 Chassieu, France.
traitement des varices est réalisée en introduisant une sonde dans la
lumière veineuse dont l’extrémité est réfrigérée par détente du
protoxyde d’azote qui permet de congeler la paroi veineuse. Cette
application du froid au niveau de l’intima se heurte à un obstacle
qui empêche de délivrer le froid en continu. En effet au bout de
quelques secondes, la veine adhère à la sonde et lors du retrait de
celle-ci, la totalité de la veine est entraînée avec la sonde réalisant
ainsi une exérèse du vaisseau qui est dénommée cryoéveinage [17]. Si
l’on veut éviter ce phénomène, on doit appliquer le froid en
discontinu et durant un laps de temps très court, c’est la technique
de la cryosclérose dont les inconvénients ont bien été démontrés, à
savoir la survenue d’une reperméation de la veine traitée [17].
Les propriétés du courant électrique pour obtenir une élévation
thermique sont connues depuis fort longtemps. Le courant électrique
continu a initialement été utilisé pour détruire la paroi des veines
pathologiques, mais en fait il engendrait essentiellement une
thrombose. Avec l’usage du courant alternatif et en particulier des
courants à haute fréquence, le résultat recherché a été obtenu.
Enfin, l’effet thermique peut également être transmis aux tissus en
utilisant l’énergie lumineuse émise par une fibre laser.
Principe et mode d’action
des différentes techniques
endoluminales
RADIOFRÉQUENCE
Elle fournit une énergie thermique contrôlée qui élève la
température au niveau de la paroi vasculaire. Il en résulte d’une
part une destruction de l’intima et d’autre part une contraction et
un épaississement des fibres de collagène contenues dans l’adventice
Toute référence à cet article doit porter la mention : Perrin M. Traitement endovasculaire des varices des membres inférieurs. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques
chirurgicales - Chirurgie vasculaire, 43-161-C, 2003, 11 p.
43-161-C
Traitement endovasculaire des varices des membres inférieurs
1
*
A
Histopathologie d’une veine variqueuse.
A. L’endoveine est d’épaisseur inégale. La média est régulièrement épaissie avec un aspect de fibrose. Adventice
normale. Coloration trichrome-vert lumière.
B. Les fibres élastiques pathologiques sont colorées à l’orcéine.
*
B
*
A
2
Techniques chirurgicales
*
C
*
B
Histopathologie de la veine saphène après Closurey.
A. Nécrose de coagulation de l’intima et de la média. Coloration trichrome-vert
lumière.
B. Au sein du foyer de nécrose, les myocytes de la média sont étirés, aplatis. Coloration
trichrome-vert lumière.
C. Les fibres élastiques sont fragmentées. Orcéine.
3
Transformation
fibreuse du tronc de la grande
veine saphène. Contrôle à 4
ans après procédure Closurey par échodoppler.
et surtout la média (fig 2). Ce dernier phénomène est bien connu et
décrit dans la littérature. La contraction des fibres de collagène est
secondaire à une déconnexion de la structure moléculaire hélicoïdale
avec maintien des ponts intramoléculaires thermorésistants.
Ainsi, le diamètre veineux est réduit de façon très importante par la
contraction et l’épaississement des fibrilles de collagène mais
également par le spasme induit par l’élévation de la température.
Ces phénomènes induisent secondairement une évolution fibreuse,
le plus souvent progressive, aboutissant à l’occlusion de la lumière
veineuse (fig 3). La procédure étant réalisée sur une veine vide de
sang, la formation de thrombus est réduite au minimum ce qui
élimine le risque de recanalisation par thrombolyse.
La radiofréquence produit cet effet thermique contrôlé à partir d’un
générateur relié à un cathéter. Les cathéters utilisés présentent des
électrodes bipolaires qui délivrent une température de 85 °C à leur
extrémité (fig 4). Cette élévation thermique est obtenue sur une
2
4
Extrémité des cathéters Closurey 6 et 8 F.
bague de 6 à 8 mm de long. La diffusion de la température est
fonction de la distance qui la sépare de l’électrode, la température
diminuant progressivement lorsque l’on s’éloigne du point de
contact du cathéter avec la veine pour atteindre des valeurs de
l’ordre de 43 °C à 2 mm de distance. C’est la raison pour laquelle
l’énergie thermique est diffusée de manière continue.
LASERS
Le laser agit par action thermique en trois étapes complexes et
successives :
– Une conversion de la lumière laser en chaleur par diffusion
optique. Le volume chauffé, ici le sang est dénommé « volume
Techniques chirurgicales
Traitement endovasculaire des varices des membres inférieurs
*
A
5
Histopathologie de la veine saphène après procédure laser.
A. Coloration trichrome-vert lumière.
B. Nécrose de coagulation intéressant l’endoveine. Orcéine
*
B
*
C
C. Nécrose de coagulation localisée intéressant l’endoveine. Coloration trichrome-vert
lumière.
6
7
Aspect atrophique à l’échodoppler de
la veine traitée par laser à 6 mois.
chauffé primaire ». La conversion de la lumière en chaleur varie en
fonction du milieu dans lequel la lumière est délivrée. Comme l’a
bien démontré Proebstle [21, 22] en étudiant les effets du laser diode
(810 nm, 940 nm et 980 nm), l’action est différente lorsque la lumière
est délivrée dans le sérum salé, le plasma ou le sang. L’énergie laser,
lorsqu’elle est délivrée dans le sang par une fibre de 600 µm par
pulsions successives d’une durée variable, provoque des bulles de
vapeur générées par le sang hémolysé. En effet lors de la procédure,
la veine traitée n’est pas exsanguinée.
– Le transfert de chaleur par conduction dans les tissus avoisinants,
c’est-à-dire la paroi veineuse. Ce sont les bulles qui transmettent
l’énergie thermique à la totalité de la circonférence de la paroi
interne veineuse, c’est le « volume chauffé secondaire ». La
température moyenne mesurée à l’extrémité de la fibre laser est en
moyenne de 729 °C [28]. L’effet thermique a une faible diffusion dans
le milieu sanguin : sa capacité de pénétration dans les tissus est de
0,3 mm [22] ;
– La troisième étape est thermochimique. Elle conduit à la
destruction des tissus. L’aspect histopathologique [23, 28] (fig 5) et
échographique (fig 6) de la veine traitée est bien renseigné. Appliqué
en continu, le laser peut être à l’origine de perforation de la paroi
veineuse [28].
Matériel et techniques
MATÉRIEL SPÉCIFIQUE
¶ Radiofréquence
Le matériel est actuellement commercialisé par une seule firme sous
l’appellation Closurey. Pour réaliser cette procédure, il faut
disposer :
– d’un générateur de radiofréquence ;
43-161-C
Fibre laser de 600 µm
dans son cathéter.
– de cathéters Closurey 6 et 8 french (F) (fig 4) ;
– d’une boîte d’instruments chirurgicaux pour phlébectomie ;
– d’un introducteur à valve et d’un guide ;
– d’un prêt-à-monter de perfusion avec du sérum hépariné (sérum
salé à 0, 9 % additionné de 10 000 UI d’héparine pour 1000 mL) ;
– d’un système de repérage du cathéter : échographe adapté à
l’analyse mode B des tissus superficiels (sonde de 7,5 MHz, doppler
pulsé) ou équipement radiographique.
Cette intervention est généralement réalisée en salle d’opération.
¶ Laser endoveineux
Le matériel est actuellement commercialisé par plusieurs firmes qui
proposent soit le laser diode, soit le laser YAG. Pour réaliser cette
procédure, il faut disposer :
– d’un générateur laser ;
– d’une fibre laser (fig 7) ;
– d’une boîte d’instruments chirurgicaux pour phlébectomie ;
– d’un introducteur à valve et d’un guide ;
– d’un système de repérage du cathéter : échographe adapté à
l’analyse mode B des tissus superficiels (sonde de 7,5 MHz, doppler
pulsé).
Cette intervention est réalisée en salle d’opération ou en salle de
consultation [7].
TECHNIQUE
¶ Points communs à la radiofréquence et au laser
endoveineux
La radiofréquence et le laser endoveineux ont un certain nombre de
points communs dans leur réalisation. L’intervention, réalisée le plus
souvent sous anesthésie locale (tumescente dans la plupart des cas)
ou locorégionale, nécessite :
3
Traitement endovasculaire des varices des membres inférieurs
43-161-C
8
*
A
*
B
*
C
Techniques chirurgicales
Procédure Closurey.
A. Le cathéter a été introduit électrodes repliées dans la lumière de la veine à traiter.
B. Le cathéter positionné, les électrodes sont déployées et
au contact de la paroi veineuse.
C. L’énergie thermique induite par la radiofréquence est
délivrée. La paroi veineuse se contracte.
D. Le cathéter est retiré lentement au-dessous de la veine
traitée qui s’est rétractée.
*
D
– soit un miniabord chirurgical par exposition limitée de la partie
distale de la veine à traiter qui peut être extériorisée à l’aide d’un
crochet de phlébectomie, puis ouverte par phlébotomie ;
– soit une ponction percutanée.
En pratique, la veine est abordée au-dessous du segment à traiter (la
jarretière le plus souvent pour le tronc de la grande veine saphène)
après repérage à l’échodoppler. Un fil-guide métallique ou mieux
hydrophile droit ou en J est alors monté, sa position est contrôlée
par échodoppler. Un introducteur est ensuite mis en place sur le
fil-guide.
En fin d’intervention, le cathéter (Closurey) ou l’ensemble fibrecathéter (laser) est retiré de la lumière veineuse. L’incision cutanée
est fermée et une compression par bande ou par bas élastiques est
mise en place immédiatement sur le membre traité.
¶ Procédure Closurey
Procédure de base
Le choix du type de cathéter est fonction du calibre de la veine à
traiter : 6 F (1,7 mm) pour les veines d’un diamètre de 2 à 8 mm
mesuré en décubitus et 8 F (2,7 mm) pour les veines de 4 à 12 mm.
À noter que les deux cathéters admettent un guide de 0,25 pouce
(inch) qui permet de cathétériser la veine lorsqu’elle est tortueuse.
Le cathéter est connecté au générateur et à la perfusion de sérum
hépariné qui sera maintenue pendant toute l’intervention afin de
prévenir la formation de thrombus à l’intérieur du cathéter. Ce
dernier est monté électrodes repliées (fig 8A) jusqu’au niveau
supérieur du segment à traiter. Le membre est alors exsanguiné par
mise en place d’une bande d’Esmarch complétée par une
compression manuelle en regard de l’extrémité du cathéter et le
malade basculé d’environ 20° tête en bas. Les électrodes sont
déployées afin d’entrer en contact avec la paroi veineuse (fig 8B) ;
on effectue alors un repérage précis (échographique ou
fluoroscopique) du positionnement de la sonde et il importe de ne
plus mobiliser le membre. Les différents paramètres s’affichent sur
l’écran du générateur : puissance (6 watts), température (85 °C) et
durée de la procédure (999 s). Avant de commencer la procédure, on
procède à un test d’impédance. La valeur affichée doit être égale ou
supérieure à 200 ohms confirmant le bon contact des électrodes avec
la paroi veineuse. On démarre alors la procédure thérapeutique. Le
cathéter dont les électrodes sont au contact de la paroi veineuse est
alors lentement retiré de la proximalité à la distalité (fig 8C, D) à
4
9
Procédure Closurey. Contrôle peropératoire par échodoppler du positionnement
de l’extrémité du cathéter. Ici, le cathéter est positionné entre 5-10 mm de la jonction saphénofémorale.
une vitesse comprise entre 2 et 3 cm/min et les différents paramètres
surveillés en permanence. Le respect de la température (85 +/- 3 °C)
conditionne la vitesse de mobilisation du cathéter Closurey. Par
ailleurs, l’impédance en cours de procédure doit être au minimum
de 150 ohms avec le 6 F et de 100 ohms avec le 8 F.
Variantes
Bien que le protocole de la technique Closurey soit très codifié,
quelques variantes ont été développées au plan technique par ses
utilisateurs. Certains préfèrent engager le cathéter dans la lumière
fémorale puis le retirer électrodes déployées pour le positionner avec
précision au niveau de la terminaison du tronc saphène (fig 9).
Comme il a été mentionné plus haut, deux techniques de repérage
peuvent être utilisées, elles sont le plus souvent choisies en fonction
des disponibilités locales en matière d’investigations.
L’échodoppler [20] est utilisé lors de l’abord de la veine à cathétériser,
pour suivre la progression du cathéter et son positionnement final
avant que la radiofréquence soit délivrée et enfin pour contrôler
l’efficacité de la procédure en fin d’intervention (absence de flux).
L’usage de l’échodoppler nécessite la présence d’un opérateur
rompu à cette investigation, mais il est plus rapide que le mapping
radiologique et peut être répété aisément.
Les techniques radiologiques ont fait l’objet d’une description et
d’une évaluation détaillées [12].
La scopie permet de suivre la progression du cathéter car il est radioopaque. Elle n’est utilisée qu’en cas de difficulté de progression.
Techniques chirurgicales
Traitement endovasculaire des varices des membres inférieurs
43-161-C
10
Procédure laser. La
distance entre le point d’introduction de la fibre et la
partie supérieure de la veine
à traiter est mesurée et reportée sur la fibre laser.
11
L’extrémité de la fibre
laser est positionnée 2 cm
au-dessous de la jonction
saphénofémorale ; elle dépasse de 2 cm le cathéter.
12
Procédure laser. La fibre laser est facilement identifiée lorsqu’elle sort à l’extrémité proximale du cathéter.
Complétée par l’injection de produit de contraste, elle permet de
vérifier le positionnement du cathéter juste avant la mise en œuvre
de la radiofréquence.
En fin d’intervention, l’absence de flux dans la veine traitée est plus
rarement contrôlée par angiographie.
¶ Procédure laser
Dans un premier temps, on matérialise par un Steri-Stript sur le
cathéter la longueur de la veine à traiter. Il correspond à la distance
entre le point d’introduction et le point qui correspond à la limite
supérieure de la veine à traiter (fig 10). De la même façon, on
matérialise sur la fibre laser la longueur portée sur le cathéter
augmentée de 2 cm. Le cathéter est alors introduit dans la lumière
veineuse et monté sur le fil-guide par l’introducteur laissé en place
après éventuelle vérification du reflux et rinçage au sérum salé. Son
extrémité doit être positionnée 4 cm au-dessous de la limite
supérieure de la veine à traiter (fig 11), sa position est aisément
vérifiée par échodoppler alors que la fibre laser est difficile à
identifier. Le fil-guide est alors retiré et la fibre laser connectée au
générateur en position d’attente (stand-by). La fibre laser est alors
introduite dans la lumière du cathéter et montée jusqu’à ce que son
extrémité devienne visible (on parle de faisceau de visée), ce qui se
produit dès qu’elle émerge du cathéter en raison de sa luminescence
(fig 12). L’extrémité de la fibre est donc positionnée 2 cm au-dessous
du niveau supérieur de la veine à traiter (fig 11). La fibre et le
cathéter sont solidarisés. Si l’on utilise l’anesthésie locale qui n’avait
été réalisée qu’au point d’introduction, elle est alors complétée tout
le long du trajet de la veine à traiter. L’anesthésie par tumescence
est la plus utilisée. Toutes les personnes présentes dans la salle
mettent leurs lunettes de protection. L’ensemble fibre et cathéter est
alors retiré conjointement et les impulsions laser délivrées de façon
étagée et en discontinu (fig 13). Les différents paramètres (durée de
l’impulsion, distance entre deux impulsions, etc) varient en fonction
du type de laser utilisé. Ces différences sont regroupées dans le
tableau I. Cependant, certains délivrent l’énergie laser en continu.
La visualisation à travers la peau du faisceau de visée permet, dans
la plupart des cas, de voir la progression de l’extrémité de la fibre
laser durant la procédure.
13
Procédure laser. Le tir laser est réalisé en discontinu lors du retrait de la fibre.
¶ Procédures complémentaires
Lorsque la veine traitée est le tronc de la grande ou de la petite
veine saphène, un certain nombre de gestes peuvent être réalisés en
complément.
Crossectomie
Elle n’est plus pratiquée dans la technique Closurey car une étude [3]
a démontré que les résultats étaient équivalents avec ou sans
crossectomie. Dans la procédure laser, elle peut être associée [4] ou
non [7, 8, 14, 22].
Phlébectomie ou sclérothérapie des collatérales
Dans la technique Closurey, la phlébectomie par mini-incisions
étagées des collatérales est le plus souvent associée dans le même
temps au traitement de l’insuffisance tronculaire ; la sclérothérapie
est utilisée en règle en postopératoire.
Dans les techniques laser, la phlébectomie peut être réalisée avec la
fibre laser [4]. Dans les autres séries, les collatérales pathologiques
ont été traitées dans le même temps opératoire par phlébectomie
étagée [8] ou ultérieurement par sclérothérapie [14, 22].
5
Traitement endovasculaire des varices des membres inférieurs
43-161-C
Techniques chirurgicales
Tableau I. – Différents lasers et leur mode d’utilisation.
Auteur
Type de laser
Longueur
d’onde en mm
Durée de
l’impulsion
(s)
Distance entre
chaque
impulsion
(mm)
Durée entre
chaque
impulsion (s)
Vitesse de
traction de la
fibre : durée
(s)/distance
(cm)
I Énergie délivrée (J)
a à chaque impulsion
b totale
II Puissance délivrée
(W)
Chang [4]
YAG
1 064
10
/
Min [14]
Diode
810
1
2
0,8-1
/
I b = 15 240 moyenne
II = 10-15
II = 10-12
Diode
810
1
/
/
/
Ia=6
Diode
940
1
5-7
2
/
Diode
980
1,5-3
3
1,5
/
I a = 15
II = 15
II = 10-13
Guex [8]
Navarro [15]
Proebstle
[22]
Gérard [7]
Difficultés, incidents et accidents
peropératoires
RADIOFRÉQUENCE
10/1
Exsanguination
?
Compression
manuelle
Compression
manuelle
Non
Non
¶ Échec immédiat
Deux échecs peropératoires sur une série de 97 cas [15] qui ont
consisté en deux non-occlusions immédiates dont l’une liée à une
perforation.
¶ Cathétérisme impossible
Bien que cette difficulté ait été rarement rapportée, elle est survenue
dans quatre cas sur 170 [12] ; elle a pu être résolue par la montée d’un
guide dans la moitié des cas.
¶ Fausse route
Elle peut être due :
– à l’engagement du cathéter Closurey dans une collatérale de la
veine à traiter qui n’est pas toujours évidente, la surveillance de la
progression par échodoppler se révèle ici précieuse ;
– à une perforation : l’attention de l’opérateur est attirée par une
augmentation importante du chiffre de l’impédance qui atteint des
valeurs de 600 à 800.
Quelle est la conduite à tenir ? On retire le cathéter Closurey puis on
exerce une compression manuelle au niveau de la perforation
pendant quelques minutes, on réintroduit le cathéter sur un filguide, on effectue un test d’impédance et l’on reprend la procédure.
Bilan préopératoire
– Le bilan général est superposable à celui qui est réalisé dans la
chirurgie classique d’exérèse [17]. Il est fonction de l’âge de l’opéré et
de la modalité anesthésique qui a été arrêtée.
– Une investigation par échodoppler avec cartographie complète
doit dans tous les cas précéder le traitement endoluminal des
varices.
Suites opératoires
Le malade, quelle que soit la technique utilisée, quitte le service le
jour même avec une prescription d’antalgique à la demande et une
compression pour 2 à 3 semaines. La marche est autorisée dès le
premier jour. Le traitement anticoagulant a été prescrit de principe
dans deux séries [7, 22]. Le malade est revu en routine dans un délai
de 4 à 8 jours.
¶ Thrombus au niveau des électrodes
L’opérateur en est averti dans un premier temps par la modification
du paramètre impédance (supérieur à 800 ohms) puis par l’arrêt du
générateur. En effet, l’énergie délivrée est une énergie contrôlée et
autorégulée par la thermosonde située sur une des électrodes du
cathéter Closurey. Il convient alors de retirer le cathéter et d’enlever
le coagulum qui s’est formé sur les électrodes, puis on reprend la
procédure.
Complications
¶ Échec immédiat par non-oblitération de la veine
traitée
Les complications postopératoires sont listées dans le tableau II.
On peut soit recommencer immédiatement la procédure Closurey,
soit avoir recours à la chirurgie d’exérèse classique. D’où l’intérêt
d’un contrôle immédiat peropératoire.
LASER ENDOVEINEUX
Nous avons identifié dans la littérature deux séries où des problèmes
peropératoires étaient signalés.
¶ Cathétérisme impossible
Impossibilité de monter la fibre laser chez dix patients sur 149 [4] ; la
difficulté a été tournée en cathétérisant le tronc saphène à partir de
la crossectomie.
6
Elles ont été répertoriées de façon précise dans l’étude Closurey
Pilote (cf infra). Elles sont parfois plus difficiles à cerner pour les
procédures laser.
CLOSUREy
Les hématomes, l’infection et les thromboses veineuses superficielles
n’ont pas donné lieu à réintervention. Les dysesthésies se situent
essentiellement dans le territoire du nerf saphène et ont été
beaucoup plus fréquentes chez les patients dont la procédure a été
conduite jusqu’à la cheville.
Deux autres types de complication ont été notés.
Brûlures dermiques. Sur les 330 membres traités, les brûlures
dermiques relevées dans l’étude Closurey Pilote concernent sept
cas, soit 2,4 % du total. Toutes ces brûlures étaient de degré I. Six
patients sur sept présentaient une brûlure dermique comprise entre
0,5 et 3 cm de longueur avec un diamètre inférieur à 0,2 mm.
Cette complication est directement liée à la procédure et
indirectement à la morphologie du patient (vitesse insuffisante de
Traitement endovasculaire des varices des membres inférieurs
Techniques chirurgicales
43-161-C
Tableau II. – Complications et leurs séquelles après Closurey.
Type de complications
Hématome
Infection
Thrombose veineuse
superficielle
Dysesthésies
1 semaine
6 mois
1 an
2 ans
3 ans
(n = 244)
(n = 242)
(n = 252)
(n = 149)
(n = 68)
14 (5 %)
0
6 (2 %)
1 (0,4 %)
0
1 (0,4 %)
0
0
0
0
0
0
0
0
0
42 (14 %)
24 (10 %)
9 (3,6 %)
8 (5,4 %)
0
Tableau III. – Complications et leurs séquelles après laser YAG.
Type de complications
Hématome
Œdème
Thrombose veineuse superficielle
Dysesthésies
Pigmentation
Brûlures superficielles/cicatrices
1 semaine
6 mois
12-24 mois
(n = 252)
(n = 252)
(n = 252)
2 (0,8 %)
252 (100 %)
4 (1,6 %)
92 (36,5 %)
58 (23 %)
12 (4,8 %)
0
0
0
7 (2,8 %)
2 (0,8 %)
6 (2,4 %)
0
0
0
0
0
0
(tableau IV) plus difficiles à identifier dans les autres séries [14, 22]. Un
échodoppler de contrôle systématique du réseau veineux profond a
été effectué dans deux séries [7, 14] (respectivement 20 et 33 patients),
il n’a pas été identifié de thrombose veineuse profonde.
Indications
CONTRE-INDICATIONS GÉNÉRALES
retrait du cathéter en fin de procédure et/ou veine superficielle à
moins de 10 mm de la surface de la peau). Il faut rajouter que les
cas de brûlures dermiques sont apparus au tout début de la série et
que sur les 200 derniers patients inclus, aucune complication de ce
type n’a été signalée. Actuellement, une évaluation par ultrasons de
la profondeur des segments veineux à traiter est systématique et
permet d’identifier les patients susceptibles de présenter une telle
complication. Une infiltration de sérum physiologique ou une
anesthésie tumescente sur le segment à traiter est alors effectuée.
Cette amélioration technique a supprimé cette complication.
Thrombose veineuse profonde. Sur les 330 membres traités, trois
thromboses veineuses profondes ont été observées (0,9 %).
Deux de ces thromboses étaient asymptomatiques, la dernière s’est
manifestée par une embolie pulmonaire (0,3 %) de gravité moyenne
qui a nécessité une hospitalisation et un traitement par
anticoagulant. Ces trois complications thromboemboliques sont
survenues précocement et ont été identifiées à l’échodoppler. Ces
thromboses étaient localisées dans la veine fémorale commune en
regard de la jonction saphénofémorale.
Après avoir repris le dossier du patient qui avait présenté une
embolie pulmonaire, il est apparu que le positionnement du cathéter
n’avait pas respecté les consignes techniques. De surcroît, le patient
n’avait pas pu suivre les conseils de déambulation précoce en raison
de la survenue d’une entorse de cheville.
LASER ENDOVEINEUX
Trois études fournissent des informations inégales. Elles sont
détaillées dans la série de Chang [4] (tableau III) et de Proebstle [21]
Elles ne sont pas différentes des contre-indications retenues dans la
chirurgie classique d’exérèse [17] : grossesse ou désir de grossesse à
court terme, thrombose veineuse profonde récente, patient ne
pouvant déambuler normalement, état général médiocre, etc.…
CONTRE-INDICATIONS SELON LA MÉTHODE
¶ Closurey
Un certain nombre de contre-indications sont retenues : veine dont
le diamètre mesuré en décubitus est supérieur à 12 mm, présence de
tortuosités trop importantes sur le vaisseau à traiter, artère fémorale
très proche du tronc de la grande veine saphène [6]. La position très
superficielle de la grande veine saphène n’est pas une contreindication car le risque de brûlure cutanée peut être évité comme
nous l’avons indiqué dans le paragraphe traitant des complications.
¶ Laser endoveineux
Aucune contre-indication spécifique liée à la morphologie ou au
diamètre de la veine à traiter n’a été identifiée dans la littérature.
INDICATIONS EN FONCTION DE LA LOCALISATION
AU PLAN ANATOMIQUE OU TOPOGRAPHIQUE
DES VARICES À TRAITER
La grande veine saphène est la veine qui a été le plus fréquemment
traitée par procédure endoluminale et on se limite le plus souvent à
la portion située au-dessus de la jarretière en raison du risque de
léser le nerf saphène dans le segment crural. Ce même risque
neurologique fait que la petite veine saphène a été plus rarement
traitée par procédure endoluminale mais on dispose néanmoins
d’une série de petites veines saphènes traitées par laser diode [21].
Tableau IV. – Complications et leurs séquelles après laser diode dans la chirurgie de la petite veine saphène.
Complications
Membres
Durée du suivi (semaine)
Nombre
%
Moyenne
Extrêmes
Douleur
20
54
1
0,2-4
Douleur nécessitant un analgésique
18
49
1
0,2-4
Ecchymoses
17
46
2
1-4
Induration sur le trajet
14
38
4
1-4
Paresthésies
4
11
6,5
3-8
Thrombose veineuse superficielle
3
8
1,5
1,5-4
Thrombose veineuse profonde
1
3
/
/
7
Traitement endovasculaire des varices des membres inférieurs
43-161-C
Techniques chirurgicales
Tableau V. – Résultats échodoppler après Closurey.
Échodoppler
Absence de flux
Absence de reflux
Résultat à 6 semaines
Résultat à 1 an
Résultat à 2 ans
Résultat à 3 ans
(n = 244)
(n = 252)
(n = 149)
(n = 68)
227 (93 %)
235 (96 %)
213 (85 %)
226 (88 %)
128 (86 %)
130 (87 %)
60 (88 %)
60 (88 %)
Les collatérales de la saphène variqueuses non associées à une
insuffisance de crosse ou du tronc peuvent également être traitées
par laser endoveineux [16].
INDICATIONS EN FONCTION DU CONTEXTE CLINIQUE
Elles sont superposables en théorie à celles qui sont retenues dans le
traitement conventionnel chirurgical des varices par exérèse [17] à
quelques exceptions. En présence d’une thrombophlébite
superficielle, la chirurgie endoluminale paraît contre-indiquée.
Dans les récidives variqueuses, elle semble devoir être réservée au
traitement du tronc de la grande saphène incontinent non traité lors
de la chirurgie première et dont le reflux est alimenté par des veines
périnéales ou par une néovascularisation au pli de l’aine, voire par
une perforante du canal fémoral [6].
INDICATIONS AU PLAN TECHNIQUE
Si le traitement du tronc saphène incontinent est une des bases du
traitement, les collatérales de la saphène, siège d’un reflux, doivent
également être traitées. On a le choix entre la phlébectomie par
incisions étagées qui peut être réalisée dans le même temps
opératoire que la chirurgie endoluminale du tronc, mais celle-ci peut
également être entreprise dans un deuxième temps [ 11 ] . La
sclérothérapie postopératoire est une autre alternative.
Résultats
Nous ne disposons pas actuellement de résultats au-delà de 3 ans
pour ces techniques endoluminales. Il est classique d’apprécier
d’une part ces résultats au plan clinique (symptômes, signes, score
de sévérité, satisfaction du médecin et/ou du patient, questionnaire
de qualité de vie) et d’autre part au plan échodoppler. La corrélation
entre ces deux résultats n’a été faite que pour la technique
Closurey [13]. Même s’il a été établi qu’il existe une corrélation
relativement satisfaisante entre la mise en évidence d’un reflux au
niveau du réseau veineux superficiel et la présence de varices et/ou
d’une symptomatologie veineuse [1], une autre étude [26] a montré
l’absence de corrélation entre symptomatologie et résultat
cosmétique apprécié par le patient et la présence d’un reflux au
doppler continu.
RADIOFRÉQUENCE
Le collectif que nous désignerons par groupe Closurey Pilote fait
l’objet d’une étude multicentrique, prospective ; ses résultats sont
rapportés régulièrement [10, 11, 13, 18] et réévalués en permanence.
Deux cent quatre-vingt-quatorze patients (330 membres inférieurs
traités), dont 77 % de femmes d’âge moyen 46,2 ans, ont été inclus
dans 31 centres entre décembre 1998 et octobre 1999. La répartition
topographique des veines traitées s’établit ainsi : grande veine
saphène = 323, petite veine saphène = six, circonflexe postérieure de
cuisse (terminologie ancienne : saphène postéromédiale de cuisse) =
une.
Ces patients ont été répertoriés suivant la classification CEAP [5] de
0 à 6, sachant qu’ils étaient tous symptomatiques : C0 = 2, C1 = 11,
C2 = 236, C3 = 24, C4 = 47, C5 = 5, C6 = 4.
8
14
Procédure Closurey. Échodoppler postopératoire : type I ; oblitération complète
de la terminaison de la grande veine saphène au ras de la veine fémorale commune.
Aucune veine collatérale de la crosse n’est restée perméable.
Une investigation par échodoppler a systématiquement complété
l’examen clinique. L’échodoppler préopératoire a permis d’identifier
les veines où siégeait un reflux (durée supérieure à 0,5 s) et d’en
mesurer le diamètre. La mesure était effectuée au niveau du segment
le plus dilaté.
¶ Résultats échodoppler
L’occlusion immédiate de la veine traitée a été obtenue dans 98 %
des cas (322/330) Les résultats à court, moyen et long terme du
groupe Closurey Pilote sont présentés dans le tableau V. Il n’y a
pas de différence significative entre les résultats à 6 semaines et à
3 ans.
Mais le travail le plus intéressant est indiscutablement celui qui a
expertisé l’aspect de jonction saphénofémorale sur 142 membres
avec un suivi de 2 ans [20]. Trois types peuvent être identifiés :
– type I : oblitération complète de la terminaison de la grande veine
saphène au ras de la veine fémorale et des collatérales de la crosse
(fig 14) ;
– type II a : une ou plusieurs veines collatérales restent perméables
et se drainent de façon physiologique dans la veine fémorale
commune bien qu’il ne persiste aucun moignon de crosse ;
– type II b : il persiste un court moignon de crosse (< 3 cm) dans
lequel s’abouchent les collatérales de la crosse. Ces collatérales se
drainent le plus souvent de façon physiologique dans la veine
fémorale commune (fig 15), mais peuvent également refluer dans les
collatérales « basses » de la cuisse (veines circonflexes antérieure et
postérieure de cuisse qui remplacent dans la nouvelle nomenclature
anatomique [2] les appellations veines saphènes antérolatérale et
médiopostérieure de cuisse) ; ce reflux ne pouvant être alimenté en
tout état de cause que si la valve ostiale est incontinente ou si la
disposition anatomique des collatérales s’y prête, par le drainage
physiologique d’une veine de la paroi abdominale ou d’une veine
honteuse ;
Techniques chirurgicales
Traitement endovasculaire des varices des membres inférieurs
43-161-C
été identifié que dans 16 membres (11, 3 %) et que seuls 14 d’entre
eux (9,8 %) présentaient un reflux.
¶ Résultats au plan clinique
Les résultats cliniques du groupe Closurey Pilote sont répertoriés
tableau VI. L’analyse statistique révèle que la différence est
significative pour tous les critères retenus entre les valeurs
préopératoires et les valeurs postopératoires, quelle que soit la durée
du suivi (p < 0,0001). À l’inverse, cette différence n’est pas
significative entre les résultats au sixième mois, la première, la
deuxième et la troisième année.
¶ Corrélation entre les résultats échodoppler
et cliniques
Une étude prospective [13] nous renseigne sur ce point (tableau VII).
Les patients ont été classés en postopératoire en trois groupes en
fonction des résultats de l’investigation échodoppler au niveau de
la veine traitée :
– OC (occlusion complète) : pas de flux ;
15
Procédure Closurey. Échodoppler postopératoire : type II b ; oblitération de la terminaison de la grande veine saphène avec persistance d’un moignon de crosse dans lequel s’abouche un affluent de la crosse. Cette collatérale restée perméable se draine de
façon physiologique dans la veine fémorale commune.
16
Procédure Closurey. Type III ; non-oblitération de plus de 3 cm de la terminaison de la grande veine saphène avec flux physiologique. En Valsalva, pas de reflux.
– type III : non-oblitération de la grande veine saphène de plus de
3 cm à la jonction saphénofémorale. Le flux à ce niveau peut être
physiologique (fig 16) ou antiphysiologique (reflux). Dans ce dernier
cas, le reflux se draine dans un réseau variqueux sous-jacent. Il doit
être traité impérativement par radiofréquence ou sclérothérapie afin
d’éviter une récidive.
Une étude qui porte sur le collectif Closurey Pilote a révélé à 2 ans
que sur les 142 grandes veines saphènes contrôlées, le type III n’a
– OPC (occlusion presque complète) : persistance d’un flux sur
moins de 5 cm ;
– REC (recanalisation) : persistance d’un flux sur plus de 5 cm.
Le résultat clinique (signes et symptômes) et la présence d’un reflux
(identifié par échodoppler) ont également été appréciés dans chacun
de ces trois groupes.
Pour apprécier ce résultat clinique, un score de sévérité dérivé de
celui qui avait été proposé en complément de la classification
CEAP [15] a été utilisé.
Au plan clinique, les résultats sont significativement meilleurs à 1 et
2 ans si l’on compare OC et REC : OC > REC (P 0,01), mais pas entre
OC et OPC et entre OPC et REC. Au plan du reflux, la différence
n’est pas significative entre OC et OPC, mais elle l’est entre OC et
REC et entre OPC et REC.
En résumé, la corrélation entre résultat clinique et échodoppler
permet de conclure que la persistance d’un segment veineux resté
perméable sur plus de 5 cm au niveau de la veine traitée
s’accompagne d’un résultat clinique moins satisfaisant, ce qui milite
en faveur d’un traitement complet. On peut cependant regretter
d’une part que dans cette importante étude, le résultat clinique n’ait
pas été corrélé avec le reflux plutôt qu’avec la persistance d’un flux
et d’autre part que le niveau où la veine était restée perméable n’ait
pas été pris en considération. Il est en effet probable qu’un segment
de veine restée perméable au niveau des crosses n’a pas la même
valeur qu’au niveau du tronc si l’on traite une veine saphène.
LASER ENDOVEINEUX
Les informations sur les patients traités et leurs résultats sont
rassemblées dans le tableau VIII. Les veines traitées étaient des
grandes veines saphènes avec reflux au niveau de la jonction
saphénofémorale à l’exception d’une série où seules les collatérales
saphènes ont été traitées [16].
¶ Résultats échodoppler
Trois études ont été analysées [14, 15, 16] ; les résultats sont excellents,
mais le nombre de patients suivis au-delà de 1 an est peu important.
Tableau VI. – Résultats cliniques après Closurey.
Symptômes et signes
Douleur
Fatigue
Œdème
Varices
En préopératoire
1 semaine
6 mois
1 an
2 ans
3 ans
(n = 330)
(n = 244)
(n = 242)
(n = 244)
(n = 149)
(n = 68)
82 %
72 %
31 %
96 %
26 %
9%
7%
9%
6%
1%
1%
10 %
4%
2%
1%
10 %
6%
4%
5%
13 %
2%
1%
3%
9%
9
Traitement endovasculaire des varices des membres inférieurs
43-161-C
Techniques chirurgicales
Tableau VII. – Résultats cliniques et échodoppler de l’étude Closurey Pilote.
Nombre de membres
évalués et résultat
de l’ED
Préopératoire : 286
Postopératoire 1 an : 232
OC 194 (83,6 %)
OPC 12 (5,6 %)
REC 25 (10,8 %)
Postopératoire 2 ans : 142
OC 121 (85,2 %)
OPC 5 (3,5 %)
REC 16 (11,3 %)
Signes exprimés en %
Symptômes exprimés en %
Absence de reflux en ED
dans la veine
Varices
Œdèmes
Pigmentation
Hypodermite
Douleur
Fatigabilité
à traiter ou traitée %
95
30,4
21,6
6,6
83,1
76,2
0
5,7
15,4
10
0,5
0
4
9,3
7,7
16
1,5
0
4
3,1
0
12
1
0
12
100
85
28
8,3
0
46,2
4,1
0
12,5
7,4
0
18,8
0,8
0
12,5
3,3
20
25
1,7
20
18,8
100
100
12,5
ED : échodoppler ; OC : occlusion complète, pas de flux en ED ; OPC : occlusion presque complète, persistance d’un flux sur moins de 5 cm dans la veine traitée : REC : recanalisation, persistance d’un flux sur plus de 5 cm dans la veine
traitée.
Tableau VIII. – Résultats cliniques et échodoppler après laser.
Auteur
Chang [4]
Nombre de
patients
(membres)
Sexe H/F
149 (252)
1/5
Stade clinique
préopératoire
Calibre en mm
de la veine
traitée
(moyenne)
Durée du
suivi en mois
(moyenne)
C 2 minimum1
Score 2-4 : 95 %2
4,9-18 (10,5)
12-28
(19)
Min [14]
84 (90)
1/6
ND
3-27 (11)
1-9 (6)
Navarro [15]
79 (97)
ND
ND
ND
0-20 (7)
Résultats
Cliniques
Sy : ND
S : récidive des varices
8/244 (3 %)
AS P ≥ 0,052
ND
ND
ED
Durée et nombre de malades
% de veines oblitérées
ND
3 mois 82/83 (99 %)
9 mois 26/27 (96 %)
12-20 mois 11/11 (100 %)
N : nombre ; H : homme ; F : femme ; Sy : symptôme ; S : signe ; ED : échodoppler ; ND : non documenté ; 1 : classe C de la classification CEAP [5] ; 2 : score de sévérité clinique selon Hach [9] ; AS : amélioration significative.
17
Procédure laser. Échodoppler
postopératoire.
L’aspect est identique à celui obtenu après Closurey.
Type II b.
fournissant des preuves de niveau 1 ou 2 qui permettraient de
formuler des recommandations de type A ou B [27] pour choisir entre
chirurgie classique dite d’exérèse et traitement endoluminal. Il
convient d’ailleurs de remarquer que nous ne disposons pas plus
d’études de ce type pour comparer l’efficacité thérapeutique de la
sclérothérapie échoguidée versus chirurgie précédée par un
échodoppler.
Cependant, un certain nombre d’éléments peuvent être relevés.
¶ Suites postopératoires
Les suites postopératoires sont en règle moins douloureuses, la
reprise des activités normales plus précoce et la convalescence
raccourcie dans les procédures endoluminales. Nous disposons dans
ce domaine d’une étude prospective randomisée monocentrique [24]
comparant la radiofréquence à la chirurgie classique qui confirme
ces données et met en évidence le coût moindre de la procédure
Closurey si l’on prend en compte tous les éléments financiers.
L’aspect à l’échodoppler le plus souvent identifié correspond au type
II b décrit dans la procédure Closurey (fig 17).
¶ Résultats au plan clinique
Une seule série rapporte les résultats au plan clinique de façon
précise [4] (tableau VIII).
¶ Corrélation entre les résultats échodoppler
et cliniques
Aucune étude n’est disponible.
COMPARAISON ENTRE CHIRURGIE CLASSIQUE
ET PROCÉDURES ENDOLUMINALES
Comparer les résultats des différents procédés dans le traitement
des varices reste une tâche difficile. Notons d’emblée que nous ne
disposons d’aucune étude prospective multicentrique randomisée
10
¶ Complications postopératoires
En l’absence d’étude randomisée, il est difficile de fournir des
conclusions précises. Il semble cependant que les troubles
neurologiques soient plus fréquents après traitement endoluminal
mais ils disparaissent complètement entre 2 et 3 ans (tableaux II, III).
À l’inverse, les hématomes sur le trajet de la veine traitée sont
beaucoup moins importants dans les procédures endoluminales en
l’absence d’avulsion des collatérales. Ce point est sans doute à
l’origine de la plus grande simplicité des suites postopératoires,
d’une reprise plus précoce des activités normales et de la réduction
de la durée de la convalescence. Les complications engendrées par
la ligature des crosses, infections, complications lymphatiques, ne
sont plus à craindre en l’absence de crossectomie chirurgicale dans
les procédures endoluminales.
Techniques chirurgicales
Traitement endovasculaire des varices des membres inférieurs
¶ Comparaison des résultats au plan clinique
et ultrasonique
On s’accorde généralement sur un délai minimal de 3 ans pour juger
du traitement des varices. Nous ne disposons en conséquence pour
les procédures endoluminales que du groupe Closurey Pilote
(tableaux V et VI) et pour la chirurgie d’exérèse, de l’étude de
Rutgers [26].
Résultat clinique
Si l’on établit une comparaison entre les deux collectifs qui viennent
d’être cités, on relève que dans le collectif chirurgie classique, la
disparition de la symptomatologie est de 80 % contre 97 % dans le
groupe Closurey Pilote. La présence de varices est plus difficile à
juger dans la mesure où les critères d’appréciation dans les deux
études sont différents.
Résultats des investigations ultrasoniques
Bien que les investigations aient été différentes (doppler continu [26]
versus échodoppler dans le groupe Closurey Pilote), les résultats
sont sensiblement équivalents en termes de reflux. Celui-ci n’est
identifié respectivement que dans 15 % et 12 % des cas.
COMPARAISON DE LA RADIOFRÉQUENCE
ET DU LASER ENDOVEINEUX
En termes de facilité d’exécution, les deux méthodes sont
probablement équivalentes sachant que la procédure laser
43-161-C
endoveineux est plus rapide. Mais l’élément le plus discriminant
est sans aucun doute la standardisation de la procédure. Alors
que le protocole radiofréquence est très codifié, il n’existe aucune
standardisation des procédures lasers, même lorsque le même
type de fibre laser est utilisé. Ce dernier point rend donc difficile
l’appréciation des résultats de cette technique d’autant, comme
nous l’avons souligné, que peu de résultats cliniques sont
actuellement disponibles. Nous disposons par ailleurs d’une
étude comparative animale [ 2 8 ] qui est en faveur de la
radiofréquence.
Conclusion
La chirurgie endoluminale des varices comporte un certain nombre
d’avantages par rapport à la chirurgie classique en termes
d’amélioration des suites postopératoires. Au plan de l’appréciation des
résultats, nous disposons de deux études à 3 ans qui permettent de
comparer la chirurgie classique à Closurey. Elles ne montrent pas de
différence significative.
Mais seules des études prospectives randomisées incluant la chirurgie
classique, la sclérothérapie échoguidée et les procédures endoluminales
permettraient de fournir des recommandations de grade A ou B.
Remerciements. – Nous remercions les docteurs JL Gérard, O Pichot et PN Vuong pour leur
précieuse collaboration iconographique.
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11
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 43-105
43-105
Chirurgie des artères digestives
E Kieffer
Résumé. – La chirurgie des artères digestives s’adresse à des lésions très diverses dominées par
l’athérosclérose ostiale ou juxtaostiale du tronc cœliaque et de l’artère mésentérique supérieure. L’abord de
ces artères profondément situées est difficile, ce qui explique la multiplicité des voies d’abord décrites. La
revascularisation est faite par l’une des trois grandes méthodes : endartériectomie, pontage ou transposition.
La discussion reste ouverte entre les partisans des pontages rétrogrades et ceux des pontages antérogrades et
entre les partisans d’une revascularisation complète ou incomplète. Les indications de chirurgie des artères
digestives peuvent être symptomatiques, préventives ou anatomiques. Les complications sont rares si la
chirurgie est réalisée de façon adaptée. La possibilité d’occlusion tardive par hyperplasie intimale nécessite
une surveillance à long terme par échographie-doppler.
© 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : artères digestives, tronc cœliaque, artère mésentérique supérieure, artère mésentérique
inférieure, endartériectomie transaortique, pontage antérograde, pontage rétrograde,
transposition de l’artère mésentérique supérieure.
Introduction
La revascularisation des artères digestives a progressivement acquis
droit de cité depuis les premières tentatives chirurgicales des années
1950 [100]. Bien qu’elle ne représente que moins de 1 % de l’ensemble
des revascularisations artérielles [51] , la chirurgie des artères
digestives est en effet une chirurgie vitale. Mais le petit nombre de
cas et l’absence fréquente de suivi morphologique font cependant
qu’il est difficile de choisir une technique de revascularisation plutôt
qu’une autre.
Après un bref rappel anatomique et physiopathologique, nous
étudierons successivement les lésions anatomiques, les voies
d’abord, les techniques de revascularisation et enfin les indications
opératoires et les choix tactiques avant d’envisager les complications
de cette chirurgie et certains cas particuliers comme le traitement du
syndrome du ligament arqué du diaphragme, la chirurgie de l’artère
mésentérique inférieure et le traitement des anévrismes des artères
digestives. L’exposé sera centré sur les lésions occlusives
athéroscléreuses, de loin les plus fréquentes.
1
1
Anatomie normale des
artères digestives et leurs
anastomoses longitudinales. 1. tronc cœliaque,
2. artère mésentérique supérieure ; 3. artère mésentérique inférieure ; 4. artères
hypogastriques.
2
3
Rappel anatomique
La vascularisation artérielle digestive est classiquement caractérisée
par un système à trois étages naissant de l’aorte abdominale : tronc
cœliaque, artère mésentérique supérieure (AMS) et artère
mésentérique inférieure (AMI) [12, 21, 93]. On peut y adjoindre un
Édouard Kieffer : Professeur de chirurgie vasculaire, chef de service.
Service de chirurgie vasculaire, centre hospitalier universitaire Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital,
75651 Paris cedex 13, France.
4
quatrième étage, celui des artères hypogastriques, naissant des
artères iliaques. Toutes ces artères sont reliées par un ensemble de
connexions longitudinales (fig 1) [76, 112].
Toute référence à cet article doit porter la mention : Kieffer E. Chirurgie des artères digestives. Encycl Méd Chir (Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales - Chirurgie vasculaire, 43-105, 2003, 17 p.
Chirurgie des artères digestives
43-105
2
Cercle péripancréatique anastomosant l’artère
hépatique à l’artère mésentérique supérieure.
Techniques chirurgicales
De très nombreuses variations anatomiques sont possibles. Elles
portent sur :
– les modalités d’origine du tronc cœliaque et de l’AMS, parmi
lesquelles nous signalerons les deux variations les plus fréquentes,
le tronc hépatosplénique, l’artère coronaire stomachique naissant
directement de l’aorte (3 à 13 %), et le tronc gastrosplénique, l’artère
hépatique naissant directement de l’aorte (0,5 à 12 %) ;
– les variations des artères hépatiques. La disposition modale n’est
retrouvée que dans 60 % des cas. Parmi les variations les plus
fréquentes citons :
– la coexistence d’une artère hépatique moyenne et d’une artère
hépatique gauche naissant de la coronaire stomachique (8 %) ;
– la coexistence d’une artère hépatique moyenne et d’une artère
hépatique droite naissant de l’AMS et rejoignant le pédicule
hépatique par son bord droit (11 %) ;
Le tronc cœliaque naît de la face antérieure de l’aorte au niveau de
D12, immédiatement sous l’orifice aortique du diaphragme, formé
par les piliers diaphragmatiques droit et gauche. Il répond en avant
à la région cœliaque, occupée principalement par les ganglions semilunaires du plexus cœliaque et par les ganglions lymphatiques
lomboaortiques. Après avoir donné l’artère coronaire stomachique,
le tronc cœliaque, court et sagittal, se divise en artère splénique et
artère hépatique commune. Ses branches vascularisent l’ensemble
de l’étage sus-mésocolique de l’abdomen.
L’AMS naît de la face antérieure de l’aorte au niveau de L1, à
hauteur ou un peu au-dessus des artères rénales. Ses 5 premiers
centimètres sont situés devant la veine rénale gauche et derrière le
corps du pancréas, où elle est entourée par un feutrage nerveux
dense provenant du plexus mésentérique supérieur. Elle franchit le
bord inférieur du corps du pancréas et se trouve alors en avant du
processus unciné et de la troisième portion du duodénum. Elle
s’engage alors dans la racine du mésentère, à gauche de la veine
mésentérique supérieure, puis dans le mésentère et se termine au
bord mésentérique d’une anse iléale située à environ 60 cm de la
valvule iléocæcale. Sa longueur totale est comprise entre 15 et 30 cm.
Elle donne de nombreuses branches destinées à l’ensemble du grêle,
du côlon droit et du tiers droit du côlon transverse.
L’AMI naît de la face antérogauche de l’aorte en regard de L3. Elle
pénètre d’emblée dans le mésocôlon gauche où elle descend en bas
et à gauche puis devient verticale pour passer devant les vaisseaux
iliaques gauches et se terminer devant S3 en artère hémorroïdale
supérieure. Elle vascularise les deux tiers gauches du côlon
transverse et l’ensemble du côlon gauche.
Les artères hypogastriques sont paires et symétriques. Elles naissent
de l’axe iliaque principal en regard de la margelle du petit bassin et
vascularisent la fesse et les organes pelviens, dont le rectum, par les
artères hémorroïdales moyennes.
De nombreuses anastomoses unissent ces artères entre elles [36, 112] :
– entre tronc cœliaque et AMS, le cercle péripancréatique (fig 1, 2)
est formé par les deux arcades pancréatiques, unissant les branches
de l’artère gastroduodénale, elle-même branche terminale de l’artère
hépatique commune, aux branches de l’artère pancréaticoduodénale
gauche, branche de l’AMS ;
– entre AMS et AMI, l’arcade de Riolan (fig 1) est la principale
anastomose. Elle est située dans le mésocôlon entre la branche
transverse de l’artère colique supérieure droite et celle de l’artère
colique supérieure gauche. L’arcade de Villemin est plus rare. Il
s’agit d’une connexion directe entre l’AMI et l’AMS. L’arcade de
Drummond est périphérique. Elle a les mêmes origines que l’arcade
de Riolan, longe la paroi colique et donne les vaisseaux droits ;
– entre AMI et hypogastriques : c’est l’anastomose entre l’artère
hémorroïdale supérieure et les deux artères hémorroïdales
moyennes (fig 1).
Ces anastomoses entre les différentes artères digestives atteignent
parfois un développement considérable.
2
– la régression de l’artère hépatique moyenne (12 %), la
vascularisation du foie étant alors assurée exclusivement par une
artère hépatique droite (9 %) ou gauche (1 %) ou les deux (2 %).
Physiopathologie
Même si des phénomènes emboliques à partir de lésions artérielles
proximales ont été décrits, les lésions occlusives des artères
digestives ont avant tout un retentissement hémodynamique [28, 72, 77,
92, 110]
. L’expression clinique dépend de la rapidité d’installation et
de la topographie des lésions, en particulier par rapport à la
naissance des artères collatérales critiques de l’AMS, c’est-à-dire des
artères pancréaticoduodénale gauche et colique moyenne.
Les lésions d’installation brutale (embolies) entraînent le plus
souvent une ischémie aiguë, surtout si l’embole siège au niveau des
collatérales critiques de l’AMS.
Les lésions d’installation progressive (athérosclérose et autres
atteintes pariétales des artères digestives), même multiples, sont
souvent asymptomatiques en raison de leur caractère proximal et
des très importantes possibilités de circulation collatérale [24, 28, 110].
Elles peuvent entraîner une ischémie intestinale chronique,
caractérisée par le débordement des possibilités d’hyperhémie
postprandiale. Elles peuvent également déterminer une ischémie
intestinale aiguë si les lésions débordent sur l’origine des artères
collatérales critiques de l’AMS ou si les trois troncs digestifs sont
atteints. Le passage à l’ischémie intestinale aiguë, à partir de lésions
asymptomatiques ou d’une ischémie intestinale chronique, se fait
parfois à l’occasion d’une aortographie.
Lésions anatomiques
ATHÉROSCLÉROSE
L’athérosclérose est la grande pourvoyeuse de lésions occlusives des
artères digestives [18, 30, 47, 113]. Il s’agit généralement de lésions ostiales
ou juxtaostiales, faisant partie d’une plaque d’athérome située à la
face antérieure de l’aorte (fig 3). L’évolution naturelle se fait vers
l’occlusion artérielle. Celle-ci est généralement très limitée pour le
tronc cœliaque, en raison de la présence de collatérales (artère
coronaire stomachique) et reste le plus souvent asymptomatique. Au
niveau de l’AMS, le thrombus a généralement plusieurs centimètres,
jusqu’aux artères pancréaticoduodénale gauche et colique moyenne.
Si le thrombus s’étend au-delà de ces branches, en particulier du fait
d’une occlusion associée du tronc cœliaque et/ou de l’AMI, peut
survenir une ischémie intestinale aiguë. L’athérosclérose des artères
digestives a certains caractères particuliers. Elle prédomine chez la
femme dans la plupart des séries [25, 42, 60, 74, 109]. La greffe secondaire
d’athérome sur des lésions intimales congénitales localisées, certains
facteurs hormonaux (contraception orale, hormonothérapie
substitutive) et le tabagisme auraient un rôle dans cette distribution
Chirurgie des artères digestives
Techniques chirurgicales
3
Aortographie de profil
montrant une sténose ostiale du tronc cœliaque et de
l’artère mésentérique supérieure.
43-105
5
Artériographie sélective de l’artère mésentérique
supérieure montrant une
dissection spontanée de
l’artère mésentérique supérieure.
l’AMS qui est la localisation de loin la plus fréquente. La localisation
habituelle de l’embolie est le segment de l’artère donnant naissance
aux artères iléales et iléocoliques, empêchant ainsi la circulation
collatérale de se développer et déterminant une ischémie intestinale
aiguë. L’origine de ces embolies est variable, le plus souvent
cardiaque, parfois aortique, beaucoup plus rarement précardiaque.
4
Aortographie de profil
montrant une compression
extrinsèque du tronc cœliaque par le ligament arqué
du diaphragme.
DYSPLASIE FIBROMUSCULAIRE (DFM)
Les formes occlusives de la DFM sont relativement fréquentes,
représentant environ 5 % des lésions des artères digestives
rencontrées lors des revascularisations pour ischémie intestinale
chronique [29, 53, 62]. Elles affectent essentiellement l’AMS. Les DFM
médiales ou périmédiales donnent un aspect typique en chapelet.
Les DFM intimales sont responsables de lésions longues et
régulières.
DISSECTIONS SPONTANÉES
Les dissections aortiques peuvent s’étendre à l’AMS et déterminer
une ischémie intestinale aiguë, facteur de très mauvais pronostic car
elle est souvent méconnue ou reconnue seulement tardivement [67].
Les dissections autonomes des artères digestives sont
exceptionnelles [17, 62] (fig 5). Elles intéressent avant tout l’AMS.
Parfois favorisées par une DFM, elles entraînent plus souvent une
ischémie intestinale aiguë car intéressant la zone d’origine des
branches collatérales critiques.
MALADIE DE TAKAYASU
atypique [104]. Une forme particulière mais rare d’athérosclérose des
artères digestives, baptisée coral reef atherosclerosis [85], est représentée
par des calcifications circulaires de l’aorte avec bourgeons
exubérants faisant saillie dans l’aorte et ses branches viscérales,
rénales et digestives.
Les lésions des artères digestives sont relativement fréquentes au
cours de la maladie de Takayasu et sont généralement associées à
des lésions aortiques et des artères rénales [56]. La localisation
préférentielle est l’AMS, souvent atteinte sur une grande longueur
(fig 6). Mais la traduction clinique de ces lésions est souvent
silencieuse, du fait de leur évolution lente.
LIGAMENT ARQUÉ DU DIAPHRAGME
Il s’agit d’une compression extrinsèque anatomiquement fréquente,
réalisant un conflit entre le tronc cœliaque (et parfois l’AMS) et le
ligament arqué du diaphragme (fig 4). Mais son expression clinique
est très variable et discutée [5, 10, 52, 88]. Dans tous les cas existe un
risque important de dilatation poststénotique.
ARTÉRITE RADIQUE
Les lésions radiques [66] intéressent les artères exposées dans le
champ d’irradiation, ce qui explique l’absence habituelle de
collatéralité et leur caractère le plus souvent symptomatique.
MALADIE DE RECKLINGHAUSEN
EMBOLIES
Les embolies des artères digestives ne représentent que 10 % des
embolies artérielles périphériques mais sont responsables de 50 %
environ des ischémies intestinales aiguës [3, 34, 59, 73]. Sans doute en
raison de son calibre et de sa naissance de l’aorte à angle aigu, c’est
Les lésions des troncs des artères digestives liées à la présence dans
l’adventice de l’artère de neurofibromes la comprimant sont rares
au cours de la maladie de Recklinghausen. Elles sont généralement
associées à une coarctation de l’aorte abdominale et à des sténoses
des artères rénales [62].
3
Chirurgie des artères digestives
43-105
Techniques chirurgicales
6 Aortographie de profil
montrant une occlusion
étendue de l’artère mésentérique supérieure au cours
d’une maladie de Takayasu.
8
Voie d’abord interduodénopancréatique de
l’artère mésentérique supérieure.
Voies d’abord
L’abord des artères digestives principales (tronc cœliaque et AMS)
est rendu difficile par leur caractère central, entre deux structures
fixes : le rachis en arrière et le pancréas en avant [14, 15, 48, 94, 111]. Le
choix d’une voie d’abord adéquate est donc primordial. Il repose
sur une bonne analyse artériographique des lésions et sur le choix a
priori de la technique à utiliser. En cas de constatations
peropératoires imprévues, il est important de pouvoir adapter la
voie d’abord au nouveau geste prévu.
Nous distinguerons les voies abdominales pures des voies
thoracoabdominales.
VOIES ABDOMINALES PURES
La voie d’abord la plus utilisée est la laparotomie médiane susombilicale ; mais on peut également utiliser une laparotomie
transversale ou bi-sous-costale [41, 42, 99].
¶ Voie intramésentérique, pré- et sous-duodénale (fig 7)
Le côlon est récliné vers le haut et le grêle vers le bas, ce qui fait
apparaître comme une corde qui se tend le pédicule mésentérique
supérieur. L’incision de la face antérieure du mésentère mène
directement sur l’AMS, à l’endroit où elle croise le troisième
duodénum. L’artère est à ce niveau superficielle, mais il faut prendre
garde à une veine jéjunale qui la croise par en avant pour rejoindre
la veine mésentérique supérieure située à droite d’elle, et surtout à
la présence de plusieurs branches collatérales : premières artères
jéjunales à gauche, branches coliques à droite. Cette voie d’abord est
celle, élective, de l’embolectomie de l’AMS. Elle peut également être
utilisée pour l’anastomose distale des pontages de l’AMS.
¶ Voie interduodénopancréatique (fig 8)
Le côlon est récliné vers le haut, l’angle duodénojéjunal vers le bas.
Celui-ci est décroché par section du muscle de Treitz, ce qui permet
d’aborder l’AMS depuis le voisinage de son origine, juste au-dessus
de la veine rénale gauche, jusqu’à la racine du mésentère, en
soulevant le corps du pancréas. À ce niveau, l’artère est dépourvue
de branches, sauf sur son bord droit d’où naissent l’artère
pancréaticoduodénale gauche et éventuellement une artère
hépatique droite. Cette voie d’abord peut être prolongée en
continuité par un abord latéroduodénal médian de l’aorte sous- et
inter-rénale et de l’origine des artères rénales.
¶ Voie interhépatogastrique (fig 9)
[19, 79]
Le lobe gauche du foie est mobilisé vers la droite après section du
ligament triangulaire gauche. Le petit épiploon est effondré,
7
Voie d’abord intramésentérique, pré- et sous-duodénale de
l’artère mésentérique supérieure.
4
Chirurgie des artères digestives
Techniques chirurgicales
9
Voie d’abord interhépatogastrique du tronc
cœliaque.
43-105
éventuellement avec ligature d’une artère hépatique gauche.
L’œsophage, repéré par une sonde, est récliné vers la gauche. La
terminaison du tronc cœliaque et l’origine de ses branches, entourées
du plexus solaire, apparaissent au bord supérieur du pancréas.
Si on se limite à un abord de l’artère hépatique commune (ou plus
rarement de l’artère splénique), on peut inciser le plexus nerveux à
son niveau et aborder directement l’artère. Si on a décidé d’aborder
le tronc cœliaque lui-même, il n’est pas indiqué de le disséquer à
partir de ses branches. Il est préférable d’inciser le pilier droit du
diaphragme pour découvrir l’aorte supracœliaque puis de haut en
bas, de sectionner le ligament arqué du diaphragme afin d’aborder
l’origine du tronc cœliaque. Ce faisant, il faut se méfier des artères
diaphragmatiques inférieures, dont l’origine est très variable,
pouvant se faire aussi bien de l’aorte descendante, en arrière du
ligament arqué, que du tronc cœliaque, au-delà de celui-ci.
L’abord des 2 premiers centimètres de l’AMS est également possible
par cette voie à condition de bien libérer l’origine de l’artère
splénique et de l’artère hépatique commune du bord supérieur du
pancréas, puis de récliner celui-ci vers le bas.
10
Voie d’abord des artères digestives principales par décollement de mésogastre postérieur.
5
Chirurgie des artères digestives
43-105
Techniques chirurgicales
30°
11
Voie d’abord de l’artère mésentérique supérieure par décollement duodénopancréatique.
30°
12
Voie d’abord des artères digestives principales par thoracophrénolaparotomie.
L’exposition obtenue permet l’anastomose distale de pontages de
l’artère hépatique commune, du tronc cœliaque, ou plus rarement
de l’artère splénique. Surtout, associée à un abord de l’aorte
supracœliaque par incision du pilier droit du diaphragme, elle
6
permet la réalisation de pontages antérogrades vers le tronc
cœliaque ou l’artère hépatique commune, mais aussi, généralement
associés à un pontage du tronc cœliaque, vers l’AMS, si les lésions
ne dépassent pas les 2 premiers centimètres de l’artère.
Chirurgie des artères digestives
Techniques chirurgicales
43-105
80°
13
Voie d’abord des artères digestives principales par thoracophrénolombotomie.
¶ Décollement du mésogastre postérieur (ou rotation
viscérale médiane des auteurs anglo-saxons) [80, 89] (fig 10)
Ce décollement peut être fait par voie médiane (mais le risque de
décapsulation splénique et de pancréatite aiguë postopératoire est
important) ou mieux par voie sous-costale gauche, éventuellement
élargie en lombotomie.
En incisant le feuillet péritonéal en arrière de la rate, on pénètre
dans un plan avasculaire qui permet de séparer en avant la rate et le
corps du pancréas, en arrière la loge rénale, avec au premier plan la
veine rénale gauche et la veine capsulaire moyenne. En poussant ce
décollement jusqu’à la ligne médiane, on arrive ainsi sur l’aorte.
Après section de l’artère diaphragmatique inférieure gauche, on
sectionne le ligament arqué du diaphragme puis on dissèque de
haut en bas le bord gauche et la face antérieure de l’aorte. La section
d’une artère capsulaire moyenne donne un jour complet sur la face
gauche de l’aorte viscérale, jusqu’à l’artère rénale gauche. La
dissection des artères digestives est alors possible sur 2 à 3 cm pour
le tronc cœliaque, sur 6 à 7 cm pour l’AMS.
Cette voie d’abord est la seule à fournir un accès utile à l’origine des
deux artères digestives principales et donc à permettre une
endartériectomie transaortique. Elle permet également
l’endartériectomie de l’aorte viscérale et des artères rénales. Mais,
au prix d’une incision complémentaire du pilier gauche du
diaphragme, elle peut également être utilisée pour réaliser un
pontage à partir de l’aorte supracœliaque. Elle peut également être
étendue à toute l’aorte abdominale en associant un décollement du
mésocôlon gauche.
¶ Décollement duodénopancréatique
[8, 9, 111]
(fig 11)
Le décollement du fascia de Treitz mène sur l’origine de l’AMS, mais
sans possibilité d’extension distale. C’est la raison pour laquelle cette
voie n’est utilisée que dans des cas particuliers (antécédents de
chirurgie par voie gauche).
¶ Décollement du mésocôlon droit
[87, 111]
Il permet d’aborder la face postérieure de l’AMS dans sa portion
intramésentérique.
avant sur un appui-bras. Elle associe une thoracotomie antérieure
par le septième espace, une courte phrénotomie (6 à 8 cm) radiée et
une laparotomie sectionnant le muscle grand droit gauche dans l’axe
de la thoracotomie jusqu’à la ligne médiane. Cette incision est
poursuivie éventuellement en laparotomie médiane ou, plus
rarement, prolongée dans l’axe de la thoracotomie jusqu’au niveau
du muscle grand droit droit. Une fois les berges de la phrénotomie
suspendues à celles de la thoracotomie, on dispose d’un excellent
jour sur la région sous-phrénique, en particulier pour un
décollement du mésogastre postérieur et une endartériectomie
transaortique des artères digestives.
¶ Thoracophrénolombotomie ou lombotomie
102]
Le malade est en décubitus latéral droit. L’incision est faite dans le
onzième espace ou sur le relief de la onzième côte (lombotomie) ou
dans le dizième espace ou sur le relief de la dizième côte, avec
section périphérique plus ou moins complète du diaphragme
(thoracophrénolombotomie).
Le rein gauche est refoulé en avant, ce qui donne un jour limité sur
le tronc cœliaque et surtout l’AMS (en pratique, les 2 ou 3 premiers
centimètres).
¶ Sternolaparotomie médiane
La sternotomie peut être partielle, pour agrandir un abord interhépatogastrique (en particulier chez les sujets maigres à angle
xiphocostal aigu) [ 4 3 ] . Elle peut être complète, permettant
l’implantation d’un pontage antérograde sur l’aorte ascendante (ou
une prothèse remplaçant celle-ci). Mais dans ces cas on peut lui
préférer une courte thoracotomie antérieure par le deuxième ou le
troisième espace intercostal.
Techniques de revascularisation
Elles sont multiples.
ENDARTÉRIECTOMIE
VOIES THORACOABDOMINALES
¶ Thoracophrénolaparotomie
[33, 40, 71, 108]
(fig 12)
Elle est faite sur un malade en position de trois quarts, un billot
longitudinal placé sous le côté gauche, le bras gauche ramené en
[27, 83, 91, 95, 101,
(fig 13)
[2, 25, 41, 63, 84, 86, 104, 106, 107]
L’endartériectomie s’adresse essentiellement aux lésions
athéroscléreuses, bien que certains l’aient appliquée aux formes
chroniques de la maladie de Takayasu. L’endartériectomie
transartérielle est abandonnée, de même que l’endartériectomie
ostiale, par clampage latéral de l’aorte autour de l’origine de
7
43-105
Chirurgie des artères digestives
Techniques chirurgicales
14
Endartériectomie transaortique des artères digestives
principales.
l’artère et artériotomie longitudinale. Seule s’est imposée
l’endartériectomie transaortique, généralement indiquée pour des
lésions ostiales des deux artères digestives principales (tronc
cœliaque et AMS) (fig 14).
La voie d’abord est soit abdominale pure (laparotomie médiane ou
sous-costale, éventuellement étendue en lombotomie), soit mieux
thoracoabdominale. Dans tous les cas est fait un décollement du
mésogastre postérieur. Après contrôle de l’aorte de part et d’autre
des artères digestives puis des artères digestives elles-mêmes audelà des lésions palpables, l’aorte est clampée. Une aortotomie en
« crosse de hockey » est effectuée, permettant de réaliser un volet de
paroi aortique à charnière droite. L’endartériectomie est débutée au
niveau de la berge du volet, à la spatule. Elle détache l’ensemble du
séquestre au niveau du tronc cœliaque, où celui-ci est généralement
court (< 1 cm), puis l’intima aortique est sectionnée aux ciseaux de
Potts de l’autre côté, de façon à pédiculiser le séquestre sur l’AMS,
où il est généralement plus important (4 à 5 cm). L’artère est
invaginée à l’intérieur de l’aorte jusqu’à ce que la fin du séquestre
apparaisse, avec son aspect typique en « langue de chat ». Le
passage d’un dilatateur s’assure de l’absence de ressaut distal de
l’AMS. Puis l’aortotomie est fermée directement par un surjet de
Prolènet 5×0. Après purge gazeuse, la circulation est rétablie,
d’abord dans les artères digestives, puis dans les artères rénales et
les artères des membres inférieurs.
8
Si cet aspect en « langue de chat » de l’intima distale n’est pas
obtenu, l’aortotomie est fermée de la même façon et un clamp
appliqué à l’origine de l’AMS. On peut alors ouvrir celle-ci, soit
transversalement, soit mieux longitudinalement mais au prix d’un
patch de fermeture, pour retirer la partie distale du séquestre sous
contrôle de la vue [2, 106] (fig 14D).
L’existence de lésions athéroscléreuses de l’aorte viscérale ou des
artères rénales n’ajoute pas grand-chose à l’intervention (fig 15, 16).
L’aortotomie est poursuivie en inter-rénal (en réclinant vers le bas la
veine rénale gauche) et l’endartériectomie est faite circonférentiellement, intéressant l’aorte et les artères rénales à la demande.
L’important est d’avoir bien disséqué l’artère rénale droite sur
plusieurs centimètres, pour qu’elle puisse s’invaginer dans l’aorte
jusqu’à la limite distale de l’endartériectomie, et de fixer
éventuellement l’intima aortique distale par 3 ou 4 points de
Prolènet 5×0.
Les avantages de l’endartériectomie sont sa rapidité d’exécution : 15
à 20 minutes de clampage aortique, même si la voie d’abord prend
du temps ; l’absence de matériel prothétique ; et la possibilité
d’inclure les artères rénales et l’aorte viscérale dans l’intervention.
Ses inconvénients sont sa lourdeur, due à la voie d’abord et au
clampage de l’aorte viscérale, avec ses risques de retentissement
hémodynamique et thromboembolique.
Chirurgie des artères digestives
Techniques chirurgicales
43-105
16
Endartériectomie transaortique des artères digestives et rénales par voie rétrorénale gauche.
15
Endartériectomie transaortique des artères digestives et rénales par décollement
du mésogastre postérieur.
Ses indications sont donc les lésions athéroscléreuses ostiales ou
juxtaostiales des deux artères digestives principales, chez des
malades en bon état général, surtout si une revascularisation
associée aortique ou rénale est indiquée.
PONTAGES
¶ Matériel
Les pontages utilisent un matériel variable.
– L’autogreffe veineuse saphène interne est la plus classique [45, 111].
Mais, outre les problèmes de disponibilité, elle a tendance à la
dilatation tardive [77, 107]. Elle est cependant utile pour revasculariser
les branches distales des artères (artère hépatique propre, AMS
intramésentérique) et a l’avantage d’une bonne résistance à
l’infection, qui la rend indispensable dans certaines indications
(revascularisation pour ischémie intestinale aiguë) [42].
– Les prothèses sont de loin les plus utilisées, qu’il s’agisse de
Dacront ou de polytétrafluoroéthylène (PTFE). Elles sont toujours
disponibles en diamètre et configuration adaptés. Elles ont
l’inconvénient d’être contre-indiquées en cas de chirurgie sur les
branches distales et en cas d’infection.
– L’autogreffe artérielle fémorale superficielle est le matériel idéal
pour la chirurgie de la maladie de Takayasu [56], étant entendu que
le prélévement de l’artère hypogastrique est contre-indiqué en cas
de pathologie des artères digestives [107, 111].
En cas de lésions multiples des artères digestives, ces différents
matériels peuvent être utilisés pour réaliser des pontages bifurqués,
multiples et séquentiels.
¶ Pontages rétrogrades
Les pontages rétrogrades, ou plus précisément à partir de l’aorte
sous-rénale ou des artères iliaques, sont les plus classiques [4, 37, 39]
(fig 17). Ils ne nécessitent qu’une laparotomie.
Ils peuvent se faire vers le tronc cœliaque, ou plus précisément
l’artère hépatique commune, où ils ne posent guère de problème de
trajet, du fait de leur longueur et de l’orientation de l’artère
hépatique.
Nous décrirons le pontage veineux aortohépatique. L’aorte sousrénale est abordée par voie latéroduodénale médiane classique.
L’artère hépatique commune est abordée après effondrement du
petit épiploon, en la disséquant du plexus hépatique, qui réalise un
feutrage nerveux dense. Cette dissection entraîne volontiers un
spasme, que l’on peut lever par l’application locale de papavérine
ou, une fois l’artère ouverte, par dilatation mécanique douce. Une
fois la veine saphène prélevée et considérée comme correcte en
aspect et en diamètre, et l’héparine administrée par voie générale
(0,5 mg/kg), on clampe l’aorte complètement. Une pastille
triangulaire à sommet supérieur ou ovalaire et à grand axe vertical
est réséquée à son flanc antérogauche, immédiatement au-dessus de
l’origine de l’AMI. Bien que l’aorte soit volontiers plus souple dans
la région immédiatement sous-rénale, il est préférable de prévoir le
siège d’implantation aortique du pontage un peu plus bas, pour
9
Chirurgie des artères digestives
43-105
*
B
*
A
17
Techniques chirurgicales
*
C
Différents types de pontages rétrogrades revascularisant les artères digestives principales.
A. Pontage aortohépatique.
B. Pontage aorto- ou iliomésentérique supérieur.
C. Pontage bifurqué aorte-tronc cœliaque-artère mésentérique supérieure.
D. Pontage séquentiel aorte-artère hépatique-artère mésentérique supérieure.
*
D
éviter ensuite une coudure du pontage au bord inférieur du
pancréas. La veine est anastomosée par deux hémisurjets ou un
surjet circulaire de Prolènet 6×0, puis elle est passée en avant du
pancréas, dans l’arrière-cavité des épiploons, jusqu’au pied du
pédicule hépatique où elle est anastomosée en terminolatéral à une
artériotomie longitudinale de l’artère hépatique commune, par deux
hémisurjets de Prolènet 7×0. Si, par manque de matériel veineux,
une prothèse doit être utilisée, on a le choix entre un trajet
rétropancréatique (mais comportant un risque de blessure veineuse
en arrière du pancréas et de trajet dysharmonieux) ou la couverture
de la prothèse dans son trajet prépancréatique par une
épiplooplastie, destinée à l’isoler de l’estomac.
Les pontages rétrogrades destinés à l’AMS posent davantage de
problèmes car ils sont plus courts et anastomosent deux vaisseaux
de directions opposées. Deux tendances s’affrontent :
10
– raccourcir au maximum le trajet, en donnant au pontage un aspect
en Z ou en T, ou même en lui donnant une configuration
antérograde (entre l’aorte immédiatement sous-rénale et l’AMS
distale) [23, 49] ;
– ou au contraire l’allonger, pour lui faire décrire une courbure
harmonieuse en C [18, 81, 109]. Les modalités pratiques diffèrent suivant
que l’AMS est laissée en place ou sectionnée, que le pontage
provient de l’artère iliaque droite et passe sous le mésocôlon droit,
ou qu’il passe à gauche en arrière du hile rénal gauche [68].
Nous décrirons un pontage prothétique aorto- ou iliomésentérique
supérieur en arceau. L’aorte ayant été abordée par voie
latéroduodénale médiane et l’AMS par voie interduodénopancréatique, on administre l’héparine (0,5 mg/kg) par voie
générale et on clampe complètement l’aorte sous l’AMI (ou l’artère
Chirurgie des artères digestives
Techniques chirurgicales
¶ Pontages antérogrades
18
Plicature d’un pontage rétrograde aortomésentérique supérieur.
iliaque droite). On excise une pastille triangulaire à sommet
supérieur ou ovalaire à grand axe oblique en haut et à gauche et on
lui anastomose une prothèse de Dacront de calibre 7 ou 8 mm. Il est
souvent indiqué, pour ne pas rétrécir l’anastomose, d’obtenir cette
prothèse à partir d’une prothèse bifurquée au niveau du corps de
laquelle on découpe une collerette. La prothèse est anastomosée par
deux hémisurjets ou un surjet circulaire de Prolènet 4×0 ou 5×0.
Après déclampage aortique et reclampage de l’origine de la
prothèse, on fait décrire à celle-ci un trajet en arceau qui l’amène
jusqu’au contact du mésocôlon transverse puis la fait repartir en sens
inverse vers l’AMS. L’anastomose peut être faite en terminolatéral,
à une artériotomie longitudinale de 2 cm de l’AMS ou en
terminoterminal, après section de l’AMS et éventuellement de
certaines de ses branches. L’anastomose est faite par deux
hémisurjets ou un surjet circulaire de Prolènet 5×0 ou 6×0. La
prothèse doit être isolée du duodénum et des anses grêles, soit par
une épiplooplastie, soit si l’occlusion de l’AMI permet sa section à
l’origine, par le mésocôlon gauche.
Les avantages des pontages rétrogrades sont qu’ils ne nécessitent
qu’un clampage de l’aorte sous-rénale (voire même d’une artère
iliaque) et une laparotomie.
Leurs inconvénients sont liés aux difficultés de positionnement, déjà
évoquées (fig 18), mais il est rare qu’on ne parvienne pas à trouver
une solution évitant la plicature ou la torsion du pontage ; au trajet
antiphysiologique ; et au fait qu’ils utilisent une artère donneuse peu
sûre, l’évolutivité de l’athérome étant plus grande à ce niveau qu’à
celui de l’aorte supracœliaque.
43-105
[6, 19, 20, 35, 50, 69, 82, 86, 115]
(fig 19)
Ils tirent habituellement leur origine de l’aorte supracœliaque,
exceptionnellement de l’aorte ascendante ou d’une artère sousclavière ou axillaire.
Nous décrirons le pontage prothétique aortocœliaque à partir de
l’aorte supracœliaque (fig 19A). Il ne nécessite habituellement qu’une
laparotomie médiane et un abord de l’aorte supracœliaque par voie
interhépatogastrique. Une fois l’aorte supracœliaque isolée sur 5 à
6 cm et sa bonne qualité reconnue par la palpation, elle est clampée,
le plus souvent complètement. Une pastille triangulaire à sommet
inférieur ou ovalaire, à grand axe oblique en bas et légèrement à
droite, est excisée à son flanc antérogauche. Une prothèse de
Dacront de 7 ou 8 mm de diamètre est anastomosée en palette
latérale, par deux hémisurjets de Prolènet 4×0. Comme
précédemment, il est généralement indiqué, pour ne pas rétrécir
l’anastomose, d’obtenir cette prothèse à partir d’une prothèse
bifurquée au niveau du corps de laquelle on découpe une collerette.
L’aorte est alors déclampée et la prothèse clampée au voisinage de
son origine. Après clampage de l’artère hépatique commune et de
l’artère splénique, le tronc cœliaque est alors sectionné
transversalement, en suturant son origine par un point en X de
Prolènet 2×0, éventuellement appuyé sur des attelles de feutre de
Téflont. L’artère coronaire stomachique est sectionnée peu après son
origine et une artériotomie longitudinale faite pour réaliser une
anastomose terminoterminale en palette de la prothèse au tronc
cœliaque, par deux hémisurjets de Prolènet 6×0.
Lorsque, cas relativement rare, une revascularisation de l’AMS isolée
est faite, la prothèse est passée en rétropancréatique ou en
prépancréatique (mais alors recouverte par une épiplooplastie)
jusqu’à l’AMS abordée par voie interduodénopancréatique ou par
voie intramésentérique (fig 19B). L’anastomose distale est faite le
plus souvent en terminolatéral à une artériotomie longitudinale de
2 cm par deux hémisurjets ou un surjet circulaire de Prolènet 6×0.
Lorsque, cas beaucoup plus fréquent, tronc cœliaque et AMS doivent
être revascularisés, la solution la plus simple consiste à implanter
sur l’aorte supracœliaque le corps coupé court d’une prothèse
bifurquée (fig 19D). La branche courte, destinée au tronc cœliaque,
peut être la gauche ou la droite. Une autre solution consiste à réaliser
un pontage séquentiel (fig 19E) avec une prothèse de Dacront de 7
ou 8 mm de diamètre, anastomosée à l’aorte supracœliaque et
destinée à l’AMS, au flanc antérieur de laquelle on anastomose le
tronc cœliaque, directement [114] ou par l’intermédiaire d’une courte
prothèse. On peut également revasculariser le tronc cœliaque avec
cette prothèse et anastomoser au flanc de celle-ci une deuxième
prothèse destinée à l’AMS [26, 96] (fig 19C).
Enfin, on peut, en clampant l’aorte autour du tronc cœliaque, ouvrir
celui-ci par une incision à cheval sur l’aorte et patcher cette incision
à l’aide d’une prothèse destinée à l’AMS.
Les avantages des pontages antérogrades sont qu’ils ne posent pas
de problème de plicature ou de torsion, qu’ils ont un sens
physiologique et qu’ils utilisent une artère donneuse le plus souvent
saine et appelée à le rester.
Leurs inconvénients sont un clampage aortique le plus souvent
complet, qui comporte un risque hémodynamique de retentissement
cardiaque et, dans une moindre mesure, un risque thromboembolique des artères viscérales, rénales et des membres inférieurs.
Leurs indications sont donc les malades en bon état général, surtout
si l’aorte sous-rénale est malade, mais insuffisamment pour justifier
un remplacement qui n’aurait pas d’autre indication que de servir
de point de départ à un pontage rétrograde.
Leurs indications sont donc :
– les malades fragiles, incapables de supporter un clampage de
l’aorte supracœliaque et/ou une thoracotomie ;
– les malades dont l’aorte (ou une artère iliaque) est satisfaisante,
soit spontanément, soit après remplacement (le problème étant de
savoir s’il est indiqué de remplacer l’aorte pour pouvoir faire le
pontage, alors qu’il n’y aurait pas eu d’indication sans cela).
TRANSPOSITIONS
[44, 57, 61]
(fig 20, 21)
Elles intéressent essentiellement l’AMS. Celle-ci est abordée par
voie interduodénopancréatique et largement libérée depuis son
origine jusqu’à ses premières branches. La présence d’une artère
hépatique droite constitue habituellement une contre-indication à
la technique. L’aorte sous-rénale est abordée par voie
11
43-105
Chirurgie des artères digestives
Techniques chirurgicales
*
B
"
A2
"
A1
19
Différents types de pontages antérogrades revascularisant les artères digestives principales.
A. Pontage aorte supracœliaque-tronc cœliaque.
B. Pontage aorte supracœliaque-artère mésentérique supérieure (et éventuellement artère rénale gauche).
C. Pontage tronc cœliaque-artère mésentérique
supérieure.
D. Pontage bifurqué aorte supracœliaque-tronc
cœliaque-artère mésentérique supérieure.
"
C2
"
C1
"
D2
"
D1
latéroduodénale médiane classique. Après ligature appuyée de
l’AMS au voisinage de son origine (et éventuellement
endartériectomie par éversion du moignon distal), l’AMS est
amenée au contact de l’aorte, de façon à décrire un trajet
harmonieux et sans tension. Ce point est en général assez proche
12
des artères rénales, au flanc antérodroit de l’aorte. L’aorte est alors
clampée et une pastille quadrangulaire excisée à ce niveau. Puis
l’AMS est anastomosée directement à l’aorte, par un surjet de
Prolènet 5x0, en utilisant la technique du « parachute » pour faire
le plan postérieur de l’anastomose.
Techniques chirurgicales
Chirurgie des artères digestives
43-105
"
E2
"
E3
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(Suite) Différents types de pontages antérogrades revascularisant les artères digestives principales.
E. Pontage séquentiel aorte supracœliaque-tronc cœliaque-artère mésentérique
supérieure.
"
E1
20
Transposition aortique de l’artère mésentérique supérieure.
A. Transposition directe.
B. Transposition indirecte, par l’intermédiaire d’un
court tube prothétique.
*
A
*
B
Les avantages de cette technique sont sa simplicité et le fait qu’elle
n’utilise pas de prothèse (si elle le fait, il s’agit d’une réimplantation
indirecte, qui n’est qu’une variante de pontage rétrograde).
Ses inconvénients sont le fait qu’elle exige des lésions strictement ostiales
ou juxtaostiales de l’AMS et qu’elle utilise comme artère donneuse
l’aorte sous-rénale, toujours susceptible d’évolution athéroscléreuse.
13
Chirurgie des artères digestives
43-105
Techniques chirurgicales
– lésions aorto-iliaques nécessitant une intervention chirurgicale [1,
, d’une part pour éviter les difficultés techniques d’une
chirurgie secondaire des artères digestives, d’autre part et surtout
en raison des variations volémiques, des pertes sanguines, des
risques de lésions de la circulation collatérale et de l’utilisation de
drogues ayant un effet néfaste sur la circulation splanchnique ;
16, 32, 58, 64, 111]
– chirurgie nécessitant une ligature d’une artère collatérale, en
général l’AMI dans la cure des anévrismes de l’aorte abdominale
sous-rénale, parfois le cercle péripancréatique (duodénopancréatectomie céphalique, transplantation hépatique) [7, 11, 31] ;
– chirurgie pour hypertension artérielle rénovasculaire [111] car il
existe un risque de diminution de la pression artérielle de façon
critique.
Sauf cas particulier, les lésions asymptomatiques d’une seule artère
digestive (tronc cœliaque ou AMS) ne nécessitent aucun traitement.
21
INDICATIONS ANATOMIQUES
Transposition du tronc cœliaque dans l’artère mésentérique supérieure.
Ses indications sont les revascularisations de l’AMS lorsqu’on a
délibérément choisi de ne revasculariser que cette artère [57] et que
les conditions anatomiques sont réunies (ou l’aorte sous-rénale
remplacée).
Indications opératoires
Il existe trois types d’indication pour opérer les artères digestives :
indications symptomatiques, indications préventives et indications
anatomiques.
INDICATIONS SYMPTOMATIQUES
L’ischémie intestinale aiguë est une urgence chirurgicale absolue,
pour laquelle chaque minute compte.
L’ischémie intestinale chronique pose davantage de problèmes. Si
l’indication opératoire ne fait guère de doute, son moment laisse le
choix entre opérer d’emblée ou opérer après une préparation par
nutrition parentérale. Les avis sont partagés et même fluctuants d’un
moment à l’autre au sein d’une même équipe. Il peut en effet être
tentant de renutrir une dizaine de jours par voie parentérale un
malade cachectique, à condition que toute alimentation orale soit
supprimée et à condition de le mettre sous anticoagulants [42, 99, 104,
109]
. Encore faut-il savoir que l’on risque une décompensation des
lésions occlusives, pouvant, en particulier à l’occasion de
l’artériographie, déterminer la survenue de douleurs permanentes,
voire d’une ischémie intestinale aiguë. Ces malades doivent donc
être bien surveillés, en milieu chirurgical. D’un autre côté, la
cachexie et la dénutrition sont à l’heure actuelle rarement telles que
se pose le problème d’une renutrition. Le plus souvent celle-ci sera
donc réservée à la période postopératoire [90], car ces malades ont
perdu l’habitude de manger et mettent souvent des semaines, voire
des mois à retrouver un appétit normal [55].
Il s’agit de lésions de l’aorte thoracoabdominale (anévrisme ou
coarctation). La naissance des artères digestives du segment aortique
remplacé ou ponté nécessite un geste de revascularisation, même si
l’artère elle-même n’est pas le siège de lésions occlusives.
Choix tactiques
ISCHÉMIE AIGUË
[54, 59, 70]
Le premier temps de l’intervention chirurgicale est exploratoire, à la
recherche de la viabilité intestinale. Celle-ci est parfois évidente
(nécrose étendue du grêle et d’une partie plus ou moins importante
du côlon ou au contraire aspect pâle, diffus, hyperpéristaltique mais
viable). Plus souvent les lésions sont douteuses ou surtout variables.
La revascularisation s’impose. La priorité absolue doit être donnée
au geste ne faisant pas appel à une prothèse : embolectomie,
autogreffe veineuse ou artérielle, transposition. Il faut négliger les
lésions aortiques associées ou ne faire que ce qui est strictement
nécessaire à l’implantation d’un pontage à point de départ sousrénal : endartériectomie limitée, patch autogène. La ou les
résection(s) intestinale(s) doivent être faites en laissant en place les
segments douteux. Il est préférable d’avoir recours aux stomies
plutôt qu’à l’anastomose et de prévoir un second look.
Un cas particulier est celui des malades opérés en urgence des
lésions intestinales et adressés secondairement pour le traitement
des lésions artérielles responsables. La revascularisation du seul
tronc cœliaque peut être justifiée, évitant l’abord itératif de l’étage
sous-mésocolique. Bien entendu elle doit se faire avec du matériel
autogène (greffe veineuse/aorte supracœliaque-tronc cœliaque).
ISCHÉMIE CHRONIQUE
Le choix thérapeutique est beaucoup plus ouvert et dépend des
lésions, de l’état général du malade, mais aussi beaucoup de choix
personnels.
¶ Lésions isolées des artères digestives
INDICATIONS PRÉVENTIVES
La présence de lésions asymptomatiques des artères digestives pose
le problème délicat de leur traitement préventif, car personne n’a
jamais pu prouver que l’occlusion asymptomatique d’une artère
digestive faisait courir un risque d’infarctus intestinal. Cependant, à
condition que l’état général le permette, les indications opératoires
suivantes peuvent êtres retenues :
– sténose serrée ou occlusion du tronc cœliaque et de l’AMS [13, 18, 30,
, car la vascularisation intestinale ne dépend plus que de l’AMI et
le risque est une atteinte de cette circulation collatérale vitale par
évolutivité de la maladie athéromateuse ou hypotension artérielle
d’origine cardiaque ou au cours ou au décours d’une intervention
chirurgicale, même non vasculaire ;
103]
14
– Tronc cœliaque : pontage antérograde à partir de l’aorte
supracœliaque ;
– AMS : transposition aortique en cas de lésions ostiales limitées et
si l’aorte sous-rénale est satisfaisante, sinon pontage antérograde à
partir de l’aorte supracœliaque, ou sinon pontage rétrograde ;
– tronc cœliaque + AMS : endartériectomie transaortique si l’état
général et les lésions le permettent ; sinon pontage antérograde
bifurqué ou séquentiel à partir de l’aorte supracœliaque ; sinon
pontage rétrograde.
¶ Lésions associées des artères digestives et rénales
– Si les quatre artères sont atteintes, excellente indication
d’endartériectomie transaortique si l’état général et les lésions le
Techniques chirurgicales
Chirurgie des artères digestives
permettent ; sinon pontages multiples : les deux artères digestives à
partir de l’aorte supracœliaque, les deux artères rénales à partir de
l’aorte sous-rénale ;
– si seulement deux artères (par exemple l’AMS et l’artère rénale
gauche) sont atteintes : pontage antérograde bifurqué à partir de
l’aorte supracœliaque.
¶ Lésions associées des artères digestives et de l’aorte
sous-rénale
– Endartériectomie transaortique, surtout en cas de lésions
artérielles rénales associées et de lésions isolées de l’aorte sousrénale et des artères iliaques primitives, se prêtant à une
endartériectomie complète ;
– le plus souvent remplacement prothétique de l’aorte sous-rénale
+ pontage rétrograde ou transposition de l’AMS ;
– parfois pontage antérograde à partir de l’aorte supracœliaque
(surtout pour le tronc cœliaque) et remplacement prothétique de
l’aorte sous-rénale.
¶ Lésions associées des artères digestives et de l’aorte
thoracoabdominale
– Lésions occlusives athéroscléreuses (coral reef) : endartériectomie
transaortique ;
– anévrismes thoracoabdominaux : opération de Crawford avec
endartériectomie transaortique ou pontages séparés suivant
l’extension distale des lésions ;
– coarctation (congénitale ou dans le cadre d’une maladie de
Takayasu) : résection-greffe aortique ou pontage aortique en
Dacront, associé à des revascularisations des artères viscérales par
autogreffe artérielle fémorale superficielle [56]. Il faut en effet éviter
les réimplantations directes, source de traction et d’hyperplasie
intimale.
Revascularisation complète
ou incomplète ?
La présence de lésions chirurgicales des deux artères digestives
principales (tronc cœliaque et AMS) pose le problème d’une
revascularisation complète ou non.
En faveur de la revascularisation incomplète plaident de nombreux
arguments : elle suffit presque toujours à faire disparaître la
symptomatologie ; elle est techniquement plus simple et mieux
supportée ; les résultats à long terme ne semblent guère différents
dans certaines séries de ceux des revascularisations complètes [39, 57,
66, 105]
.
En faveur de la revascularisation complète vient l’argument majeur
que l’occlusion tardive d’une des deux revascularisations, qui n’est
pas exceptionnelle, laisse persister le plus souvent un bon résultat
clinique [22, 38, 46, 74, 75, 78, 99, 111].
En pratique, si l’état général le permet, nous sommes partisans d’une
revascularisation complète. Si l’état général est médiocre, une
chirurgie dirigée le plus souvent vers l’AMS est un compromis
satisfaisant.
Complications
COMPLICATIONS VASCULAIRES
L’occlusion artérielle est la grande complication des
revascularisations intestinales. Précoce, elle est due à un échec
technique. Elle entraîne généralement une ischémie intestinale aiguë
dont le diagnostic est loin d’être toujours facile, chez un opéré récent
43-105
dont la réanimation a tendance à masquer la symptomatologie. En
pratique, la moindre anomalie dans les suites d’une
revascularisation digestive doit entraîner la réalisation d’une
aortographie ou une réintervention [103]. Faute de quoi, on risque
d’intervenir trop tardivement, pour ne découvrir que des lésions
ischémiques dépassées. Ces occlusions précoces sont responsables
d’environ la moitié des décès précoces [74].
Tardive, elle est généralement due à une hyperplasie intimale au
niveau des zones opérées. Elle peut être asymptomatique, surtout si
la revascularisation initiale avait porté sur plusieurs artères. Sinon
elle se traduit généralement par une récidive des symptômes
d’ischémie intestinale chronique, [65, 98] voire par une ischémie
intestinale aiguë. Leur fréquence non négligeable impose une
surveillance clinique et si possible par échographie-doppler régulière
de ces malades.
L’infection est heureusement exceptionnelle et complique
exclusivement les interventions ayant comporté la mise en place
d’une prothèse.
Le syndrome de revascularisation est rare mais constitue une
complication particulière de la chirurgie des ischémies intestinales
chroniques sévères [ 8 9 , 11 5 ] . Immédiat, il se traduit par une
transsudation de la paroi intestinale, responsable d’une ascite
postopératoire, voire par une rupture spontanée de la rate ou, encore
plus grave, du foie. Secondaire, quelques jours après l’intervention,
il se manifeste par un vasospasme splanchnique à la reprise de
l’alimentation. Il peut être prévenu par la reprise progressive de
l’alimentation et l’administration de calcium-bloqueurs.
COMPLICATIONS LIÉES À LA VOIE D’ABORD
Les traumatismes iatrogènes de la rate et les pancréatites
traumatiques ne sont pas rares après rotation viscérale médiane,
surtout faite par laparotomie [18, 78, 89].
Un chylopéritoine peut s’observer après dissection de l’AMS au
voisinage de son origine [57].
COMPLICATIONS GÉNÉRALES
Essentiellement cardiaques et respiratoires, elles expliquent une
partie de la mortalité postopératoire. Mais, lorsqu’on est en présence
d’une ischémie intestinale chronique, on se trouve parfois forcé
d’accepter un certain risque opératoire pour saisir la chance d’une
guérison par la chirurgie. C’est ici que les techniques
endovasculaires pourraient éventuellement avoir un rôle.
Cas particuliers
SYNDROME DU LIGAMENT ARQUÉ DU DIAPHRAGME
La responsabilité du ligament arqué du diaphragme dans un tableau
évoquant un angor intestinal est difficile à affirmer. Mais il existe
certainement, une fois éliminées les autres causes de douleurs
abdominales, d’excellentes indications. La décompression
chirurgicale classique peut éventuellement être faite sous
laparoscopie. Mais elle ne suffit pas toujours et il peut être nécessaire
de pratiquer une dilatation, une angioplastie ou un pontage
antérograde du tronc cœliaque.
CHIRURGIE DE L’ARTÈRE MÉSENTÉRIQUE INFÉRIEURE
Elle est rarement indiquée en cas de lésions associées des artères
digestives principales (tronc cœliaque et AMS), que l’on préfère
opérer directement. Ce n’est qu’en cas de lésions non
reconstructibles de l’AMS et du tronc cœliaque que l’on pourrait se
limiter à la chirurgie isolée d’une sténose ou d’une occlusion
segmentaire de l’AMI [97]. Dans ces cas, plutôt qu’à la réimplantation
aortique directe ou à l’endartériectomie, il semble plus sûr d’avoir
recours à un court pontage veineux ou prothétique.
15
43-105
Chirurgie des artères digestives
TRAITEMENT DES ANÉVRISMES DES ARTÈRES
DIGESTIVES
Le principal problème est d’apprécier la nécessité ou non du
rétablissement de la continuité artérielle.
Dans certains cas, la continuité artérielle doit être rétablie : c’est le
cas pour les anévrismes du tronc cœliaque, de l’artère hépatique et
de l’AMS. Il faut alors s’assurer d’une voie d’abord permettant un
abord direct de la lésion, la mettre à plat (ou parfois la réséquer) et
Techniques chirurgicales
rétablir la continuité par une prothèse ou une greffe veineuse
implantée soit sur un segment proximal sain de l’artère, soit sur
l’aorte.
Ailleurs, la continuité artérielle n’a pas besoin d’être rétablie : c’est
le cas pour les anévrismes de l’artère splénique et pour les
anévrismes des branches des artères digestives. On a alors le choix
entre d’une part l’endoanévrismorraphie oblitérante ou la résection,
et d’autre part et surtout, les techniques endovasculaires.
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17
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 43-312
43-312
Reconstruction vasculaire et transplantation
hépatique
B Poussier
PO Sarfati
O Vignaux
D Houssin
B Dousset
Résumé. – La technique initiale de la transplantation hépatique orthotopique s’est enrichie de variantes
techniques telles que l’implantation du greffon avec préservation de la veine cave (piggy-back), la bipartition
hépatique et la transplantation hépatique à partir de donneur vivant apparenté. Cela implique de reconnaître
l’anatomie vasculaire du donneur et du receveur afin de rétablir l’intégralité vasculaire du greffon. La
reconstruction vasculaire doit prendre en compte les variations anatomiques au cours du prélèvement, de
l’implantation du greffon et permettre une prise en charge adaptée des complications vasculaires
postopératoires. Elle associe des gestes de revascularisation, parfois complexes, et des procédures
endovasculaires de radiologie interventionnelle.
© 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : transplantation hépatique, piggy-back, revascularisation, greffon.
Prélèvement du greffon
Le prélèvement hépatique est le plus souvent réalisé lors d’un
prélèvement multiorgane. Les variations anatomiques artérielles
sont fréquentes. Leur reconnaissance a des conséquences directes sur
le prélèvement, l’implantation du greffon et la technique de
bipartition hépatique.
ANATOMIE ARTÉRIELLE HÉPATIQUE
Le foie est le plus souvent vascularisé par une artère hépatique
unique, mais des variations anatomiques sont rencontrées dans 40 à
45 % des cas [36, 48, 52]. Elles doivent être repérées au cours du
prélèvement et nécessitent une adaptation de la technique
chirurgicale au cours de la transplantation. Les variations
répertoriées dans le tableau I rapportent notre expérience portant
sur 281 transplantations réalisées entre 1986 et 1992 ainsi que les
données de la littérature [17, 52, 55].
Il existe aussi des variations dans la distribution artérielle
intrahépatique susceptibles de modifier ou de contre-indiquer la
réalisation d’une bipartition [16].
CONSÉQUENCES DES VARIATIONS ARTÉRIELLES
SUR LE PRÉLÈVEMENT
Une artère hépatique gauche est recherchée dans le petit épiploon.
La palpation du pédicule hépatique localise les battements de
l’artère hépatique moyenne et recherche à sa partie postérodroite les
Bertrand Poussier : Interne des hôpitaux de Paris.
Pierre-Olivier Sarfati : Praticien hospitalier.
Olivier Vignaux : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Didier Houssin : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Bertrand Dousset : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Service de chirurgie, hôpital Cochin, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75014 Paris, France.
Tableau I. – Répartition des anomalies artérielles hépatiques.
Type de vascularisation
artérielle hépatique
Artère hépatique moyenne
Cochin
n = 281
Littérature [17, 35, 52, 55]
222 (78 %)
55 à 60 %
Artères hépatiques moyenne et droite
23 (8 %)
8 à 11 %
Artères hépatiques moyenne et
gauche
27 (9 %)
12 à 32 %
Artères hépatiques droite, moyenne et
gauche
5 (2 %)
3,5 %
Artères hépatiques droite et gauche
3 (1 %)
1%
Artère hépatique droite isolée
5 (2 %)
3à5%
Artère hépatique gauche isolée
0
0,5 %
battements d’une artère hépatique droite. Ces vaisseaux seront
préservés et prélevés avec le foie [52].
Après clampage aortique et refroidissement hépatique par voie
aortique et portale, l’artère hépatique est prélevée avec le tronc
cœliaque et un patch aortique. Une artère hépatique gauche est
emportée avec l’artère coronaire stomachique et le tronc cœliaque.
Une artère hépatique droite est prélevée avec l’artère mésentérique
supérieure et le tronc cœliaque sur un patch aortique. Si l’anatomie
artérielle n’a pu être déterminée avec certitude, le pancréas et un
segment aortique centré sur le tronc cœliaque et l’artère
mésentérique supérieure sont prélevés en continuité avec le foie. Il
s’agit pour de nombreuses équipes d’une technique utilisée en
routine dite de « prélèvement rapide », qui ménage toute possibilité
de variation anatomique. En fin d’intervention, un axe artériel
iliofémoral est prélevé dans l’éventualité d’un pontage
aortohépatique chez le receveur. On y associe le prélèvement d’un
axe iliaque veineux en cas de thrombose portale en vue d’un
pontage mésentéricoportal. Ces allogreffes vasculaires sont stockées
dans le liquide de préservation à 4 °C.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Poussier B, Sarfati PO, Vignaux O, Houssin D et Dousset B. Reconstruction vasculaire et transplantation hépatique. Encycl Méd Chir (Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés),
Techniques chirurgicales - Chirurgie vasculaire, 43-312, 2003, 9 p.
43-312
Reconstruction vasculaire et transplantation hépatique
PRÉPARATION EX VIVO DES PÉDICULES VASCULAIRES
Plusieurs situations anatomiques peuvent être retrouvées. Une artère
hépatique unique ne nécessite aucune préparation particulière. S’il
existe plusieurs artères hépatiques, l’objectif est de réaliser une
reconstruction artérielle ex vivo afin d’obtenir un axe artériel unique
côté greffon [52]. Une artère hépatique gauche ne nécessite pas de
reconstruction, mais impose une reconstruction artérielle sur le tronc
cœliaque du greffon, en amont de l’ostium de l’artère gastrique
gauche. S’il existe une artère hépatique droite et une artère
hépatique moyenne, on réalisera une anastomose terminoterminale
entre les ostia du tronc cœliaque et de l’artère mésentérique
supérieure [ 2 5 ] . On peut aussi réaliser une anastomose
terminoterminale entre l’artère hépatique droite et l’ostium de
l’artère splénique à la condition d’une artère hépatique droite de
bon calibre, adapté à celui de l’ostium de l’artère splénique. En cas
d’athérome des artères hépatiques, la recoupe distale d’une artère
hépatique droite et d’une artère moyenne peut conduire à la
réalisation d’une néobifurcation artérielle aboutissant à la
constitution d’un ostium artériel commun. En cas de section
accidentelle haute d’une artère hépatique droite au cours du
prélèvement, on peut être amené, pour des raisons de longueur, à
réimplanter l’artère hépatique droite sectionnée sur l’ostium de
l’artère gastroduodénale (fig 1).
PROBLÈMES VASCULAIRES POSÉS
PAR LES GREFFONS RÉDUITS
Pour les enfants, l’utilisation de greffons hépatiques réduits a
diminué la mortalité lors de la période d’attente avec des résultats
comparables à ceux des greffons entiers [5, 9, 26, 27] . Le greffon
hépatique peut être réduit par hépatectomie droite ou par
hépatectomie droite élargie aux segments I et IV. Aucune dissection
pédiculaire n’est réalisée afin de ne pas dévasculariser les voies
biliaires extrahépatiques. Il s’agit d’une hépatectomie droite ou
droite élargie avec ligature-section des pédicules glissoniens droits
en intraparenchymateux. En cas de greffon hyper-réduit aux
segments II et III, la veine cave inférieure du receveur est conservée
et la veine sus-hépatique gauche est prélevée avec un patch veineux
cave [27]. Le développement de la bipartition et de la transplantation
hépatique intrafamiliale a considérablement diminué l’usage des
techniques de réduction hépatique.
PROBLÈMES VASCULAIRES
POUR LES GREFFONS PARTAGÉS
Le partage d’un foie en deux unités anatomiques et fonctionnelles
permet de greffer deux receveurs à partir du foie issu d’un seul
donneur [28, 43]. Cette technique requiert la connaissance précise de la
distribution artérielle et biliaire, obtenue par artériographie et
cholangiographie du greffon réalisées ex vivo [26]. L’anatomie des
veines hépatiques et de la veine porte est précisée par la dissection
sur table. On recherche une absence de bifurcation portale (1 %) qui
contre-indique le partage [16]. On recherche un tronc commun des
veines hépatiques moyenne et gauche, la veine sus-hépatique
moyenne étant attribuée au greffon droit pour le drainage des
segments V et VIII. L’artériographie et la cholangiographie
recherchent une duplication artérielle et/ou biliaire.
La veine cave inférieure est attribuée au foie droit en raison de
fréquentes veines hépatiques accessoires. La veine hépatique
moyenne est séparée de la veine hépatique gauche en cas de tronc
commun.
La veine porte est prélevée avec la bifurcation pour le greffon
gauche alors que le greffon droit n’emporte que la branche portale
droite.
Le canal hépatique commun sera attribué au greffon dont le pédicule
présente une duplication biliaire, cas le plus fréquent à droite [16]. La
bipartition foie droit-lobe gauche est impossible en cas de
duplication biliaire de type (III + IV) et II.
L’artère hépatique sera attribuée au greffon dont le pédicule
présente une duplication ou une triplication artérielle, cas plus
fréquents à gauche (fig 2).
2
Techniques chirurgicales
Problèmes rencontrés
au cours de la transplantation
ARTÈRE HÉPATIQUE
La vascularisation du foie cirrhotique est à prédominance artérielle,
aboutissant au développement d’artères de gros calibre, fragiles,
sujettes aux décollements de l’intima. Pour ces raisons, les
anastomoses artérielles en transplantation hépatique sont le plus
souvent réalisées selon des techniques issues de la microchirurgie. Il
s’agit d’anastomoses terminoterminales non spatulées par points
séparés ou surjet de monobrin non résorbable 7.0 réalisés sous
loupes [58]. Le choix de la réimplantation tient compte, côté receveur,
du nombre des artères, de leur calibre, de la présence d’un athérome,
d’une thrombose (antécédents de chimioembolisation intra-artérielle,
retransplantation) ou d’un ligament arqué significatif
(vascularisation hépatique et cœliaque rétrograde par l’artère
gastroduodénale) (fig 3). La prévalence de ce dernier est, dans notre
expérience, de 6 %. En cas d’artères hépatiques multiples chez le
receveur, l’anastomose artérielle sera réalisée sur la plus large. Le
site d’implantation artérielle le plus souvent utilisé est l’artère
hépatique propre au niveau de l’origine de l’artère gastroduodénale
afin d’élargir l’anastomose [8, 56]. Plus rarement, une volumineuse
artère hépatique droite ou l’artère splénique retournée peuvent être
utilisées pour la revascularisation du greffon. Côté donneur,
l’anastomose siège le plus souvent sur l’artère hépatique commune
ou sur le tronc cœliaque, le choix du site d’implantation réalisant un
compromis entre adéquation de calibre et absence d’excès de
longueur.
Si les vaisseaux du receveur sont de petit calibre (absence de cirrhose
ou artères multiples), athéromateux, thrombosés, un pontage
aortohépatique sur l’aorte abdominale sous-rénale peut être réalisé
par l’interposition d’une allogreffe artérielle iliofémorale [24, 55] (fig 4).
Dans cette éventualité, l’aorte abdominale sous-rénale est abordée
en sous-mésocolique. La tunnellisation est effectuée le plus souvent
en transmésocolique, prépancréatique, rétrogastrique [24]. L’allogreffe
est anastomosée en terminolatéral à la face antérieure de l’aorte
sous-rénale et à l’artère hépatique commune du donneur en
terminoterminal par deux hémisurjets. L’athérome du donneur peut
contre-indiquer le prélèvement d’un axe iliofémoral, conduisant à
l’interposition d’une prothèse en polytétrafluoroéthylène (PTFE)
annelé [29].
VEINE PORTE
Les fautes techniques favorisent la survenue de la thrombose ou de
la sténose portale. L’excédent de longueur est prévenu par le
relâchement de la valve sous-costale droite et de la rétraction du
bloc viscéral vers le bas, permettant d’ajuster au mieux la recoupe
de la veine porte côté donneur et receveur. L’anastomose est réalisée
par deux hémisurjets de monobrin non résorbable 5.0, maintenus en
faible tension pour éviter un effet de fronce, et noués avec un facteur
de croissance d’un quart pour permettre l’expansion veineuse [50].
L’existence d’un flux hépatofuge traduit la sévérité de l’hypertension
portale et est constamment associée à l’existence de shunts
portosystémiques spontanés, qu’il convient pour la plupart des
auteurs de lier afin d’augmenter le flux porte lors de la remise en
charge du greffon [7, 15, 54]. Il existe trois principaux types de shunts
portosystémiques spontanés identifiés par l’artériographie ou
l’angio-imagerie par résonance magnétique (IRM) :
– la réperméation d’une veine paraombilicale dont la ligature est
obligatoire au cours de l’hépatectomie lors de la section du ligament
rond ;
– le shunt coronaroazygos est fermé par la ligature de la veine
coronaire stomachique au bord gauche de la veine porte ;
– le shunt splénorénal sera oblitéré par la ligature de la terminaison
de la veine rénale gauche, préservant le drainage veineux du rein
gauche.
Techniques chirurgicales
Reconstruction vasculaire et transplantation hépatique
43-312
1 Reconstruction artérielle hépatique.TC : tronc cœliaque ; CS : artère coronaire stomachique ; S : artère splénique ; AMS : artère mésentérique supérieure ; AMS prox :
artère mésentérique supérieure proximale ; AMS dist : artère mésentérique supérieure distale ; Hép C : artère hépatique commune ; Hép P : artère hépatique propre ; GD : artère
gastroduodénale ; Hép D : artère hépatique droite ; Hép M :
artère hépatique moyenne.
A. Artère hépatique moyenne foie gauche et artère hépatique droite accessoire. Anastomose ex situ entre les
ostia proximaux du tronc cœliaque et de l’artère mésentérique supérieure du greffon. Reconstruction artérielle
entre l’artère hépatique propre du receveur et l’ostium
distal de l’artère mésentérique supérieure.
B. Artère hépatique moyenne foie gauche et artère hépatique droite accessoire avec carrefour viscéral athéromateux. Recoupe large des deux artères hépatiques.
Confection d’un ostium commun par anastomose latérale des deux artères hépatiques. Reconstruction artérielle entre l’artère hépatique propre du greffon et l’ostium commun des deux artères hépatiques du greffon.
C. Artère hépatique moyenne foie gauche et artère hépatique droite accessoire sectionnée accidentellement
au cours du prélèvement. C1. anastomose de l’artère
hépatique droite sur l’ostium de l’artère splénique du
greffon ; C2. anastomose de l’artère hépatique droite
sur l’ostium de l’artère gastroduodénale du greffon.
D. Artère hépatique moyenne foie gauche, artère hépatique droite accessoire et ligament arqué significatif :
anastomose ex situ entre les ostia proximaux du tronc
cœliaque et de l’artère mésentérique supérieure du greffon (flèche en pointillés). Anastomose (flèche pleine)
entre l’ostium distal de l’artère mésentérique supérieure et l’allogreffe iliofémorale (flèche blanche) implantée sur l’aorte du receveur.
*
A
*
B
*
D
"
C1
L’existence d’une dérivation portosystémique chirurgicale
(portocave, mésentéricocave, splénorénale) perméable entraîne
également une inversion du flux portal, justifiant pour les mêmes
raisons la fermeture de ce shunt. Celle-ci nécessite l’abord direct et
la ligature du shunt veineux ou prothétique pour une anastomose
portocave ou mésentéricocave, alors qu’une dérivation splénorénale
peut être facilement interrompue par ligature de la terminaison de
"
C2
la veine rénale gauche. La présence d’une anastomose portocave
intrahépatique par voie transjugulaire (TIPS) est traitée par
l’explantation du foie natif.
La thrombose portale n’est actuellement plus une contre-indication
à la transplantation hépatique. L’échodoppler permet son diagnostic
dans la majorité des cas [37]. L’extension proximale de la thrombose
3
43-312
Reconstruction vasculaire et transplantation hépatique
*
A
*
B
Techniques chirurgicales
*
C
2 Bipartition hépatique : l’artère hépatique sera attribuée au greffon gauche, la duplication ou la triplication artérielle
étant la plus fréquente à gauche.
A. 25 % cas : duplication artérielle gauche type (II + III) et IV.
B. 15 % cas : artère hépatique gauche.
C. 10 % cas : duplication artérielle gauche type (III + IV) et II.
D. 1 % cas : triplication artérielle hépatique.
*
D
3
*
A
A. Ligament arqué : aspect sur l’artériographie de profil.
B. Ligament arqué significatif : aspect sur l’artériographie
mésentérique supérieure (flèche pleine). Vascularisation
rétrograde du tronc cœliaque (flèche blanche) par l’artère
gastroduodénale (flèche en pointillés).
*
B
est au mieux précisée par l’artériographie ou l’angio-IRM. La
thrombose est partielle dans deux tiers des cas (fig 5A) et méconnue
au moment de la greffe dans plus de la moitié des cas [40]. La
thrombectomie veineuse par éversion (fig 5B) permet de restaurer
dans la très grande majorité des cas un flux porte satisfaisant avec
des résultats à distance voisins de ceux observés en l’absence de
thrombose porte [13, 19].
Dans de rares cas, la thrombectomie n’est pas réalisable car
l’atrophie de la veine porte pédiculaire [32, 54] rend aléatoire la
restauration d’un flux satisfaisant. La revascularisation portale peut
se faire sur différents axes veineux du receveur et nécessiter
l’interposition d’un greffon veineux iliaque (donneur) [30, 57] ou
jugulaire interne (receveur) :
– sur la veine mésentérique supérieure, en latéral, par l’interposition
d’un greffon veineux tunnellisé en transmésocolique,
prépancréatique ;
– sur le confluent splénomésentérique, en situation anatomique [54]
(fig 6) ;
– sur la veine coronaire stomachique ;
4
4
Pontage aortohépatique par interposition d’un greffon iliofémoral.
– sur une grosse veine de dérivation péricholédocienne ou
paracolique.
La thrombose diffuse du système porte a longtemps été considérée
comme une contre-indication absolue à la transplantation hépatique.
Des résultats encourageants ont été récemment rapportés dans cette
situation grâce à la revascularisation cavoportale. Il s’agit, soit d’une
anastomose cavoporte latéroterminale associée à une réduction du
Techniques chirurgicales
Reconstruction vasculaire et transplantation hépatique
*
A
5
A. Aspect artériographique d’une thrombose porte partielle.
43-312
*
B
B. Aspect artériographique chez le même malade après thrombectomie par éversion au
cours de la greffe.
jonction du confluent splénomésentérique et du tronc porte
hypoplasique [36]. Dans les syndromes polymalformatifs associés à
l’atrésie des voies biliaires, la veine porte hypoplasique peut être
parfois en position préduodénale sans que cela ne modifie
l’anastomose portale [22, 32]. En cas de greffon adulte issu de partage
ou de don intrafamilial, il existe fréquemment une disparité de
calibre (petit → large), sans frein au flux veineux, requérant une
anastomose incongruente, et justifiant l’utilisation de fil monobrin
résorbable autorisant la croissance veineuse.
En cas de greffon droit issu de partage ou de don intrafamilial, on
peut être amené à reconstruire deux branches portes sectorielles.
Différents artifices techniques ont été proposés [38] :
– division du tronc porte du receveur ;
– anastomose des deux branches sectorielles sur les deux branches
sectorielles droites du receveur ;
– adossement des deux branches sectorielles par plastie veineuse.
VEINES HÉPATIQUES
6
Hypoplasie de la veine porte. VPD : veine porte donneur ; VPR : veine porte receveur ; VS : veine splénique ; VMS : veine mésentérique supérieure.
calibre de la veine cave supra-anastomotique, soit d’une anastomose
rénoporte terminoterminale entre la veine porte et la veine rénale
gauche [1, 2, 57, 59] (fig 7A, B).
La transplantation hépatique pédiatrique utilise certains artifices
techniques en raison du petit calibre de la veine porte, soit en raison
de l’âge de l’enfant, soit en raison d’une hypoplasie de la veine porte
(diamètre < 5 mm) fréquemment observée au cours de l’atrésie des
voies biliaires. L’implantation directe sur la confluence de la veine
mésentérique et du tronc splénomésaraïque en situation anatomique
semble donner le meilleur flux et limiter les risques de thrombose et
de sténose [44]. Certains y associent une spatule d’élargissement de la
L’évolution de la technique de transplantation hépatique au cours
des dix dernières années a surtout été marquée par l’abandon par la
majorité des équipes de la circulation veinoveineuse extracorporelle
et l’avènement de l’implantation du greffon hépatique en piggyback. En cas d’implantation du greffon hépatique en piggy-back,
l’anastomose cave suprahépatique peut être cavocave
terminolatérale, cavocave latérolatérale ou terminoterminale entre la
veine cave suprahépatique du greffon et les ostia réunis des veines
hépatiques moyennes et gauches. Ces différentes techniques ont
pour principal intérêt de préserver le flux cave au cours de la phase
d’anhépatie (fig 8A, B). La majorité des équipes y associent une
anastomose portocave terminolatérale transitoire, afin de
décomprimer le territoire splanchnique au cours de la phase
d’anhépatie [14, 39, 57]. Cette technique exige la préservation de la veine
cave rétrohépatique du receveur, qui peut être particulièrement
difficile en cas de lobe de Spiegel recouvrant la veine cave inférieure.
La veine cave inférieure peut être absente et associée à une
continuation de la veine azygos chez les enfants porteurs d’une
atrésie des voies biliaires associée à un syndrome de polysplénie.
Dans cette configuration, les veines hépatiques se drainent dans un
collecteur commun sur lequel portera l’anastomose suprahépatique
[7, 22, 32]
.
5
43-312
Reconstruction vasculaire et transplantation hépatique
Techniques chirurgicales
7
Thrombose diffuse du système porte. I : Veine cave inférieure suprahépatique ; II : veine porte du greffon ; III : veine
cave inférieure (VCI) infrahépatique ; IV : anastomose cavoporte latéroterminale ; V : fermeture partielle de la VCI infrahépatique par agrafage mécanique ; VI : anastomose rénoporte
terminoterminale.
A. Reconstruction cavoportale.
B. Reconstruction rénoportale.
*
A
*
B
*
A
*
B
8
Reconstruction des veines hépatiques. VCI : veine cave inférieure.
A. Anastomose latérolatérale terminalisée. Fermeture de l’ostium de la veine
hépatique droite, réunion des ostia des veines hépatiques moyenne et gauche
prolongée en cavotomie verticale côté receveur. Fermeture de l’ostium cave infrahépatique et cavoplastie triangulaire postérieure à base supérieure de l’ostium cave
suprahépatique, côté greffon. Anastomose cavocave latérolatérale terminalisée.
B. Anastomose terminoterminale (piggy-back). Fermeture de l’ostium de la veine
hépatique droite, réunion des ostia des veines hépatiques moyenne et gauche côté receveur. Anastomose terminoterminale entre l’ostium cave suprahépatique du greffon et
les ostia réunis des veines hépatiques moyenne et gauche du receveur.
La veine cave inférieure suprahépatique doit être abordée en
intrapéricardique [11] en cas de syndrome de Budd-Chiari, ou plus
rarement devant l’existence d’une fibrose du confluent cavo-sushépatique chez les malades porteurs d’une échinococcose
alvéolaire [32].
Dans la situation d’une transplantation intrafamiliale parent-enfant
avec prélèvement du lobe gauche, la reconstruction suprahépatique
est réalisée dans la majorité des cas entre la veine hépatique gauche
du greffon et l’ostium réuni des veines hépatiques moyenne et
gauche du receveur. Dans la situation d’une transplantation
intrafamiliale entre adultes avec prélèvement du foie droit, la
majorité des équipes prélèvent le foie droit sans la veine hépatique
moyenne, ce qui entraîne de façon fréquente une stase veineuse dans
le secteur antérieur du foie droit. Dans cette situation, la
reconstruction veineuse hépatique est le plus souvent réalisée entre
la veine hépatique droite du greffon prélevée avec un patch cave et
l’ostium de la veine hépatique droite du receveur. Toute veine
hépatique accessoire inférieure droite, toute veine hépatique issue
6
Techniques chirurgicales
Reconstruction vasculaire et transplantation hépatique
du segment V ou du segment VIII, de calibre conséquent, se
drainant vers la veine hépatique moyenne, doit être réimplantée
dans la veine cave inférieure, soit directement, soit par
l’intermédiaire d’un greffon veineux interposé [54, 60].
43-312
Les complications vasculaires les plus fréquentes après
transplantation hépatique sont les complications artérielles,
représentées principalement par les thromboses et les sténoses. Les
thromboses artérielles requièrent une retransplantation dans 50 % [47]
des cas.
voie biliaire principale du greffon doit faire associer un geste de
reconstruction biliaire par anastomose hépaticojéjunale sur la
convergence, susceptible de réartérialiser les voies biliaires
intrahépatiques par collatéralité issue du territoire mésentérique
supérieur. La prévention de la thrombose repose avant tout sur la
réalisation en urgence d’un échodoppler éventuellement complété
d’une artériographie en cas de fièvre, d’une élévation brutale des
transaminases, ou d’une complication biliaire précoce.
La thrombose tardive compliquée de sténose(s) biliaire(s) aboutit le
plus souvent à une reconstruction vasculaire et biliaire ou à une
retransplantation élective. Elle survient après la quatrième semaine.
Sa physiopathologie est mal connue. Elle est symptomatique dans
50 %, essentiellement sous la forme de sepsis ou de complications
biliaires. Elle peut se révéler par des altérations isolées du bilan
hépatique ou une dilatation des voies biliaires [4].
¶ Thrombose
¶ Sténose
Sa fréquence est de 4 à 8 % dans la transplantation hépatique
orthotopique réalisée chez l’adulte [6, 33, 56] et de 9 à 15 % chez
l’enfant [27, 45, 53]. Elle représente 65 % des complications vasculaires
de la transplantation hépatique [33] et est associée à une mortalité de
50 %. Son évolution se fait le plus souvent vers la retransplantation,
soit précoce pour nécrose hépatique ischémique, soit tardive pour
cirrhose biliaire secondaire à une cholangite ischémique diffuse, la
vascularisation biliaire étant exclusivement artérielle.
Elle est favorisée par [34, 42, 53] :
Elle se révèle dans la majorité des cas par la survenue de sténoses
biliaires et/ou d’élévation fluctuante des transaminases, sans
argument en faveur d’un rejet. Le doppler hépatique est peu
contributif car la persistance d’un flux artériel subnormal ne préjuge
pas de l’existence d’une sténose significative. Elle est située dans
deux tiers des cas sur l’anastomose et est accessible à une
angioplastie [12, 62] (fig 9A, B).
– receveur < 15 kg ;
– ischémie froide prolongée ;
Les complications portales de la transplantation hépatique sont
rencontrées dans 1 à 2 % des cas [23, 31, 51, 63]. Il s’agit essentiellement
de thrombose portale et de sténose anastomotique.
– sténose d’amont (ligament arqué ou athérome) souvent
sous-évaluée ;
¶ Thrombose
Complications postopératoires
COMPLICATIONS ARTÉRIELLES
– diamètre artère receveur < 3 mm ;
– reconstruction artérielle complexe ;
– mais aussi par les malfaçons techniques, un hématocrite élevé, les
transfusions massives, l’utilisation d’antifibrinolytiques, le rejet.
La prévalence de la thrombose artérielle chez l’enfant peut être
diminuée par l’utilisation d’un greffon adulte obtenu par réduction
ou bipartition, et cela vraisemblablement en raison d’un calibre plus
élevé des artères du greffon issu d’un donneur adulte [26, 27].
Le diagnostic est le plus souvent évoqué précocement devant la
disparition du signal artériel au doppler hépatique quotidien [41, 46],
avant même toute manifestation clinique ou biologique. C’est dans
ces conditions de diagnostic précoce qu’une tentative de
thrombectomie chirurgicale peut être envisagée. Ce geste, s’il
parvient à restaurer un flux artériel dans environ 50 % des cas,
n’empêche le plus souvent pas la survenue de complications biliaires
ischémiques tardives. L’intervention recherche d’abord une
malfaçon technique : plicature par excès de longueur, sténose
anastomotique, principalement. La face antérieure de l’anastomose
est désunie. La désobstruction côté receveur est facilement obtenue
sous la pression du flux artériel avec ou sans utilisation de sonde de
Fogarty. Côté greffon, la thrombectomie d’aval, réalisée à la sonde
de Fogarty, est complétée par une fibrinolyse in situ (30 min) afin de
lyser les fragments de thrombus intrahépatique inaccessibles à une
désobstruction mécanique. Ceux-ci sont en effet susceptibles
d’engendrer une rethrombose précoce par augmentation des
résistances artérielles intrahépatiques. Une artériographie de
contrôle peropératoire est effectuée de manière systématique pour
juger de la qualité du résultat obtenu. Si le flux d’amont est
insuffisant, on discutera, soit un pontage aortohépatique, soit une
ligature proximale de l’artère splénique susceptible d’augmenter le
débit artériel hépatique, en particulier dans le cas d’une
splénomégalie importante, soit une reconstruction artérielle sur
l’artère splénique retournée du receveur. Toute plicature, excès de
longueur, sténose, flap intimal, thrombus adhérent doit conduire à
une résection et à la confection d’une nouvelle anastomose artérielle.
L’existence d’une fistule biliaire ou d’une nécrose ischémique de la
COMPLICATIONS PORTALES
La thrombose portale survient dans 1 % des transplantations et sera
suspectée en cas d’insuffisance hépatique aiguë postopératoire,
d’ascite, d’hémorragie digestive, ou de douleurs abdominales
diffuses. Elle est favorisée par une thrombectomie porte
peropératoire, une contrainte technique (hypoplasie porte du
receveur, disparité de calibre, plicature de l’anastomose par excédent
de longueur, twist en rotation) ou une insuffisance de flux (flux porte
hépatofuge [7] préopératoire en raison de shunts portosystémiques
spontanés volumineux ou d’une dérivation portosystémique
chirurgicale non fermée), un rejet aigu sévère. La thombectomie
chirurgicale peut être proposée [49, 61]. Elle est le plus souvent vouée
à l’échec, en raison d’un diagnostic tardif. Des observations de
thrombolyse percutanée avec mise en place d’une endoprothèse ont
été rapportées [3, 9, 10]. En cas de thrombose portale pédiculaire
suspendue avec persistance d’une perméabilité des branches
portales intrahépatiques, un pontage extra-intra-hépatique
hépatopète entre la veine mésentérique supérieure et la terminaison
de la branche portale gauche dans le récessus de Rex par greffon
interposé permet de récupérer une vascularisation portale du greffon
tout en traitant l’hypertension portale (pontage mésentérico-rex) [18].
Ce pontage est réalisé par l’interposition d’un greffon veineux
jugulaire autologue.
¶ Sténose
Les sténoses portales sont fréquemment dues à un défaut technique
éventuellement lié à une incongruence. Elles sont le plus souvent de
révélation tardive, au-delà du deuxième mois, sous forme d’ascite,
de splénomégalie ou d’hémorragie digestive. La réparation
chirurgicale nécessite le plus souvent une résection-anastomose de
la veine porte. Cette intervention est difficile et peut nécessiter le
démontage de l’anastomose biliaire pour des raisons d’exposition.
L’angioplastie portale percutanée transhépatique a transformé la
prise en charge de cette complication avec d’excellents résultats
obtenus par simple dilatation et sans interposition d’endoprothèse
vasculaire [23, 63].
Il est probable que dans les greffons réduits et les transplantations
avec donneur vivant, une sténose différée puisse être due à une
7
Reconstruction vasculaire et transplantation hépatique
43-312
Techniques chirurgicales
*
A
*
B
9
Sténose hyperserrée de l’anastomose artérielle hépatique révélée par une cholangite ischémique.
A. Vue artériographique.
bascule de ce greffon liée à sa régénération [54]. Les symptômes dus à
la congestion portale peuvent être retardés en raison d’une
circulation collatérale portale développée par l’hypertension portale
prétransplantation.
B. Vue cholangiographique.
Elles sont rencontrées dans 0,5 à 2,2 % des transplantations
hépatiques.
et des anastomoses cavocaves en piggy-back entre la veine cave
suprahépatique du greffon et le tronc commun des veines
hépatiques moyenne et gauche du receveur. Le diagnostic est
suggéré par l’échodoppler en cas de perte du signal triphasique des
veines hépatiques. La cavographie ou l’angio-IRM permet de
confirmer le diagnostic. En cas de transplantation pour syndrome
de Budd-Chiari associé à une hypercoagulabilité, un traitement
anticoagulant ou antiagrégant est indiqué pour éviter la thrombose
cave postopératoire.
¶ Thrombose
¶ Sténose
La thrombose de la veine cave inférieure est observée dans 0,6 à 2 %
des cas après transplantation. Ses manifestations cliniques sont un
œdème des membres inférieurs, une oligurie avec insuffisance rénale
en rapport avec un syndrome de Budd-Chiari lorsque la thrombose
cave intéresse la veine cave suprahépatique ou les veines sushépatiques. Cette situation peut conduire à une indication de
retransplantation. Ses facteurs étiologiques sont un greffon de petite
taille par rapport au receveur, susceptible d’une bascule et d’une
plicature de l’anastomose cave suprahépatique. En cas d’anastomose
cavocave avec préservation de la veine cave inférieure du receveur,
deux facteurs ont été identifiés comme pouvant favoriser
l’obstruction cave suprahépatique : il s’agit des greffons volumineux
Les sténoses se présentent essentiellement sous la forme d’une ascite
réfractaire ou d’un syndrome de Budd-Chiari. Le diagnostic est
suggéré par l’échodoppler en cas de perte du signal triphasique des
veines hépatiques. La cavographie ou l’angio-IRM permet de
confirmer le diagnostic. Le traitement le plus adapté est
l’angioplastie cave percutanée par voie jugulaire ou fémorale. La
survenue d’une sténose itérative après dilatation peut faire discuter,
soit la mise en place d’une endoprothèse autoexpansive, soit la
réalisation d’une cavoplastie chirurgicale d’élargissement. Il s’agit
d’une intervention délicate requérant une exclusion vasculaire totale
du greffon avec clampage suprahépatique intrapéricardique [20, 21, 54,
60, 63]
.
COMPLICATIONS VEINEUSES HÉPATIQUES
8
Techniques chirurgicales
Reconstruction vasculaire et transplantation hépatique
43-312
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121-126
9
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 43-012
43-012
Techniques endovasculaires appliquées
aux artères des membres inférieurs
J Marzelle
H Borie
S Kovarsky
JM Pernes
D Hovasse
JL Lasry
E Aptecar
N Bussy
Principes et matériels
Résumé. – Les techniques endoluminales de traitement de l’athérome au niveau des artères des membres
peuvent être utilisées comme traitement de première intention ou en complément d’une chirurgie
conventionnelle. La plupart de ces techniques sont maintenant validées, comme en témoignent les récentes
conférences de consensus : la place et l’intérêt des endoprothèses, de la thrombolyse, par rapport au
traitement médical, à l’angioplastie transluminale par ballonnets et à la chirurgie, sont maintenant codifiés.
Une bonne connaissance des voies d’abord et des caractéristiques techniques des cathéters et des
endoprothèses est fondamentale. Les indications de ces techniques doivent prendre en compte le stade
clinique du patient, son profil lésionnel (atteinte segmentaire ou diffuse), les probabilités de complications ou
de détérioration à long terme des résultats.
© 2002 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : athérome, sténose, occlusion artérielle, angioplastie, endoprothèse, cathéter, thrombolyse,
embolectomie, complications, resténose.
Introduction
La place, dans un traité de techniques chirurgicales, d’un article sur
les techniques endoluminales de traitement de l’athérome au niveau
des artères des membres pose plusieurs problèmes :
– ces techniques sont à la frontière de la radiologie interventionnelle,
mais la collaboration maintenant bien établie entre chirurgiens et
radiologues au sein d’une équipe pluridisciplinaire a relégué
beaucoup de querelles de chapelle au rang de combats d’arrièregarde. Le chirurgien peut les utiliser en complément d’une chirurgie
« classique » ; il est parfois confronté à leurs complications
immédiates ou secondaires ; elles peuvent être tentées au cours du
premier temps d’une chirurgie de sauvetage de membre : ce sont
désormais des techniques chirurgicales à part entière ;
– la plupart de ces techniques sont maintenant validées, comme en
témoignent les récentes conférences de consensus [59] : la place et
l’intérêt des endoprothèses, de la thrombolyse par rapport au
traitement médical, à l’angioplastie transluminale par ballonnets et
à la chirurgie, sont maintenant mieux codifiés ;
– des améliorations technologiques des cathéters et des
endoprothèses sont encore attendues, et cet article risque d’être
rapidement obsolète : une bonne compréhension des techniques
actuelles, leur pratique et la connaissance de leurs limites sont
néanmoins indispensables au développement de la chirurgie
endovasculaire de demain ;
– la majorité de ces techniques ont été développées dans les pays
anglo-saxons : dans la mesure où on continue à utiliser la plupart
des termes techniques en anglais, nous nous sommes efforcés de les
franciser en citant quand même le terme anglais « de référence ».
Angioplastie transluminale
Principes de l’angioplastie
transluminale
Bien que la technique d’angioplastie transluminale ait été décrite
pour la première fois par Dotter [15] en 1964, celui-ci utilisait des
Jean Marzelle : Chirurgien.
Hervé Borie : Chirurgien.
Stéphane Kovarsky : Chirurgien.
Jean-Marc Pernes : Radiologue.
Denis Hovasse : Radiologue.
Jean-Louis Lasry : Radiologue.
Eduardo Aptecar : Radiologue.
Hôpital privé d’Antony, 25, rue de la Providence, 92160 Antony, France.
Nicolas Bussy : Surveillant, pôle cardiovasculaire interventionnel, clinique Les Fontaines, 54, boulevard
Aristide Briand, 77000 Melun, France.
dilatateurs coaxiaux en Téflont de taille croissante passés dans la
sténose à dilater : ce mode de recanalisation est souvent appelé
« dottérisation ». Le véritable essor de l’angioplastie transluminale
date de la description, en 1974, par Grüntzig [22] des cathéters à
ballonnets à double lumière.
Depuis lors, un certain nombre de modifications ont permis
d’améliorer les résultats de cette technique, qui doit répondre à
plusieurs objectifs [1] :
– élargir la lumière artérielle pour rétablir un flux sanguin suffisant ;
– permettre au vaisseau traité de rester perméable, sans resténose ;
– laisser une interface régulière avec le sang circulant ;
– éviter la production d’emboles distaux, athéromateux ou
cruoriques ;
– léser ou agresser le moins possible la paroi artérielle.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Marzelle J, Borie H, Kovarsky S, Pernes JM, Hovasse D, Lasry JL, Aptecar E et Bussy N. Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs. Principes et
matériels. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales - Chirurgie vasculaire, 43-012, 2002, 29 p.
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
43-012
Techniques chirurgicales
"
A1
"
A2
1
Angioplastie transluminale percutanée. Matériel de
ponction percutanée.
A. Aiguilles de ponction. A1. Aiguille de ponction à
mandrin ; A2. trocart de Seldinger.
B. Introducteur. 1. Gaine à valve ; 2. dilatateur.
*
B
*
B
*
A
2
*
C
Angioplastie transluminale percutanée. Ponction fémorale sous l’arcade crurale.
A. Ponction artérielle.
B. Mise en place du guide.
C. Passage de l’introducteur.
D. Retrait du dilatateur, angiographie.
*
D
Bien que certains aient défendu l’idée qu’il n’y avait pas de « bonne
dilatation » sans fracture de la plaque, voire sans image de
dissection, un consensus existe maintenant pour que le résultat de
l’angioplastie soit une blessure limitée (controlled injury) de la paroi
artérielle, suffisante pour maintenir le calibre du vaisseau, mais sans
« surdilatation ». Les conséquences de cette surdilatation pourraient
en effet être la réocclusion immédiate, la dissection circulante, la
rupture artérielle, l’évolution anévrismale, ou la resténose à distance
par un mécanisme de remodelage ou d’hyperplasie myo-intimale.
Abords artériels
VOIES D’ABORD
¶ Ponction percutanée (fig 1, 2)
Ponction
Elle est pratiquée avec les mêmes règles d’asepsie qu’un abord
chirurgical (rasage, badigeonnage avec un antiseptique, mise en
place de champs). Après repérage du pouls artériel entre deux
doigts, on infiltre d’anesthésique local le derme et l’hypoderme. On
2
peut utiliser une aiguille de ponction 16 G avec mandrin métallique,
ou un trocart de ponction type Seldinger. On ponctionne la peau à
quelques centimètres du pouls que l’on perçoit, et l’on introduit
l’aiguille à 45° jusqu’au contact de l’artère. Si on utilise la technique
de Seldinger, on pousse l’aiguille jusqu’à traverser les deux parois
(antérieure et postérieure) de l’artère, puis on retire doucement
l’aiguille jusqu’à obtenir un reflux de sang artériel. Cette technique
a comme inconvénient théorique d’exposer à un saignement au
niveau de la sortie de l’aiguille à la face postérieure de l’artère, à
une fistule artérioveineuse si on ponctionne la veine adjacente au
contact de l’artère. Au niveau fémoral, une ponction trop profonde
expose également à une lésion de l’artère fémorale profonde. Si l’on
veut éviter ce type d’incident, on a intérêt à ne ponctionner que la
paroi antérieure de l’artère : dès qu’on obtient un reflux de sang
artériel, on arrête la progression de l’aiguille. L’inconvénient de cette
dernière technique est de risquer de s’engager dans un faux chenal :
le décollement d’une plaque par l’aiguille peut entraîner une
dissection localisée circulante (avec parfois un reflux sanguin
trompeur) ; on risque, en injectant dans ce plan, d’aggraver la
dissection. Il est donc prudent, une fois le reflux obtenu, d’injecter
quelques centimètres cubes de produit de contraste pour vérifier que
l’aiguille est bien dans la vraie lumière et que le produit injecté ne
stagne pas dans la paroi artérielle. Cette injection-test a, de plus,
Techniques chirurgicales
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
Tableau I. – Équivalence d’unités french, inches et millimètres.
Inches
Millimètres
French
0,013
0,014
0,015
0,016
0,018
0,021
0,025
0,026
0,032
0,035
0,038
0,039
0,053
0,066
0,078
0,33
0,36
0,38
0,41
0,46
0,54
0,64
0,67
0,82
0,90
0,97
1,00
1,35
1,67
2,00
1,00
1,08
1,15
1,23
1,38
1,62
1,92
2,00
2,46
2,69
2,92
3,00
4,00
5,00
6,00
l’intérêt de situer avec précision le point de ponction, en particulier
au niveau du trépied fémoral, ce qui évite, dans les ponctions
antérogrades de la fémorale commune, de s’engager dans la
fémorale profonde. On retire alors le mandrin en maintenant
l’aiguille en place, et l’on passe un guide à travers l’aiguille dans la
lumière artérielle. Lorsque le guide est avancé suffisamment loin
dans l’artère pour ne pas risquer de ressortir lors d’une fausse
manœuvre, on retire l’aiguille et on élargit l’orifice de ponction
cutanée d’une moucheture au bistouri, pour ne pas abîmer le bout
des cathéters que l’on va introduire le long du guide.
Introducteur
Dans la plupart des cas, la taille des cathéters, la nécessité de
changer de guide ou de cathéter, le fait qu’un ballonnet déflaté
présente toujours quelques aspérités pouvant léser la paroi artérielle
lors du retrait au point de ponction, justifient la mise en place d’un
introducteur (sheath). Cet introducteur est une gaine de gros calibre,
de longueur variable (15 à 100 cm), il est muni à son extrémité
proximale d’une valve à diaphragme empêchant le reflux de sang,
même lorsqu’un cathéter ou un guide de calibre moindre est passé à
travers cette valve. Un orifice latéral au niveau de la valve autorise
l’injection de produit de contraste ou de sérum hépariné. Avant la
mise en place de l’introducteur, on glisse à travers la gaine un
dilatateur effilé pour franchir les téguments sans abîmer l’extrémité
de l’introducteur lui-même, et surtout pour permettre une dilatation
progressive de l’orifice de ponction artériel. L’ensemble gainedilatateur est donc placé le long du guide dans l’artère, et le
dilatateur est alors retiré. On a intérêt, en particulier lorsqu’on
prévoit une procédure longue ou complexe (passage de plusieurs
cathéters), à fixer l’introducteur à la peau par un fil enroulé autour
de la valve. La taille nominale des introducteurs correspond à leur
calibre interne (c’est-à-dire à la taille des cathéters qu’ils admettent),
et est exprimée en french (F) (tableau I) : ainsi, un introducteur 6 F a
un calibre interne de 2 mm et permet d’utiliser des cathéters
d’angioplastie 5 F. En effet, le calibre en french des cathéters
d’angioplastie étant le diamètre externe du cathéter à ballon
totalement replié, il est préférable de choisir un introducteur d’une
taille supérieure au calibre nominal du cathéter d’angioplastie. Il
faut prévoir en début de procédure la taille des cathéters que l’on
risque d’utiliser pour ne pas être obligé de changer d’introducteur
en cours d’intervention.
Cathéters d’angiographie
Les cathéters d’angiographie 4 F ou 5 F peuvent être utilisés comme
cathéters-guides pour assurer la progression d’un guide au niveau
d’une courbure (passage du carrefour aortique lors du cathétérisme
iliaque par voie controlatérale, orientation d’un guide vers l’artère
tibiale antérieure), à travers une lésion longue et tortueuse (risque
de fragilisation du guide) ou à travers une occlusion (perte de
transmission des mouvements de poussée et de torsion imprimés
au guide, si son extrémité distale est enchâssée sur une trop grande
43-012
longueur dans l’occlusion). On peut également utiliser les cathéters
d’angiographie comme cathéters d’échange : une fois la lésion
franchie par un premier guide, le cathéter d’angiographie franchit la
lésion sur le guide ; ce guide est ensuite retiré et un deuxième guide
est passé à travers le cathéter laissé en place. Ce procédé est utile
quand le premier guide, choisi comme le plus adapté pour franchir
la lésion, a été abîmé ou ne peut être utilisé, du fait de son calibre
ou de son manque de rigidité, pour assurer la progression du
cathéter d’angioplastie.
¶ Site de ponction
Voie fémorale
C’est la voie la plus utilisée. La ponction rétrograde permet l’accès à
l’artère iliaque, la voie antérograde à la fémorale superficielle, à la
poplitée et aux artères de jambe. La ponction doit toujours être
effectuée sur la fémorale commune sous l’arcade crurale, de façon à
limiter la diffusion de l’hématome. Une ponction au-dessus de
l’arcade crurale expose à la constitution d’un hématome, qui peut
diffuser dans l’espace rétropéritonéal et entraîner une
déglobulisation importante. Ce type de complication se rencontre
surtout après utilisation d’introducteurs de gros calibre, et lors de
troubles de coagulation induits par une héparinisation systémique
importante, par une thrombolyse, ou par des inhibiteurs puissants
de l’agrégation plaquettaire. Des hématomes de cuisse volumineux
peuvent être observés pour les mêmes raisons, ce qui justifie une
compression d’au moins 10 minutes après retrait des cathéters et de
l’introducteur, la surveillance prolongée du point d’introduction,
parfois le recours à un brassard gonflable de contrepression, voire
lorsqu’on prévoit un risque hémorragique, par un système de
fermeture mis en place lors de l’ablation de l’introducteur.
Voie fémorale controlatérale
Cette voie est utile pour traiter des lésions iliaques complexes ou
pour réaliser des angioplasties de la fémorale profonde. Elle suppose
un matériel particulier pour franchir la bifurcation aortique (cathéter
d’angiographie angulé), et un guide suffisamment rigide pour
assurer la progression des cathéters en évitant une plicature (guides
super-stiff). Une autre possibilité consiste à utiliser un introducteur
long et courbe, qui protège la progression des cathéters en passant
en pont sur la bifurcation aortique. L’inconvénient de cet abord est
d’exposer aux complications de la ponction artérielle du côté
asymptomatique.
Voie humérale
En cas d’impossibilité de cathétériser les trépieds fémoraux, l’accès
artériel ne peut être assuré que par ponction des artères du membre
supérieur. La voie axillaire expose à des complications
neurologiques (compression plexique par hématome) et nombre
d’auteurs préfèrent la voie humérale. Elle est facile, du fait du
caractère superficiel de l’artère quelques centimètres au-dessus du
pli du coude, mais présente plusieurs inconvénients :
– la taille des introducteurs est limitée du fait du calibre de l’artère ;
– la longueur du trajet jusqu’aux artères des membres inférieurs
oblige à prévoir des guides et cathéters plus longs ;
– enfin, le guidage de la procédure est plus difficile en raison de
l’éloignement et des courbures artérielles franchies (origine des sousclavières, crosse aortique).
On a souvent intérêt à s’aider, comme en angioplastie coronaire,
d’un cathéter-guide long amené à proximité de la lésion, pour
permettre aux mouvements de torsion et de poussée imprimés au
guide d’être transmis de façon efficace.
Voie poplitée
La ponction de la poplitée basse sous-articulaire, sur un patient en
décubitus ventral, est utilisée par certaines équipes. Elle permet le
traitement par voie rétrograde des lésions ostiales de la fémorale
3
43-012
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
superficielle et des lésions de la jonction iliofémorale, inaccessibles
par abord fémoral homolatéral. Si elle peut être mise en balance avec
la voie fémorale controlatérale dans certains cas, les partisans de
cette voie soulignent son intérêt dans le traitement des lésions
occlusives de la fémorale superficielle dans son tiers supérieur : le
passage du guide en droite ligne à partir de l’artère poplitée
limiterait le risque de dissection, en particulier au passage de
l’ostium de la fémorale superficielle. La ponction poplitée n’est pas
toujours aisée, en raison de l’absence fréquente de pouls palpable,
et de la crainte de léser les veines et les nerfs de voisinage. On peut
s’aider, pour guider l’aiguille, d’une échographie ou de
l’opacification poplitée par Seldinger controlatéral (ponction
fémorale rétrograde et positionnement d’un cathéter d’angiographie
dans la bifurcation aortique sur le patient encore en décubitus
dorsal). L’inconvénient de cette méthode est double : risque de léser
l’artère poplitée basse, souvent infiltrée, par un introducteur de gros
calibre, et surtout risque d’un hématome compressif après retrait de
l’introducteur. La loge poplitée étant bien limitée, l’hématome ne
diffuse pas, mais peut rapidement réaliser une compression des
structures nerveuses, dont les conséquences peuvent être
dramatiques. Ce risque justifie une surveillance postopératoire
rigoureuse, et une intervention chirurgicale d’hémostase et de
décompression dès les premiers signes d’alarme.
Techniques chirurgicales
¶ Abord chirurgical
et des vaisseaux sous-jacents. Il peut également être utilisé en
rétrograde pour les angioplasties des vaisseaux sus-jacents : en cas
de lésion de la fémorale superficielle sur ses premiers centimètres,
un abord de la fémorale superficielle basse peut être réalisé : encore
faut-il se donner au moins 10 cm entre la lésion et le point de
ponction, de façon à laisser une longueur suffisante d’introducteur
dans l’artère avant le site d’angioplastie. Pour les lésions iliaques,
l’abord de la fémorale superficielle à la pointe du Scarpa peut être
utilisé, même en cas d’occlusion à son origine : on aborde la
fémorale superficielle à quelques centimètres de son origine, en zone
occluse, et on la ponctionne vers le haut, en créant un chenal avec
l’aiguille ; l’angle de ponction doit être inférieur à 30° de façon à
garder l’aiguille la plus centrée possible dans l’artère lorsqu’elle
arrive dans la fémorale commune. Le franchissement de l’occlusion
se traduit par un reflux de sang : il convient néanmoins de vérifier
par injection de quelques millilitres de produit de contraste que l’on
est bien parvenu dans la vraie lumière. On passe alors le guide, puis
l’introducteur dans la fémorale commune à travers la fémorale
superficielle occluse. Au retrait de l’introducteur, un ou deux points
suffisent en règle pour éviter tout saignement. L’intérêt de la voie
chirurgicale est d’éviter tout hématome postopératoire, et d’autoriser
ainsi une héparinisation postopératoire identique à celle de la
chirurgie conventionnelle. Il est néanmoins prudent de refermer
l’incision sur un drain de Redon aspiratif laissé en place 24 heures
pour éviter tout suintement postopératoire.
Abord limité de la fémorale (fig 3)
Angioplastie lors du suivi d’un pontage
Moins esthétique que la ponction percutanée, l’abord chirurgical du
point de ponction présente plusieurs avantages. Il permet de
ponctionner l’artère en zone « saine », après palpation de celle-ci au
besoin sur plusieurs centimètres. Il permet la mise en place d’un
introducteur de taille importante, par une artériotomie ou par
ponction sous contrôle de la vue, et d’assurer après retrait de
l’introducteur une hémostase chirurgicale, soit par une bourse ne
prenant que l’adventice autour du point de ponction, soit à points
séparés de Prolènet chargeant toute l’épaisseur de la paroi artérielle,
de façon à fixer le ressaut créé par la ponction au niveau d’une paroi
souvent athéromateuse. Enfin, en cas de traitement de lésions à
potentiel emboligène, il autorise un clampage transitoire de l’artère.
Cet abord limité peut être réalisé sous anesthésie locale. Si un court
abord dans le pli inguinal est parfois utilisé lorsqu’on veut
ponctionner la fémorale commune, l’abord le plus fréquent est celui
de la fémorale superficielle à la pointe du Scarpa, c’est-à-dire sous le
niveau de la lame ganglionnaire : après une courte incision cutanée
(deux à trois travers de doigts), suffisante pour mettre en place un
petit écarteur de Beckmann, on incise l’aponévrose du couturier que
l’on écarte en dehors en ayant soin de respecter les branches
nerveuses, dont la contusion serait source de paresthésies
postopératoires dans le territoire du nerf crural. On palpe la
fémorale superficielle, qui est séparée de la veine adjacente sur 2 à
3 cm et mise sur lacs, sans exercer de traction à son niveau. L’aiguille
de ponction artérielle est introduite par voie percutanée, le plus
souvent à quelques centimètres de l’abord chirurgical de façon à
percer l’artère avec un angle de 45° sous contrôle de la vue, pour
éviter toute coudure de l’introducteur. La technique de mise en place
de l’introducteur est dès lors la même que pour un abord percutané.
Quand la taille de l’introducteur semble trop importante par rapport
au calibre de l’artère et que l’on craint des complications de la
ponction artérielle (fausse route en cas d’artère très infiltrée, suture
sténosante d’un orifice de ponction trop large), on peut préférer la
mise en place de l’introducteur à travers une véritable artériotomie :
l’artère est contrôlée par deux lacs, en amont et en aval de
l’artériotomie ; on réalise au ténotome une artériotomie transversale
à la face antérieure de l’artère, car une artériotomie longitudinale
exposerait à une suture sténosante ou à une fermeture par pièce ; le
guide est introduit dans l’artère après avoir autorisé un certain
reflux en relâchant le lacs, et l’introducteur est alors passé le long
du guide. Le lacs est serré sur l’introducteur pour éviter tout reflux.
Cet abord de la fémorale superficielle peut être utilisé en
antérograde, pour les angioplasties de la fémorale superficielle basse
La survenue d’une sténose d’amont ou d’aval, dépistée lors de la
surveillance évolutive dans les mois ou les années qui suivent la
réalisation d’un pontage, oblige à s’interroger sur la nature de la
lésion à traiter, hyperplasie myo-intimale au niveau des anastomoses
ou progression de l’athérome. Si un prolongement du pontage se
discute devant des lésions étendues, le recours aux techniques
endoluminales est de plus en plus fréquent devant des lésions
segmentaires. Si l’abord percutané au niveau d’une artère native ou
la ponction du pontage sont maintenant licites du fait de la
miniaturisation des matériels, certains arguments militent pour un
abord chirurgical limité du pontage : facilité de l’abord chirurgical
du pontage à l’endroit où il est superficiel ; difficultés prévisibles
d’hémostase en cas de ponction percutanée, après ablation de
l’introducteur (risque d’occlusion en cas de compression prolongée,
de surinfection, d’hématome ou de faux anévrisme).
4
Angioplastie au cours de la chirurgie vasculaire conventionnelle
Une angioplastie peut être réalisée en complément d’un pontage lors
du traitement de lésions « à double étage ». Par exemple, on peut
coupler une angioplastie iliaque à un pontage fémorodistal, ou au
contraire compléter une revascularisation aortofémorale par une
angioplastie fémorale superficielle. Cette combinaison est licite
lorsqu’on réalise une angioplastie à faible risque de complication
(dissection ou thrombose), afin de ne pas compromettre le devenir
du pontage. Dans les autres cas, un intervalle de quelques jours est
préférable, afin de contrôler la pérennité du résultat. Il est également
important d’établir avec soin la stratégie opératoire pour ne pas
risquer, par un clampage total prolongé, la thrombose du pontage
en charge ou du site d’angioplastie. Que l’on réalise l’angioplastie
par l’artériotomie de l’anastomose fémorale ou par ponction du
pontage, on a intérêt à mettre en place un introducteur évitant les
traumatismes pariétaux inhérents aux passages répétés des guides
et cathéters. Si l’on passe par le pontage, on peut préférer une courte
prothétotomie que l’on ferme à points séparés, à une ponction dont
la suture risque d’être sténosante.
Si l’on veut éviter les complications thrombotiques d’un clampage
prolongé, plusieurs solutions existent en fonction des cas de figure.
• Angioplastie iliaque et pontage fémoropoplité
– Si l’anastomose proximale porte sur la fémorale superficielle, on
peut mettre en place l’introducteur par l’artériotomie proximale, et
réaliser l’angioplastie iliaque dans un premier temps, puisque le
Techniques chirurgicales
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
43-012
*
B
*
A
*
C
*
D
*
E
3
Angioplastie transluminale peropératoire.
A. Abord de la fémorale superficielle à la pointe du Scarpa.
B. Isolement de la fémorale superficielle dans le canal musculaire.
C. Mise en place de l’introducteur antérograde.
D. Mise en place de l’introducteur rétrograde : tunnellisation dans une occlusion fémorale superficielle. pour angioplastie iliaque.
E. Suture du point de ponction.
clampage de la fémorale superficielle pour le pontage n’empêche
pas le flux iliaque de se drainer vers la fémorale profonde. Cette
solution permet, en cas de mauvais résultat de l’angioplastie, de se
tourner à temps vers une revascularisation conventionnelle du
trépied fémoral (pontage aorto-, axillo-, ou fémorofémoral).
– Si l’anastomose porte sur la fémorale commune, on a intérêt à
réaliser l’anastomose fémorale dans un premier temps. Avant la
fermeture, l’introducteur est mis en place par l’artériotomie laissée
entrouverte et l’on réalise l’angioplastie. On retire alors
l’introducteur et l’on ne clampe la fémorale commune que le temps
de nouer le fil de l’anastomose, avant de remettre en charge l’axe
iliaque et de terminer le pontage fémoropoplité.
• Pontage aortofémoral et angioplastie fémoropoplitée
Après réalisation du pontage et avant sa mise en charge, un
introducteur est placé dans l’anastomose fémorale, avant fermeture
5
43-012
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
Techniques chirurgicales
*
A
*
B
4
Architecture des guides à âme fixe.
A. Structure du guide : 1. gaine spiralée ; 2. ruban de sécurité ; 3. âme effilée.
B. Formes de guides : 1. droit ; 2. angulé ; 3. guide en « J ».
"
A1
"
A2
"
B1
"
B2
5
Architecture des guides à âme amovible.
A. Âme amovible permettant de modifier la forme du bout distal.
B. Âme amovible permettant l’infusion de thrombolytiques par le bout distal.
de celle-ci ou par une courte prothétotomie ; on ne déclampe le
pontage qu’après vérification de la qualité de l’angioplastie.
• Pontage fémorodistal et angioplastie des axes de jambe
C’est probablement la situation la plus complexe et la plus sujette à
controverses, pour de multiples raisons, la principale étant que ce
type de revascularisation s’adresse en règle à des patients en
situation de sauvetage de membre présentant des lésions diffuses,
fémoropoplitées et du trépied jambier. Les résultats des techniques
endoluminales appliquées aux lésions diffuses et aux artères de petit
calibre font qu’une revascularisation par pontage doit être préférée
à chaque fois qu’elle est réalisable avec de bonnes chances de
succès : matériau veineux de longueur et de qualité suffisantes,
artère receveuse de qualité suffisante et bon lit d’aval. C’est dans les
autres cas, quand un pontage ne peut être réalisé dans de bonnes
conditions, que se discute le recours aux techniques endoluminales,
isolées ou associées à un pontage court (pontage prothétique
fémoropoplité haut en amont d’une recanalisation endoluminale,
greffe veineuse courte poplitée-artère de jambe en aval d’une
recanalisation fémorale). Tous les cas de figure sont possibles, depuis
une recanalisation endoluminale à plusieurs étages à partir d’un
abord fémoral haut, jusqu’à l’angioplastie à partir d’un pontage.
Dans ce dernier cas, il faut garder à l’esprit que la mise en place de
l’introducteur au niveau du pontage est souvent préférable à un
abord par l’anastomose distale, trop proche des lésions à traiter, avec
un risque de léser la paroi artérielle avec un introducteur trop épais
et trop rigide. Une héparinisation par voie systémique et des
rinçages fréquents au sérum hépariné par l’introducteur doivent
permettre d’éviter une thrombose extensive en cas de clampage.
6
GUIDES
Depuis le premier guide de 0,05 inches (1,27 mm) utilisé par Dotter
et Judkins [15] pour franchir une sténose fémoropoplitée, des
améliorations considérables [57] ont permis de mettre au point des
guides fins, flexibles (floppy), effilés (tapered), orientables (steerable),
faciles à diriger (torquable), dont le revêtement minimise les frictions
avec la paroi vasculaire. Dans la majorité des angioplasties
transluminales, la lésion est d’abord franchie par un guide laissé en
place pendant toute la procédure, afin d’être sûr qu’une fois la
sténose ou l’occlusion levée, la continuité de la vraie lumière
artérielle sera préservée : en effet le franchissement itératif de la
lésion, la fracture de plaque induite par la dilatation risquent de
créer un faux chenal qui exposerait à une occlusion de l’artère en
aval du site traité, ou risquerait d’entraîner des embolies distales.
¶ Architecture des guides (fig 4, 5, 6, 7)
Guides à âme fixe (fig 4)
Les guides à âme fixe sont généralement constitués d’une gaine
externe spiralée enduite de Téflont qui entoure un mandrin interne :
l’âme. L’âme est plus ou moins effilée à l’extrémité du guide, et peut
s’arrêter avant celle-ci : dans ce cas, l’extrémité du guide est
beaucoup plus souple (floppy), mais requiert un filament
supplémentaire de sécurité pour éviter un déroulement de la spirale
et un détachement du bout distal. Le bout du guide peut être droit,
angulé, ou en « J ». Les guides en « J » sont censés être moins
traumatisants pour la paroi : le J est mesuré en millimètres radius
(rayon du J) de 1,5 à 3, 7, voire 15 mm de radius.
Techniques chirurgicales
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
6
7
Architecture du guide hydrophile.
Guides à âme mobile (fig 5)
Les guides à âme amovible (movable core) sont construits selon le
même principe : revêtement spiralé couvert de Téflont, filament de
sécurité et âme. Le retrait de l’âme sur une longueur variable est
possible, pour donner de la souplesse à l’extrémité du guide ou lui
permettre un certain degré d’angulation, si le revêtement externe
est préformé. Enfin, le retrait complet de l’âme autorise, à travers
certains guides, l’administration de thrombolytiques.
Revêtement externe
La spirale est en général constituée d’un fil métallique de section
circulaire. L’utilisation d’un fil aplati, en limitant l’épaisseur de la
gaine externe, laisse plus de place à l’âme pour rigidifier le guide
(super stiff). Ce type de guide est particulièrement utile dans les
lésions iliaques tortueuses, surtout en cas d’abord controlatéral, de
façon à maintenir le guide en place lors de la progression du
cathéter. Lorsqu’on utilise des guides en « J » rigides, on a intérêt,
après angioplastie, à effacer le J en retirant le guide dans le cathéter
pour éviter de s’accrocher aux aspérités de la paroi.
Guides orientables (fig 6)
Pour cathétériser les artères tortueuses ou les bifurcations artérielles,
on a besoin de guides transmettant la torsion imprimée par
l’opérateur depuis l’extrémité proximale jusqu’à l’extrémité distale
(torque). L’extrémité distale de ces guides orientables, appelés
steerable, est plus souple sur une longueur variable, et le bout peut
être angulé, ce qui permet de bien orienter le trajet du guide. Le
corps du guide est suffisamment rigide pour transmettre la torsion.
Le maniement de tels guides peut être facilité par un « torquer », vis
concentrique qui, serrée autour de l’extrémité proximale du guide,
permet des gestes plus précis.
Guides effilés
L’accès aux vaisseaux de petite taille expose à la survenue plus
fréquente d’un spasme artériel. Cette notion a conduit au
développement de guides dont l’extrémité distale est de plus petit
calibre (tapered) que le corps du guide.
Guides hydrophiles (fig 7)
Leur apparition a amélioré les possibilités de franchissement des
sténoses très serrées et des occlusions. Ils sont construits en trois
couches concentriques : une âme effilée très élastique en Nitinolt,
enrobée d’une couche de polyuréthane et tungstène. Le revêtement
est constitué d’un polymère hydrophile, qui devient très glissant dès
qu’il est en contact avec un liquide. Cette hydrophilie, responsable
de la facilité du guide à franchir les lésions tortueuses, présente
plusieurs inconvénients : il faut d’emblée humidifier le guide si l’on
veut profiter de son hydrophilie, en particulier pour le glisser dans
un cathéter ; le guide devient alors très glissant : on a dès lors du
mal à le pousser et à le tourner (l’utilisation d’un « torquer », ou à
défaut d’une compresse sèche pour le manœuvrer est
recommandée) ; comme on sent très mal sa progression, le guide
peut emprunter un plan de dissection sans que l’opérateur ne
perçoive de ressaut ; enfin lors de l’échange ou du retrait d’un
43-012
Architecture du guide orientable.
cathéter, le guide a tendance à glisser (ou au contraire à rester
accroché au cathéter si un segment du guide redevient sec), et il faut
surveiller en scopie la position de l’extrémité distale du guide, afin
d’éviter une migration qui obligerait à franchir de façon répétée la
lésion. Les guides hydrophiles peuvent être droits, angulés ou en
« J ».
Guides d’injection
Il s’agit de guides pourvus d’une âme amovible qui se poursuit
jusqu’à l’extrémité distale (Sos ou Cragg). Une fois le guide en place,
on retire l’âme et l’on peut perfuser des thrombolytiques par
l’extrémité distale du guide. On rapproche de ces guides les
cathéters fins de 3 F (T3 de Cook ou Tracker de Target Therapeutics)
qui admettent des guides de 0,016 à 0,025 in.
¶ Taille des guides
Longueur
La longueur du guide varie de 75 cm à 260 cm, selon la longueur
des cathéters que l’on veut faire glisser le long du guide. En
choisissant la longueur du guide, on doit pouvoir assurer la
progression et le retrait du cathéter sur le guide en place (c’est-àdire ayant traversé la lésion), sans avoir besoin de déplacer le guide.
Les guides longs, « guides d’échange », sont surtout utilisés pour
changer de cathéter lors d’abords très à distance de la lésion à traiter.
Calibre
Le calibre du guide doit être prévu en fonction du calibre de la
lumière interne du cathéter d’angioplastie : 0,035 ou 0,038 in pour
les cathéters habituels, 0,014 à 0,018 in pour les cathéters fins
d’angioplastie pour artères de jambe. Le calibre du guide intervient
également en partie dans ses qualités de progression à travers des
lésions tortueuses. Les guides les plus fins peuvent être utiles pour
franchir des lésions complexes, mais leur fragilité oblige parfois à
les amener jusqu’à proximité de la lésion à traiter à l’intérieur d’un
cathéter 4 ou 5 F.
SYSTÈMES DE FERMETURE (fig 8)
Nous avons vu que le retrait de l’introducteur de l’artère nécessite
une compression prolongée de l’artère, en raison du risque
d’hématome ou de faux anévrisme. Ce risque est d’autant plus
important que la taille de l’introducteur est grande, et que l’on a
utilisé pendant la procédure des médicaments antithrombotiques
« puissants » ou des thrombolytiques.
La persistance d’un saignement peut nécessiter le maintien d’une
compression prolongée, manuelle ou par l’intermédiaire d’une
ceinture munie d’un ballon transparent de pression (Femostopt).
Des systèmes de fermeture de l’orifice artériel ont été développés
pour pallier ces inconvénients. Certains permettent de fermer
l’orifice de ponction soit par un bouchon de collagène (plug) : c’est
le système Angiosealt ; d’autres (Percloset, Closuret) réalisent une
véritable suture artérielle : le fil de suture est noué à l’extérieur de la
plaie, et le nœud coulisse le long du trajet de ponction jusqu’au
contact de la paroi artérielle. Le risque de sepsis local lié à
l’utilisation de tels systèmes rend impératives des précautions
d’asepsie rigoureuses lors de leur mise en place. Par ailleurs,
l’efficacité de ces systèmes est souvent limitée aux introducteurs de
taille inférieure à 8 F.
7
43-012
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
Techniques chirurgicales
*
B
*
A
*
C
*
E
*
D
8
Système de fermeture percutanée (Percloset).
A. Positionnement du système Closery à la place de l’introducteur.
B. Déploiement de l’aiguille.
C. Extériorisation des fils de suture.
D. Les deux fils sont placés dans une boîte (à gauche) dans laquelle le nœud est automatiquement préparé, et le système Closery est retiré de l’artère.
E. Descente du nœud au contact de la paroi artérielle au moyen d’un poussoir.
Angioplastie transluminale
par ballonnet
CARACTÉRISTIQUES DES CATHÉTERS D’ANGIOPLASTIE
¶ Profil des cathéters
Il arrive, devant une sténose très serrée déjà franchie par le guide,
de ne pas pouvoir franchir la lésion avec le cathéter à ballonnet. De
nombreuses améliorations [39] de la forme de l’extrémité du cathéter
(taper), de sa consistance, autorisent le franchissement de la lésion
sans forcer, mais il n’existe pas de consensus sur le meilleur « profil »
à adopter. La diminution du calibre des cathéters, qui sont passés
de 9 à 7 F, et maintenant à 5 F et même 4,3 et 3,5 F pour les cathéters
à ballonnets de petit calibre, permet de s’approcher le plus possible
du calibre du guide. Enfin la longueur de l’extrémité distale du
cathéter et le mode de pliage du ballon (fonction du matériau utilisé)
jouent également. Même avec des cathéters très « profilés » (low
profile) il est parfois nécessaire, plutôt que de pousser le cathéter en
forçant la sténose (au risque de produire une embolie distale), de
passer sur le guide des cathéters de calibre croissant pour
« dottériser » la lésion jusqu’à un calibre suffisant, afin que le
cathéter à ballonnet passe sans problème : par exemple, passage sur
un guide 0,035 in d’un cathéter d’angiographie 4 F avant d’utiliser
un cathéter à ballonnet 5 F.
8
¶ Force de dilatation du ballon (fig 9)
Cette force de dilatation est la résultante de plusieurs facteurs [1] :
– la pression hydrostatique produite par le liquide d’inflation du
ballon ;
– le calibre du ballon : la tension radiale (T) exercée sur les parois du
ballon qui se gonfle pour atteindre sa forme finale répond à la loi de
Laplace (T = P × R), et est fonction de la pression (P) à l’intérieur du
ballon, et du rayon R du ballon. À pression d’inflation égale, elle est
donc plus grande dans les ballons de gros calibre, ce qui explique
que la pression d’inflation nécessaire pour faire céder la sténose
d’une artère de gros calibre (iliaque) soit moins importante que celle
qui est nécessaire pour faire céder la sténose d’une artère de petit
calibre (tibiale ou coronaire) dont la structure pariétale serait
similaire. On comprend donc que les ballons de gros calibre
requièrent une pression d’inflation moindre et que le risque de
rupture artérielle, à pression d’inflation égale, soit plus important
dans les artères de gros calibre, comme l’aorte et les iliaques ;
– la compliance du ballon : c’est la mesure du degré d’élargissement
du ballon au-delà de son calibre nominal pour une pression
d’inflation donnée. Un ballon non compliant ne dépasse jamais son
diamètre nominal, quelle que soit la pression d’inflation. Il garde sa
forme, son calibre et son profil lors d’inflations répétées. Comme
tous les ballons sont fabriqués avec un matériau élastique, chaque
ballon a un certain degré de compliance. Pour les ballons les moins
Techniques chirurgicales
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
43-012
l’autre côté de la plaque, un ballon plus long prend appui sur toute
la circonférence de l’artère pour pousser sur la plaque ;
– la longueur de sténose : dans la mesure où une sténose longue a
une surface de contact plus grande, la force totale de dilatation du
ballon au niveau de la sténose est plus grande ;
– le degré de sténose : plus la sténose est serrée, plus la force de
dilatation du ballon, à pression d’inflation égale, est importante. Le
vecteur de force est fonction de l’amplitude du rétrécissement du
ballon au niveau de la zone sténosée. Alors qu’une pression
d’inflation modérée entraîne un vecteur de force important sur une
sténose très serrée, une sténose résiduelle modérée demande des
pressions d’inflation beaucoup plus importantes, proches de la
pression de rupture du ballon. Ce concept a conduit à développer
des ballons résistant à de hautes pressions d’inflation, pour éviter
une sténose résiduelle. Cette sténose résiduelle conduisait, lorsqu’on
ne disposait que de ballons à faible pression, à discuter d’une
angioplastie complémentaire avec un ballon de taille supérieure.
*
A
*
B
CHOIX DU BALLON
¶ Matériau
La plupart des ballons sont fabriqués à partir des cinq classes
principales de polymères du plastique : chlorure de polyvinyle
(PVC), polyéthylène (PE), polyéthylène téraphtalate (PET), Nylon,
et polyuréthane (PU) renforcé.
– PVC : ce matériau est de moins en moins employé. Le ballon a un
certain degré de compliance, même aux pressions d’inflation
habituelles. Cette compliance a tendance à augmenter lors
d’inflations répétées. La pression de rupture du ballon est basse,
comparée à celle des autres matériaux utilisés. Certains dérivés du
PVC auraient de meilleures caractéristiques de compliance.
*
C
9
Principes de l’angioplastie.
A. La force d’expansion (FE) suit la loi de Laplace : elle est fonction de la pression
d’inflation du ballon (P) et de son calibre (D) [1].
B. Compliance du ballon. 1. Ballon compliant : augmentation de taille aux deux
extrémités de la zone sténosée ; 2. ballon non compliant : maintien du calibre aux
fortes pressions.
C. Tableau de compliance en fonction de la pression d’inflation : ballon compliant,
ballon peu compliant, ballon non compliant.
compliants, la pression nécessaire à un élargissement du ballon audelà de son calibre nominal est très proche de la pression de rupture
du ballon. Si un ballon est compliant, il dépasse son calibre nominal
pour de faibles pressions d’inflation : quand le ballon est positionné
à cheval sur une sténose, une augmentation de pression d’inflation
entraîne une augmentation du calibre du ballon de part et d’autre
de la sténose, alors que la pression sur la zone sténosée est moindre
qu’avec un ballon non compliant. Ainsi, l’avantage des ballons peu
compliants est d’assurer une force de dilatation plus importante au
niveau de la sténose à dilater, de maintenir cette force de dilatation
lors d’une inflation prolongée, de prévoir exactement le calibre de la
zone dilatée, sans surdilatation, en particulier en amont et en aval
de la lésion à traiter. Quand on utilise un ballon non compliant, toute
baisse de la pression en cours d’inflation témoigne des modifications
de la paroi de l’artère et non d’un élargissement du ballon, ce qui
permet de suivre la progression de l’angioplastie ;
– la longueur du ballon : elle a peu d’influence sur les ballons peu
compliants. En revanche, la longueur des ballons compliants a une
influence sur la force de dilatation au niveau de la zone à dilater :
plus le ballon est long et dépasse de part et d’autre de la sténose,
moins la force de dilatation au niveau de la sténose est importante.
Si l’on veut exercer une force de dilatation importante au niveau
d’une sténose avec un ballon compliant, il faut donc choisir le ballon
le plus court possible. Les ballons longs non compliants ont un
avantage théorique : alors qu’un ballon court, appliqué sur une
sténose excentrée, a tendance à étirer la paroi, plus élastique, de
– PE : les ballons en PE sont en règle moins compliants, et ont des
pressions de rupture supérieures que ceux qui sont fabriqués en
PVC. La compliance dépend néanmoins de l’épaisseur du ballon, et
certains cathéters très profilés ont donc une compliance plus
importante. Le PE a une résistance à la déchirure plus importante
que le PET, ce qui expose moins aux perforations de ballons et aux
ruptures sur des sténoses calcifiées ou irrégulières.
– PET : ce matériau a permis d’élaborer des ballons plus fins et
mieux profilés. Les ballons en PET sont beaucoup moins compliants
que ceux qui sont en PVC ou en PE et peuvent supporter de hautes
pressions d’inflation.
– Dérivés du Nylon (Nydext, Duralynt) : ces ballons présentent des
pressions d’inflation et des caractéristiques de compliance qui
dépendent de leur composition, et semblent moins fragiles que le
PET dans les sténoses calcifiées.
– PU : ces ballons sont peu compliants, même après des inflations
répétées. Les cathéters d’Olbert, en PU renforcé par une mèche de
Nylon, ont une pression de rupture élevée.
¶ Architecture du cathéter (fig 10)
– Cathéters coaxiaux : le premier cathéter de Grüntzig [22] était un
cathéter coaxial entièrement en PVC. Ce type de cathéter a été
abandonné à cause de sa compliance : à partir d’une certaine
pression, la chemise externe avait tendance à se dilater et la chemise
interne à se rétrécir autour du canal central. La plupart des cathéters
actuellement sur le marché sont des cathéters à plusieurs lumières.
Le corps du cathéter est composé de dérivés du polyester, du
polyéthylène, du Nylon, ou du polyamide, et le ballon y est collé
et/ou scellé par fusion. La lumière externe, qui communique avec
l’entrée latérale (sideport) sert à l’inflation ou à la déflation du
ballon : elle peut être circulaire ou semi-circulaire, ce qui influence
la facilité d’inflation ou de déflation.
– Cathéter d’Olbert : ce cathéter est composé de cathéters coaxiaux
qui glissent l’un sur l’autre. Le cathéter interne est en PE et le
9
43-012
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
*
A
*
B
"
C1
Techniques chirurgicales
du cathéter, dont le calibre varie de 2,7 à 5,8 F. Ils autorisent des
pressions d’inflation de 4 à 12 atmosphères. La flexibilité de ces
cathéters améliore leur progression sur le guide. Malgré un faible
calibre, ils transmettent de façon satisfaisante les forces axiales
jusqu’à leur extrémité distale (pushability), ce qui permet leur
progression dans le vaisseau sans plicature. Les tailles de ballons
s’échelonnent de 1,5 à 6 mm, de 0,5 en 0,5 mm. Les ballons ont été
construits de façon à se déchirer longitudinalement, ce qui minimise
les risques de détachement de l’extrémité distale et de rupture
vasculaire. Des efforts ont également été faits pour raccourcir
l’extrémité distale du cathéter et pour adoucir l’angle du cathéter
avec le ballon (« taper »), afin de limiter le traumatisme du vaisseau
adjacent à la zone dilatée. Enfin, le revêtement du cathéter a été
amélioré pour rendre l’interface avec le sang circulant le moins
thrombogène possible.
Cas particuliers
• Cathéters de perfusion
"
C2
Ces cathéters présentent des orifices latéraux en amont et en aval du
ballon pour éviter d’interrompre la circulation du sang en cas
d’inflation prolongée, ce qui est surtout utile en pathologie
coronaire.
• Cathéters à larges ballons pour angioplastie aortique
*
D
*
E
10
Architecture des différents types de cathéters d’angioplastie.
A. Cathéter coaxial.
B. Cathéter à double lumière.
C. Cathéter d’Olbert : 1. ballon dégonflé ; 2. ballon gonflé.
D. Ballon-guide.
E. Système Monoraily.
cathéter externe en Téflont. Le ballon est en PU renforcé d’une
mèche de Nylon : alors qu’il est solidaire du cathéter externe à son
extrémité proximale, il est scellé au cathéter interne en distalité ; le
cathéter interne glisse en arrière dans le cathéter externe lors de
l’inflation et reprend sa position après déflation, ce qui permet au
ballon de s’affaisser sans aucune irrégularité susceptible de léser la
paroi artérielle lors du retrait. Pour certains, dans les angioplasties
sur endoprothèses, ce type de ballonnet limite le risque de migration
de l’endoprothèse lors du retrait du ballon.
¶ Autres développements
Traitement des artères de jambe
Les impératifs de taille et de flexibilité en pathologie coronaire et en
neuroradiologie, ainsi que les améliorations technologiques de
traitement des polymères, ont conduit au développement d’autres
types de cathéters à ballonnets utiles dans le traitement des artères
de jambe.
• Système d’échange rapide ou Monoraily
Ce système permet la sortie du guide à une distance variable (entre
5 et 35 cm selon le modèle) en amont du ballon. L’extrémité
proximale du cathéter communique avec le ballon. L’avantage de ce
système est de faciliter les échanges sur guide. En outre, dans le
système Monoraily, l’extrémité du guide ne bouge pas lors du
retrait du cathéter, ce qui évite de surveiller en scopie toute la
procédure de retrait. En revanche, ce cathéter ne permet pas
l’injection de produit de contraste.
• Cathéters profilés (« low-profile »)
Certains dérivés du PE sont utilisés pour construire des ballons très
profilés, sans différence de calibre entre le ballon replié et le corps
10
Ils autorisent des angioplasties de vaisseaux de 20 ou 30 mm de
diamètre et peuvent également être utilisés en pathologie veineuse
(syndromes caves). Ils ont des pressions d’inflation faibles, compte
tenu du risque de rupture vasculaire, et passent dans des
introducteurs de grande taille (10 à 15 F).
• Cathéters de prévention des embolies
Ils ont été développés pour empêcher les migrations distales lors
des angioplasties carotidiennes, et pourraient également être utiles
dans les angioplasties d’artères viscérales. Une aspiration des débris
avant déflation est nécessaire.
• Cathéters permettant l’administration de drogues pendant
l’angioplastie
Des recherches sur le coating du ballonnet ou des ballonnets
microporeux sont à l’étude, essentiellement dans les coronaires.
• Cathéters à lame (« cutting balloon »)
Utilisés en coronaire [19] et dans les artères de jambe, ils combinent
un ballon d’angioplastie 3 F avec des lames réparties tous les 120°
qui créent une zone de fragilité de la paroi lors de l’inflation
(dissection contrôlée), de façon à couper la plaque d’athérome et à
éviter que la force d’inflation ne s’exerce que sur le côté le plus
fragile de la paroi.
• Cathéters permettant une radiothérapie de contact pour prévenir
la resténose
Des systèmes de radiothérapie sont à l’étude en coronaire [54], mais
également dans les artères périphériques [42].
MODALITÉS DE L’ANGIOPLASTIE
Alors qu’elle est passée dans les mœurs depuis plus de deux
décennies, en particulier à l’échelon iliaque, il n’existe toujours pas
de consensus sur les modalités de réalisation de l’angioplastie. On
ne dispose d’aucune étude comparant les effets de différents modes
d’inflation du ballon sur les résultats à moyen et à long terme. Les
recommandations sont fondées sur l’expérience des opérateurs et
sur une certaine réflexion sur la physiopathologie du mécanisme
d’action de l’angioplastie.
¶ Type de cathéter
Calibre du ballon
La prévision du calibre du ballonnet du cathéter d’angioplastie se
fait en fonction de la taille de la lumière de l’artère en amont et en
aval du segment à traiter. Les notions anatomiques sur la taille des
Techniques chirurgicales
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
artères non athéromateuses conduisent à surestimer la taille du
ballonnet, alors que les artères athéromateuses, même à distance des
lésions sténosantes, sont le siège d’une endartérite diffuse.
L’évaluation de la taille du ballonnet par l’angiographie impose la
prise en compte d’un facteur de correction, lié à l’amplification de
l’image. On peut la calculer en se référant à la taille de repères
osseux comme les vertèbres, ou utiliser comme référence radioopaque le guide en place dans l’artère. Les mesures faites en
doppler-échographie avant procédure peuvent également servir de
référence. En cas de doute, il vaut toujours mieux débuter
l’angioplastie avec un ballonnet sous-dimensionné, en particulier en
cas de sténose très serrée et/ou d’artère calcifiée. En fait, avec la
pratique, on choisit souvent d’instinct la taille du ballonnet : 7 à
10 mm pour une iliaque primitive, 6 à 8 mm pour une iliaque
externe, 5 à 7 mm pour une fémorale superficielle, 4 à 6 mm pour
une poplitée, 2 à 3,5 mm pour une artère de jambe.
La question de la dimension idéale du ballon est loin d’être résolue :
une surdilatation de la lésion pourrait prévenir le risque de resténose
élastique, mais expose à une rupture artérielle, et à un moindre
degré à une dissection artérielle (circulante ou thrombosée, elle
expose à une occlusion précoce ou à une resténose) ou à des lésions
pariétales susceptibles d’induire une agrégation rapide de thrombus,
un remodelage par sclérose de la paroi, ou une hyperplasie myointimale secondaire. Une sous-dilatation expose théoriquement à
une mauvaise impaction de la plaque d’athérome (plus le ballon est
petit, moindre est la pression sur la lésion), au risque de voir la
sténose se reproduire après déflation du ballonnet (elastic recoil). Le
fait de laisser une sténose résiduelle n’est pas synonyme de mauvais
résultat hémodynamique : une petite amélioration de calibre sur une
sténose très serrée peut entraîner une amélioration considérable du
flux sanguin. Selon la loi de Poiseuille, le débit à travers une sténose
à 70 % est cinq fois supérieur au débit à travers une sténose à 80 %.
Néanmoins, un résultat incomplet risque de se détériorer plus
rapidement en cas de progression de l’athérome. Les modifications
pariétales interviennent également : l’impaction d’une sténose
irrégulière, ou au contraire la création d’une fracture de plaque à
partir d’une sténose régulière, fait passer d’un flux turbulent à un
flux laminaire, ou inversement. Une impaction progressive de la
plaque par des ballonnets de calibre croissant pourrait limiter le
traumatisme pariétal, mais rien ne permet d’affirmer le bien-fondé
d’une telle attitude, qui en outre majore d’autant le coût de la
procédure. Enfin, l’étude à long terme des résultats des angioplasties
transluminales montre que le taux de resténose est significativement
plus important lorsqu’on laisse une sténose résiduelle de plus de
30 %.
Longueur du ballon
Nous avons vu que l’influence de la longueur du ballon sur la
pression au niveau de la zone sténosée était surtout significative
pour les ballons compliants. Par ailleurs, les ballons longs ont sans
doute un intérêt dans l’obtention d’une impaction plus homogène
des sténoses excentrées. À l’opposé, le traumatisme imposé à la
paroi à distance de la sténose peut être responsable d’hyperplasie
intimale avec une resténose longue, là où n’existait qu’une sténose
courte : il est donc déconseillé d’utiliser un ballon long
surdimensionné par rapport à l’artère en amont et, surtout, en aval,
de la sténose que l’on veut traiter. Devant des sténoses étagées sur
une dizaine de centimètres, il peut être plus séduisant de réaliser
une seule inflation avec un ballon long s’appuyant sur toute la zone
d’endartérite, que de réaliser des inflations successives à l’aide d’un
ballon court.
Compliance
Chaque type de ballon est caractérisé par une courbe de compliance
exprimant le diamètre du ballon en fonction de la pression
d’inflation. Les ballons non compliants ont une courbe plate jusqu’à
la pression de rupture. L’intérêt des ballons peu compliants, outre le
fait qu’ils assurent une force de dilatation plus importante, un
calibre prévisible sans variations aux pressions élevées, est de se
déformer moins, et donc de ne pas varier de calibre lors d’inflations
43-012
prolongées ou répétées. Les ballons assez compliants sont adaptés à
des sténoses dont on préjuge qu’elles céderont à de faibles pressions
d’inflation, et permettent de gagner quelques dixièmes de
millimètres en augmentant la pression d’inflation si on juge que l’on
a un peu sous-dimensionné le ballon.
Choix du cathéter en fonction de l’artère
Les lésions simples sur des artères de gros calibre comme les artères
iliaques, admettent tous les types de cathéter, même des cathéters
assez rigides, peu profilés, de gros calibre. Les artères de plus petit
calibre, sinueuses, les lésions occlusives méritent des cathéters plus
souples, mieux profilés, d’un calibre inférieur ou égal à 5 F. Les
artères de jambe bénéficient des progrès de l’angioplastie coronaire
et des cathéters adaptés existent, comme nous l’avons vu plus haut.
¶ Mise en place du cathéter
Angioplastie classique
Une fois le guide en place à travers la lésion, le cathéter est passé
sur le guide après rinçage au sérum du chenal central pour éviter
toute friction. Les cathéters 5 F admettent en règle des guides jusqu’à
0,035 in. Le recours à un guide de moindre calibre, 0,025 ou 0,28 in,
qui n’est pas occlusif dans le cathéter, autorise des injections de
produit de contraste par le cathéter, à condition de munir l’extrémité
proximale d’un connecteur en Y à valve. Il faut en revanche se
méfier des cathéters plus fins qui n’admettent souvent que des
guides de 0,018, 0,016, voire 0,014 inches, car il vaut mieux choisir
d’emblée la bonne taille si la lésion est facile à franchir, ou échanger
les guides grâce à un cathéter d’échange si un guide plus gros a été
utilisé pour franchir une lésion plus complexe. Le positionnement
du ballon à travers la lésion est suivi en scopie, des marqueurs
radio-opaques étant visibles au centre ou aux deux extrémités du
ballon selon la marque du cathéter. Le repérage de la lésion se fait
par une injection de produit de contraste à partir de l’introducteur.
Pour éviter la répétition inutile des injections, le niveau de la lésion
est repéré à l’aide de marqueurs radio-opaques ou d’une règle
graduée radio-opaque glissée sous le patient. À condition de ne
bouger ni le patient, ni la source, l’artériographie de repérage peut
être utilisée comme masque, que l’on rappelle en arrière-fond pour
suivre en scopie la progression du cathéter : c’est le roadmapping [38].
L’inflation du ballon est suivie en scopie, le liquide utilisé pour
gonfler le ballon étant composé pour moitié de sérum et pour moitié
de produit de contraste, afin que le ballon soit visible sans que
toutefois la viscosité du produit de contraste ne gêne l’inflation ni la
déflation, qui se font à partir de l’orifice latéral du cathéter, à travers
un chenal assez fin.
Angioplastie sous-intimale (fig 11)
Alors que le passage sous-intimal du guide était considéré comme
source d’échec ou de complications, l’Anglais Bolia [6] a décrit une
technique de recanalisation des occlusions longues, où il place
d’emblée son guide dans un plan sous-intimal, franchit la totalité de
la lésion à traiter, le guide ne retrouvant la vraie lumière qu’après le
pôle distal de la lésion.
Un cathéter angulé (type Van Andel) est positionné au pôle
supérieur de l’occlusion que l’on veut recanaliser. On pénètre dans
l’occlusion au moyen d’un guide téfloné rigide dont on a légèrement
angulé l’extrémité, en dirigeant cette angulation vers l’extérieur de
la paroi artérielle, à l’opposé de collatérales éventuelles. On crée
ainsi une dissection dans laquelle on pousse le cathéter : sa position
est contrôlée par injection d’une petite quantité de produit de
contraste. On assure ensuite la progression du cathéter à travers
l’occlusion sur un guide en J de 1,5 mm de courbure. Quand le
cathéter approche de la fin de l’occlusion, on le retire de 3 à 4 cm
pour permettre au guide de former une large boucle en « U » que
l’on pousse jusqu’à ce qu’elle retrouve la lumière en aval de
l’occlusion : c’est cette boucle qui garantit la réentrée dans la vraie
lumière artérielle, d’autant plus facilement que l’artère d’aval est peu
pathologique. En cas d’artère pathologique, il est possible que la
réentrée se fasse plus loin dans l’artère.
11
43-012
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
Techniques chirurgicales
– les perforations (10 % des cas pour Bolia) : elles peuvent être
traitées en trouvant un plan de dissection alternatif et en réalisant
l’hémostase en impactant la paroi contre l’orifice de perforation, ce
qui suffit le plus souvent à assurer l’hémostase ;
– les embolies périphériques, assez fréquentes, de l’ordre de 5 %, et
qui sont traitées le plus souvent par thromboaspiration, plus
rarement par thrombolyse ou thrombectomie chirurgicale ;
– la survenue d’une dissection extensive, complication la plus grave,
heureusement rare, dont la gravité est liée à l’occlusion des
collatérales sur son trajet. Elle entraîne une ischémie sévère, et
nécessite un pontage en urgence pour restaurer le flux,
éventuellement associé à une embolectomie distale ou à une
thrombolyse.
¶ Inflation
Mode d’inflation
11
Technique d’angioplastie sous-intimale [6].
A. Abord de l’occlusion par le couple cathéter-guide pour entrer dans la paroi le
plus loin possible de la collatérale.
B. Le cathéter précédé de son guide trouve le plan de moindre résistance, qui est
un plan de dissection. La plus grande partie de l’occlusion est ainsi franchie par
l’extrémité en « J » du guide qui sort à peine du cathéter.
C. Vers la terminaison de l’occlusion, on pousse le guide de façon à former une
boucle en « U ».
D. Lorsque l’on pousse la boucle en « J » à travers la dissection, sa tendance naturelle est de retrouver la vraie lumière en aval de l’occlusion.
Une fois l’occlusion franchie, on réalise une angioplastie par un
ballonnet, de 5 mm à l’étage fémoropoplité, gonflé à 12 bars pendant
5 à 10 secondes, sur toute la hauteur de la zone recanalisée. En cas
de succès, l’artériographie de contrôle montre une progression
rapide du produit de contraste : tout ralentissement doit être dépisté
et corrigé par angioplastie itérative.
En cas d’occlusion de la fémorale superficielle dès son origine, on
ponctionne assez haut la fémorale commune, et l’on commence par
introduire un dilatateur de 4 F dans cette artère : on se sert de ce
dilatateur comme d’un cathéter pour pénétrer dans la fémorale
superficielle occluse, à l’aide d’un guide hydrophile angulé. La
recanalisation se poursuit alors comme nous l’avons décrit
précédemment.
En cas de recanalisation d’artères de jambe, la technique est un peu
différente, car la distance par rapport au point de ponction rend
malaisée la progression du cathéter. La fréquence du spasme
requiert une injection systématique d’antispasmodiques et
éventuellement de dérivés nitrés. Au lieu d’un cathéter
d’angiographie classique, on utilise un cathéter de diamètre 5 F à
ballonnet de 3 mm de diamètre sur 2 cm de long, admettant un
guide 0,035 in, contrairement aux cathéters plus fins habituellement
utilisés dans les angioplasties jambières, qui passent sur des guides
plus fins. Ce système de recanalisation est plus fort, et sa progression
est plus aisée. Il permet en outre, en cas de difficulté de progression
dans l’occlusion, d’effectuer une angioplastie de tout le segment déjà
franchi, afin d’éliminer la résistance à la progression du cathéter. Le
guide utilisé est un guide hydrophile de 0,035 in. En cas de difficulté,
on peut utiliser un guide hydrophile plus rigide (stiff) en se méfiant
de ne pas perforer l’artère. Une fois l’occlusion franchie, on la dilate
sur toute sa hauteur, par courtes inflations de 3 à 5 secondes à 12
bars.
Les complications propres à ce type de procédure sont :
12
Il n’y a toujours pas de consensus sur le meilleur mode d’inflation :
inflation rapide de courte durée, inflations répétées ou inflation
progressive et longue. La rapidité de l’inflation peut également jouer
un rôle sur le remodelage de la plaque. Il est certain qu’une inflation
rapide peut être dangereuse : risque de rupture artérielle en cas de
sténose fibreuse dure, « expulsion » d’un bourgeon calcaire. Elle peut
également favoriser une fracture de la plaque, avec risque de
dissection circulante. En cas de lésion excentrée ne cédant pas à
l’inflation, la rapidité d’inflation peut déterminer des lésions de
déchirure sur le versant « sain » de l’artère : ces lésions sont
incriminées dans le développement ultérieur d’une hyperplasie
intimale. La plupart des auteurs s’accordent donc à prôner un
gonflage progressif, par paliers, du ballon : la sténose met souvent
plusieurs dizaines de secondes à céder. La progression de la
dilatation peut être suivie en scopie (l’empreinte de la sténose sur le
ballon s’efface) ou sur le manomètre de l’inflateur (une baisse de
pression témoigne du fait que la sténose cède).
Pression d’inflation
Les considérations sur les pressions optimales d’inflation sont très
théoriques. L’utilisation de pressions très supérieures à la pression
nécessaire à faire céder la sténose aboutit à une meilleure impaction,
mais a l’inconvénient d’augmenter le traumatisme pariétal, et donc
le risque d’hyperplasie myo-intimale. Il est difficile de prévoir à
quelle pression cédera telle ou telle lésion, selon son étendue, le
degré de calcification pariétale, l’existence possible de thrombus.
Une lésion iliaque simple cède à 2 bars, alors que les sténoses d’axes
de jambe calcifiés demandent souvent des pressions supérieures à
10 bars. Devant un bourgeon irrégulier calcifié, le recours rapide à
une pression d’inflation élevée peut avoir un effet néfaste : rupture
du ballon sur les aspérités avant qu’un quelconque remodelage de
la plaque ait eu lieu, ou au contraire rupture pariétale par
« expulsion » de la plaque. C’est dans ce type de lésions qu’une
inflation prolongée, par paliers successifs, a les meilleures chances
de succès, en obtenant un remodelage progressif de la plaque
d’athérome.
Temps d’inflation
Beaucoup d’auteurs s’accordent à considérer que l’effet de
remodelage sur la paroi d’une inflation prolongée est meilleur que
celui d’inflations de courte durée. Des inflations de 2 minutes sont
habituelles. Des inflations plus longues (10 minutes, voire plus) ont
été recommandées, de première intention ou devant des sténoses se
reproduisant après déflation du ballon. En périphérie, ces inflations
longues ne présentent pas tant un risque d’ischémie distale
(l’occlusion artérielle étant compensée par la collatéralité), que de
formation de thrombus en amont ou juste en aval du ballonnet. Ce
risque peut être prévenu par une anticoagulation systémique,
éventuellement complétée par injection de sérum hépariné, en
amont par l’orifice latéral de l’introducteur, et en aval par le cathéter
(il faut retirer le guide si celui-ci occupe toute la lumière interne, ou
utiliser un raccord en « Y » à valve dans le cas contraire).
Techniques chirurgicales
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
*
A
43-012
*
C
*
B
12
Analyse des résultats après angioplastie.
A. Artériographie. Fracture de plaque (flèche) après recanalisation par angioplastie transluminale d’une occlusion de l’artère
fémorale superficielle.
B. Artériographie. Dissection circulante avec sténose résiduelle (flèche) après angioplastie transluminale.
C. Artériographie. Contrôle d’une angioplastie transluminale de la jonction fémoropoplitée sans sténose résiduelle visible au temps
précoce (gauche) ; la stagnation de produit de contraste au temps tardif (droite) traduit l’existence d’un faux chenal de dissection.
D. Échographie endovasculaire. Fracture de plaque venant au contact de la sonde d’échographie.
*
D
Mode de déflation
• Anomalies pariétales ou endoluminales
Le faible calibre de la lumière et la viscosité du produit de contraste
rendent la déflation parfois longue et difficile : les seringues
d’injection sont munies d’un système de verrou qui permet de
maintenir l’aspiration sans effort. Il est impératif de s’assurer, en
scopie, que le ballon est parfaitement déflaté avant de commencer le
retrait du cathéter, afin d’éviter l’aggravation des lésions pariétales
ou la création d’emboles. Le cathéter est le plus souvent retiré
complètement pour vérifier le résultat de l’angioplastie, mais la
position du guide à travers la lésion doit être maintenue lors du
retrait, pour éviter tout traumatisme au cas où une procédure
complémentaire serait indiquée. Lors du retrait du ballon de
l’introducteur, la surface du ballon présente souvent quelques
aspérités résiduelles, qui justifient, à la moindre sensation de
résistance, un mouvement tournant afin de replier le mieux possible
le ballon autour du corps du cathéter.
Une dissection artérielle peut entraîner une sténose résiduelle,
indication à une angioplastie répétée ou, en cas de persistance, à la
mise en place d’une endoprothèse. Certaines images d’addition
persistant dans la lumière peuvent être d’interprétation difficile
(thrombus marginé, flap, déchirure pariétale localisée ou fracture de
plaque), et seule une angioscopie permet de trancher de façon
formelle.
¶ Analyse des résultats (fig 12)
[38]
Critères angiographiques
L’interprétation du résultat après angioplastie prend en compte
quatre facteurs.
• Sténose résiduelle
C’est le rapport du diamètre de l’artère traitée à celui de l’artère
sus-jacente. Le calibre de l’artère traitée doit être calculé sur au
moins deux incidences, car il n’est pas rare que l’absence de sténose
résiduelle sur le cliché de face ne masque une sténose de plus de
50 % sur le cliché de profil. Une sténose de l’artère d’amont ou
d’aval est parfois notée. À côté des complications pariétales que
nous détaillons plus loin, il peut s’agir d’un spasme. Celui-ci se
rencontre même après passage d’un simple guide, a fortiori après
angioplastie avec un ballonnet surdimensionné.
• Ralentissement du flux artériel
Il doit faire suspecter une sténose ou une dissection non visible lors
de la première opacification.
• Lit d’aval
L’étude du lit d’aval dépiste une dissection avec sténose en aval
d’une occlusion recanalisée, le guide étant « réentré » dans la vraie
lumière artérielle parfois plusieurs centimètres après la fin de
l’occlusion. Elle peut également montrer des lésions pariétales à
distance liées au passage du guide, ou des embolies distales.
Critères hémodynamiques
La prise des pressions en aval d’une sténose et le calcul de l’index
de pression par rapport à la pression radiale sont un des moyens
d’évaluer le caractère significatif de cette sténose. Si la persistance
d’un gradient de pression indique une angioplastie complémentaire
ou la mise en place d’une endoprothèse, l’absence de gradient de
pression n’est pas un élément suffisant pour affirmer l’absence de
complications pariétales. La manométrie est surtout réalisée à l’étage
iliaque [58]. À l’étage fémoral, la manométrie est beaucoup moins
fiable, puisque l’introducteur, en amont de la sténose, constitue un
obstacle au flux.
13
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
43-012
Angioscopie
La méconnaissance par l’angiographie de certaines lésions rend
compte de certains échecs précoces « inexpliqués », occlusions ou
embolies, dont le point de départ est manifestement le site traité.
L’angioscopie est le meilleur examen pour visualiser avec précision
les anomalies endoluminales, mais ses indications se sont raréfiées,
car nombre des anomalies magnifiées par l’optique méritent d’être
respectées : elles « cicatrisent » le plus souvent, et leur correction
peut être dangereuse. C’est le cas des thrombi marginés, adhérents à
la paroi, des flaps qui disparaissent en quelques semaines, et de la
plupart des fractures de plaque, si la sténose n’est pas significative.
Cet examen, s’il a eu le mérite de permettre une meilleure
corrélation avec les images radiologiques, est actuellement
d’indication rare si on sait interpréter les anomalies rencontrées dans
le contexte de la procédure (meilleure connaissance des
caractéristiques de la lésion par l’analyse de l’échographie doppler).
Échographie endovasculaire
C’est l’examen peropératoire le plus précis [3] pour quantifier le
degré de sténose résiduelle. En pathologie occlusive, on utilise des
sondes de 20 ou 30 MHz, passées sur guide. Si cet examen identifie
plus difficilement que l’angioscopie les anomalies endoluminales
comme thrombi ou flaps, il est plus facilement réalisable à l’étage
iliaque et, surtout, permet d’analyser de façon fine les anomalies
pariétales induites par l’angioplastie : fracture de plaque et
dissection. Sa limite principale est le coût de l’examen.
Complications de l’angioplastie
COMPLICATIONS IMMÉDIATES
¶ Au point de ponction
– La survenue d’un hématome au point de ponction percutanée est
considérée dans la littérature radiologique comme une complication
bénigne. Ne sont considérés comme graves que les hématomes
nécessitant une transfusion ou un geste chirurgical d’hémostase. La
fréquence des hématomes au point de ponction est corrélée à la
durée de la procédure, à la taille de l’introducteur utilisé et aux
médicaments antithrombotiques administrés. Dans notre expérience
de chirurgie d’hémostase après ponction percutanée, l’état de l’artère
ponctionnée intervient également, ce qui nous incite à recommander
la pratique d’une échographie-doppler avant de décider du site de
ponction : la constatation d’une ectasie, d’une plaque calcifiée ou
d’une endartérite irrégulière au niveau du trépied fémoral
représente pour nous une indication à chercher un point de ponction
plus sain, ou à réaliser un abord chirurgical du site de ponction. Les
ponctions percutanées de pontages peuvent également être sources
de complications : si on a parfois la chance d’obtenir après retrait du
cathéter une hémostase rapide, il existe un risque de saignement
prolongé (et la compression prolongée du trajet d’un pontage peut
entraîner la thrombose de celui-ci) et un risque de faux anévrisme,
parfois septique.
– La thrombose au point de ponction est rare, liée à la formation de
thrombus le long du cathéter ou de l’introducteur, le thrombus
devenant occlusif lors du retrait du cathéter.
¶ Au niveau du site traité
Nous avons vu, dans le paragraphe consacré à l’analyse des
résultats, le détail des lésions pariétales et endoluminales induites
par l’angioplastie. Si certaines, comme les flaps, les irrégularités
pariétales, ou les thrombi marginés, cicatrisent en règle sans
complication, d’autres méritent une prévention ou un traitement
adaptés :
– la thrombose du site dilaté justifie une prévention par un
traitement antithrombotique, dont les modalités varient selon les
14
Techniques chirurgicales
auteurs. La plupart des équipes s’accordent sur la nécessité d’un
traitement antiagrégant débuté le plus souvent 24 à 48 heures avant
la procédure, et une héparinothérapie pendant la procédure.
Certains administrent l’héparine par voie intra-artérielle, en bolus,
alors que d’autres préfèrent une héparinisation systémique ;
– la persistance d’une sténose significative, par resténose élastique,
par fracture de plaque ou par création d’un chenal de dissection
thrombosé ou circulant, justifie une angioplastie itérative. En cas
d’échec, la mise en place d’une endoprothèse, au moins à l’étage
iliaque, n’est plus discutée. Le problème est plus difficile sur les
vaisseaux de petit calibre, et surtout au niveau des plis de flexion,
où les résultats des endoprothèses sont moins bons. Enfin, devant
une lésion réclamant un traitement complémentaire risqué ou
aléatoire, il est souvent plus prudent de suspendre la procédure ou
de se tourner vers une revascularisation chirurgicale « classique »,
plutôt que de risquer une aggravation ou une extension des lésions ;
– la survenue d’une rupture artérielle, heureusement rare, revêt une
gravité certaine à l’étage aorto-iliaque. Elle survient plus volontiers
sur les artères calcifiées, a fortiori si l’on utilise des pressions
d’inflation fortes sur des artères de gros calibre, et en cas de
surdilatation. Après contrôle de l’hémorragie par inflation itérative
du ballon (ce qui souligne l’importance de laisser un guide à travers
la lésion jusqu’à la fin de la procédure), elle peut être traitée par
endoprothèse ou par chirurgie.
¶ À distance du site traité
– Des lésions pariétales (lacérations, décollement de plaque) ou des
thromboses peuvent être induites par l’introducteur ou par les
guides et cathéters utilisés à distance du site traité. Il importe donc
de les prévenir en suivant en scopie la progression de la procédure,
et en contrôlant au moindre doute (sensation de ressaut, difficulté
de progression), par une injection de produit de contraste, la
perméabilité artérielle et la position du guide ou du cathéter par
rapport à la lumière artérielle. Une fois dépistées, la correction de
ces complications se fait selon les mêmes critères que les
complications au niveau du site traité.
– Un spasme survient d’autant plus volontiers que l’on utilise des
instruments rigides ou de gros calibre par rapport à l’artère traitée.
Il n’est pas toujours facile de différencier un spasme d’une lésion
pariétale iatrogène, mais à l’inverse, ce diagnostic doit être évoqué
avant d’entreprendre des manœuvres endoluminales
supplémentaires qui risquent de l’aggraver. Il peut être prévenu par
l’injection de drogues comme la papavérine, ou traité par dérivés
nitrés. Compte tenu des effets secondaires possibles de ces derniers,
il faut attendre un certain temps (la levée du spasme n’est pas
immédiate) avant de renouveler l’injection.
– Les embolies distales peuvent compromettre le résultat immédiat
et entraîner une thrombose extensive. Elles peuvent être traitées par
thromboaspiration ou par administration in situ de thrombolytiques
(en respectant leurs contre-indications), dont le succès dépend de la
nature de l’embole (la thrombolyse est inefficace en cas
d’athéroembolisme).
COMPLICATIONS PRÉCOCES
¶ Faux anévrisme
L’apparition secondaire d’un hématome au point de ponction justifie
la recherche par échographie-doppler couleur d’un faux anévrisme
circulant alimenté par le point de ponction. La constatation d’un
faux anévrisme circulant amène à discuter trois options
thérapeutiques : chirurgie d’hémostase (avec parfois des retards de
cicatrisation liés à la diffusion de l’hématome), compression
prolongée [47] sous contrôle échodoppler (procédure parfois longue
et inconfortable pour le patient), ou embolisation par ponction
directe et injection de colle [36] ou de coils [25] (avec un risque septique
théorique).
¶ Sténose au point de ponction
Le passage de l’introducteur, surtout s’il est de calibre important,
dans une artère pathologique peut se compliquer d’une dissection
Techniques chirurgicales
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
localisée, qui peut se réaccoler en quelques jours ou évoluer pour
son propre compte. La suture artérielle en cas d’abord chirurgical
expose également à ce type de complication, surtout en cas de
bourse dont les points sont passés trop en profondeur dans la paroi
artérielle.
¶ Thrombose et embolie
Le processus de « cicatrisation » du site traité n’étant pas immédiat,
il n’est pas rare qu’une thrombose au site traité ou des embolies
distales surviennent de façon retardée. Même s’il est difficile de
définir de façon formelle un profil lésionnel « à risque » sur des
critères purement angiographiques (l’angiographie peut méconnaître
dissections et anomalies pariétales), il semble préférable de
poursuivre une anticoagulation de quelques jours et de contrôler
par échographie-doppler toutes les lésions traitées, en particulier les
occlusions recanalisées, les lésions diffuses et les angioplasties sur
un mauvais lit d’aval.
COMPLICATIONS TARDIVES
¶ Resténose
C’est la complication qui a fait couler le plus d’encre [20, 52, 67]. En
effet, quelles que soient les améliorations apportées à l’angioplastie
transluminale, les traitements adjuvants étudiés, il semble qu’on ne
peut descendre à moins de 20 à 45 % de resténoses à distance en
fonction de la nature de la lésion, du site traité, et de l’état du lit
d’aval. Un mécanisme d’hyperplasie myo-intimale, réaction de la
paroi artérielle à l’agression, a été mis en évidence par les études
histologiques. Il était néanmoins curieux que le taux de resténose
après angioplastie soit très supérieur à celui que l’on observe après
thromboendartériectomie chirurgicale. L’amélioration des
techniques d’imagerie, en particulier l’échographie endovasculaire,
a permis d’analyser la part réelle de l’hyperplasie myo-intimale, qui
survient en règle dans un délai de 3 à 6 mois après le geste initial,
par rapport à trois autres mécanismes :
– le remodelage artériel correspond à une rétraction en fibrose de
l’artère traitée. Malgré des études en échographie endovasculaire,
on n’a pas identifié de critères prédictifs de survenue de ce
phénomène, qui a cependant justifié l’utilisation plus « libérale » des
endoprothèses, à l’exemple des coronaires ;
– la resténose précoce est certainement liée à des lésions pariétales
significatives laissées en place et évoluant pour leur propre compte,
que l’angiographie de contrôle ou les mesures d’index de pression
ont initialement méconnues. Il peut s’agir d’une dissection
circulante, parfois secondairement thrombosée, d’un flap
occasionnant un ralentissement circulatoire intermittent, de fracture
de plaque responsable de turbulences, d’irrégularités pariétales
constituant le point d’appel à l’accrétion secondaire de thrombus ;
– la resténose tardive est liée à la récidive in situ de lésions
d’athérome floride, à laquelle s’ajoutent parfois des lésions de
remodelage (diminution du calibre externe de l’artère) et
d’hyperplasie myo-intimale.
¶ Réocclusion
La littérature confond souvent resténose et réocclusion. La resténose
par hyperplasie myo-intimale est d’autant plus significative qu’elle
survient sur des artères de petit calibre, mais des facteurs
thrombotiques interviennent probablement souvent : ils peuvent être
secondaires aux anomalies pariétales, mais également à des
variations de débit circulatoire (cardiopathie ischémique), ou à une
pathologie surajoutée (cardiopathie emboligène, syndrome
inflammatoire, troubles de l’hémostase). La réocclusion du site traité
peut s’accompagner d’embolies distales ou d’une thrombose
extensive : cette dernière éventualité paraît rare du fait de l’existence
de collatérales en amont et en aval de la lésion, susceptibles de
maintenir un flux circulant.
¶ Progression de l’athérome
Le développement de lésions à distance du site traité peut être
parfois rapporté à des complications de la procédure (traumatisme
43-012
pariétal par le guide, embolies), mais il est le plus souvent lié à
l’évolutivité de la maladie athéromateuse. Celle-ci peut être favorisée
par la persistance des facteurs de risque, en particulier le tabac. On
peut reprocher à l’angioplastie transluminale que l’amélioration
clinique rapide qu’elle entraîne, au prix d’un geste peu invasif,
encourage l’insouciance du patient.
Athérectomie
Malgré le développement et l’efficacité maintenant reconnue de
l’angioplastie transluminale par ballonnets dans le traitement des
lésions athéroscléreuses, un certain nombre de limitations à ses
applications ont suscité, au début des années 1990, le
développement de technologies visant à l’ablation de tout ou partie
de la plaque d’athérome [68] : l’athérectomie.
Les principes de fonctionnement des différents athérotomes
découlent de l’analyse des facteurs limitant l’efficacité de
l’angioplastie transluminale [20].
Resténose
Ce phénomène survient évolutivement dans 20 à 45 % des cas
d’angioplasties. L’ablation de la plaque, plutôt que son remodelage,
pourrait diminuer le taux de resténose.
Occlusions
Par rapport à l’angioplastie des sténoses artérielles, le traitement des
occlusions connaît encore un taux d’échecs techniques immédiats
important (impossibilité de franchir la lésion en totalité à l’aide d’un
guide). L’athérectomie pourrait faciliter le franchissement des
occlusions et représenter le traitement des lésions occlusives, seule
ou associée à une angioplastie par ballonnet complémentaire.
Facteurs anatomiques
Certaines situations sont difficiles à traiter par angioplastie (lésions
diffuses, sténoses ostiales, etc), et pourraient être accessibles à des
technologies spécifiques.
Depuis l’agrément par la Food and Drug Administration (FDA) en
1987 aux États-Unis du cathéter de Simpson, d’autres systèmes ont
été développés, puis commercialisés. L’agrément par la FDA ne
représente qu’un gage que ces technologies répondent à des normes
de sécurité. À l’heure actuelle, aucun système n’a fait preuve d’une
efficacité suffisante pour pouvoir prétendre remplacer
l’angioplastie [65]. Même si certains athérotomes restent utilisés par
certaines équipes en pathologie coronaire, l’athérectomie n’est plus
utilisée qu’exceptionnellement en pathologie périphérique.
L’exemple de l’athérectomie par laser est particulièrement frappant :
après une diffusion très médiatisée [53], de nombreuses publications
ont fait état de taux de perméabilité médiocres qui ont stoppé les
développements de cette technologie [ 3 1 , 4 5 ] . Les différents
athérotomes n’ont pas fait preuve de leur supériorité par rapport à
l’angioplastie, et leur déclin a coïncidé avec le développement des
indications des endoprothèses.
Nous ne ferons donc que mentionner l’athérectomie rotative (fig 13)
par Rotablatort [70], encore pratiquée par certaines équipes qui ont
une activité mixte coronaire et périphérique, mais dont les
applications restent exceptionnelles, limitées en outre par le coût de
la procédure.
Le Rotablatort est un athérotome rotationnel constitué d’une olive
métallique dont la partie antérieure, qui fait face à la lésion à traiter,
est couverte d’une poussière de particules de diamant. La rotation
de l’olive, entre 120 000 et 180 000 t/min, est assurée par un câble,
relié à un moteur à air comprimé, à l’intérieur d’un cathéter qui
permet en outre une irrigation de sérum physiologique pour
refroidir le câble et l’olive. Olive et câble passent sur un guide
métallique de 0,009 in à extrémité distale en platine : ce guide est
bloqué automatiquement pendant l’activation du système, mais peut
sinon être avancé dans l’artère à traiter. Différentes tailles d’olive
sont disponibles, de 1,5 à 3 mm.
15
43-012
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
Techniques chirurgicales
*
B
*
A
13
Athérectomie sur guide par Rotablatort.
A. Architecture de l’athérotome : 1. raccord de la turbine avec l’air comprimé ; 2. poussoir ; 3. irrigation ; 4. rétrocontrôle.
B. Recanalisation du tronc tibiopéronier par Rotablatort, sans angioplastie complémentaire.
Après franchissement de la lésion par le guide, on active le moteur
et on avance progressivement l’olive au sein de la lésion, sans forcer,
au moyen de la mollette du système d’avancée : l’olive progresse
ainsi de plusieurs centimètres dans la lésion. L’avancée de l’olive
doit être très lente : le temps de franchissement d’une lésion
segmentaire est de 3 à 5 minutes (la console est pourvue d’un
tableau lumineux qui compte le temps d’activation du moteur). Une
fois la lésion franchie, on retire le cathéter en activant le moteur à
une vitesse de 60 000 à 90 000 t/min en laissant le guide en place, de
façon à contrôler le résultat. Une sténose résiduelle impose
l’utilisation d’une fraise de plus gros calibre ou une angioplastie
complémentaire.
L’efficacité du Rotablatort est tributaire du passage préalable de la
lésion par un guide : il est illusoire et dangereux de tenter de
recanaliser une occlusion par Rotablatort seul. Les complications [2]
sont la rupture artérielle (surtout quand on utilise d’emblée une
fraise de calibre trop proche de celui de l’artère, le flux ralenti (slow
flot : l’angiographie de contrôle après passage de la fraise retrouve
parfois une lenteur de progression du produit de contraste qui
pourrait être liée à des phénomènes de cavitation), le spasme (que
certains préviennent par administration systématique d’inhibiteurs
calciques). On a également rapporté la survenue d’une
hémoglobinurie, et surtout d’athéroembolisme.
Endoprothèses
Principes des endoprothèses
En France, il a été pratiqué près de 50 000 angioplasties
périphériques en l’an 2000, avec un taux de stenting de 20 %. En
effet, les techniques et les matériaux utilisés ont repoussé les limites
de l’angioplastie, alors que les échecs de pose sont devenus plus
rares (biocompatibilité des matériaux utilisés, réduction de
l’épaisseur des endoprothèses, diminution du profil distal des
ballons, sertissage par machine des endoprothèses, traitement
adjuvant médicamenteux adapté).
Bizarrement, le terme « stent » est né en 1854, quand Charles Thomas
Stent, dentiste anglais, a inventé un système de tuteur destiné à
soutenir les dents (couronne). Mais c’est encore à Dotter [14] que
revient le mérite d’avoir imaginé la possibilité de prothèses par voie
endoartérielle. La première implantation sur l’homme d’une
endoprothèse coronaire en platine fut réalisée en France à Toulouse
par Jacques Puel [56] en 1986. Cet événement est important, car l’essor
historique des endoprothèses, et les progrès dans leur conception,
proviennent essentiellement de l’expérience des coronaires.
La resténose élastique (elastic recoil) et la dissection sous-intimale ou
médiale (cette distinction au sein d’une paroi très remaniée par
l’athérome est souvent très théorique) sont des facteurs limitants du
succès de l’angioplastie transluminale, en laissant une sténose
résiduelle après déflation du ballon, et en laissant à la surface de la
zone traitée des irrégularités, facteurs de turbulences et de
thrombose. La surdilatation par un ballon de dimension supérieure
au calibre de l’artère comporte le risque de majorer ou d’étendre les
lésions, de provoquer une rupture artérielle et d’induire, en étirant
16
les fibres musculoélastiques de la média, une hyperplasie myointimale. La mise en place d’une prothèse endoluminale (stent)
permet de maintenir, après angioplastie, le calibre artériel à une
valeur prédéterminée, d’impacter les fragments de paroi en laissant
une lumière circulante cylindrique sans turbulences [5] . Les
endoprothèses couramment utilisées sont des treillis métalliques,
suffisamment radio-opaques pour permettre leur pose sous contrôle
scopique, qui exercent sur la paroi un certain degré de force radiaire
pour maintenir la lumière vasculaire ouverte. Leur expansion peut
être assurée par l’intermédiaire d’un ballon, ou en leur laissant
reprendre leur diamètre nominal en les larguant à l’aide d’un
cathéter dans lequel elles sont repliées : on parle dans ce dernier cas
d’endoprothèses autoexpansibles.
Il existe actuellement plus de 40 sociétés commercialisant des
endoprothèses, et il nous a paru important de synthétiser les
principes de choix d’une bonne endoprothèse, plutôt que de dresser
un inventaire exhaustif (et éphémère) des produits disponibles sur
le marché. Les tableaux II et III résument les caractéristiques des
endoprothèses les plus couramment employées.
Architecture des endoprothèses
Il existe plusieurs familles d’endoprothèses (fig 14) : tubulaires,
filamentaires, autoexpansives. De ces trois grandes familles est née
une sous-famille : les endoprothèses multicellulaires ou
tubuloflexibles.
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
Techniques chirurgicales
43-012
Tableau II. – Caractéristiques des endoprothèses expandues sur ballon.
Stent
Société
Matériaux
Radio-opacité
Force radiaire
Flexibilité
Particularité
Taille desilet
Herculinkt
Guidant
316 L
Bonne
Bonne
Moyenne
Ballon monorail
guide 0,014 in
6 et 7 F
Megalinkt
Guidant
316 L
Bonne
Bonne
Moyenne
Ballon coaxial
guide 0,018 in
6 et 7 F
Bridge Stentt
Medtronic AVE
316 L
Bonne
Bonne
Moyenne
Ballon coaxial
guide 0,035 in
7F
Corinthient
Cordis
316 LVM
Bonne
Bonne
Moyenne
Ballon coaxial
0,035 in
6 et 7 F
M3t
Cordis
316 L
Bonne
Bonne
Moyenne
Ballon monorail
guide 0,014 in
6 et 7 F
Helistentt
Hexacath
316 L
Bonne
Bonne
Moyenne
Ballon coaxial
guide 0,035 in
6 et 7 F
Wave Maxt
Jostent
316 L
Bonne
Bonne
Moyenne
Ballon coaxial
guide 0,035 in
6 et 7 F
Pericot
Braun
316 L
Bonne
Bonne
Moyenne
Ballon coaxial
guide 0,035 in
6 et 7 F
Intervascular
316 L
Bonne
Bonne
Moyenne
Ballon coaxial
guide 0,035 in
6 et 7 F
Tableau III. – Caractéristiques des endoprothèses autoexpansives.
Stent
Société
Matériaux
Radio-opacité
Force radiaire
Flexibilité
Particularité
Taille desilet
Easy Wallstent
Boston Scientific
Platinium/Cobalt
Bonne
Moyenne
Bonne
Cathéter coaxial
guide 0,035 in
6 et 7 F
Easy Wallstent RP
Boston Scientific
Platinium/Cobalt
Bonne
Moyenne
Bonne
Cathéter coaxial
guide 0,035 in
6F
Dynalink
Guidant
Nitinol
Bonne
Moyenne
Bonne
Cathéter coaxial
guide 0,035 in
7F
Symphony
Boston Scientific
Nitinol
Bonne
Moyenne
Bonne
Cathéter coaxial
guide 0,035 in
7F
Smart
Cordis
Nitinol
Bonne
Moyenne
Bonne
Cathéter coaxial
guide 0,035 in
7F
Memotherm
Bard
Nitinol
Bonne
Moyenne
Bonne
Catheter coaxial
guide 0,035 in
7F
Sinus Stent
Optimed
Nitinol
Bonne
Moyenne
Bonne
Catheter coaxial
guide 0,035 in
7F
Expander
Bolton Medical
Nitinol
Bonne
Moyenne
Bonne
Cathéter coaxial
guide 0,035 in
7F
Self X
Jostent
Nitinol
Bonne
Moyenne
Bonne
Cathéter coaxial
guide 0,035 in
7F
In Stent
Vasculoil
Nitinol
Bonne
Moyenne
Bonne
Cathéter coaxial
guide 0,035 in
7F
Z Stent
Cook
Nitinol
Bonne
Moyenne
Bonne
Cathéter coaxial
guide 0,035 in
7F
Différentes dans leur conception et leur fabrication, elles répondent
à plusieurs types d’artères ou lésions. Leur développement a été
initié dans les coronaires, et nous avons maintenant à notre
disposition leurs applications périphériques.
une grande flexibilité mais retire une grande partie de leur force
radiaire. Les indications des endoprothèses filamentaires sont des
zones très angulées, des zones de bifurcation. Mais elles sont moins
efficaces dans les lésions calcifiées.
ENDOPROTHÈSES TUBULAIRES
Ce sont des stents créés à partir d’un tube en acier 316 L découpé au
laser, ou à partir de plaques d’acier 316 L également découpées au
laser, puis soudées entre elles pour former un tube. La particularité
de ces endoprothèses est leur grande force radiaire. Mais en
contrepartie, leur flexibilité est limitée. Leurs indications sont les
plaques calcifiées, ou des segments d’artère droits sans angulation
ni courbure.
ENDOPROTHÈSES FILAMENTAIRES
Leur conception est totalement différente : elles sont créées à partir
d’un fil en acier 316 L ou en tantale. Elles sont conformées en
« vague » et enfin enroulées sur elles-mêmes, ce qui leur procure
ENDOPROTHÈSES AUTOEXPANSIVES
Elles sont créées à partir d’un acier à mémoire de forme, comme le
nitinol ou le cobalt/platinium. Il s’agit d’un treillis de fils tressés
entre eux qui est ensuite compacté dans une gaine, ou d’un tube de
nitinol prédécoupé et conditionné à froid dans une gaine. Lors du
largage, ces endoprothèses se déploient à leur diamètre préétabli.
De conception très flexible, elles sont utilisées dans plusieurs
indications, angulation très prononcée d’artères, rupture d’artères,
image de caillots résiduels accrochés à la paroi. Leurs points faibles
sont un ratio métal/artère très important, un taux de resténose plus
élevé, la réticence à les appliquer à des lésions touchant les
bifurcations, un système de mise en place moins pratique que les
17
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
43-012
Techniques chirurgicales
*
A
*
B
14
Différents types d’endoprothèses.
A. Endoprothèses sur ballon.
B. Endoprothèse autoexpansive : largage par retrait de la gaine, en faisant point fixe sur le poussoir.
endoprothèses expandues par ballonnet et par conséquent un
positionnement plus difficile, en partie lié à leur degré de
raccourcissement plus important.
– Cobalt/platinium. La plupart des endoprothèses ne sont pas
ferromagnétiques afin ne pas contre-indiquer un éventuel examen
d’imagerie par résonance magnétique (IRM). L’IRM n’est d’ailleurs
pas un bon examen pour contrôler les stents [41].
ENDOPROTHÈSES MULTICELLULAIRES
OU TUBULOFLEXIBLES
Ratio métal/artère (surface de couverture)
Il est variable en fonction des types d’endoprothèses (9 à 35 %). Un
trop faible ratio diminue la force radiale du stent, à l’inverse, un
trop fort ratio métal/artère augmente les risques de resténose ou
d’occlusion thrombotique.
De conception initiale tubulaire, ces endoprothèses sont appelées
multicellulaires en raison de leurs cellules reliées entre elles par des
ponts métalliques qui leur confèrent une flexibilité plus importante.
C’est la nouvelle génération des stents tubulaires. Selon les
caractéristiques du métal, ils peuvent être largués sur ballon ou
autoexpansibles.
Propriétés des endoprothèses
CRITÈRES DE CHOIX
Un certain nombre de facteurs ont été pris en compte [16,
développement des endoprothèses.
17]
lors du
Structure métallique
– La plupart des stents sont fabriqués en acier 316 L : c’est un alliage
bien connu dans le milieu des endoprothèses, puisqu’il représente
plus de 90 % du choix des matériaux utilisés dans ce secteur. Il est
ensuite découpé au laser puis sa surface est polie. Sa découpe est
faite selon un dessin travaillé sur informatique.
– Elgiloy.
– Nitinol. Cet alliage de nickel et de titanium est utilisé pour ses
propriétés d’élasticité et de mémoire de forme. Cette dernière
propriété permet au stent de retrouver son calibre nominal à
température normale [49].
18
Radio-opacité
La radio-opacité d’une endoprothèse est importante pour son
positionnement précis au niveau de la zone à stenter. Les stents en
acier 316 L ont une bonne radio-opacité lorsqu’ils sont sertis sur le
ballon (maille fermée) mais permettent néanmoins, une fois
déployés, une bonne visualisation de l’artère, car leur radio-opacité
est alors devenue plus faible.
Force radiaire
Nous avons vu qu’elle dépend de l’architecture et du ratio
métal/artère. Les études réalisées ont démontré que les stents
devaient résister à une pression de 0,6 à 0,7 bars.
Raccourcissement
Le raccourcissement est le résultat mécanique de l’expansion d’un
tube métallique ou d’une endoprothèse autoexpansible. Ce
raccourcissement est beaucoup plus limité dans les autres
endoprothèses, en particulier multicellulaires.
Flexibilité
Elle était l’apanage des endoprothèses autoexpansibles, au détriment
de leur force radiaire, mais la position des segments de ponts sur les
différentes sinusoïdes des stents multicellulaires leur donne
Techniques chirurgicales
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
également une flexibilité, et permet ainsi d’accéder aux vaisseaux
tortueux, et d’éviter de modifier la géométrie de l’artère après
l’implantation du stent.
Profil
Le sertissage manuel sur ballon, outre le risque de migration de
l’endoprothèse (qui est surtout important quand on utilise un
ballonnet qui n’a pas encore été déployé), rend aléatoire le profil du
couple stent-ballon, même entre des mains expertes. Le très bas
profil du stent obtenu lorsqu’il est serti en machine sur le ballon
(présertissage) permet de franchir des lésions très serrées sans
friction sur les éventuelles plaques d’athéromes.
Expansion
L’expansion du stent d’une façon uniforme est très importante. Le
but est que celui-ci s’applique à la même pression sur la toute la
surface du ballon. La pression d’ouverture des endoprothèses est
souvent de l’ordre de 4 atmosphères, le diamètre nominal est atteint
à 6 atmosphères, mais l’on conseille l’implantation des stents à des
pressions de 8 à 10 atmosphères.
Il ne faut pas se fier à l’aspect du ballon, rempli de sérum mélangé à
du produit de contraste, ou à l’angiographie de contrôle (encore
moins aux gradients de pression), pour juger du caractère complet
de l’expansion de l’endoprothèse. Les contrôles en angioscopie et en
échographie endovasculaire montrent souvent des irrégularités de
calibre de l’endoprothèse, soit au niveau d’une plaque un peu plus
épaisse ou plus dure à impacter, soit aux extrémités de
l’endoprothèse : il ne faut pas hésiter à réaliser une angioplastie
complémentaire (même en cas de prothèse autoexpansible) pour
obtenir un calibre homogène sur toute la longueur de
l’endoprothèse. Les irrégularités de calibre sont d’ailleurs souvent
visibles sur les clichés sans préparation, à condition de grossir
l’image et de rendre l’endoprothèse la plus opaque possible en
faisant varier la pénétration des rayons.
Rigidité
Les partisans des stents les plus rigides arguent du fait que moins
un vaisseau est rendu compliant, moins importante sera
l’hyperplasie intimale. En outre, une endoprothèse rigide maintient
avec plus de force le calibre que l’on veut imposer à l’artère.
Cependant, la rigidité d’une endoprothèse gêne sa pose au niveau
des vaisseaux sinueux : les endoprothèses rigides sont en règle plus
courtes que les endoprothèses flexibles, ce qui oblige dans les lésions
longues à mettre en place plusieurs endoprothèses courtes, plutôt
qu’une seule endoprothèse de longueur suffisante. Quelle que soit
l’endoprothèse, la flexibilité est insuffisante pour supporter les
mouvements de flexion, ce qui contre-indique la mise en place d’une
endoprothèse au niveau d’une articulation, en particulier en regard
de l’interligne du genou.
Recoïl (retour élastique)
Le retour élastique est la conséquence logique de la résistance de la
plaque d’athérome à l’endoprothèse. Cette résistance entraîne la
diminution de diamètre du stent après la déflation du ballon. Ce
phénomène est très important, car le facteur prédictif majeur de
resténose est lié au diamètre final après angioplastie. Les données
techniques fournies par les industriels font état d’un recoïl de 0 à
7 %.
INCONVÉNIENTS DES ENDOPROTHÈSES
Thrombogénicité
Bien qu’une endothélialisation se produise à travers les mailles du
stent qui sont recouvertes en quelques semaines, la thrombose
précoce était une complication non négligeable de cette technique.
Sa fréquence est limitée par l’emploi d’un métal peu thrombogène,
par une architecture laissant aussi peu de métal que possible en
contact avec le sang circulant, et par un traitement anticoagulant
43-012
dont les modalités (antiagrégants, héparine ou antivitamine K) et la
durée restent débattues [10] , mais dont la standardisation en
pathologie coronaire [29] a permis la large diffusion de la technique :
elle repose sur un traitement antiagrégant plaquettaire associant
l’aspirine et une thiénopyridine (ticlopidine ou clopidogrel),
encadrant la procédure, et prolongé pendant au moins plusieurs
semaines. La quasi-totalité de ces endoprothèses sont électropolies à
la phase terminale de leur fabrication pour diminuer le risque
d’agrégation plaquettaire sur leur surface. Le coating des
endoprothèses par des antithrombotiques comme l’héparine [61] est
actuellement à l’étude.
Resténose
Outre la récidive de l’athérome in situ, qui est possible avec toute
technique endoluminale, un mécanisme d’hyperplasie intimale est
possible, la paroi réagissant aux forces radiaires exercées contre elle
lors de l’angioplastie, mais également par l’endoprothèse qui reste
en place. Cette réaction pariétale entraîne une resténose d’autant
plus significative que l’endoprothèse a été placée dans un vaisseau
de petit calibre. Un certain nombre de resténoses aux extrémités de
l’endoprothèse ont été notées, dans les semaines ou les mois qui
suivaient la mise en place : bien que l’on puisse évoquer une
hyperplasie myo-intimale favorisée par le changement de
compliance de la paroi artérielle [31], il est probable qu’un certain
nombre de ces sténoses sont dues à une couverture incomplète de la
lésion à traiter : les dissections induites par l’angioplastie
transluminale sont souvent plus longues que la lésion initiale, et
l’angiographie est un moyen insuffisant d’appréciation, comme l’ont
montré des corrélations avec l’angioscopie et, plus récemment, avec
l’échographie endovasculaire. Lors du traitement de lésions ostiales,
comme les sténoses de l’origine de l’iliaque primitive qui sont en
règle liées à une plaque débutant sur le carrefour aortique, il faut
laisser dépasser de quelques millimètres l’extrémité du stent en
amont de la sténose, pour éviter la persistance d’une sténose
résiduelle qui serait difficilement accessible à une angioplastie
itérative. Le coating des endoprothèses par des agents susceptibles
de prévenir la resténose [4] est actuellement à l’étude.
Perméabilité des collatérales
La faible proportion de paroi artérielle couverte est un gage
théorique de maintien de la perméabilité des collatérales. Il faut
néanmoins éviter de couvrir les bifurcations artérielles comme la
bifurcation iliaque, en raison du risque de turbulences et de
thrombose.
Sepsis
Il ne faut pas oublier que la mise en place d’endoprothèse est la
seule technique endoluminale où on laisse un corps étranger à
l’intérieur de l’artère. Même si les cas rapportés sont rares [34, 69], les
précautions d’asepsie lors de l’implantation doivent être rigoureuses,
et une antibioprophylaxie est recommandée [44].
Mise en place des endoprothèses
MISE EN PLACE D’UNE ENDOPROTHÈSE SUR BALLON
L’endoprothèse est montée repliée sur un ballon d’angioplastie. On
doit choisir la taille du ballon correspondant au calibre que l’on veut
donner à l’artère traitée, afin d’éviter toute sténose résiduelle. La
taille du ballon doit donc correspondre au calibre souhaité en cas
d’endoprothèse rigide, ou être surdimensionnée de 1 mm en cas
d’endoprothèse plus flexible qui a tendance à se resserrer un peu
après déflation du ballon.
Même s’il existe une forte probabilité d’avoir recours à une
endoprothèse dès le début de la procédure (par exemple
recanalisation d’occlusion), il vaut mieux commencer par une
angioplastie transluminale simple : la mise en place de
l’endoprothèse sans angioplastie préalable nécessiterait de la part
19
43-012
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
du ballon une force suffisante pour à la fois dilater la lésion et
assurer l’expansion de l’endoprothèse, ce qui est très aléatoire. De
plus, le passage de l’endoprothèse à frottement dur contre la paroi
artérielle exposerait à sa migration le long du ballon. Dans certains
cas, en particulier les occlusions, mais aussi les sténoses très
calcifiées, cette angioplastie première peut être réalisée à l’aide d’un
ballonnet sous-dimensionné de 1 à 2 mm.
Le largage d’une endoprothèse ressemble beaucoup à une
angioplastie transluminale simple. Il suppose un certain nombre de
précautions :
– l’extrémité distale du cathéter d’angioplastie muni de
l’endoprothèse est beaucoup moins flexible : lorsqu’on doit franchir
des sinuosités artérielles, il est préférable de passer le cathéter sur
un guide plus rigide (stiff) pour assurer une progression facile du
cathéter jusqu’à la lésion. En cas de procédure par voie
controlatérale (crossover), il peut même être prudent d’avoir recours
à un introducteur long et courbe ;
– la valve de l’introducteur risque de désolidariser l’endoprothèse
du ballon lors de son passage : on protégeait les premières
endoprothèses en interposant une gaine métallique, que l’on retirait
une fois la valve franchie par l’endoprothèse. L’amélioration des
matériaux et le sertissage préalable par les industriels, mais aussi
l’amélioration des valves d’introducteurs, rendent ce problème
beaucoup moins fréquent. Lorsqu’on doit franchir des artères
sinueuses, ce qui est souvent le cas à l’étage iliaque, le cathéter
risque de frotter contre la paroi, en provoquant une migration de
l’endoprothèse par rapport au ballon ou en provoquant des embolies
distales : il vaut mieux dans ce cas utiliser un introducteur long qui
franchit la lésion à traiter, et qui protège l’endoprothèse lors de son
positionnement au niveau de la lésion. L’introducteur est ensuite
retiré en faisant point fixe sur le cathéter ; encore faut-il s’assurer
avant inflation que le ballon sort de plusieurs centimètres de
l’introducteur pour éviter le largage de l’extrémité proximale de
l’endoprothèse dans l’introducteur ;
– l’endoprothèse est assez radio-opaque pour que son
positionnement en scopie soit aisé. Si on doit couvrir une lésion
longue par plusieurs endoprothèses, il faut toujours commencer par
couvrir la lésion la plus distale, pour éviter le passage répété du
cathéter d’angioplastie qui risquerait de déloger l’endoprothèse ;
– le largage de l’endoprothèse doit se faire par une inflation
progressive à faible pression, pour éviter une rupture du ballon : le
plus souvent 6 bars pour les endoprothèses de moins de 8 mm,
moins pour les endoprothèses de calibre supérieur. En cas de
rupture du ballon alors que l’endoprothèse est incomplètement
déployée, on peut essayer de sauver la situation en gonflant à forte
pression le ballon pour obtenir la meilleure expansion possible, puis
en dégonflant le ballon le mieux possible. On retire prudemment le
ballon en laissant le guide en place sous contrôle scopique : si
l’endoprothèse, radio-opaque, a tendance à migrer lors du retrait du
cathéter, on peut tenter une nouvelle inflation, mais il faut surtout
dégonfler patiemment le ballon, et essayer de le « décrocher » de
Techniques chirurgicales
l’endoprothèse par de petits mouvements de va et vient ou de
torsion. Une fois le cathéter retiré, il faut repasser un cathéter neuf à
travers l’endoprothèse pour obtenir son expansion complète, en
raison du risque de migration ultérieure ;
– une fois l’endoprothèse déployée, on réalise un contrôle
angiographique guide en place et un contrôle sans injection pour
dépister des irrégularités de calibre.
MISE EN PLACE D’UNE ENDOPROTHÈSE
AUTOEXPANSIBLE
On avance le cathéter jusqu’à la lésion sur un guide préalablement
mis en place. Le cathéter est en règle muni d’anneaux radioopaques, qui indiquent l’endroit où l’extrémité proximale de
l’endoprothèse sera positionnée après largage complet, et souvent
l’endroit où l’extrémité distale de l’endoprothèse sera positionnée,
ce qui est important du fait du raccourcissement lors de l’expansion.
La surveillance de ces repères en cours de largage est fondamentale
car, une fois l’expansion de l’endoprothèse débutée, on peut la
retirer, mais on ne peut pas l’avancer vers le versant distal de la
lésion, puisqu’elle est déjà en partie appliquée à la paroi. Les
systèmes de largage se sont considérablement simplifiés depuis les
premiers Wallstent, et le largage s’apparente le plus souvent à la
technique de pose des filtres caves, l’essentiel étant d’assurer le point
fixe de l’endoprothèse lors du retrait de sa gaine de protection. La
surveillance du largage en scopie, en utilisant au besoin une
magnification pour des endoprothèses peu radio-opaques, est
fondamentale. Lorsqu’on a vérifié en scopie l’expansion complète
de l’endoprothèse, on retire le cathéter en laissant le guide en place
pour vérifier l’absence de sténose résiduelle en angiographie. Très
souvent, une expansion complémentaire par un cathéter à ballonnet
est indiquée, pour assurer une impaction complète de
l’endoprothèse dans la paroi artérielle. Quand plusieurs
endoprothèses sont nécessaires pour couvrir la totalité d’une lésion,
on peut les faire se chevaucher de plusieurs millimètres sans qu’il y
ait de ressaut.
Endoprothèses couvertes
L’association d’endoprothèses classiques et de matériau prothétique
utilisé pour les pontages (polytétrafluoroéthylène [PTFE] ou
polyester) a permis de réaliser des endoprothèses couvertes :
Passagert à partir du stent de Cragg [46], Jo-stent JPSGt [18], Wallgraftt
à partir du wallstent [32]. Leur bénéfice n’a pas été démontré de façon
formelle en iliaque, et ils présentent un taux de thrombose non
négligeable en sous-inguinal, qui pourrait être amélioré par un
traitement antithrombotique adapté.
Des endoprothèses couvertes de conception originale comme
l’Hémobahnt ont donné des résultats cliniques prometteurs [50], à
condition d’un résultat suffisant de la recanalisation première et de
l’angioplastie de la lésion occlusive à traiter.
Traitement des thromboses artérielles
Thrombolyse médicamenteuse
Depuis le premier cas de thrombolyse locorégionale rapporté en
1971 [12], la streptokinase (SK), l’urokinase (UK) et de nouvelles
molécules comme l’activateur tissulaire du plasminogène (tPA) ont
été administrées par l’intermédiaire d’un cathéter positionné au
voisinage de la lésion dans le traitement des occlusions
thrombotiques et emboliques, primitives, et secondaires à un
pontage ou à un traitement endoluminal. Notre propos n’est pas de
20
discuter les indications de la thrombolyse locorégionale, mais
d’exposer les différents schémas thérapeutiques. Il est important de
garder à l’esprit qu’aucune technique n’assure d’administration
vraiment sélective du thrombolytique [37] : ni les complications
hémorragiques générales, parfois mortelles, ni les complications
locales (hématomes au point de ponction nécessitant parfois une
hémostase chirurgicale) ne sont directement liées à la dose horaire,
à la dose totale, ou aux paramètres biologiques de surveillance. Un
strict respect des contre-indications des thrombolytiques est donc de
mise [51].
Techniques chirurgicales
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
*
A
43-012
*
B
*
C
15
Thrombolyse locorégionale : modalités d’administration.
A. Infusion en amont du thrombus par guide à âme amovible ou cathéter.
B. Cathéter multifenêtré assurant la perfusion au sein du thrombus.
C. Cathéter à double ballonnet de Tonnesen.
AGENTS THROMBOLYTIQUES
¶ Streptokinase (SK)
C’est une protéine d’origine bactérienne dont la demi-vie est de 30
minutes. Son administration suscite une réponse antigénique en 5
jours pour une durée de 4 à 6 mois. Les protocoles varient suivant
les auteurs : certains débutent par un bolus, puis la dose horaire
varie entre 2 000 et 30 000 U/h, la dose totale entre 25 000
et 1 700 000 U. La dose horaire la plus couramment utilisée est
5 000 U/h.
¶ Urokinase (UK)
C’est une protéine extraite de l’urine humaine dont la demi-vie
biologique est de 10 minutes, et qui ne suscite pas de réaction
antigénique. Alors qu’elle est administrée à forte dose par voie
systémique dans l’infarctus du myocarde (2 à 3 MU en 60 à 90
minutes), les doses d’administration par voie locorégionale sont en
règle dix fois moindres. Il existe de nombreux protocoles, certains
auteurs recommandant l’association avec le lysyl-plasminogène [63] :
le protocole le plus souvent appliqué est celui de McNamara [40] qui
injecte une dose de 4 000 U/min tant que l’occlusion artérielle est
totale, puis 1 000 à 2 000 U/min dès la levée partielle de l’occlusion.
¶ Activateur tissulaire du plasminogène (tPA)
C’est une protéine sérique normalement présente à faible
concentration chez l’homme, qui est maintenant synthétisée par
génie génétique. Sa demi-vie biologique est de 3 à 5 minutes. Alors
qu’elle est administrée à forte dose par voie systémique dans
l’infarctus du myocarde (1 mg/kg en 90 à 180 minutes), la dose
horaire étudiée en thrombolyse artérielle [62] varie entre 3 et 10 mg/h,
éventuellement précédée d’un bolus de 5 à 10 mg. Bien que ce
thrombolytique soit censé être plus spécifique que SK et UK, des
accidents hémorragiques ont été rapportés avec une fréquence
sensiblement identique avec ces trois agents. La corrélation de ces
accidents avec une baisse du taux de fibrinogène est beaucoup
moins fréquente en cas d’utilisation du tPA.
¶ Surveillance biologique
Il n’y a pas de corrélation formelle entre le risque hémorragique
local ou à distance, et les paramètres biologiques. Le temps de
procédure, l’utilisation d’héparine, et la taille des introducteurs
utilisés ont également une influence.
Le bilan d’hémostase initial doit comprendre un taux de
prothrombine (TP), un temps de céphaline activé (TCA), un temps
de thrombine (TT), un dosage de fibrinogène (Fg), une numération
globulaire et plaquettaire, en évitant de faire un temps de
saignement, en raison du risque important de reprise du saignement
si le traitement thrombolytique est actif. La prudence est de répéter
un dosage de fibrinogène et un temps de céphaline + activateur
toutes les 4 heures pendant le traitement, puis 1 heure et 4 heures
après la fin de celui-ci, pour évaluer l’efficacité et le risque
hémorragique. Un taux de fibrinogène inférieur à 1g/L ou chutant
de plus de 50 % de sa valeur initiale, un allongement du TCA
supérieur à 2,5 fois le temps du témoin (interprétable si Fg > 1g/L)
indiquent l’arrêt ou la modification de posologie du traitement.
MODALITÉS D’ADMINISTRATION (fig 15)
L’agent thrombolytique peut être administré en amont du thrombus
ou au sein de celui-ci à l’aide d’un guide ou d’un cathéter fin. Nous
avons vu que des guides 0,035 inches à âme amovible permettent
l’infusion d’une solution thrombolytique par leur extrémité distale
ou par des orifices latéraux après retrait de l’âme. Des cathéters fins
d’angiographie, 4 ou 5 F, perforés sur une plus ou moins grande
hauteur [24] avec une extrémité distale éventuellement borgne,
permettent l’infusion de thrombolytique sur toute la hauteur de
l’occlusion, ou en amont de celle-ci selon leur position. L’injection
d’une certaine quantité de thrombolytiques en amont éviterait les
thromboses sur cathéter, qui se voient surtout en cas de thrombolyse
prolongée. Hess [23] a montré que si on suit en scopie la progression
de la thrombolyse en avançant régulièrement le cathéter dans
l’occlusion, on réduit le temps de procédure.
Deux éventualités sont possibles :
– si le guide ou le cathéter butent au niveau de l’occlusion, on peut
choisir d’administrer le thrombolytique juste en amont de
l’occlusion, pour éviter de s’engager dans un faux chenal. On avance
le cathéter en fonction des progrès de la thrombolyse, jusqu’à passer
l’occlusion. Une fois l’occlusion franchie, on peut, selon l’estimation
que l’on fait de la quantité de thrombus résiduel :
– poursuivre l’infusion de thrombolytique au niveau de la zone
recanalisée, l’arrêt de la thrombolyse étant alors décidé en cas
d’absence d’amélioration du calibre artériel ;
– compléter la thrombolyse par une thrombectomie, une
thrombolyse mécanique ou une angioplastie transluminale, qui
impacte le thrombus résiduel en même temps que la lésion
athéromateuse sous-jacente ;
– si l’occlusion est franchie en totalité, on peut procéder de plusieurs
façons :
– infiltrer le thrombus sur toute sa hauteur par un bolus de
thrombolytique avant de commencer l’infusion ;
– positionner un cathéter fenêtré sur toute la hauteur du
thrombus et procéder à une infusion continue ;
– réaliser une thrombolyse « pulsée » pharmacomécanique [60] en
répétant des micro-injections sous pression, faisant pénétrer le
thrombolytique dans le thrombus, toutes les minutes ;
– Tonnesen [28] a proposé un cathéter à deux ballonnets que l’on
positionne de part et d’autre de la lésion pour limiter le plus
possible la diffusion systémique de l’agent thrombolytique, qui
est administré entre les deux ballons.
Thrombectomie mécanique
Des procédés d’extraction, d’aspiration, de fragmentation du
thrombus ont été développés comme alternative ou comme
21
43-012
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
*
A
*
B
*
C
Techniques chirurgicales
une résistance au retrait du cathéter. Cette inflation suffit en règle
pour permettre une thrombectomie dans de bonnes conditions.
Lorsqu’on perçoit une résistance plus importante au cours du retrait
du cathéter, il convient de relâcher légèrement la pression de façon
à éviter de créer une lésion pariétale, en particulier lors des
thrombectomies sur artères athéromateuses. Sur les cathéters de petit
calibre, certains recommandent le gonflage du ballonnet à l’air plutôt
qu’au sérum physiologique, de façon à avoir une sensation plus fine
du gonflage ;
– il est souvent inutile de multiplier les passages pour que la
thrombectomie soit complète. Si le cathéter ne ramène pas de
thrombus ou si le reflux n’est pas satisfaisant, il est recommandé de
réaliser une artériographie ou une angioscopie pour localiser un
thrombus résiduel ou une lésion sous-jacente qui peut justifier un
geste complémentaire, thrombectomie à l’aide d’un autre cathéter
ou geste chirurgical associé.
¶ Autres cathéters de thrombectomie
Cathéter double-lumière (thru-lumen)
*
D
16
Cathéters de thromboembolectomie de Fogarty.
A. Cathéter à ballonnet.
B. Cathéter à double lumière.
C. Cathéter ACCt.
D. Cathéter pour thrombectomie de pontage.
complément de la thrombolyse médicamenteuse. À côté de
l’angioplastie transluminale ou de certains athérotomes, différents
procédés ont été développés, depuis la sonde à ballonnet de Fogarty,
utilisée depuis 1963 [21], que l’on pourrait considérer comme le
précurseur des techniques endoluminales, jusqu’à des procédés de
fragmentation du thrombus encore en voie d’évaluation. Ces
différentes techniques peuvent être utilisées à travers une
artériotomie, mais également dans certains cas par voie percutanée,
à condition que l’on soit sûr d’éviter toute embolie distale (en
particulier lorsqu’on réalise la thrombectomie sans interrompre
totalement le flux sanguin), et à condition de pouvoir retirer le
matériel thrombotique à travers un cathéter ou un introducteur de
taille suffisante.
CATHÉTERS DE FOGARTY (fig 16)
Lors des thrombectomies sur artères athéromateuses, il existe un
risque de dissection lors de l’introduction du cathéter. L’extrémité
du cathéter est courte et effilée, mais elle n’est pas toujours centrée
par rapport à l’artère : on doit donc se méfier quand on rencontre
une résistance, alors que la traversée d’un thrombus est souvent
facile. Des cathéters coaxiaux d’embolectomie existent dans les
mêmes tailles que les cathéters d’embolectomie simples, pourvus
d’une lumière centrale autorisant le passage d’un guide de 0,013 à
0,035 inches. Devant une occlusion sur artère pathologique, il est
plus prudent de passer d’abord un guide, puis le cathéter, et de
vérifier, après retrait du guide, que l’on est bien dans la vraie
lumière artérielle par une angiographie à travers le cathéter.
Cathéter pour thrombus adhérent (Adherent Clot Cathetert)
Sur ce cathéter, le ballon est remplacé par une double spirale
métallique gainée de latex, dont on peut régler le calibre grâce à une
manette à l’extrémité proximale du cathéter. La spirale se moule sur
la paroi artérielle, et les forces de friction se répartissent sur toute la
hauteur de la spirale. Ce cathéter existe en trois tailles (7 à 9 F)
permettant des thrombectomies dans des artères de 6 à 10 mm.
Cathéter pour thrombectomie de pontage
Il est constitué comme le précédent d’une double spirale, qui peut
être expandue à 14 ou à 16 mm. Il permet une thrombectomie de
pontage à frottement dur, la spirale n’étant pas gainée de latex.
¶ Cathéter pour embolectomie artérielle
Il s’agit d’un cathéter pourvu à son extrémité d’un ballon en latex,
qui peut être gonflé par injection de sérum physiologique à son
extrémité proximale. Il en existe plusieurs tailles, de 2 F à 7 F, chaque
taille correspondant à un ballon de calibre allant de 4 mm à 14 mm,
pour une contenance de 0,2 à 5 mL. Il est important de bien
connaître la contenance de chaque ballon de façon à éviter tout
surgonflage, qui entraînerait une hyperpression sur la paroi artérielle
et risquerait de faire éclater le ballon. Après introduction du cathéter
dans l’artère jusqu’en aval de l’occlusion, on gonfle le ballonnet et
l’on retire le cathéter en maintenant le ballonnet gonflé.
Afin d’éviter les complications pariétales liées au retrait du cathéter
(fracture de plaque, voire rupture artérielle ; hyperplasie intimale
secondaire), il convient de prendre plusieurs précautions :
– dans le traitement d’occlusions longues, il est prudent de réaliser
la thrombectomie en plusieurs fois, de façon à éviter des forces de
friction trop importantes sur la paroi ;
– il n’est pas toujours nécessaire de gonfler le ballon au maximum.
On teste le ballon avant introduction du cathéter, pour se rendre
compte de la quantité de liquide nécessaire à provoquer un début
d’inflation du ballon. Une fois le cathéter en place, le ballon étant en
aval de l’occlusion, on gonfle très progressivement, jusqu’à sentir
22
INSTRUMENTATION ENDOLUMINALE
Le développement de l’angioscopie a permis d’améliorer certaines
procédures de thrombectomie [71] , en évitant le recours à des
angiographies répétées en cours de procédure. L’enthousiasme
initial pouvait faire espérer l’avènement d’une instrumentation
endoluminale spécifique qui aurait permis de développer de
nouvelles techniques sous contrôle de la vue. Les résultats ont été
décevants, même si certains instruments comme des pinces à
préhension ou des sondes de Dormia peuvent être utilisés dans des
cas particuliers. L’utilisation des anneaux de Vollmar sous contrôle
angioscopique permet l’ablation des dépôts de fibrine et des thrombi
adhérents, qui résistent souvent au passage de la sonde de Fogarty
dans les thrombectomies de prothèse [33].
THROMBOLYSE MÉCANIQUE
Un certain nombre de systèmes de fragmentation du caillot [43] par
hydrodissection, rotation, vibration ou ultrasons ont été développés.
S’ils ont prouvé une certaine efficacité dans les thromboses d’accès
d’hémodialyse, leur efficacité et leur innocuité en raison du risque
de traumatisme pariétal et d’embolies distales qu’ils comportent
restent à démontrer au niveau des membres inférieurs.
Techniques chirurgicales
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
43-012
*
A
*
B
17
Thromboaspiration.
A. De gauche à droite : emboles récents multiples du trépied jambier ; résultat après thromboaspiration des différents emboles.
B. Embolie poplitée sur artère athéromateuse : récupération d’un trépied jambier perméable après thromboaspiration sur guide hydrophile.
THROMBOASPIRATION
La thrombectomie par aspiration (fig 17) a été développée
initialement pour compléter les thrombolyses incomplètes, ou pour
traiter les complications emboliques des angioplasties
transluminales [66]. Elle peut être employée comme alternative à la
sonde de Fogarty ou à la thrombolyse dans les embolies d’origine
cardiaque, voire dans les thromboses sur artères athéromateuses.
Le thrombus peut être aspiré à l’intérieur du cathéter ou
« ventousé » à l’extrémité distale de celui-ci, quand le thrombus est
trop dur ou trop volumineux pour être remodelé par l’aspiration.
C’est dans ce dernier cas que l’extraction du thrombus de l’artère
peut être difficile. Deux solutions existent :
– on peut réaliser un court abord chirurgical et réaliser la procédure
par une artériotomie transversale que l’on referme à points séparés
de Prolènet ;
– l’utilisation d’introducteurs de 8 à 10 F à valve amovible permet
de réaliser la thromboaspiration en percutané.
Les cathéters utilisés doivent avoir un calibre suffisant pour assurer
une aspiration efficace. On peut utiliser un cathéter droit ou un
cathéter légèrement angulé. Certains cathéters, utilisés en
coronarographie, ont une paroi très fine et sont munis d’une
extrémité plus souple (soft tip), moins traumatisante lors de la
progression dans l’artère : un exemple est le cathéter « Judkins
droit », qui pour un calibre externe de 8 F (2,6 mm) a une lumière
interne de 0,078 inches (2 mm) et permet la plupart des
thrombectomies fémoropoplitées. Pour descendre dans les artères de
jambe, des cathéters de 5 ou 6 F sont préférables.
Il vaut mieux débuter la procédure sous scopie : après avoir repéré
le niveau du thrombus par une injection de produit de contraste, on
commence par passer un guide hydrophile en aval, et on descend le
cathéter de thromboaspiration sur le guide, pour minimiser le risque
de traumatisme pariétal. On retire alors le guide et on assure
l’aspiration en connectant une seringue de 20 mL à l’embout Luer à
l’extrémité proximale du cathéter. Un cathéter légèrement angulé est
utile en cas d’artères sinueuses ou de thrombus marginé.
La thromboaspiration n’est pas toujours aisée. En cas de thrombus
ancien partiellement adhérent, on peut commencer par injecter
quelques millilitres de sérum hépariné sous pression pour détacher
le thrombus : le risque embolique est minime tant que le thrombus
n’est pas fragmenté. Certains utilisent la thromboaspiration couplée
à la thrombolyse. D’autres préconisent une angioplastie
transluminale préalable pour fractionner ou ramollir le thrombus,
ou une angioplastie complémentaire si persiste un thrombus
marginé partiellement sténosant.
23
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
43-012
Techniques chirurgicales
Indication des différentes techniques
Angioplastie transluminale
L’angioplastie transluminale par ballonnet reste la technique
endoluminale de référence pour le traitement des sténoses et
occlusions athéromateuses dans les cas simples, où elle a fait preuve
de son efficacité et de son innocuité. Ses résultats sont actuellement
bien établis, et ont été étudiés dans le Transatlantic Intersociety
Consensus (TASC) [59] entre les différentes sociétés de radiologie et
de chirurgie vasculaire à l’échelon international.
ÉTAGE ILIAQUE
À l’étage iliaque, Johnston [26] avait depuis longtemps souligné
l’influence du caractère (occlusion ou sténose), de la localisation
(iliaque primitive ou externe), de la longueur de la lésion, du stade
clinique et du lit d’aval sur les résultats à long terme. Le taux de
complications est de 3 à 6 %, et le taux de succès technique est de
95 % à 83 % selon que l’on traite une sténose ou une occlusion [59].
Les taux de perméabilité [59] (échecs techniques inclus), sont le plus
souvent basés sur la mesure des index de pression systolique au
cours de l’évolution : 78 % et 68 % à 1 an, 66 % et 60 % à 3 ans, selon
que l’on a traité une sténose ou une occlusion.
Dans une méta-analyse récente, Bosch [8] a montré une réduction par
les endoprothèses du risque relatif d’échec à long terme de 39 %. Le
recours de principe aux endoprothèses ne semble pas justifié, mais
on leur reconnaît les indications suivantes :
– résultat hémodynamique insuffisant par resténose élastique
immédiate évaluée par mesure du gradient de pression ;
– dissection sténosante à l’artériographie de contrôle ;
– traitement des occlusions chroniques ;
– ulcérations artérielles symptomatiques (athéroembolisme) ;
– resténoses après angioplastie ;
– lésions complexes.
Les indications lésionnelles à l’échelon aorto-iliaque ont été définies
en quatre groupes par le consensus TASC [59] (tableau IV) (fig 18). Le
groupe A correspond aux indications préférentielles de l’angioplastie
transluminale, alors que le groupe D correspond aux indications de
la chirurgie conventionnelle. Il n’y a pas de consensus concernant
les lésions des groupes B et C, même si les sociétés de radiologie
Tableau IV. – Classification lésionnelle à l’étage iliaque en quatre
types, de moins en moins favorables au traitement endoluminal du
type A au type D, d’après le Transatlantic Intersociety Consensus [59]
(cf fig 18).
• Type A
• Type B
• Type C
• Type D
24
1. sténose unique < 3 cm de l’iliaque primitive (IP) ou de l’iliaque
externe (IE) (unilatérale/bilatérale)
2. sténose unique de 3 à 10 cm ne s’étendant pas à la fémorale
commune (FC)
3. deux sténoses < 5 cm de l’IP et/ou de l’IE ne s’étendant pas à la
FC
4. occlusion IP unilatérale
5. sténoses bilatérales < 5 cm de l’IP et/ou de l’IE ne s’étendant pas
à la FC
6. occlusion IE unilatérale ne s’étendant pas à la FC
7. sténose IE unilatérale s’étendant à la FC
8. occlusion IP bilatérale
9. sténoses diffuses multiples unilatérales étendues à l’IP, l’IE et la
FC (habituellement > 10 cm)
10. occlusion unilatérale de l’IP et de l’IE
11. occlusions IE bilatérales
12. lésions diffuses de l’aorte et des deux artères iliaques
13. sténoses iliaques chez un patient ayant un anévrisme aortique,
ou une autre indication à une chirurgie aorto-iliaque
18
Classification lésionnelle à l’étage iliaque en quatre types, de moins en moins favorables au traitement endoluminal du type A au type D, d’après le Transatlantic Intersociety Consensus [59]. Noter que toutes les lésions ne sont pas représentées.
Type A : traitement électif endovasculaire ; type B : traitement endovasculaire le
plus souvent employé, mais preuves insuffisantes pour une recommandation ;
type C : traitement chirurgical le plus souvent employé, mais preuves insuffisantes pour une recommandation ; type D : traitement électif chirurgical.
insistent sur le fait que le traitement endovasculaire est celui qui est
le plus souvent réalisé. Il est probable que c’est dans ces lésions que
le recours aux endoprothèses permet d’améliorer les résultats du
traitement endovasculaire.
ÉTAGE FÉMOROPOPLITÉ
À l’étage fémoropoplité, les résultats du traitement des lésions
étendues sont plus décevants [11, 27]. Les résultats sont moins bons en
cas d’occlusion qu’en cas de sténose, mais cette différence a tendance
à s’atténuer dans les séries récentes. C’est surtout l’état du lit d’aval
qui conditionne la pérennité des résultats. Le problème essentiel
reste de définir, sur l’artériographie préopératoire [48], l’étendue des
lésions au-delà desquelles une recanalisation endoluminale est
déraisonnable. Le consensus TASC [59] définit quatre groupes de A à
D (tableau V) (fig 19), comme à l’étage iliaque, en indiquant que la
chirurgie est le traitement de choix pour les occlusions de plus de
5 cm (groupe D). Dans la littérature, la longueur des occlusions est
fixée à 5,8 cm voire 10 cm selon les auteurs, mais il est rare qu’ils
Techniques chirurgicales
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
43-012
Tableau V. – Classification lésionnelle à l’étage fémoropoplité en
quatre types, de moins en moins favorables au traitement endoluminal du type Aau type D, d’après le Transatlantic Intersociety Consensus [59] (cf fig 19).
• Type A
• Type B
• Type C
• Type D
1. sténose fémoropoplitée unique < 3 cm (unilatérale/bilatérale)
2. sténose unique de 3 à 5 cm sauf sur la poplitée distale (les
sociétés de radiologie, soulignant que les résultats notés dans la
littérature ancienne sont plus liés à des échecs techniques qu’à des
différences de perméabilité à long terme, proposent, en raison de
l’amélioration des techniques de cathétérisme : sténose unique de 3 à
10 cm y compris la poplitée distale)
3. sténoses très calcifiées < 3 cm
4. lésions multiples, chacune de moins de 3 cm
5. lésions uniques ou multiples sans lit d’aval tibial, afin d’améliorer l’axe donneur d’un pontage distal éventuel
6. sténose ou occlusion unique > 5 cm (les sociétés de radiologie,
soulignant que les résultats notés dans la littérature ancienne sont
plus liés à des échecs techniques qu’à des différences de perméabilité à long terme, proposent, en raison de l’amélioration des techniques de cathétérisme : sténose ou occlusion unique < 10 cm)
7. sténoses ou occlusions multiples, chacune de 3 à 5 cm, avec ou
sans calcifications sévères
8. occlusion complète de la fémorale commune, ou occlusions
fémorales superficielles, ou occlusion complète de la poplitée et du
trépied jambier
20
Angioplastie en « kissing balloon » de deux sténoses ostiales d’artères de jambe
(cathéters Monoraily).
l’échelon fémoropoplité, mais le consensus TASC [59] leur reconnaît
un rôle limité dans le traitement des échecs ou complications de
l’angioplastie.
– Au stade de claudication : le principal argument pour traiter des
lésions segmentaires est la possibilité de les voir se transformer en
occlusion fémoropoplitée. Cette éventualité semble rare, mais peut
justifier l’angioplastie de telles lésions chez les sujets jeunes, à
condition d’obtenir de leur part une suppression des facteurs de
risque. L’angioplastie est également défendable chez les patients
chez qui la réentrée poplitée est médiocre, soit parce que la lésion
touche la poplitée au voisinage de l’interligne articulaire, soit parce
que la fémorale profonde est très pathologique.
– Au stade d’ischémie critique, les patients présentent souvent des
lésions à plusieurs étages : le traitement d’une atteinte
fémoropoplitée peut permettre de passer un cap, seul ou associé à
un geste de revascularisation chirurgicale ou endoluminale à l’étage
aorto-iliaque. En fonction du profil lésionnel, il faut considérer le
bénéfice respectif de chaque traitement : l’angioplastie d’une lésion
segmentaire peut être préférable à un pontage long sur un lit d’aval
aléatoire ; à l’inverse, un pontage présentant de bonnes chances de
succès à moyen terme est préférable à l’angioplastie de lésions
étendues.
19
Classification lésionnelle à l’étage fémoropoplité en quatre types, de moins en
moins favorables au traitement endoluminal du type A au type D, d’après le Transatlantic Intersociety Consensus [59]. Noter que toutes les lésions ne sont pas représentées.
Type A : traitement électif endovasculaire ; type B : traitement endovasculaire le
plus souvent employé, mais preuves insuffisantes pour une recommandation ;
type C : traitement chirurgical le plus souvent employé, mais preuves insuffisantes pour une recommandation ; type D : traitement électif chirurgical.
distinguent les occlusions thrombotiques en amont d’une lésion
segmentaire des occlusions athéromateuses étendues. Par ailleurs, le
terme de lésions « diffuses » est rarement précisé : il est certain que
l’évolutivité d’une fémorale superficielle de petit calibre, siège de
sténoses étagées, à la limite de la significativité quand on les
examine séparément, laisse peu d’espoir. Quant aux lésions
segmentaires, on peut se poser la question du bien-fondé de leur
traitement, car la plupart des patients présentant ce type de lésions
sont ou deviendront rapidement asymptomatiques. Des critères de
prédictibilité hémodynamiques (pressions distales, réentrée
poplitée), anatomiques (état du lit d’aval, de la fémorale profonde),
et le contexte clinique du patient, sont autant d’aides à la décision
thérapeutique. Il n’existe aucun argument dans la littérature pour
défendre le recours de première intention aux endoprothèses à
ARTÈRES DE JAMBE (fig 20)
Les risques à court terme et les résultats à moyen terme de
l’angioplastie sur des artères de petit calibre ne justifient pas le
traitement des lésions des artères de jambe chez des patients au
stade de claudication [55], d’autant que ce sont rarement ces lésions
qui sont responsables de claudication : soit il existe une lésion
proximale qu’il convient de traiter, soit il existe une artériopathie
plus distale avec des résistances périphériques élevées, que ne
modifiera pas le traitement. En revanche, au stade d’ischémie
critique [9], l’angioplastie peut être discutée comme alternative ou
comme complément des revascularisations fémoropoplitées ou
fémorojambières. Enfin, dans le suivi évolutif des pontages,
l’angioplastie d’une sténose anastomotique ou d’une lésion
segmentaire sous-jacente peut être mise en balance avec une
« retouche » chirurgicale parfois aléatoire. Le consensus TASC [59]
propose une stratification des lésions comme aux autres étages de A
àD:
– type A : sténose unique de moins de 1 cm ;
– type B : sténoses focales multiples de moins de 1 cm ; une ou deux
sténoses de moins de 1 cm du trépied jambier ; sténose courte
associée à une angioplastie fémoropoplitée ;
25
43-012
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
Techniques chirurgicales
*
A
21
Traitement endoluminal des occlusions artérielles :
bons résultats.
A. Occlusion poplitée : recanalisation au guide hydrophile et angioplastie transluminale.
B. cclusion iliaque primitive : résultat après angioplastie et mise en place d’une endoprothèse Wallstent.
*
B
– type C : sténoses de 1 à 4 cm de longueur ; occlusions de 1 à 2 cm ;
sténose étendue du trépied jambier ;
– type D : occlusions de plus de 2 cm ; atteinte diffuse.
Alternatives à l’angioplastie
Certains profils lésionnels sont responsables d’échecs techniques
initiaux de l’angioplastie ou de détérioration du résultat à court ou
moyen terme. C’est dans ces indications que le recours à des
techniques complémentaires doit être mis en balance avec
l’indication d’une chirurgie vasculaire plus traditionnelle. Chacune
des technologies nouvelles développées n’ayant trouvé d’indication
que dans un profil lésionnel particulier, l’angiographie seule ne
représente pas un facteur décisionnel suffisant. Le recours à des
examens préopératoires, comme l’échographie couplée au doppler
couleur (même si ses résultats dépendent de la qualité de
l’opérateur), ou peropératoires, comme l’étude des gradients de
pression ou l’échographie endovasculaire, semble licite dans bien
des cas (même si ces examens entraînent un surcoût et un
allongement du temps de procédure).
26
OCCLUSIONS
Le traitement d’occlusions segmentaires peut être simple et obtenir
un résultat durable (fig 21), mais on ne doit pas perdre de vue qu’il
peut exposer à des complications et à des échecs (fig 22). La
recanalisation d’une occlusion impose donc l’analyse rigoureuse de
ses caractéristiques en fonction du contexte clinique (durée de la
symptomatologie, état prothrombotique), de l’artériographie (lésions
controlatérales symétriques à un stade plus précoce, aspect des
artères à distance du site lésionnel plus que les caractères de la lésion
elle-même) et des données de l’échographie doppler (qui permet une
analyse plus fine de la structure pariétale, de la répartition des
calcifications éventuelles, et de l’existence de matériel endoluminal).
On peut ainsi distinguer plusieurs situations.
Occlusions thrombotiques
Le traitement du thrombus permet souvent de simplifier le profil
lésionnel, la lésion causale étant bien souvent une lésion
segmentaire. Une thrombolyse, médicamenteuse ou mécanique, ou
une thromboaspiration, peuvent être complétées par une
angioplastie transluminale simple, voire par la mise en place d’une
endoprothèse pour limiter le risque embolique devant un thrombus
marginé résiduel irrégulier.
Techniques chirurgicales
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
43-012
*
B
*
A
22
Traitement endoluminal des occlusions artérielles : complications.
A. Recanalisation d’occlusion iliaque primitive gauche : embolie iliaque externe droite (côté asymptomatique).
B. Recanalisation dans un plan de dissection d’une occlusion iliaque : la mise en place d’endoprothèse aboutit au maintien à distance de la perméabilité du faux chenal, avec
évolution sur un mode ectasique (dont témoigne l’éloignement entre « vraie » et « fausse » iliaques primitives droites).
Occlusions calcifiées
Le seul athérotome efficace sur les lésions calcifiées est le
Rotablatort, qui peut permettre de se passer d’angioplastie sur les
artères de petit calibre, mais son usage a été limité par son coût et
par l’absence de résultats cliniques probants. On peut néanmoins
tenter une angioplastie, en sachant que le risque de fracture de
plaque oblige souvent à la mise en place d’une endoprothèse. C’est
sur les artères calcifiées que le risque de rupture est le plus
important : il justifie des précautions lors de l’inflation du ballonnet,
certains auteurs prônant une prédilatation à l’aide d’un ballon de
petit calibre, et le stenting de principe. Les résultats préliminaires
des endoprothèses couvertes demandent toujours à être confirmés.
l’inverse, une greffe veineuse occluse est peut-être traitée avec moins
de dégâts pariétaux par thrombolyse que par thrombectomie
mécanique ou chirurgicale, d’autant qu’une anomalie segmentaire
responsable de l’occlusion, identifiée par l’artériographie de
contrôle, peut être traitée dans le même temps par angioplastie.
LÉSIONS DIFFUSES
Quelle que soit la technique utilisée, les résultats sont décevants à
court (risque de thrombose extensive) ou moyen terme (resténose).
L’utilisation de stents longs ou étagés ne se justifie que dans un
contexte de sauvetage de membre, dans les cas peu favorables à la
chirurgie conventionnelle.
Occlusions fibreuses-plaques complexes
Le recours aux endoprothèses est licite en cas d’artères de gros
calibre (aorte, iliaques). Leur résultat est plus décevant au niveau
des artères fémorale et poplitée (en particulier au pli de flexion), et
mal évalué au niveau des artères de jambe (un parallèle avec les
coronaires serait tentant, en raison d’un calibre identique, mais les
différences de structure pariétale, de régime hémodynamique, et
surtout le caractère diffus des lésions incitent à la prudence).
Occlusions longues
Le recours aux endoprothèses multiples donne des résultats qui se
détériorent rapidement, et pose des problèmes de coût par rapport
à la chirurgie traditionnelle. Certains auteurs [7, 35] sont partisans de
l’angioplastie sous-intimale, en particulier dans les situations
d’ischémie critique : ce mode de recanalisation n’est pas couplé à la
mise en place d’endoprothèses, mais le résultat hémodynamique,
jugé sur la rapidité de progression du produit de contraste à
l’artériographie de contrôle, doit être bon. Au moindre doute, une
angioplastie itérative est indiquée.
Occlusions de pontages
Les bons résultats cliniques de la thrombolyse par rapport à la
chirurgie, en cas d’occlusion vue tôt (moins de 14 jours) sont
tempérés par la possibilité d’incidents hémorragiques, et surtout par
des résultats sensiblement équivalents à moyen terme. Les deux
options thérapeutiques ne dispensent pas du traitement de
l’étiologie de l’occlusion. La thrombectomie mécanique d’un pontage
dans le même temps qu’un prolongement de celui-ci ou que la
correction d’une anomalie anastomotique est parfaitement licite. À
ATHÉROEMBOLISME
Des publications, généralement sans suivi clinique à long terme, ont
fait état du traitement par athérectomie des artériopathies
emboligènes [13].
Même si la mise en place d’une endoprothèse peut se compliquer
d’embolies distales, ce traitement est à mettre en balance avec les
solutions beaucoup plus « lourdes » de la chirurgie classique
(endartériectomie ou pontage-exclusion).
COMPLICATIONS DE L’ANGIOPLASTIE
TRANSLUMINALE
La survenue d’une complication limitée au cours d’une angioplastie
doit faire mettre en balance le bénéfice éventuel, le coût et le risque
propres à la procédure complémentaire qu’on envisage. Il est parfois
plus sage de se contenter d’un échec technique qui n’aggrave pas le
patient, ou de se tourner vers une intervention chirurgicale de
réalisation simple, que de se laisser guider par un « vertige
technique » qui peut conduire à une situation irréparable.
Complications thromboemboliques
Selon la localisation et l’étendue des lésions, on discute une
thrombectomie, une thromboaspiration ou une thrombolyse, en
gardant présent à l’esprit le risque hémorragique de celle-ci.
Complications pariétales
Certaines fractures de plaque sont accessibles à une endoprothèse,
dont la mise en place doit être discutée également si des lésions
27
43-012
Techniques endovasculaires appliquées aux artères des membres inférieurs
plus diffuses résistent à une angioplastie itérative. En cas de rupture
artérielle évoquée devant une douleur à l’inflation, une chute de
tension, et visualisée par une fuite de produit de contraste, le
premier geste est d’assurer l’hémostase en regonflant le ballon
d’angioplastie. On a alors le choix entre une chirurgie d’hémostase,
ou la mise en place d’une endoprothèse, couverte ou non [30].
Resténoses
Elles peuvent être accessibles à une angioplastie itérative ou à une
athérectomie [64], mais surtout à la mise en place d’une endoprothèse.
Les traitements médicamenteux, surtout étudiés en coronaire, n’ont
pas encore fait preuve d’une efficacité miraculeuse. La radiothérapie
endocavitaire est en voie d’évaluation. La survenue d’une resténose
Techniques chirurgicales
sur une artère de petit calibre laisse néanmoins mal augurer du
maintien de la perméabilité à long terme du site traité.
Conclusion
L’essor du traitement des anévrismes artériels par des endoprothèses
couvertes, la discussion de nouvelles applications comme les troncs
supra-aortiques, les progrès réalisés en pathologie coronaire, ont
bénéficié aux techniques endoluminales appliquées aux membres
inférieurs. Dans l’arsenal thérapeutique du chirurgien vasculaire,
l’angioplastie transluminale a maintenant une place bien établie : ses
indications cliniques et lésionnelles sont maintenant bien codifiées, bien
distinctes du mauvais réflexe « oculosténotique ». L’essor de la
chirurgie endoluminale continuera probablement à susciter recherches
et polémiques dans les années à venir.
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29
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 43-022
43-022
Médicaments antithrombotiques
en chirurgie vasculaire
SX Racine
CM Samama
Résumé. – La thrombose artérielle représente la première complication de la chirurgie vasculaire. Aux lésions
préexistantes des vaisseaux sanguins pathologiques s’ajoutent celles liées à la chirurgie (mise à nu du sousendothélium, stase sanguine au clampage, ischémie locale) qui induisent les mécanismes d’activation
plaquettaire et la thrombinoformation. Les antithrombotiques et notamment les antiagrégeants ont
longtemps été associés à l’augmentation du risque hémorragique. Actuellement, les études montrent qu’ils
n’augmentent pas les complications hémorragiques mais diminuent la mortalité périopératoire tout en
augmentant la durée de vie de certains types de pontages (notamment prothétiques).
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : chirurgie vasculaire, chirurgie prothétique, endartérectomie carotidienne, chirurgie aortique,
pontage, antiagrégeants, héparine.
Introduction
La thrombose artérielle en chirurgie vasculaire conduit à l’échec du
pontage. Elle est due à la fois à des mécanismes d’ischémie locale
activant l’agrégation plaquettaire et de perturbations de flux sanguin
par baisse de débit sanguin ou de turbulences intrinsèques au
pontage. La thrombose artérielle nécessite une prise en charge
thérapeutique spécifique en fonction du geste chirurgical et du site
anatomique de l’intervention.
De nombreuses études contradictoires ont longtemps entretenu le
doute sur le rapport bénéfice/risque des traitements antithrombotiques, l’hémorragie iatrogène incontrôlable représentant la
crainte principale. Néanmoins, depuis quelques années, les études
cliniques présentent une prise en charge consensuelle en fonction
du site vasculaire, de la période d’administration et du type
d’antithrombotique utilisé que sont les héparines, les
antivitamines K (AVK) et les différentes classes d’antiagrégeants
plaquettaires.
Nous ne présentons pas la pathologie vasculaire occlusive chronique
conduisant systématiquement à l’utilisation d’antithrombotiques,
d’autant que d’autres pathologies y sont souvent associées. Nous
détaillons les différents antithrombotiques utilisés en fonction de
leur mode d’action pharmacologique et leur utilisation pour chaque
type de chirurgie vasculaire.
Antithrombotiques
MODE D’ACTION DES ANTITHROMBOTIQUES ET RÈGLE
DE PRESCRIPTION EN CHIRURGIE VASCULAIRE
Les antithrombotiques ont principalement deux sites d’action
correspondant à deux classes de produits. Les antiagrégeants qui
Stéphane-Xavier Racine : Chef de clinique-assistant.
Charles-Marc Samama : Praticien hospitalier.
Département d’anesthésie-réanimation, centre hospitalier universitaire Avicenne, 125, route de Stalingrad,
93009 Bobigny cedex, France.
agissent principalement sur les plaquettes et les interactions
plaquette-paroi vasculaire. Les anticoagulants qui agissent sur les
différentes étapes de la coagulation (fig 1).
Les mécanismes d’action pharmacologiques sont donc fonction des
classes d’antithrombotiques.
¶ Aspirine
L’aspirine inhibe de manière irréversible la cyclo-oxygénase (COX)
alors que les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ne font que
bloquer celle-ci de manière réversible. Cette enzyme catalyse l’acide
arachidonique en prostanoïdes comme les prostaglandines G2
(PGG2) et H2 (PGH2). Cette PGH2 qui est habituellement labile
entraîne, lorsqu’elle est activée par des médiateurs de
l’inflammation, une production de thromboxane A2 (TXA2) par les
plaquettes et de prostacycline (PGI2) par l’endothélium [46]. Le TXA2
est inducteur de l’agrégation plaquettaire et de la vasoconstriction
dans les situations d’agression tissulaire. L’aspirine diminue la
synthèse de TXA2.
¶ Flurbiprofène
Le flurbiprofène est un AINS qui inhibe de manière réversible
(24 heures) la COX plaquettaire, entraînant un défaut de synthèse
de TXA2. C’est le seul AINS en France ayant une autorisation de
mise sur le marché (AMM) pour la prévention des thromboses
artérielles coronariennes. Dans le cadre d’une chirurgie programmée
chez un patient sous aspirine (mais aussi sous thiénopyridine), le
flurbiprofène est une alternative à un relais entre l’aspirine qui doit
être arrêtée au minimum 10 jours et l’intervention chirurgicale. Le
flurbiprofène ne sera arrêté que 24 heures avant l’intervention.
¶ Dipyridamole
Le dipyridamole est un dérivé de la pyrimidopyrimidine possédant
des propriétés vasodilatatrices et antiplaquettaires. Le mécanisme
d’action est encore soumis à controverse mais il semblerait que le
dipyridamole bloque le récepteur à l’adénosine qui stimule la
dégradation de l’acide adénosine monophosphorique (AMP) en
5’AMP cyclique plaquettaire et réduit l’activation plaquettaire [23].
Toute référence à cet article doit porter la mention : Racine SX et Samama CM. Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés),
Techniques chirurgicales – Chirurgie vasculaire, 43-022, 2001, 9 p.
Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire
43-022
1
Site d’action des thérapeutiques antithrombotiques.
vWf : facteur von Willebrand ; Gp : glycoprotéine de surface ; ADP : adénosine diphosphate.
Abciximab
SANG
Plaquette activée
Ticlopidine
Clopidogrel
Récepteur
ADP
Récepteur
TXA2
PLASMA
Facteurs contact :
XII, prékallicréine, etc
Récepteurs
GPIIb/IIIa
RGD-like
ADP
vWf
fibrinogène
TXA2
Gp Ib IIa V IX
Facteur
tissulaire
VII
Phospholipides
plaquettaires
THROMBINE
Récepteurs
GPIIb/IIIa
Granules d'ADP
Techniques chirurgicales
Cyclo-oxygénase
Plaquette activée
Aspirine
Activation
plaquettaire
vWf
Héparines
et AVK
Endothéline, lipoxygénase, etc
Lésion vasculaire
Endothélium vasculaire
¶ Thiénopyridines (ticlopidine et clopidogrel)
Les thiénopyridines (ticlopidine [Ticlidt] et clopidogrel [Plavixt])
inhibent l’agrégation plaquettaire induite par l’adénosine
diphosphate (ADP) mais aussi celle induite par le collagène et la
thrombine [28]. Chez les patients porteurs d’une artériopathie des
membres inférieurs, le clopidogrel développe une activité
antithrombotique supérieure à celle de l’aspirine [9]. Le clopidogrel
tend à présent à remplacer la ticlopidine dans la prévention de la
thrombose des endoprothèses coronaires, en association avec
l’aspirine.
¶ Inhibiteurs des récepteurs glycoprotéiques IIb/IIIa
(GP IIb/IIIa)
L’abciximab (Réoprot), le tirofiban (Agrastatt) et l’eptifibatide
(Integrilint) et ses dérivés, en se fixant aux récepteurs
glycoprotéiques Gp IIb/IIIa des plaquettes, entrent en compétition
avec le fibrinogène et accessoirement le facteur von Willebrand [24].
Le blocage de ces sites empêche les plaquettes d’agréger. Ils n’ont
pas d’indication pour l’instant en chirurgie vasculaire, mais sont
utilisés dans l’angor instable réfractaire et dans le cadre d’une
angioplastie coronaire en association avec l’aspirine et l’héparine [10].
¶ Héparines
Les héparines sont classées en deux groupes : l’héparine non
fractionnée (HNF) et les héparines de bas poids moléculaire
(HBPM). L’HNF agit par l’intermédiaire de l’antithrombine (AT).
Elle inhibe la thrombine (IIa) et dans la même proportion le facteur
Xa (rapport Xa/IIa égal à 1). Dans une moindre mesure, elle interagit
également avec les facteurs IXa, XIa et XIIa [44]. Les héparines de bas
poids moléculaire (HBPM) inhibent de manière prépondérante le
facteur Xa (rapport anti-Xa/anti-IIa entre 2 et 5 selon les molécules).
Leur meilleure biodisponibilité par voie sous-cutanée rend compte
d’une efficacité et d’une tolérance supérieures à celles de l’HNF.
L’HNF est administrable par voie intraveineuse à la dose de 300 à
500 UI/kg/j, après une dose de charge de 300 UI/kg afin d’obtenir
une anticoagulation efficace. L’administration en continu doit faire
l’objet d’une surveillance par le temps de céphaline activée (TCA)
qui doit être supérieur ou égal au double du témoin. L’HNF calcique
est injectable par voie sous-cutanée. De même efficacité que l’HNF
sodique, seule sa pharmacocinétique change. En effet, son pic
d’efficacité est obtenu 40 minutes après l’injection sous-cutanée pour
une durée moyenne de 6 heures. L’HNF sodique a son pic
plasmatique dans les minutes qui suivent l’injection du bolus, mais
sa demi-vie étant de 90 minutes, il est nécessaire de recourir à
l’injection intraveineuse continue si l’anticoagulation doit être
maintenue.
2
Les HBPM sont administrables en une ou deux injections
journalières. Outre les contre-indications liées au risque
hémorragique de tout antithrombotique, l’insuffisance rénale contreindique les HBPM pour une clairance de la créatinine inférieure à
30 mL/min.
Elles peuvent être utilisées en mode préventif ou curatif dans le
cadre de la maladie thromboembolique veineuse et l’angor instable.
Leur utilisation est mal définie dans le cadre de la chirurgie
vasculaire.
Une seule injection par jour est nécessaire en mode préventif sans
contrôle de l’activité anti-Xa. En revanche, en mode curatif, le dosage
de l’activité anti-Xa au pic de l’activité (4 heures) est recommandé.
Elle doit être comprise entre 0,5 et 1 UI-anti-Xa/mL pour obtenir
une anticoagulation efficace pour la majorité des molécules.
¶ Antivitamines K
Les AVK diminuent la synthèse des facteurs II, VII, IX, X et deux
inhibiteurs physiologiques que sont les protéines C et S, en
interférant avec l’activité du cofacteur de la vitamine K vis-à-vis de
la gammacarboxylase hépatique. Les AVK nécessitent un délai
d’action de quelques jours avant de développer une efficacité. Pour
cela, il ne sont jamais prescrits seuls en première intention mais
toujours en relais d’une anticoagulation par héparine. La
surveillance du traitement repose sur la mesure de l’international
normalized ratio (INR) qui doit être compris le plus souvent entre 2
et 3.
¶ Thrombolytiques
Les thrombolytiques ont pour fonction de lyser le caillot sanguin
récemment formé (moins de 2 semaines). Leur mode d’action
commun est d’activer le système fibrinolytique physiologique en
transformant le plasminogène inactif en plasmine active, ceci
entraînant une dégradation de la fibrine, aboutissant à une lyse du
thrombus. Les trois principales molécules utilisées en chirurgie
vasculaire sont la streptokinase (SK) d’origine streptococcique et
immunogène pour l’homme, l’urokinase (UK) isolée à partir de
l’urine humaine et l’altéplase (recombinant-tissue-type plasminogen
activator [rt-PA]) obtenue par génie génétique. Les doses
administrées sont plus faibles que celles utilisées dans l’infarctus du
myocarde pour la thrombolyse locorégionale artérielle.
Pour la SK, il faut débuter par 250 000 UI en bolus puis
100 000 UI/h pendant 24 heures. Pour l’UK, il faut débuter par
4 400 UI/kg en 10 minutes, puis relayer par une perfusion
intraveineuse pendant 12 à 24 heures par 2 000 UI/kg/h. Dans le
cas d’une impossibilité à poursuivre le bolus local par une perfusion
intraveineuse, il faut poursuivre par HNF à la dose de 500 UI/h,
Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire
Techniques chirurgicales
43-022
Tableau I. – Contre-indications et précautions d’emploi des antithrombotiques.
Médicaments
Principales contre-indications
Recommandations d’emploi
Aspirine
Absolue : allergie aux salicylés et dérivés, ulcère gastrique en évolution,
coagulopathie constitutionnelle ou acquise, risque hémorragique majeur,
grossesse, association au méthotrexate à haute dose, maladies hémorragiques.
En cas d’insuffisance rénale dont la clair créat < 30 mL/min, contre-indiquer
l’association avec les HBPM.
Dipyridamole
Identiques à celles de l’aspirine en ce qui concerne le risque hémorragique.
Pour les fortes doses, fractionner les prises car vasodilatation brutale possible.
Clopidogrel
Allergie, insuffisance hépatocellulaire sévère, lésion hémorragique évolutive,
allaitement.
Ne pas utiliser dans les premiers jours d’un infarctus du myocarde, d’un
angor instable, de la pose de stent, d’un pontage aortocoronarien et d’un
AVC ischémique de moins de 7 jours. Association à des médicaments antithrombotiques et insuffisance rénale : prudence.
Ticlopidine
Idem que pour l’aspirine.
Arrêt 10 jours avant intervention chirurgicale, association antithrombotiques,
théophylline (surdose), pentoxifylline (hémorragie), phénitoïne (surdose).
Surveillance NFS (leucothrombopénie et PTT).
Anti-GP IIb/IIIa
Allergie à la molécule ou à ses composés (exemple : la papaïne pour le
Réoprot), lésion hémorragique, ATCD d’AVC hémorragique de moins de 2
ans, TC ou intrarachidien de moins de 2 mois, lésion cérébrale tumorale,
malformative ou anévrismale, HTA incontrôlée. Coagulopathie, thrombopénie, vascularite, rétinopathie vasculaire, insuffisance hépatique ou rénale.
Évaluation bénéfice-risque, administration simultanée d’aspirine et héparine,
surveillance en milieu de surveillance intensive.
HNF/HBPM
Absolue : allergie, thrombopénie, lésions tissulaires hémorragiques, coagulopathie sauf CIVD non liée à l’héparine, endocardite infectieuse aiguë (sauf si
prothèse mécanique), postopératoire de neurochirurgie, AVC hémorragique.
Relative : association à d’autres antithrombotiques. HBPM : insuffisance
rénale avec clair créat < 30 mL/min.
Risque hémorragique si association à d’autres antithrombotiques, corticothérapie à forte dose ou supérieure à 10 jours (interaction médicamenteuse).
AVK
Absolue : allergie à la molécule ou à ses dérivés, lésion hémorragique,
neurochirurgie, chirurgie ophtalmologique, insuffisance hépatocellulaire ou
rénale (clair créat < 20 mL/min), ulcère gastroduodénal récent ou évolutif,
varices œsophagiennes, HTA maligne (diastolique > 12 mmHg), AVC (sauf
embolie systémique).
Association miconazole, phénylbutazone et AINS pyrazolés, salicylés à forte
dose
Si risque thrombotique, utiliser les AVK en relais avec une anticoagulation
efficace (héparine) du fait du temps de latence de l’efficacité des AVK.
ATCD : antécédent ; AVC : accident vasculaire cérébral ; TC : traumatisme crânien ; clair créat : clairance de la créatininémie ; IHC : insuffisance hépatocellulaire ; NFS : numération-formule sanguine ; PTT : purpura thrombotique
thrombopénique ; AVK : antivitamine K ; HBPM : héparine de bas poids moléculaire ; HNF : héparine non fractionnée ; AINS : anti-inflammatoire non stéroïdien ; CIVD : coagulation intravasculaire disséminée ; HTA : hypertension
artérielle.
Tableau II. – Modalités de surveillance des antithrombotiques et lieu de réalisation technique : au laboratoire ou au chevet du malade.
Antithrombotiques
Aspirine
Modalités de surveillance
Temps de saignement par méthode d’Ivy
PFAt épinéphrine
Valeur sous traitement
> 10 minutes
> 160 secondes
Laboratoire
Malade
(+)
(+)
Dipyridamole
Pas de dosage spécifique
Clopidogrel (Plavixt)
Pas de dosage spécifique
NFS car risque de thrombopénie
Ticlopidine (Ticlidt)
Pas de dosage spécifique
NFS car risque de neutropénie
Anti-GP IIb/IIIa (Réoprot)
Pas de dosage spécifique
NFS car risque de thrombopénie
HNF (à dose curative)
Temps de céphaline activée
ACT : Hemochront, Actalyket, ACTIIt
Thrombo-élastogramme
NFS car risque de thrombopénie
> 1,5 fois le témoin
> 400 et < 600 secondes
(r+k) élevé, Am normale
(+)
HBPM
Activité anti-Xa
NFS car risque de thrombopénie
> 0,5 et < 1 UI
(+)
AVK
INR
INR > 2
risque hémorragique majeur si > 4
(+)
(+)
(+)
AVK : antivitamine K ; HBPM : héparine de bas poids moléculaire ; HNF : héparine non fractionnée ; NFS : numération-formule sanguine ; ACT : activated clotting time ; INR : international normalized ratio ; Am : amplitude maximale ;
(r + k) : temps de réaction + temps de coagulation.
4 heures après la thrombolyse, à condition que le fibrinogène soit
supérieur à 1 g/L et le TCA inférieur à deux fois le témoin. Pour
le rt-PA, il faut débuter par un bolus locorégional de 10 mg en
1 minute puis de 45 mg/h pendant 2 heures. Contrairement aux
précédentes molécules, l’HNF est démarrée à l’arrêt de l’altéplase
à la dose de 1 000 UI/h et adaptée en fonction du TCA. La
fibrinolyse n’est arrêtée qu’après l’assurance de l’absence totale
de thrombus, l’héparine en relais n’ayant pour but que
d’empêcher la formation de nouveaux thrombi. La surveillance
est réalisée par la clinique (chaleur et coloration cutanée,
perception du pouls, point de ponction, signes hémorragiques), la
biologie (temps de prothrombine [TP], TCA, numération-formule
sanguine [NFS], plaquettes, fibrinogène par 6 heures pendant
24 heures) et éventuellement le doppler. La survenue d’un
syndrome hémorragique, d’un hématome au point de ponction
ou un taux de fibrinogène inférieur à 1 g/L doivent faire arrêter la
thrombolyse.
Les principales indications, contre-indications et modes de
surveillance sont précisés dans les tableaux I et II.
3
Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire
43-022
Utilisation des antithrombotiques
en fonction du type de chirurgie
Dans ce chapitre sont présentées les principales études sur
l’utilisation des antithrombotiques en fonction du type
d’intervention chirurgicale (tableau III). Pour chaque site opératoire
sont détaillées les pratiques thérapeutiques en fonction de la
classification de la conférence de consensus nord-américaine sur
l’utilisation des antithrombotiques en chirurgie vasculaire. Celle-ci a
classé, après une revue de la littérature, les recommandations
thérapeutiques en trois catégories (tableau III) [26] suivant le niveau
avantage/inconvénient des agents antithrombotiques [29].
CHIRURGIE DE L’AORTE
Le risque de thrombose après chirurgie de l’aorte est faible car le
débit aortique très élevé rend difficile la fixation des composés
plaquettaires. Ceci n’est plus vrai pendant le clampage aortique, du
fait de la stagnation du sang dans un cul-de-sac vasculaire, des
lésions traumatiques de l’endothélium vasculaire dues au clampage
et de l’ischémie locale. Toutes ces conditions favorisent la formation
locale d’un thrombus. La solution qu’apporte l’héparine au
phénomène de thrombose au moment du clampage de l’aorte n’est
peut-être que théorique. Thompson et al [50] , dans une étude
multicentrique randomisée sur 284 patients, ne retrouvent pas de
différences significatives entre le groupe recevant 5 000 UI d’HNF
avant le clampage et le groupe non anticoagulé en termes de
complications thrombotiques et hémorragiques périopératoires. En
revanche, le bénéfice de l’héparine apparaît vis-à-vis de l’infarctus
du myocarde avec une réduction de la morbidité (1,4 % versus
5,7 %) et de la mortalité (2 % versus 8,5 %).
Dans la chirurgie de l’aorte, l’anticoagulant de référence est l’HNF.
Habituellement, l’administration par voie intraveineuse est basée sur
un bolus avant le clampage, suivie d’un entretien en continu ou faite
de bolus répétitifs, le but étant d’obtenir une anticoagulation efficace
avec un TCA double de celui du témoin. L’obtention de ce niveau
d’anticoagulation nécessite un bolus initial de 100 à 150 UI/kg
d’HNF et de répéter théoriquement la dose de 50 UI/kg toutes les
45 minutes pendant toute la durée du clampage.
D’après Qhigley et al [ 4 3 ] , le monitorage de la coagulation
peropératoire tel qu’il est pratiqué habituellement par une prise de
sang périphérique est inadapté. Dans une étude observant le temps
de coagulation activée (activated clotting time [ACT]) après injection
d’héparine dans une chirurgie de l’aorte, les auteurs montrent que
le prélèvement sanguin réalisé en amont du clampage a un ACT
plus long que celui prélevé en aval du clampage. Mais l’efficacité de
l’anticoagulation dépend du type de molécule utilisé et aussi du site
d’injection. Kroneman et al [33], dans une étude comparative étudiant
les HBPM et les HNF au cours de pontages aortobifémoraux, ne
retrouvent pas de différences entre les deux groupes concernant la
perte sanguine ou le risque thrombotique. Cependant, l’avantage
revient aux HBPM (daltéparine) en ce qui concerne la
reproductibilité de la cinétique plasmatique. En effet, la
pharmacocinétique des HBPM dans le temps est beaucoup plus
stable que celle de l’HNF. Ainsi, il semble que l’anticoagulation par
HNF dans la chirurgie de l’aorte est aléatoire en comparaison de
l’utilisation des HBPM. Ceci est confirmé par l’étude de Melissari et
al [38], dans laquelle le taux et la durée de l’activité anti-Xa sont plus
Techniques chirurgicales
élevés avec les HBPM qu’avec l’HNF. Enfin Wilson et al [54], utilisant
les HBPM, ont comparé l’influence de l’anticoagulation en fonction
des sites d’injection, périphérique ou intra-aortique, et des moments
d’administration, avant ou après le clampage. Bien qu’aucun patient
n’ait développé de thrombose distale, les prélèvements sanguins ont
montré une activité anti-Xa basse en aval du clampage aortique si
l’administration est réalisée après le clampage. En revanche,
l’activité anti-Xa est plus élevée dans le groupe recevant l’héparine
en intra-aortique avant le clampage par rapport au groupe recevant
l’héparine en périphérie, aussi bien sur des prélèvements
systémiques qu’en aval du clampage.
En postopératoire, l’aspirine est la molécule antiagrégeante la plus
couramment utilisée. En effet, de nombreux facteurs facilitent la
formation du thrombus [8] : zone de turbulence du flux sanguin,
absence d’endothélium d’où mise en contact du sous-endothélium
avec le sang entraînant une activation de l’hémostase. Les taux de
cisaillement élevés de la circulation artérielle donnent aux plaquettes
un rôle prépondérant par rapport aux facteurs de la coagulation.
Dans ce contexte, les antiagrégeants sont les molécules de choix.
Recommandations de la conférence de consensus nord-américaine de
chirurgie aortique :
– l’aspirine administrée à la dose de 81 à 325 mg/j réduit l’incidence
de l’infarctus du myocarde (A1) ;
– les AVK (associés ou non à l’aspirine) ne sont pas à utiliser au
long cours (A1) ;
– l’aspirine à la dose de 81 à 325 mg/j (associés ou non au
dipyridamole à la dose de 75 mg, trois fois par jour) est
recommandée dans les pontages artériels prothétiques ou pour tous
les types de pontages fémoropoplités (B1) ;
– l’héparinisation doit être efficace pendant le clampage artériel
(B1) ;
– un pontage sur une artère d’un diamètre supérieur à 6 mm ne
nécessite pas l’utilisation d’antithrombotiques en postopératoire
(C1). (L’association avec l’aspirine réduit la morbidité et mortalité
cardiovasculaires, cf première recommandation classée A1.)
CHIRURGIE VASCULAIRE ARTÉRIELLE PÉRIPHÉRIQUE
¶ Ischémie aiguë des membres inférieurs
La pathologie artérielle chronique représente certes la première
cause d’ischémie artérielle aiguë, mais le traumatisme et l’occlusion
aiguë vasculaire occupent également une place importante dans ce
domaine, avec une thérapeutique associée lourde car dépendante
des autres lésions liées au traumatisme ou aux tares viscérales
(cardiaque, neurologique, thoracique...). En cas de traumatisme
sévère, l’anticoagulation est contre-indiquée car s’associent souvent
une hémorragie, une coagulation intravasculaire disséminée et/ou
une fibrinolyse massive, avec un déficit qualitatif et quantitatif
majeur en facteurs de la coagulation et de l’hémostase primaire. Le
traitement est orienté vers une chirurgie réparatrice en cas de
section, lacération ou compression artérielle externe. Dans le cas
d’occlusion artérielle aiguë de type thromboembolique, le traitement
consiste à réaliser une désobstruction vasculaire par sonde de
Fogarty, ou mieux par thromboaspiration (moins traumatisante pour
l’endothélium vasculaire). Dans la situation d’un échec de la
désobstruction artérielle par sonde endovasculaire, l’utilisation de
Tableau III. – Niveaux de recommandations des études par la Société américaine de chirurgie vasculaire.
Études de niveau A
Méthodologie forte, résultats sûrs, étude randomisée
avec échantillon ou groupe contrôlé et homogène
Études de niveau B
Méthodologie forte, résultats individuels par patient disparates, étude randomisée avec échantillon ou groupe
contrôlé et hétérogène
1 Effets clairs, apportant un bénéfice
2 Effets équivoques, dont le bénéfice n’est pas démontré
4
Études de niveau C
Méthodologie succincte, études d’observation
Techniques chirurgicales
Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire
thrombolytiques in situ a démontré son efficacité sans augmentation
de la morbidité. Dotter et al [19], dans une étude multicentrique,
montrent que l’injection de SK in situ en amont d’une obstruction
artérielle a un succès de reperfusion significativement supérieur à
une injection intraveineuse systémique. L’étude multicentrique
STILE comparant les bénéfices de la chirurgie vasculaire versus
l’utilisation de thrombolytiques dans les ischémies aiguës de
membres, d’origine non embolique, montre que la revascularisation
chirurgicale est supérieure à la fibrinolyse lorsque les symptômes
ischémiques durent depuis plus de 15 jours [47]. Dans la situation où
ces symptômes datent de moins de 2 semaines, la fibrinolyse
enregistre un taux plus faible d’amputations. La fibrinolyse devrait
être utilisée avant qu’une restructuration endothéliale ne se
développe.
L’utilisation de l’héparine doit être associée, en même temps que le
geste chirurgical, en l’absence de thrombolyse ou après l’utilisation
de la thrombolyse. En postopératoire et en l’absence de contreindication aux antithrombotiques, il faut utiliser les mêmes
thérapeutiques antithrombotiques et aux mêmes doses que pour la
chirurgie vasculaire programmée.
¶ Chirurgie de reconstruction vasculaire périphérique
Les prothèses vasculaires artérielles synthétiques présentent un plus
grand risque de thrombose que les pontages veineux [52]. Veith et
al [51] ont comparé, dans une étude randomisée multicentrique
pendant 6 ans, les complications des pontages artériels en matériel
synthétique (polytétrafluoroéthylène [PTFE]) par rapport à des
greffons veineux. Il en résulte, de manière significative, moins de
complications dans le groupe greffon veineux en termes de
rethrombose (p < 0,001). Ce résultat est valable pour toutes les études
comparatives similaires [20, 37].
L’hyperplasie intimale est une des complications principales
aboutissant à l’échec des pontages artériels. Il se crée une zone
thrombogène par les turbulences liées au mauvais écoulement
sanguin et par la fragilité de l’endothélium pouvant laisser à nu le
sous-endothélium. Ceci induit l’adhésion plaquettaire et active les
facteurs de la coagulation. Bien que quelques études animales aient
montré une diminution de l’hyperplasie intimale sous traitement
antiagrégeant, d’autres études expérimentales chez l’animal [7, 12] et
thérapeutiques chez l’homme [25] n’ont pas retrouvé de résultats
semblables.
La thrombogénicité de la surface du matériau employé rentre
également en ligne de compte. En effet, la réendothélialisation est
plus rapide, plus complète et de meilleure qualité sur les greffons
veineux que sur les prothèses en Dacront ou en PTFE. Pumphrey et
al [42] ont montré que des plaquettes marquées à l’indium 111 étaient
moins nombreuses sur la surface de greffons veineux que sur les
pontages en Dacront ou en PTFE. À l’inverse, l’association
dipyridamole-aspirine diminue cette fixation des plaquettes de
manière plus importante dans le groupe prothèses que pour les
pontages en greffon veineux.
Une troisième complication est liée au débit circulant dans le
pontage. Pour des diamètres supérieurs à 6 mm, il n’y a pas
d’indication pour une thérapeutique antiagrégeante. Les occlusions
des pontages aorto-iliaques, fémoraux et des artères rénales sont
beaucoup moins fréquentes que celles des pontages distaux. En
revanche, les pontages artériels offrant un débit inférieur à
200 mL/min ou les pontages croisant une zone de plicature
(exemple, le creux poplité) sont à haut risque de thrombose et
doivent bénéficier d’un traitement par antiagrégeant [26].
Ce traitement doit être débuté le plus tôt possible avant
l’intervention chirurgicale. Clyne et al [13] montrent, dans une étude
randomisée, qu’un traitement associant dipyridamole avant et
pendant l’intervention, et aspirine-dipyridamole après le pontage,
diminue de manière significative le risque de thrombose à
6 semaines pour les prothèses artérielles alors que, pour les greffons
veineux, la différence n’est pas significative. Kohler et al [31], dans
une étude avec une méthodologie similaire, ont administré des
43-022
antiagrégeants après l’intervention. L’association aspirinedipyridamole n’apporte pas de bénéfice en termes de thrombose
entre le groupe traité et celui non traité.
L’aspirine et le dipyridamole augmentent-ils le risque
hémorragique ? Une étude multicentrique [36] portant sur les patients
ayant bénéficié d’un pontage veineux, fémoropoplité montre une
augmentation du nombre d’hématomes en regard de la cicatrice
opératoire. Dans cette étude, le groupe traité par antiagrégeant a
reçu plus de transfusions que dans le groupe contrôle. Ce résultat
s’oppose à l’étude multicentrique randomisée de Becquemin et al [5]
sur le même type de pontage sous dipyridamole seul. En effet, dans
cette étude, il n’y a pas de différence dans les deux groupes en ce
qui concerne le risque hémorragique tout en obtenant moins de
thromboses par rapport au groupe témoin.
Une analyse rétrospective sur 2 000 patients à partir de 11 études
randomisées montre que les traitements antiagrégeants diminuent
de manière significative (p < 0,0001) le risque de thrombose avec un
recul de 19 mois [1].
Les héparines préviennent la formation de la thrombose artérielle
mais la dose, le site d’administration (voie systémique ou locale) et
le moment de l’administration par rapport au clampage dépendent
de l’habitude chirurgicale. L’agrégation plaquettaire induite par les
HNF n’est pas retrouvée avec les HBPM [4]. Cette donnée plaide
théoriquement en faveur des HBPM en chirurgie vasculaire. L’étude
de Samama et al [45] montre, dans le groupe traité avec l’HNF, un
risque de thrombose postopératoire plus élevé qu’avec les HBPM
lors des pontages artériels périphériques (HNF versus enoxaparine,
22 % versus 8 %, p = 0,009) avec un risque hémorragique plus faible
dans le groupe HBPM.
Les AVK sont des anticoagulants puissants (fig 1). Les résultats des
études sont contradictoires en termes de mortalité et morbidité, mais
il semble que le risque hémorragique imputable aux AVK soit plus
élevé, comparativement à celui induit par d’autres médicaments
[2, 17]
antithrombotiques
. Néanmoins, une étude portant sur 12 ans
montre que le pontage artériel a une durée de vie supérieure dans
le groupe traité par rapport à celui non traité [32].
L’association de faibles doses d’antiagrégeants plaquettaires et
d’AVK a pour but théorique d’augmenter l’efficacité de l’action
antithrombotique tout en diminuant les risques hémorragiques. Une
étude multicentrique portant sur 458 patients recevant soit 325 mg/j
d’aspirine, soit l’association aspirine et AVK (pour obtenir un INR
entre 1,5 et 2,8), après un pontage fémorotibial, fémoropoplité ou
fémoropédieux sur un suivi de 4 ans, ne montre pas de différence
en termes de complications hémorragiques entre les deux groupes.
En revanche, cette étude révèle que la prise médicamenteuse au long
cours des anticoagulants oraux est aléatoire car des contrôles d’INR
ont montré fréquemment un sous-dosage [30]. Pour s’assurer de la
viabilité d’un pontage, il faut tenir compte de la bonne compliance
au traitement antithrombotique du patient.
Recommandations de la conférence de consensus nord-américaine de
chirurgie vasculaire périphérique :
– l’aspirine administrée à la dose de 81 à 325 mg/j réduit l’incidence
de l’infarctus du myocarde (A1) ;
– les AVK (associés ou non à l’aspirine) ne sont pas à utiliser au
long cours (A1), sauf (classé B2) en cas de pontage distal associé à
un risque de thrombose ;
– l’aspirine à la dose de 81 à 325 mg/j (associés ou non au
dipyridamole à la dose de 75 mg, trois fois par jour) est
recommandée dans les pontages artériels prothétiques ou pour tous
les types de pontages fémoropoplités (B1) ;
– l’héparinisation doit être efficace pendant le clampage artériel
(B1) ;
– en cas de thrombus ou d’embole artériel après une
thromboembolectomie, il faut utiliser l’héparine à dose efficace puis
faire un relais par les AVK (C1).
5
43-022
Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire
CHIRURGIE CAROTIDIENNE
La complication la plus redoutée per- et postopératoire de ce type
de chirurgie est l’embolisation distale de débris athéromateux
provenant de la carotide.
En théorie, l’aspirine administrée avant l’intervention devrait
prévenir la formation de ces emboles provenant de la zone opérée.
En effet, des plaquettes marquées à l’indium 111 ont permis
d’observer, à la scintigraphie, une adhésion endothéliale juste après
l’intervention [48]. Cette adhésion décroissante dans le temps est
probablement liée à la réendothélialisation vasculaire de la lumière
artérielle.
Findlay et al [ 2 2 ] ont montré que l’association aspirine et
dipyridamole diminuait la fréquence des interactions adhésionagrégation entre l’endothélium et les plaquettes, tout en diminuant
l’incidence des accidents vasculaires cérébraux périopératoires.
Fields et al [21] ont évalué le bénéfice apporté par 650 mg d’aspirine
biquotidien chez des patients opérés d’endartériectomie carotidienne
contre un groupe traité par placebo. Après 2 ans de traitement, le
bénéfice est statistiquement en faveur du traitement par l’aspirine,
avec une diminution globale de la mortalité et de la morbidité liée à
l’athérosclérose carotidienne (accident vasculaire ischémique,
infarctus cérébral, accident ischémique transitoire, amaurose, etc).
Cependant, les études ne vont pas toutes dans le même sens. Findlay
et al comparant 50 à 100 mg/j d’aspirine, contre un groupe placebo,
administré après une endartériectomie carotidienne, n’ont pas
détecté de différence en termes de mortalité et morbidité. Dans cette
étude, certains biais n’ont pas permis de conclure sur le bénéfice de
l’utilisation d’une faible dose (dose variable non adaptée au poids,
démarrage de la première prise postopératoire allant de 1 semaine à
3 mois). Plus récemment, Lindblad et al [35] ont confirmé, dans une
étude en double aveugle avec placebo, que 75 mg/j d’aspirine en
préopératoire diminuaient significativement les accidents cérébraux
per- et postopératoire sans augmentation du risque de saignement.
Les données de l’étude NASCET (North American symptomatic
carotid endarteriectomy) ont montré que les accidents vasculaires
cérébraux survenaient principalement dans le mois qui suit une
endartériectomie. Cette étude suggérait que ces accidents étaient
plus faibles pour les patients traités par de fortes doses d’aspirine
(de 325 à 650 mg deux fois par jour) contre ceux ne recevant pas
d’aspirine ou recevant moins de 325 mg/j [3]. Ce dernier résultat, par
l’analyse d’un sous-groupe, s’opposait aux études comparant
l’utilisation de faibles doses d’aspirine contre placebo.
Les résultats de l’étude ACE (ASA and carotid endarteriectomy)
contredisent ceux de l’étude NASCET. Cette étude multicentrique,
randomisée en double aveugle et portant sur 2 849 patients, a
observé l’effet de quatre dosages d’aspirine donnés avant une
endartériectomie carotidienne jusque 3 mois après l’intervention. Les
résultats montrent que le risque d’accident vasculaire cérébral,
d’infarctus du myocarde et de décès à 30 jours et à 3 mois de
l’opération est plus faible dans les groupes traités avec 81 et 325 mg
d’aspirine (5,4 % versus 7 % à 30 jours, 6,2 % versus 8,4 % à 3 mois)
que dans ceux traités avec 650 et 1 300 mg [49].
Les études confirment que l’aspirine administrée en préopératoire
et en postopératoire diminue le risque d’accidents vasculaires
cérébraux ischémiques pour une dose quotidienne supérieure à
75 mg. Néanmoins, les complications hémorragiques ne sont pas
rares, pouvant s’élever jusqu’à 3 % des endartériectomies.
L’héparinothérapie et les poussées hypertensives associées à un
traitement antiagrégeant augmentent l’incidence des hémorragies
périopératoires [34].
Chez des patients non opérés, asymptomatiques mais porteurs
d’une sténose carotidienne, aucune étude ne montre de bénéfice
apporté par l’aspirine administrée au long cours, en ce qui concerne
les complications cérébrales. Seule l’étude de Coté et al [16] a observé
l’absence de bénéfice du traitement sur une période de 2 à 3 ans,
mais il n’existe pas d’étude randomisée sur une plus longue période
concernant le bénéfice de l’aspirine en termes de mortalité, comme
celles réalisées dans l’infarctus du myocarde.
6
Techniques chirurgicales
Chez les patients opérés d’une endartériectomie carotidienne, il ne
semble pas que l’aspirine au long cours diminue le risque de
resténose, comme le montrent les études rétrospectives de Clagett et
al [11] et Cossman et al [15], confirmé par Harker et al [27] qui ne
retrouvent aucun bénéfice en termes de resténose carotidienne pour
les patients traités par l’association aspirine et dipyridamole.
L’héparine en chirurgie carotidienne est l’antithrombotique de
référence. Habituellement, l’HNF est administrée à la dose de 85
UI/kg avant le clampage carotidien. Même si la durée de ce
clampage est court, il est souhaitable de monitorer régulièrement au
bloc opératoire l’anticoagulation. En ce qui concerne la chirurgie
carotidienne, la mesure d’un ACT supérieure à 300 secondes semble
diminuer les complications neuropsychiques emboliques
postopératoires [41]. Il s’agit d’une anticoagulation efficace et donc
potentiellement hémorragique. Ce risque hémorragique doit être
néanmoins relativisé car, en chirurgie cardiaque, l’ACT souhaité est
supérieur à 450 secondes. Quoi qu’il en soit, la diminution du risque
hémorragique passe par une consultation clinique permettant
d’éliminer toutes les contre-indications aux antithrombotiques.
En postopératoire, faut-il antagoniser l’héparine par le sulfate de
protamine ? Si l’antagonisation est fréquente aux États-Unis, elle l’est
beaucoup moins en France. Les études montrent qu’il n’y a pas de
bénéfice en termes de saignement ou de complication embolique liés
à la protamine [18]. En revanche, la protamine peut être responsable
d’effets secondaires de type allergique ou hémodynamique.
Depuis plus d’une trentaine d’années, les anesthésistes ont mis au
point des techniques d’anesthésie locorégionale (ALR) cervicale pour
les endartériectomies. Celles-ci consistent à injecter, par une ou
plusieurs ponctions, des anesthésiques locaux le long du bord
postérieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien, afin de bloquer la
conduction nerveuse de racines C2 à C6 (voire plus en fonction du
volume et de la concentration administrée). Si quelques cas
d’intoxication aux anesthésiques locaux ont été décrits, aucune étude
n’a pu mettre en évidence d’accidents hémorragiques pour les
anesthésies locales cervicales comparativement à l’anesthésie
générale. Actuellement, l’utilisation de stimulateurs nerveux et
l’adoption de la technique à une seule ponction limitent le risque
d’une perforation vasculaire pouvant entraîner un saignement
incontrôlable.
Recommandations de la conférence de consensus nord-américaine de
chirurgie carotidienne :
– l’aspirine à la dose de 81 à 650 mg biquotidienne doit être donnée
à vie après une endartériectomie (diminue le risque de thrombose et
d’accident vasculaire cérébral ischémique) (A1) ;
– l’héparinisation doit être efficace pendant le clampage artériel (B1).
ANGIOPLASTIE PERCUTANÉE TRANSLUMINALE
L’angioplastie percutanée en cathétérisant une artère dans laquelle
le ballonnet, situé sur la partie distale, dilate la sténose, restaure le
chenal artériel mais peut créer des lésions thrombogènes de la paroi
artérielle ou, par fracture de plaques athéromateuses, peut libérer
des emboles en aval de la dilatation [6]. Des études expérimentales
montrent que les plaquettes s’accumulent 30 minutes après le début
de la dilatation, cette réaction est d’autant plus importante qu’il
existe des lésions histologiques à type de dissection [53].
Les études concernant l’utilisation des antithrombotiques dans
l’angioplastie périphérique sont peu nombreuses par rapport à
l’angioplastie coronarienne. Néanmoins, il existe quelques études
randomisées pouvant orienter la thérapeutique. Dans les traitements
au long cours après angioplastie périphérique, une étude
multicentrique [ 3 9 ] n’a pas montré de différences en termes
d’inhibition de l’activité plaquettaire à 1 an entre l’association
aspirine-dipyridamole contre un placebo. Par ailleurs, cette étude
comparant de fortes doses d’aspirine (1 g/j) à de faibles doses
d’aspirine (100 mg/j) n’a pas montré de différences en termes de
bénéfice ; en revanche, les complications gastriques sont plus élevées
dans le groupe à forte dose. Une autre étude randomisée étudiant
l’activité plaquettaire par agrégométrie montre, sur un suivi de
Techniques chirurgicales
Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire
18 mois après une angioplastie, que l’utilisation de 100 mg d’aspirine
ne bloque que 60 % de l’activité plaquettaire, mais qu’aucun patient
n’a développé de complication thrombotique [40].
Plus récemment a été développée l’utilisation des inhibiteurs des
récepteurs plaquettaires GP IIb/IIIa, comme l’abciximab,
l’eptifibatide et le tirofiban, pour les interventions coronariennes
percutanées. Le but de ces molécules est de prévenir les
complications cardiaques ischémiques au cours des angioplasties
coronariennes, des athérectomies ou lors de la pose de stent. Les
anti-GP IIb/IIIa doivent être utilisés en association avec de l’aspirine
et de l’HNF. Cependant, aucune étude n’a été publiée sur leur
utilisation en chirurgie vasculaire non cardiaque. On peut se
demander si le risque hémorragique ne peut pas l’emporter en
utilisant à la fois deux antiagrégeants plaquettaires (aspirine
+ inhibiteur GP IIb/IIIa) et un anticoagulant (HNF) pour une
intervention vasculaire sur les gros vaisseaux artériels.
Le manque de résultats en recherche clinique montre bien la
difficulté du choix d’une molécule et de son dosage, mais surtout de
l’utilité des antithrombotiques dans l’angioplastie non coronarienne
qui semble pourtant indispensable par le risque thrombotique
qu’engendre le matériel vasculaire synthétique.
Recommandations de la conférence de consensus nord-américaine de
chirurgie de l’angioplastie percutanée transluminale :
– l’héparinisation doit être efficace pendant le clampage artériel
(B1) ;
– l’aspirine associée à la ticlopidine sont recommandées pour les
angioplasties fémorales et artérielles périphériques (B2) ;
– l’aspirine doit être administrée avant et après les angioplasties
aortiques et iliaques (C1).
Problèmes particuliers
ANTITHROMBOTIQUES ET RISQUES
THROMBOEMBOLIQUES VEINEUX PÉRIOPÉRATOIRES
EN CHIRURGIE VASCULAIRE
La maladie thromboembolique veineuse repose sur l’atteinte d’au
moins un des éléments suivants que sont une lésion de
l’endothélium vasculaire (étirement ou compression veineuse), la
stase veineuse (alitement, plâtre, mauvais retour veineux
postchirurgie pelvienne ou des membres inférieurs, etc), et
l’hypercoagulabilité (activation des médiateurs de l’inflammation
post-traumatique, infection, etc). Plusieurs types de risques sont à
prendre en compte de manière indépendante, l’association de ces
différents facteurs augmentant le risque de maladie
thromboembolique veineuse (MTEV). Le risque chirurgical ne
semble pas être majeur en chirurgie vasculaire. En effet, la
conférence de consensus de l’Assistance publique-hôpitaux de
Paris [14] n’a pas retenu ce type de chirurgie. La chirurgie viscérale,
43-022
gynéco-obstrétricale et carcinologique abdominopelvienne, ainsi que
la chirurgie orthopédique, notamment de la hanche, présentent un
risque élevé de thrombose veineuse. Cependant, la chirurgie de
l’aorte représente un risque thromboembolique qui doit être
considéré au minimum comme modéré (chirurgie abdominale et du
bassin) nécessitant une prévention de la MTEV. En revanche, le
risque lié au terrain classe le plus souvent le patient de chirurgie
vasculaire en risque modéré ou élevé.
Le risque modéré est représenté par l’âge supérieur à 40 ans, la
présence de varices, une contraception œstroprogestative, une
insuffisance cardiaque, un alitement périopératoire supérieur à
4 jours, une infection, le post-partum et l’obésité.
Le risque élevé lié au terrain est surtout associé à une pathologie
préexistante sévère (cancer évolutif, anomalies de certains facteurs
de la coagulation comme les protéines C, S, AT III, la présence
d’anticoagulants circulants, hémopathie, etc), mais surtout un
antécédent de MTEV.
Bien qu’aucune conférence de consensus ne précise les modalités de
prise en charge de la MTEV en chirurgie vasculaire, ce type de
chirurgie est à risque modéré (sauf en cas de risque élevé lié au
terrain). La prévention de la MTEV débute par les moyens
mécaniques. La déambulation précoce, la surélévation des membres
inférieurs, les bas de contention (sauf en cas de pontage artériel des
membres inférieurs), voire la mise en place d’une compression
intermittente plantaire ou du mollet représentent des techniques peu
coûteuses et ayant une réelle efficacité. L’autre versant thérapeutique
est l’utilisation de médicaments comme les HBPM, les AVK (surtout
aux États-Unis), le danaparoïde sodique (Orgarant) qui n’a une
AMM que pour la chirurgie orthopédique, carcinologique et les
thrombopénies induites par l’héparine, les autres molécules comme
l’hirudine, les pentasaccharides et le mélagatran sont en cours
d’évaluation.
Quoi qu’il en soit, les thérapeutiques antithrombotiques artérielles
utilisées en postopératoires d’une chirurgie vasculaire sont utilisées
à dose curative (aspirine, HBPM, HNF, etc) avec une hémostase plus
proche du versant hémorragique que du versant thrombotique.
Néanmoins, au-delà de cette période postopératoire précoce, le
risque de MTEV est lié au terrain plus qu’à la chirurgie. Si à ce stade
aucune thérapeutique antithrombotique artérielle au long cours n’est
envisagée (AVK, antiagrégeants, etc), le risque de MTEV devient
prépondérant pour la chirurgie vasculaire intéressant les membres
inférieurs (tableau IV).
ANESTHÉSIE LOCORÉGIONALE
ET TRAITEMENTS ANTITHROMBOTIQUES
Il faut distinguer deux types d’ALR. Tout d’abord, il y a les ALR
médullaires (péridurales et rachianesthésies). La survenue d’un
hématome liée à une anesthésie médullaire est de l’ordre de
1/150 000 en l’absence de trouble de la coagulation. Cette incidence
augmente en présence d’antiagrégeant ou d’anticoagulant. Les
conséquences d’un hématome dans cette région contre-indiquent
Tableau IV. – Prévention des maladies thromboemboliques veineuses (MTEV) en chirurgie vasculaire, en l’absence de traitement antithrombotique artériel associé.
Risque de MTEV faible (situation peu courante en chirurgie vasculaire)
Déambulation précoce
Risque de MTEV modéré : âge > 40 ans, varices, contraception œstroprogestative,
insuffisance cardiaque décompensée, alitement périopératoire > 4 jours, infection, postpartum, obésité
HBPM à dose modérée ± bas de contention (sauf pontage des membres inférieurs) +
déambulation précoce
Risque de MTEV élevé : cancer évolutif, anomalies de certains facteurs de la coagulation : les protéines C, S, AT III, anticoagulants circulants, hémopathie, antécédent de
MTEV
HBPM à dose élevée + bas de contention (sauf pontage des membres inférieurs) +
déambulation précoce
Problèmes particuliers
Les bas de contention ne sont pas à utiliser pour les pontages artériels des membres
inférieurs (surtout distaux) : risque de bas débit artériel ; idem pour la surélévation des
jambes
Si des thérapeutiques antithrombotiques artérielles (HNF, aspirine, etc) sont utilisées à
dose curative en postopératoire d’une chirurgie vasculaire, les médicaments anti-MTEV
ne doivent pas être surajoutés (risque hémorragique)
HBPM : héparine de bas poids moléculaire ; HNF : héparine non fractionnée.
7
Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire
43-022
Techniques chirurgicales
Tableau V. – Antithrombotiques utilisables en fonction du site opératoire ou de la technique chirurgicale utilisée.
Site ou type chirurgical
Phase périopératoire
Thérapeutique au long cours
Aorte
Héparine pendant le clampage
Aspirine (diminue la morbidité cardiovasculaire)
Fogarty, thromboaspiration : ischémie aiguë, subaiguë
Symptômes (< 2 semaines)
Symptômes (> 2 semaines)
Thrombolytique seul
Chirurgie ± thrombolytique + héparine
Identique aux pontages périphériques
Identique aux pontages périphériques
Pontage périphérique :
- greffon veineux
- prothèse synthétique
Héparine pendant le clampage
Héparine pendant le clampage
AVK inutiles (sauf pontage fémoropoplité)
AVK et/ou aspirine et/ou dipyridamole
Endartériectomie carotidienne
Héparine pendant le clampage + aspirine
Aspirine
Angioplastie
Héparine
Aspirine ou aspirine + ticlopidine
AVK : antivitamine K.
Notions essentielles en dix points.
– Les antithrombotiques (sauf l’héparine) interviennent sur l’hémostase primaire en bloquant soit l’adhésion ou soit l’agrégation plaquettaire,
l’héparine agit sur la coagulation.
– Une altération de l’endothélium vasculaire est souvent à l’origine de la thrombose.
– La chirurgie est un des mécanismes inducteurs de thrombose par traumatisme (clampage vasculaire, ischémie sur la zone opératoire et
en aval du clampage) et réaction inflammatoire in situ.
– En chirurgie aortique, les HBPM ont une meilleure stabilité pharmacocinétique que les HNF.
– Dans l’ischémie aiguë des membres inférieurs, la technique de revascularisation est fonction du début d’apparition des symptômes. Moins
de 15 jours de symptômes, les résultats à long terme sont meilleurs avec la fibrinolyse alors que pour des symptômes plus anciens, seule la
revascularisation chirurgicale a une plus faible morbidité.
– Les HBPM préviennent mieux la thrombose que l’HNF pour les pontages fémoraux.
– L’échec de l’utilisation des AVK en postopératoire est souvent lié à la mauvaise compliance des patients au traitement.
– L’aspirine administrée à faible dose avant et après une endartériectomie carotidienne diminue les complications de morbidité et de
mortalité dans l’infarctus du myocarde et les accidents vasculaires cérébraux. L’aspirine au long cours n’offre pas de bénéfice en termes
de resténose.
– L’aspirine n’offre pas de bénéfice en cas de sténose carotidienne asymptomatique non opérée.
– Actuellement, aucun bénéfice n’est lié à un traitement antithrombotique pour l’angioplastie percutanée transluminale non coronarienne.
formellement l’anesthésie médullaire en cas d’anomalie de
l’hémostase. L’aspirine doit être arrêtée 10 jours avant l’intervention,
les AINS en moyenne 48 heures (si le patient ne doit pas arrêter son
aspirine, un relais par flurbiprofène peut être envisagé que l’on
arrête 24 heures avant l’intervention), pour les HBPM, maintenir un
délai de 24 heures entre la dernière injection et l’anesthésie, attendre
un délai de 4 heures après le retrait du cathéter de péridurale avant
de reprendre l’héparine. Pas d’ALR si un INR sous AVK est
supérieur à 2 ou dans les 24 heures d’une fibrinolyse, dans ces deux
cas précis et en cas d’urgence chirurgicale ne permettant pas une
anesthésie générale, il faut apporter des facteurs de coagulation ou
du fibrinogène pour pouvoir effectuer une ALR médullaire.
L’autre type d’ALR correspond aux blocs nerveux. Généralement,
les blocs très superficiels ne perforant pas les vaisseaux ne
présentent pas de réel danger (dans l’hypothèse d’un hématome,
celui-ci est rarement compressif). En ce qui concerne les blocs plus
profonds qui traversent la masse musculaire (exemple : le bloc
sciatique), ceux-ci s’apparentent aux mêmes dangers que les
injections intramusculaires en ce qui concerne la survenue d’un
hématome. Dans ce cas, les précautions concernant les
antithrombotiques doivent être identiques à celles concernant les
ALR médullaires.
8
Reste le cas particulier des blocs en regard du site opératoire
(exemple : le bloc cervical, cf supra), ceux-ci ne posent aucun
problème en termes d’hématome compressif, et le bloc cervical en
particulier n’a jamais démontré de risque hémorragique supérieur
par rapport à l’anesthésie générale.
Conclusion
Globalement la chirurgie vasculaire peut se limiter à l’utilisation de
deux ou trois antithrombotiques pour les techniques chirurgicales les
plus courantes (tableau V).
L’héparine reste la molécule à utiliser dans la période périopératoire
avec une préférence pour les HBPM plutôt que l’HNF. Dans le cas des
pontages prothétiques, l’aspirine prévient efficacement la thrombose.
Ceci n’est pas formellement démontré pour les greffons veineux. Dans
tous les cas, l’aspirine utilisée en chirurgie vasculaire diminue le risque
d’accident vasculaire cérébral ischémique et les complications morbides
et mortelles de l’infarctus du myocarde, sans que le risque
hémorragique soit plus élevé.
Techniques chirurgicales
Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire
43-022
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9
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 43-028-A
43-028-A
Chirurgie des anévrysmes artériels
des membres (I)
JB Ricco
C Camiade
P Patra
P Plagnol
Résumé. – Les anévrysmes artériels des membres sont moins fréquents que les anévrysmes aortiques, mais ils
représentent quand même 18 % des anévrysmes artériels. À côté de l’étiologie dégénérative habituelle, il
existe de nombreuses autres étiologies, en particulier traumatiques et iatrogènes, à l’origine de faux
anévrysmes survenant après cathétérisme artériel. Les anévrysmes infectieux seront traités à part, qu’ils
soient de faux ou de vrais anévrysmes infectés.
Tous les anévrysmes peuvent entraîner des complications graves et en particulier la perte du membre par
accident embolique. Nous avons revu dans cet article les différentes étiologies et les différentes techniques
chirurgicales. Nous avons précisé les différentes indications en fonction de la localisation de l’anévrysme et de
son étiologie.
© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Introduction
Les anévrysmes artériels périphériques ont une topographie et une
étiologie très variables.
Un anévrysme se définit comme une perte du parallélisme des
parois artérielles, localisée à un segment artériel, et correspondant à
une augmentation de 50 % du diamètre artériel normal. Une
artériomégalie se définit comme une dilatation artérielle diffuse, sans
perte du parallélisme des parois.
Ce travail a pour but de préciser les caractéristiques cliniques et les
traitements appropriés pour chaque localisation et pour chaque
étiologie. Les anévrysmes fémoraux et poplités sont les plus
fréquents, ils sont le plus souvent dégénératifs et s’observent avant
tout chez l’homme. À l’opposé, les anévrysmes des artères sousclavières sont le plus souvent dus à une compression artérielle dans
le défilé costoclaviculaire. À côté de ces anévrysmes fréquents, il
existe deux causes rares d’anévrysme artériel périphérique : ceux
survenant sur l’artère sous-clavière droite rétro-œsophagienne et
ceux survenant sur l’artère sciatique persistante. Bien que les lésions
artérielles des vascularites et de la maladie de Behçet soient le plus
souvent de type occlusif, les artères de ces malades peuvent aussi
évoluer vers une pathologie anévrysmale ; il en va de même pour
les dysplasies artérielles.
À côté de ces anévrysmes vrais, il existe de faux anévrysmes sans
paroi propre dont l’étiologie est variable : faux anévrysmes posttraumatiques, faux anévrysmes anastomotiques fémoraux, enfin
anévrysmes infectieux, qui représentent une entité à part et dont le
traitement a été modifié par l’utilisation des allogreffes artérielles
cryocongelées in situ.
Jean-Baptiste Ricco : Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service.
Christophe Camiade : Interne des Hôpitaux.
Service de chirurgie vasculaire, hôpital Jean-Bernard, centre hospitalier universitaire, 86021 Poitiers
cedex, France.
Philippe Patra : Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service, service de chirurgie
vasculaire, hôpital Guillaume et René Laennec, centre hospitalier universitaire, 44035 Nantes cedex, France.
Philippe Plagnol : Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service, service de chirurgie
vasculaire, centre hospitalier général Pasteur, rue Paul-Langevin, 33212 Langon cedex, France.
Ce chapitre technique est donc très varié et ce sont tous ces aspects
que nous allons décrire en choisissant, pour chacun d’entre eux, un
exemple et une localisation appropriés.
Étiologies
Les anévrysmes artériels des membres sont essentiellement
dégénératifs.
ANÉVRYSMES DÉGÉNÉRATIFS
Ils sont les plus fréquents, le plus souvent limités à une zone
anatomique (poplitée, fémorale superficielle, sous-clavière). Ils sont
quelquefois multiples et étendus à plusieurs segments anatomiques
contigus des membres ou situés à distance les uns des autres.
L’association à des lésions occlusives athéromateuses, notamment
carotidiennes et coronariennes, est fréquente.
AUTRES ÉTIOLOGIES
Les anévrysmes infectieux sont en général consécutifs à une greffe
bactérienne au niveau d’une lésion artérielle athéromateuse
préexistante. Ils réalisent des ruptures artérielles responsables
d’anévrysmes sacciformes.
Les faux anévrysmes sont des entités particulières. Il s’agit
d’anévrysmes sacciformes sans paroi propre dont l’étiologie est le
plus souvent iatrogène. L’exemple le plus simple étant la ponction
artérielle fémorale qui aboutit, par défaut d’hémostase, à la création
d’un hématome périartériel qui s’organise avec une coque fibreuse,
le faux anévrysme étant alimenté par l’orifice de ponction resté
perméable. Ces faux anévrysmes peuvent aussi se développer au
niveau des anastomoses fémorales des pontages aortiques. Leur
risque de rupture est important car ils communiquent à plein canal
avec la lumière artérielle. Enfin, il existe des anévrysmes plus rares
dus à des traumatismes artériels répétés suite à une compression
anatomique (anévrysme axillo-sous-clavier et syndrome de la
Toute référence à cet article doit porter la mention : Ricco JB, Camiade C, Patra P et Plagnol P. Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I). Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits
réservés), Techniques chirurgicales - Chirurgie vasculaire, 43-028-A, 2000, 19 p.
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
43-028-A
traversée thoracobrachiale, anévrysme poplité poststénotique des
artères poplitées piégées) ou externe (anévrysme de l’artère cubitale
au cours du syndrome du marteau hypothénar).
Classification
La classification des anévrysmes artériels périphériques que nous
avons adoptée est anatomique. Nous allons successivement décrire :
Techniques chirurgicales
Tableau I. – Données concernant les anévrysmes poplités.
Références
Sexe (hommes-femmes)
Âge moyen au moment du diagnostic
Anévrysmes asymptomatiques
Anévrysmes bilatéraux
Association à d’autres anévrysmes
Association à un AAA*
33-1
63 ans
39 %
56 %
50 %
33 %
[8, 13, 99, 24]
[8, 12, 14, 19, 24]
[2, 14, 24]
[12, 14, 24]
[8, 13, 19]
[2, 12, 14, 24]
AAA : anévrysme de l’aorte abdominale.
– les anévrysmes poplités ;
– les anévrysmes fémoraux ;
– les anévrysmes axillo-sous-claviers ;
– les anévrysmes du membre supérieur et de la main.
Pour certaines localisations, les étiologies seront décrites en raison
de leur fréquence relative. Par exemple, au niveau fémoral : les faux
anévrysmes et les anévrysmes infectieux. Pour chaque localisation,
les modalités opératoires sont précisées en décrivant à chaque fois
l’abord chirurgical et les principes du traitement. Nous préciserons
aussi certaines particularités du geste technique qui peuvent varier
en fonction de l’étiologie de l’anévrysme.
Anévrysmes des membres inférieurs
ANÉVRYSMES DÉGÉNÉRATIFS POPLITÉS
Les anévrysmes poplités sont les plus fréquents des anévrysmes
artériels périphériques (tableau I), 84 % d’après Dent [5] sur une série
de 1 488 malades porteurs d’anévrysmes artériels périphériques.
L’incidence des anévrysmes poplités bilatéraux varie entre 45 et
68 %. De plus, Vermillion [24] avait retrouvé, chez 55 % des malades
ayant un anévrysme poplité, d’autres anévrysmes artériels
périphériques.
Les anévrysmes poplités sont souvent fusiformes et étendus de
l’artère poplitée à l’artère fémorale superficielle (fig 1). Ce type
d’anévrysme est souvent associé à des lésions sténosantes sus- et
sous-jacentes, d’où la nécessité d’un bilan préopératoire
artériographique complet (fig 2). Les anévrysmes sacculaires, plus
rares, touchent préférentiellement la partie moyenne de l’artère
*
A
2
*
B
A. Dysplasie artérielle fémoropoplitée avec anévrysme fémoral superficiel.
B. Pièce opératoire montrant l’anévrysme avec un thrombus mural.
1 Dysplasie artérielle fémoropoplitée avec anévrysme poplité
bilatéral.
2
Techniques chirurgicales
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
3
43-028-A
Anévrysme poplité sacculaire avec thrombus mural.
A Échodoppler.
B. Artériographie montrant l’occlusion de l’artère tibiale
antérieure et de l’artère tibiale postérieure.
*
A
*
B
poplitée (fig 3), leur diamètre est plus important (fig 4), mais ils sont
peu étendus.
¶ Signes cliniques
Quatre séries cliniques (tableau I) montrent que 39 % des patients
porteurs d’un anévrysme poplité sont asymptomatiques lors du
diagnostic initial. La rupture des anévrysmes poplités est rare
(3 %) [24]. Le symptôme révélateur d’un anévrysme poplité pouvant
être une ischémie aiguë contemporaine de l’occlusion de
l’anévrysme ou de la dernière artère de jambe encore perméable, la
thrombose du lit artériel jambier constitue certainement l’un des
problèmes les plus difficiles à résoudre chez ces malades découverts
au stade ultime d’ischémie critique ou aiguë.
4 Volumineux anévrysme poplité sacculaire comprimant les veines poplitées.
Malade ayant une thrombose de la veine
poplitée.
¶ Diagnostic
Le diagnostic repose sur l’examen clinique qui comporte la palpation
du creux poplité. L’échodoppler couleur confirme le diagnostic. Il
permet de mesurer le diamètre de l’anévrysme et son extension en
longueur. Il met aussi en évidence l’existence ou non d’un thrombus
mural (fig 3). L’échodoppler donne aussi une idée exacte du réseau
artériel d’amont et d’aval. L’artériographie est primordiale pour
planifier la revascularisation et préciser l’état du lit artériel d’aval,
compte tenu de la fréquence des embolies artérielles jambières. La
tomodensitométrie permet de faire le diagnostic d’anévrysme
poplité, mais il s’agit d’un examen peu contributif pour adapter la
stratégie thérapeutique.
L’imagerie par résonance magnétique peut être utile quand on
suspecte un anévrysme sur une artère poplitée piégée, afin de
préciser ses rapports musculoligamentaires et de localiser la
compression extrinsèque.
¶ Indications chirurgicales
D’après les données de la littérature [23], il semble raisonnable de
recommander le traitement chirurgical pour tout anévrysme poplité
symptomatique, sauf si le lit artériel jambier ne permet pas
d’envisager une revascularisation.
Pour les anévrysmes poplités asymptomatiques, en l’absence
d’étude randomisée et épidémiologique récente, on doit décider de
l’attitude à adopter en tenant compte des études cliniques
chirurgicales publiées ces dernières années [1]. D’après ces données
de la littérature, il semble logique de recommander le traitement
chirurgical de tous les anévrysmes poplités asymptomatiques de
plus de 2 cm de diamètre, surtout s’ils contiennent un thrombus et
3
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
43-028-A
5 Exclusion-pontage.
Après ligature et section des deux pôles
de l’anévrysme, on restaure la continuité artérielle
par un pontage saphène. Cette technique laisse l’anévrysme vascularisé par ses branches collatérales. Il
est essentiel de réaliser une section complète en
amont et en aval de l’anévrysme pour éviter
sa recanalisation.
Tableau II. – Résultats de la chirurgie des anévrysmes poplités à
5 ans.
Références
Occlusion des pontages en veine saphène
Occlusion des pontages prothétiques
Taux de sauvetage de membre chez les
malades asymptomatiques
Taux de sauvetage de membre chez les
malades symptomatiques
20 %
55 %
98 %
[19, 8, 13, 12, 24, 14, 2]
81 %
[2, 8, 12, 13, 14, 19, 24]
Techniques chirurgicales
[2, 8, 12, 13, 14, 19, 24]
[2, 8, 12, 13, 14, 19, 24]
si les artères de jambe présentent des signes d’embolies
périphériques. La seule condition restrictive à cette indication
opératoire est de pouvoir disposer d’une veine saphène interne pour
faire le pontage (tableau II). La perméabilité médiocre des pontages
prothétiques sur la poplitée basse ou sur les artères de jambe ne
justifie pas leur utilisation systématique pour un petit anévrysme
poplité asymptomatique.
¶ Technique chirurgicale
Principes généraux
La technique chirurgicale doit tenir compte de l’extension de
l’anévrysme, des lésions associées de l’artère fémorale superficielle
et des artères de jambe. Le but de la chirurgie est d’éliminer tout
risque embolique et tout risque de rupture ou de compression à
partir de l’anévrysme. Les anévrysmes fusiformes, souvent étendus
jusqu’au tiers inférieur de l’artère fémorale superficielle, mais de
petit diamètre, ne compriment pas les structures de voisinage et
peuvent être traités par simple exclusion bipolaire avec sectionsuture de chaque extrémité artérielle et pontage autogène (fig 5). À
l’inverse, les anévrysmes sacculaires de gros diamètre compriment
les structures de voisinage et ont un potentiel évolutif local. Ils
doivent être traités par mise à plat (endoanévrismorraphie
oblitérante), associée à un pontage autogène (fig 6).
"
A1
La résection de l’anévrysme n’est pas recommandée, sauf si
l’anévrysme est de petite taille et non adhérent. Le danger de cette
technique est la plaie de la veine poplitée, voire des nerfs
périphériques, ces éléments étant étalés sur la poche anévrysmale
(fig 7).
"
A2
"
B1
"
B2
6
4
Mise à plat-pontage de l’anévrysme poplité.
A. Ouverture de l’anévrysme (A1), hémostase des collatérales par suture endoanévrysmale et revascularisation à l’aide d’une greffe veineuse inversée.
B. Anévrysme poplité avec des lésions artérielles associées d’amont ou d’aval. On
réalise selon la topographie des lésions une revascularisation par un pontage sa-
phène inversé implanté en terminal par voie endoanévrysmale et en latéral sur l’artère
jambière perméable (B1). Exclusion de l’anévrysme. Dysplasie artérielle d’amont :
anastomose proximale latérale, exclusion de l’anévrysme et anastomose distale terminale endoanévrysmale (B2).
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
Techniques chirurgicales
43-028-A
*
A
*
A
*
B
7 Résection-pontage.
Le risque de cette technique est la plaie veineuse ou nerveuse de voisinage. Cette technique n’est indiquée que pour les petits anévrysmes poplités.
A. La section première d’un des pôles de l’anévrysme permet de le mobiliser
et facilite sa dissection.
B. La restauration artérielle est effectuée dans un deuxième temps par interposition
d’une courte greffe veineuse inversée.
*
B
Le choix du greffon est simple. La veine grande saphène représente
le meilleur matériel pour les pontages artériels périphériques. Deux
possibilités sont offertes à l’opérateur :
– soit le greffon saphène est inversé et transposé. Cette technique
est bien adaptée au traitement des anévrysmes poplités ;
– soit on a recours à une greffe veineuse in situ qui est plus adaptée
aux longs pontages pour des lésions étendues dysplasiques ou
athéromateuses associées (fig 8).
En l’absence de veine grande saphène, on peut utiliser la veine petite
saphène ou une veine superficielle des membres supérieurs, mais
leur longueur et leur diamètre sont rarement suffisants et leur
perméabilité semble être inférieure à celle observée avec les veines
grandes saphènes. On peut aussi utiliser une homogreffe artérielle
cryocongelée qui semble donner des résultats acceptables à moyen
terme. Enfin, on peut utiliser une prothèse synthétique en polyester
ou en polytétrafluoroéthylène expansé (PTFE). En l’absence de
matériel autogène utilisable, il faut savoir rediscuter l’indication
opératoire en fonction de la symptomatologie, du diamètre de
l’anévrysme et de l’état des artères de jambe, le pronostic d’un
pontage fémoropoplité bas prothétique n’étant pas obligatoirement
plus favorable que celui d’un petit anévrysme poplité
asymptomatique.
*
C
Voies d’abord
Deux voies d’abord sont utilisées pour le traitement des anévrysmes
poplités dégénératifs. La voie interne est la plus utilisée, la voie
postérieure a des indications plus limitées.
• Voie interne
Le patient est installé en décubitus dorsal, le membre inférieur en
abduction, genou fléchi. L’opérateur est placé du côté opposé au
membre opéré, l’aide est placé en face de l’opérateur. L’installation
du membre dans un jersey stérile fendu et maintenu par un champ
*
D
8
Techniques de prélèvement de la veine saphène.
A, B, C. Incisions discontinues.
D. Incision continue.
5
43-028-A
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
transparent collant permet d’aborder la région fémorale au triangle
de Scarpa, la région fémoropoplitée et tout le trajet de la veine
grande saphène qui a été repéré. Si la veine grande saphène
homolatérale ne semble pas être utilisable pour le pontage, les deux
membres inférieurs sont mis dans le champ opératoire pour prélever
éventuellement
la
veine
Techniques chirurgicales
grande
saphène
La voie d’abord latérale nécessite deux incisions : une supra- et une
infragéniculée. Dans certains cas, ces deux incisions peuvent être
continues (fig 9).
9
6
controlatérale.
"
A1
"
A2
"
A3
"
A4
"
B1
"
B2
"
B3
"
B4
Abord de l’artère poplitée.
A. Incision cutanée de
l’abord poplité haut (A1).
Dissection sous-cutanée
et isolement de la veine
grande saphène (A2). Incision de la gaine du couturier (A3). Incision de
l’aponévrose jambière, de
la gaine du demitendineux, puis du droit
interne (A4).
B. Incision de découverte
de l’artère poplitée haute
(B1). L’aponévrose fémorale est incisée, découvrant le muscle sartorius,
récliné ou arriéré par un
écarteur
autostatique
(B2).
L’artère grande anastomotique, le nerf saphène
interne sont repérés au
sortir de l’aponévrose de
Hunter (B3). La section
du tendon du troisième
adducteur expose l’artère
poplitée et la jonction fémoropoplitée (B4).
Techniques chirurgicales
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
"
C1
43-028-A
"
C2
"
C3
9
"
C4
(suite)
C. Artère poplitée basse. Un écarteur de Beckman prend appui sur le jumeau interne en arrière
et expose l’artère poplitée basse. En cas d’anévrysme bas situé, il est nécessaire d’inciser l’arcade du soléaire pour exposer le tronc tibiopéronier. En combinant les deux voies supra- et infragéniculées, on
réalise un abord complet de l’artère poplitée haute et basse. L’artère poplitée moyenne ne peut être
abordée directement que si l’on sectionne l’insertion du muscle jumeau interne.
D. Détail de l’abord du tronc tibiopéronier par incision de l’arcade du soléaire.
"
C5
*
D
7
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
43-028-A
– Abord supragéniculé : l’incision cutanée débute à la jonction du
tiers moyen et du tiers inférieur de la cuisse, en avant du muscle
sartorius, et se termine 2 cm en arrière du condyle fémoral médial.
La veine grande saphène doit être repérée et disséquée sur toute la
hauteur de l’incision, puis protégée par une compresse imprégnée
de sérum. La veine grande saphène ne sera prélevée qu’après avoir
terminé la dissection de l’anévrysme et choisi les sites d’anastomoses
du pontage. L’aponévrose fémorale est incisée, découvrant le muscle
sartorius qui est récliné en arrière avec les tendons du muscle demitendineux par un écarteur autostatique de type Beckman, créant un
espace limité en haut par le muscle grand adducteur (fig 9A).
L’aponévrose de Hunter et l’anneau du grand adducteur sont
ensuite sectionnés pour exposer la jonction fémoropoplitée (fig 9B).
L’artère poplitée est entourée d’un réseau veineux très adhérent. Il
faut, dans la mesure du possible, respecter à ce niveau le nerf
saphène interne et l’artère descendante du genou (grande
anastomotique) qui est repérée à son émergence de l’aponévrose de
Hunter.
– Abord infragéniculé : l’incision cutanée débute 1 cm en arrière de
la saillie du condyle fémoral médial. Elle est légèrement arciforme
et se poursuit 2 cm en arrière du bord postérieur du tibia (fig 9C).
Elle correspond au trajet de la veine grande saphène qui est
disséquée et protégée. L’incision de l’aponévrose jambière remonte
au bord postérieur du sartorius. Pour voir correctement l’artère
poplitée basse, il faut remonter jusqu’aux tendons des muscles demitendineux et droit interne dont les gaines aponévrotiques sont
incisées. Un écarteur de Beckman, prenant appui en arrière sur le
muscle jumeau interne et en avant sur le bord postérieur du tibia,
*
A
10
*
B
8
Techniques chirurgicales
met en évidence le paquet vasculonerveux. L’artère poplitée est
accompagnée par deux veines poplitées, l’une antéroexterne, l’autre
postéro-interne qui recouvre l’artère lors de son abord. En cas
d’anévrysme bas situé, il est nécessaire de disséquer le tronc
tibiopéronier, après section de l’arcade du muscle soléaire (fig 9D).
Dans le cas d’anévrysmes volumineux, il peut être nécessaire de
désinsérer les tendons de la patte d’oie sans section musculaire afin
de contrôler l’anévrysme. Cet artifice technique permet de garder
un plan périosté solidaire qui est réinséré en fin d’intervention par
des agrafes fixées au tibia. Cette voie d’abord interne a des
avantages, car elle permet d’aborder tout l’axe artériel du membre
inférieur et de prélever sans problème la veine grande saphène. Elle
a aussi des inconvénients, car il est parfois nécessaire de sectionner
les tendons de la patte d’oie pour avoir un contrôle satisfaisant. En
tout état de cause, l’abord de l’artère poplitée moyenne
rétroarticulaire demeure difficile, à moins de sectionner l’insertion
du muscle jumeau interne, au prix de séquelles fonctionnelles
importantes.
• Voie postérieure
Le malade est installé en décubitus ventral. L’incision est faite en
« baïonnette », avec un court segment horizontal au niveau du pli
de flexion du genou (fig 10A). La partie supérieure, longue de 8 à
10 cm, est décalée en dedans et longe le relief externe du muscle
demi-membraneux. La partie inférieure est légèrement externe et
s’infléchit en dedans. Après incision de l’aponévrose superficielle, la
veine petite saphène et son nerf satellite sont refoulés latéralement.
*
C
*
D
Voie d’abord poplitée postérieure avec incision en « baïonnette ».
A, B. Après incision de l’aponévrose superficielle, la veine saphène externe et son nerf satellite sont refoulés latéralement.
C. L’anévrysme poplité est exposé en écartant latéralement les deux muscles jumeaux.
D. Cette voie rend difficile l’extension vers l’artère fémorale superficielle et le prélèvement de la saphène interne.
Techniques chirurgicales
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
La veine petite saphène sert de repère pour gagner la veine poplitée.
Elle peut servir de greffon autogène si sa longueur et son diamètre
sont suffisants. L’artère poplitée moyenne est alors exposée en
écartant, en dedans et de haut en bas, le muscle demi-membraneux
et le muscle jumeau interne, puis, en dehors et de haut en bas, le
muscle long biceps et le muscle jumeau externe (fig 10C). Les
avantages de cette voie d’abord sont l’absence de section
musculotendineuse et l’exploration aisée de l’artère poplitée
moyenne rétroarticulaire. Les inconvénients de cette voie d’abord
sont la difficulté de réaliser un prélèvement de la veine grande
saphène et de poursuivre la dissection vers l’artère fémorale
superficielle (fig 10D). Cette voie d’abord est indiquée dans les petits
anévrysmes survenant sur des artères poplitées piégées.
Traitement de l’anévrysme
• Mise à plat-pontage
Elle consiste à réaliser par voie endoanévrysmale l’oblitération des
collatérales partant de la poche. Il s’agit d’une technique sûre car
elle limite au minimum la dissection de l’anévrysme (fig 6). Elle
comporte l’abord de l’artère fémorale superficielle en amont et son
contrôle, puis l’abord de l’artère poplitée basse ou du trépied
jambier selon l’extension de l’anévrysme. Le malade est alors
hépariné (0,5 mg/kg) et l’anévrysme est clampé, puis ouvert. Le
thrombus mural est enlevé et l’hémostase des collatérales est faite
par des points de fil non résorbable (Prolènet). En cas de reflux
important, une hémostase temporaire des collatérales peut être
réalisée à l’aide de sondes à ballonnet occlusives, mais cela est
rarement nécessaire au niveau poplité. Si l’anévrysme est peu
étendu, on peut réaliser la totalité du geste par voie
endoanévrysmale en anastomosant la veine grande saphène inversée
en terminoterminal à chaque extrémité de l’anévrysme poplité. Cette
anastomose endosacculaire est souvent facile à réaliser. Elle évite
toute dissection inutile. Elle ne peut être réalisée que si l’axe artériel
d’amont et d’aval est relativement sain. En cas de lésions artérielles
d’amont ou d’aval, la mise à plat de l’anévrysme est associée à une
revascularisation exosacculaire, sur une artère saine disséquée à
distance de l’anévrysme (fig 6).
• Exclusion-pontage
Elle associe l’exclusion de l’anévrysme et la revascularisation
artérielle par un pontage (fig 5). Il s’agit d’un traitement « à distance
de l’anévrysme ». Cette méthode a des avantages : elle est simple,
rapide ; mais elle a un inconvénient majeur : elle laisse l’anévrysme
revascularisé par ses collatérales, d’où risque de croissance de
l’anévrysme et de rupture. Cette méthode peut être utilisée pour les
anévrysmes poplités de petit diamètre qui ont essentiellement un
risque embolique. Elle n’est pas recommandée pour les anévrysmes
dont le volume est important. De plus, l’anévrysme restant en place,
son volume rend difficile le passage du greffon en position
anatomique et conduit à réaliser un trajet sous-cutané par
tunnellisation.
• Résection-pontage
Elle comporte l’exérèse de l’anévrysme et la restauration artérielle
par un pontage autogène (fig 7). Cette technique classique est
cependant dangereuse car la dissection de l’anévrysme expose à une
blessure des éléments de voisinage qui sont le plus souvent
comprimés et étalés sur la paroi de l’anévrysme poplité. La
résection-pontage peut être réalisée pour les petits anévrysmes
sacculaires et les anévrysmes infectieux.
• Résultats du traitement chirurgical
Les résultats du traitement chirurgical des anévrysmes poplités
asymptomatiques sont excellents avec une perméabilité à 5 ans de
80 % et un taux de sauvetage de membre de 98 %. À l’opposé, les
malades opérés pour un anévrysme symptomatique ont un taux
43-028-A
11
Anévrysme poplité fissuré. Traitement par stent-graft poplité. Image
de fissuration anévrysmale injectée par le
produit de contraste.
d’amputation de 19 %, un taux de mortalité de 5 % et une
perméabilité à 5 ans de 65 % [10].
• Endoprothèses couvertes
Dans certains cas, chez des sujets en très mauvais état général,
inopérables ou ayant une espérance de vie limitée, on peut mettre
en place des endoprothèses couvertes. Celles-ci permettent de
conserver, sous anesthésie locale, le membre inférieur, à condition
d’avoir un lit d’aval jambier suffisant. Cette méthode de sauvetage a
permis de passer un cap chez des malades inopérables qui faisaient
des embolies distales récidivantes ou qui avaient une fissuration de
l’anévrysme poplité (fig 11). Il faut discuter ces indications en
fonction de la localisation de l’anévrysme poplité. La mise en place
d’une endoprothèse sur l’artère poplitée haute sans plicature au pli
de flexion est possible. Elle est discutable sur la poplitée moyenne
au niveau de l’interligne articulaire. Il n’y a pas actuellement de
recul suffisant pour l’appréciation de cette technique.
TRAITEMENT DES ANÉVRYSMES POPLITÉS
COMPLIQUÉS
¶ Rupture
Le traitement des ruptures nécessite un contrôle d’amont rapide et
un clampage. Ce contrôle est facile pour les anévrysmes poplités.
L’hémostase d’aval peut être assurée par des ballonnets occlusifs.
Le reste du traitement chirurgical est inchangé. Dans ce contexte,
l’infection de l’anévrysme doit être évoquée et fait discuter comme
premier choix une résection avec prélèvement bactériologique et
anatomopathologique, puis une mise à plat associée à une
revascularisation par une greffe veineuse autologue. À défaut, une
allogreffe artérielle cryocongelée est préférable aux matériaux
prothétiques.
¶ Thrombose aiguë
Comme pour toute oblitération artérielle aiguë, le délai écoulé entre
la survenue de l’oblitération artérielle et la restauration du flux
artériel est capital.
Les moyens thérapeutiques sont pharmacologiques et chirurgicaux.
Dès l’évocation du diagnostic, l’héparine intraveineuse doit être
débutée à doses efficaces pour éviter l’extension de la thrombose.
Les fibrinolytiques peuvent être employés par voie intra-artérielle in
situ à l’aide d’un cathéter multiperforé introduit par voie percutanée
au niveau de l’artère fémorale, et dont l’extrémité est mise en place
dans l’anévrysme. Cette fibrinolyse est contrôlée par des
artériographies répétées toutes les 6 heures et par le dosage de la
fibrine. Les résultats de la fibrinolyse semblent être satisfaisants pour
de nombreux auteurs [10], avec une récupération partielle ou totale
du lit d’aval, des séquelles moindres et une meilleure perméabilité
de la revascularisation artérielle. Ces résultats favorables n’ont pas
été confirmés par l’étude randomisée STILE [25]. La durée de la
fibrinolyse étant en moyenne de 12 heures, cette méthode ne peut
pas être réalisée pour les ischémies aiguës où l’on ne dispose que de
9
43-028-A
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
*
A
Techniques chirurgicales
*
B
12
A. Anévrysme poplité thrombosé à partir du Hunter.
B. Récupération progressive d’un lit d’aval après fibrinolyse locale (rt-PA [recombinant tissue plasminogen activator]).
C. Revascularisation par un pontage fémoropoplité bas réalisée 90 min après le début de la fibrinolyse
locale.
*
C
quelques heures pour réussir une revascularisation distale. Pour
notre part, nous préconisons chez ces malades en ischémie aiguë
une attitude intermédiaire, avec un abord chirurgical premier de la
poplitée basse et du trépied jambier en aval de l’anévrysme (fig 12).
La réalisation d’une artériographie directe est suivie, si nécessaire,
d’une thrombolyse du lit d’aval par rt-PA (recombinant tissue
plasminogen activator) ou urokinase. Cette méthode a l’avantage de
ne pas faire perdre de temps à réaliser une fibrinolyse de la poche
anévrysmale et de l’artère fémorale superficielle dont l’intérêt est
nul, pour se concentrer sur la lyse du thrombus des artères de jambe.
Le reste de l’intervention (mise à plat de l’anévrysme poplité,
préparation de la veine grande saphène) se déroule pendant que la
fibrinolyse locale agit. La revascularisation est réalisée dès que
l’artériographie montre la récupération d’une artère de jambe
correcte. C’est en effet la perméabilité du lit d’aval qui conditionne
le résultat de la revascularisation (fig 13). Cette technique représente
un gain de temps qui permet d’espérer un meilleur résultat
fonctionnel sur les structures nerveuses et musculaires (fig 14). Des
aponévrotomies sont nécessaires si l’ischémie a été sévère et
prolongée. En postopératoire, outre la surveillance des bilans
biologiques (créatinémie et kaliémie), il faut réaliser une surveillance
clinique du membre inférieur avec échographie-doppler, et
éventuellement prise des pressions dans les loges musculaires. En
résumé, si le lit d’aval est perméable au-dessous de l’anévrysme
thrombosé, il faut réaliser un pontage d’emblée ; s’il n’y a pas de lit
d’aval jambier visible et si le malade est en ischémie subaiguë, on
10
13
Anévrysme poplité thrombosé. Ischémie aiguë. Récupération après 45 min
de fibrinolyse sous-poplitée faite directement dans l’artère tibiale postérieure.
peut réaliser une fibrinolyse percutanée suivie par une
revascularisation conventionnelle. Enfin, si le malade est en ischémie
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
Techniques chirurgicales
*
A
14
A. Thrombose aiguë d’un anévrysme poplité gauche sur artère poplitée piégée.
B. Abord des lésions par voie postérieure.
aiguë, il faut réaliser un abord poplité bas et une fibrinolyse locale
peropératoire pour récupérer une artère de jambe, et faire un
pontage tibial.
43-028-A
*
B
*
C
C. Résection de l’anévrysme et greffe veineuse poplitée terminoterminale.
Tableau III. – Données concernant les anévrysmes dégénératifs de
l’artère fémorale commune.
Références
ANÉVRYSMES FÉMORAUX
¶ Anévrysmes fémoraux dégénératifs
Il s’agit, après la localisation poplitée, de la localisation la plus
fréquente des anévrysmes artériels périphériques. Les anévrysmes
fémoraux dégénératifs siègent habituellement au niveau de l’artère
fémorale commune. Le tableau III montre leur association fréquente
avec d’autres localisations de la maladie anévrysmale. Les
anévrysmes fémoraux sont fréquemment bilatéraux et associés à
d’autres anévrysmes artériels périphériques (fig 15). Leur localisation
au niveau de l’artère fémorale profonde est plus rare (fig 16).
Comme les anévrysmes poplités, les anévrysmes fémoraux peuvent
entraîner une ischémie distale par embolie ou thrombose de
l’anévrysme, une compression locale (nerveuse ou veineuse). Les
embolies distales sont fréquentes. La rupture anévrysmale est plus
rare : elle survient dans moins de 5 % des cas [16].
En raison de leur localisation, les anévrysmes fémoraux sont
habituellement diagnostiqués par la palpation. L’échodoppler
*
A
15
Anévrysmes fémoraux dégénératifs bilatéraux.
A. Aspect tomodensitométrique.
Âge moyen au moment du diagnostic
Sexe (hommes-femmes)
Anévrysmes bilatéraux
Association à un AAA
Risque d’amputation en l’absence de traitement
d’un petit anévrysme fémoral asymptomatique
Risque relatif de rupture et de complications
thromboemboliques
65 ans
28-1
54 %
75 %
5%
2/13
[3, 11, 16]
[3, 11, 16]
[3, 11, 16]
[3, 11, 16]
[11]
[11]
AAA : anévrysme de l’aorte abdominale.
confirme aisément le diagnostic et précise la qualité du réseau
artériel d’amont et d’aval, ainsi que l’existence d’autres lésions
anévrysmales et de sténoses athéromateuses. Les anévrysmes
fémoraux sont souvent associés à un anévrysme aortique ou poplité
et sont souvent bilatéraux. Les anévrysmes fémoraux
symptomatiques doivent être opérés en raison du risque d’embolie
distale et de rupture.
À l’opposé, l’indication opératoire est plus discutée pour les
anévrysmes asymptomatiques. Graham [11] avait retrouvé, dans une
*
B
*
C
B, C. Vues peropératoires.
11
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
43-028-A
16
Anévrysme de l’artère fémorale profonde droite.
Techniques chirurgicales
série de 105 anévrysmes fémoraux non opérés, qu’un tiers des
malades avaient des complications ischémiques après un suivi
moyen de 28 mois. L’indication opératoire des anévrysmes fémoraux
asymptomatiques dépend du diamètre de l’anévrysme (3-4 cm), de
l’existence d’un thrombus mural à l’échodoppler et des facteurs de
risque du malade.
Technique opératoire des anévrysmes fémoraux dégénératifs
L’atteinte fréquente de la bifurcation fémorale explique les
différentes modalités techniques du traitement chirurgical des
anévrysmes fémoraux.
La voie d’abord est inguinale externe, arciforme, passant en dehors
de la lame ganglionnaire afin de minimiser les risques de
lymphocèle et de lymphorrée (fig 17). Si l’anévrysme fémoral est
inflammatoire ou de volume important, il est préférable de contrôler
dans un premier temps l’artère iliaque externe par une voie suscrurale rétropéritonéale. Au pôle inférieur de l’anévrysme, on
contrôle facilement l’artère fémorale superficielle. Le contrôle de
l’artère fémorale profonde est plus délicat si l’anévrysme s’étend
"
A1
"
B3
"
B1
"
A2
"
B2
17
"
A3
12
A. Abord de l’artère fémorale commune : incision
verticale arciforme.
B. Incision passant en dehors de la lame ganglionnaire.
C. Au pôle inférieur de l’anévrysme, on contrôle
l’artère fémorale superficielle. Le contrôle de l’artère
fémorale profonde peut nécessiter une dissection
plus étendue avec section de la veine circonflexe externe et quadricipitale, ou être fait par voie endoanévrysmale par une sonde à ballonnet.
*
C
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
Techniques chirurgicales
18
43-028-A
A. Anévrysme fémoral respectant l’origine de l’artère fémorale superficielle et de l’artère fémorale profonde.
B. Résection de l’anévrysme.
C. Revascularisation par un pontage prothétique terminoterminal au niveau de la jonction iliofémorale et terminal
sur une palette comprenant les ostiums de l’artère fémorale
profonde et superficielle.
D. Mise à plat de l’anévrysme fémoral et pontage avec réimplantation directe de l’artère fémorale profonde dont l’hémostase a été faite par une sonde à ballonnet.
E. Même technique de revascularisation avec résection
de l’anévrysme fémoral.
F, G. Revascularisation limitée à l’artère fémorale profonde en
cas d’occlusion de l’artère fémorale superficielle.
*
A
*
B
*
C
*
F
*
D
*
E
vers l’origine de la bifurcation fémorale. Dans ce cas, il faut réaliser,
après clampage, l’occlusion temporaire de l’artère fémorale profonde
par voie endoanévrysmale à l’aide d’une sonde à ballonnet.
Après héparinisation et clampage, l’anévrysme est mis à plat, la
revascularisation artérielle est effectuée par une prothèse synthétique
tubulaire ou bifurquée en polyester ou en PTFE.
Dans le cas le plus simple, la prothèse est anastomosée en
terminoterminal sur les derniers centimètres de l’artère iliaque
externe, puis sur une palette comportant les ostiums de l’artère
fémorale superficielle et de l’artère fémorale profonde (fig 18). Si
l’anévrysme se continue sur les premiers centimètres de l’artère
fémorale profonde et de l’artère fémorale superficielle, il faut réaliser
un pontage bifurqué en commençant par le pontage fémoral profond
sur lequel on branche en Y un jambage revascularisant l’artère
fémorale superficielle. L’utilisation préférentielle d’un pontage
veineux autogène ne se justifie pas dans cette localisation.
*
G
¶ Anévrysmes infectieux fémoraux
L’infection des artères des membres est rare. Elle se traduit par une
thrombose, une rupture, et plus rarement par un anévrysme
infectieux (fig 19). Une enquête réalisée en 1997 en France [17] avait
retrouvé 44 anévrysmes des artères des membres, dont
30 anévrysmes de l’artère fémorale commune et de l’artère fémorale
superficielle. Ces malades avaient une symptomatologie évocatrice
d’une infection locale dans 84 % des cas, une rupture ou une
fissuration avait été révélatrice dans 13,7 % des cas.
Parmi ces malades, 27,4 % avaient une endocardite infectieuse
responsable d’anévrysmes infectieux secondaires ou « mycotiques »
se développant à partir d’une greffe bactérienne sur une paroi
artérielle souvent saine. Le délai d’apparition de l’anévrysme après
l’endocardite infectieuse était variable, allant de 5 jours à 3 ans.
Dans cette même étude, 58,8 % des malades avaient une bactériémie
d’origine extracardiaque responsable d’anévrysmes infectieux
13
43-028-A
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
*
A
19
Techniques chirurgicales
*
B
A. Anévrysme infectieux de l’artère fémorale profonde, maladie d’Osler.
B. Anévrysme infectieux de l’artère fémorale superficielle.
*
C
C. Anévrysme infectieux poplité.
*
A
20
Anévrysme infectieux poplité sur un pontage en polytétrafluoroéthylène.
A. Aspect clinique.
B. Artériographie montrant un faux anévrysme poplité.
C. Pièce opératoire montrant l’anévrysme infectieux réséqué.
*
B
primaires développés sur une lésion athéromateuse préexistante.
Toute bactériémie peut être à l’origine d’une greffe infectieuse
artérielle, particulièrement celles à point de départ digestif dues aux
salmonelles. L’anévrysme infectieux primaire peut aussi compliquer
une immunodéficience acquise.
Chez les malades restants (13,7 %), l’anévrysme infectieux était la
conséquence d’une contamination externe à partir d’un traumatisme
ouvert, d’une ponction artérielle, d’un foyer infectieux de voisinage
ou de l’infection d’un pontage artériel prothétique (fig 20). Tout
cathétérisme artériel est susceptible d’entraîner un faux anévrysme
infectieux. L’infection artérielle après injection de drogue constitue
une entité particulièrement grave en raison du terrain sur lequel elle
14
*
C
survient. Le toxicomane ponctionne ses artères quand toutes les
veines périphériques sont thrombosées en raison des phlébites
infectieuses répétées. L’anévrysme infectieux se développe alors
chez un malade dénutri, souvent contaminé par les virus de
l’immunodéficience humaine (VIH), de l’hépatite B (VHB) ou C
(VHC), ce qui aggrave le pronostic chirurgical.
Dans tous les cas, l’artériographie est l’examen complémentaire
essentiel. Elle peut montrer l’aspect caractéristique multilobé des
anévrysmes infectieux sans calcification, associé à d’autres
localisations anévrysmales ou emboliques. Les germes le plus
souvent rencontrés sont le staphylocoque doré, le streptocoque et
les salmonelles.
Techniques chirurgicales
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
43-028-A
21
Pontage croisé par voie périnéale.
A. Installation du malade,
les cuisses en abduction, le
scrotum est relevé et fixé à la
paroi abdominale.
B. Trajet du pontage croisé
par voie périnéale.
*
B
*
A
Traitement des anévrysmes infectieux
Deux techniques sont possibles :
Le traitement antibiotique des anévrysmes infectieux est toujours
associé au traitement chirurgical. Dans la littérature, la durée du
traitement antibiotique est variable. Une durée moyenne de
6 semaines a été proposée.
– pontage croisé par voie périnéale : il n’est réalisable que si l’axe
iliofémoral controlatéral est indemne de lésion sténosante ou si la
sténose iliaque controlatérale est dilatable dans un premier temps.
La nécessité de passer à distance de la zone infectée impose de
réaliser le pontage par voie périnéale. Les deux cuisses sont
maintenues en abduction et légère flexion, le scrotum est relevé et
fixé à la paroi abdominale (fig 21). Le pontage peut être réalisé sur
l’artère fémorale profonde ou l’artère fémorale superficielle. L’artère
fémorale profonde est abordée par voie médiocrurale en passant
entre les muscles sartorius et droit antérieur, puis entre le vaste
interne et le moyen adducteur. L’abord fémoral controlatéral est un
abord inguinal classique du trépied fémoral. La tunnellisation
périnéale est réalisée en passant en avant du muscle moyen
adducteur de chaque côté. Elle est réalisée au doigt, à la partie
postérieure de la racine des bourses, pour effondrer la cloison
médiane. La tunnellisation est poursuivie jusqu’à l’artère fémorale
profonde ou superficielle ;
Traitement chirurgical.
Le traitement d’un anévrysme infectieux fémoral comprend outre la
résection de l’anévrysme, le parage et le drainage des tissus infectés.
Ce temps est essentiel, en particulier pour les anévrysmes infectés
des toxicomanes. La revascularisation est le plus souvent nécessaire
au niveau de l’artère fémorale commune ; , elle n’est pas toujours
indispensable au niveau de l’artère fémorale superficielle. Si
l’anévrysme fémoral infecté est rompu avec une cellulite diffuse de
la région inguinale, le risque de rupture secondaire du pontage est
important. Yeager et Porter [26] ont montré que, chez le toxicomane,
l’excision-ligature entraînait 23 % d’amputations et 6 %
d’hémorragies graves, alors que la revascularisation in situ autogène
entraînait 6 % d’amputations et 31 % d’hémorragies graves. Ces
anévrysmes infectieux sont donc difficiles à traiter et il n’existe pas
de solution idéale.
Il faut essayer de tenir compte des règles de la chirurgie vasculaire
en milieu septique, c’est-à-dire réaliser des anastomoses sur des
artères saines et tunnelliser le pontage en tissu sain avec, si
nécessaire, un lambeau de couverture épiploïque. Une fois ce temps
vasculaire « propre » réalisé, il faut supprimer le foyer infectieux
artériel en réalisant une excision large de l’anévrysme infectieux et
des tissus infectés.
• Revascularisation extra-anatomique
Elle consiste à effectuer dans un premier temps le pontage à distance
du foyer infectieux, puis, après fermeture des incisions, à réaliser le
parage des tissus infectés et la résection de l’anévrysme fémoral.
C’est la technique de choix en cas de rupture infectieuse
hémorragique, mais la revascularisation extra-anatomique n’est pas
toujours facile à réaliser au niveau fémoral.
– pontage iliofémoral par le trou obturateur : comme pour le pontage
fémorofémoral croisé, l’abord de la fémorale profonde est réalisé par
voie médiocrurale. L’abord de l’artère iliaque homolatérale est
réalisé par voie sous-péritonéale (fig 22). L’incision iliaque est
prolongée vers le pubis afin de permettre l’abord de la région
obturatrice. La tunnellisation est réalisée à la partie postéroinférieure de la membrane obturatrice afin d’éviter la blessure du
paquet vasculonerveux obturateur. Dans les faits, cette tunnellisation
est le plus souvent aveugle. Le tunnellisateur est introduit à partir
de la voie d’abord crurale, le long du muscle grand adducteur et en
avant du demi-tendineux. On palpe et on guide le tunnellisateur au
travers de la membrane obturatrice. Cette technique peut se
compliquer lors de la tunnellisation par la rupture de volumineuses
veines pelviennes de suppléance qui sont la conséquence de la
thrombose veineuse iliofémorale souvent associée à l’infection
artérielle fémorale.
15
43-028-A
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
Techniques chirurgicales
*
A
*
B
22
Pontage iliofémoral par le trou obturateur.
A. Préparation du champ opératoire permettant de tunnelliser le pontage à distance
de l’anévrysme septique fémoral.
B. Trajets de tunnellisation du pontage obturateur.
C. Passage d’un clamp tracteur à partir de la face endopelvienne du canal sous-pubien.
D. Sites possibles d’implantation proximale du pontage obturateur. 1. Sur l’artère iliaque
commune homolatérale ou controlatérale ; 2. sur l’artère iliaque interne controlatérale,
le pontage étant tunnellisé dans l’espace présacré pour rejoindre le trou obturateur ; 3.
la revascularisation extra-anatomique est suivie de l’exclusion de l’anévrysme septique
(mise à plat et drainage ou résection).
*
C
*
D
16
Techniques chirurgicales
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
Tableau IV. – Données concernant les faux anévrysmes fémoraux.
Références
Incidence des faux anévrysmes fémoraux
Incidence d’anévrysmes décelés par angiographie
numérisée
Sexe (hommes-femmes)
Intervention initiale pour anévrysme
Intervention initiale pour lésion occlusive
Anévrysme après reconstruction aorto-iliaque
Anévrysme après reconstruction fémoropoplitée
Récidive après suture simple
Récidive après interposition prothétique
4%
44 %
[6, 7, 21]
8,5-1
41 %
59 %
92 %
8%
27 %
7%
[4, 6, 19]
[21]
[6, 7, 19]
[4, 6, 7, 19]
[4, 6, 19]
[4, 6, 19]
[4, 6, 19]
[4, 6, 19]
• Revascularisation in situ
La revascularisation in situ peut être proposée si l’infection est
contrôlée. Le matériel utilisé doit être autogène : veine grande
saphène, veine petite saphène ou artère fémorale superficielle
prélevée sur le membre controlatéral. En l’absence de greffon
autogène, les allogreffes cryocongelées peuvent être utilisées in situ.
L’utilisation des prothèses polyester ou PTFE, imprégnées ou non
d’antibiotiques, n’est pas recommandée en cas de revascularisation
in situ.
¶ Faux anévrysmes fémoraux
Les faux anévrysmes peuvent être la conséquence de plusieurs
mécanismes qui ont en commun l’existence d’une rupture de la
continuité artérielle avec une extravasation de sang dans les tissus
périartériels.
Faux anévrysmes fémoraux anastomotiques
La plupart des faux anévrysmes iatrogènes surviennent après une
reconstruction artérielle (tableau IV). Ils sont la conséquence d’une
désunion entre la prothèse et l’artère native (fig 23). La fuite
sanguine conduit à la formation d’une coque fibreuse qui limite la
collection sanguine, mais se développe progressivement sous l’effet
de la pression artérielle. La fréquence des faux anévrysmes est
variable. Szilagyi [22] a retrouvé 1,7 % de faux anévrysmes dont les
trois quarts étaient au niveau fémoral. Les conditions d’apparition
des faux anévrysmes anastomotiques fémoraux sont précisées sur le
43-028-A
tableau IV. L’infection joue certainement un rôle dans la survenue
des faux anévrysmes anastomotiques. Seabrook [20] a retrouvé, après
mise en culture dans des milieux enrichis et après sonication de la
prothèse, 60 % de cultures positives. Le germe mis en évidence était
le plus souvent un Staphylococcus epidermidis.
En dehors des prothèses artérielles, toute ponction artérielle peut
aussi engendrer la formation d’un faux anévrysme. Messina [15] a
montré un taux de complication des cathétérismes fémoraux à visée
thérapeutique de 3,4 %, les faux anévrysmes représentant 16 % de
ces complications. Les cathétérismes diagnostiques avaient un taux
de complication de 0,7 %, les faux anévrysmes représentant 32 % de
ces complications. La prévention des faux anévrysmes par ponction
fémorale est actuellement en évaluation. Il s’agit de systèmes de
fermeture artérielle transcutanés type perclose ou angioseal.
• Traitement chirurgical des faux anévrysmes
anastomotiques fémoraux
Le principe du traitement chirurgical consiste à reconstruire
l’anastomose désunie et à la transformer en anastomose
terminoterminale [18]. Il est souhaitable, dans un premier temps, de
contrôler la prothèse par une courte voie d’abord sus-crurale
rétropéritonéale. Dans un deuxième temps, une voie inguinale
prolongée vers la cuisse doit permettre de contrôler l’artère fémorale
superficielle et l’artère fémorale profonde (fig 24). Si le contrôle est
difficile du fait de la sclérose périanévrysmale, il faut prévoir un
contrôle endoanévrysmal d’aval par des sondes à ballonnet dès le
clampage d’amont et l’ouverture du faux anévrysme. Dès
l’ouverture, l’évacuation du thrombus permet de retrouver
facilement la désunion de l’anastomose et de compléter
éventuellement l’hémostase par la mise en place de sondes à
ballonnet occlusives. Même si la désunion est partielle, il faut la
traiter comme une désunion totale et réimplanter la prothèse en
mettant en place une prothèse intermédiaire anastomosée en
terminoterminal sur la prothèse en amont, ce qui impose de suturer
la fémorale commune ou l’origine de l’iliaque externe par voie
endoanévrysmale. L’anastomose distale terminoterminale est ensuite
faite en suturant en « canon de fusil » le bord commun ouvert en
« V » des artères fémorales profonde et superficielle. Les deux
artères ainsi réunies sont réimplantées en terminoterminal dans la
prothèse. Si l’ostium des deux artères est trop éloigné ou
23
Faux anévrysme anastomotique fémoral : désunion entre
la prothèse et l’artère native.
17
43-028-A
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
Techniques chirurgicales
*
A
*
B
*
C
24
*
D
18
Faux anévrysme anastomotique fémoral.
A. Contrôle artériel d’amont par abord fémoral ou rétropéritonéal. Ouverture
du faux anévrysme et hémostase endovasculaire par sondes à ballonnet occlusives.
B. Cure du faux anévrysme par interposition prothétique utilisant le même site
d’anastomose distale après ablation de tout le matériel prothétique.
C. Cure du faux anévrysme avec résection de l’ancienne anastomose distale, suture
de l’artère fémorale commune en amont, anastomose proximale du segment prothétique interposé et anastomose distale du segment prothétique interposé sur les berges de l’ostium de l’artère fémorale profonde et superficielle.
D. Interposition d’un pontage fémoral terminoterminal sur lequel est implanté
le segment prothétique. Cette technique permet de conserver la vascularisation
iliaque rétrograde vers l’iliaque interne.
Techniques chirurgicales
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (I)
pathologique, on réimplante d’abord l’artère fémorale profonde,
puis l’artère fémorale superficielle par un court pontage en Y.
• Faux anévrysmes traumatiques
À côté des faux anévrysmes infectés déjà vus, il faut insister sur les
complications artérielles des cathétérismes à visée diagnostique et
thérapeutique. Toute exploration endoartérielle entraîne une brèche
artérielle. De façon immédiate ou retardée, un hématome important
peut se développer. La possibilité d’extension rétropéritonéale
latente cliniquement, surtout après ponction haute au-dessus de
l’arcade crurale, doit être connue. Les faux anévrysmes résultent de
la reperméabilisation secondaire de ces hématomes et sont constitués
par une poche contenant du sang circulant, en communication avec
la lumière artérielle. L’échodoppler couleur est actuellement le
meilleur examen pour confirmer le diagnostic, visualiser la poche,
préciser sa taille exacte et authentifier la présence d’un flux
systolique, traduisant un faux anévrysme communicant, ou d’un
flux continu traduisant une fistule artérioveineuse.
Le traitement des faux anévrysmes dépend de leur
symptomatologie, de leur diamètre et de leur évolution suivie par
échodoppler couleur. On admet que les anévrysmes
symptomatiques de plus de 2 cm de diamètre augmentant à deux
examens doppler successifs nécessitent un traitement chirurgical.
Plus récemment, des auteurs ont proposé dans un premier temps
une compression manuelle guidée par le doppler. Cette technique
consiste à comprimer l’anévrysme tout en maintenant un flux dans
43-028-A
l’artère adjacente. Le taux de succès global de cette technique est de
56 % pour Feld [9]. Ce taux de succès varie selon que le malade reçoit
ou non un traitement anticoagulant : 88 % de succès en son absence
et seulement 29 % en sa présence. Il existe un taux de récidive de
10 %. On peut donc raisonnablement proposer cette technique non
invasive pour les faux anévrysmes de moins de 2 cm de diamètre,
asymptomatiques chez des malades qui n’ont pas besoin d’être
anticoagulés. Après l’échec de deux tentatives, le malade doit être
opéré. Le traitement non chirurgical s’est récemment enrichi de
l’apport des techniques endovasculaires, par exemple des
endoprothèses couvertes, dont l’utilisation au niveau fémoral est
discutable compte tenu du risque d’occlusion de l’artère fémorale
profonde et de plicature du stent.
Traitement chirurgical
Le traitement chirurgical des faux anévrysmes dus aux cathétérismes
comporte un contrôle de l’artère fémorale commune ou de l’artère
iliaque externe par une voie sus-crurale, puis l’ouverture de la poche
anévrysmale et la fermeture de la brèche artérielle par des points
séparés. Les faux anévrysmes fémoraux associés à une fistule
artérioveineuse nécessitent une exploration artérielle guidée par
l’échodoppler peropératoire jusqu’à la mise en évidence de la fistule
et sa fermeture par voie endoartérielle ou endoveineuse. La
disparition du thrill et du signal doppler continu permet de
confirmer immédiatement l’efficacité du geste chirurgical.
Références
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19
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 43-028-B
43-028-B
Chirurgie des anévrysmes artériels
des membres (II)
JB Ricco
C Camiade
P Patra
P Plagnol
Anévrysmes des membres supérieurs
ANÉVRYSMES AXILLO-SOUS-CLAVIERS DÉGÉNÉRATIFS
Les anévrysmes axillo-sous-claviers sont rares, mais il est difficile
d’en connaître l’incidence exacte.
Les étiologies les plus fréquentes sont les traumatismes et
l’athérosclérose. Les autres étiologies possibles sont les infections,
les artérites inflammatoires, les dysplasies fibromusculaires et les
anomalies congénitales (tableau I).
Les traumatismes chroniques entraînent préférentiellement des
anévrysmes de l’artère sous-clavière distale. Ils sont causés
habituellement par l’existence d’une côte cervicale ou par une bande
fibreuse retrouvée dans le cadre d’un syndrome du défilé thoracique.
Les anévrysmes de l’artère sous-clavière proximale et moyenne sont
dégénératifs. Ils sont souvent associés à des anévrysmes aortiques
ou poplités et sont le plus souvent asymptomatiques. Leur
expansion aiguë ou leur fissuration entraînent des douleurs
cervicales ou thoraciques. Ces anévrysmes peuvent aussi entraîner
une ischémie aiguë ou chronique du membre supérieur par embolie
athéromateuse, des signes de compression du plexus brachial, une
dysphonie par compression du nerf laryngé récurrent droit, des
signes de compression trachéale, un accident vasculaire transitoire
ou définitif par embolie rétrograde dans les artères à destinée
Tableau I. – Données
sous-clavière.
concernant
les
anévrysmes
de
l’artère
Références
Sexe (hommes-femmes)
Âge moyen au moment du diagnostic
Côté (droite-gauche)
Étiologie dégénérative
2-1
49 ans
2-1
46 %
[3 , 8 , 14, 15]
[3 , 8 , 14, 15]
encéphalique. L’examen clinique peut mettre en évidence une masse
sus-claviculaire battante et expansive, un souffle sus-claviculaire, des
microembolies digitales, un déficit neurologique périphérique par
compression du plexus brachial, un syndrome de Claude
Bernard-Horner.
Le diagnostic peut être suspecté sur une radiographie pulmonaire
où l’on met en évidence un syndrome tumoral du médiastin
supérieur. La tomodensitométrie et l’échodoppler permettent
d’établir le diagnostic qui est précisé par l’artériographie. Celle-ci
est indispensable pour étudier le réseau artériel d’aval et les limites
de l’anévrysme par rapport à l’origine de l’artère vertébrale
homolatérale.
Les anévrysmes du tiers externe de l’artère sous-clavière englobent
souvent la jonction axillo-sous-clavière. À la différence des
anévrysmes dégénératifs situés aux tiers interne et moyen de l’artère
sous-clavière, ces anévrysmes sont presque constamment associés à
la présence d’une côte cervicale et plus rarement à une anomalie de
la première côte. Il existe dans ces cas une compression artérielle
avec une dilatation poststénotique conduisant au développement
d’un anévrysme sous-clavier ou axillo-sous-clavier. Ces anévrysmes
sont plus fréquents à droite, mais peuvent être bilatéraux. Ils sont
aussi plus fréquents chez la femme. L’échodoppler met souvent en
évidence un thrombus intra-anévrysmal, source d’embolies au
niveau du membre supérieur. Des embolies rétrogrades vertébrales
et carotidiennes ont aussi été décrites. Le traitement des anévrysmes
sous-claviers dépend de leur localisation et de leur étiologie.
Actuellement, la plupart de ces anévrysmes sous-claviers sont traités
par chirurgie conventionnelle, mais la mise en place d’endoprothèses
couvertes a été décrite à ce niveau et peut représenter une
alternative intéressante, surtout en cas de faux anévrysme
traumatique où la zone à recouvrir par l’endoprothèse est
relativement courte.
[3 , 8 , 14, 15]
[3 , 8 , 14, 15]
Jean-Baptiste Ricco : Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service.
Christophe Camiade : Interne des Hôpitaux.
Service de chirurgie vasculaire, hôpital Jean Bernard, centre hospitalier universitaire, 86021 Poitiers cedex,
France.
Philippe Patra : Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service, service de chirurgie
vasculaire, hôpital Guillaume et René Laennec, centre hospitalier universitaire,44035 Nantes cedex, France.
Philippe Plagnol : Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service, service de chirurgie
vasculaire, centre hospitalier général Pasteur, centre hospitalier universitaire, rue Paul-Langevin,
33212 Bordeaux cedex, France.
¶ Traitement chirurgical des anévrysmes sous-claviers
Les anévrysmes sous-claviers sont abordés le plus souvent par une
incision sus- et sous-claviculaire respectant la clavicule et
éventuellement prolongée dans le sillon deltopectoral. Après
intubation trachéale, le malade est installé en décubitus dorsal. La
tête est laissée en position indifférente. L’incision est faite 2 à 3 cm
au-dessus de la clavicule. Elle débute à 1 cm de la ligne médiane
(fig 1). Le plan de clivage est situé à la surface du muscle sternocléido-mastoïdien (SCM). Le chef sternal du SCM n’est sectionné que
si l’anévrysme a une extension nécessitant le contrôle des premiers
centimètres de l’artère sous-clavière (fig 2). La graisse préscalénique
Toute référence à cet article doit porter la mention : Ricco JB, Camiade C, Patra P et Plagnol P. Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (II). Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits
réservés), Techniques chirurgicales – Chirurgie vasculaire, 43-028-B, 2000, 7 p.
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (II)
43-028-B
Techniques chirurgicales
*
A
*
C
*
B
1
B. Section du muscle omohyoïdien. Le muscle sterno-cléido-mastoïdien n’est sectionné que si un contrôle proximal est indispensable.
C. Section du muscle scalène antérieur en protégeant le nerf phrénique.
Anévrysme isolé de l’artère sous-clavière.
A. Incision sus-claviculaire.
*
B
*
C
*
A
2
Anévrysme isolé de l’artère sous-clavière.
A. Dissection de l’artère en amont de l’anévrysme, dissection de l’origine
de l’artère vertébrale.
B. Abord des premiers centimètres de l’artère sous-clavière avec section du muscle
sterno-cléido-mastoïdien et des muscles sous-hyoïdiens qui permet de contrôler
la terminaison du tronc artériel brachiocéphalique et l’origine de la carotide commune droite.
C. Résection de l’anévrysme et pontage en veine saphène.
est clivée en regard du muscle scalène antérieur. Le nerf phrénique
est récliné avec précaution. Le muscle scalène antérieur est sectionné
au ras de son insertion sur la première côte. Les racines C5-C6 et C7
sont libérées. Puis le muscle scalène moyen est sectionné. L’artère
sous-clavière est ainsi exposée sur tout son trajet. Cet abord peut
être complété par un abord axillaire dans le sillon deltopectoral
(fig 3).
ou rétroscalénique de l’artère sous-clavière, il est souhaitable de la
réimplanter dans l’artère carotide commune.
Anévrysme sous-clavier et syndrome du défilé thoracobrachial
La première côte est ensuite disséquée en extrapériosté. Le col de la
côte est sectionné après avoir récliné le plexus brachial (fig 4, 5). S’il
existe une côte cervicale, elle est réséquée par cette voie avec le
muscle scalène moyen. Une courte voie sous-claviculaire est
nécessaire en fonction de l’étendue de l’anévrysme pour réséquer
l’extrémité antérieure de la première côte.
Cure de l’anévrysme
L’anévrysme est en général réséqué (fig 6) car il est souvent de
volume réduit, mais il existe toujours un risque de plaie nerveuse et
veineuse. Si l’anévrysme est plus important (fig 7), avec une sclérose
périanévrysmale englobant le plexus brachial et la veine sousclavière, on réalise de préférence une mise à plat de l’anévrysme.
Restauration artérielle
La continuité artérielle est rétablie de préférence par un pontage en
veine grande saphène inversée. Si la veine grande saphène n’a pas
un diamètre suffisant, un pontage prothétique peut être réalisé. Si
l’artère vertébrale est intéressée par un anévrysme de la portion pré2
La réalisation d’une voie d’abord transclaviculaire partant du sillon
deltopectoral avec section de la clavicule à sa partie moyenne se
prolongeant en sus-claviculaire interne n’est pas indispensable
(fig 8). Elle peut cependant être réalisée en urgence dans certains cas
d’anévrysmes post-traumatiques ou d’anévrysmes sous-claviers
fissurés.
¶ Cas particulier des anévrysmes de l’artère sousclavière droite rétro-œsophagienne de l’adulte
Ils peuvent se manifester par une compression œsophagienne
responsable d’une dysphagie, un anévrysme développé sur un
diverticule de Kommerell pouvant comprimer l’œsophage et se
rompre (tableau II). Ces anévrysmes peuvent aussi être associés à
une coarctation, un anévrysme ou une dissection aortique (fig 9).
Cela explique les problèmes de la voie d’abord et du rétablissement
de la continuité artérielle. En cas d’anévrysme ou de volumineux
diverticule de Kommerell, on peut réaliser, dans les cas les plus
simples, une voie sus-claviculaire droite pour réimplanter l’artère
sous-clavière dans la carotide commune droite. Puis, après avoir
changé la position du malade, on fait une thoracotomie
postérolatérale gauche permettant le contrôle de l’aorte thoracique,
un clampage aortique latéral et une suture aortique de l’origine de
l’artère sous-clavière droite appuyée sur des feutres de Téflont. Si la
base d’implantation aortique est trop large, il faut réaliser un
clampage aortique total.
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (II)
Techniques chirurgicales
43-028-B
3
4
A. Extension de l’incision dans le
sillon deltopectoral.
B. Section de l’aponévrose clavipectorale et du muscle grand pectoral, repérage de la veine céphalique.
C. Section du muscle petit pectoral,
abord de l’artère axillaire.
D. Contrôle de l’artère axillaire après
ligature et section de l’artère
acromiothoracique.
Anévrysme de l’artère axillaire et
syndrome du défilé thoracobrachial (premier temps).
A. Incision sus- et sous-claviculaire.
B. Section du muscle grand pectoral
au bord inférieur de la clavicule.
C. Abord de l’origine de l’artère
axillaire.
D. Section de l’insertion du muscle
scalène antérieur sur la première côte.
*
A
*
A
*
B
*
B
*
C
*
C
*
D
*
D
3
43-028-B
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (II)
*
A
*
B
Techniques chirurgicales
*
C
5
Anévrysme de l’artère axillaire et syndrome du défilé
thoracobrachial (deuxième temps).
A. Abord sus-claviculaire.
B. Section du muscle sterno-cléido-mastoïdien et repérage du nerf phrénique.
C. Abord sous-claviculaire complémentaire avec section
du muscle sous-clavier et des muscles intercostaux, puis
du scalène antérieur.
D. Résection de la partie antérieure de la première côte.
E. Résection par voie sus-claviculaire de l’arc postérieur
de la première côte. La résection d’une côte cervicale peut
être réalisée par la même voie d’abord.
*
D
*
E
6
Résection de l’anévrysme sous-clavier avec revascularisation par un pontage en veine saphène-grande saphène.
ANÉVRYSMES DU MEMBRE SUPÉRIEUR ET DE LA MAIN
¶ Anévrysme post-traumatique aigu de l’artère cubitale
Les anévrysmes dégénératifs de l’avant-bras et de la main sont rares.
La plupart de ces anévrysmes sont en relation avec un traumatisme
chronique.
Nous prendrons pour exemple les anévrysmes cubitaux
traumatiques qui peuvent se voir dans deux cadres différents :
l’anévrysme aigu traumatique par plaie ou choc direct de l’artère
cubitale et le syndrome du marteau hypothénar lié à des
microtraumatismes répétés.
Les circonstances de survenue sont diverses (plaie ouverte, choc,
traumatisme du poignet), avec souvent un temps de latence entre le
traumatisme initial et le diagnostic. Il existe une tuméfaction
douloureuse de l’éminence hypothénar et le diagnostic est confirmé
par l’échodoppler, puis l’artériographie. Il s’agit en fait d’un
hématome dont l’organisation constitue un faux anévrysme. La
gravité potentielle des complications emboliques à partir de ces
anévrysmes est en faveur de leur traitement chirurgical
4
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (II)
Techniques chirurgicales
*
A
7
43-028-B
*
B
Anévrysme sous-clavier et syndrome du défilé thoracobrachial.
A. Anévrysme sous-clavier associé à la présence d’une côte cervicale.
B. Anévrysme réséqué avec thrombus intra-anévrysmal.
9
Artère sous-clavière droite rétro-œsophagienne avec sténose aortique susvalvulaire.
¶ Syndrome du marteau hypothénar
8 Anévrysme sous-clavier rompu. Voie d’abord transclaviculaire donnant accès à la
totalité de l’artère sous-clavière. Cette voie peut être agrandie vers l’artère axillaire
et vers la terminaison du tronc artériel brachiocéphalique.
Tableau II. – Données concernant les anévrysmes sur artère sousclavière rétro-œsophagienne (ASCRO).
Références
Sexe (hommes-femmes)
Incidence de l’ASCRO
Dysphagie
Anomalie visible sur la Rx pulmonaire
Crosse aortique à gauche, artère sous-clavière
droite rétro-œsophagienne
Association à un AAA
Rupture
2,5-1
0,5 %
39 %
94 %
97 %
[1, 4, 16]
25 %
20 %
[1, 4, 16]
[1, 4, 16]
[1, 4, 16]
[1, 4, 16]
[1, 4, 16]
Il constitue une entité spécifique et peut entraîner des complications
graves avec des nécroses digitales. Il s’agit le plus souvent d’un
travailleur manuel qui utilise la paume de la main comme un outil.
Ces impacts répétés entraînent des traumatismes de l’artère cubitale
au niveau de l’éminence hypothénar, juste après son passage sous le
crochet de l’os crochu où elle se divise pour donner l’arcade
palmaire superficielle. Ces traumatismes entraînent une dysplasie
fibreuse de la paroi artérielle qui va évoluer vers la constitution d’un
anévrysme. Cet anévrysme a un risque de thrombose in situ ou
d’embolies dans les artères digitales. Le symptôme le plus fréquent
est un phénomène de Raynaud unilatéral et asymétrique
prédominant aux trois derniers doigts de la main dominante. Une
gangrène digitale est révélatrice dans un tiers des cas. L’échodoppler
et l’artériographie sont indispensables au diagnostic.
Le traitement dépend des lésions artérielles. En cas de thrombose
cubitale, le traitement médical est logique car le mécanisme
embolique ne peut plus se produire et par conséquent de nouvelles
aggravations cliniques sont improbables. Lorsque l’anévrysme est
perméable (fig 10), il faut réaliser, si le réseau artériel d’aval est
satisfaisant, une résection-suture ou une revascularisation par une
greffe veineuse avec les techniques habituelles de la microchirurgie.
[1, 4, 16]
AAA : anévrysme de l’aorte abdominale ; Rx : radiographie.
systématique. Il est rarement possible de suturer directement la
brèche artérielle. Il est souvent nécessaire de faire une résection de
l’anévrysme suivi d’une revascularisation par une greffe veineuse
ou par une autogreffe artérielle en adoptant les techniques
microchirurgicales. La ligature artérielle n’est possible que si la
revascularisation est trop aléatoire et s’il existe une artère radiale
perméable avec une arcade palmaire complète.
Étiologies plus rares
ANÉVRYSMES DES VASCULARITES
ET DE LA MALADIE DE BEHÇET
Les vascularites constituent un groupe de maladies hétérogènes
définies par l’association d’une inflammation et d’une altération
structurale de la paroi vasculaire. La survenue d’anévrysmes
artériels périphériques au cours des vascularites est connue
(tableau III).
5
43-028-B
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (II)
Techniques chirurgicales
*
A
*
B
10
Anévrysme de l’artère cubitale, syndrome du marteau hypothénar.
A. Anévrysme situé sur l’artère cubitale, au niveau de l’os crochu, juste avant la naissance de l’arcade palmaire
superficielle.
B. Tracé de l’incision cutanée.
C. Résection de l’anévrysme et revascularisation par un pontage cubitopalmaire.
*
C
Tableau III. – Données concernant les anévrysmes au cours de la maladie de Takayasu.
des thromboses postopératoires et des faux anévrysmes anastomotiques.
Références
Incidence des anévrysmes au cours de la
maladie de Takayasu
Distribution relative des anévrysmes
- Carotides
- Artère sous-clavière
- Aorte thoracique
- Aorte abdominale
12 %
[9, 17]
[17]
20 %
10 %
40 %
30 %
[17]
[17]
[17]
[17]
Les critères de diagnostic internationaux de la maladie de Behçet
sont des ulcérations orales récurrentes plus de trois fois par an et
deux des manifestations suivantes : ulcérations génitales, lésions
oculaires, lésions cutanées, pathergy test positif.
L’atteinte artérielle s’exprime par des thromboses ou par des
anévrysmes diversement associés. Les anévrysmes sont de mauvais
pronostic car ils exposent à la dissection et à la rupture. Chez ces
malades, le risque iatrogène des ponctions artérielles directes est
connu. Le traitement fait appel à des pontages utilisant moins
souvent une greffe veineuse qu’une prothèse, du fait de l’atteinte
veineuse fréquente au cours de la maladie de Behçet. Ces malades
posent des problèmes complexes en raison de la fréquence
6
ANÉVRYSMES DE LA DYSPLASIE FIBROMUSCULAIRE
Les localisations au niveau des artères iliaques externes et des artères
des membres inférieurs sont rares et ont été rapportées chez des
sujets jeunes. Il peut s’agir de dilatations interstructurales à l’origine
d’embolies périphériques au niveau des orteils ou de dissections.
Quelques rares cas d’anévrysmes de l’artère fémorale profonde ou
de l’artère poplitée ont été décrits. Dans ces cas, il faut réaliser une
résection-pontage ou une mise à plat-pontage, comme cela a été
précédemment décrit.
ANÉVRYSMES POST-STÉNOTIQUES DES MEMBRES
Ils sont le plus souvent consécutifs à une artère piégée aboutissant à
la formation d’un anévrysme post-sténotique. Les deux localisations
préférentielles sont l’artère sous-clavière en cas de syndrome du
défilé thoracobrachial déjà vu et l’artère poplitée piégée avec
développement d’un anévrysme poplité post-sténotique ou dû à
l’atteinte directe de la paroi artérielle par des microtraumatismes
répétés. Ces anévrysmes s’accompagnent des complications
thromboemboliques classiques avec dégradation du lit d’aval. Il faut
réséquer le piège anatomique et traiter l’anévrysme comme
précédemment.
Chirurgie des anévrysmes artériels des membres (II)
Techniques chirurgicales
Tableau IV. – Données concernant l’artère sciatique persistante
(ASP).
Références
Incidence de l’ASP
Côté (gauche-droite-bilatéral)
Sexe (hommes-femmes)
Âge moyen au moment du
diagnostic
Survenue d’un anévrysme
Traitement
Taux d’amputation
[7, 13, 18]
0,025-0,06 %
9-8-6
5-4
65 ans
[2, 5, 6]
[6, 7, 10, 11]
[2, 6, 13, 14]
En regard du grand trochanter
Ligature ou embolisation + pontage fémoropoplité
28 %
[13]
[2, 13]
[12]
43-028-B
du système artériel embryonnaire avec une artère sciatique
persistante complète ou incomplète associée à un système fémoral
hypoplasique ou normal (tableau IV). L’anévrysme est la
complication la plus fréquente des artères sciatiques persistantes. Le
siège des anévrysmes de l’artère sciatique persistante est presque
toujours situé entre le grand trochanter et le muscle grand fessier.
Le diagnostic clinique est souvent évoqué devant une tuméfaction
battante de la fesse. Le traitement isolé de l’artère sciatique
persistante est souvent suffisant. Il peut être réalisé par embolisation
ou par ligature en utilisant une voie postérieure transfessière afin de
contrôler l’artère sciatique persistante dans le canal sous-pyramidal.
Cette voie comporte un risque de blessure du nerf sciatique. On peut
aussi réaliser une ligature en amont par une voie rétropéritonéale
en contrôlant l’origine de l’artère iliaque interne.
ANÉVRYSMES DE L’ARTÈRE SCIATIQUE PERSISTANTE
Les anévrysmes de l’artère sciatique persistante sont rares.
L’existence d’une artère sciatique persistante est due à la persistance
La revascularisation est souvent nécessaire. Elle est le plus souvent
réalisée par un pontage entre l’artère fémorale et l’artère poplitée.
Références
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7
ENCYCLOPÉDIE MÉDICO-CHIRURGICALE 43-029-G2
43-029-G2
Pontages veineux sur les artères
de jambe et du pied
J Watelet
R é s u m é. – La réussite d’un pontage infrapoplité tient à la réunion de plusieurs
conditions : un patient susceptible d’être réadapté fonctionnellement, des lésions
ischémiques distales réversibles, un réseau artériel d’aval correct et du matériel veineux
autologue disponible. La présence d’une veine grande saphène utilisable joue un rôle
décisif dans la réussite du pontage ; en son absence il est souvent possible d’utiliser
d’autres matériels veineux autologues avec des résultats acceptables.
La technique d’utilisation de la veine, in situ ou inversée, a peu d’influence sur les
résultats hormis pour les veines de diamètre inférieur ou égal à 3 mm qui semblent tirer
un bénéfice de l’utilisation in situ.
L’état du réseau artériel d’aval est également déterminant pour la perméabilité du
pontage : la présence d’une artère de jambe en continuité directe ou indirecte avec une
arche plantaire étant le meilleur garant d’une perméabilité durable sous couvert d’une
surveillance attentive par échodoppler.
© 1999, Elsevier, Paris.
Introduction
Voies d’abord
Avec la vulgarisation de la technique in situ, les indications des pontages
sur les artères de jambe se sont multipliées ; les indications habituelles
sont les ischémies sévères résistant au traitement médical et menaçant la
vitalité du membre. Quelques auteurs considèrent que l’indication d’un
pontage sur artère de jambe peut être portée pour une claudication
intermittente incapacitante après l’échec d’un traitement médical bien
conduit, lorsque existent un bon réseau artériel jambier et une veine
grande saphène (VGS) utilisable. Cette indication reste toutefois
exceptionnelle et il faut garder à l’esprit que, dans ces conditions,
l’échec précoce du pontage engendre habituellement une aggravation de
la symptomatologie et peut même faire courir un risque d’amputation.
Tronc tibiofibulaire
Le succès des pontages sur artère de jambe tient avant tout à la possibilité
d’utiliser la VGS. Les résultats décevants des pontages prothétiques
réalisés à ce niveau, quel que soit le matériel utilisé, en limitent les
indications à l’absence de matériel veineux.
© Elsevier, Paris
La technique in situ prend au niveau jambier tout son intérêt, offrant une
meilleure adéquation du calibre des vaisseaux à anastomoser et la
possibilité d’utiliser avec succès des veines dont le diamètre au niveau
jambier n’excède pas 2,5 à 3 mm. En contrepartie, la destruction
valvulaire pose d’autant plus de problèmes que le pontage est long et
que la veine est de petit calibre. Le pontage inversé garde toutefois des
partisans [19] qui invoquent une plus grande faisabilité et des résultats à
peu près superposables.
Jacques Watelet : Professeur des Universités, praticien hospitalier, Service de chirurgie
vasculaire, centre hospitalier universitaire Charles-Nicolle, 1, rue de Germont, 76031
Rouen cedex, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Watelet J. Pontages veineux
sur les artères de jambe et du pied. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Techniques
chirurgicales – Chirurgie vasculaire, 43-029-G2, 1999, 13 p.
L’abord du tronc tibiofibulaire (TTF) par voie rétrotibiale interne n’est
qu’une extension de l’abord poplité bas (fig 1). L’incision cutanée est
prolongée vers le bas de plusieurs centimètres en restant 1 cm en arrière
du bord postérieur du tibia ou mieux encore en regard de la VGS
préalablement repérée. L’aponévrose est incisée à proximité de son
insertion tibiale ; après section de l’arcade du soléaire facilitée par la
dissection de l’artère et de la veine tibiale antérieure, l’incision du
soléaire est effectuée parallèlement au bord interne du tibia jusqu’à
mettre en évidence le paquet vasculaire. La gaine vasculaire incisée
laisse apparaître le TTF en rapport étroit avec une volumineuse veine
satellite souvent dédoublée et la bifurcation artérielle en artère tibiale
postérieure et fibulaire.
Artère tibiale postérieure et branches de division
Tiers supérieur-tiers moyen (fig 2A, B, C, D1, D2)
L’incision cutanée est faite en regard de la VGS habituellement située 1
à 2 cm en arrière du bord postéro-interne du tibia. L’aponévrose incisée
laisse apparaître le bord interne du muscle gastrocnémien médial qui est
libéré et récliné en arrière. Le muscle soléaire peut être désinséré du tibia
ou incisé perpendiculairement à ses fibres à un travers de doigt de son
bord interne. Le plan aponévrotique épais recouvre un espace celluleux
et l’aponévrose profonde qui, une fois effondrée donne accès au paquet
vasculonerveux avec le nerf tibial et, en dedans et en avant de lui, l’artère
avec ses deux veines satellites.
Tiers inférieur (fig 2D3, E)
Le soléaire fusionné au muscle gastrocnémien n’a plus d’insertion
osseuse et l’incision de l’aponévrose jambière mène dans un plan
celluleux situé entre le triceps sural en arrière et le plan profond en avant
constitué par les muscles long fléchisseur des orteils et tibial postérieur.
Au sein de cet espace siège le paquet vasculonerveux recouvert par le
feuillet profond de l’aponévrose jambière.
43-029-G2
PONTAGES VEINEUX SUR LES ARTÈRES DE JAMBE ET DU PIED
Techniques chirurgicales
A
1
A. Voie d’abord du tronc tibiofibulaire (TTF), tracé de l’incision de l’arcade du
soléaire.
B. La section de l’arcade découvre le TTF, sa veine satellite et la bifurcation en
artères tibiale postérieure et fibulaire.
B
A
2
A. Abord de la tibiale postérieure (TP) aux tiers supérieur, tiers moyen et tiers
inférieur de la jambe.
Régions rétro- et sous-malléolaire
Abord rétromalléolaire (fig 2F, G, H)
Le genou fléchi à 60°, le membre inférieur en rotation externe, le pied
est posé sur un billot pour ouvrir l’espace rétro- et sous-malléolaire.
L’incision cutanée de 6 à 8 cm verticale puis légèrement incurvée en
avant à sa partie inférieure (à l’aplomb de la pointe de la malléole) est
faite à égale distance du tendon calcanéen et du bord postérieur de la
malléole interne. Le pied étant en flexion forcée, l’aponévrose
superficielle est incisée devant le tendon calcanéen puis, le pied étant
mis en équin et le tendon calcanéen récliné par un écarteur, l’aponévrose
profonde nacrée et épaisse est incisée au ras de son bord interne. La
gaine vasculaire ouverte, l’artère apparaît flanquée d’une ou deux veines
satellites.
Abord sous-malléolaire (voie calcanéenne interne) (fig 2F, I)
L’incision curviligne à concavité supérieure est faite à égale distance du
bord interne du pied et de la malléole interne remontant, à la demande,
en rétromalléolaire. L’incision longe le bord supéro-interne du muscle
abducteur de l’hallux ; le rétinaculum des fléchisseurs est incisé au ras
du muscle qui est relâché par une adduction du pied et récliné vers le
bas. La section de l’expansion du muscle abducteur de l’hallux au
page 2
B
B. Abord de la TP au tiers supérieur de jambe. L’incision de l’aponévrose découvre le
bord interne du gastrocnémien médial qui est récliné en arrière ; incision du soléaire.
sustentaculum tali facilite cette manœuvre ; la dissection de la
bifurcation de l’artère tibiale postérieure et des premiers centimètres des
artères plantaires est facilitée par la section du muscle abducteur de
l’hallux. L’artère plantaire latérale, plus volumineuse que la branche
médiale, apparaît habituellement inférieure dans la position opératoire ;
un abord plus étendu de cette artère peut être obtenu en sectionnant le
bord interne de l’aponévrose plantaire et le muscle court fléchisseur des
orteils. Lors de cette dissection, il faut s’attacher à préserver l’artère
calcanéenne interne, branche collatérale naissant en amont de la
bifurcation plantaire et d’une particulière importance chez les patients
présentant une ischémie du talon.
Trajet des pontages vers l’artère tibiale postérieure
En cas de pontage effectué in situ, la VGS est mobilisée sur une dizaine
de centimètres ; la destruction valvulaire obéit aux principes décrits (cf
supra). Le site de l’anastomose inférieure est repéré et marqué sur
l’artère, puis sur la veine mise sous tension et disposée
harmonieusement, genou en extension. Les aponévroses jambières,
superficielle et profonde, doivent être incisées suffisamment haut pour
éviter une angulation de la veine.
Pour les pontages inversés, le trajet peut être sous-cutané ou anatomique.
Le trajet sous-cutané réalisé entre les deux sites anastomotiques au prix
Techniques chirurgicales
43-029-G2
PONTAGES VEINEUX SUR LES ARTÈRES DE JAMBE ET DU PIED
D1
D2
C
2
(suite) C. L’incision du soléaire récliné en arrière donne accès au paquet vasculonerveux tibial postérieur.
D. Coupes de l’abord de la tibiale postérieure. Au tiers supérieur de la jambe (D1), au tiers moyen (D2), au tiers inférieur
(D3) ; LFH : long fléchisseur de l’hallux.
D3
F
E
G
d’une ou deux contre-incisions, chemine à la face antéro-interne de la
cuisse en regard de la ligne de ligature de l’artère fémorale superficielle
puis à la face interne du genou et de la jambe. Le tunnelliseur utilisé doit
avoir un diamètre suffisant pour ménager un tunnel où le pontage sera à
l’abri de toute compression.
E. Abord de la TP au tiers inférieur de jambe. Après incision de l’aponévrose jambière,
le paquet vasculonerveux recouvert par le feuillet profond de l’aponévrose jambière
apparaît entre le triceps sural récliné en arrière et le plan musculaire profond en avant.
F. Abord de la tibiale postérieure rétro- et sous-malléolaire (incision cutanée).
G. Abord rétromalléolaire, incision de l’aponévrose profonde.
H. Découverte du paquet vasculonerveux.
I.Abord sous-malléolaire. La section de l’abducteur du gros orteil facilite la dissection de
l’origine des artères plantaires
H
I
Le trajet anatomique emprunte la face postérieure du muscle sartorius,
traverse le creux poplité entre les muscles gastrocnémiens et rejoint
l’abord de la tibiale postérieure. Ce trajet nécessite un abord de la partie
basse du creux poplité qui permet de guider le tunnelliseur le long de
l’axe vasculaire entre les chefs gastrocnémiens. Il est habituellement
page 3
43-029-G2
PONTAGES VEINEUX SUR LES ARTÈRES DE JAMBE ET DU PIED
A
B
3
C1
Techniques chirurgicales
C2
A. Abord de l’artère fibulaire par voie rétrotibiale interne. Les temps initiaux sont
ceux de l’abord de la tibiale postérieure. L’aponévrose profonde est incisée entre
les muscles long fléchisseur de l’hallux (LFH) et tibial postérieur (TP).
B. Le fléchisseur propre récliné vers l’arrière laisse apparaïtre le paquet vasculonerveux fibulaire, qui repose sur le muscle TP.
C. Coupes de l’abord de l’artère fibulaire au tiers supérieur de jambe (1), et au tiers
moyen (2).
possible de faire progresser le tunnelliseur de la partie basse du creux
poplité à la face postérieure du muscle sartorius, sans aborder le creux
poplité au-dessus de l’interligne.
Le trajet sous-cutané a l’avantage de la simplicité et d’une surveillance
plus aisée mais expose au risque de compression posturale. Le trajet
anatomique est plus harmonieux. De plus, il n’est pas exposé au risque
de plicature lors des mouvements de flexion du genou et protège mieux
le pontage des risques d’une infection superficielle des voies d’abord.
Ce trajet est ainsi utilisé de préférence au trajet sous-cutané pour les
pontages veineux inversés et a fortiori si un matériel prothétique est
utilisé.
Artère fibulaire (fig 3A, B)
Voie rétrotibiale interne
Elle permet d’aborder ses deux tiers supérieurs mais la situation assez
profonde de l’artère peut rendre l’anastomose délicate. Les temps
initiaux de l’abord sont analogues à ceux de l’artère tibiale postérieure.
Le paquet tibial postérieur repéré est récliné vers l’avant et l’on
recherche l’interstice entre les muscles tibial postérieur et long
fléchisseur de l’hallux. L’aponévrose profonde est incisée à ce niveau et
le bord interne du muscle long fléchisseur de l’hallux est libéré et récliné
en arrière, laissant apparaître le paquet vasculonerveux fibulaire
reposant sur le muscle tibial postérieur. L’artère est entourée de ses
grosses veines satellites qui rendent sa dissection difficile ; l’utilisation
de la bande d’Esmarch prend dans ce cas tout son intérêt permettant de
limiter au minimum la dissection de l’artère.
Les rapports de l’artère fibulaire et du muscle long fléchisseur de l’hallux
varient en fonction du niveau considéré (fig 3C) :
– au tiers supérieur de jambe, l’artère reposant sur le muscle tibial
postérieur est retrouvée au bord interne du muscle long fléchisseur de
l’hallux ;
– au tiers moyen de jambe, l’artère est fréquemment entourée par les
fibres musculaires du long fléchisseur de l’hallux pouvant réaliser un
véritable canal musculaire ; la découverte de l’artère est facilitée en
amorçant sa dissection plus en amont et en dissociant à partir de là, vers
le bas, les fibres musculaires ;
– au tiers inférieur de jambe, l’artère est approchée au mieux par voie
externe avec résection de la fibula.
page 4
4 Abord de l’artère fibulaire par voie externe. La résection de la fibula découvre le
paquet vasculonerveux fibulaire reposant sur le long fléchisseur commun des orteils.
Voie externe avec résection de la fibula (fig 4)
L’incision cutanée de 10 à 12 cm est centrée sur la fibula en fonction du
site anastomotique choisi. Le muscle long fibulaire est libéré du bord
externe de l’os et récliné en arrière avec le muscle long fléchisseur de
l’hallux. Les faces externe et postérieure de l’os sont ensuite libérées à
la rugine sur 7 à 8 cm, d’autant plus facilement vers la partie basse de la
jambe que la fibula se dégage des muscles qui l’entouraient plus haut :
les tendons des muscles fibulaires restent sur son bord postérieur et le
muscle troisième fibulaire, faisceau ultime du muscle long extenseur des
orteils ne s’insère que sur le bord antérieur de l’os. Il est aisé ensuite de
Techniques chirurgicales
PONTAGES VEINEUX SUR LES ARTÈRES DE JAMBE ET DU PIED
43-029-G2
A
C
E
B
5
D
A. Abord de la tibiale antérieure au tiers supérieur et au tiers moyen de jambe (incision cutanée).
B. L’écartement des muscles tibial antérieur et long extenseur des orteils découvre le paquet vasculonerveux tibial antérieur.
C. Coupes de l’abord de la tibiale antérieure.
D, F. Abord de la tibiale antérieure au tiers intérieur de jambe, incision cutanée et coupe.
E. Le paquet vasculonerveux tibial antérieur apparaît entre les muscles tibial antérieur et long extenseur de l’hallux.
F
réséquer à la scie de Gigli un segment osseux de 6 à 8 cm en prenant
soin de disséquer la membrane interosseuse adhérente au bord interne
de l’os ; cette résection ne compromet pas la stabilité de l’articulation
tibiotarsienne dont la malléole externe reste intacte. Le paquet vasculaire
est aisément retrouvé reposant directement sur le corps du muscle long
fléchisseur des orteils.
Artère tibiale antérieure et artère dorsale du pied
Voie postéroexterne ou rétrofibulaire
Au tiers supérieur-tiers moyen de jambe (fig 5A, B, C)
La voie jambière postéroexterne ou rétrofibulaire donne un accès limité
et malaisé à l’artère dans sa partie moyenne.
La jambe est maintenue en flexion à 30-40°, par un billot placé sous le
genou. L’opérateur est en dehors, une incision de 8 cm est située sur une
ligne joignant la dépression préfibulaire et le milieu du cou de pied ;
l’aponévrose est incisée en regard de l’interstice qui sépare les muscles
tibial antérieur et long extenseur des orteils. Cet interstice est retrouvé
plus facilement dans la partie inférieure de l’incision en maintenant le
pied en extension. L’interstice est marqué par ailleurs par l’émergence
de petits vaisseaux. Les muscles étant relâchés par la mise en flexion du
pied, on récline aisément en dedans le muscle tibial antérieur qui
recouvre le muscle long extenseur des orteils et le clivage est poursuivi
vers le haut sur toute la hauteur de l’incision. Le pédicule
vasculonerveux est profond ; le nerf surcroise l’artère fréquemment
masquée par des fibres aponévrotiques dépendant de l’aponévrose
interosseuse ou par ses veines satellites dilatées.
Trajet des pontages vers l’artère fibulaire
Le trajet est analogue à celui des pontages destinés à l’artère tibiale
postérieure lorsque l’artère est abordée par voie rétrotibiale interne. Si
l’artère a été abordée par voie externe, le trajet le plus logique est externe
(cf fig 6A) : le pontage emprunte un trajet extra-anatomique qui croise
obliquement en « écharpe » en bas et en dehors les faces antérieure puis
externe de la cuisse, longe la face externe du genou entre le tubercule de
Gerdy et la tête de la fibula et de là rejoint la voie jambière externe.
La VGS peut être utilisée soit inversée soit non inversée, ex situ après
destruction valvulaire. Deux contre-incisions courtes permettent
d’effectuer la tunnellisation sous-cutanée de l’artère fémorale à l’artère
fibulaire.
Le trajet externe a l’avantage d’une surveillance aisée et d’éviter tout
risque d’angulation du pontage notamment en flexion aiguë du genou.
En cas d’abord externe et de pontage in situ, la résection de la fibula peut
permettre également de tunnelliser le pontage à partir du site de
prélèvement interne vers la loge externe en passant en arrière du paquet
vasculonerveux tibial postérieur.
L’artère tibiale antérieure est abordée communément par voie
antérieure, plus rarement par voie postéro-interne.
Abord par voie antérieure
Au tiers inférieur de jambe (fig 5D, E, F)
L’abord de l’artère est aisé car elle est moins profonde et les corps
musculaires font place à de volumineux tendons ; l’écartement des deux
tendons des muscles tibial antérieur et extenseur de l’hallux laisse
apparaître le paquet vasculonerveux appliqué contre l’os. À la partie
basse de l’incision, l’artère s’engage en arrière du tendon de l’extenseur
propre qu’il faut récliner en dehors avec le tendon du long extenseur des
page 5
43-029-G2
PONTAGES VEINEUX SUR LES ARTÈRES DE JAMBE ET DU PIED
Techniques chirurgicales
I
G
K
5
H
orteils pour trouver le paquet vasculaire au contact du bord externe du
muscle tibial antérieur. L’extension de l’abord vers l’aval nécessite la
section du rétinaculum des extenseurs.
Au quart supérieur de jambe (fig 5G)
La voie d’abord peut être étendue jusqu’à la tête de la fibula ; le clivage
des muscles tibial antérieur et long extenseur des orteils permet de suivre
l’artère tibiale antérieure qui devient de plus en plus profonde jusqu’au
point où elle pénètre dans la loge antérieure. La dissection complète de
l’artère peut être aidée le cas échéant par la section de rameaux nerveux
que les nerfs fibulaire commun et tibial antérieur envoient au muscle
tibial antérieur ; leur section n’entraîne qu’une paralysie incomplète car
le muscle reçoit beaucoup plus bas un autre rameau moteur. Il peut être
possible, par cette voie, de disséquer la bifurcation poplitée et le TTF
mais il est vrai que cette dissection est grandement facilitée par la
résection temporaire (ou définitive) de l’extrémité supérieure de la
fibula.
Abord par voie postéro-interne (fig 5H)
Cet abord est rarement utilisé car l’accès obtenu sur l’artère tibiale
antérieure est profond et ne facilite pas la réalisation de l’anastomose.
Les premiers temps sont identiques à ceux décrits pour l’abord tibial
postérieur ; le cheminement se fait en avant du pédicule tibial postérieur
et des muscles profonds jusqu’à la membrane interosseuse qu’il faut
page 6
(suite) G. Abord de la tibiale antérieure au quart
supérieur de jambe. Le clivage de l’extrémité supérieure des muscles tibial antérieur et long extenseur des orteils permet d’aborder l’origine de la
tibiale antérieure et la poplitée adjacente.
H. Abord de la tibiale antérieure par voie postérieure (coupe).
I. Abord de la dorsale du pied (incision cutanée).
J. La dorsale du pied et sa première branche externe, l’artère tarsienne latérale apparaissent entre
le long extenseur de l’hallux et le chef interne du
court extenseur. La dissection plus poussée de
l’artère tarsienne latérale impose de sectionner partiellement le court extenseur de l’hallux.
K. L’abord de l’artère dorsale du pied distale dans le
premier espace métatarsien permet d’effectuer une
anastomose à ce niveau.
J
inciser largement pour découvrir le pédicule tibial antérieur par sa face
profonde. L’artère doit être mobilisée aussi largement que possible pour
rendre la confection d’une anastomose réalisable sans trop de difficultés.
Cette voie n’est indiquée que lorsque des lésions cutanées interdisent
l’abord par voie antérieure.
Abord de l’artère dorsale du pied (fig 5I, J)
Le pied étant en extension et le genou fléchi, l’incision cutanée va du
milieu du cou de pied à l’extrémité postérieure du premier espace
interosseux sur 4 à 5 cm ; elle longe ainsi le bord externe du tendon du
long extenseur de l’hallux ; la branche interne du nerf musculocutané
est laissée en dehors ; l’incision de l’aponévrose superficielle au bord
externe du tendon du long extenseur de l’hallux laisse apparaître, en
dehors, le chef interne musculaire du court extenseur de l’hallux.
L’extenseur propre de l’hallux est récliné en dedans et le chef musculaire
du court extenseur en dehors, donnant accès en profondeur au paquet
vasculaire appliqué sur l’os ; l’artère et la veine dorsales du pied sont
longées en dedans par le nerf tibial antérieur qu’il faut ménager.
L’abord de l’artère dorsale du pied peut être étendu vers le haut en
échancrant à la demande le rétinaculum inférieur des extenseurs ; en
aval, l’artère dorsale du pied devient l’artère plantaire profonde en
traversant le premier espace métatarsien pour s’anastomoser avec
l’artère plantaire latérale. Cette traversée détermine un orifice limité
(fig 5K) :
– en arrière par le ligament métatarsien dorsal ;
Techniques chirurgicales
PONTAGES VEINEUX SUR LES ARTÈRES DE JAMBE ET DU PIED
43-029-G2
– en avant par le muscle premier interosseux dorsal dont les deux
faisceaux d’insertion sur les premier et deuxième métatarsiens
circonscrivent, à l’extrémité postérieure du muscle, une boucle dans
laquelle descend l’artère plantaire profonde ;
– en dedans et en dehors par la base des premiers métatarsiens.
À la sortie de ce tunnel, l’artère plantaire profonde s’anastomose avec
l’artère plantaire latérale pour former l’arcade plantaire profonde.
L’incision longitudinale, de 3 à 4 cm de longueur sur la face dorsale de
la portion moyenne et antérieure du pied, permet de disséquer l’artère
dorsale du pied en aval de sa bifurcation en artère plantaire profonde et
première artère métatarsienne dorsale. Le muscle court extenseur de
l’hallux est écarté en dehors ou sectionné ; le muscle premier
interosseux dorsal est échancré pour donner un meilleur accès à la partie
proximale de l’artère plantaire profonde. Le périoste de la partie
adjacente du deuxième métatarsien est ruginé et écarté afin d’exciser
suffisamment de fût métatarsien pour obtenir une bonne exposition de
l’artère plantaire profonde et permettre d’effectuer une anastomose à ce
niveau [2].
B
Artère tarsienne latérale
C’est une source non négligeable de vascularisation pour le dos du pied
grâce à ses anastomoses avec la branche terminale antéroexterne de
l’artère fibulaire et avec l’artère plantaire latérale. L’artère tarsienne
latérale naît de la partie proximale de l’artère dorsale du pied près du
bord inférieur du rétinaculum des extenseurs. De là, elle se dirige en
avant et en dehors, en arrière du muscle extenseur des orteils. Après
section du rétinaculum inférieur des extenseurs et dissection de la partie
proximale de l’artère dorsale du pied, l’origine de l’artère tarsienne
latérale est repérée ; une dissection plus poussée de son trajet impose de
récliner en dehors le tendon du muscle long extenseur des orteils et
d’inciser partiellement le muscle court extenseur.
Trajet des pontages vers l’artère tibiale antérieure
Pour les pontages in situ, la veine doit être mobilisée sur tout son
segment jambier à partir de l’interligne du genou.
La partie basse du creux poplité est abordée avec une dissection a
minima de la bifurcation poplitée. La membrane interosseuse est
dégagée puis incisée longitudinalement sur 2 à 3 cm à la partie
supérieure de l’abord antérieur ; un instrument mousse est passé de la
loge antérieure vers le creux poplité guidé par un doigt interne. La veine
est disposée dans son trajet sous tension physiologique, genou en
extension afin d’éviter une brièveté du pontage. L’anastomose distale
doit être réalisée à une distance suffisante de l’endroit où la veine
franchit la membrane interosseuse ; la veine doit en effet être parallèle à
l’artère pour réaliser de façon optimale l’anastomose à la face
antéroexterne de celle-ci. Réalisée trop près de la traversée de la
membrane interosseuse, l’anastomose est menacée d’une plicature au
niveau de son talon (fig 6B).
Le pontage inversé emprunte le trajet anatomique, à la face postérieure
du sartorius puis entre les chefs gastrocnémiens, avant de rejoindre la
loge antérieure selon les modalités qui viennent d’être décrites. Le trajet
sous-cutané externe est employé préférentiellement lorsque l’abord du
creux poplité est interdit du fait d’un sepsis ou non souhaitable du fait du
risque de sclérose engendré par des abords itératifs.
Trajet transosseux
Il constitue une alternative intéressante au trajet à travers la membrane
interosseuse. Il consiste à effectuer un tunnel osseux transtibial oblique
en bas et en dehors permettant au pontage de rejoindre selon un trajet
harmonieux la loge antérieure (fig 6A, C, D). Le tunnel doit préserver
l’intégrité des crêtes tibiales pour ne pas altérer la solidité de l’os.
L’orifice d’entrée est réalisé au niveau de la face postérieure ou au
niveau de la face interne du tibia ; à partir de là le tunnel rejoint la face
externe de l’os selon un angle dont l’obliquité ne doit pas excéder 60°
pour éviter de fragiliser la diaphyse.
Le siège de l’orifice de sortie du tunnel sur la face externe de l’os est
choisi en fonction du niveau de l’anastomose sur l’artère tibiale
antérieure : une distance de 2 à 3 cm entre les deux est nécessaire pour
pouvoir réaliser l’anastomose sans risque de plicature. La face externe
de l’os est dégagée du périoste sur 1 cm2 ; après avoir entamé la corticale
à la pointe carrée, le trajet peut être fait avec celle-ci, mais l’utilisation
A
D
C
6
A. Trajets des pontages vers la tibiale antérieure. a. anatomique ; b. sous-cutané
externe commun à la tibiale antérieure et à l’artère fibulaire abordée par voie
externe ; c. trajet transosseux ; c’. trajet à travers la membrane interosseuse.
B. Le pontage franchit la membrane interosseuse à distance de l’anastomose
pour éviter le risque de plicature.
C. Trajet transosseux : trajet du tunnel.
D. Trajet transosseux : passage du pontage.
d’une broche introduite au moteur pneumatique est préférable,
permettant de guider au mieux la mèche au moment du forage. En
fonction de la face choisie, l’orifice d’entrée doit être postérieur sur la
face interne, proche du bord interne ou postéro-interne sur la face
postérieure. Une mèche de 7 donne un diamètre suffisant au tunnel dont
les orifices d’entrée et de sortie sont émoussés à la fraise pour n’être pas
vulnérants.
Le tunnel transosseux est particulièrement intéressant pour les pontages
in situ anastomosés sur la partie basse de l’artère tibiale antérieure ; en
l’absence de tunnel, la veine doit en effet emprunter un trajet souscutané qui croise le bord antérieur saillant de l’os pour rejoindre l’artère
tibiale antérieure. Le trajet transosseux, de réalisation technique aisée,
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43-029-G2
PONTAGES VEINEUX SUR LES ARTÈRES DE JAMBE ET DU PIED
Techniques chirurgicales
supprime tout risque de compression extrinsèque. Le risque théorique
d’affaiblir la trame osseuse incite à ne pas utiliser cette technique dans
les ostéoporoses avérées.
Une variante de cette technique a été décrite [21] consistant à réaliser non
pas un tunnel mais une simple gouttière creusée dans la corticale du bord
antérieur de l’os. Les incisions du prélèvement de la veine et de l’abord
antérieur de l’artère tibiale antérieure sont utilisées pour exposer les
faces interne et externe et le bord antérieur de l’os ; une mèche permet
de forer la crête tibiale de façon superficielle et la gouttière ainsi réalisée
est émoussée et régularisée. Cette technique n’offre pas d’avantage
évident par rapport à la précédente et est de réalisation plus délicate du
fait de la difficulté du forage de la crête tibiale. En outre, le risque est
réel d’affaiblir l’architecture osseuse comme le démontre le risque de
survenue de fracture « pathologique» en regard de la gouttière [21].
Abord des artères de jambe par voie postérieure
Les voies d’abord postérieures des artères de jambe sont très rarement
utilisées, car elles supposent que les lésions artérielles aient une
topographie sous-poplitée permettant la réalisation d’un pontage
poplité-jambier. Cette topographie lésionnelle est surtout l’apanage du
patient diabétique et a la particularité de ménager dans un bon nombre
de cas la partie distale des artères de jambe ou du pied offrant la
possibilité d’une revascularisation courte. La voie postérieure peut
certes permettre le prélèvement de la VGS jambière et gonale, mais elle
tire réellement son intérêt de pouvoir utiliser la veine petite saphène
(VPS).
L’examen du patient en orthostatisme peut parfois permettre d’apprécier
l’état de la VPS mais l’échodoppler veineux nous semble toujours
nécessaire, permettant d’apprécier l’anatomie de la veine, de repérer et
de marquer son trajet et la naissance des principales collatérales ; il
précise en outre les éventuelles altérations pariétales et le diamètre
proximal et distal mesuré au mieux sous garrot et jambe pendante. La
veine est considérée comme utilisable si le diamètre externe mesuré dans
ces conditions est supérieur ou égal à 3 mm et si elle est indemne
d’altération pariétale. Dans l’expérience d’Ouriel, la VPS était utilisable
chez 72 % des patients relevant d’une revascularisation souspoplitée [13]. L’échodoppler a enfin l’avantage de situer le niveau de
l’abouchement de la VPS dans la veine poplitée et par là même de
prévoir la longueur de veine disponible pour le pontage.
Installation du patient
Le patient est confortablement installé en décubitus ventral avec un
coussin placé sous les crêtes iliaques, le membre inférieur enrobé
jusqu’au tiers supérieur de cuisse dans un jersey collé. Des champs
placés sous le genou maintiennent l’articulation en extension et facilitent
l’abord de l’artère poplitée. Compte tenu de la position du patient et de
la durée opératoire prévisible, l’anesthésie générale est préférable à
l’anesthésie péridurale.
Incision cutanée
Si la VPS est utilisable, l’incision centrée sur la veine débute au pli du
genou et s’étend vers le bas en fonction du site de l’anastomose
inférieure et de la longueur de veine nécessaire. En cas d’anastomose
sur l’artère tibiale postérieure distale, une courte voie d’abord
complémentaire parallèle au bord interne du tendon calcanéen est
souhaitable, afin d’éviter un décollement sous-cutané trop important,
source de troubles de cicatrisation.
La longueur de l’incision dépend du mode d’utilisation de la veine pour
le pontage :
– en cas de pontage inversé, l’incision peut être continue ou discontinue
ménageant de courts intervalles de peau saine, permettant la dissection
de la veine et son prélèvement ;
– en cas de pontage in situ, seules les parties proximales et distales de la
veine sont abordées et disséquées en regard des futures zones
anastomotiques.
Dans sa moitié inférieure, la VPS est sus-aponévrotique longée par le
nerf saphène externe ; au tiers moyen de jambe, elle s’enfonce dans un
dédoublement de l’aponévrose superficielle qui engaine séparément le
nerf situé en avant d’elle. Au niveau du creux poplité, elle est située entre
les aponévroses superficielle et profonde, perforant celle-ci en regard de
page 8
7 Abord postérieur des artères de jambe : tracé des incisions. a. Extension poplitée haute ; b + c. incision sur le trajet de
la veine petite saphène ; c. abord distal de l’artère fibulaire ; d.
abord distal de l’artère tibiale postérieure.
l’interligne articulaire pour s’aboucher à la face postérieure de la veine
poplitée. La crosse peut être haut située par rapport à l’interligne
articulaire, offrant 5 à 6 cm supplémentaires utilisables pour le pontage.
L’artère poplitée sous articulaire est aisément abordée après avoir
récliné en dehors successivement le nerf tibial puis la veine poplitée.
L’abord de l’artère poplitée sus-articulaire nécessite une extension de la
voie d’abord vers le haut selon un trajet en « baïonnette » interne (fig 7).
Abord proximal des artères de jambe
L’abord du TTF et de l’origine des artères de jambe nécessite le clivage
de la fusion médiane des muscles gastrocnémiens qui sont écartés avec
leur pédicule. Le muscle soléaire forme une nappe épaisse et large, du
moins dans la partie supérieure de la jambe. À la partie basse de la jambe,
il devient plus étroit et peut être contourné latéralement. Le muscle
soléaire peut être désinséré de son attache tibiale sur toute sa longueur
ou sectionné à proximité de celle-ci ; il peut être également incisé sur la
ligne médiane selon la voie classique de ligature de l’artère tibiale
postérieure, l’incision pouvant se prolonger jusqu’au niveau calcanéen
(fig 8). On découvre ainsi très largement le TTF, les artères tibiale
postérieure en dedans et fibulaire en dehors croisée près de son origine
par le nerf tibial. Le TTF et l’origine des artères de jambe sont masqués
par un réseau de veines plexiformes et de branches nerveuses dont le
respect est souhaitable pour éviter des parésies musculaires, source de
gêne fonctionnelle ultérieure.
La partie proximale des artères tibiale postérieure et fibulaire est exposée
de façon satisfaisante par cet abord. En revanche, l’artère tibiale
antérieure n’est accessible que dans ses 15 premiers millimètres avant le
franchissement du bord supérieur de la membrane interosseuse dont la
section permet l’exposition de 1 à 2 cm complémentaires.
Abord distal des artères de jambe
Le tiers moyen et le tiers inférieur des artères tibiale postérieure et
fibulaire sont abordés au mieux par de courtes voies d’abord parallèles
aux bords du tendon calcanéen.
Artère tibiale postérieure (fig 9)
Un abord longitudinal de 8 à 10 cm est réalisé au bord interne du tendon
calcanéen. L’incision de l’aponévrose jambière superficielle donne
accès à un espace celluleux situé entre le muscle triceps sural et le plan
musculaire profond sur lequel repose l’artère recouverte par
l’aponévrose jambière profonde. À proximité de la malléole, l’artère
tibiale postérieure chemine en arrière du muscle long fléchisseur des
orteils qu’il faut écarter en dedans pour aborder la partie distale de
l’artère.
PONTAGES VEINEUX SUR LES ARTÈRES DE JAMBE ET DU PIED
Techniques chirurgicales
43-029-G2
A
10 Abord de l’artère fibulaire
distale par voie postérieure.
1. Aponévrose superficielle ; 2.
triceps sural ; 3. muscle long fléchisseur de l’hallux ; 4. artère
fibulaire.
8 Abord postérieur des artères de jambe par voie médiane transsoléaire. 1. Artère
poplitée ; 2. tronc tibiofibulaire ; 3. muscle soléaire ; 4. artère tibiale antérieure ;
5. artère fibulaire ; 6. artère tibiale postérieure.
B
dehors en sectionnant si besoin quelques fibres musculaires qui
s’insèrent sur une cloison tendineuse commune avec des faisceaux du
muscle tibial postérieur. À sa partie basse, l’artère s’applique sur la
membrane interosseuse et se divise en deux branches terminales
antéroexterne et postéro-interne. Le repérage de l’artère peut être facilité
par la palpation de la fibula située immédiatement en dehors de l’artère.
Anastomose proximale
Elle est faite selon les données angiographiques sur l’artère poplitée
haute ou basse, voire exceptionnellement sur le TTF ou une artère de
jambe proximale. En cas de technique in situ, la destruction valvulaire
est réalisée au mieux sous contrôle angioscopique :
– soit avant la réalisation de l’anastomose proximale, l’angioscope
introduit par la partie haute de la veine contrôlant l’action du
valvulotome introduit par le bas ;
– soit après la réalisation de l’anastomose proximale, l’angioscope
pouvant être solidarisé à la tige du valvulotome, l’optique étant située
un peu en retrait de l’olive.
En cas de technique inversée, la tunnellisation du pontage peut être faite
en sous-aponévrotique, ou mieux encore en avant du muscle soléaire,
selon un trajet anatomique qui met le pontage à l’abri d’une éventuelle
infection des voies d’abord.
Anastomose distale
Artère tibiale postérieure
A
L’anastomose peut être faite à un niveau quelconque du trajet de l’artère
jusqu’à la bifurcation plantaire qui est aisément abordée dans cette
position, la cheville et le dos du pied étant appuyés sur un billot et le pied
maintenu en valgus.
9 Abord de l’artère tibiale
postérieure distale par voie postérieure. 1. Muscle long fléchisseur des orteils ; 2. triceps sural ;
3. artère tibiale postérieure.
Artère fibulaire
B
Artère fibulaire (fig 10)
Les aponévroses superficielle et profonde de jambe sont incisées
longitudinalement en dehors du tendon calcanéen au niveau de la partie
basse de l’incision de prélèvement de la VPS ; l’artère est recouverte en
arrière par le muscle long fléchisseur de l’hallux qu’il faut écarter en
Elle peut être revascularisée jusqu’à sa bifurcation, l’anastomose
pouvant même être faite distalement sur la branche de division postérointerne lorsque celle-ci est hypertrophiée et reprend en charge l’arche
malléolaire.
Artère tibiale antérieure
L’accès de ses premiers centimètres est possible après section du bord
supérieur de la membrane interosseuse ; au-delà, elle est d’un accès
difficile mais néanmoins parfois réalisable par voie antérieure après mise
page 9
43-029-G2
PONTAGES VEINEUX SUR LES ARTÈRES DE JAMBE ET DU PIED
en rotation externe du membre. Si la revascularisation doit porter sur
l’artère dorsale du pied, le pontage peut être tunnellisé en sous-cutané
en avant de la malléole interne et l’anastomose distale faite après
fermeture des voies d’abord postérieures et réinstallation du patient en
décubitus dorsal.
Discussion
Les conditions du succès d’un pontage distal sont multifactorielles. La
présence de matériel veineux et d’un réseau d’aval correct est le meilleur
garant d’une perméabilité durable ; la qualité des suites opératoires et
notamment l’absence de morbidité reposent en grande partie sur le choix
pertinent de la voie d’abord et la qualité de sa réalisation. Une
cicatrisation per primam autorise une reprise rapide de la marche et
abrège la durée d’hospitalisation. À l’inverse, les troubles de
cicatrisation retardent la réadaptation fonctionnelle, génèrent des
douleurs et prolongent l’hospitalisation, quand ils ne sont pas
responsables directement ou indirectement de complications septiques.
La fréquence des complications cutanées varie de 7 à 30 % selon les
séries qui se sont intéressées à ce problème. Leur survenue est favorisée
par les conditions locales et générales parmi lesquelles l’état de
dénutrition, le degré d’ischémie, la présence d’une infection ou la
proximité de troubles trophiques. Leur prévention repose avant tout sur
la qualité de la réalisation de la voie d’abord et de sa fermeture, fruit de
l’expérience chirurgicale et de l’engagement de l’opérateur. Le tracé des
incisions est essentiel et doit être réalisé par l’opérateur lui-même ; il
doit permettre l’abord de la veine, l’exposition de l’artère et la
tunnellisation. Dans les pontages à haut risque de thrombose, le choix
des voies d’abord et le tracé des incisions doivent tenir compte d’un
échec potentiel et contrarier le moins possible la réalisation d’une
éventuelle amputation.
La réalisation de la voie d’abord doit respecter les structures
anatomiques de voisinage. La peau et le tissu cellulaire sous-cutané sont
particulièrement vulnérables dans cet environnement ischémique. Les
décollements intempestifs, les coagulations trop proches de la peau, les
écartements agressifs inutilement prolongés doivent être prohibés. La
dissection doit être atraumatique. Les délabrements musculaires
résultant souvent d’une connaissance insuffisante de l’anatomie doivent
être évités. Les nerfs sont souvent maltraités et leur contusion peut être
responsable de névralgies gênantes. Les collatérales musculaires des
nerfs profonds doivent être autant que possible préservées car la section
de certaines d’entre elles peut entraîner des faiblesses musculaires
fâcheuses. Les veines jambières sont intimement adhérentes à l’artère
adjacente, souvent dédoublées, parfois plexiformes ; leur blessure
impose souvent leur ligature source de phlébite postopératoire.
L’utilisation de la bande d’Esmarch pour réaliser l’anatomose distale
constitue dans cette optique un réel progrès et doit être largement
utilisée. Elle permet de réduire la zone de dissection de l’artère à
revasculariser, limitant par là les risques de traumatismes nerveux,
veineux et artériels. L’artère est seulement exposée et non plus
disséquée, encore moins circonscrite ; la palpation localise un segment
artériel adéquat de 15 à 20 mm ou doit porter l’anastomose.
Choix du site de l’anastomose distale
et de la voie d’abord
Choix de la voie d’abord
Il repose sur l’analyse de plusieurs paramètres : la présence de lésions
cutanées, le matériel veineux disponible, les éventuels abords
préalables, le morphotype du patient. La voie rétrotibiale interne permet
d’aborder simultanément la VGS, l’artère tibiale postérieure et la moitié
supérieure de l’artère fibulaire. La partie distale de l’artère fibulaire est
abordée au mieux par voie externe ; cette voie peut être choisie
électivement lorsque l’abord de la partie supérieure de l’artère
s’annonce difficile par voie interne en raison d’abords antérieurs ou du
fait du morphotype du patient. Dans la majorité des cas, l’artère tibiale
antérieure est abordée par voie antérieure ; l’abord postéro-interne n’est
indiqué que pour améliorer l’accès par voie rétrotibiale interne des
premiers centimètres de l’artère au niveau et en aval de sa crosse ou
lorsque des lésions cutanées interdisent l’abord antérieur.
La voie postérieure des artères tibiale postérieure et fibulaire, très
rarement utilisée, est réservée aux lésions artérielles sous-poplitées et
page 10
Techniques chirurgicales
suppose que la VPS soit utilisable. Les avantages de cette voie d’abord
sont nombreux ; elle préserve la VGS et facilite l’abord artériel en cas
de repontage. Les complications cutanées seraient rares et l’œdème
exceptionnel. L’abord distal de l’artère fibulaire est plus aisé et moins
délabrant que par voie externe. A contrario, cette voie offre une
accessibilité limitée au tiers supérieur et moyen des artères de jambe
imposant un clivage des muscles gastrocnémiens et une section étendue
du muscle soléaire. Les nerfs des muscles de la loge postérieure
superficielle sont relativement vulnérables dans cet abord et leur
traumatisme peut entraîner des parésies musculaires gênantes.
Site de l’anastomose distale
Dans les ischémies sévères, rares sont les cas où plusieurs artères de
jambe sont perméables et de qualité suffisante pour permettre une
revascularisation séquentielle. Dans la majorité des cas une seule artère
de jambe offre les conditions requises pour une revascularisation
élective : absence d’altération diffuse, continuité directe avec le réseau
artériel du pied ou continuité indirecte (artère fibulaire) par
l’intermédiaire d’anastomoses suffisantes.
L’artère tibiale postérieure offre rarement ces conditions et la
revascularisation intéresse le plus souvent l’artère tibiale antérieure et
surtout l’artère fibulaire assez fréquemment épargnée par l’athérome,
mais dont le pronostic de la revascularisation tient à la qualité des
anastomoses qu’elle contracte avec les arches plantaires.
En présence de lésions sténosantes du TTF ou de l’origine des artères de
jambe, les indications respectives d’une revascularisation poplitée en
amont des lésions sténosantes ou d’une revascularisation jambière sur
une artère présumée saine dépendent avant tout du matériel veineux
disponible. Une veine saphène perméable et de calibre adéquat incite à
utiliser le meilleur site anastomotique possible en aval des lésions
sténosantes.
Pontage sur l’artère fibulaire ou au pied ?
En cas d’athérosclérose évoluée, l’artère fibulaire reste souvent la
dernière artère perméable et l’on peut avoir le choix entre la
revascularisation de celle-ci ou d’une artère du pied revascularisée
indirectement par l’artère fibulaire.
La revascularisation de l’artère fibulaire a l’avantage potentiel de
permettre un pontage plus court et donc de nécessiter moins de matériel
veineux ; cet avantage devant être pondéré si une voie d’abord et un
trajet externe sont choisis.
La revascularisation d’une artère de la cheville ou du pied a l’avantage
d’un abord aisé et d’une revascularisation plus efficace des zones
ischémiques distales. L’étude de la littérature ne permet pas de trancher
en faveur de l’une ou l’autre option ; les taux de perméabilité des
pontages sur l’artère fibulaire et des pontages plus distaux étaient
comparables dans l’expérience de Shah et al [18] adeptes de la technique
in situ et d’Elliott [7] , Schneider [17] ou Bergamini [3] . Les taux de
sauvetage de membre étaient également comparables à l’exception de la
série d’Elliott où le taux de sauvetage de membre obtenu après pontage
sur l’artère fibulaire (55 % à 2 ans) était significativement inférieur à
celui obtenu après pontage sur les artères tibiales ou les artères du pied
(67 %) [7].
Le choix entre artère fibulaire et artère du pied est ainsi influencé par la
longueur de matériel veineux disponible, la qualité des anastomoses
entre l’artère fibulaire et le réseau du pied, l’existence ou non de lésions
nécrotiques distales et enfin par les préférences de l’opérateur.
Technique in situ ou inversée ?
Le choix de la technique d’utilisation de la VGS reste un sujet de
controverse. Pour les pontages destinés au quart inférieur de jambe ou à
la cheville, la destruction valvulaire selon la technique rétrograde
impose pratiquement un relais dans la région périgonale ou crurale basse
du fait des différences importantes entre les calibres proximal et distal
du pontage ; il est en effet rarement possible d’utiliser des valvulotomes
de plus de 2,5 mm au niveau jambier, valvulotomes qui s’avéreront
souvent insuffisants pour assurer une destruction valvulaire adéquate au
niveau crural. La destruction valvulaire à l’aide du valvulotome de Mills
effectuée sous contrôle angioscopique prend dans cette indication tout
son intérêt.
PONTAGES VEINEUX SUR LES ARTÈRES DE JAMBE ET DU PIED
Techniques chirurgicales
43-029-G2
Tableau I. – Perméabilité des pontages veineux fémorojambiers [4, 5, 6, 8, 11, 20, 24].
Perméabilité primaire (ou primaire assistée)
Auteurs
Années
Nombre de cas
Type de pontage
Feinberg [8]
1990
57
In situ
Bergamini [4]
1991
246
In situ
Donaldson [6]
1991
100
In situ
63 %
(primaire assistée
71 %)
Londrey [11]
1991
93
61
Inversé
In situ
59 % NS
72 %
Taylor [20]
1991
203
Inversé
Dalman [5]*
1990
Wengerter [24]**
1991
2 ans
3 ans
Inversé
In situ
5 ans
63 %
70 %
Inversé
In situ
63
62
4 ans
64 %
67 %
62 %
68 %
61 % NS
58 %
* Méta-analyse ; ** étude prospective randomisée ; NS : différence non significative.
Résultats
Les taux de perméabilité actuarielle des pontages fémorojambiers sont
peu différents, que la technique utilisée soit in situ ou inversée
(tableau I).
Dans une étude rétrospective appréciant l’influence du diamètre de la
veine sur la perméabilité, Wengerter et al [23] ont montré que les taux de
perméabilité des pontages fémorojambiers en veine inversée d’un
diamètre externe de 3,5 mm étaient à peu près équivalents à ceux des
pontages réalisés avec des veines de diamètre supérieur ou égal à 4 mm.
Dans cette étude, le diamètre critique au-dessous duquel la perméabilité
des pontages veineux inversés diminuait de façon nette était de 3 mm.
Dans les études rétrospectives (tableau I) les taux de perméabilité
primaire exprimés à 5 ans varient de 59 à 67 % pour la technique
inversée et de 63 à 72 % pour la technique in situ.
Dans la méta-analyse réalisée par Dalman [5], les taux moyens de
perméabilité primaire à 4 ans étaient respectivement de 62 et 68 % pour
les pontages inversés et in situ, la perméabilité secondaire étant de 76 et
81 %.
Dans l’étude prospective randomisée multicentrique de Wengerter et
al [24] comparant les pontages in situ et inversés au niveau infrapoplité,
les perméabilités actuarielles primaire et secondaire des deux types de
pontage étaient équivalentes (perméabilité primaire et secondaire à
2 ans : inversés = 61 et 67 % ; in situ = 58 et 69 %). Toutefois, la
perméabilité des pontages in situ effectués avec des veines de diamètre
inférieur ou égal à 3 mm était supérieure à celle des pontages inversés
de même diamètre (in situ : 75 % ; inversés : 37 % à 1 an) ; la différence
n’étant toutefois pas statistiquement significative du fait des faibles
populations en présence.
Outre la technique d’utilisation de la VGS, les perméabilités seraient
également influencées par le réseau artériel d’aval et notamment l’état
des artères du pied, une réintervention, une insuffisance rénale
terminale, la poursuite du tabagisme, la qualité de la surveillance.
L’influence d’autres facteurs tels que le diabète, le stade initial de
l’ischémie, le sexe, les traitements adjuvants est plus controversée.
Pontages distaux paramalléolaires
et inframalléolaires
Indications
Avec l’amélioration des techniques, les indications des pontages se sont
étendues progressivement vers la distalité du membre avec la
revascularisation des artères jambières à la cheville, voire au pied. La
revascularisation peut en effet intéresser les branches de division de
l’artère tibiale postérieure, la partie distale de l’artère dorsale du pied ou
une de ses branches hypertrophiées.
Les artériopathies distales, apanage de l’artérite diabétique, fournissent
l’essentiel des indications ; deux tableaux cliniques peuvent être
distingués :
– le plus fréquent concerne les patients dont le pouls poplité est perçu et
les pouls distaux abolis ; l’artériographie révèle une oblitération
proximale ou distale des artères de jambe avec un réseau artériel du pied
pouvant être partiellement respecté par l’athérome ;
– le deuxième tableau, plus rare, est constitué de patients dont les pouls
sont perçus dans la région malléolaire mais qui présentent néanmoins
une ischémie distale sévère ; l’artériographie peut parfois objectiver en
aval d’une oblitération paramalléolaire, une branche de division de
l’artère tibiale postérieure ou une artère dorsale du pied distale
susceptibles d’être revascularisée.
Compte tenu du pronostic des revascularisations distales et de leur
relative difficulté technique, les indications doivent être réservées aux
gangrènes ischémiques ne cicatrisant pas en dépit d’un traitement
médical agressif et de débridements chirurgicaux effectués à la
demande. L’artériographie doit étudier particulièrement les artères
jambières et le réseau artériel du pied.
L’opacification du réseau du pied a bénéficié grandement de l’apport de
l’angiographie digitalisée ; rares sont les cas où une artère distale
perméable n’est pas visualisée par cette technique ; à défaut, la présence
d’un signal doppler audible sur le trajet d’une artère doit inciter à
l’explorer chirurgicalement. Après héparinisation générale, l’artère
exposée peut être cathétérisée avec un Cathlon 22 G, mais le risque de
dissection pariétale sur une artère de petit calibre doit plutôt inciter à
effectuer sur la zone la plus favorable, une courte artériotomie
longitudinale qui permet de cathétériser à vue la lumière distale. Du
sérum hépariné est poussé à la seringue dans le cathéter : une résistance
élevée à l’injection contre-indique la réalisation du pontage ; la mesure
de la résistance, lorsqu’elle est techniquement réalisable, revêt dans ce
cas un intérêt particulier. Un cliché artériographique pratiqué par le
cathéter permet d’apprécier précisément l’état de l’artère et sa
collatéralité avant la réalisation du pontage.
Pontages longs ou courts ?
En fonction de l’état du réseau artériel fémoropoplité, le pontage peut
être soit long, anastomosé sur l’artère fémorale commune, soit court,
anastomosé sur l’artère fémorale superficielle basse voire sur l’artère
poplitée en dessous de l’interligne ; plus rarement, l’anastomose
proximale peut être faite sur une artère de jambe.
Dans tous ces cas, la réalisation d’une anastomose basse est
subordonnée à l’absence de sténose d’amont supérieure ou égale à 30 %.
Plusieurs séries de la littérature non prospectives ont montré que la
longévité des pontages courts était au moins égale sinon supérieure à
celle des pontages longs [12, 15, 16, 22]. La supériorité des pontages courts
serait encore plus nette quand l’anastomose distale porte sur une artère
du pied et/ou quand le réseau d’aval est médiocre.
Matériel utilisé
En l’absence de matériel veineux, les chances de perméabilité des
pontages très distaux réalisés avec du matériel prothétique sont très
faibles, même en utilisant les artifices destinés à augmenter leur
perméabilité :
– le pontage long bénéficie au mieux de l’utilisation in situ de la
VGS [18] ;
page 11
43-029-G2
PONTAGES VEINEUX SUR LES ARTÈRES DE JAMBE ET DU PIED
Techniques chirurgicales
– pour les pontages courts et en particulier pour les pontages naissant
sous l’interligne du genou, la technique inversée présente de nombreux
avantages permettant notamment d’utiliser la portion la plus adéquate
de la veine et d’éviter les problèmes de déroutage de celle-ci ; en
contrepartie, elle fait perdre le bénéfice d’une meilleure congruence
anastomotique ; pour cette raison, certains auteurs préconisent d’utiliser
la VGS non inversée après destruction valvulaire.
Site anastomotique distal
Dans ces indications de pontage très distaux, l’artère réceptrice est
rarement préservée par l’athérome ; les calcifications sont fréquentes et
parfois circonférentielles ; la dissection doit s’attacher à retrouver la
zone la moins pathologique possible pour réaliser l’anastomose.
L’exploration doit ainsi parfois être poussée :
– au-delà de la bifurcation plantaire, lorsque l’artère tibiale postérieure
rétro- et sous-malléolaire est trop pathologique et en particulier vers
l’artère plantaire latérale, de calibre habituellement plus important que
l’artère plantaire médiale et qui donne l’arcade plantaire profonde ;
– vers la partie distale de l’artère dorsale du pied dans sa plongée vers la
région plantaire.
En cas d’oblitération des troncs principaux, certaines branches ou
collatérales telles que l’artère tarsienne latérale, l’artère arquée ou
l’artère plantaire médiale peuvent s’hypertrophier et bénéficier le cas
échéant d’une revascularisation ; ces revascularisations ne sont toutefois
concevables qu’effectuées avec du matériel veineux et en l’absence de
nécrose tissulaire évoluée. L’expérience d’Ascer dans ce domaine fixe
les limites des revascularisations distales comme une solution
alternative à une amputation de jambe [2].
11 Trajet du pontage in situ vers
l’artère dorsale du pied. 1. trajet
idéal ; 2. à éviter.
Résultats
Incisions distales et trajet du pontage
La technique in situ impose de réaliser distalement deux incisions
cutanées pour prélever la VGS et aborder l’artère à revasculariser. Ces
deux incisions sont d’autant plus proches que l’on descend plus
distalement sur le pied, en particulier sur l’artère dorsale du pied (fig 11).
Le pont cutané déterminé par les deux incisions est d’autant plus exposé
à l’ischémie que les incisions sont proches, que l’ischémie du pied est
sévère et qu’un décollement est fait sous ce lambeau pour dérouter et
tunnelliser la veine. Le risque d’ischémie du lambeau cutané peut être
réduit en écartant autant que possible les deux incisions et en évitant de
tunnelliser la veine sous le pont cutané, le décollement étant un facteur
d’ischémie supplémentaire. La mobilisation de la veine doit être
amorcée plus haut et la veine est tunnellisée en amont du pont cutané.
Anastomose distale
La réalisation de l’anastomose distale doit bénéficier d’une technique
rigoureuse : utilisation de grossissement optique (loupes 2,5 à 4,5, voire
microscope lorsque le diamètre de la lumière avoisine le millimètre), fil
monobrin fin 6 ou 7/0 serti d’aiguilles très fines, surjet suspendu et
anastomose réalisée sous bande d’Esmarch pour éviter le traumatisme
du clampage des parois de l’artère.
page 12
Les résultats des pontages effectués sur l’artère dorsale du pied [14] ou
sur l’artère tibiale postérieure rétro- et sous-malléolaire, voire sur
l’artère plantaire latérale [1], sont bien meilleurs que ne le laisserait
espérer a priori le réseau artériel d’aval très réduit dans lequel elles
débouchent. Contrairement à ce qui est habituellement démontré à
l’étage poplité ou jambier, il ne semble pas exister de corrélation aussi
fidèle entre la perméabilité des pontages inframalléolaires et le réseau
artériel récepteur du pied. En particulier, l’état de l’arche malléolaire,
longtemps invoqué comme une condition indispensable de succès,
n’influerait pas sur la perméabilité des pontages distaux [10, 14]. Le haut
degré de collatéralité du réseau du pied et la richesse des anastomoses
entre les artères dorsale du pied et plantaires pourraient expliquer cette
apparente discordance. Les perméabilités actuarielles primaires des
pontages para- et inframalléolaires varient de 58 % à 3 ans [17] à 68 % à
5 ans [14] (perméabilités secondaires dans les deux séries : 82 %).
Les séries les plus importantes concernent les revascularisations de
l’artère dorsale du pied plus volontiers épargnée par les calcifications,
notamment chez le diabétique et d’un abord chirurgical aisé. À propos
de 384 pontages effectués sur l’artère dorsale du pied, Pomposelli et al
font état de perméabilité primaire et secondaire de 68 % et 82 % à
5 ans [14]. L’expérience de Harrington [9] est plus nuancée : à propos de
73 pontages la perméabilité primaire à 2 ans était de 59 % ; les facteurs
d’échec identifiés dans cette série étaient la qualité médiocre de la veine,
une arche antérieure déficiente et une infection extensive du pied.
Techniques chirurgicales
PONTAGES VEINEUX SUR LES ARTÈRES DE JAMBE ET DU PIED
43-029-G2
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page 13
ENCYCLOPÉDIE MÉDICO-CHIRURGICALE 43-029-I
43-029-I
Pontages séquentiels, mixtes
et prothétiques. Pontages avec
matériel veineux autologue autre que
la veine grande saphène. Pontages
avec allogreffes vasculaires
J Watelet
R é s u m é. – Quand la veine saphène est absente ou de longueur insuffisante, le
choix de la technique et du matériel de pontage dépend du niveau de la
revascularisation, de la présence ou non d’autre matériel veineux autologue et des
habitudes de l’opérateur.
Au niveau sus-articulaire, le matériel prothétique peut être utilisé avec des résultats
satisfaisants.
Au niveau infragéniculé, la supériorité du matériel veineux sur les divers substituts
artériels est telle que son utilisation doit être privilégiée ; une exploration complète du
capital veineux doit être ainsi réalisée avant de recourir au matériel prothétique.
Les veines des membres supérieurs sont fréquemment utilisables avec des résultats
proches de ceux obtenus avec les veines grandes saphènes (VGS) ; les veines
petites saphènes (VPS) sont particulièrement adaptées aux revascularisations
infragéniculées poplitées-distales. Enfin, des segments veineux d’origine diverse
peuvent être compilés avec des résultats acceptables.
L’insuffisance de veine peut être résolue par divers procédés : l’abaissement de
l’anastomose supérieure souvent possible, au prix parfois d’une thromboendartériectomie de l’artère fémorale superficielle ; le pontage séquentiel dont la
réalisation est facilitée par la présence d’une artère poplitée suspendue ; le pontage
mixte dont les performances nettement inférieures aux deux procédés précédents
peuvent néanmoins être comparées favorablement à celles des pontages
prothétiques.
En l’absence de matériel veineux, le choix se circonscrit entre : le matériel prothétique
dont les résultats semblent tirer un bénéfice de l’utilisation d’artifices au niveau de
l’anastomose distale et les allogreffes artérielles dont les perspectives séduisantes
doivent être encore confirmées.
© 1999, Elsevier, Paris.
Pontages séquentiels
En 1971, De Laurentis et Friedman ont décrit une technique de
restauration artérielle sous-inguinale utilisant de façon séquentielle un
© Elsevier, Paris
Jacques Watelet : Professeur des Universités, praticien hospitalier, service de chirurgie
vasculaire, centre hospitalier universitaire Charles-Nicolle, 1, rue de Germont, 76031
Rouen cedex, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Watelet J. Pontages séquentiels,
mixtes et prothétiques. Pontages avec matériel veineux autologue autre que
la veine grande saphène. Pontages avec allogreffes vasculaires. Encycl Méd
Chir (Elsevier, Paris), Techniques chirurgicales - Chirurgie vasculaire, 43-029-I,
1999, 12 p.
pontage prothétique et une veine saphène inversée [12]. Ce type de
pontage était destiné à des patients nécessitant une revascularisation
de l’artère poplitée sous-articulaire ou d’une artère de jambe, et dont
le capital veineux était insuffisant pour effectuer tout le pontage. Le
pontage proximal prothétique était anastomosé sur une artère poplitée
haute, perméable ou endartériectomisée, et le pontage distal
franchissant l’interligne du genou revascularisait une artère de jambe.
Utilisée par ces auteurs en présence de veines saphènes inadéquates,
cette technique avait pour objectif d’éviter la traversée du pli du
genou par du matériel prothétique. Cette technique de
revascularisation peut être proposée dans diverses configurations
anatomiques ; le tableau habituel associe une oblitération de l’artère
fémorale superficielle (AFS) avec reperméation d’une artère poplitée
suspendue ; de ce segment d’artère poplitée, naissent des artères
jumelles et articulaires qui revascularisent distalement une ou
plusieurs artères de jambe.
43-029-I
PONTAGES SÉQUENTIELS, MIXTES ET PROTHÉTIQUES. PONTAGES AVEC MATÉRIEL VEINEUX
Techniques chirurgicales
AUTOLOGUE AUTRE QUE LA VEINE GRANDE SAPHÈNE. PONTAGES AVEC ALLOGREFFES VASCULAIRES
1 Pontage séquentiel prothétique et veineux
fémoropoplité et poplitétibial antérieur.
A
B
C
2
Plus rarement, l’artère poplitée alimente une artère de jambe
pathologique, oblitérée à un niveau variable, avec reperméation en aval
d’une artère pédieuse ou tibiale postérieure paramalléolaire, susceptible
d’être revascularisée.
Dans les deux cas de figure, l’artère poplitée peut servir de relais pour
le pontage proximal. L’intervention consiste typiquement à effectuer
un pontage prothétique de l’artère fémorale commune (AFC) à
l’artère poplitée haute ; un second pontage est branché latéralement
sur la prothèse en amont de l’anastomose distale, franchit l’interligne
du genou et revascularise distalement l’artère de jambe la plus
adéquate (fig 1). En revascularisant deux territoires distincts, cette
technique augmente le réseau artériel récepteur, abaisse le niveau des
résistances et augmente de ce fait le débit dans le pontage proximal.
Avec la pratique d’anastomoses séquentielles, des augmentations de
débit de plus de 50 % dans le pontage proximal ont été démontrées
aussi bien expérimentalement qu’en pratique clinique. Cette
technique est particulièrement justifiée lorsque l’état de la VGS
(longueur disponible insuffisante, taille réduite...) n’autorise pas la
réalisation d’un pontage conventionnel, in situ ou inversé, sur une
artère de jambe ; dans ce cas, le pontage prothétique proximal
fémoropoplité permet d’économiser 20 à 30 cm de veine, et la portion
crurale de la veine suffit habituellement pour effectuer le pontage
distal. De plus, le pontage prothétique limité à la région susarticulaire a une longévité acceptable. Par rapport au pontage mixte,
cette technique évite l’écueil de l’anastomose intermédiaire et, en
particulier, son risque de plicature.
page 2
Pontage « continu » fémoro-tibio-péronier avec relais poplité selon trois
modalités.
A. Par une anastomose latérolatérale.
B. Par court pontage veineux ou prothétique interposé.
C. Par l’intermédiaire d’une saphène dédoublée.
Technique
Pontage continu
Le pontage veineux ou prothétique peut être continu de l’AFC à l’artère
jambière.
Le relais sur l’artère poplitée peut revêtir trois modalités.
– Par une anastomose latérolatérale (fig 2A). Le pontage emprunte un
trajet anatomique passant entre les jumeaux. Après confection de
l’anastomose proximale sur l’artère fémorale commune, le pontage est
tunnellisé en arrière du couturier, puis entre les jumeaux. Le site
anastomotique sur l’artère poplitée est choisi en fonction des données
confrontées de l’artériographie et de la palpation de l’artère. Le membre
inférieur étant en extension et le pontage sous tension, le site
correspondant sur la prothèse est repéré.
Après flexion du genou et clampage de l’artère poplitée et du pontage,
l’artériotomie est faite sur 20 à 25 mm, à moins que la présence de
plaques d’athérome adjacentes n’oblige à en réduire la longueur. Une
ouverture de longueur équivalente est faite en regard sur le pontage, en
excisant une pastille ovalaire de 2 ou 3 mm de large pour ouvrir
l’anastomose. Le surjet est débuté au milieu de la berge postérieure en
nouant d’emblée le premier point, et poursuivi de part et d’autre vers
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3 Technique de l’anastomose latérolatérale : le surjet débuté
au milieu de la berge postérieure est poursuivi de part et d’autre
vers l’angle correspondant.
A
5
B
C
Variétés de relais des pontages séquentiels prothétiques et veineux.
A. Anastomose latéroterminale entre le pontage prothétique et le pontage veineux.
B. Anastomoses « indépendantes ».
C. Zone anastomotique commune.
– Par un court pontage veineux ou prothétique interposé entre le
pontage fémorojambier et l’artère poplitée ; les anastomoses étant
réalisées latéralement (fig 2B).
– Par l’intermédiaire d’une saphène dédoublée (fig 2C).
Pontages successifs
A
4
B
Dangers de l’anastomose latérolatérale.
A. Artériotomie trop haute par rapport au pontage : plicature du pontage.
B. Artériotomie trop basse : traction sur l’artère pouvant couder l’origine du
pontage sous-jacent.
l’angle correspondant (fig 3). On peut ainsi, à la demande, agrandir l’une
des deux ouvertures sur l’artère ou la prothèse. L’anastomose se termine
par la suture de la berge antérieure. Après les manœuvres de purge
habituelles, l’artère poplitée est mise en charge et la prothèse clampée
au ras de l’anastomose ; l’anastomose distale peut être ensuite réalisée.
En cas de pontage veineux, la veine est utilisée de façon optimale en
position inversée ; si l’anastomose inférieure doit être faite très
distalement, il peut être souhaitable d’utiliser la veine de façon non
inversée, après destruction valvulaire, pour avoir une meilleure
congruence anastomotique.
Danger : les sites anastomotiques doivent être rigoureusement
concordants sur l’artère et le pontage ; si l’artériotomie est effectuée trop
haut par rapport au pontage, l’anastomose entraîne une plicature sur le
pontage (fig 4A), qui peut être corrigée par une meilleure répartition de
l’excès de longueur en amont et par une éventuelle fixation du pontage
à l’artère adjacente. Si l’artériotomie est effectuée trop bas, le pontage
exerce une traction sur l’anastomose pouvant couder l’artère et l’origine
du pontage sous-jacent (fig 4B).
La technique usuelle fait appel à deux pontages successifs, proximal
prothétique et distal veineux. L’artère poplitée haute (ou l’AFS basse)
constitue le relais idéal fournissant un réseau artériel récepteur (artères
articulaires et jumelles) non négligeable et évitant la traversée du genou
par la prothèse. À défaut, l’artère poplitée basse peut être utilisée, voire
le tronc tibiopéronier.
Plusieurs modalités de relais entre les deux pontages sont possibles
(fig 5) :
– le pontage proximal est anastomosé sur l’artère poplitée haute ou
basse et le pontage distal est anastomosé latéralement quelques
centimètres en amont de l’anastomose inférieure (fig 5A) ;
– les deux pontages sont indépendants et l’anastomose distale du
pontage d’amont reste à distance de l’anastomose proximale du pontage
sous-jacent (fig 5B) ; cette technique nécessite un segment
suffisamment long d’artère perméable (par exemple, artère poplitée
haute et basse) ou endartériectomisé. La zone endartériectomisée doit
être assez longue pour permettre la réalisation de deux anastomoses
successives et doit être faite, si possible, en regard de collatérales
(grande anastomotique...) dont la revascularisation assurera la longévité
de la zone endartériectomisée ;
– la zone anastomotique est commune aux deux pontages dont les
extrémités sont adossées l’une à l’autre (fig 5C).
L’artériographie de contrôle doit s’attacher à vérifier les deux
anastomoses dont l’opacification optimale est obtenue en clampant
alternativement l’origine du pontage distal et l’anastomose poplitée. La
mesure du débit et des résistances revêt, dans ce type de pontage, un
intérêt particulier objectivant et quantifiant l’abaissement des
résistances et l’augmentation du débit avec l’adjonction du pontage
distal.
À distance, la thrombose est la principale complication ; elle peut
intéresser l’ensemble du pontage mais, assez fréquemment, elle épargne
le pontage proximal qui continue d’alimenter le territoire poplité ; la
thrombose du pontage distal est marquée par une chute des pressions
distales, alors que le pouls poplité reste perçu avec des pressions
inchangées à la partie basse de la cuisse. La perméabilité du pontage
proximal réduit l’importance de la récidive ischémique et permet
page 3
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A
a
b
B
C
6 Anastomose intermédiaire d’un pontage mixte prothétique et veineux.
A. Extrémités congruentes : anastomose terminoterminale par triangulation.
B. Extrémités non congruentes : élargissement de la
veine, a : par une angioplastie triangulaire ; b : en utilisant l’origine d’une collatérale.
C. Anastomose spatulée. Une collatérale permet
d’élargir le talon de la veine.
7 Plicature sténosante de la veine compliquant une anastomose avec
une veine de petit calibre.
habituellement d’éviter l’amputation. Dans quelques rares cas, la
thrombose du pontage distal peut être attribuée à un phénomène de flux
compétitifs engendré par une collatéralité insuffisamment déconnectée
entre les différents territoires intéressés par la revascularisation
séquentielle.
De façon occasionnelle, le pontage distal peut rester perméable en dépit
de la thrombose du pontage proximal [51] grâce à la remarquable aptitude
des pontages veineux à rester perméables en dépit d’un débit effondré.
Dans cette situation, un nouveau pontage proximal permet de remettre
en charge le pontage distal et d’en pérenniser la perméabilité.
Résultats
Les perméabilités varient selon les séries de 74 à 86 %, à 1 an et de 62 à
72 % à 4 ans [36].
Pontages mixtes prothétiques et veineux
La réalisation d’un pontage distal est confrontée, dans 20 à 40 % des cas,
à une insuffisance (ou une absence) de matériel veineux. Le pontage
mixte associant matériels veineux et prothétique constitue l’une des
solutions techniques à ce problème. La prothèse en
polytétrafluoroéthylène (PTFE) de 6 mm est implantée proximalement
sur l’AFC ou l’AFS et anastomosée au segment veineux utilisable. Le
niveau de l’anastomose intermédiaire, dicté par la longueur de veine
disponible, doit être situé, de préférence, en amont de l’interligne
articulaire du genou. La tunnellisation est faite entre les jumeaux après
vérification de l’absence de fuite au niveau de l’anastomose
intermédiaire. Après rinçage au sérum hépariné et ligature de l’extrémité
distale de la veine, le pontage est mis sous tension, genou étendu ; on
peut ainsi apprécier, au mieux, le siège de la section veineuse en regard
du site artériel choisi pour l’anastomose, en évitant tout risque de
torsion. L’anastomose distale est ensuite réalisée selon la technique
coutumière.
Le matériel veineux autologue peut provenir de la VGS homo- ou
controlatérale, mais aussi de la VPS ou des veines du membre supérieur.
La veine peut être utilisée inversée s’il n’y a pas de disparité de calibre
notable entre les extrémités proximale et distale ; dans les autres cas,
l’utilisation non inversée est souhaitable, permettant de limiter la
disparité de calibre entre la veine et la prothèse, et de faciliter d’autant la
réalisation de l’anastomose intermédiaire. La destruction valvulaire est
faite, pontage en charge, de façon habituelle à l’aide d’un valvulotome
conventionnel ou du valvulotome de Mills.
page 4
L’anastomose intermédiaire est faite habituellement de façon
terminoterminale (fig 6) :
– les extrémités peuvent être spontanément congruentes : l’anastomose
est faite en terminoterminale au fil 5 ou 6/0, par triangulation en évitant
un surjet sténosant par tension excessive de la suture (fig 6A) ;
– l’anastomose peut être rendue congruente en élargissant le calibre de
la veine par une angioplastie veineuse triangulaire (fig 6Ba)ou en
utilisant une bifurcation veineuse (fig 6Bb);
– l’anastomose peut être spatulée : l’obliquité respective des plans de
coupe étant fonction du calibre des extrémités à anastomoser (fig 6C) ;
l’utilisation du talon d’une collatérale veineuse permet d’élargir la
tranche de section veineuse.
Le risque commun de ces anastomoses est la plicature sténosante de la
veine qui survient plus volontiers si la veine est de petit calibre (fig 7).
Une disparité de calibre importante entre la prothèse et la veine peut
inciter :
– soit à réaliser une anastomose terminolatérale de la saphène sur la
prothèse (fig 8, 9) élargie le cas échéant par le talon d’une collatérale ou
une angioplastie veineuse ; l’anastomose peut utiliser l’artifice de
Linton, surtout si la veine est de petit calibre ; la prothèse est ensuite
sectionnée obliquement au ras de l’anastomose et refermée en surjet ; la
terminalisation de l’anastomose ainsi réalisée réduirait les conséquences
hémodynamiques délétères de l’anastomose latérale ;
– soit mieux encore : à choisir la solution du pontage séquentiel si les
conditions anatomiques le permettent.
Outre les complications analogues à celles des pontages veineux et
prothétiques, les pontages mixtes sont exposés au risque particulier de
faux anévrysme et surtout de sténose de l’anastomose intermédiaire. Le
faux anévrysme peut être dépisté par la surveillance clinique et surtout
échographique et traité simplement par résection-greffe.
La sténose procède habituellement d’une hyperplasie myo-intimale
(HMI) analogue à celle qui se développe au niveau des anastomoses
prothétoartérielles distales. De survenue précoce, la sténose est
diagnostiquée au mieux par échodoppler. L’angioplastie transluminale
est souvent décevante dans le traitement de ces sténoses qui relèvent
d’angioplasties d’élargissement ou d’une résection greffe.
Le pontage mixte doit être préféré au pontage prothétique
fémorojambier même si la brièveté du segment veineux disponible ne
permet pas de reporter l’anastomose intermédiaire en amont de
l’interligne articulaire. L’association du PTFE au matériel veineux
donnait les meilleurs résultats dans l’étude de Feinberg [14].
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8 Anastomose intermédiaire latéroterminale. La veine est implantée dans la prothèse : la section suture de la prothèse au ras de l’anastomose permet de terminaliser
celle-ci.
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niveau fémoropoplité les pontages en PTFE avec ou sans renforcement
externe n’a pas démontré d’avantage significatif en faveur des prothèses
renforcées, notamment au niveau sous-articulaire [19]. L’addition d’une
interface en carbone dans la lumière prothétique a fait l’objet d’une
étude prospective dont les résultats préliminaires ne démontraient pas
d’avantage significatif par rapport aux prothèses en PTFE
conventionnelles [3] ; à plus long terme, les résultats étaient plus
favorables aux prothèses revêtues de carbone, mais la différence
observée n’était pas statistiquement significative (perméabilité
secondaire à 2 ans : 54 % versus 38 %).
L’adjonction d’un traitement à l’antivitamine K au long cours
améliorerait selon Kreschtmer [26] et Flinn [15] la perméabilité à long
terme des pontages prothétiques infrapoplités (37 % à 4 ans pour Flinn
versus 12 % dans l’étude prospective de Veith [47]).
Dacront
9 Une veine de petit calibre peut être anastomosée sur un patch veineux (technique
de Linton).
Les taux actuariels de perméabilité au niveau fémorojambier varient de
30 % à 2 ans [14] à 28 % à 5 ans [15] et sont nettement supérieurs à ceux
obtenus par Londrey [29] avec le seul matériel prothétique sans artifice au
niveau de l’anastomose distale (7 % à 5 ans). Au niveau fémoropoplité
sous-articulaire, l’étude de Hall [20] suggère que le pontage mixte serait
supérieur au pontage en PTFE lorsque le réseau artériel d’aval est de
mauvaise qualité.
Pontages prothétiques
Matériaux
En dépit d’une recherche exhaustive du capital veineux par l’examen
clinique et surtout par échodoppler, il est fréquemment nécessaire de
recourir à des matériels prothétiques dont le plus couramment utilisé est
le PTFE. La veine ombilicale semble fournir les meilleurs taux de
perméabilité mais, à long terme, ce type de matériel expose au risque de
dégradation anévrysmale avec une fréquence inquiétante [25, 42] et son
utilisation est interdite en France, depuis 1995, pour des raisons de nonconformité aux normes sécuritaires en vigueur depuis le décret de loi du
24 mars 1994.
Polytétrafluoroéthylène
Le problème majeur de ce matériau est la forte incidence de thromboses
précoces le plus souvent inexpliquées ; en l’absence de problème
technique, la perméabilité est habituellement restaurée par une simple
thrombectomie qui est plus facile et plus complète que pour un Dacront,
ou une veine. Les thromboses tardives ont comme cause principale la
progression des lésions artérielles distales (40 % dans l’expérience de
Quinonesbaldrich [37]) associées une fois sur deux à une sténose de
l’anastomose distale par HMI [18] ; les prothèses en PTFE semblent en
effet stimuler une réaction d’HMI anastomotique avec une fréquence
plus élevée que les autres matériels prothétiques. La thrombectomie
associée à une angioplastie chirurgicale ou endoluminale de la sténose
anastomotique donne des résultats décevants au niveau infrapoplité, et
certains auteurs jugent préférable de réaliser d’emblée un nouveau
pontage, de préférence veineux [37].
Parmi les améliorations apportées aux prothèses en PTFE, le calibre
progressivement décroissant n’a pas fait jusqu’à présent la preuve de son
efficacité. La paroi mince permet de réaliser l’anastomose sur les artères
de petit calibre dans de meilleures conditions techniques. Le support
externe par addition d’anneaux, destiné à prévenir le risque de plicature
et d’écrasement aux plis de flexion, pourrait altérer la biostabilité de la
prothèse [18] ; en outre, une étude prospective randomisée comparant au
Il n’est plus utilisé que par de rares équipes au niveau sous-inguinal ;
pourtant, rien ne permet de penser que les résultats obtenus avec ce type
de matériel seraient inférieurs à ceux du PTFE, en tout cas au niveau
fémoropoplité. Une étude prospective randomisée comparant PTFE et
Dacront (polyester tricoté imprégné de collagène) au niveau poplité
sus-articulaire a fait état de résultats comparables en termes de
morbimortalité et de perméabilité (perméabilité primaire à 5 ans de 67 %
pour le Dacront versus 57 % pour le PTFE [1].
En dehors de leurs inconvénients spécifiques, les substituts artériels
biologiques ou synthétiques ont en commun un risque infectieux plus
élevé que celui du matériel veineux et dont les conséquences sont
souvent dramatiques. En dehors de rares exceptions, l’infection d’une
prothèse impose habituellement son exérèse et se complique souvent
d’une amputation haute. La préparation du patient et notamment de la
région inguinale revêt, de ce fait, une importance particulière ; la
préparation cutanée doit être débutée plusieurs jours avant l’opération
avec des solutions antiseptiques (Bétadinet), et les éventuels foyers
infectieux distaux soigneusement détergés.
Technique
Un diamètre prothétique de 7 ou 8 mm est adapté à la région
fémoropoplitée, le diamètre de 6 mm voire 5 mm à la région
fémorojambière. La technique d’implantation diffère peu de celle d’une
greffe veineuse : la taille de la prothèse est faite en « palette », en
arrondissant le sommet et le talon pour éviter le risque de sténose au
niveau des angles de l’artériotomie. La tendance anévrysmale de
l’anastomose est prévenue par une taille évitant l’excès de largeur de la
palette. La longueur de la palette doit être égale à environ deux fois le
diamètre de la prothèse, soit un angle de coupe proche de 60°.
L’anastomose proximale est faite en premier ; la suture entre le matériel
rigide et l’artère est facilitée par la technique du surjet suspendu. La
technique d’anastomose doit être rigoureuse, car la rigidité de la
prothèse ne tolère pas les imperfections de la suture, notamment au
niveau des angles ; ainsi, une insuffisance de longueur de la palette par
rapport à l’artériotomie se complique d’une sténose au niveau de l’angle
distal par tension excessive de la suture sur l’artère ; ce problème peut
être prévenu par une section adéquate de la palette et le passage d’un
point provisoire à l’angle distal qui bâtit l’anastomose.
En cas d’emploi du PTFE, l’utilisation d’un fil du même matériau limite
le saignement au niveau des trous d’aiguille et facilite le serrage du surjet
suspendu, du fait des propriétés de glissement de ce fil. La tunnellisation
peut adopter un trajet sous-cutané ou anatomique ; le trajet sous-cutané
externe semble réduire le risque de plicature en flexion avec ses
conséquences délétères sur la perméabilité. La réalisation de
l’anastomose inférieure est analogue à celle d’un pontage veineux. Le
clampage de la prothèse au ras de l’anastomose proximale, pendant la
confection de l’anastomose distale, doit être le plus atraumatique
possible ; les clamps de Fogarty habillés de gaines souples remplissent
cette condition. Le contrôle artériographique est réalisé selon les
modalités habituelles avec mise en place d’un Cathlon 19 G à la partie
supérieure du pontage (ou mieux encore dans l’artère d’amont) et
réalisation de clichés en circulation libre sous amplificateur de brillance
numérisé.
page 5
43-029-I
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Moyens d’améliorer les résultats des pontages
sous-poplités prothétiques
L’échec des pontages prothétiques anastomosés sur des artères de petit
calibre dépend de plusieurs facteurs dont les plus fortement invoqués
sont la forte thrombogénicité de la paroi prothétique, la progression de
l’atteinte artérielle d’aval et surtout le développement d’une sténose par
HMI au niveau de l’anastomose distale.
La thrombogénicité de la paroi prothétique pourrait, au moins en théorie,
bénéficier d’un ensemencement cellulaire. Le recouvrement de la
surface thrombogène du matériel prothétique par une couche de cellules
endothéliales douées de propriétés antithrombotiques est
intellectuellement séduisant, mais peu d’évaluations cliniques des
techniques d’ensemencement cellulaire ont été réalisées à ce jour. La
vulgarisation de ce procédé pose de plus des problèmes techniques
actuellement non résolus.
Les moyens pharmacologiques de prévention de l’HMI se sont avérés
jusqu’à présent de peu d’effet.
Parmi les procédés imaginés pour améliorer la perméabilité des
pontages prothétiques distaux, les plus intéressants sont l’addition d’une
fistule artérioveineuse (FAV) distale et l’interposition de matériel
veineux au niveau de l’anastomose distale.
Interposition de matériel veineux au niveau
de l’anastomose distale
L’interposition d’un patch veineux au niveau de l’anastomose distale a
été proposée par Linton en 1973 [27].
Elle consiste à réaliser un patch veineux au niveau de l’artériotomie et à
anastomoser ensuite le tube prothétique au milieu de ce patch. Ce
procédé facilite la réalisation de l’anastomose, mais il n’a jamais fait la
preuve de son efficacité ; les meilleurs résultats obtenus avec cette
technique sont à l’actif de Batson [5] avec 65 % de perméabilité à 3 ans
pour 68 pontages prothétiques effectués pour sauvetage de membre.
En 1986, Buth [7] proposait un autre type d’interposition veineuse entre
veine ombilicale et artère de jambe pour éviter la protrusion des berges
suturées de la veine ombilicale dans la lumière artérielle. À l’aide d’un
court segment veineux de 2 ou 3 cm, l’auteur réalisait l’équivalent d’une
anastomose conventionnelle puis refendait longitudinalement le tube
veineux à sa face antérieure et anastomosait la veine ombilicale sur la
palette veineuse ainsi obtenue.
Patch de Taylor (fig 10) [45] : la technique décrite par Taylor consiste à
insérer un large patch veineux à cheval sur l’artériotomie et la prothèse ;
l’artériotomie distale est faite sur 2,5 à 3 cm et le greffon prothétique est
anastomosé sur le premier centimètre ; la face supérieure du greffon est
ensuite incisée sur 2 cm dans l’axe de l’artériotomie et un large patch
veineux est inséré à cheval sur l’artériotomie et la prothèse. La longueur
du patch ainsi réalisé est d’environ 5 cm. L’auteur propose d’effectuer
également un patch de 3 cm sur l’anastomose proximale.
À propos d’une série rétrospective de 83 pontages fémorotibiaux
prothétiques (PTFE), dont l’anastomose distale était réalisée selon sa
technique originale, Taylor [45] fait état d’une perméabilité actuarielle de
54 % à 5 ans, très nettement supérieure aux chiffres publiés dans la
littérature avec ce type de matériel. Cette technique est en cours
d’évaluation dans une étude prospective randomisée aux États-Unis,
comparant les pontages prothétiques sous-inguinaux avec et sans patch
de Taylor.
En 1979, Siegman [41] préconisait l’emploi d’une collerette veineuse en
tout point similaire à la description qu’en fit Miller en 1984 pour les
anastomoses entre artère et matériel prothétique [31]. Ce procédé (fig 11)
consiste à interposer entre la prothèse et l’artère une collerette veineuse
(ou cuff) suturée aux berges de l’artériotomie. Un court segment veineux
de trois ou quatre fois la longueur de l’artériotomie est incisé
longitudinalement, puis suturé à l’artériotomie distale par un surjet de
fil Monobrin 7/0. Les extrémités de la collerette ainsi réalisée sont
suturées l’une à l’autre. Après recoupe oblique, la prothèse est ensuite
anastomosée sur la collerette par un surjet de fil Monobrin 6/0.
Au plan technique, ce procédé facilite la réalisation de l’anastomose,
permettant notamment un placement précis des points au niveau des
extrémités de l’artériotomie. Selon Miller, cette technique aurait
également l’intérêt de réaliser une chambre de compliance intermédiaire
entre prothèse et artère, susceptible de réduire l’HMI.
L’expérience clinique initiale de l’auteur portait sur 29 pontages
fémorojambiers dont 21 étaient perméables avec un suivi moyen de
page 6
10 Patch de Taylor. Le patch veineux est inséré à cheval sur la prothèse et
l’artériotomie.
A
B
11
Procédé de Miller.
A. La veine incisée longitudinalement est anastomosée aux berges de l’artériotomie et ses deux extrémités suturées l’une à l’autre.
B. La prothèse recoupée en « palette » est anastomosée sur l’anneau veineux.
8 mois [31]. Avec cette technique, Wolfe et Tyrrel [50] ont rapporté une
série de 55 pontages prothétiques longs (> à 70 cm) en PTFE sur les
artères de jambe avec une perméabilité actuarielle de 52 % à 3 ans.
Sous le nom de Saint-Mary’s-Boot, Tyrrel et Wolfe [46] ont proposé en
1991 une modification de la cuff de Miller où l’extrémité de la collerette
est suturée à la partie distale de l’artériotomie (fig 12) ; le reste de la
suture est réalisé selon la technique originale ; la partie redondante de la
collerette est partiellement réséquée. Les auteurs espèrent que
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13 Fistule artérioveineuse au niveau de l’anastomose distale. Un surjet d’adossement est fait entre l’artère et la phlébotomie et la prothèse anastomosée sur l’ostium
commun ainsi créé.
2 ans) ; ce résultat n’a toutefois pas été confirmé par une étude
prospective randomisée belge ou les perméabilités des pontages avec et
sans cuff étaient à peu près comparables [33].
Au niveau infrapoplité, le taux de perméabilité à 4 ans des pontages sans
cuff est de 21 % dans la méta-analyse de Dalman [10] et de 12 % dans
l’étude prospective de Veith [47]. Si la plupart des études rétrospectives
concluent à une supériorité des pontages avec cuff, il faut noter toutefois
que la seule étude comparative randomisée réalisée à ce niveau n’a pas
objectivé de différence statistiquement significative entre les deux types
de pontage (37 % versus 53 % à 2 ans pour les pontages avec et sans
cuff) [33].
12
Augmentation du débit par adjonction d’une fistule
artérioveineuse distale
Saint-Mary’s-boot : collerette de Miller modifiée par Tyrrel et Wolfe.
l’amélioration du profil de la cuff se traduise par un gain
hémodynamique avec une réduction des turbulences.
Une nouvelle modification a été proposée en 1995 par Karacagil [24] où
la collerette veineuse fait l’objet d’une coupe en forme de V, dont la
pointe est suturée au talon de la prothèse ; cette technique améliorerait
encore, selon l’auteur, le profil hémodynamique de la cuff ; 21 pontages
sous-inguinaux ont été réalisés avec cette technique (dont 10 sur artères
de jambe) avaient une perméabilité actuarielle de 69 % à 1 an.
L’adjonction d’une FAV au niveau de l’anastomose distale a pour effet
d’abaisser les résistances périphériques et, par voie de conséquence,
d’augmenter le débit et la vitesse du flux sanguin dans le pontage. La
vitesse circulatoire est ainsi augmentée bien au-delà du seuil critique de
vélocité au-dessous duquel un pontage prothétique a toute chance de se
thromboser [35] ; l’augmentation du débit réduirait l’incidence de l’HMI
au niveau de l’anastomose distale. La fistule est réalisée entre l’artère
revascularisée et une veine adjacente, soit au niveau de l’anastomose
distale selon la technique décrite par Dardik [11], soit en amont ou en aval
de celle-ci.
Résultats
Au niveau de l’anastomose distale
Au niveau poplité sus-articulaire, les taux de perméabilité primaire des
pontages prothétiques sont respectivement de 67 % à 5 ans pour le
Dacront et de 57 % pour le PTFE dans l’étude prospective randomisée
d’Abbott et al [1]. Dans la méta-analyse de Michaels [30], les perméabilités
secondaires des pontages en PTFE sont proches de 45 % à 5 ans.
Au niveau poplité sous-articulaire, les taux de perméabilité des pontages
prothétiques (PTFE) réalisés sans artifice au niveau de l’anastomose
distale varient de 22 % [13] à 54 % à 4 ans [47]. Dans l’étude prospective
randomisée réalisée au Royaume-Uni [44] comparant les pontages
prothétiques avec et sans cuff, il existait une différence statistiquement
significative en faveur des pontages avec cuff (52 % versus 29 % à
C’est la technique la plus utilisée ; l’usage de la bande d’Esmarch
permet de limiter au minimum la dissection de l’artère et de la veine
adjacente. La longueur de la phlébotomie faite en regard de
l’artériotomie est controversée : la plupart des auteurs lui donnent la
même longueur que l’artériotomie, d’autres préconisent de réduire sa
longueur au tiers de celle de l’artériotomie (fig 13) pour éviter un
hyperdébit générateur de vol vasculaire.
Sous agrandissement optique, un surjet d’adossement entre la
phlébotomie et la partie adjacente de l’artériotomie est réalisé au fil 7/0.
Le pontage est ensuite anastomosé sur l’ostium commun créé par
l’adossement de la veine et de l’artère
page 7
43-029-I
PONTAGES SÉQUENTIELS, MIXTES ET PROTHÉTIQUES. PONTAGES AVEC MATÉRIEL VEINEUX
Techniques chirurgicales
AUTOLOGUE AUTRE QUE LA VEINE GRANDE SAPHÈNE. PONTAGES AVEC ALLOGREFFES VASCULAIRES
En amont
La fistule est faite 2 ou 3 cm en amont du site de l’anastomose distale au
niveau d’une zone artérielle souple préalablement repérée [32]. Pour
éviter d’être gêné par le pontage, il vaut mieux réaliser la fistule
d’emblée, avant l’anastomose distale. Sous bande d’Esmarch, l’artère
et la veine sont incisées en regard sur une longueur équivalente. La
longueur idéale à donner à la fistule selon les études expérimentales est
de 5 mm [35] ; une fistule de ce calibre, non seulement augmente le débit
dans le pontage et l’artère réceptrice, mais préserve également la
perfusion distale. Une fistule de calibre supérieur expose au risque
d’hémodétournement. L’anastomose latérolatérale est faite au fil
Monobrin 6 ou 7/0 sous agrandissement optique en démarrant le surjet
au niveau d’un angle ou au milieu des berges postérieures ; la réalisation
de l’anastomose peut être facilitée par l’introduction d’une sonde tutrice
dans l’artère à partir de l’artériotomie sous-jacente, destinée à recevoir
le pontage.
En aval
Après réalisation de l’anastomose distale, la FAV est faite sur l’artère
réceptrice, selon la technique décrite (cf supra), à une distance qui peut
varier de 5 à 15 cm ; certains auteurs proposent même de reporter la FAV
au niveau de la cheville par une voie d’abord séparée [35].
Chaque site a ses avantages et ses inconvénients propres : la technique
la plus répandue consiste à effectuer la fistule au niveau de l’anastomose
distale ; cette solution a l’avantage d’une relative simplicité et préserve
l’intégrité de l’artère réceptrice en amont et en aval ; cependant, la
présence de la fistule au niveau de l’anastomose est un facteur de
turbulences et donc potentiellement d’HMI [32, 33, 34, 35] ; en outre, le risque
d’hémodétournement par la fistule aux dépens du réseau artériel distal
semble plus important que lorsque la fistule est située à distance de
l’anastomose.
La situation de la fistule en amont et surtout en aval de l’anastomose
aurait plusieurs avantages :
– elle évite les flux turbulents au niveau de l’anastomose distale [35] ;
– elle augmente le flux dans l’artère réceptrice ;
– le segment artériel compris entre l’anastomose et la fistule
constituerait un frein susceptible de réduire le débit dans la fistule et
donc le risque d’hémodétournement [32] ;
Association d’une « cuff » et d’une FAV
Elle a été proposée par Harris [21] ; les flux turbulents engendrés par la
fistule au niveau de l’anastomose distale stimuleraient, à moyen terme,
l’apparition d’une HMI que l’adjonction d’une collerette veineuse
pourrait prévenir. Dans une étude personnelle, l’auteur a comparé des
pontages prothétiques infrapoplités réalisés selon cette technique à des
pontages avec FAV isolée et à une série contemporaine de pontages
veineux infrapoplités ; les taux de perméabilité à 2 ans étaient
respectivement de 62 %, 28 % et 68 % (différence statistiquement
significative entre groupes I et II : p < 0,01) [21].
La technique proposée par Ascer [2] s’inspire du même principe ; l’auteur
interpose entre la prothèse et l’artère réceptrice une veine profonde
jouant le rôle de la cuff. Une veine satellite de l’artère est sectionnée
après ligature d’amont et anastomosée sur l’artériotomie (fig 14) ; la
prothèse est ensuite anastomosée sur cette veine. À propos de
68 pontages prothétiques infrapoplités réalisés avec cette technique,
Ascer fait état d’un taux de perméabilité primaire assistée de 62 % à
3 ans.
Pontages avec matériel veineux autologue
autre que la veine grande saphène
Les résultats médiocres des pontages prothétiques infragéniculés
justifient d’effectuer une exploration préalable complète du capital
veineux autologue disponible en l’absence de VGS homolatérale. Dans
cette circonstance, la VGS controlatérale reste pour la plupart des
équipes le matériel de pontage utilisé de première intention sauf en cas
d’ischémie critique pouvant faire l’objet d’une revascularisation à plus
ou moins brève échéance.
Les veines des membres supérieurs et les VPS constituent une réserve
de matériel veineux autologue peu utilisée et souvent disponible. Le
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Procédé d’Ascer.
capital veineux comprend également les veines profondes fémorales
superficielles et poplitées dont l’utilisation reste à ce jour anecdotique.
Veines du membre supérieur
Elles offrent un capital veineux souvent utilisable. En 1969, Kakkar
montrait que la veine céphalique était de longueur suffisante pour aller
de l’artère fémorale commune à l’artère poplitée basse et pouvait résister
à des pressions de 400 mmHg. D’excellents résultats ont été obtenus
avec ce matériel [4]. La veine céphalique peut être prélevée en continuité,
du sillon deltopectoral à la tabatière anatomique par une incision
continue ; la longueur de veine ainsi obtenue permet de réaliser un
pontage fémorojambier. Le diamètre du conduit après implantation est
d’environ 5 à 7 mm, de 1 à 2 mm supérieur à celui de la VGS ; le calibre
presque uniforme d’une extrémité à l’autre justifie l’utilisation en
position inversée. On peut également utiliser la veine basilique ou
encore son segment brachial en continuité avec la veine céphalique
antibrachiale (fig 15) ; ces deux combinaisons fournissent une longueur
suffisante pour réaliser un pontage fémoropoplité. Lorsque les veines de
l’avant-bras sont inutilisables, on peut prélever d’un seul tenant, comme
l’a montré Logerfo [28], la veine basilique, la veine intermédiaire du
coude et la veine céphalique (fig 16) ; ces deux veines sont plus larges
que les veines de l’avant-bras et offrent, bout à bout, une longueur
suffisante pour effectuer un pontage infragéniculé. Le prélèvement d’un
seul tenant n’est possible que si la veine intermédiaire du coude est
perméable : cela peut être habituellement déterminé par l’examen
clinique aidé d’un garrot. Cependant, l’échodoppler est le plus souvent
nécessaire pour compléter les données de l’examen clinique ; il précise
le siège des collatérales et d’éventuelles lésions pariétales engendrées
par des ponctions antérieures ; le diamètre proximal et distal de la veine
est déterminé au mieux sous garrot, et l’examen est terminé par un
marquage de la veine et de ses collatérales qui facilite le temps de
prélèvement. Dès que l’utilisation des veines d’un membre supérieur est
envisagée, il faut interdire toute perfusion ou ponction veineuse.
Lorsque le calibre du réseau veineux de l’avant-bras déterminé au mieux
par échodoppler et sous garrot apparaît « limite » pour le pontage
(proche de 2,5 mm), certains ont proposé d’effectuer une artérialisation
temporaire du réseau de l’avant-bras afin d’en augmenter le calibre
[6, 39] ; une FAV peut être ainsi réalisée au poignet entre la veine
céphalique et l’artère radiale par une anastomose latérale. D’autres sites
anastomotiques sont possibles en fonction de l’anatomie du réseau
veineux (anastomose entre la veine basilique au poignet et l’artère
cubitale, anastomose latérale au pli du coude entre veine intermédiaire
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du membre supérieur effectué par des incisions continues doit être très
minutieux ; les collatérales doivent être squelettisées avant ligature pour
éviter des brides rétractiles. Une fois la veine exposée, une infiltration
périveineuse est faite avec du sérum hépariné additionné de papavérine
pour prévenir le spasme. En dépit de ces précautions, le spasme
complique habituellement le prélèvement ; il peut être levé en injectant
par le bout périphérique de la veine du sérum ou du sang hépariné ; le
risque d’hyperpression est évité si l’on prend soin, lors de l’injection, de
ne pas clamper l’extrémité distale de la veine.
Si les veines basilique et céphalique ont été prélevées en continuité, la
veine basilique, du fait de son calibre plus important, est utilisée non
inversée et la veine céphalique inversée ; les congruences
anastomotiques sont ainsi plus favorables, notamment entre la partie
distale de la céphalique et une artère poplitée basse ou jambière. Après
réalisation de l’anastomose supérieure, la destruction des jeux
valvulaires de la veine basilique utilisée non inversée est faite à l’aide
d’un valvulotome conventionnel ou d’un valvulotome de Mills introduit
par le moignon de veine céphalique antibrachiale gardé dans ce but.
Après vérification du flux obtenu, le moignon de veine céphalique est
refermé et l’anastomose distale peut être réalisée.
15 Diverses possibilités d’utilisation des veines du membre supérieur. AEB : veine céphalique ; CD : veine basilique ; AEC : veine céphalique, veine intermédiaire du coude, veine
basilique.
et artère humérale...). Un délai de 10 à 15 jours et quelques séances de
garrottage seraient suffisants pour obtenir une dilatation significative du
réseau veineux.
Technique
L’anesthésie générale est impérative ; la réalisation simultanée du temps
de prélèvement et des voies d’abord par deux équipes permet de réduire
la durée opératoire. En raison de leur finesse, le prélèvement des veines
L’implantation doit être faite de préférence en sous-cutané pour faciliter
la surveillance ultérieure, car les veines du membre supérieur présentent,
à distance, une certaine tendance à la dilatation, justifiant une
surveillance clinique et échographique suivie. Le trajet sous-cutané
permet en outre une autosurveillance par le patient et une plus grande
accessibilité pour le traitement endoluminal ou chirurgical des
complications.
Résultats
Les taux de perméabilité actuarielle des revascularisations sousinguinales effectuées avec les veines des membres supérieurs sont très
discordants, variant de 43 à 85 % à 1 an en fonction des séries [43]. Les
taux très différents de malades diabétiques d’une série à l’autre (27 à
80 %) expliqueraient selon Stonebridge la dispersion des résultats [43]. À
propos de 102 pontages sous-inguinaux (dont 52 % étaient
1
3
2
2
3
3
2
4
16 Utilisation des veines basilique et céphalique en continuité pour réaliser un pontage infrapoplité (Logerfo avec
autorisation de l’auteur). 1. Veine axillaire ; 2. veine céphalique ; 3. veine basilique ; 4. artère tibiale postérieure ;
5. artère fémorale.
5
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infrapoplités) réalisés avec des veines des membres supérieurs non
compilées, Harris [22] obtenait 82 % de perméabilité à 1 an et 60 % à
5 ans.
La série de Balshi [4] portait sur 36 pontages dont 58 % étaient
infrapoplités ; les pontages réalisés avec des veines du membre
supérieur d’un seul tenant avaient des perméabilités primaire et
secondaire de 73 et 82 % à 1 an. Les pontages compilés résultant de
segments anastomosés de veines des membres supérieurs avaient des
perméabilités primaire et secondaire de 53 et 66 % à 1 an. Dans la même
série, les pontages infrapoplités avaient une perméabilité secondaire à
1 an de 79 %. Une réduction statistiquement significative des
thromboses postopératoires était obtenue grâce au contrôle
angioscopique peropératoire dans la série de Stonebridge [43].
L’expérience de Gentile et al [16] portait sur 187 pontages réalisés au
niveau fémoropoplité (54 cas) et jambier (133 cas) avec du matériel
veineux autre que la VGS. Les veines des membres supérieurs étaient
utilisées dans 144 pontages (77 %) de façon exclusive dans 97 cas ou
partielle dans 47 cas ; la VPS était utilisée dans 11 cas et la veine
fémorale superficielle dans cinq cas. Sur 114 pontages qui résultaient de
la compilation de plusieurs segments veineux d’origines diverses, il y
avait une anastomose intermédiaire dans 87 cas (76 %) et deux
anastomoses ou plus dans 27 cas.
Les taux de perméabilité primaire assistée étaient de 63 % à 5 ans pour
les pontages fémoropoplités et de 72 % pour les pontages
fémorojambiers. Ces résultats étaient comparables à ceux obtenus par
l’auteur avec la VGS comme matériel de pontage.
L’expérience la plus importante en matière d’utilisation des veines des
membres supérieurs est celle d’Hölzenbein [23] ; en l’absence de VGS
homolatérale, l’auteur choisit de première intention les veines des
membres supérieurs comme matériel de pontage. La sélection des veines
était aidée par l’utilisation routinière de l’angioscopie qui a permis de
guider des gestes de correction dans 52 % des cas pour améliorer la
qualité du conduit. Sur 199 pontages réalisés d’un seul tenant et 51 avec
des veines compilées, il y avait 114 pontages fémorotibiaux, 41
fémoropoplités et 33 poplitédistaux. La veine céphalique était utilisée
dans 86 % des pontages et constituait l’unique matériel de pontage dans
50 % des cas. Les veines basilique et céphalique utilisées en continuité
selon la technique de Logerfo représentaient 35,6 % des pontages. La
perméabilité primaire assistée à 1 an de l’ensemble des pontages était de
70,6 %, et la perméabilité secondaire de 77 %. À 3 ans, le taux de
perméabilité primaire était de 52 % pour les pontages effectués de
première intention, de 42 % pour les pontages itératifs et de 57 % pour
les pontages ayant fait l’objet d’une réparation avec les veines des
membres supérieurs.
D’autres auteurs ont fait état de résultats plus modestes ; pour Calligaro
et al [8], les taux de perméabilité primaire assistée et secondaire étaient
respectivement de 46 et 55 % à 2 ans. Dans cette série, les meilleurs
résultats étaient à l’actif des pontages effectués avec un matériel veineux
d’un seul tenant (perméabilité primaire assistée à 2 ans de 55 % et
secondaire de 64 %).
Dans l’expérience de Sesto et al [39], 34 pontages dont 25 infragéniculés,
les taux de perméabilités primaire et secondaire étaient respectivement
de 40 et 46 % à 3 ans.
Veine petite saphène
Longtemps ignorée en raison des problèmes posés par son prélèvement,
la VPS représente une autre alternative intéressante en l’absence de
VGS. D’après Weaver [49], les VPS seraient utilisables dans 85 %, des
cas pour un pontage. Dans l’expérience d’Ouriel [34], la VPS était
utilisable chez 72 % des patients relevant d’une revascularisation souspoplitée. L’appréciation clinique de la VPS étant souvent difficile, il peut
être nécessaire de demander un échodoppler pour connaître l’anatomie
de la veine, ses tailles proximale et distale, le siège de ses principales
collatérales et son mode de terminaison dans la veine poplitée.
Technique
Le prélèvement est réalisé, malade en décubitus ventral, par une incision
continue centrée par le repérage échographique. Les deux VPS
compilées permettent d’effectuer un pontage fémorojambier.
Dans les indications de pontage entre l’artère poplitée basse et une artère
à la cheville, la VPS peut être utilisée in situ selon la technique décrite
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par Shandall [40]. Le malade étant en décubitus dorsal, l’artère poplitée
est abordée par une incision rétrotibiale conventionnelle agrandie
largement vers le bas pour permettre d’aborder par un décollement sousaponévrotique la partie terminale de la VPS ; après section de sa partie
distale, la veine est mobilisée suffisamment pour l’amener au contact de
l’artère poplitée. Les collatérales repérées lors de la dissection sont liées.
La partie basse de la veine est abordée séparément et peut être
anastomosée, soit à l’artère tibiale postérieure au prix d’un court tunnel
sous-cutané, soit à l’artère tibiale antérieure après création d’un tunnel à
travers le muscle et la membrane interosseuse. Après réalisation de
l’anastomose proximale, la destruction valvulaire peut être faite sous
contrôle angioscopique avec le valvulotome de Mills, ou de façon
habituelle à l’aide d’un valvulotome conventionnel.
Une variante de cette technique d’utilisation in situ de la VPS consiste à
effectuer tout ou partie du pontage en décubitus ventral. La crosse de la
saphène est disséquée par une incision en « baïonnette » dans le creux
poplité ou par une incision transversale large, en regard ou un peu audessus du pli du genou, en fonction des données du repérage
échographique préopératoire. La saphène sectionnée au ras de la veine
poplitée peut être aisément anastomosée sur l’artère poplitée adjacente.
La destruction valvulaire est effectuée après section de la saphène à la
cheville. Le pontage peut être ensuite anastomosé :
– sur l’artère tibiale postérieure, soit dans sa partie supérieure par une
incision para-achilléenne interne, soit plus distalement dans sa partie
rétro- et même sous-malléolaire jusqu’à sa bifurcation, la cheville et le
dos du pied étant appuyés sur un billot et le pied maintenu en valgus ;
– sur l’artère fibulaire dont l’abord de la partie distale est aisé par voie
postérieure [48] jusqu’à sa bifurcation, l’anastomose pouvant même être
faite distalement sur la branche de division postéro-interne lorsque
celle-çi est hypertrophiée et reprend en charge l’arche malléolaire ;
– soit enfin sur l’artère tibiale antérieure basse ou l’artère pédieuse,
après fermeture des voies d’abord et réinstallation du malade en
décubitus dorsal, le pontage étant tunnellisé soit en sous-cutané en avant
de la malléole interne, soit à travers la membrane interosseuse.
Résultats
Dans l’expérience de Weaver [49], la VPS a été utilisée dans 29 cas
isolément pour réaliser une revascularisation de la poplitée sousarticulaire dans quatre cas et des artères de jambe dans 25 cas avec un
taux actuariel de perméabilité de 60 %, à 3 ans. Dans 14 cas, la VPS a
été utilisée en association avec du matériel autologue avec un taux de
perméabilité de 47 % à 1 an et 38 % à 18 mois.
Ouriel [34] a effectué une revascularisation poplitée jambière par voie
postérieure à l’aide de la VPS chez 21 patients ; 81 % des patients étaient
diabétiques ; l’anastomose supérieure du pontage était située sur l’artère
poplitée sus-articulaire dans quatre cas et sous-articulaire dans 17 cas ;
l’anastomose distale était faite sur le tronc tibiofibulaire dans six cas,
l’artère fibulaire dans neuf cas, l’artère tibiale postérieure dans quatre
cas et l’artère tibiale antérieure dans deux cas. Le taux de perméabilité
primaire était de 83 % à 18 mois.
Pour Calligaro [8], les résultats des pontages infrapoplités réalisés avec
des VPS étaient décevants avec des taux de perméabilité primaire
assistée de 23,5 % à 2 ans, comparables aux résultats des pontages
infrapoplités en PTFE (26 %).
Les résultats obtenus par les revascularisations utilisant les VPS
compilées ou non sont donc discordants. Ce matériel semble
particulièrement adapté aux revascularisations poplitées distales
effectuées par voie postérieure avec la VPS utilisée in situ ou inversée.
Veines fémorales superficielles et poplitées
L’utilisation de la veine fémorale superficielle pour les pontages sousinguinaux a été proposée par Schulman [38] ; les veines fémorales
superficielles et poplitées sont prélevées par une incision unique ou deux
incisions ménageant un pont cutané. L’hémostase des collatérales est
assurée par des clips. Les veines fémorales, commune et profonde, sont
préservées pour assurer le drainage veineux du membre inférieur. Le
prélèvement nécessite la section de l’anneau du troisième adducteur et,
le cas échéant, celle des muscles et tendons internes du genou. Étant
donné que la confluence des veines fémorales superficielle et commune
est située 8 cm plus bas que la bifurcation artérielle, la perte de longueur
impose souvent de réaliser des pontages courts, naissant de l’artère
Techniques chirurgicales
PONTAGES SÉQUENTIELS, MIXTES ET PROTHÉTIQUES. PONTAGES AVEC MATÉRIEL VEINEUX
AUTOLOGUE AUTRE QUE LA VEINE GRANDE SAPHÈNE. PONTAGES AVEC ALLOGREFFES VASCULAIRES
fémorale superficielle ou de l’artère fémorale profonde. La destruction
valvulaire est faite selon la technique coutumière. La greffe est utilisée
non inversée et tunnellisée en position profonde. Les anastomoses sont
faites sur une longueur d’au moins 3 cm, assurant une réduction
progressive du calibre de la greffe, dans le but d’améliorer les conditions
hémodynamiques et, par là même, de diminuer l’incidence de l’HMI.
Les veines d’un calibre supérieur à 12 mm, responsables dans
l’expérience de Schulman d’un taux d’échec important, doivent être
écartées ; aucun trouble trophique de type postphlébitique n’a été
observé par l’auteur et l’œdème postopératoire se résorbe
progressivement en quelques mois. Les résultats obtenus par Schulman
au niveau fémoropoplité égalent ceux d’une série comparative de
pontages effectués avec la veine saphène inversée et sont équivalents à
ceux des meilleures séries de pontages veineux saphéniens
(perméabilités primaire et secondaire à 3 ans de 82 et 89 %) [38] .
Toutefois, aucune série n’a, jusqu’à présent, confirmé dans la littérature
ces résultats.
Veines compilées
En cas d’insuffisance de longueur du segment veineux principal, ces
divers matériels veineux peuvent être suturés entre eux, selon de
multiples combinaisons, pour réaliser un pontage sous-poplité. Un soin
particulier doit être apporté à la réalisation des anastomoses
veinoveineuses, dont certains auteurs soulignent l’effet délétère sur la
perméabilité tardive imposant une surveillance renforcée par
échodoppler. Les anastomoses sont réalisées en terminoterminal, en
s’aidant le cas échéant d’un tuteur ; sur les veines de petit calibre, des
refends opposés permettent d’avoir une anastomose oblique longue.
Une trop grande disparité de calibre peut inciter à réaliser une
anastomose latérale. L’anastomose est faite sous magnification optique
au fil fin (6 ou 7/0) par deux hémisurjets. En cas d’anastomose sur des
veines de petit calibre (inférieur ou égal à 4 mm) des points séparés
peuvent être faits sur une hémicirconférence.
Dans l’étude de Harris [22], 41 pontages compilés veineux réalisés avec
du matériel veineux autologue provenant des membres supérieurs et
inférieurs ont été anastomosés dans 80 % des cas en infrapoplité avec
un taux de perméabilité actuarielle de 73 % à 1 an.
L’expérience de Chang [9] portait sur 184 pontages réalisés avec des
veines compilées d’origine diverse (membre supérieur : 11 %, VPS :
28 %, VGS homo- ou controlatérale : 61 %) ; 84 % des pontages étaient
infrapoplités ; les perméabilités primaires et secondaires de l’ensemble
des pontages étaient de 45 % et 61 % à 4 ans. Ces taux de perméabilité
étaient nettement inférieurs à ceux obtenus par l’auteur avec les
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pontages in situ d’un seul tenant. Belkin a souligné l’importance de la
surveillance par échodoppler, 29 % des pontages de ce type faisant
l’objet dans son expérience de révisions (chirurgicales ou
endoluminales) pour des sténoses sur les sites d’anastomoses
veinoveineuses.
Pontages avec allogreffes vasculaires
Les résultats médiocres des matériaux prothétiques de petit calibre ont
relancé l’intérêt des allogreffes vasculaires. Plusieurs travaux ont
souligné de plus l’excellent comportement des allogreffes artérielles en
milieu infecté. La conservation en milieu nutritif à 4 °C et la
cryoconservation sont les méthodes de conservation les plus employées.
La conservation en milieu nutritif à 4 °C fournit des greffons riches en
cellules et vivants, donc doués d’une faible thrombogénicité et résistants
à l’infection, mais dont le délai d’utilisation est limité à 45 jours. La
cryoconservation bénéficie actuellement de l’utilisation d’un
cryoprotecteur, le diméthylsulfoxyde (DMSO) et d’une congélation par
descente progressive en température. La cryoconservation diminuerait
l’antigénicité du greffon et conserverait un endothélium fonctionnel. Les
dégradations pariétales des allogreffes procèdent en grande partie de
l’agression immunologique de la paroi artérielle. La recherche d’une
identité ABO, voire d’un cross-match négatif semble de peu d’effet. La
décellularisation du greffon avant son implantation, en éliminant les
massifs protéiques antigéniques, supprimerait l’immunogénicité du
greffon mais sensibiliserait ce dernier à l’infection. En pratique, la
conservation en milieu nutritif préservant la richesse cellulaire de
l’allogreffe est particulièrement adaptée au traitement des sepsis de
prothèse. La décellularisation respectant la matrice extracellulaire non
thrombogène et supprimant l’antigénicité créerait les conditions
favorables à une perméabilité durable.
À de rares exceptions près, les résultats des revascularisations
infragéniculées réalisées avec des allogreffes veineuses sont décevants.
À l’inverse, les allogreffes artérielles laissent entrevoir des perpectives
prometteuses. En 1993, à propos de 94 allogreffes artérielles
infragéniculées réalisées par trois équipes françaises pour sauvetage de
membre (dont 64 pontages sur artères de jambe), les taux de
perméabilité actuarielles secondaires étaient de 65 % à 18 mois
(résultats non publiés).
En 1995, Gournier [ 1 7 ] rapportait une série de 52 pontages
infragéniculés ; il s’agissait d’une troisième revascularisation dans 77 %
des cas : 30 pontages sur 52 étaient infrapoplités ; les perméabilités
primaires et secondaires étaient respectivement de 43 et 65 % à 2 ans.
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Encyclopédie Médico-Chirurgicale 43-029-N
43-029-N
Chirurgie des artères du membre supérieur
(anévrismes et ischémie aiguë exclus)
J Cron
JP Becquemin
Résumé. – La chirurgie des artères du membre supérieur représente moins de 3 % de l’ensemble des
restaurations artérielles périphériques. Les procédés de revascularisation varient selon la localisation et
l’extension des lésions. À l’étage axillaire, les pontages carotido- et sous-clavier-huméraux, utilisant une veine
saphène ou un greffon prothétique, peuvent suivre un trajet anatomique ou extra-anatomique. Au niveau du
bras et de l’avant-bras, les veines in situ peuvent être utilisées avec de bons résultats. Les revascularisations
distales bénéficient des techniques dérivées de la microchirurgie. En l’absence de possibilité de
revascularisation, la sympathectomie thoracoscopique peut améliorer les symptômes au prix d’une morbidité
opératoire faible. Les techniques endovasculaires ont peu de place au membre supérieur ; elles concernent
surtout les lésions axillaires.
© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : ischémie chronique, membre supérieur, artère axillaire, artère humérale, artère radiale, artère
cubitale, pontage in situ, veine céphalique, veine basilique.
Introduction
La chirurgie des artères du membre supérieur représente moins de
3 % de l’ensemble des restaurations artérielles périphériques. Elle
intéresse les artères axillaire, humérale, les artères de l’avant-bras,
du poignet et de la main. Le chirurgien est rarement confronté aux
lésions concernant ces artères, mais une bonne connaissance de
l’anatomie et des différentes possibilités chirurgicales peut lui
permettre d’éviter les erreurs techniques et les échecs. Les procédés
de revascularisation varient selon la localisation et l’extension des
lésions. Nous ne détaillons pas dans ce travail les revascularisations
pour ischémie aiguë et traumatisme décrites ailleurs. À l’étage
axillaire, les pontages carotido- et sous-clavier-huméraux, utilisant
une veine saphène ou un greffon prothétique, peuvent suivre un
trajet anatomique ou extra-anatomique. Au niveau du bras et de
l’avant-bras les veines in situ peuvent être utilisées avec de bons
résultats. Les revascularisations distales bénéficient des techniques
dérivées de la microchirurgie. En l’absence de possibilité de
revascularisation, la sympathectomie thoracoscopique peut
améliorer les symptômes au prix d’une morbidité opératoire faible.
L’efficacité des fistules artérioveineuses au membre supérieur dans
le cadre d’un sauvetage de membre reste à déterminer. Les
techniques endovasculaires ont peu de place au membre supérieur ;
elles concernent surtout les lésions axillaires.
Nous exposons dans ce travail, pour chaque localisation, les voies
d’abord, les pathologies le plus fréquemment rencontrées et les
différentes techniques utilisables.
Chirurgie de l’artère axillaire
VOIE D’ABORD
L’artère axillaire est abordée le plus facilement dans le sillon
deltopectoral (fig 1A). L’incision débute à la pointe de l’apophyse
coracoïde aisément palpable sous la peau et s’achève 1 ou 2 cm audessus du bord libre du grand pectoral. Après avoir récliné la veine
céphalique en dehors, la dissection est effectuée dans l’interstice
avasculaire séparant les fibres musculaires verticales du deltoïde et
horizontales du grand pectoral. Le petit pectoral est sectionné au
bistouri électrique dans la portion musculotendineuse voisine de
l’insertion coracoïdienne. Le plan vasculonerveux apparaît alors au
sein d’un tissu adipeux dense (fig 1B). L’artère axillaire est masquée
par le tronc antéroexterne et les racines du médian. Elle est passée
sur un lac dont la traction douce facilite la dissection. Vers le haut,
on rencontre rapidement l’artère thoracique sous-croisée par l’anse
des pectoraux et la mammaire externe qui peuvent être conservées
ou liées selon la longueur d’artère nécessaire à l’artériotomie.
L’abord peut être étendu en haut avec une incision sus- ou sousclaviculaire. L’incision sous-claviculaire permet d’aborder l’artère
sous-clavière distale. L’incision sus-claviculaire permet l’exposition
de l’artère sous-clavière (fig 2, 3). L’artère carotide primitive est
exposée après section du sterno-cléido-mastoïdien.
L’abord peut être étendu en bas par une incision séparée brachiale
interne pour l’exposition de l’artère humérale.
PATHOLOGIE
Jérôme Cron : Chef de clinique, assistant des hôpitaux de Paris.
Jean-Pierre Becquemin : Professeur des Universitées, praticien hospitalier.
Service de chirurgie vasculaire, hôpital Henri Mondor, 51, avenue du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny,
94010 Créteil cedex, France.
¶ Lésions
De nombreuses étiologies peuvent intervenir dans la pathologie de
l’artère axillaire [6, 9, 13, 19, 21, 34, 38, 42]. Citons les plus fréquentes.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Cron J et Becquemin JP. Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus). Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris,
tous droits réservés), Techniques chirurgicales - Chirurgie vasculaire, 43-029-N, 2000, 15 p.
43-029-N
Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus)
1
Techniques chirurgicales
3
Abord de l’artère axillaire dans le
sillon deltopectoral.
A. Schéma de l’incision cutanée.
B. Exposition du plan vasculonerveux après section du petit pectoral.
Abord de l’artère axillaire avec extension sousclaviculaire.
*
A
*
B
2
Abord de l’artère axillaire avec extension sus- ou sous-claviculaire et humérale : schéma des incisions cutanées.
4
Artériographie axillohumérale pour ischémie chronique du membre supérieur
droit : sténose athéromateuse de la terminaison de l’artère axillaire (flèche).
– L’athérosclérose (fig 4) reste la cause la plus fréquente chez les
sujets ayant les facteurs de risque habituels.
– La maladie de Takayasu, plus rare, doit être évoquée chez la
femme jeune qui présente une altération de l’état général avec
syndrome inflammatoire et hypertension artérielle. Les lésions sont
segmentaires et comportent des sténoses ou des occlusions, voire
des dilatations anévrismales. L’atteinte sous-clavière postvertébrale
est fréquente.
– La maladie de Horton atteint la femme âgée dans un contexte de
syndrome inflammatoire et réalise des sténoses lisses et longues ou
des occlusions en « bec de flûte ».
– Les lésions artérielles après irradiation axillaire et sus-claviculaire
pour tumeur du sein ou hémopathie se produisent en moyenne
entre 5 ans et 10 ans après l’irradiation. L’atteinte artérielle est
associée en règle à une radiodermite se traduisant par une sclérose
cutanée et tissulaire dense, parfois à une plexite radique responsable
de douleurs intenses, voire à une fibrose ou une thrombose veineuse,
éléments qui viennent compliquer la restauration artérielle (fig 5).
2
5
Artériographie axillohumérale pour nécrose de l’avant-bras, 20 ans après une irradiation de l’épaule pour tumeur de la clavicule : aspect de sténose radique (flèche).
– Les syndromes du défilé thoracobrachial peuvent se compliquer
de lésions de l’artère axillaire par extension vers l’aval d’un
Techniques chirurgicales
Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus)
43-029-N
8
Mécanisme des embolies distales à partir d’un
anévrisme de l’artère circonflexe postérieure [6].
1. Anévrisme de l’artère circonflexe postérieure ; 2. microembolie ; 3. thrombus.
1
2
3
6
Artériographie axillaire pour ischémie subaiguë du membre supérieur gauche
après traumatisme par étirement : aspect de sténose avec dissection intimale.
7 Aspect opératoire des
lésions intimales après
traumatisme fermé de l’artère axillaire.
– Chez le sportif, des embolies distales peuvent provenir des
altérations des branches de l’artère axillaire et notamment des
artères circonflexes antérieures et postérieures. Ce syndrome a été
décrit chez les joueurs de base-ball. Les mouvements importants
exercés au cours du lancer de balle soumettent l’artère à un
étirement puis à une dégénérescence anévrismale. Un thrombus
dans la poche anévrismale peut alors emboliser dans les artères
digitales (fig 8).
– La ponction de l’artère axillaire lors des interventions
endovasculaires à visée diagnostique ou thérapeutique est source
de complications. Il peut s’agir d’hématome au point de ponction,
de thrombose par décollement de plaques ou de dissection,
d’embolie distale, de sténose secondaire, de faux anévrisme et de
fistule artérioveineuse. Une atteinte du plexus brachial peut être à
l’origine de séquelles neurologiques graves réalisant le syndrome
du compartiment brachial interne.
– Lors d’actes de chirurgie orthopédique, l’artère axillaire peut être
lésée notamment lors des interventions pour luxation récidivante de
l’épaule, pseudarthrose de la clavicule, ostéosynthèse des fractures
du col huméral et résection de la première côte par voie axillaire.
¶ Physiopathologie
La richesse du réseau collatéral et la faible masse musculaire du
membre supérieur expliquent le faible retentissement habituel des
occlusions de l’artère axillaire.
Le réseau anastomotique le plus important provient des artères
scapulaires inférieure et postérieure et de l’artère acromiothoracique.
La réentrée se fait par les artères circonflexes ou les branches de
l’humérale profonde.
anévrisme sous-clavier poststénotique ou par occlusion
axillo-sous-clavière.
– Les plaies pénétrantes (balle, chevrotine, arme blanche,
complications des drainages thoraciques ou des ponctions susclaviculaires) et les traumatismes fermés après choc sur la ceinture
scapulaire (avec fracture de la première côte ou de la clavicule,
luxation ou fracture de la tête de l’humérus, impaction du moignon
de l’épaule) entraînent des lésions artérielles variables : rupture
complète avec ou sans dilacération de la paroi entraînant hémorragie
ou thrombose, rupture partielle sans rétraction des extrémités
artérielles conduisant à un faux anévrisme, rupture n’intéressant que
la média et/ou l’intima (fig 6, 7) et source d’occlusion secondaire,
voire rupture dans la veine axillaire entraînant une fistule
artérioveineuse.
EXPLORATIONS
¶ Examen clinique
En cas d’occlusion chronique, le degré d’ischémie est apprécié
cliniquement. Il peut s’agir de troubles trophiques telle une
gangrène pulpaire, ou de plusieurs phalanges, de nécrose cutanée et
musculaire du bras et de l’avant-bras, de douleurs continues de la
main qui est froide, œdématiée, blanche ou cyanique. Dans les
formes les mieux tolérées, les symptômes surviennent uniquement
au froid ou à l’effort. Un syndrome de Raynaud est fréquent,
caractérisé par des épisodes de vasospasme artériel digital majoré
par le froid et les stimuli émotionnels. Souvent, l’occlusion est
asymptomatique et la découverte d’une anisotension peut être
révélatrice.
3
43-029-N
Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus)
Techniques chirurgicales
9
Pontage veineux carotidohuméral : confection de
l’anastomose carotidienne.
A. Utilisation d’une
collatérale pour élargir
la veine.
B. Suture de la berge
postérieure par surjet.
C. Suture de la berge
antérieure.
*
A
*
B
En cas de traumatisme, la plaie vasculaire est évoquée s’il existe une
hémorragie extériorisée ou un hématome pulsatile. Sinon, le
diagnostic est difficile, en particulier lorsqu’il existe des lésions
orthopédiques. L’absence de pouls et la pauvreté du remplissage
veineux sont des signes qui doivent attirer l’attention.
¶ Examen doppler
En cas de doute, il précise l’absence de flux artériel dans l’artère
humérale situant ainsi le niveau axillaire de l’obstacle.
¶ Échographie endovasculaire
Son utilisation au niveau des artères du membre supérieur reste
exceptionnelle. Dans le cadre de certaines lésions traumatiques, elle
peut permettre de préciser l’existence d’éventuelles lésions
intimales [6].
¶ Artériographie
En dehors des cas d’hémorragie externe incontrôlable, nécessitant
un geste d’hémostase immédiat, l’artériographie est l’examen de
base pour définir la stratégie thérapeutique. Conventionnelle ou
digitalisée, elle ne doit pas se limiter aux troncs supra-aortiques et à
l’artère axillaire, mais elle doit permettre l’analyse de l’ensemble du
membre supérieur [7, 29]. Pour cela, des clichés de la crosse de l’aorte
et des segments proximaux de l’artère sous-clavière sont effectués
par Seldinger fémoral. Une injection sélective permet ensuite
d’analyser les artères axillaire, humérale, radiale et cubitale et même
les artères de la main après, au besoin, l’administration de
vasodilatateurs pour lever le spasme distal qui gêne la bonne
interprétation des radiographies.
PROCÉDÉS
¶ Installation
L’opéré est placé en décubitus dorsal, les anesthésistes à la tête ou
du côté opposé au membre opéré. Le bras est placé en abduction et
repose sur une table à bras. Le champ opératoire ménage un accès à
la région cervicale, la tête de l’opéré est tournée du côté opposé au
membre et placée en légère hyperextension. Il est préférable
d’installer l’ensemble du membre supérieur dans le champ
opératoire pour ménager un éventuel abord distal. L’opérateur se
place en dedans et l’aide lui fait face. Il est également prudent de
prévoir un accès à l’un des membres inférieurs, pour prélever si
besoin un segment veineux.
¶ Anesthésie
Il s’agit habituellement d’une anesthésie générale bien qu’un bloc
plexique soit également réalisable.
4
*
C
¶ Greffon
La veine saphène interne ou à défaut un greffon prothétique,
notamment en polytétrafluoroéthylène (PTFE) [12, 15], peuvent être
utilisés. Pour certains auteurs l’utilisation de la veine saphène
interne doit être systématique afin de limiter le risque de
plicature [25]. Pour d’autres, la perméabilité des pontages étant
excellente avec les deux matériaux, il faut privilégier l’utilisation des
prothèses afin de préserver le capital veineux et éviter les
dégénérescences anévrismales des pontages saphéniens [ 1 5 ] .
L’utilisation in situ de la veine céphalique en cas d’occlusion axillaire
a également été rapportée avec de bons résultats [4, 25, 30].
¶ Procédés
Pontages
Ce sont les restaurations les plus utilisées [9, 12, 15, 25, 31, 41, 43].
Les revascularisations par pontage aortoaxillaire, carotidoaxillaire,
axilloaxillaire et fémoroaxillaire ayant été décrites avec la chirurgie
des troncs supra-aortiques, nous ne traitons que les
revascularisations aboutissant à l’artère humérale.
• Pontage carotidohuméral
L’artère humérale est exposée par une incision brachiale interne puis
l’artère carotide primitive est abordée par une incision susclaviculaire et mobilisée sur quelques centimètres. La tunnellisation
est ensuite préparée entre la clavicule et la première côte en prenant
garde de ne pas blesser les éléments veineux et nerveux. L’emploi
d’une pince longuette munie d’une « noisette » facilite la
tunnellisation. Lorsque l’espace créé apparaît trop étroit, certains ont
proposé de réséquer l’arc moyen de la première côte. L’extrémité
proximale du greffon est préparée en utilisant, si c’est une veine,
une collatérale pour élargir l’implantation (fig 9). Une dose de
0,5 mg/kg d’héparine est administrée par voie intraveineuse, puis
la carotide est clampée en plaçant les deux clamps sur la berge
externe. Une rotation des clamps de 90 à 110° vers l’avant expose
correctement le bord externe sur lequel l’artériotomie carotidienne
est effectuée. Le talon de l’anastomose est placé en haut, ce qui offre
un trajet plus harmonieux au greffon. Nous réalisons généralement
un surjet coulissant pour le talon, puis la pointe est fixée et deux
hémisurjets latéraux sont effectués. Après les manœuvres de purge,
la carotide est déclampée. Un clamp est placé à l’extrémité distale
du greffon ce qui permet de contrôler la morphologie du greffon et
de le marquer par du bleu de méthylène pour contrôler l’absence de
torsion pendant le passage rétrojugulaire et surtout rétroclaviculaire.
L’artère humérale est ensuite clampée et ouverte longitudinalement.
La longueur du greffon est calculée, greffon en charge puis coupé en
biseau. L’anastomose est effectuée selon la même technique que
précédemment. Après les contrôles de perméabilité, les incisions
sont refermées sur deux drains de Redon (fig 10).
Techniques chirurgicales
Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus)
10
43-029-N
11
Pontage carotidohuméral.
A. Vue d’ensemble.
B. Détail de l’anastomose carotidienne.
C. Détail de l’anastomose humérale.
Pontage carotidohuméral extra-anatomique :
le greffon a un trajet souscutané au bord externe
du moignon de l’épaule.
*
A
deltoïde. Le greffon rejoint l’artère humérale par un trajet souscutané plutôt que transbicipital (fig 11). Cette variation est utilisée
en cas de sclérose importante du creux axillaire, pour laquelle le
trajet classique comporte le risque de blessure des éléments veineux
et nerveux et celui d’une compression du pontage. L’indication
principale est représentée par les artérites radiques (fig 12) [3].
• Pontage carotidohuméral profond
*
B
En cas d’obstruction axillohumérale, l’artère humérale profonde peut
être le seul axe perméable au bras. Plutôt que d’effectuer un long
pontage carotidoradial ou cubital qui franchit deux plis de flexion, il
est intéressant d’utiliser l’artère humérale profonde comme artère
réceptrice. Celle-ci est abordée par une incision brachiale interne en
suivant l’artère humérale commune. Elle plonge en regard du bord
libre du grand pectoral dans la gouttière radiale à la face postérieure
de l’humérus, accompagnée par le nerf radial. Le talon de
l’anastomose peut être appliqué sur l’artère humérale commune
endartériectomisée, et la pointe du greffon est suturée sur la
profonde comme pour une angioplastie fémorale communefémorale profonde. Ce pontage permet de réinjecter les rameaux
tricipitaux de l’humérale profonde et la branche anastomotique
radiale (fig 13). Lorsque ces collatérales sont insuffisantes, le pontage
est prolongé sur les artères de l’avant-bras assurant une
revascularisation séquentielle.
• Pontage sous-clavier-huméral
*
C
C’est une variante des pontages précédents, l’artère donneuse étant
l’artère sous-clavière. Celle-ci est abordée par une incision sousclaviculaire ou par une incision sus-claviculaire. Dans ce dernier cas,
la sous-clavière rétroscalénique est libérée, après section du scalène
antérieur, en respectant le nerf phrénique. L’anastomose est effectuée
en zone saine en terminoterminal ou mieux en latéroterminal. La
tunnellisation du greffon et l’anastomose inférieure sont effectuées
selon les principes décrits (cf supra). Ce pontage est indiqué dans
les lésions traumatiques de l’artère axillaire. Les lésions
athéroscléreuses se prêtent moins bien à ce procédé, car la sousclavière est fréquemment pathologique.
• Pontage carotidohuméral extra-anatomique
Angioplastie d’élargissement
Il diffère du pontage carotidohuméral par le trajet donné au greffon.
La tunnellisation est effectuée en sous-cutané au-dessus de
l’articulation acromioclaviculaire puis sur le relief externe du
Sa principale indication vient des complications des pontages
axillofémoraux (faux anévrisme ou thrombose) lorsque la prothèse
doit être explantée et plus rarement des ruptures artérielles
5
Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus)
43-029-N
Techniques chirurgicales
14
Résection d’un anévrisme de l’artère circonflexe postérieure sans geste
au niveau du tronc de l’artère axillaire.
Résections-sutures, sutures simples, greffes veineuses
ou prothétiques
Elles sont pratiquées essentiellement pour les lésions traumatiques
limitées, iatrogènes ou non, de l’artère axillaire.
*
A
En cas d’anévrisme des branches de l’artère axillaire, une résection
limitée de l’anévrisme doit être effectuée (fig 14). Elle est associée à
une courte greffe veineuse ou prothétique de l’artère axillaire quand
celle-ci est sténosée. En cas de microemboles dans les artères
digitales, une thrombolyse in situ peropératoire peut améliorer la
perfusion distale [6].
Dans le cadre des syndromes du défilé thoracobrachial compliqués
d’anévrisme s’étendant à l’artère axillaire ou d’occlusion sousclavioaxillaire, la réparation artérielle est effectuée par une greffe
veineuse, artérielle ou prothétique. Le geste de résection des
éléments osseux compressifs est réalisé dans le même temps
opératoire.
Ligature
*
B
12
Pontage veineux carotidohuméral extra-anatomique pour artérite radique.
A. Contrôle artériographique du pontage (les flèches indiquent les anastomoses).
B. Aspect des incisions.
13
Pontage aboutissant à l’artère humérale profonde.
Elle est indiquée dans les lésions septiques ou en cas d’hémorragie
sévère chez un polytraumatisé pour lequel d’autres lésions vitales
font l’objet d’un geste prioritaire. La surveillance postopératoire doit
alors être particulièrement vigilante pour poser l’indication d’une
revascularisation secondaire pour les cas où une ischémie sévère se
développerait, mais celle-ci n’est pas obligatoire.
¶ Soins postopératoires
L’héparine est utilisée en postopératoire immédiat. Les
anticoagulants n’ont pas d’indication au long cours et on leur
préfère les antiagrégants plaquettaires. La main doit être légèrement
surélevée et une kinésithérapie est très rapidement instituée, mais
les mouvements larges des articulations doivent rester prudents
jusqu’à la cicatrisation des sutures vasculaires, ce qui demande 2 à
3 semaines.
Les antibiotiques sont prescrits à titre prophylactique pendant
48 heures ou institués pour traiter une complication infectieuse
patente et authentifiée par les prélèvements bactériologiques.
¶ Contrôle de la revascularisation
La perméabilité est attestée cliniquement par la présence d’un pouls
radial et par un flux pulsé au doppler. Un contrôle angiographique
est cependant souvent préférable pour détecter une anomalie
potentiellement évolutive.
partielles. L’artère axillaire est abordée dans le sillon deltopectoral.
Dans certains cas, en particulier pour les ruptures avec hématome
important ou en cas de sclérose liée à un abord antérieur, il est
préférable de contrôler, en préalable, l’axe artériel à distance par
deux abords (sous-clavier et huméral). Cette stratégie limite les
risques de blessure du plexus brachial. Après contrôle, l’artère est
refermée à l’aide d’un patch prothétique (Dacront ou PTFE).
6
¶ Résultats des pontages carotidoou sous-clavier-huméraux
Les amputations restent exceptionnelles et la perméabilité des
pontages est bonne, entre 70 [19] et 92 % [12] à 5 ans.
Les échecs sont plus fréquents lorsque les artères de l’avant-bras
sont obstruées [11, 39].
Techniques chirurgicales
Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus)
15
*
A
43-029-N
Artériographie
A. Sténose de l’artère axillaire (flèche).
B. Résultat après angioplastie par voie humérale (flèche).
*
B
¶ Techniques endovasculaires
Technique
La dilatation peut être menée par voie fémorale, par voie humérale
homolatérale ou par ces deux abords simultanément (fig 15).
Certains auteurs recommandent un abord chirurgical de l’artère
humérale afin de limiter les embolies distales surtout après
recanalisation d’occlusions longues [42].
Les sténoses peuvent être franchies avec des guides « téflonnés »
0,035 (type Bentson) qu’il faut préférer en début d’expérience aux
guides hydrophiles de même taille (type Térumo) dont l’utilisation
est source de dissections. Ces derniers, droits ou angulés, sont en
revanche nécessaires en cas de recanalisation d’occlusion. Le
diamètre du ballonnet doit être adapté au diamètre de l’artère à
dilater et varie de 6 à 8 mm. En cas de lésions serrées, très calcifiées
ou radiques, une prédilatation avec un ballonnet de diamètre
inférieur diminue le risque de dissection. Des pressions
d’insufflation élevées sont parfois nécessaires. La pose
d’endoprothèse n’est pas systématique : elle peut être indiquée en
cas de recanalisation d’occlusion, de lésions potentiellement
emboligènes, de recoil ou de sténose résiduelle, de dissection
postangioplastie, et en cas de resténose.
Il est préférable d’utiliser des stents flexibles (tels que les
endoprothèses autoexpansibles Wallstent [Schneidert] ou les stents
en Nitinolt) ou des stents très courts en raison des risques de
compression ou de fracture lors des mouvements de l’épaule.
Le traitement antithrombotique périopératoire est inspiré des
protocoles d’angioplastie coronaire : le patient est mis sous
Aspirinet la veille de l’intervention et reçoit durant la procédure
0,5 mg/kg d’héparine. L’héparinothérapie est poursuivie pendant
24 à 48 heures (le temps de l’hospitalisation en général). Le patient
garde ensuite un antiagrégant plaquettaire au long court, pouvant
être associé à un deuxième antiagrégant durant le premier mois en
cas de pose d’une endoprothèse afin de limiter les rethromboses
précoces.
Résultats
Les lésions de l’artère axillaire étant rares, peu de grandes séries
sont disponibles [10]. Avec une perméabilité de 65 % à 26 mois, les
résultats de l’angioplastie axillaire sont décevants, surtout quand les
lésions traitées sont longues et diffuses [16]. Néanmoins, en cas
d’artérite radique, cette option thérapeutique est séduisante car elle
peut éviter une chirurgie artérielle difficile et extensive du fait de la
sclérose tissulaire [37].
Chirurgie des artères du bras
et de l’avant-bras
ABORDS
¶ Abord de l’artère humérale
L’incision cutanée est effectuée entre les reliefs des muscles biceps
et vaste interne du triceps, en arrière de la veine basilique (fig 16A).
*
A
*
B
16
Abord de l’artère humérale.
A. Schéma de l’incision cutanée.
B. Exposition de l’artère, le nerf médian est récliné en haut.
L’aponévrose brachiale est incisée et maintenue refoulée par un petit
écarteur de Beckman. Le nerf médian apparaît, il est écarté avec
précaution et l’axe artériel est dégagé (fig 16B). En cas d’oblitération
chronique ou de traumatisme, l’artère humérale est très grêle et peut
être difficile à identifier.
L’abord peut être étendu en haut vers le creux axillaire, et en bas
vers le coude et si besoin l’avant-bras. Pour le passage du pli du
coude, l’incision est inclinée en dehors puis à nouveau en dedans,
réalisant un S allongé (fig 17). La bifurcation de l’artère humérale est
abordée en sectionnant l’expansion aponévrotique du biceps (fig 18).
L’artère part en dedans et s’engage sous le rond pronateur cubital et
les muscles épitrochléens, l’artère radiale prolonge la direction de
l’artère humérale et donne l’artère récurrente radiale qui
s’anastomose avec la branche terminale de l’humérale profonde. Le
tronc des interosseuses et l’interosseuse antérieure sont abordés
depuis la terminaison de l’artère humérale au pli du coude, en
sectionnant le rond pronateur et au besoin l’arcade du fléchisseur
commun superficiel, voire son corps musculaire.
Le nerf médian qui est en avant de l’interosseuse doit être ménagé.
7
43-029-N
Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus)
17 Abord de l’artère humérale et de ses branches de
division : schéma de l’incision cutanée.
Techniques chirurgicales
19
Abord des artères radiales (R) et cubitale (C) :
schéma des incisions cutanées.
¶ Abord des artères de l’avant-bras
L’artère radiale est abordée à la partie moyenne de l’avant-bras en
incisant l’aponévrose en dedans de la veine radiale. Le long
supinateur est récliné en dehors par un écarteur de Beckman et
l’artère est disséquée entre ses deux veines satellites. La cubitale est
abordée par une incision antibrachiale interne selon une ligne
s’étendant de l’épitrochlée au relief du pisiforme (fig 19). L’artère est
profonde. Après avoir incisé l’aponévrose, les muscles cubital
antérieur et fléchisseur commun superficiel sont écartés. Le nerf
cubital apparaît et l’artère est recherchée en dehors sur le fléchisseur
profond.
PATHOLOGIE
¶ Lésions
Elles ont plusieurs étiologies.
– L’athérosclérose est assez rare.
– Les embolies anciennes sont plus fréquentes : l’embole peut être
méconnu dans la phase initiale lorsqu’il n’entraîne pas d’ischémie
aiguë. L’obstruction artérielle est découverte secondairement, en
raison du développement d’une ischémie permanente ou d’effort.
Les emboles sont d’origine cardiaque dans plus de 90 % des cas. Ils
peuvent également provenir de plaques athéroscléreuses ulcérées ou
d’anévrismes de la sous-clavière dont la cause la plus fréquente,
chez le sujet jeune, est le défilé thoracobrachial. Ces lésions doivent
être traitées simultanément ou en préalable à une revascularisation
plus distale du membre. L’obstruction progressive des petites artères
puis des axes principaux pose des problèmes chirurgicaux parfois
difficiles en raison de la rareté d’axe revascularisable [11, 23].
– Les complications artérielles après ponction humérale sont les
mêmes qu’au niveau axillaire [20, 24]. Une atteinte du nerf médian peut
être associée.
– Les traumatismes ouverts du bras après plaie (arme à feu, arme
blanche ou agent tranchant) ou les traumatismes fermés avec
fracture du tiers moyen de l’humérus ou fracture supracondylienne
18
Abord des branches de division de l’artère humérale au
coude.
A. Section de l’expansion aponévrotique du biceps.
B. Découverte de l’artère radiale et de l’artère cubitale.
*
A
8
*
B
Techniques chirurgicales
Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus)
43-029-N
*
*
A
B
Schéma d’utilisation des veines in situ pour revascularisations distales
du membre supérieur.
A. Utilisation de la veine céphalique et de la veine radiale superficielle in situ.
B. Utilisation de la veine basilique et de la veine cubitale superficielle in situ.
*
*
C
D
C. Utilisation de la veine céphalique in situ et de la veine basilique inversée.
D. Utilisation de la veine basilique in situ et de la veine céphalique inversée.
s’accompagnent très fréquemment de lésions du nerf médian qui
vont dominer le pronostic fonctionnel en dépit d’une
revascularisation correcte. L’essentiel de la pathologie chirurgicale
des artères de l’avant-bras est représenté par les traumatismes et
surtout par les traumatismes ouverts. En France, il s’agit avant tout
d’accidents du travail avec des agents tranchants, ou parfois
d’accidents de la voie publique avec des dégâts ostéotendineux
importants.
¶ Anesthésie
20
¶ Physiopathologie
En cas d’obstruction du segment brachial de l’artère humérale, les
suppléances sont assurées par l’artère humérale profonde et l’artère
collatérale interne qui servent de relais, la réentrée se faisant dans
l’artère récurrente radiale ou les rameaux musculaires du biceps.
En cas d’obstruction du segment distal de l’artère humérale, les
suppléances au coude s’établissent par l’intermédiaire des artères
récurrentes radiale et cubitale anastomotiques avec les branches
postérieures de l’humérale et avec l’humérale profonde.
EXPLORATIONS
Outre les explorations employées pour l’artère axillaire, il peut être
utile de préciser artériographiquement l’état de l’artère interosseuse
et de ses deux branches terminales par des clichés de profil du
coude. On évite ainsi les erreurs d’interprétation lorsque l’une des
deux artères est thrombosée.
PROCÉDÉS
La chirurgie des artères du bras et de l’avant-bras se prête assez
bien à l’anesthésie locorégionale par bloc plexique.
¶ Greffon
Les bons résultats obtenus avec les veines du membre supérieur
pour les revascularisations des membres inférieurs rendent leur
utilisation logique au niveau du bras et de l’avant-bras. Ce choix
permet l’économie d’une veine saphène. Les veines du bras peuvent
être utilisées inversées ou in situ [30]. Cette dernière technique offre
une meilleure congruence entre les segments artériels et veineux, et
limite les voies d’abords.
Quand on utilise les veines du membre supérieur, de multiples
adaptations dans le montage sont possibles en fonction de la
longueur de pontage nécessaire. Ainsi, la partie proximale du
pontage peut être constituée par la veine céphalique in situ et la
partie distale par la veine basilique basculée et utilisée inversée
quand les veines de l’avant-bras ne sont pas utilisables. De la même
façon, la veine basilique peut être utilisée in situ et la veine
céphalique basculée et inversée (fig 20).
Quelle que soit la veine utilisée, celle-ci doit être prélevée de façon
atraumatique et gonflée à des pressions physiologiques avec du sang
hépariné et de la papavérine, afin de limiter les fibroses ultérieures
par hyperplasie intimale. Les veines du membre sont généralement
fragiles et se spasment facilement ; une grande attention est de mise
lors de leur préparation.
¶ Installation
¶ Procédés
Elle est identique à celle de l’artère axillaire, un abord cervical étant
parfois nécessaire.
Quel que soit le procédé employé, l’artère humérale diffère des
artères de jambe par sa texture, la rareté des lésions d’athérosclérose
9
43-029-N
Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus)
Techniques chirurgicales
21
Angioplastie veineuse pour traumatisme iatrogène de l’artère humérale.
*
A
et, en conséquence, les possibilités de spasme qui peuvent
compromettre une revascularisation a priori correcte. Pour limiter
ce phénomène, le plus simple est de dilater modérément l’artère,
soit mécaniquement par les obturateurs de Garrett, soit
pharmacologiquement par l’injection de papavérine et de sérum
hépariné.
Au niveau de l’avant-bras l’application des techniques dérivées de
la microchirurgie contribue beaucoup à la qualité des résultats.
Dans tous les cas, il est préférable de contrôler sur table d’opération
la revascularisation, par la palpation des pouls au poignet, la prise
d’un doppler et surtout d’une artériographie qui peut détecter les
éventuels défauts techniques ou les obstructions résiduelles d’aval.
Suture simple
Elle est possible en cas de traumatisme punctiforme que l’on observe
après les cathétérismes vasculaires.
*
B
22
Pontage veineux humérohuméral.
A. Terminoterminal.
B. Latéral avec exclusion de l’artère pathologique.
Pontages
Résection-suture de l’artère humérale
Elle comporte, dans un. premier temps, la résection complète des
segments d’artère contuse, y compris les dommages de la couche
endothéliale. Lorsque les zones sont saines, on vérifie que les deux
extrémités viennent au contact l’une de l’autre sans traction
excessive. La suture est ensuite effectuée à points séparés pour éviter
une sténose due à un surjet trop serré. Cette technique est employée
pour les plaies franches, les contusions limitées et dans certains
traumatismes iatrogènes après ponction artérielle.
Angioplastie d’élargissement de l’artère humérale
Elle comporte l’excision de la portion de paroi artérielle
pathologique et la fermeture de l’artère par un patch veineux ou
plus rarement prothétique. Le patch est suffisamment long pour
éviter les sténoses aux extrémités et pas trop large pour éviter une
évolution anévrismale (fig 21). Ce procédé est applicable dans les
traumatismes avec rupture incomplète et dans les complications des
ponctions artérielles. En cas d’artère pathologique, la fixation d’une
plaque d’athérome ou d’un ressaut intimal par quelques points peut
s’avérer nécessaire.
Endartériectomie de l’artère humérale
Elle n’est que très rarement effectuée. Il s’agit en fait plus
d’intimectomie que d’endartériectomie. Elle peut être réalisée en
complément d’autres procédés, en particulier des pontages, pour
récupérer des collatérales importantes.
10
• Pontages axillohuméral et humérohuméral
Ils sont effectués à l’aide d’une veine. Ils comportent, après abord
de l’artère axillaire ou de l’artère humérale haute puis de l’humérale
basse, une anastomose proximale latéroterminale et une anastomose
distale latérale ou terminale (fig 22A). Ce pontage, plus ou moins
long selon l’étendue des lésions, est placé parallèlement à l’axe
huméral. Lorsque l’on craint une infection de la zone opératoire, il
convient de placer les sutures en zones saines et de dérouter le
pontage, éventuellement en avant ou en dehors du biceps (fig 22B).
En cas d’hématome infiltrant, l’incision cutanée peut être difficile à
fermer et, plutôt que de prendre le risque d’une nécrose cutanée
avec exposition du pontage, ou celui d’une compression du greffon,
il est préférable de réaliser une incision cutanée et aponévrotique de
décharge sur le bord externe du bras.
• Pontage huméroradial
Les axes artériels sont libérés selon le siège lésionnel, et le pontage
est effectué avec un segment de saphène pris à la jambe ou une
veine céphalique ou basilique. Le pontage est placé anatomiquement
en lui donnant une courbure arciforme externe et en vérifiant
l’absence de plicature lorsque le coude est fléchi (fig 23, 24) [14, 39].
• Pontage humérocubital
Il répond aux mêmes principes que le pontage huméroradial. La
plicature du greffon peut être évitée par un trajet interne ou un long
trajet en « S » (fig 25, 26).
Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus)
Techniques chirurgicales
23
25
Pontage huméroradial.
43-029-N
Pontage humérocubital.
26
Contrôle artériographique de l’anastomose distale
d’un pontage humérocubital.
24
Contrôle artériographique d’un pontage huméroradial en veine saphène interne
inversée.
• Pontage huméroséquentiel
En cas de doubles lésions proximales, il est intéressant de
revasculariser les deux artères de l’avant-bras. Pour cela, on utilise
un greffon veineux bifurqué ou on réimplante la cubitale dans le
greffon huméroradial (fig 27).
• Pontage huméro-interosseux
En l’absence d’artères radiale et cubitale à la partie proximale ou
moyenne de l’avant-bras, l’artère interosseuse peut être utilisée
comme artère réceptrice (fig 28) [19].
• Pontages radioradial et cubitocubital
Les anastomoses sont terminoterminales aux deux extrémités. Ces
revascularisations sont indispensables en cas d’atteinte des deux
axes artériels. Les pontages sont également utiles en cas de lésions
d’un seul axe, bien que plus discutables, le but étant alors de
27
Pontage veineux bifurqué dévalvulé huméroradial et cubital.
prévenir les ischémies par suppléances insuffisantes ou de préserver
l’avenir (plaies itératives) [18]. Lorsqu’une seule artère est lésée et que
la réparation est effectuée tardivement (au-delà de quelques heures),
il est important d’assurer un débit maximal dans l’axe restauré pour
éviter la thrombose par compétition de flux. Pour cela, on comprime
11
Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus)
43-029-N
Techniques chirurgicales
29
Abord de l’artère radiale dans la tabatière anatomique.
28
Pontage huméro-interosseux antérieur.
digitalement l’artère saine pendant une quinzaine de minutes avant
de refermer les plaies [40].
Ligature
Elle est indiquée dans les lésions hautement septiques lorsqu’un
pontage à distance n’est pas faisable.
30 Abord de l’artère cubitale : schéma
de l’incision cutanée.
¶ Soins postopératoires
Ils sont similaires à ceux des revascularisations axillaires. En cas de
pontage franchissant le pli du coude, le bras est maintenu en légère
flexion pour ne pas exercer de traction sur les sutures.
En cas d’œdème important ou d’hématome infiltrant, la couverture
des abords vasculaires peut être obtenue par des incisions cutanées
et aponévrotiques de décharge des bords, interne ou externe, de
l’avant-bras. Dans certains cas, il faut avoir recours à des plasties de
recouvrement par lambeau de peau ou par interposition musculaire.
¶ Résultats
La perméabilité des pontages est supérieure quand l’anastomose
distale est effectuée en amont de la bifurcation humérale : 83 %
versus 53 % à 2 ans pour McCarty [19], 94 % versus 84 % à 2 ans pour
Harris [13].
Chirurgie des artères du poignet
et de la main
31
Artériographie d’un anévrisme post-traumatique
du poignet développé au niveau de l’artère cubitale.
ABORDS
L’artère radiale est abordée dans la gouttière du pouls. Elle est sousaponévrotique et accompagnée par deux veines satellites. Elle peut
également être abordée dans la tabatière anatomique par une
incision dorsale dans l’axe de la première commissure (fig 29). Les
fibres sensitives du nerf radial sont ménagées et les tendons du long
et du court extenseur puis du court abducteur du pouce sont
réclinés. L’artère cubitale et l’arcade palmaire superficielle sont
abordées par une incision cutanée en « S » en dedans du pisiforme,
prolongée dans l’axe de la troisième commissure. L’artère est
dégagée après avoir incisé l’aponévrose et le palmaire cutané (fig 30).
PATHOLOGIE
¶ Lésions
– Elles sont dominées, là encore, par les traumatismes ouverts (plaie
de l’artère radiale par engin tranchant, tentative d’autolyse) et par
12
les traumatismes fermés (thrombose ou rupture des artères radiales
et cubitales après luxation rétrolunaire du carpe ou fracture du
scaphoïde) (fig 31).
Techniques chirurgicales
Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus)
32
Artériographie de la main montrant
une occlusion des artères digitales
par microembolies à partir d’une sténose
radique de l’artère sous-clavière.
43-029-N
– occlusion proximale d’une des artères de l’avant-bras avec une
arcade palmaire non fonctionnelle ;
– occlusion à double étage, palmaire et collatérale digitale.
EXPLORATIONS
– Le doppler permet, en l’absence de pouls, de mesurer la pression
de perfusion et la qualité des suppléances. Il est surtout utile pour
apprécier l’existence d’un flux pulpaire, la perméabilité des artères
collatérales des doigts et le caractère fonctionnel ou non des arcades
palmaires. Il suffit pour cela de placer le crayon doppler tour à tour
sur l’une des artères du poignet et de comprimer l’autre.
L’accélération du flux témoigne du caractère complet de l’arcade.
– L’échographie couplée au doppler peut confirmer le diagnostic
clinique d’anévrisme de l’artère cubitale.
– La pléthysmographie digitale incite à proposer un geste de
revascularisation quand elle montre un tracé plat ou franchement
démodulé.
– Une pathologie particulière est consécutive aux manipulations
d’engins vibrants (marteau-piqueur ou scie circulaire) qui peuvent
entraîner des thromboses des arcades palmaires ou des collatérales
des doigts [27]. Les traumatismes isolés ou répétés de l’éminence
hypothénar sont à l’origine de thromboses ou d’anévrismes
emboligènes de l’artère cubitale, réalisant le syndrome du marteau
hypothénar [27, 36]. Ce syndrome se développerait toutefois chez des
patients porteurs d’une fibrodysplasie préexistante [8]. Certains
anévrisme peuvent également être d’origine athéroscléreuse [22].
Les traumatismes peuvent également entraîner des fistules
artérioveineuses aux dépens des artères et veines radiales ou
cubitales.
– L’insuffisance rénale terminale peut se compliquer d’ischémie de
la main et des doigts d’origine multifactorielle : accès pour
hémodialyse compliqué de thrombose distale ou phénomène de vol,
athérosclérose accélérée, calcifications artérielles dans le cadre d’une
calciphylaxie [28]. Les signes ischémiques sont parfois sévères avec
nécrose digitale et gangrène nécessitant une amputation. Les
douleurs en rapport avec une neuropathie monomélique ischémique
associée peuvent persister après la revascularisation.
– La maladie de Buerger dans laquelle l’atteinte des artères de la
main est très fréquente, sinon constante au cours de cette maladie. Il
s’agit d’oblitération des artères radiales ou cubitales, ou d’atteinte
plus diffuse.
– La sclérodermie et l’artérite rhumatoïde : les oblitérations
artérielles sont rares. Elles aggravent l’ischémie tissulaire qui est
habituellement due à une vascularite.
– L’athérome mais aussi l’artérite radique [37] peuvent entraîner des
oblitérations des artères digitales par occlusion ou par embolies
provenant de l’artère sous-clavière (fig 32).
– Les embolies vieillies chez les patients porteurs de cardiopathies
emboligènes peuvent évoluer à bas bruit entraînant des gangrènes
[2, 33]
digitales
.
¶ Physiopathologie
Les suppléances au poignet et à la main en cas d’obstruction d’une
artère radiale ou cubitale s’établissent facilement par l’intermédiaire
des arcades palmaires profonde et superficielle. Cependant, ces
suppléances ne sont pas fonctionnelles chez 22 % de la population
générale [5].
Une ischémie sévère ne peut survenir que dans les cas suivants [2] :
– occlusion des deux artères digitales palmaires propres ;
– occlusion proximale des artères de l’avant-bras avec mauvaise
collatéralité ;
– La mesure transcutanée de la pression d’oxygène (TcPO 2 )
confirme la sévérité de l’ischémie et incite à opérer quand elle est
inférieure à 20 mmHg.
– L’artériographie, en cas d’ischémie, est effectuée comme décrit
précédemment, c’est-à-dire avec l’étude de l’ensemble des artères
du membre supérieur pour ne pas méconnaître une pathologie susjacente associée.
PROCÉDÉS
¶ Gestes de revascularisation
– La résection-suture en cas d’anévrisme de l’artère cubitale est
rarement possible et un court pontage veineux est le plus souvent
effectué [8, 28] afin d’éviter une embolisation dans les arcades
palmaires et les collatérales digitales. En cas de thrombose de
l’anévrisme, le risque embolique n’existe plus et la chirurgie n’est
pas indiquée.
– Les pontages radiopalmaire et cubitopalmaire superficiels : en cas
d’obstruction des artères radiale et cubitale distale avec conservation
d’une arcade palmaire superficielle, un court pontage sur l’arcade
palmaire peut être effectué à partir de l’artère radiale ou de la
cubitale. Comme greffon, on peut utiliser des veines du dos de la
main, la veine radiale superficielle prélevée à l’avant-bras, la veine
saphène interne prélevée à la cheville ou une veine du dos du pied.
Cette technique, pour avoir des chances raisonnables d’être efficace,
nécessite un entraînement à la microchirurgie (fig 33) [2, 21, 32]. Les
anastomoses sont effectuées sous loupe binoculaire avec un
monofilament 8/0. Dans le cadre de l’insuffisance rénale terminale,
il est préférable d’effectuer une revascularisation de la main sans
sacrifier l’accès pour hémodialyse. L’anastomose proximale peut être
effectuée sur l’artère humérale ou sur une artère de l’avant-bras à
distance de la fistule artérioveineuse [28].
¶ Artérialisations veineuses
En cas d’ischémie sévère du membre supérieur sans artère en
distalité pouvant recevoir un pontage, une fistule artérioveineuse
peut être effectuée dans le cadre d’un sauvetage de membre [17]. Le
but de cette fistule est d’établir un flux artériel rétrograde dans la
veine afin d’améliorer la perfusion tissulaire. L’anastomose est
effectuée en latéral sur l’artère saine la plus distale et en terminal
sur une veine superficielle après sa dévalvulation et sa ligature en
aval.
La fistule peut ainsi être créée entre l’artère humérale et une veine
du pli du coude ou au poignet, entre l’artère radiale et la veine
radiale (fig 34).
Les résultats de cette technique sont peu documentés et son intérêt
reste discuté.
13
43-029-N
33
Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus)
Techniques chirurgicales
Pontage veineux entre l’artère cubitale et l’arcade palmaire superficielle.
¶ Sympathectomie thoracique
Bien que contestée par certains [35], elle peut améliorer de façon
parfois spectaculaire des situations graves [21, 38]. Menée par voie
thoracoscopique, l’intervention est généralement bien tolérée, sans
complication majeure, et la durée d’hospitalisation peut être limitée
à 48 heures. Le risque de syndrome de Claude Bernard-Horner est
faible si la limite supérieure de la résection est au niveau du
croisement de la chaîne sympathique et de la première côte [1]. Elle
peut être proposée en cas de douleurs ischémiques et de troubles
14
34
Schéma d’une fistule artérioveineuse créée au pli du coude entre l’artère humérale et la veine radiale superficielle.
1. Veine céphalique ; 2. veine cubitale intermédiaire ; 3. artère radiale ; 4. veine basilique ; 5. artère tumérale ; 6. veine radiale superficielle.
trophiques après échec du traitement médical (vasodilatateurs,
antagonistes du calcium, perfusions de prostaglandines) et quand il
n’existe pas de possibilités de revascularisation.
Techniques chirurgicales
Chirurgie des artères du membre supérieur (anévrismes et ischémie aiguë exclus)
43-029-N
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15
ENCYCLOPÉDIE MÉDICO-CHIRURGICALE 43-029-Q
43-029-Q
Chirurgie des syndromes
de compression du défilé
thoracobrachial
P Patra
JC Pillet
P Chaillou
R é s u m é. – Après un rappel anatomique des cinq espaces du défilé
cervicothoracique où une compression ostéoarticulaire peut s’exercer sur les
éléments vasculonerveux, ce travail expose :
– les variations et les anomalies anatomiques des défilés ;
– les éléments du diagnostic des formes neurologiques, artérielles ou veineuses ;
– les différentes voies d’abord chirurgicales, en détaillant les voies axillaire et susclaviculaire les plus utilisées ;
– les indications du traitement chirurgical et ses complications ;
– les récidives et leur traitement.
Introduction
Les syndromes de la traversée cervicothoracobrachiale (STTB) résultent
de la compression des structures vasculonerveuses, au niveau du défilé
thoracobrachial. Cette compression provient en général de la présence
d’une côte cervicale, de faisceaux scaléniques anormaux ou d’anomalies
fibromusculaires. Le traitement des STTB fait l’objet de controverses.
L’une d’entre elles concerne le principe de la résection systématique de
la première côte. De 1910 à 1927, plusieurs résections costales,
effectuées avec succès, ont été rapportées ; mais de 1927 à 1962, à la
suite des publications d’Adson et Coffey, la scalénectomie isolée est
devenue la technique de choix. À partir de 1962, devant les échecs de la
scalénectomie, les résections de la première côte ont connu un nouvel
essor. Plusieurs voies ont été décrites presque simultanément :
postérieure par Clagett, thoracique par Servelle [39] et axillaire par Roos
en 1966 [34]. Le débat a été relancé par Sanders en 1979 [38], puis par Dale
en 1982 [12], à la suite de la publication de complications graves liées à la
résection de la première côte [3]. Ce débat demeure d’actualité, ainsi que
la question du choix de la voie d’abord.
Données anatomiques
Anatomie normale [29]
La traversée cervicothoracobrachiale peut être définie comme la
© Elsevier, Paris
Philippe Patra : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Jean-Christophe Pillet : Assistant-chef de clinique.
Philippe Chaillou : Praticien hospitalier.
Service de chirurgie vasculaire, centre hospitalier universitaire, hôpital Guillaume et
René Laennec, boulevard Jean-Monod, Saint-Herblain, 44093 Nantes cedex 01,
France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Patra P, Pillet JC et Chaillou P.
Chirurgie des syndromes de compression du défilé thoracobrachial. Encycl Méd
Chir (Elsevier, Paris), Techniques chirurgicales – Chirurgie vasculaire, 43-029-Q,
1998, 12 p.
1 Traversée cervicothoracobrachiale. A : défilé intercostoscalénique ; B : canal
costoclaviculaire ; C : tunnel sous-pectoral ; D : billot huméral ; SA : muscle scalène
antérieur ; ACC : artère carotide commune ; PB : plexus brachial ; AS : artère subclavière ; VS : veine subclavière ; SM : muscle scalène moyen ; C : clavicule ; MS :
muscle subclavier ; AA : artère axillaire ; PP : muscle petit pectoral.
succession de cinq espaces parcourus par les éléments vasculonerveux
(fig 1) : le défilé intercostoscalénique et préscalénique, le canal
costoclaviculaire, le tunnel sous-pectoral et le billot huméral.
Défilé intercostoscalénique
C’est un espace prismatique triangulaire délimité par le bord postérieur
du muscle scalène antérieur, le bord antérieur du muscle scalène moyen
et la face supérieure de la première côte (fig 2). L’obliquité de la face
supérieure de la première côte dépend de la morphologie du sujet.
L’angle supérieur du défilé est très étroit (souvent inférieur à 20°) et le
bord inférieur est comblé par des fibres arciformes émanant des muscles
scalènes antérieur et moyen, et se perdant sur le périoste costal (fig 3, 4).
43-029-Q
CHIRURGIE DES SYNDROMES DE COMPRESSION DU DÉFILÉ THORACOBRACHIAL
2 Vue antéroexterne
du défilé intercostoscalénique droit. SA : tendon inférieur du muscle
scalène antérieur ; C :
première côte ; PB :
plexus brachial ; SC : artère subclavière.
Défilé intercostoscalénique
C’est un espace prismatique triangulaire délimité par le bord postérieur
du muscle scalène antérieur, le bord antérieur du muscle scalène moyen
et la face supérieure de la première côte (fig 2). L’obliquité de la face
supérieure de la première côte dépend de la morphologie du sujet.
L’angle supérieur du défilé est très étroit (souvent inférieur à 20°) et le
bord inférieur est comblé par des fibres arciformes émanant des muscles
scalènes antérieur et moyen, et se perdant sur le périoste costal (fig 3, 4).
Les trois muscles scalènes forment une masse unique en haut, mais se
divisant en bas pour faire place aux organes de passage. Des anomalies
de division musculaire expliquent la présence de formations musculaires
qui peuvent rétrécir en permanence le défilé intercostoscalénique. On
distingue :
– les muscles interpédiculaires supérieurs (entre le muscle scalène
moyen et antérieur, 2 % des sujets) ;
Techniques chirurgicales
– les muscles interpédiculaires inférieurs, correspondant au petit
scalène de Winslow (présent chez 3 % des sujets) qui traverse les
racines inférieures du plexus brachial ou s’interpose entre ces racines et
l’artère sous-clavière.
L’artère et les troncs nerveux sont amarrés par trois types de ponts
fibreux infra-artériels (fig 4). Les premiers siègent au niveau de la berge
interne du défilé. Ils relient les muscles scalènes antérieur et moyen.
Cette formation n’adhère pas à l’artère. Les deuxièmes siègent au niveau
de la berge externe du défilé. Ils sont très adhérents à l’artère. Les
troisièmes sont plus constants, situés à l’intérieur même du défilé, ils
fixent l’artère aux parois de ce dernier par un tissu cellulofibreux lâche,
mais ferme.
La méconnaissance de ces éléments fibreux, lors des sections des
insertions costales des scalènes ou des résections de la première côte
sans artériolyse, rend insuffisant le geste curateur et peut même aggraver
une éventuelle compression artérielle. En effet, l’artère est alors soustendue par un anneau fibreux non amarré et soulevée par les muscles
rétractés. De plus, les muscles scalènes tendent à se rapprocher une fois
leurs attaches costales disparues.
Des amarres fibreuses solidarisant les racines plexiques aux parois
existent à tous les niveaux du défilé. Elles sont particulièrement denses
à la partie haute du défilé. Il faut inciser cette expansion fibreuse pour
découvrir et libérer les nerfs. Il existe également des attaches entre
l’adventice artérielle, les muscles et le plexus brachial.
L’artère sous-clavière chemine dans l’angle antéro-inférieur de l’espace
interscalénique (fig 3). Les troncs nerveux ont une disposition très
variable. Ils sont presque toujours aplatis selon un plan frontal, et non
pas cylindriques ; d’autre part, la racine C7 a tendance à se placer audessus de l’artère, la racine C8-T1 étant en arrière.
Le défilé préscalénique correspond au passage de la terminaison de la
veine sous-clavière et se situe entre l’extrémité antérieure de la première
côte, en bas, l’extrémité sternale de la clavicule doublée du muscle sousclavier et du tendon du scalène antérieur. Ce défilé se modifie
considérablement avec les mouvements de la clavicule.
Canal costoclaviculaire
Ce canal est situé entre la face inférieure de la moitié interne de la
clavicule et la face supérieure des segments moyen et antérieur de la
première côte (fig 5). Les variations du muscle sous-clavier
conditionnent la forme de son orifice antérieur. Dans 25 % des cas
seulement, il s’agit d’un muscle peu épais, cylindrique. Il se présente, le
plus souvent, comme une véritable lame musculaire, débordant vers
l’avant la face inférieure de la clavicule (fig 5). Suivant son importance
et sa longueur, le rebord tendineux inférieur du muscle transforme
1re côte
4
3 Vue externe du défilé intercostoscalénique droit. Le muscle scalène antérieur (SA) a été sectionné, ainsi que
l’artère, pour montrer les fibres unissant les deux muscles scalènes (SM : muscle scalène moyen). On remarque
la présence d’un fort ligament transversocostal (*).
3
page 2
4 Vue schématique des amarres artérielles et plexuelles. SM : scalène moyen ; SA : scalène antérieur ; Tnp :
tronc veineux primaire du plexus brachial ; Hfia : hamac fibreux intra-artériel ; Sub : artère sous-clavière ; Pt fib :
pont fibreux.
Techniques chirurgicales
CHIRURGIE DES SYNDROMES DE COMPRESSION DU DÉFILÉ THORACOBRACHIAL
43-029-Q
6 Vue antérieure du canal costoclaviculaire droit vidé de son contenu. Cette
préparation souligne sa proximité par rapport au défilé intercostoscalénique. CL :
clavicule ; MS : muscle sous-clavier ; C : première côte ; SA, SM : tendons du muscle
scalène antérieur et moyen.
5 Vue antérieure du canal costoclaviculaire droit. CL : clavicule ; MS : muscle
sous-clavier dont le tendon inférieur déborde en dehors sur le compartiment neuroartériel (flèche) ; PP : muscle petit pectoral sectionné ; SA : tendon du muscle scalène
antérieur qui se projette sur le canal costoclaviculaire ; VS : veine sous-clavière
sectionnée ; F : berge interne du canal comblé par des formations fibreuses ; AS :
artère sous-clavière et ses attaches fibreuses à la première côte (C).
l’orifice antérieur du canal costoclaviculaire en un orifice
ostéotendineux pratiquement indéformable et vulnérant pour les
éléments vasculonerveux qui viennent à son contact.
Le canal costoclaviculaire est long et le muscle scalène antérieur glisse
sous sa berge postérieure. Il est difficile de discerner une ligne de
démarcation nette entre la berge externe du défilé intercostoscalénique
et l’orifice postérieur du canal costoclaviculaire (fig 6).
Le canal costoclaviculaire est divisé en un compartiment antéro-interne
lymphoveineux et un compartiment postéroexterne neuroartériel. Ces
deux compartiments ont un diamètre très réduit avec de grandes
variations liées aux mouvements de la clavicule. La veine est surtout
comprimée dans le compartiment antéro-interne, entre le muscle sousclavier et la première côte. Il existe en effet des adhérences constantes
entre la gaine du muscle sous-clavier et la veine axillaire qui rendent
celle-ci solidaire des mouvements de la clavicule.
Il faut également noter la présence de valvules veineuses qui sont
constantes et importantes, leur rôle hémodynamique pouvant expliquer
en partie certaines thromboses veineuses du membre supérieur. Elles
sont situées au croisement de la veine sous-clavière avec la première
côte.
Tunnel sous-pectoral
Il est limité, en arrière, par la paroi dorsale de la fosse axillaire et, en
avant, par le muscle petit pectoral (fig 7). Dans 15 % des cas, le bord
externe du muscle petit pectoral est fibreux, épais et peut former un
arceau ou un rebord rectiligne agressif pour les vaisseaux. Les branches
du plexus brachial cheminent avec l’artère et la veine axillaires dans un
espace relativement large, comblé par un tissu cellulograisseux et
ganglionnaire. Ce tissu de glissement peut manquer chez les sujets
maigres ou longilignes.
Billot huméral
En position indifférente, le paquet vasculonerveux occupe le grand axe
du creux axillaire, demeurant ainsi à distance de la tête humérale. En
abduction du bras, à partir de 90°, l’artère se plaque contre la tête
humérale. Cette compression serait à l’origine d’un nombre sous-estimé
de complications artérielles du STTB [15].
7 Vue antérieure du
tunnel sous-pectoral droit.
PP : muscle petit pectoral
et son bord externe
(flèche) ; MS : muscle
sous-clavier ; C : clavicule
sectionnée ;A : artère axillaire ; V : veine axillaire ;
M : nerf médian.
La plus grande fréquence du syndrome de la traversée thoracobrachiale
chez les femmes est plus difficile à expliquer. Il n’existe en effet que de
discrètes différences dans les mensurations thoraciques entre les deux
sexes. En revanche, l’imprégnation œstroprogestative chez la femme
pourrait être responsable d’une laxité musculoligamentaire entraînant la
chute de l’épaule.
Les variations selon le type somatique sont plus évidentes. Chez les
sujets longilignes, les clavicules sont nettement tombantes et le diamètre
biacromial réduit, prédisposant ainsi aux syndromes de la traversée
thoracobrachiale. À l’inverse, chez les brévilignes, le thorax est large,
les clavicules sont horizontales ; le risque de compression serait
moindre. Certains sportifs de haut niveau peuvent présenter un STTB,
du fait de l’hypertrophie des muscles scalènes. C’est, notamment, le cas
de nageurs de compétition [21].
Au repos, le paquet vasculonerveux franchit sans difficulté la traversée
cervicothoracobrachiale ; il n’en va pas de même au cours des
mouvements de la ceinture scapulaire et du membre thoracique. En
abduction, la taille du canal costoclaviculaire diminue par rotation axiale
de la clavicule, venant comprimer les éléments vasculonerveux contre
la première côte. Les éléments vasculonerveux qui traversent cette
région n’ont qu’un jeu physiologique très étroit, qui est encore réduit en
cas d’anomalie musculoligamentaire ou osseuse.
Certaines études anatomiques relèvent un taux d’anomalies de 70 % [20],
mais elles ne sont pas toujours symptomatiques.
Anomalies musculoligamentaires [23]
Variations des défilés
Au niveau du défilé intercostoscalénique
L’âge joue un rôle évident, comme tendrait à le prouver la plus grande
fréquence des compressions vasculonerveuses observées chez l’adulte
jeune. La descente de la paroi antérieure du thorax, avec l’âge,
entraînerait un déplacement postérieur et inférieur de la clavicule. De
plus, la cage thoracique s’élargit transversalement à partir de la puberté,
jusqu’à l’âge adulte. On constate également une convergence des deux
mors de la pince costoclaviculaire.
Les irrégularités de perforation de la masse scalénique par le pédicule
vasculonerveux ont été évoquées plus haut. Elles expliquent les
différentes possibilités de brides ou frondes interscaléniques pouvant
passer dans le plexus brachial, au-dessus ou sous l’artère. Elles
correspondent aux brides de type IV de Roos [36].
Les faisceaux fibreux interscaléniques situés au-dessus de la première
côte peuvent être particulièrement développés et se prolonger jusqu’à la
page 3
43-029-Q
CHIRURGIE DES SYNDROMES DE COMPRESSION DU DÉFILÉ THORACOBRACHIAL
8
A
B
A
9
A. Côte cervicale unilatérale se
terminant par une néoarthrose
sur C1.
B. Pièce de résection de la première côte (1) et de la côte cervicale (2) ; (3) : néoarthrose.
B
A. Côtes cervicales bilatérales vues de face.
B. Compression et déviation du trajet artériel permanentes, dues à la côte cervicale gauche.
jonction costo- ou chondrosternale, ce qui correspond aux brides de type
VII et VIII de Roos [35]. Il s’agit, le plus souvent, d’un fort ligament
transversocostal (type III de Roos) (fig 3).
Au niveau du canal costoclaviculaire
Le pédicule vasculonerveux n’est menacé dans le compartiment externe
qu’en cas de prolongement hypertrophique du ligament coracoclaviculaire.
Au niveau du compartiment interne, ce sont les anomalies du muscle sousclavier, évoquées plus haut, qui peuvent être en cause.
Anomalies osseuses
Congénitales
De telles anomalies sont fréquentes (de l’ordre de 1 % des sujets), et sont en
cause dans 10 % des STTB. Nous en retiendrons essentiellement trois.
– Les côtes cervicales, présentes chez 0,6 à 5 ‰ des sujets, et bilatérales
dans 50 % des cas (fig 8A, 9A). On distingue deux grands types de côtes
cervicales :
– les côtes complètes, se rattachant au manubrium sternal par un
cartilage individualisé ou bien confondu avec celui de la première côte ;
– les côtes incomplètes, pouvant présenter une extrémité libre qui
flotte dans le creux sus-claviculaire ou être prolongée en avant par un
trousseau fibreux qui s’attache à la première côte.
page 4
Techniques chirurgicales
En arrière, la côte cervicale peut être unie à la septième vertèbre par
une articulation avec tête et tubercule costaux, ou par une soudure
entre la vertèbre et la côte. Dans le premier cas, la libération de la côte
se fait par désarticulation, et dans le second par section osseuse.
– Les apophysomégalies de C7, plus fréquentes (1 % des sujets) et
souvent associées à une côte cervicale.
– Les anomalies de la première côte, présentes chez environ 3 % des
sujets [14]. L’anomalie la plus fréquente est l’agénésie de l’arc antérieur
de la première côte. Elle s’accompagne d’une surélévation de la
première côte agénésique, de trousseaux fibreux qui prolongent la
première côte et, dans la moitié des cas, d’une néoarthrose C1-C2 qui
réalise un tubercule volumineux et rétrécit encore le défilé. Les
exostoses et les synostoses sont plus rares.
Seule une minorité de ces anomalies devient symptomatique ; 5 à 10 %
des côtes cervicales seraient pathogènes [24]. La mise en cause d’une
anomalie osseuse congénitale dans les STTB varie entre 10 et 20 %
selon les auteurs [14].
Pathologie claviculaire
Une étiologie claviculaire n’est retrouvée que dans 0,5 à 9 % des séries
de STTB [4, 26] . Il s’agit essentiellement des conséquences de
traumatismes, cal vicieux ou hypertrophiques, pseudarthroses après
fractures, ainsi que de luxations sternoclaviculaires ou acromioclaviculaires. Des anomalies congénitales sont plus rarement en cause :
Techniques chirurgicales
CHIRURGIE DES SYNDROMES DE COMPRESSION DU DÉFILÉ THORACOBRACHIAL
43-029-Q
pseudarthroses congénitales de la clavicule ou surélévations
congénitales de l’omoplate. Il existe aussi des causes acquises diverses,
exceptionnelles, publiées sous forme de cas isolés (tumeurs de la
clavicule, hyperostose sternocostoclaviculaire ou encore ostéomyélite
de la clavicule).
Post-traumatique
Le rôle favorisant ou déclenchant d’un traumatisme dans la survenue
d’un STTB est signalé dans de nombreux travaux ; il varie entre 16 et
92 % des cas [6, 16, 18, 36, 38]. Les traumatismes minimes mais répétés
peuvent avoir les mêmes conséquences [43]. En dehors des lésions
osseuses envisagées plus haut, on peut retenir le rôle des lésions
musculaires (étirement, déchirure, hématome, désinsertion) évoluant
vers une fibrose cicatricielle. Le délai d’apparition de la
symptomatologie peut toutefois être suffisamment long pour que la
relation de causalité soit douteuse. Il se pose alors des problèmes
médicolégaux et thérapeutiques qui doivent rendre prudent dans la
conduite thérapeutique.
De nombreuses formations anatomiques sont ainsi susceptibles de
provoquer des compressions vasculonerveuses. Les syndromes de la
traversée cervicothoracobrachiale apparaissent dès lors trop complexes pour
être attribués à la seule première côte. Plutôt que de procéder
systématiquement à une résection costale, il faudrait tenter de définir, par
des explorations dynamiques, les éléments anatomiques compressifs
responsables de la symptomatologie, et proposer une chirurgie « à la carte ».
Données diagnostiques
Le diagnostic de STTB repose essentiellement sur l’interrogatoire et
l’examen clinique. La compression des structures vasculonerveuses
provoque, le plus souvent, une symptomatologie neurologique. Ce
syndrome comporte alors des douleurs et des paresthésies du cou, de
l’épaule, du bras, de la main, de la paroi antérieure du thorax et de la
région interscapulothoracique. Il s’agit, souvent, de signes bilatéraux. Il
n’y a pas de symptomatologie tronculaire à la différence des
compressions du nerf ulnaire, au coude, ou du nerf médian, au poignet,
qui doivent être recherchées. La symptomatologie dépend du niveau de
la compression radiculaire. On distingue les STTB hauts impliquant les
racines C5, C6 et C7, et les STTB bas concernant plutôt les racines C7,
C8 et T1. Des céphalées sont fréquemment décrites, dues à la contracture
secondaire des muscles trapèze et paravertébraux [42]. Les symptômes
sont déclenchés par des mouvements d’abduction et d’antépulsion
prolongés, ou la position allongée.
L’examen clinique cherche des troubles sensitifs ou une amyotrophie,
en fait rares [42]. La palpation de la fosse sus-claviculaire et du triangle
interscalénique peut déclencher la douleur.
Un STTB est plus rarement le fait d’une compression artérielle qui,
localisée et répétée, peut entraîner une sténose et parfois une dilatation
poststénotique. L’altération de la paroi artérielle provoque l’apparition
de microembolies digitales, d’embolies tronculaires graves ou une
thrombose de l’artère sous-clavière [5, 13]. Les manifestations cliniques
comprennent la claudication intermittente du membre supérieur, les
douleurs de repos de la main et des doigts, la pâleur et le refroidissement
de ceux-ci, la présence d’hémorragie sous les ongles, d’ulcères ou de
gangrènes digitaux. Ces signes d’ischémie évoluée avec nécrose
tissulaire sont, presque toujours, la conséquence d’épisodes emboliques
multiples qui peuvent être évités par un diagnostic précoce. Moins de
5 % des ischémies aiguës du membre supérieur sont dues à un STTB [1].
Tous ces symptômes peuvent s’associer à un phénomène de Raynaud
unilatéral, mais sans qu’un lien de cause à effet soit démontré [30]. Dans
quelques cas, les symptômes du STTB peuvent avoir évolué jusqu’à
ressembler à ceux d’une causalgie (dystrophie sympathique réflexe)
avec vasospasme, œdème diffus et hypersensibilité [42].
Un STTB avec compression veineuse peut provoquer un œdème, une
cyanose, une fatigabilité rapide de l’avant-bras à l’effort, en absence de
toute lésion artérielle et des douleurs du membre supérieur. Une
compression chronique peut aboutir à une thrombose, avec
d’éventuelles séquelles postphlébitiques. Ces différents syndromes
peuvent être associés chez un même sujet.
L’examen clinique cherche à reproduire le phénomène de compression
par les manœuvres classiques (Kalb, Roth, Wright...). La manœuvre
10
Sténose artérielle intermittente objectivée en abduction du bras.
d’Adson (abolition du pouls radial en inspiration forcée et rotation
cervicale opposée) met en évidence une compression artérielle. Elle est
souvent positive en cas de STTB neurologique. La manœuvre du
« chandelier » a la meilleure valeur diagnostique. Il est demandé au
malade d’ouvrir et de fermer les poings de façon répétée, les bras en
position « haut-les-mains ». Le test, pour être positif, doit reproduire
rapidement la symptomatologie. Les examens doppler et
échographique, artériel et veineux, complètent cet examen.
Aucun examen paraclinique ou d’imagerie ne peut se substituer au
diagnostic clinique de STTB.
Les radiographies standards du rachis cervical et du thorax recherchent
d’éventuelles anomalies osseuses (fig 8A, 9A).
L’angiographie en abduction permet de faire le diagnostic de
compression, mais elle est surtout réservée à l’exploration des
complications artérielles (sténoses, anévrisme) (fig 9B, 10).
La réalisation d’une tomodensitométrie (TDM) cervicale ou d’une
imagerie par résonance magnétique (IRM) est généralement peu utile en
cas de STTB neurologique. Ces examens permettent le diagnostic
différentiel de discopathie, de cervicarthrose, voire de lésion du système
nerveux central. L’étude comparative des images du scanner spiralé et
des constatations anatomiques montre une bonne corrélation
anatomoradiologique. Mais un aspect de compression n’est pas toujours
pathologique [25].
La phlébographie dynamique est utile dans le bilan d’une compression
veineuse. Elle peut montrer des images de compression ou de sténose
avec dilatation d’amont. L’échographie endovasculaire donne des
résultats comparables à ceux de la phlébographie, dans l’exploration des
STTB veineux [9].
Les examens électrophysiologiques représentent une aide au diagnostic en
montrant des signes positifs (atteinte motrice des petits muscles de la main,
diminution du potentiel sensitif distal du cubital) et en éliminant des
diagnostics différentiels (syndrome du canal carpien ou de compression du
nerf cubital au coude). Il en est de même pour les potentiels évoqués
somatosensitifs, qui permettent de mieux sélectionner les malades candidats
à une intervention chirurgicale et d’en apprécier plus objectivement les
résultats. La principale limite des examens électrophysiologiques est de
présenter un taux élevé de faux négatifs [22].
Une large part doit être accordée au bilan psychologique si le diagnostic
est douteux et les examens électrophysiologiques normaux [33].
Voies d’abord de la première côte
(fig 11)
Résection de la première côte par voie axillaire
(technique de Roos) [10, 42]
Instrumentation
La résection de la première côte par voie axillaire nécessite une
instrumentation spécifique (fig 12). Elle permet l’exposition de tous les
éléments neurovasculaires dans un tunnel étayé par des valves, et au
fond duquel la première côte est libérée et sectionnée à chacune de ses
extrémités.
page 5
43-029-Q
CHIRURGIE DES SYNDROMES DE COMPRESSION DU DÉFILÉ THORACOBRACHIAL
A
B
Techniques chirurgicales
12 Instrumentation pour la résection costale par voie axillaire. 1. Valves de
Kocher ou Hosel ; 2, 3, 4. costotomes ; 5. costotome de Roos ; 6. écarteur à racine
de Roos ; 7. pince gouge.
45°
C
D
13
Installation du malade pour une voie axillaire.
Exposition
11
Voies d’abord de la première
côte.
E
A. Voie axillaire.
B. Voie sus-claviculaire.
C. Voie sous-claviculaire.
D. Voie postérieure extrapleurale.
E. Voie antérolatérale transpleurale.
Installation (fig 13)
Le patient est immobilisé en décubitus latéral à 90° ou en position dite
intermédiaire, entre 45 et 60°, selon la corpulence du sujet. Le travail à
l’aide d’une lampe frontale ou de valves éclairantes est plus aisé qu’avec
un éclairage par un scialytique plafonnier. Tout le membre supérieur est
préparé pour être libre et permettre des manœuvres de traction qui
ouvrent l’angle entre le paquet vasculonerveux du bras et la première
côte. Pour une intervention à droite, l’aide en premier est placé à la droite
de l’opérateur, l’aide en second à gauche. Le rôle de ce deuxième aide
est important ; il exerce une traction sur le membre, qui doit être
progressive pour ne pas provoquer des lésions d’étirement du plexus
brachial. Cette traction est interrompue toutes les 5 minutes.
Incision cutanée
Elle est faite à la limite inférieure de la pilosité axillaire, soit
transversalement, soit légèrement arciforme, à concavité supérieure.
L’incision est arrêtée, en avant, sur la saillie du muscle grand pectoral
et, en arrière, sur celle du bord externe du muscle grand dorsal. Une
incision cutanée plus longue expose à la section des fibres musculaires
et à des séquelles fonctionnelles et esthétiques sans améliorer pour
autant la visibilité.
page 6
La graisse sous-cutanée est traversée à l’aplomb jusqu’au fascia
exothoracique. La dissection s’arrête sur le plan ostéomusculaire de la
paroi thoracique avant le muscle grand dentelé (serratus anterior). La
dissection est ensuite dirigée vers la première côte, après une
progression de 15 à 20 cm. Le décollement se fait au doigt ou au tampon
monté, dans le plan situé entre le fascia exothoracique et la face
superficielle du muscle grand dentelé. Ce décollement est oblique, en
haut et en avant, en arrière de la face postérieure du muscle grand
pectoral (pectoral latéral). L’exposition est faite par une ou plusieurs
valves de Kocher de différentes longueurs. La plus longue valve est
positionnée dans l’angle, entre les faces supérieure et antérieure de la
cavité. Une autre valve écarte le muscle grand pectoral et son nerf
inférieur, ainsi que l’artère mammaire externe (thoracique externe) qui
ne sont habituellement pas vus. En revanche, le nerf perforant est
habituellement situé sur le trajet de la dissection. C’est une anastomose
entre le deuxième nerf intercostal et le nerf accessoire du brachial cutané
interne (nerf cutané médial du bras). Sa section provoque une anesthésie
de la face interne du bras, le plus souvent définitive. Sa contusion lors
des manœuvres d’écartement est source de séquelles temporaires à type
d’anesthésie vraie, de dysesthésies ou d’hypoesthésie.
Il faut éviter de faire une dissection ayant un trajet postérieur, suivant la
face antérieure du muscle grand dorsal (thoracodorsal). Le danger serait
alors de blesser le nerf du muscle grand dorsal ou l’artère
thoracodorsale. Ce trajet se prolonge sur le nerf du muscle grand dentelé
dont le traumatisme a pour conséquence un décollement de l’omoplate
de la paroi thoracique (scapula alatae).
Libération de la première côte (fig 14)
La traction du membre supérieur est indispensable pour décoller le
paquet vasculonerveux qui apparaît au-dessus du bord interne de la
première côte. L’artère est d’abord contrôlée sur lacs, puis libérée de ses
Techniques chirurgicales
CHIRURGIE DES SYNDROMES DE COMPRESSION DU DÉFILÉ THORACOBRACHIAL
14 Voie axillaire : exposition du défilé interscalénique avant section des muscles
scalènes. 1. Défilé interscalénique ; 2. artère axillaire ; 3. plexus brachial ; 4. veine
axillaire ; 5. scalène antérieur ; 6. scalène moyen ; 7. première côte.
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15 Voie axillaire : exposition du pédicule artérionerveux après la résection costale. 1. Dôme pleural ; 2. artère axillaire ; 3. veine axillaire ; 4. plexus brachial.
adhérences avec les muscles scalènes antérieur, moyen, et avec la
première côte. Les derniers centimètres du muscle scalène antérieur sont
disséqués. Le muscle est ensuite sectionné et un segment musculaire est
réséqué [42], ainsi que d’éventuelles attaches avec les éléments de
voisinage.
La même manœuvre est réalisée pour le muscle scalène moyen.
L’utilisation du rétracteur à racine de Roos permet de refouler la racine
C8/T1. Les fibres musculaires des muscles intercostaux sont sectionnées
en extrapériosté, sur toute la longueur du bord externe de la première
côte ; la plèvre est décollée sous la face inférieure de la côte.
Section costale (fig 15)
Elle est habituellement commencée par la section antérieure au niveau
de la jonction chondrocostale à l’aide d’un costotome droit de Roos, ou
angulé à 45° de Maurer. L’arc antérieur de la côte est saisi à l’aide d’une
pince type Museux, puis soulevée et latéralisée. La racine C8/T1 est
réclinée et protégée. Un costotome à 90° est descendu le plus loin
possible vers l’articulation costovertébrale. La résection doit être la plus
complète possible. L’idéal est de réséquer l’arc postérieur de la première
côte en totalité, jusqu’à l’articulation costovertébrale. La clef de la
désarticulation est la section de la capsule de l’articulation
transversocostale. Celle-ci peut être obtenue en poussant une rugine
échancrée de Semb le long du bord externe de la première côte dans sa
partie postérieure, tout en maintenant fermement l’arc postérieur de la
côte. Il est ensuite relativement aisé de pratiquer la désarticulation
costovertébrale, en exerçant sur l’arc postérieur de la côte des
mouvements combinés de rotation et de traction.
Les extrémités costales restantes doivent être parfaitement nettes. Les
esquilles osseuses sont réséquées à la pince gouge. L’artère et de la
racine C8/T1 doivent être parfaitement libres. D’éventuelles brides
fibreuses et des faisceaux musculaires accessoires (scalène minor ou
minimus) seraient sectionnés.
Une petite brèche pleurale ne nécessite qu’une simple hyperpression
d’insufflation pulmonaire, permettant le retour du poumon à la paroi.
Une brèche plus importante peut amener à poser un drain thoracique
n°16 ou 18 laissé en aspiration quelques heures.
Fermeture et suites
Un drain aspiratif de Redon est habituellement laissé en place pendant
24 ou 48 heures. Le tissu cellulaire sous-cutané est rapproché par
quelques points de fil résorbable. La peau est refermée par un surjet
sous-cutané.
Cette voie d’abord est peu algique. Le lever est précoce. La gêne
respiratoire est nulle. Le recours à une rééducation de l’épaule n’est pas
systématique [42]. La reprise du travail varie, selon la profession du sujet,
entre 3 et 4 semaines.
16
Sympathectomie dorsale par voie axillaire.
Avantages et inconvénients
Cette voie d’abord permet un certain nombre de gestes associés :
ténotomie du muscle sous-clavier, résection d’une côte cervicale,
sympathectomie dorsale supérieure (fig 16), gestes vasculaires
complémentaires ou ténolyse du petit pectoral. Il faut cependant
souligner la relative difficulté de l’intervention pour un chirurgien peu
habitué à cette voie. Cette difficulté est majorée chez le sujet obèse ou
musclé, ainsi qu’en présence d’une néoarthrose entre C1 et C2, ou entre
une côte cervicale longue et la première côte. La résection d’une côte
cervicale est parfois délicate, mais elle impose rarement le recours à une
voie sus-claviculaire complémentaire pour éviter de laisser en place un
moignon costal résiduel. Il faut enfin noter la difficulté, sinon
l’impossibilité, de réaliser un geste vasculaire élaboré par cette voie.
Voie sus-claviculaire [38]
Installation
Après intubation trachéale, le malade est installé en décubitus dorsal,
avec un billot sous les épaules ou une alèse roulée. Il faut éviter de placer
le cou en hyperextension, et plus encore, d’y associer une rotation
controlatérale de la tête. Cette position met en effet en tension les racines
plexiques pendant toute la durée de l’intervention. La tête doit donc être
laissée en position indifférente, et pouvoir être mobilisée, le cas échéant,
pour soulager une tension exercée temporairement sur les racines. Le
membre supérieur peut être inclus dans le champ pour mobiliser le bras,
afin d’apprécier la libération des éléments nerveux et de l’opportunité
de la résection complémentaire de la première côte [43].
page 7
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CHIRURGIE DES SYNDROMES DE COMPRESSION DU DÉFILÉ THORACOBRACHIAL
Techniques chirurgicales
Incision cutanée
L’incision est faite 2 cm au-dessus de la clavicule ; elle débute à 1 cm
de la ligne médiane et est longue de 8 à 10 cm. Son tracé doit être fait au
minimum 2 cm au-dessus de la clavicule, car la cicatrice a tendance à
migrer vers le bas de façon inesthétique. L’idéal est de repérer, sur le
cou en flexion, le pli situé le plus bas (celui qui est choisi pour la
chirurgie thyroïdienne) et d’inciser en regard sur une longueur de 6 à
8 cm.
Exposition (fig 17)
Les berges cutanées sont disséquées sous le muscle peaucier. Le bon
plan de clivage est situé immédiatement à la surface du muscle
sternocléidomastoïdien (SCM). Il est possible de sectionner le chef
claviculaire du SCM, mais cela n’est habituellement pas nécessaire. La
graisse préscalénique est sectionnée en regard du muscle scalène
antérieur. Le nerf phrénique, qui siège à la surface du scalène antérieur,
est disséqué avec précaution, puis récliné. Le muscle scalène antérieur
est alors disséqué et réséqué au voisinage de son insertion sur la première
côte. En haut, la dissection doit être menée jusqu’à l’insertion du muscle
sur l’apophyse transverse de la sixième vertèbre cervicale. Les racines
C5, C6 et C7 sont libérées. Le muscle scalène moyen, qui est situé en
arrière, est ensuite réséqué progressivement en respectant le nerf du
grand dentelé. Si une côte cervicale ou un ligament congénital sont
présents, ils siègent généralement à ce niveau ; ils sont donc excisés à ce
moment avec le muscle.
17 Voie sus-claviculaire : exposition du pédicule nerveux et artériel après section
du muscle scalène antérieur (1), scalène moyen (2), artère sous-clavière (3), plexus
brachial (4), nerf phrénique (5).
Libération de la première côte (fig 18)
La première côte est disséquée en extrapériosté. Le plexus brachial est
récliné, puis le col de la côte est sectionné. Après avoir soulevé
l’extrémité de la côte, les muscles intercostaux sont désinsérés au bord
externe de la côte, à la rugine, et la plèvre libérée à sa face profonde.
L’extrémité antérieure de la côte est ensuite libérée, puis sectionnée. Les
esquilles osseuses au niveau des extrémités costales restantes sont
réséquées à la pince gouge.
Libération d’une côte cervicale
La côte cervicale doit être identifiée, ainsi qu’un éventuel trousseau
fibreux. Les racines plexiques sont mises sur lacs pour les mobiliser
prudemment et permettre la dissection rétrograde de la côte cervicale. Il
est souvent nécessaire, et plus aisé, de séparer le plexus en deux
contingents, supérieur et inférieur, alternativement écartés pour faciliter
la dissection. Le trousseau fibreux est ensuite réséqué ainsi que la côte
jusqu’à sa base ou son éventuelle articulation.
Fermeture et suites
Un drain aspiratif est laissé en place en arrière du plexus, la graisse
préscalénique est remise en place et l’incision est fermée en utilisant des
fils résorbables, pour le plan sous-cutané, et un surjet intradermique.
Avantages et inconvénients
Cette voie d’abord est plus facile à réaliser que la voie axillaire, surtout
pour un opérateur débutant. L’exposition des racines nerveuses, de
l’artère sous-clavière et d’une éventuelle côte cervicale est meilleure que
par voie axillaire [8]. En revanche, la résection de la partie antérieure de
la première côte est plus difficile. La voie sus-claviculaire doit donc être
évitée dans les cas où la symptomatologie veineuse est prédominante.
Une sympathectomie cervicale est possible par cette voie [43]. Les
traumatismes du nerf phrénique, de même que les plaies veineuses et
celles du canal thoracique, sont plus fréquents par une voie susclaviculaire que par une voie axillaire [38].
Voies d’abord thoraciques [41]
Voie antérieure sous-claviculaire
Installation
Le malade est en décubitus dorsal, la tête tournée vers le côté opposé, le
bras en abduction avec surélévation de l’épaule par un billot. Cette
position ouvre l’espace cléidocostal.
page 8
18 Voie sus-claviculaire : exposition du pédicule nerveux et artériel après section
du muscle scalène antérieur (1) et du muscle scalène moyen (2), artère sousclavière (3), plexus brachial (4), nerf phrénique (5), première côte (6).
Incision
L’incision horizontale, sous-claviculaire, débute dans la dépression
située sous l’extrémité sternale de la clavicule et se termine plus ou
moins loin vers le sillon deltopectoral, selon l’importance de la
musculature du sujet. Les fibres du grand pectoral sont dissociées et le
petit pectoral sectionné. Après clivage du tissu celluleux précostal, un
écarteur récline les vaisseaux et le plexus brachial en dehors et en haut.
Exposition et résection costale (fig 19)
Les fibres du muscle grand pectoral sont réclinées et le muscle sousclavier sectionné. Les muscles intercostaux du premier espace sont
ensuite désinsérés jusqu’à l’articulation chondrosternale.
Après section des ligaments costoclaviculaires, la face profonde de
l’extrémité antérieure de la côte est libérée, ainsi que son bord supérieur.
La section est faite au niveau du cartilage costal. L’extrémité de la côte
est mobilisée pour permettre la libération de sa face inférieure sous
contrôle de la vue. L’abaissement de la côte éloigne les vaisseaux sousclaviers, en mettant en tension les muscles scalènes qui sont ensuite
sectionnés. La libération de la côte est poursuivie, en la tirant en haut et
en dedans, jusqu’au sommet de l’apophyse transverse, tout en
protégeant la première racine dorsale. La côte est ensuite sectionnée à
ce niveau.
La fermeture est faite en rapprochant le muscle grand dorsal sur un
drainage aspiratif.
Techniques chirurgicales
CHIRURGIE DES SYNDROMES DE COMPRESSION DU DÉFILÉ THORACOBRACHIAL
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19 Voie d’abord sous-claviculaire. 1. Pédicule artériel et nerveux ; 2. muscle
scalène antérieur ; 3. muscle scalène moyen ; 4. première côte ; 5. clavicule.
Gestes associés
Une apicolyse peut être réalisée par cette voie, permettant une
sympathectomie thoracique. Une restauration artérielle est possible en
poursuivant l’incision dans le sillon deltopectoral. Une thrombectomie
veineuse est aisément réalisée, la veine étant directement exposée et
protégée par l’écarteur durant la libération et la résection costale.
Avantages et inconvénients
Cette voie permet une exérèse facile de l’arc antérieur de la première
côte, mais il n’en va pas de même pour l’arc postérieur, ou une
éventuelle côte cervicale, ou encore pour une apophysomégalie
transverse. Elle permet un geste veineux, ainsi qu’un geste artériel et une
sympathectomie thoracique.
C’est une alternative à la voie axillaire dans les formes à
symptomatologie veineuse.
Voie postérieure extrapleurale
Installation
Le malade est installé en décubitus latéral incliné en avant, avec un
billot, de façon à dégager et élargir au maximum l’espace
interscapulovertébral.
Incision et exposition (fig 20)
L’incision est parallèle au bord spinal de l’omoplate et à la ligne des
apophyses épineuses. Elle débute à la hauteur de l’épine de l’omoplate
et ne dépasse pas la pointe. Les muscles trapèze et rhomboïde sont
sectionnés près de la ligne des épineuses, afin de respecter le nerf spinal
et l’artère scapulaire postérieure. On découvre ainsi un plan celluleux
facile à cliver, qui permet de glisser un écarteur, de manière à soulever
l’omoplate en dehors et en haut.
La côte la plus haute que l’on voit et que l’on palpe est la deuxième côte.
Elle est repérée par l’insertion du grand dentelé sur son bord externe et
sa face supérieure. La section des premières digitations supérieures du
grand dentelé accentue l’écartement de l’omoplate, exposant la partie
haute de la cage thoracique. La première côte est masquée par différentes
formations musculaires : scalène postérieur, masse latérovertébrale,
faisceau supérieur du grand dentelé. Elle est incluse à l’intérieur de l’arc
de la deuxième côte, profondément enfouie. Selon la conformation du
thorax, la résection préalable de la deuxième côte peut être nécessaire.
Résection costale
La dissection de la côte est menée successivement le long de son bord
externe et à sa face inférieure, depuis le col jusqu’au cartilage. La face
supérieure est libérée prudemment en commençant par l’extrémité
postérieure de la côte sur 2 ou 3 cm près du col. La côte est sectionnée en
arrière à la pointe de l’apophyse transverse. L’extrémité de l’arc costal
est abaissée pour éloigner le paquet vasculonerveux. La face supérieure
et le bord interne sont ruginés et les muscles scalènes sectionnés. Le
ligament costoclaviculaire est désinséré en avant, puis la côte est
sectionnée à la jonction chondrocostale.
20
Voie postérieure extrapleurale : abord postérieur de la première côte (1).
Variantes
La voie postérolatérale de Johnson (voie interscapulovertébrale
prolongée en bas vers l’aisselle) associe une section du muscle grand
dorsal et une résection sous-périostée de la côte. Après ablation de la
côte, un clivage est effectué en avant, entre la veine sous-clavière et le lit
périosté qui est plus épais à ce niveau. Le périoste et les attaches des
muscles scalènes sont ensuite mobilisés vers le bas et réséqués.
Gestes associés
L’excellente exposition des racines nerveuses permet une neurolyse
complète. Il est également facile de pratiquer une résection complète de
la première côte, d’une côte cervicale, d’anomalies osseuses ainsi que
des tractus fibromusculaires ou ligamentaires. Une sympathectomie
dorsale peut également être réalisée par cette voie en sectionnant un
court segment postérieur de la deuxième côte.
Avantages et inconvénients
Cette voie permet une exérèse facile de l’arc postérieur de la première
côte, d’une côte cervicale ou d’une apophysomégalie, moins aisée de
l’arc antérieur. Un geste vasculaire est difficilement réalisable. Le
préjudice esthétique est minime.
Voie antérolatérale transpleurale
Installation et incision
Le malade est installé en décubitus latéral, légèrement dorsal, avec le
membre supérieur suspendu au-dessus de la tête.
L’incision cutanée se fait sous le bord inférieur du muscle grand pectoral
chez l’homme. Elle est latéro- et sous-mammaire chez la femme. La
thoracotomie antérolatérale, courte, s’effectue dans le troisième espace
intercostal, au bord supérieur de la quatrième côte.
Exposition (fig 21A)
Le poumon est récliné vers le bas. La plèvre du dôme pleural, qui
masque le pédicule sous-clavier, est incisée sur la côte, dans sa moitié
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CHIRURGIE DES SYNDROMES DE COMPRESSION DU DÉFILÉ THORACOBRACHIAL
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A
antérieure, en débordant à peine sur le cartilage. En arrière, l’incision
pleurale descend vers le col de la deuxième côte. À partir de cette
incision pleurale, le plan extrapleural est ouvert en progressant de
manière concentrique jusqu’à 1 cm du bord inscrit, en avant et jusqu’au
col de la première côte en arrière. Ce geste éloigne la veine, libère la
racine T1 de l’arc postérieur et met en évidence la portion
intrascalénique de l’artère.
Résection costale (fig 21B)
Le tiers postérieur du bord inférieur de la côte est dégagé en repoussant,
vers le haut, la lèvre supérieure de l’incision pleurale. Il faut rester au
contact de l’os, entre la racine et la plèvre, en refoulant T1 et C8. Le
premier espace intercostal est ouvert après avoir sectionné l’insertion du
muscle scalène moyen. La section costale est effectuée en prenant soin
de refouler les racines nerveuses vers l’avant. La côte est abaissée pour
mettre en tension le scalène antérieur et écarter l’artère vers le haut. Le
scalène est alors sectionné. L’incision est poursuivie vers l’avant pour
dégager la veine et la refouler, au tampon monté, à la face supérieure de
la côte. Le costotome est poussé en avant pour sectionner la côte au
niveau du cartilage. Le fragment postérieur est recoupé au contact de
l’apophyse transverse. Une partie des muscles scalènes est réséquée, et
l’on réalise une libération de l’artère et de la veine, ainsi qu’une
exploration complète à la recherche d’anomalies fibroligamentaires.
Variante technique
La résection peut être menée d’avant en arrière. Le geste clé reste
l’abaissement de la côte et la mise en tension du scalène antérieur. Le
bord supéro-interne de l’arc costal antérieur est libéré au tampon monté,
refoulant la veine sous-clavière. La côte sectionnée au niveau du
cartilage est ensuite abaissée et le scalène antérieur sectionné après avoir
écarté l’artère. Le segment postérieur de la côte est isolé, puis sectionné
après avoir récliné les racines vers le haut.
Gestes associés
La résection d’une côte cervicale est possible par cette voie, ainsi que
celle d’une première côte anormale ou celle d’anomalies
fibromusculaires.
Une réparation de l’artère sous-clavière est possible. La
sympathectomie thoracique est facilement réalisable, l’accès direct
permettant l’exérèse des premiers ganglions, en respectant le ganglion
stellaire pour éviter un syndrome de Claude Bernard-Horner.
Avantages et inconvénients
La voie transpleurale est techniquement simple et rapide. L’ouverture
de la plèvre n’entraîne aucun risque supplémentaire, si ce n’est sa
contre-indication, en cas de séquelles pleurales ou de lésions
pulmonaires anciennes du sommet. L’ablation complète de l’extrémité
postérieure est moins aisée, mais l’exérèse d’une côte cervicale ou
d’anomalies est possible. La cicatrice est peu visible, aussi bien chez
l’homme que chez la femme.
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B
Techniques chirurgicales
Voie antérolatérale transpleurale.
A. Avant résection de la première côte
(1).
B. Après résection de la première côte,
pédicule artériel et nerveux (1).
Indications
L’indication d’une résection de la première côte ne doit pas être
univoque, mais choisie en fonction de deux facteurs : la
symptomatologie prédominante (artérielle, veineuse ou nerveuse) et les
gestes qui doivent y être associés (résection de côte cervicale ou
d’apophysomégalie transverse, ligament fibromusculaire cervical,
désobstruction artérielle ou veineuse sous-clavière, restauration
artérielle pour oblitération ou anévrysme, sympathectomie thoracique).
De façon générale, l’intervention chirurgicale n’est décidée qu’après
échec d’une gymnastique rééducative de la ceinture scapulaire menée
pendant 3 à 6 mois. Cette physiothérapie, proposée initialement par Peet,
a pour but de développer les muscles « ouvrant » la traversée
thoracobrachiale (faisceaux supérieur et moyen du trapèze, élévateurs
de l’épaule, sternocléidomastoïdien et rhomboïde) [2].
Les indications peuvent se résumer de plusieurs façons.
– Pour les formes nerveuses, et lorsqu’il existe des anomalies
ostéoligamentaires : voie sus-claviculaire [19]. La voie postérieure peut
être envisagée dans les récidives des manifestations nerveuses et dans
les échecs d’interventions incomplètes menées par d’autres abords.
– Pour les formes vasculaires non compliquées (compression veineuse
et/ou artérielle sans lésions pariétales) : voie axillaire avec résection de
l’aponévrose du muscle sous-clavier et de son tendon.
– Pour les formes veineuses compliquées : si la thrombose veineuse
aiguë sous-clavière est vue précocement, elle peut être traitée par
thrombectomie ou fibrinolyse. Dans les formes chroniques, la
reconstitution directe de la veine sous-clavière est décevante [7]. La
résection costale peut être menée par voie antérieure sous-claviculaire,
de préférence à une voie axillaire, en raison du risque nerveux iatrogène
moindre (traumatisme des racines, élongation plexique), surtout chez le
sujet obèse ou musclé. Cette voie est particulièrement utile en cas de
récidive veineuse après résection costale axillaire [27]. Il est possible
d’utiliser une voie combinée sus- et sous-claviculaire [43]. Une éventuelle
sténose veineuse résiduelle peut être traitée par angioplastie
transluminale après la décompression chirurgicale. La question se pose
également de l’indication opératoire préventive controlatérale, qui serait
justifiée s’il existe des signes de compression veineuse [32].
– Pour les formes artérielles compliquées :
– anévrysme, ulcération, thrombose : la voie sus-claviculaire est la
plus utilisée [13] pour faire la résection costale et la réparation
vasculaire. Une courte voie sous-claviculaire peut être nécessaire,
selon l’étendue de la lésion artérielle [43]. La zone pathologique est
réséquée et la continuité artérielle est rétablie en interposant un
greffon saphène ou prothétique, voire un greffon autogène artériel [43] ;
– lésions distales (embolies, troubles vasomoteurs) : les tentatives
d’embolectomies tardives et les pontages distaux sur les artères de
l’avant-bras donnent des résultats décevants. On peut alors avoir
recours à une sympathectomie dorsale supérieure. La résection
costale est menée par une voie axillaire ou thoracique transpleurale.
La question se pose également de savoir s’il faut toujours réséquer la
première côte [3, 13]. La résection est systématique en cas d’anomalie de
la première côte, de défilé osseux étroit, de sténose de la veine sousclavière, de récidive après scalénectomie ou après résection isolée d’une
Techniques chirurgicales
CHIRURGIE DES SYNDROMES DE COMPRESSION DU DÉFILÉ THORACOBRACHIAL
côte cervicale. La conservation de la première côte est possible en cas
de compression plexique haute isolée [17], de compression par le muscle
petit pectoral, ou encore d’une pathologie claviculaire imposant une
cléidectomie.
La discussion reste ouverte dans deux cas :
– en présence d’une côte cervicale, la conservation de la première côte
peut être systématique, avec un taux de récidive qui paraît faible [3], ou
sélective, si la côte cervicale est très volumineuse et si le défilé est bien
libéré après son exérèse. La résection de la première côte peut aussi être
systématique, surtout en cas de geste de revascularisation artérielle, pour
prévenir une récidive qui serait difficile à traiter ;
– en présence d’une compression plexique basse sans anomalie
osseuse, trois attitudes sont possibles :
– une attitude minimaliste, qui consiste à effectuer une scalénectomie
et une résection des éléments compressifs (avec un risque de récidive
de 15 à 20 %). Cette attitude peut être systématique [12] ou réservée
aux syndromes post-traumatiques qui répondent positivement aux
tests d’infiltration du scalène antérieur [38] ;
– une attitude maximaliste, qui comporte la résection systématique
de la première côte et des scalènes ;
– une attitude intermédiaire, qui préconise la résection de la première
côte, avec résection d ’une partie des scalènes par voie axillaire, en
cas de compression plexique basse. La résection de la première côte
avec scalénectomie est réservée aux compressions plexiques diffuses,
en utilisant une double voie sus-claviculaire et axillaire [3].
Seule une étude randomisée permettrait de dégager les meilleures
indications opératoires, mais sa réalisation se heurtera à l’absence de
tests diagnostiques objectifs et à l’influence de la technique sur les
résultats.
Complications
Cette chirurgie, réputée bénigne, peut être source de complications
mineures comme des dysesthésies transitoires, des brèches pleurales ou
des hémothorax qui peuvent nécessiter un drainage. Mais il a aussi été
rapporté des complications graves, qu’il s’agisse de plaies veineuses,
artérielles, ou de traumatismes du plexus brachial, du nerf du grand
dentelé ou encore du nerf phrénique. Il est à noter que les complications
vasculaires sont plus fréquentes par la voie axillaire. Il peut être
nécessaire, en cas de plaie artérielle impossible à contrôler rapidement,
de clamper l’artère en amont par une voie sus-claviculaire. La voie susclaviculaire expose davantage à des blessures de la veine sous-clavière,
mal exposée par cette voie, ou du nerf phrénique [6, 26].
Résultat
Les résultats chirurgicaux sont habituellement bons pour des indications
de compression artérielle ou veineuse. Une amélioration est apportée
dans 70 à 90 % des cas [19] . Il n’en va pas de même lorsque la
symptomatologie initiale prédominante est neurologique [31] . Des
facteurs psychopathologiques influencent l’appréciation des résultats
chirurgicaux. Il est donc important de bien sélectionner les malades
avant de proposer une intervention chirurgicale.
Récidives
Elles posent de difficiles problèmes diagnostiques et thérapeutiques.
Leur fréquence, diversement appréciée, serait de l’ordre de 10 % des
cas [36]. Leur délai d’apparition varie de quelques semaines à plusieurs
années après l’intervention. Les signes peuvent survenir à la suite d’un
facteur déclenchant, tel un traumatisme de l’épaule, du cou ou du bras.
Comme lors du bilan initial, il faut rechercher les diagnostics
différentiels possibles : compression des nerfs ulnaire ou médian,
pathologies cervicarthrosiques, lésions du système nerveux central,
voire un angor ou un syndrome de Pancoast et Tobias.
Diagnostic
Deux formes cliniques de récidive neurologique (haute et basse)
prédominent. La récidive plexique haute intéresse les racines
supérieures (C5, C6 et C7) du plexus brachial. Elle est due à la
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persistance des adhérences ou à une fibrose cicatricielle solidarisant le
muscle scalène antérieur au fascia endothoracique, à l’artère sousclavière ou au plexus brachial. Elle entraîne des douleurs des régions
cervicale latérale, interscapulohumérale, sus-scapulaire, de la partie
externe de l’épaule et du bras dans le territoire du nerf radial, irradiant
parfois vers l’oreille.
La récidive plexique basse concerne les racines plexiques inférieures
(C8 et T1) et est due à la formation d’une fibrose cicatricielle sur le fascia
endothoracique du dôme pleural. Elle s’accompagne également de
douleurs de la région interscapulovertébrale, du creux sus-claviculaire,
du creux axillaire, de paresthésies dans le territoire du nerf ulnaire.
Certaines récidives associent les deux types d’atteinte plexique.
La majeure partie de l’innervation sympathique du membre supérieur
chemine avec le nerf ulnaire, ce qui explique l’existence de causalgies
associant des douleurs à type de brûlure à une hypersensibilité cutanée
du creux axillaire, de la partie interne du bras et de la main. Certains
malades présentent un aspect de neuroalgodystrophie du membre
supérieur.
La récidive postopératoire n’intéresse qu’exceptionnellement l’artère et
la veine sous-clavière, si l’obstacle anatomique a été totalement levé lors
de la première intervention.
L’examen clinique retrouve une douleur à la palpation du creux susclaviculaire, ou à la pression du nerf ulnaire. Il existe des parésies du
triceps et des muscles interosseux dans les formes basses, et des muscles
deltoïde, biceps et extenseurs du poignet dans les formes hautes.
L’artériographie et la phlébographie, de même que l’exploration
échodoppler des vaisseaux sus-claviculaires, sont le plus souvent
inutiles. Les explorations électromyographiques n’apportent que peu
d’arguments diagnostiques. En revanche, les radiographies du rachis
cervical, le scanner ou l’IRM peuvent retrouver un moignon postérieur
costal proéminent ou une côte surnuméraire insuffisamment réséquée.
Un résidu osseux ou une fibrose existent dans 40 % des cas de
récidive [8], mais sans relation de cause à effet clinique évidente. Une
résection insuffisante du muscle scalène antérieur, une hémorragie perou postopératoire, une infection, une lymphorrhée et une reprise précoce
de la rééducation (avant 3 mois) sont des facteurs prédisposant à la
récidive.
Traitement
Pour les récidives plexiques hautes, le but de la réintervention est de
réaliser une neurolyse des racines plexiques hautes, de réséquer
complètement le muscle scalène antérieur et un éventuel moignon costal
thoracique ou cervical trop long. Certains préconisent également la
résection du muscle scalène moyen [8]. La voie d’abord sus-claviculaire
permet un bon contrôle des racines hautes du plexus brachial et du
muscle scalène antérieur. Ce muscle doit être abordé à l’union de son
tiers moyen et de son tiers supérieur afin de ne pas traumatiser le nerf
phrénique. La partie inférieure du scalène antérieur est réclinée vers le
bas et progressivement libérée de ses attaches fibreuses. Il faut réséquer
entièrement le pseudotendon fibreux qui le solidarise généralement avec
les racines plexiques. La partie supérieure du muscle est ensuite
réséquée. Chaque racine du plexus est libérée sur toute sa longueur
jusqu’au foramen rachidien. La prévention d’une nouvelle récidive
implique une hémostase et une lymphostase rigoureuses, complétées par
un lavage du creux sus-claviculaire et l’interposition de la graisse
préscalénique sur les troncs nerveux disséqués.
En cas de récidive plexique inférieure, la réintervention doit libérer les
racines C8 et T1 du tissu fibreux cicatriciel, situé surtout au niveau du
moignon de la première côte, au voisinage du foramen de T1, sur le
dôme pleural jusqu’au niveau de la deuxième côte. La neurolyse est
poursuivie jusqu’au niveau du foramen, avec ablation du tissu cicatriciel
et libération de l’artère sous-clavière. La voie axillaire serait la mieux
adaptée [28, 37]. La reprise de l’incision axillaire conduit directement sur
le gril costal. La dissection est poursuivie vers le haut, au doigt, le long
du plan costal jusqu’au tissu cicatriciel. Il faut alors libérer au ciseau,
prudemment, l’artère axillaire, ainsi que le tronc primaire inférieur
jusqu’au foramen de la racine T1. Il n’est pas nécessaire, et même
dangereux, de libérer la veine axillaire. Il est possible de réaliser une
pleurectomie apicale afin d’améliorer l’exposition, faciliter la dissection
de T1 et permettre une sympathectomie élective du ganglion T2, en cas
de causalgie ou d’algodystrophie. Il faut réséquer toutes les adhérences
fibreuses attachées à la racine T1 jusqu’à son foramen. Le moignon
costal doit être réséqué s’il dépasse la taille de 1 cm [28]. Il est possible,
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CHIRURGIE DES SYNDROMES DE COMPRESSION DU DÉFILÉ THORACOBRACHIAL
par cette voie, de réséquer le scalène antérieur si cela n’a pas été fait au
cours de la première intervention. Il en est de même pour une éventuelle
fibrose du scalène moyen. Les précautions évoquées pour éviter une
nouvelle récidive sont respectées et certains auteurs [37] conseillent
l’interposition d’un lambeau graisseux pédiculé à partir du tissu
graisseux axillaire. Ce pédicule débute au niveau du fascia sous-cutané,
au niveau de la partie supérieure de la cicatrice axillaire. Il doit avoir une
dizaine de centimètres de long pour pouvoir être placé, sans tension, en
arrière et en dessous de la racine T1.
En cas de causalgie ulnaire, une sympathectomie du ganglion T2 peut
être réalisée avant la confection du lambeau graisseux pédiculé. Il faut,
auparavant, réaliser une pleurectomie apicale et repérer le ganglion
stellaire, situé juste au-dessus du col de la deuxième côte, entre la racine
T1 et l’artère sous-clavière.
Si la symptomatologie évoque un syndrome complet, il est prudent
d’installer le malade de sorte qu’un abord sus-claviculaire et axillaire
puisse être réalisé.
Résultats
Ces réinterventions sont plus difficiles. Leur résultats sont moins bons
que ceux des interventions de première intention. Les succès immédiats
sont évalués à 70 %, avec un bon résultat clinique dans 45 % des cas
après 18 mois [8]. L’ablation d’une anomalie anatomique, osseuse ou
Techniques chirurgicales
tissulaire, incomplètement réséquée au cours de la première
intervention, est un facteur de bon pronostic.
Les complications des réinterventions sont à la fois plus fréquentes et
plus graves. Il s’agit de pneumothorax, lymphorrhée, lésions graves des
nerfs plexiques, paralysie récurrentielle ou phrénique.
La prévention de ces récidives consiste à faire une résection
extrapériostée [28] de la première côte, tout en laissant un moignon costal
aussi court que possible, à réséquer toutes les formations
musculoaponévrotiques anormales, à faire une hémostase parfaite, laver
soigneusement la plaie avant la fermeture et, enfin, à limiter les
mouvements de l’épaule et du bras pendant 3 mois après l’intervention.
•
• •
Les principales difficultés diagnostiques des syndromes de la
traversée thoracobrachiale se rencontrent dans les formes
neurologiques. L’acte chirurgical est bien codifié et généralement
bénin. Les suites, en revanche, sont souvent longues avant
l’obtention d’un résultat définitif, et responsables d’arrêts de travail
prolongés. Les échecs ou les récidives observés dans les
syndromes neurologiques ne doivent pas remettre en question le
bien-fondé de ces interventions. Elles doivent surtout inciter à
poursuivre les efforts tendant à améliorer les performances des
examens complémentaires, les techniques opératoires et la
sélection des malades qui doivent être opérés [19].
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Encyclopédie Médico-Chirurgicale 43-029-V
43-029-V
Sympathectomie lombaire
X Chaufour
J Cau
JP Bossavy
A Barret
Résumé. – L’indication de la sympathectomie lombaire est limitée à l’heure actuelle au traitement de
l’ischémie chronique des membres inférieurs des patients ne pouvant pas bénéficier d’un geste de
revascularisation directe. Elle peut être réalisée avec une morbidité très faible et permet d’améliorer, dans
certains cas, l’évolution naturelle de l’insuffisance artérielle. La sympathectomie lombaire réalisée sous
vidéoscopie est une alternative à la sympathectomie conventionnelle ou à la neurolyse chimique.
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : sympathectomie lombaire, vidéoscopie, artériopathie oblitérante chronique, neurolyse chimique.
Principes
Depuis le développement de la chirurgie artérielle restauratrice, la
sympathectomie lombaire a été reléguée au second plan. La
sympathectomie périartérielle a été décrite par Jaboulay en 1899,
puis étudiée sur le plan expérimental par Leriche en 1913 et fut une
première étape avant la sympathectomie lombaire. Leriche et
Fontaine ont montré que la sympathectomie périartérielle n’agit pas
par interruption des voies motrices sympathiques mais par section
des fibres sensitives ou centripètes, permettant d’obtenir une
vasodilatation artérielle d’amont et d’aval [31]. Julio Diez pratiqua la
première sympathectomie lombaire pour artérite en 1925, alors que
1 an auparavant Leriche et Wertheimer avaient essayé sans succès la
section des rameaux sympathiques communicants lombaires. L’effet
vasodilatateur de la sympathectomie a été démontré
expérimentalement, il y a de nombreuses années, par Claude
Bernard lors de la résection du ganglion cervical supérieur.
L’augmentation de température aux membres inférieurs, après
sympathectomie lombaire, a été objectivée par Gonzalès Aquilar en
1931. L’augmentation de calibre artériel, après sympathectomie
lombaire, a été objectivée par Fontaine après comparaison de clichés
artériographiques en 1933. Si l’effet vasodilatateur de la
sympathectomie a pu être démontré rapidement, le niveau
anatomique de la sympathectomie, pour obtenir une vasodilatation
optimale, a longtemps été controversé par de nombreux auteurs ;
certains auteurs préconisent des résections sympathiques
thoracolombaires, d’autres des résections sympathiques
lombosacrées. Albert et Dumont constatent, en 1936, que la section
de la chaîne sympathique juste sous le premier ganglion lombaire
permet d’obtenir une vasodilatation artérielle maximale des
membres inférieurs ; les sections sous-jacentes et sus-jacentes
ajoutent peu à cette vasodilatation. Les travaux de White et
Smithwick, en 1947, confirment ces données et démontrent que
l’efficacité optimale de la sympathectomie lombaire pour artérite est
obtenue lorsque les deuxième et troisième ganglions lombaires sont
réséqués [31].
Pour les patients présentant une artériopathie oblitérante
symptomatique des membres inférieurs et ne pouvant bénéficier
d’un geste de revascularisation par méthode chirurgicale ou
endovasculaire, la sympathectomie lombaire a des indications. Elle
permet d’augmenter la vasodilatation artérielle par diminution du
vasospasme, en supprimant l’effet hypertonique du système
sympathique. Ces indications restent limitées aux douleurs de
décubitus et à l’ischémie critique avec troubles trophiques
superficiels très limités. Il existe des tests préopératoires qui
permettent d’évaluer la fonction sympathique et de prédire ou non
une amélioration de la vascularisation cutanée après
sympathectomie.
Tests fonctionnels prédictifs positifs :
– l’index de pression bras/cheville est supérieur à 0,30 et/ou une
pression systolique à l’orteil supérieure à 30 mmHg [1, 24, 29] ;
– le test cutané à la sueur à l’acétylcholine est positif : il permet de
prédire le succès de la procédure en testant en préopératoire
l’intégrité du système autonome sympathique. C’est un test simple
et efficace [2] ;
– le test de Hillestad est positif si la courbe de pléthysmographie
est multipliée par deux après la levée du garrot jambier [5, 18] ;
– l’anesthésie péridurale qui a permis de réchauffer les
téguments [23] ;
– le test électrophysiologique d’activité cutanée sympathique est
positif [19].
Techniques
CHIRURGICALE
Xavier Chaufour : Chef de clinique-assistant des Hôpitaux.
André Barret : Professeur de chirurgie vasculaire.
Jérôme Cau : Interne des hôpitaux de Toulouse.
Jean Pierre Bossavy : Professeur agrégé de chirurgie vasculaire.
Hôpital Purpan, place du Docteur Baylac, 31059 Toulouse cedex, France.
¶ Conventionnelle
Les grandes voies d’abord latérales, décrites autrefois, pour l’abord
de la chaîne sympathique lombaire sont maintenant abandonnées.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Chaufour X, Cau J, Bertin F, Bossavy JP et Barret A. Sympathectomie lombaire. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés),
Techniques chirurgicales - Chirurgie vasculaire, 43-029-V, 2001, 7 p.
Sympathectomie lombaire
43-029-V
Techniques chirurgicales
1
Patient installé en décubitus dorsal pour une sympathectomie droite par voie
rétropéritonéale.
2
Incision cutanée.
3
Les fibres musculaires du grand oblique et du petit oblique sont discisées. Le bord
externe de l’aponévrose antérieure du muscle grand droit est incisé. 1. Muscle grand
oblique ; 2. muscle petit oblique ; 3. muscle transverse.
Seul l’abord rétropéritonéal doit être envisagé, par une courte voie
antéroexterne sus-ombilicale à la hauteur de la 11e côte, elle permet
un abord sous-péritonéal suffisant. La sympathectomie par voie
transpéritonéale ne peut être envisagée qu’en association à une
chirurgie restauratrice aorto-iliaque transpéritonéale.
Voie rétropéritonéale
Le malade sous anesthésie générale ou anesthésie locorégionale est
en décubitus dorsal, un billot sous la fosse lombaire, le genou demifléchi pour détendre le psoas (fig 1). On réalise une incision
horizontale externe qui est étendue sur 5 à 8 cm du bord externe du
muscle grand droit en direction de l’extrémité de la 11e côte. Il vaut
mieux prendre comme repère les éléments osseux que l’ombilic, car
ce dernier peut être abaissé chez un malade obèse ou amaigri (fig 2).
Le feuillet antérieur de la gaine du muscle grand droit est incisé sur
sa moitié externe, respectant le muscle. Les fibres du muscle grand
oblique, dirigées en bas et en dedans sont dissociées et écartées sans
section. Le deuxième plan est celui du petit oblique ; ses fibres,
dirigées en haut et en dedans, sont dissociées et écartées (fig 3). On
accède ainsi à l’aponévrose du muscle transverse qui est incisée
prudemment transversalement. L’incision aponévrotique se poursuit
transversalement en dehors dans les fibres musculaires et en dedans
vers la gaine postérieure du grand droit (fig 4). Le péritoine est
décollé progressivement ; il est fragile en dedans et peut être ouvert
accidentellement ; la brèche sera fermée immédiatement par un
point au Vicrylt 2/0. En cas de péritoine extrêmement fragile, ce
dernier sera réparé en fin d’intervention au fil serti, en prenant à la
fois le feuillet aponévrotique de la gaine du droit et le péritoine.
Le décollement péritonéal se fait soit au tampon monté, soit au doigt
et progresse vers la fosse iliaque, il est plus aisé de débuter le
décollement de haut en bas. En profondeur, le repère est constitué
2
4
Incision de l’aponévrose du muscle transverse en avant et discision des fibres musculaires en arrière. Le sac péritonéal est visible, il sera décollé et refoulé en dedans. 1.
Muscle grand oblique ; 2. muscle petit oblique ; 3. muscle transverse ; 4. péritoine.
par le muscle psoas ; dès que le doigt le perçoit, il va cheminer à sa
face antérieure, refoulant en dedans le sac péritonéal sans aller en
profondeur vers le muscle carré des lombes. Le muscle psoas
conduit au plan vertébral (fig 5).
Techniques chirurgicales
Sympathectomie lombaire
43-029-V
5
Le sac péritonéal est refoulé en dedans lors d’un abord rétropéritonéal droit. 1.
Veine cave inférieure ; 2. aorte abdominale ; 3. chaîne sympathique gauche ; 4. chaîne
sympathique droite.
Le sac péritonéal est maintenu en dedans par deux valves de
Leriche ; il est impératif que l’aide récline le péritoine de manière
efficace afin d’exposer la chaîne sympathique, repérée contre le plan
vertébral, dans l’angle dièdre formé par la vertèbre et le muscle
psoas en refoulant en dedans le sac péritonéal. La chaîne
sympathique est un cordon dur, qui ne se laisse pas écraser, renflé
par endroits, solidement plaqué contre la vertèbre. Ces caractères le
différencient des ganglions lymphatiques moins fermes, des nerfs
abdominogénitaux, génitocrural et fémorocutanés plus externes. Les
valves de Leriche doivent être maintenues fermement, mais sans
à-coups pour ne pas léser les structures anatomiques, veineuses en
particulier. À droite, il est nécessaire de prendre prudemment sous
les valves la veine cave inférieure qui cache la chaîne sympathique
(fig 6).
La chaîne sympathique doit être libérée sur une hauteur de deux
ganglions (L2-L3). La dissection est facilitée par l’utilisation d’un
crochet de Leriche, qui permet de soulever la chaîne sympathique
(fig 7). Les deuxième et troisième ganglions sont les plus accessibles
et les mieux individualisés ; plus bas, le quatrième ganglion est
derrière les vaisseaux iliaques ; plus haut, le premier ganglion est
caché par les piliers du diaphragme. Il faut enlever le deuxième et le
troisième ganglion, ainsi que les rameaux communicants. La chaîne
sympathique est sectionnée au ciseau, ou éventuellement entre deux
clips ; le fragment prélevé est envoyé au laboratoire pour examen
anatomopathologique.
Les dangers ne sont représentés que par les vaisseaux lombaires qui
croisent, en arrière le plus souvent, mais parfois en avant, la chaîne
sympathique ; en cas de plaie veineuse, l’hémostase est réalisée au
mieux à l’aide d’un fil Prolènet 5/0 serti. Si l’uretère a été laissé au
contact du péritoine sous les valves, il n’y a pas réellement de risque
de traumatisme. Les lésions d’arthrose vertébrale peuvent
compliquer l’intervention en modifiant les repères anatomiques. Le
contrôle de l’hémostase doit être soigneux dans la fosse lombaire,
sous les valves de Leriche qui sont relâchées progressivement. Ce
contrôle dispense d’un drainage. La paroi est fermée plan par plan
par rapprochement des fibres musculaires par points séparés au fil
résorbable. Les suites opératoires sont en général très simples ; les
boissons peuvent êtres reprises dès le lendemain, l’alimentation
solide au deuxième jour.
La sympathectomie lombaire bilatérale en un temps est tout à fait
possible puisque le patient est installé en décubitus dorsal, elle est
réalisée par deux incisions rétropéritonéales droite et gauche.
6
Décollement péritonéal en dedans sur la face antérieure du muscle psoas.
1. Uretère ; 2. muscle psoas ; 3. nerf génitocrural ; 4. muscle carré des lombes.
¶ Sympathectomie lombaire sous vidéoscopie par voie
rétropéritonéale (rétropéritonéoscopie ou lomboscopie)
L’intervention sous vidéoscopie conserve les mêmes exigences
techniques que l’intervention classique : exérèse de la chaîne
sympathique lombaire emportant au moins deux ganglions, par voie
rétropéritonéale exclusive. Cette technique a pour but de diminuer
les douleurs postopératoires, la durée d’hospitalisation et de
permettre la reprise précoce du transit.
Instrumentation
L’instrumentation varie selon les équipes. Nous utilisons une
instrumentation standard utilisée couramment en thoracoscopie ou
en cœlioscopie. Elle comprend une optique de 0°-10 mm et une
optique de 30°-10 mm, un trocart de 10 mm pour le système optique,
deux trocarts de 5 mm, deux pinces à préhension de 5 mm, un ciseau
coagulateur, un crochet droit coagulateur, un aspirateur-laveur, un
tampon monté.
Il est nécessaire d’utiliser une caméra endoscopique de bonne qualité
afin de faciliter le geste opératoire, une source de lumière froide et
un insufflateur électronique.
Installation
Elle varie selon les auteurs et selon les techniques d’approche.
• Décubitus latéral
C’est l’installation utilisée le plus fréquemment. Sous anesthésie
générale, le patient est installé en décubitus latéral, avec mise en
place d’un billot au niveau du flanc. L’opérateur principal est du
côté de l’ombilic, l’aide opératoire est en face, du côté du rachis,
l’instrumentiste est du même côté que l’opérateur. Le moniteur est
positionné en face de l’opérateur. Une table à pont est installée audessus des cuisses du patient (fig 8, 9).
• Décubitus dorsal
Le patient est installé en décubitus dorsal avec un billot au niveau
de la charnière dorsolombaire et une rotation du tronc de 30° du
3
43-029-V
Sympathectomie lombaire
Techniques chirurgicales
9
Patient installé en décubitus latéral gauche pour une sympathectomie droite
par voie rétropéritonéale sous vidéoscopie avec position des trocarts.
7
La chaîne sympathique est soulevée par le crochet. 1. Muscle des piliers
du diaphragme ; 2. veine lombaire.
10
Vue cœlioscopique du champ opératoire. 1. Le muscle psoas est en haut ; 2. le sac
péritonéal est en bas, l’uretère reste accolé au sac.
côté opposé au côté opéré. L’opérateur principal est installé du côté
opposé au côté opéré, l’aide opératoire est en face, l’instrumentiste
est du même côté que l’opérateur.
Dissection
8
Disposition de l’opérateur, de l’aide, de l’instrumentiste et des moniteurs. 1. Aide ;
2. opérateur.
4
On réalise une incision (de 30 mm) située sur la ligne entre l’aile
iliaque et le bord inférieur de la 12e côte dans le flanc (le billot
permet d’ouvrir cet angle). On incise l’aponévrose du grand oblique
sur 30 mm, on dissocie les trois plans musculaires (cf supra), puis
on amorce au doigt le décollement rétropéritonéal. On positionne
un trocart à ballonnet de 10 mm (trocart avec ballon d’étanchéité)
qui permet d’introduire l’optique. Certaines équipes s’aident d’un
ballon dissecteur pour créer l’espace de décollement
rétropéritonéal [3]. On insuffle progressivement afin d’obtenir le
rétropneumopéritoine et l’on complète le décollement à l’aide de
l’optique, puis on positionne sous contrôle de la vue les deux autres
trocarts opérateurs de 5 mm. Les deux trocarts opérateurs sont
placés en triangulation à 3-4 cm en dehors du bord externe des
muscles grands droits. Les trocarts opérateurs ne doivent pas être
positionnés trop en dedans, car le péritoine reste accolé au bord
externe des droits, il existe donc un risque de brèche péritonéale et
donc de pneumopéritoine (fig 9).
Une des difficultés, lors de la période d’apprentissage, est que la
vue opératoire est inversée par rapport à la chirurgie
conventionnelle, puisque l’opérateur est placé du côté de l’ombilic ;
le psoas apparaît à l’écran, en haut, le sac péritonéal en bas (fig 10).
La dissection s’effectue de proche en proche au tampon monté et à
la pince fenêtrée dans la direction de l’angle dièdre formé par le
Techniques chirurgicales
Sympathectomie lombaire
11
Le sac péritonéal est refoulé en dedans par le rétropneumopéritoine. 1. Muscle
psoas ; 2. chaîne sympathique ; 3. sac péritonéal.
rachis et le muscle psoas en refoulant en dedans le sac péritonéal.
Le rétropneumopéritoine et la position du malade en décubitus
latéral contribuent au refoulement des anses intestinales. L’uretère
est laissé au contact du péritoine. La chaîne sympathique est repérée
au contact du rachis, le muscle psoas doit être récliné car il
surplombe le nerf sympathique (fig 11). La dissection doit être
minutieuse afin d’éviter l’une des principales difficultés techniques
de cette intervention sous laparoscopie qui est le saignement des
vaisseaux lombaires qui peuvent croiser par en avant la chaîne
sympathique. En cas de psoas proéminent, il est préférable d’utiliser
une optique à 30°, ce qui permet de mieux visualiser la chaîne
sympathique.
À l’aide du crochet, on soulève le nerf sympathique, ce qui facilite
sa dissection vers le haut et vers le bas (fig 12). Après avoir libéré le
nerf sympathique sur une hauteur suffisante (2e et 3e ganglions
lombaires), on coagule et on sectionne l’extrémité supérieure du
sympathique (certains opérateurs préfèrent utiliser des endoclips).
Le bord libre de la chaîne sympathique, tenu par une pince, est
récliné vers le bas, ce qui permet de sectionner au crochet
coagulateur les rameaux collatéraux sur une distance de trois
métamères (fig 13). L’extrémité inférieure de la chaîne sympathique
est sectionnée et retirée par le canal opérateur de 5 mm pour examen
anatomopathologique.
On vérifie soigneusement l’hémostase avant de réaliser l’exsufflation
du rétropneumopéritoine. Les muscles, au niveau de l’orifice du
trocart de 10 mm, sont refermés par deux points séparés au fil
résorbable. Le drainage n’est pas nécessaire. La fermeture cutanée
des orifices de trocarts de 5 mm est assurée par des Stéri-Stript.
Variantes techniques
• Technique de Dulucq
Le patient est installé en décubitus dorsal. On ponctionne en suspubien à l’aiguille de Palmer l’espace de Retzius afin d’insuffler 1,5 L
de CO2 pour créer un rétropneumopéritoine. Puis on introduit un
trocart de 5 mm en sous-ombilical pour insérer une optique de 0°5 mm. On réalise la dissection rétropéritonéale avec l’optique d’un
espace suffisant au niveau du flanc pour permettre l’introduction de
deux trocarts de 5 mm en triangulation (pince fenêtrée et crochet
coagulateur). La dissection et la résection de la chaîne sympathique
sont poursuivies comme précédemment décrit. Parfois l’introduction
d’un quatrième trocart de 5 mm est nécessaire pour réaliser au
mieux l’exposition de la chaîne sympathique. Cette technique est
dérivée de la technique des cures de hernie inguinale par voie
rétropéritonéale ; elle nécessite une grande expérience de la chirurgie
laparoscopique [10, 32].
43-029-V
12
La chaîne sympathique est tenue par une pince, le crochet permet de poursuivre
la dissection. 1. muscle psoas ; 2. chaîne sympathique ; 3. pince ; 4. crochet coagulateur.
13
La chaîne sympathique a été sectionnée en haut et est réclinée vers le bas par une
pince. 1. Muscle psoas ; 2. troisième ganglion lombaire sympathique ; 3. crochet
coagulateur.
Dans la littérature, une équipe préconise la sympathectomie par
cœlioscopie transpéritonéale, ce qui nécessite un décollement
colique [30]. Nous ne recommandons pas cette voie d’abord.
SYMPATHECTOMIE CHIMIQUE
Les techniques parachirurgicales de phénolisation ou d’alcoolisation
sympathique, sous contrôle tomodensitométrique, sont réalisées en
première intention par certaines équipes [14, 17, 20]. La neurolyse
sympathique chimique est faite sous ponction guidée par
tomodensitométrie. La ponction à l’aveugle ou sous échographie ne
doit plus être réalisée. La plupart des scanners permettent de
pratiquer ce geste, à condition de pouvoir opérer sous asepsie stricte.
Sous anesthésie locale, on ponctionne le troisième ganglion lombaire
à l’aide d’une aiguille fine. L’injection d’un mélange de Xylocaïnet
et de produit de contraste permet de tester l’efficacité du blocage
sympathique avant d’effectuer l’injection définitive par un mélange
de 96 % d’éthanol et de Xylocaïnet. Cette première injection test
permet de réduire le risque de blocage inefficace et de diminuer le
5
Sympathectomie lombaire
43-029-V
taux de complications [25]. Certaines équipes proposent de réaliser la
neurolyse sympathique à l’aide d’une sonde de radiofréquence selon
la même technique de ponction guidée [13].
Résultats
Techniques chirurgicales
Abcès rétropéritonéal
Il complique généralement un hématome rétropéritonéal. Cette
complication est décrite après abord chirurgical, mais aussi après
sympathectomie chimique [12, 14].
Syndrome douloureux postsympathectomie
Chez les patients présentant des tests préopératoires fonctionnels
prédictifs positifs, la sympathectomie permet d’obtenir de bons
résultats avec amélioration clinique significative et cicatrisation des
troubles trophiques [1, 4, 15]. Les résultats sont comparables chez les
patients diabétiques et non diabétiques [8, 15]. Le choix de la technique
dépend essentiellement des équipes médicochirurgicales. Il n’existe
pas d’étude randomisée démontrant la supériorité d’une technique
par rapport à l’autre. Certaines équipes préconisent la
sympathectomie sous vidéoscopie [9], d’autres équipes ne trouvent
pas d’avantage à cette technique par rapport à la chirurgie
conventionnelle [16] ; la courbe d’apprentissage de cette nouvelle
technique peut expliquer que les résultats ne soient pas, pour
l’instant, significativement différents. L’intérêt de la neurolyse
chimique versus chirurgie n’a jamais été démontré, bien que
certaines équipes préfèrent cette technique moins invasive [6, 8, 14, 26].
Pour beaucoup d’auteurs, le succès de la sympathectomie chimique
est de moindre efficacité que la sympathectomie chirurgicale ; la
sympathectomie chimique doit être réalisée uniquement par des
équipes entraînées, afin d’obtenir une neurolyse complète et efficace
de la chaîne sympathique lombaire [ 1 4 , 2 5 ] . Cette méthode
radiochirurgicale n’est pas dénuée de complications, elle doit être
réservée aux patients à risques anesthésiques importants.
Ce syndrome débute toujours après une phase de latence de 2 jours
à plusieurs semaines. Son début est brutal, les douleurs sont à type
de brûlure ou de déchirement, sa topographie métamérique se
projette sur les dermatomes sensitifs L1-L2, sa durée est très
variable, de quelques jours à plusieurs semaines. Les troubles
disparaissent toujours sans laisser de séquelle après un traitement
antalgique. Sa fréquence varierait de 2 à 65 % des cas dans une
enquête effectuée en 1986 auprès d’un groupe de chirurgiens
vasculaires français.
Gangrènes paradoxales
Elles seraient provoquées par l’ouverture des shunts artérioveineux
précapillaires, aux dépens du réseau capillaire. Le fait que ces
aggravations ischémiques soient plus importantes chez les malades
qui ont un index de cheville systolique inférieur à 0,30 irait dans ce
sens. Certains pensent que l’ischémie serait plutôt due à l’acte
opératoire et non à la sympathectomie, soit par bas débit cardiaque
peropératoire à l’origine de la thrombose distale, soit par embolies
peropératoires par traumatisme de l’aorte ou des vaisseaux iliaques,
soit encore par section d’une artère lombaire volumineuse vicariante.
Troubles sexuels postsympathectomie
Complications
COMPLICATIONS PEROPÉRATOIRES
Plaie des veines lombaires
C’est la complication la plus fréquente ; l’hémostase en est parfois
délicate car ces veines se rétractent rapidement en arrière vers le
rachis. On préférera ligaturer au fil ou aux clips ces veines que les
électrocoaguler. Le saignement peut être minimisé en vidéoscopie,
lorsque l’on travaille en pression d’insufflation élevée.
Traumatisme ou plaie urétérale
Les adhérences de l’uretère au péritoine pariétal postérieur ne
doivent pas être libérées, afin que l’uretère soit récliné en même
temps que le sac péritonéal et soit protégé sous les valves de Leriche.
D’après les travaux de Smithwick en 1951, 54 % des patients
bénéficiant d’une sympathectomie bilatérale emportant le premier
ganglion lombaire présenteraient une dyséjaculation. En pratique,
les variations anatomiques de la chaîne sympathique ne permettent
pas de prévoir strictement la survenue ou non de troubles sexuels ;
aussi vaut-il mieux toujours prévenir les sujets jeunes de la
possibilité de cette complication lors de sympathectomie bilatérale.
Sténose urétérale
Une sténose urétérale extrinsèque après neurolyse chimique a été
décrite par plusieurs auteurs après sympathectomie chimique [12, 14].
Ernst préconise une échographie rénale à 3 mois chez tous les
patients ayant bénéficié d’une neurolyse chimique afin de détecter
cette complication [12].
Conversion chirurgicale sous cœlioscopie
Paraplégie
Elle varie de 0 à 25 % des cas dans la littérature [3, 9, 27]. La conversion
est principalement due à un saignement non contrôlable des
vaisseaux lombaires, à l’existence d’un pneumopéritoine fermant la
cavité opératoire, à un muscle psoas hypertrophique empêchant une
bonne visualisation de la chaîne sympathique. L’obésité est aussi un
facteur de conversion lors de la phase d’apprentissage.
Un cas de paraplégie transitoire lors d’une sympathectomie
chimique a été décrit [11].
Pneumopéritoine
L’apparition d’un pneumopéritoine après abord rétropéritonéal sous
vidéoscopie (par brèche péritonéale ou par diffusion) va venir
fermer la zone de décollement rétropéritonéal et donc la cavité
opératoire [3]. Il n’y a pas d’intérêt à refermer les brèches péritonéales
(difficile et souvent inefficace), il faut préférer le positionnement
d’une aiguille de Palmer dans l’hypocondre afin d’exsuffler le
pneumopéritoine.
COMPLICATIONS PRÉCOCES
Indications actuelles
L’indication actuelle de la sympathectomie lombaire, pour le
traitement de l’artériopathie chronique oblitérante des membres
inférieurs, est limitée aux patients ne pouvant pas bénéficier d’un
geste de revascularisation directe, par méthode chirurgicale
conventionnelle ou endovasculaire. Les indications sont limitées
strictement aux douleurs de décubitus ou aux troubles trophiques
limités ; les tests fonctionnels prédictifs permettent de sélectionner
les patients qui vont répondre à ce traitement.
D’autres indications plus rares sont à connaître :
– l’hyperhidrose invalidante [21] ;
Hématome rétropéritonéal
– les gelures [28] ;
C’est la complication la plus fréquente, due généralement à un
décollement excessif de l’espace rétropéritonéal et à un défaut
d’hémostase. Ces hématomes sont à l’origine d’une majoration des
douleurs postopératoires et du temps de séjour hospitalier.
– la maladie de Raynaud sévère [7] ;
6
– la maladie de Buerger [22] ;
–
algodystrophie.
Sympathectomie lombaire
Techniques chirurgicales
Les rapports du TASC 2000 (TransAtlantic Inter-Society Concensus),
pour les maladies artérielles périphériques, ne recommandent pas la
sympathectomie lombaire pour le traitement des ischémies critiques.
Il n’existe pas, à ce jour, de tests scientifiques suffisamment fiables
pour sélectionner les patients, en ischémies critiques, qui pourraient
bénéficier d’une sympathectomie lombaire.
Pour le TASC, les indications restent limitées aux patients ne
pouvant pas être revascularisés et présentant une artériopathie avec
des douleurs de décubitus ou une artériopathie avec des troubles
trophiques superficiels limités aux orteils et montrant les critères
suivants :
– un index de pression bras/cheville supérieur à 0,30 ;
– une absence de neuropathie périphérique ;
43-029-V
– une amélioration clinique après une rachianesthésie ;
– un risque chirurgical acceptable pour une voie rétropéritonéale.
Conclusion
La sympathectomie lombaire est une intervention simple dont la
morbidité-mortalité ne doit pas dépasser 1 %. Le succès clinique
postopératoire dépend essentiellement de la bonne sélection des
indications, en s’aidant des tests fonctionnels prédictifs. La
sympathectomie lombaire vidéoassistée est une technique simple,
rapide, dont la faisabilité a été démontrée. L’apprentissage de cette
technique cœlioscopique n’est pas très difficile et permet au chirurgien
vasculaire de se familiariser avec les techniques de vidéoscopie.
Références
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7
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 43-037
43-037
Pontage aortofémoral vidéoassisté
JN Fabiani
Résumé. – La chirurgie vidéoassistée permet de réaliser des pontages aortofémoraux par une courte incision
et plusieurs accès par trocarts. Plusieurs techniques sont possibles pour faciliter les différents temps
opératoires et particulièrement la suture : l’utilisation de prothèse spéciale fixée à l’aide de clips et la suture
assistée par ordinateur. Les résultats à court et moyen termes sont bons, comparables à ceux obtenus avec
une exposition classique. Cependant, les suites sont beaucoup plus rapides et beaucoup plus simples,
permettant la sortie du patient vers le quatrième jour postopératoire.
© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : chirurgie vidéoassistée, chirurgie mini-invasive, chirurgie robotique.
Introduction
Ce n’est qu’après d’autres spécialités que la chirurgie vasculaire
développe des techniques de chirurgie mini-invasive et
vidéoassistée. L’avantage majeur de ces nouvelles opérations est de
réduire l’abord chirurgical à une effraction pariétale limitée, afin de
permettre des suites moins douloureuses et des hospitalisations plus
courtes. Réaliser un pontage aortobifémoral sans ouvrir largement
l’abdomen, et insérer sur l’aorte abdominale une prothèse
synthétique bifurquée pouvait sembler, il y a encore peu de temps,
une gageure. Pourtant, les progrès de l’instrumentation,
l’entraînement des équipes chirurgicales et l’évolution des idées,
nous ont permis de réaliser, à ce jour, cette opération chez plus de
50 patients.
Il nous semble clair que la nécessité de trouver des solutions au défi
technique ainsi lancé, va également permettre de proposer des
améliorations à une chirurgie très efficace à long terme, battue en
brèche par la simplicité apparente et les résultats à court terme de la
chirurgie endovasculaire
Le matériel utilisé dérive directement de celui employé en chirurgie
digestive ou thoracique : colonne avec caméra vidéo munie si
possible d’un zoom, comportant un angle à 0 ou à 30°, instruments
longs permettant la coagulation et l’aspiration, rétracteur
téléscopique pouvant être introduit par un simple trocart ou
suspenseurs pariétaux… Cependant, de nouveaux instruments sont
déjà disponibles : écarteurs intrapéritonéaux (type fish retractors),
clamps largables...
Technique chirurgicale du pontage
aortobifémoral par voie
transpéritonéale
Après préparation intestinale, le patient est anesthésié et installé en
décubitus dorsal, les lombes soulevées par un fort billot. Une
Jean-Noël Fabiani : Professeur, chef de service, département de chirurgie cardiovasculaire et de
transplantation d’organes, Hôpital Européen Georges Pompidou, 20, rue Leblanc, 75015 Paris, France.
insufflation d’air à l’aiguille de Palmer est alors commencée, après
simple ponction périombilicale, jusqu’à atteindre une pression intraabdominale de 13 mmHg. Trois trocarts avec valve antireflux sont
alors installés par des incisions de 1 cm : l’un en sous-costal droit
pour introduire un rétracteur télescopique, les deux autres en
pararectal gauche pour introduire l’optique, la lumière froide et les
instruments (fig 1). Le premier temps opératoire consiste à exposer
l’aorte derrière le péritoine pariétal postérieur, c’est-à-dire à récliner
les anses grêles. Ce temps est délicat ; le résultat est obtenu par la
mise en Trendelenburg du patient, tout en l’inclinant vers la droite.
Le rétracteur télescopique est alors mis en place pour assurer la
stabilité du champ opératoire. Certaines équipes ont étudié des
écarteurs spécifiques pour assurer la stabilité du champ intestinal,
type fish retractor.
La dissection du péritoine pariétal postérieur est alors menée aux
ciseaux de cœliochirurgie sur lesquels une coagulation est possible.
Le but est de dénuder largement l’aorte sur 5 cm, afin de permettre
l’installation du clamp latéral en toute sécurité. Pendant ce temps,
l’absence de calcification pariétale est vérifiée ; leur existence, gênant
le clampage, pourrait être une contre-indication à la technique,
nécessitant la conversion. Tout ce temps opératoire est effectué sous
insufflation péritonéale.
Les temps suivants sont effectués après une courte laparotomie et
l’on perd le bénéfice de la distension péritonéale. Un cadre
suspenseur autostatique (cadre de Moret ou Laparolifty) peut alors
être avantageusement installé pour maintenir un espace de travail
intra-abdominal suffisant. Un clamp moyen de Satinsky est alors
introduit par la laparotomie sus-ombilicale de 3 cm. Sa parfaite mise
en place sur l’aorte est assurée sous contrôle cœlioscopique. Les
anneaux de ce clamp restent en extra-abdominal, émergeant de
l’incision, permettant au chirurgien une action permanente et directe
sur l’instrument en cas de nécessité. L’aortotomie longitudinale est
alors menée prudemment s’assurant tout d’abord de la parfaite
étanchéité du clampage. On injecte alors l’héparine à la dose de
0,5 mg/kg par voie intraveineuse.
La prothèse en Dacront tissé est entièrement préparée avant son
introduction intra-abdominale : les recoupes sont effectuées au
thermocautère pour éviter l’effilochage et un matériel précoagulé est
indispensable. Cette prothèse est introduite par un des abords après
Toute référence à cet article doit porter la mention : Fabiani JN. Pontage aortofémoral vidéoassisté. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales — Chirurgie
vasculaire, 43-037, 2000, 4 p.
43-037
Pontage aortofémoral vidéoassisté
Techniques chirurgicales
Technique chirurgicale du pontage
aortofémoral par voie rétropéritonéale
Une incision de 3 cm est effectuée au bord externe du muscle grand
droit sur la ligne joignant l’ombilic à l’épine iliaque
antérosupérieure. Le péritoine est ensuite décollé en utilisant soit un
tampon monté, soit un ballon gonflable, jusqu’aux vaisseaux. Un
rétracteur téléscopique est alors mis en place et retient le sac
péritonéal, soit par la même petite incision, soit par un trocart. Deux
trocarts sont alors mis en place pour introduire la caméra et les
instruments. L’aorte est alors disséquée sous contrôle de la vue, puis
le clamp est mis en place comme décrit (cf supra). L’intervention est
alors menée selon les mêmes principes. Il est, bien sûr, possible
d’effectuer un pontage au niveau de l’aorte ou sur l’iliaque primitive
selon les lésions.
Réalisation de la suture vasculaire
et utilisation d’une prothèse sans
suture
1 Voies d’abord.
1. Minilaparotomie ; 2. canal caméra ; 3. canal opérateur ; 4. mise en place
du rétracteur télescopique ; 5. écran de contrôle.
l’avoir vrillée pour limiter l’encombrement, surtout si elle est
introduite par un trocart. Elle est déplissée soigneusement dans
l’abdomen sous vidéoscopie et présentée en position de suture. Il
est parfois nécessaire, pour ne pas être gêné, de réaliser d’emblée les
tunnels sous-péritonéaux et de mettre en place la prothèse jusqu’aux
triangles de Scarpa, évitant ainsi la gêne des coudures des jambages
dans un espace de travail restreint.
La suture terminoterminale est menée au surjet, utilisant un fil
monobrin 4/0 et un porte-aiguille long et fin. Chaque point est mené
successivement dans la prothèse, puis dans la paroi artérielle ; le
surjet est tendu grâce à un aide par l’intermédiaire d’un crochet
introduit dans l’abdomen par la laparotomie médiane. Le nœud qui
termine le surjet est descendu et serré à l’aide d’un pousse-nœud
qui applique fermement les boucles inversées. Une variante
technique permet de réaliser le surjet avec une aiguillée de 7 cm de
long, qui facilite les manœuvres intra-abdominales. En revanche, le
nœud peut être de réalisation délicate en l’absence de système
robotisé.
L’abord des triangles de Scarpa est effectué à ciel ouvert et la
tunnellisation des branches est réalisée à l’aveugle, comme
habituellement. Chaque branche de la prothèse est rattrapée sous
contrôle cœlioscopique et amenée en position fémorale en vérifiant
l’absence de torsion et la bonne tension du montage. Le clamp peut
être prudemment relâché pour vérifier l’hémostase. Un reclampage
pour ajouter un point complémentaire est possible. Les anastomoses
fémorales et les purges sont effectuées. Puis, le grand épiploon est
amené et suturé sur la prothèse pour la séparer du tube digestif.
2
Le temps le plus long et le plus délicat de l’intervention est celui de
la suture. Deux choix sont possibles : utiliser une suture de longueur
normale et se pose alors le problème de la tension du surjet, ou
travailler avec une aiguillée raccourcie et le problème vient alors du
nœud.
Quand on travaille avec une suture habituelle de longueur normale,
il est difficile d’assurer la traction du surjet dans l’espace de travail
cœlioscopique. On propose alors de récupérer chaque boucle par
l’intermédiaire d’un crochet qui peut être tendu par l’aide, soit par
la minilaparotomie, soit par un trocart. Le contrôle de la tension
peut donc se faire à la main et à la vue, grâce à la vision
endoscopique. Le nœud est facile à descendre par l’intermédiaire
d’un pousse-nœud prenant appui sur des brins suffisamment longs.
Le plus facile est de réaliser le surjet prothèse-vaisseau, à l’aide
d’une aiguillée volontairement raccourcie à une longueur de
7-10 cm, car la traction se fait alors aisément dans l’espace délimité
par le cadre suspenseur. Cependant, le nœud doit alors être fait à la
pince, ce qui peut être délicat, sauf si l’on dispose d’un robot dont la
virtuosité dans ce domaine est reconnue.
Afin d’éviter cette suture, nous avons décrit un nouveau type de
prothèse, que l’on peut fixer par l’intermédiaire de clips. Cette
prothèse-collerette s’introduit dans le vaisseau soit en position
terminale, soit en position latérale et permet l’introduction d’une
rangée de clips pour appliquer la prothèse sur la face intimale de la
paroi. Une large zone de contact est ainsi réalisée pour assurer
l’hémostase. L’étude expérimentale a permis de prouver l’efficacité
de la technique, l’absence de réaction inflammatoire à long terme et
l’absence de faux anévrismes.
Chirurgie assistée par ordinateur
Plusieurs systèmes de chirurgie assistée par ordinateur, applicables
à la chirurgie vasculaire, sont maintenant disponibles : il s’agit des
systèmes d’Intuitive Surgical ou de Computer Motion.
Notre expérience est celle du robot Da Vinci d’Intuituive Surgical.
Des bras armés par un outil-instrument sont introduits dans la cavité
abdominale par l’intermédiaire de trocarts (fig 2). L’avantage de ces
outils est la possibilité de travailler sur tous les plans de l’espace
grâce à une articulation intracavitaire, contrairement à la chirurgie
laparoscopique par instruments classiques, dont l’axe de travail est
imposé. Le chirurgien se trouve placé devant une console de
visualisation (fig 3) dont la situation géographique est indifférente
(il peut se tenir dans une pièce différente de la salle d’opération). La
vision obtenue est en trois dimensions et le chirurgien pilote les brasinstruments par l’intermédiaire de manettes dans lesquelles les
doigts sont glissés. L’interface informatique permet de réaliser un
Pontage aortofémoral vidéoassisté
Techniques chirurgicales
43-037
3
Console de visualisation et manettes de mobilisation des instruments à
distance.
2
Chirurgie assistée par ordinateur : mise en place des instruments.
certain nombre de fonctions (lissage du mouvement,
démultiplication …). Il est ainsi possible de réaliser dans de bonnes
conditions des sutures terminoterminale ou terminolatérale entre
l’aorte et une prothèse de Dacront, car l’apprentissage en est assez
rapide.
La limite de ces systèmes est l’impossibilité actuelle d’obtenir un
rendu de sensibilité au niveau des manettes de la console du
chirurgien, si bien que le seul élément de contrôle de la tension du
surjet, de la résistance de suture ou bien du serrage d’un nœud n’est
effectué que par la vision. Cependant, des progrès dans les
programmes informatiques permettront de réaliser dans un proche
avenir des tâches plus sophistiquées comme la réalisation
automatique de nœuds ou l’immobilisation visuelle du champ
opératoire...
Résultats
Cinquante patients ont été opérés par nous-mêmes en utilisant ces
techniques. Deux patients ont nécessité une conversion à une
laparotomie classique : l’un pour des difficultés d’exposition lors
d’un abord transpéritonéal et l’autre pour une aorte trop calcifiée
pour être aisément clampable par une voie d’abord limitée.
Chez les autres patients, l’abord a été sept fois transpéritonéal pour
pontage aortobifémoral et 43 fois rétropéritonéal pour pontage
unilatéral. En cas de pontage transpéritonéal, la mise en place de
trois trocarts et la confection d’une minilaparotomie de 3 cm ont été
nécessaires. La voie rétropéritonéale a nécessité une incision de 5 cm
et la mise en place d’un ou de deux trocarts. Toutes les interventions
ont été menées sous anesthésie générale.
Des prothèse en Dacront LPI ont été cousues sur l’aorte à l’aide de
surjet de Prolènet 4/0. Dans trois cas, la suture proximale a été
menée par ordinateur. Le saignement total de ce groupe de malades
(saignement peropératoire et drainage) a été de 273 mL, un malade
a été repris le lendemain pour hématome rétropéritonéal par la
même voie d’abord. Le temps moyen de ces opérations a été de
172 minutes (1 heure 30 minutes à 4 heures). Un seul patient dont la
fraction d’éjection était altérée a séjourné en réanimation, les autres
ont regagné leur chambre le soir même de l’intervention. La reprise
du transit a été obtenue après 48 heures. La sortie de ces malades a
été décidée entre le quatrième et le septième jour postopératoire.
Des complications postopératoires ont été notées : un sus-décalage
de ST sans infarctus, une lymphorrée au niveau d’un triangle de
Scarpa et une hématurie minime et régressive.
Le résultat vasculaire, contrôlé par doppler et chez deux patients
par artériographie, s’est avéré excellent dans tous les cas (fig 4). Dans
un cas, une occlusion de branche prothétique a été reprise dans les
suites hospitalières.
4
Aspect pré- et postopératoire en angiographie : pontage
aortobifémoral par voie mini-invasive transpéritonéale.
*
A
*
B
3
Pontage aortofémoral vidéoassisté
43-037
Techniques chirurgicales
Commentaires
5
Pontage aortobifémoral transpéritonéal : aspect
de la cicatrice.
Ces techniques, qui ne sont que des pontages réalisés par de petites
incisions, permettent de poser sous un jour nouveau les éléments de
comparaison entre pontage et angioplastie.
INDICATIONS DE LA TECHNIQUE
L’angioplastie des artères iliaques est devenue une des techniques
de choix dans le traitement des sténoses iliaques, surtout quand elles
sont limitées à un segment (sténose unilatérale, touchant l’iliaque
primitive). Ses résultats sont moins bons quand il s’agit d’une
occlusion nécessitant la recanalisation et la mise en place d’un stent.
Les résultats des perméabilités primaires et secondaires de ces
techniques endovasculaires commencent à être connues, à 5 ans, par
des études randomisées correctement conduites, comparant
l’angioplastie simple à l’angioplastie associée à une endoprothèse.
Cependant, le pontage aortofémoral donne actuellement les
meilleurs résultats à long terme (92,7 % de perméabilité secondaire
à 20 ans dans les stades II) et reste la technique de référence, au
prix, il est vrai, d’une hospitalisation plus longue et de douleurs
non négligeables dans la période périopératoire.
D’une façon générale, on peut résumer nos indications de la façon
suivante :
– angioplastie simple ou mise en place d’une endoprothèse, si
l’atteinte est unilatérale et ne touche qu’un segment artériel ;
– recanalisation plus endoprothèse en cas d’occlusion courte d’un
segment iliaque ;
– pontage en cas d’atteinte aorto-iliaque bilatérale ou d’atteinte
complexe d’un axe iliaque (primitive et externe).
Les indications du pontage vidéoassisté sont évidemment les mêmes
que celles de tous les pontages aortofémoraux, seule change la voie
d’abord et l’instrumentation nécessaire à la dissection des vaisseaux
et à la réalisation des sutures.
CONTRE-INDICATIONS
Elles naissent de cette première expérience, certaines rejoignent les
complications de toute cœliochirurgie.
– L’obésité et les antécédents de chirurgie abdominale rendent
l’abord des vaisseaux rétropéritonéaux malaisé et la dissection
difficile ou hémorragique.
– L’existence d’une aorte très calcifiée peut rendre périlleux le
clampage. Il est clair que le clamp, une fois mis en place, peut
difficilement être mobilisé et que tout saignement incontrôlé peut
rapidement devenir dramatique en l’absence de laparotomie.
– Enfin, en cas de mauvaise fonction ventriculaire gauche,
l’insufflation associée à la position de Trendelenburg peut augmenter
de façon dangereuse la précharge cardiaque et favoriser une
décompensation.
AVANTAGES DE LA TECHNIQUE
Ils sont évidents : l’absence de cicatrice et les douleurs très modérées
permettent d’éviter le séjour en réanimation et autorisent la sortie
du patient 1 à 2 jours après la reprise du transit (fig 5). À plus long
terme, on peut espérer l’absence de complication pariétale, assez
fréquente chez ces malades.
DISCUSSION DE LA VOIE D’ABORD
En chirurgie vasculaire par abord classique, la voie rétropéritonéale
est souvent pratiquée et ses avantages, quant aux suites immédiates
et à la qualité de la cicatrisation secondaire sont souvent vantés [2].
4
En vidéochirurgie la voie transpéritonéale pose incontestablement
un problème d’exposition, obligeant à un pneumopéritoine efficace
pour qu’existe un espace libre de travail tout en réclinant le grêle.
La difficulté à maintenir ce pneumopéritoine efficace pendant toute
la suture a été notée par plusieurs auteurs. Dion [4] dans son étude
expérimentale chez le porc, et Berens [1] dans le cas de pontage
effectué chez l’homme, ont préféré se tourner vers un rétracteur
abdominal (Laparolifty) qui, en soulevant l’abdomen, délimite un
espace de travail quand l’insufflation ne suffit plus. Chen [3] ,
rapportant un cas d’anévrisme de l’aorte abdominale, opéré chez un
homme de 62 ans, utilise la voie intrapéritonéale, mais effectue une
laparotomie de 10 cm, complétée par la mise en place de neuf
trocarts. Le bénéfice de la technique devient alors discutable par
rapport à une voie classique rétro- et même intrapéritonéale.
Cependant, dans l’état actuel de notre instrumentation, nous
pensons comme Dion [4], que la voie rétropéritonéale est plus simple
et plus sûre
RISQUE HÉMORRAGIQUE
Les instruments de vidéochirurgie permettent une dissection simple
et rapide du péritoine pariétal postérieur et la coagulation peut être
menée pas à pas. Le seul vrai problème est celui du clampage qui
doit être sûr, sous peine de risquer une situation périlleuse ; c’est
pourquoi nous avons préféré convertir les patients dont l’aorte
calcifiée ne permettait pas un clampage aisé. Nous avons également
utilisé un clamp classique dont la mise en place se fait par la caméra
vidéo, mais dont le contrôle des branches reste à la main du
chirurgien traversant la paroi abdominale par une courte
laparotomie. La mise au point de nouveaux instruments permettra
sans doute dans l’avenir de pallier cet inconvénient.
Conclusion
À la lumière de cette première expérience de pontages aortofémoraux
vidéoassistés, on peut penser que cette technique peut fournir des
résultats immédiats comparables à ceux de la technique classique. Elle
peut vraisemblablement faciliter les suites immédiates et limiter le
temps d’hospitalisation. Les indications actuelles se limitent à une
population choisie, exempte des contre-indications suivantes : obésité,
antécédents chirurgicaux abdominaux, aorte calcifiée et mauvaise
fonction ventriculaire gauche.
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ENCYCLOPÉDIE MÉDICO-CHIRURGICALE 43-038-A
43-038-A
Chirurgie restauratrice
aorto-iliaque : revascularisations
endovasculaires (I)
J Marzelle
X Chaufour
F Luizy
G Franco
JM Fichelle
D Guez
F Cormier
JM Cormier
R é s u m é. – La chirurgie endovasculaire a changé en quelques années les
indications de revascularisation à l’étage aorto-iliaque : diminution du nombre de
pontages aortofémoraux, aide au maintien de la perméabilité des revascularisations
extra-anatomiques, et surtout élargissement des indications de première intention
grâce aux endoprothèses. Les résultats à long terme des techniques endoluminales
incitent à discuter les revascularisations endoluminales par rapport à la chirurgie
classique dans la plupart des situations cliniques et des lésions anatomiques,
sténoses et occlusions. Une bonne connaissance des modalités techniques est donc
indispensable au chirurgien vasculaire d’aujourd’hui : cathéters et guides, ballons et
endoprothèses, voies d’abord homo- et controlatérales. Les indications et la
technique commencent à être bien codifiées, même si des progrès restent à faire, en
particulier dans le domaine des endoprothèses et des endopontages.
Introduction
Les résultats à long terme des techniques endoluminales sont
maintenant disponibles, exprimés dans nombre de cas avec la même
rigueur que les résultats de la chirurgie conventionnelle [61] : ils
incitent à discuter les revascularisations endoluminales par rapport à
la chirurgie classique dans la plupart des situations cliniques et des
lésions anatomiques rencontrées à l’échelon aorto-iliaque. Une
bonne connaissance des modalités techniques est donc indispensable
au chirurgien vasculaire d’aujourd’hui.
Matériel
Imagerie peropératoire
Nous ne reviendrons pas sur la nécessité d’une imagerie de qualité au
sein du bloc opératoire : elle permet d’avoir des résultats équivalents à
ceux des procédures endoluminales réalisées en salle d’angiographie [18].
Les principes sont développés dans le chapitre consacré à l’imagerie
peropératoire auquel nous nous référons [41].
Artériographie
Amplificateur de brillance
L’amplificateur doit être muni au minimum d’un arceau mobile
permettant de faire des clichés de face et profil, et de déplacer l’appareil
© Elsevier, Paris
Jean Marzelle : Chirurgien vasculaire.
Xavier Chaufour : Interne des hôpitaux de Paris.
François Luizy : Angiologue.
Gilbert Franco : Angiologue.
Jean-Marc Fichelle : Chirurgien vasculaire.
David Guez : Chirurgien vasculaire.
François Cormier : Chirurgien vasculaire.
Jean-Michel Cormier : Chirurgien vasculaire.
Clinique de la Défense, 16, boulevard Emile-Zola, 92000 Nanterre, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Marzelle J, Chaufour X, Luizy F,
Franco G, Fichelle JM, Guez D, Cormier F et Cormier JM. Chirurgie restauratrice
aorto-iliaque : revascularisations endovasculaires. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris),
Techniques chirurgicales – Chirurgie vasculaire, 43-038-A, 1998, 15 p.
vers le haut et le bas, et le long de la table. Une configuration à deux
écrans permet de garder une image choisie comme référence, ou de
visualiser sur un écran l’image en soustraction, et sur l’autre l’image des
repères osseux. Le champ des appareils actuels couvre de 23 à 32 cm de
large, le champ maximal étant obtenu en plaçant la source aussi loin que
possible du patient.
La mémoire de l’appareil permet de stocker des images pour rappeler un
résultat intermédiaire, mais un disque dur est souhaitable pour permettre
l’acquisition de séquences d’images à une cadence moyenne de
4 images/s. En dehors des séquences d’angiographie conventionnelle et
en soustraction digitale (DSA ou digital substraction angiogram), le
traitement de l’image permet une sommation ou la constitution d’un
masque (roadmapping ou tracé artériel). Les images de la procédure
peuvent être conservées sur papier ou sur film, mais également sur
support informatique.
Injecteur
L’injecteur est un élément indispensable afin d’obtenir des séquences
d’artériographie, surtout à l’étage aortique, et pour les contrôles en fin
de procédure, une fois le flux rétabli. La quantité de produit de contraste
nécessaire à une image de qualité est ainsi réduite. La quantité de produit
injecté varie entre 10 et 20 mL par injection. On peut également faire
varier le temps d’injection.
Radioprotection
C’est un élément mal connu des chirurgiens, mais qui mérite une
attention spéciale, car si l’effet des radiations ionisantes est très atténué
au-delà de 1 mètre de la source de rayons X, la protection des utilisateurs
43-038-A
CHIRURGIE RESTAURATRICE AORTO-ILIAQUE (I)
fait partie des obligations légales : protège-thyroïde, tablier léger mais
efficace et donc homologué, lunettes plombées et gants stériles de
protection pour l’opérateur et son instrumentiste, port du dosifilm.
Règles élémentaires
Nous insistons ici sur des points fondamentaux, que nous reverrons au
fur et à mesure des techniques. Il importe de vérifier ces points avant de
débuter une procédure, de la même façon qu’il faut vérifier que l’on
dispose du matériel suffisant, non seulement pour réaliser une procédure
simple, mais également pour faire face à ses complications, par
technique endovasculaire aussi bien que par une chirurgie de
conversion.
Le problème de la radio-opacité des tables d’opération justifie une
adaptation des tables existantes, voire l’acquisition d’une table
totalement radiotransparente compatible avec des interventions de
chirurgie traditionnelle. Dans tous les cas, on doit vérifier que
l’installation du patient, avant de débuter la procédure, autorise la prise
de clichés sous plusieurs incidences (au moins face et obliques) et la
visualisation de l’arbre artériel de l’aorte jusqu’à la distalité, sans être
gêné par le pied de la table ou par son armature métallique.
Une règle radio-opaque placée sous le patient ou collée sur la peau,
parallèlement à la lumière artérielle, est utile au repérage du niveau
d’une lésion, et au calcul de ses dimensions, mais il faut garder à l’esprit
qu’il existe un facteur de grossissement, source d’erreurs de parallaxe,
et il est parfois utile d’avoir recours à des guides ou des sondes
d’angiographie calibrées par des marqueurs radio-opaques. Le caractère
excentré d’une sténose et le calcul du degré de sténose ne peuvent être
déterminés que si l’on réalise des opacifications sous plusieurs
incidences.
Lorsqu’on franchit une lésion au guide, il faut toujours vérifier par une
artériographie le positionnement correct du guide dans la lumière
artérielle. Un guide en place ne doit jamais être retiré avant d’avoir
décidé de la fin de la procédure : sa surveillance doit être confiée à l’aide
ou à l’instrumentiste. Compte tenu de la longueur des guides et des
cathéters, on peut avoir intérêt à positionner la table d’instruments dans
le prolongement des pieds du patient.
Des études récentes montrent que la sensibilité de l’angiographie dans
l’interprétation du résultat après angioplastie est insuffisante : la mesure
du gradient de pression transsténotique [54] , voire l’échographie
endovasculaire [55], prendraient ici toute leur valeur.
Doppler - Échographie
Depuis l’avènement du doppler, exploration hémodynamique,
l’amélioration de l’échographie a permis une exploration
morphologique fine de la paroi des vaisseaux et de leur contenu. Avec le
couplage des deux techniques, on dispose d’une approche non invasive
pour le bilan préopératoire, éventuellement peropératoire, et le suivi
postopératoire [11]. Il nous a paru logique de ne pas dissocier exploration
hémodynamique et morphologique.
Doppler continu
Le doppler continu n’a pas de résolution spatiale et, de ce fait, tous les
vaisseaux se trouvant sur le parcours du faisceau ultrasonore donneront
une réponse simultanée, ce qui peut être source de confusion entre le
vaisseau étudié et les vaisseaux sous-jacents. Le crayon doppler utilisé
en peropératoire permet de guider la ponction fémorale lorsque le pouls
est faiblement perçu.
Doppler pulsé
Contrairement au doppler continu, le doppler pulsé n’est pas aveugle et
il est possible de déplacer un volume de mesure dont on peut faire varier
taille et profondeur : on peut ainsi choisir avec précision le vaisseau et la
zone à explorer. Il peut être utilisé seul, sans couplage à l’imagerie.
Échotomographie
L’échotomographie mode B en temps réel utilise des sondes à haute
fréquence (7 à 10 MHz), pour contrôler la qualité d’une désobstruction
ou rechercher des anomalies morphologiques, géométriques, des fautes
techniques telles que des flaps, des ressauts intimaux ou des dissections.
Couplage doppler-échographie
Le doppler pulsé peut être couplé à l’échotomographie en temps réel
mode B (duplex). Plus récemment, il a été associé au doppler couleur
(triplex). Le maniement est plus délicat pour des opérateurs peu
page 2
Techniques chirurgicales
entraînés à la technique, et le concours d’une tierce personne spécialisée
s’avère nécessaire. C’est l’examen de référence en préopératoire [16] et
pour le suivi postopératoire, il permet d’explorer la qualité du trépied
fémoral avant toute ponction et analyse la lésion artérielle à traiter tant
sur le plan morphologique qu’hémodynamique. L’échographie doppler
reste l’examen non invasif de référence pour le suivi des patients. En cas
de ponction difficile (patient obèse, trépied fémoral pathologique), une
ponction guidée est possible en enveloppant barrette et câble dans un
manchon stérile.
Manométrie artérielle
Cette méthode permet de mesurer la pression de perfusion artérielle. Sa
réalisation technique, avec les appareils de monitoring des pressions des
anesthésistes, ne pose pas de problème. Le cathéter d’angiographie, et
le port latéral de l’introducteur sont reliés par une tubulure à un capteur
électronique de pression. La pression s’affiche en temps réel sur un
moniteur et peut éventuellement être comparée à la pression radiale : le
rapport des deux représente l’index de pression. La prise des pressions
en amont et en aval d’une sténose et le calcul de gradient de pression
sont des moyens d’évaluer le caractère significatif de cette sténose.
L’index est calculé avant et après l’angioplastie transluminale, car
l’artériographie de contrôle sous-estime souvent le degré de sténose
résiduelle. La persistance d’un gradient de pression supérieur à 0,10
constitue donc l’indication à un geste complémentaire, nouvelle
angioplastie ou mise en place d’une endoprothèse [53]. La prise de
pressions est réalisée par l’intermédiaire d’une sonde 5F positionnée
juste en amont de la sténose, puis en aval de la sténose.
Échographie endovasculaire
C’est une technologie récente qui permet d’apprécier l’état de la lumière
artérielle, d’évaluer la morphologie de l’intima, de la média, et de
l’adventice, leur épaisseur et leur structure, et de mesurer de façon
précise le diamètre luminal de l’artère et contrôler l’efficacité d’une
angioplastie ou la bonne expansion d’une endoprothèse [1].
Sondes
Les plus petits cathéters ont un calibre de 3,5 F. Tous doivent être montés
sur guide (0,014 à 0,035 inches) pour réaliser la procédure. Ce système
de guide a le mérite de limiter les traumatismes pariétaux. Diverses
fréquences de sondes sont disponibles, et leur pénétration (rayon
maximal accessible à l’exploration) varie de manière inversement
proportionnelle à leur fréquence : à l’étage aorto-iliaque, ce sont les
sondes de 10 MHz et de 20 MHz qui sont le plus adaptées à la résolution
spatiale : leur résolution axiale et latérale est de l’ordre du dixième de
millimètre.
Source
L’extrémité proximale du cathéter est reliée à l’échographe. La console
d’échographie comprend un moniteur TV, un magnétoscope, et un
tableau de réglage qui permet la mesure du calibre artériel et de la
surface de la lumière par un système de curseurs. Des rapports de surface
peuvent être calculés automatiquement, pour déterminer le pourcentage
de sténose. Le rapport de surface est un reflet plus exact du degré de
sténose que le rapport de diamètre, qui, comme l’artériographie, ne
prend en compte qu’un seul plan, au risque de surestimer ou de sousestimer la sténose selon le plan. Le centre de l’image est occupé par
l’image circulaire de la sonde d’échographie, qui, selon la sinuosité des
artères et le trajet du guide, est plus ou moins centrée par rapport à la
lumière. Une plaque calcifiée, très dense, entraîne une ombre portée en
arrière (cône d’ombre) qui peut masquer la média et l’adventice à son
niveau. Une dissection se matérialise par l’image d’un double chenal
pulsatile, le lambeau de dissection flottant dans la lumière qu’il sépare
du faux chenal. L’étendue de la dissection est facilement appréciée par
la longueur du retrait du cathéter et la projection sous scopie de la sonde
endovasculaire. Pour l’instant, le principal inconvénient de cet outil
reste le coût d’utilisation, car les sondes d’échographie endovasculaires
sont à usage unique. Dans un avenir proche, des sondes d’échographie
couplées au ballon d’angioplastie, autoriseront dans le même temps un
bilan lésionnel morphologique, la dilatation, un contrôle du geste
effectué, un dépistage des complications pariétales et leur correction
immédiate.
Techniques chirurgicales
CHIRURGIE RESTAURATRICE AORTO-ILIAQUE (I)
43-038-A
A
B
C
D
E
F
G
H
J
I
1
Différentes sondes d’approche.
A. Cathéter droit.
B. Cathéter multipurpose.
C. Cathéter en crosse de hockey.
D. Cathéter en J.
E. Cathéter « vertébral ».
Matériel d’angioplastie
Nous ne détaillerons pas ici les différentes caractéristiques du
matériel [40] , mais nous insisterons sur le matériel spécifique aux
recanalisations aorto-iliaques.
Guides
On dispose maintenant de guides fins, flexibles (floppy), effilés
(tapered), orientables (steerable), faciles à diriger (torquable),
hydrophiles dont le revêtement minimise les frictions avec la paroi
vasculaire. Dans toutes les recanalisations, la lésion est d’abord franchie
par un guide, laissé en place pendant toute la procédure afin d’être sûr
qu’une fois la sténose ou l’occlusion levée, la continuité de la vraie
lumière artérielle sera préservée : en effet, le franchissement itératif de
la lésion, la fracture de plaque induite par la dilatation risquent de créer
un faux chenal qui exposerait à une occlusion de l’artère en aval du site
traité. Parmi la multitude de guides disponibles, un choix doit être fait :
il faut des guides téflonés et hydrophiles, à extrémité droite ou angulée à
30° et des guides en J, de diamètres différents : 0,035, 0,020,
0,018 inches. Le franchissement de certaines occlusions par un guide fin
(0,014 ou 0,018), analogue à ceux utilisés dans les coronaires, soutenu
par un cathéter d’angiographie, est parfois nécessaire. Il faut choisir un
guide de longueur suffisante (en tenant compte de la taille des cathéters
que l’on compte utiliser). Il existe des guides de rigidités différentes :
normale, stiff, superstiff, extrastiff (type Amplatz). Les guides rigides
sont surtout indiqués pour les procédures controlatérales (cross over),
de façon à assurer le franchissement du carrefour aortique par le cathéter
à ballonnet ou le stent. Si les guides hydrophiles permettent de franchir
plus facilement les occlusions thrombotiques [21] , ils présentent
l’inconvénient de s’engager dans des plans de dissection sans que l’on
sente de « ressaut », ce qui rend réservé sur leur utilisation comme guides
de première intention. La progression du guide doit être suivie en scopie,
de façon à l’orienter et à adapter sa progression aux sinuosités de l’arbre
artériel.
F. Cathéter « cérébral » modifié par Burke.
G. Cathéter Cobra.
H. Cathéter headhunter.
I. Cathéter Sidewinder ou Simmons.
J. Cathéter pigtail.
Introducteurs
Il s’agit d’introducteurs à valve de différentes tailles, depuis 5 F jusqu’au
12F pour certains stents aortiques, qui sont disponibles en trois
longueurs : 10 cm, 23 cm, 40 cm. Le changement pour un introducteur
long, voire courbe [33] (Cook, Arrow) franchissant la bifurcation
aortique, dans les cas de cathétérisme controlatéral, permet de laisser en
place un accès aisé à l’artère iliaque controlatérale, et de faciliter le
passage de la bifurcation aortique par des cathéters ou des stents rigides.
Les introducteurs longs ont par ailleurs l’intérêt de permettre la
progression « protégée » des endoprothèses serties sur ballonnet à
travers des artères sinueuses et rétrécies : ils sont surtout utiles en cas de
stenting primaire, c’est-à-dire sans angioplastie préalable. Une fois le
stent positionné au niveau de la lésion, la gaine de l’introducteur est
retirée et le stent peut être déployé.
Cathéters
Sondes d’angiographies
Les sondes de type queue de cochon (pigtail) permettent de réaliser les
artériographies. Il peut être intéressant d’utiliser des sondes calibrées
radiomarquées pour réaliser des mesures précises de la longueur d’une
lésion et du diamètre des artères iliaques et de l’aorte.
Sondes d’approche
Elles permettent de réaliser un cathétérisme sélectif des artères ou
permettent de rigidifier le guide, de l’orienter et de le diriger de façon
plus aisée. Un certain nombre d’orientations sont décrites dans la
figure 1. On peut également utiliser les cathéters comme cathéters
d’échange : une fois la lésion franchie par un premier guide, le cathéter
d’angiographie franchit la lésion sur le guide ; ce guide est ensuite retiré
et un deuxième guide, plus rigide, est passé par le cathéter laissé en
place ; ce procédé est utile quand le premier guide, choisi comme le plus
adapté pour franchir la lésion, a été abîmé ou ne peut être utilisé avec le
cathéter d’angioplastie pour des raisons de calibre.
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43-038-A
CHIRURGIE RESTAURATRICE AORTO-ILIAQUE (I)
Techniques chirurgicales
Sondes de thrombolyse sélective
Des sondes multiperforées, type Katzen et Mewissen, permettent
l’administration in situ de thrombolytiques, soit en injection continue,
soit en injection discontinue ou pulsée (pulse spray thrombolysis). La
thrombolyse est d’autant plus efficace que la lésion a pu être franchie
par un guide hydrophile. Le cathéter est alors placé au sein du thrombus.
Les doses et la durée de thrombolyse peuvent être réduites en suivant la
progression de la thrombolyse de façon à adapter la position du cathéter.
Sondes de prise de pressions
Ce sont des sondes à un ou deux chenaux permettant de calculer le
gradient de pressions de part et d’autre de la sténose avant et après la
procédure. Le plus souvent, on peut réaliser la prise de pression en amont
à travers un cathéter droit qui a franchi la lésion, et en aval par
l’introducteur.
Ballons
Choix du ballon
La plupart des ballons sont fabriqués à partir des cinq classes principales
de polymères du plastique : chlorure de polyvinyle (PVC), polyéthylène
(PE), polyéthylène teraphtalate (PET), Nylon, et polyuréthane (PU)
renforcé [40].
La plupart des cathéters actuellement disponibles ont un corps de 5 F.
Des progrès considérables ont été réalisés dans le « profil » des
ballonnets. On sélectionnera le type du cathéter essentiellement en
fonction du caractère compliant ou non du ballon.
Taille du ballon
Le diamètre et la longueur du ballon d’angioplastie doivent être adaptés
à la lésion à traiter afin d’obtenir des résultats satisfaisants ; le risque de
surdilatation et d’angioplastie débordant sur une artère saine doit rester
présent à l’esprit lors de toute angioplastie ; d’ou l’intérêt d’utiliser en
peropératoire une sonde d’angiographie calibrée ou une règle radioopaque pour connaître avec précision le diamètre et la longueur des
lésions. Bien que cette attitude ne soit pas validée, le traitement des
occlusions par sous-dilatation à l’aide d’un ballonnet de calibre nominal
inférieur de 1 ou 2 mm au calibre théorique de l’artère limiterait le risque
de rupture artérielle, en particulier sur les lésions calcifiées. Par ailleurs,
l’utilisation de ballonnets compliants permet théoriquement une certaine
marge dans la taille des ballons, ce qui évite d’avoir recours à un
deuxième cathéter en cas de résultat incomplet. Ce type de ballonnet a
l’inconvénient d’avoir une pression de rupture nettement inférieure à
celle des ballons non compliants, et de faire courir le risque de
surdilatation de l’artère en amont et en aval de la sténose, lorsque celle-ci
ne cède pas malgré une augmentation de la pression d’inflation.
Endoprothèses
Principes des endoprothèses
La mise en place d’une prothèse endoluminale (stent, d’après le nom du
dentiste Charles Stent) permet de maintenir, après angioplastie, le
calibre artériel à une valeur prédéterminée, d’impacter les fragments de
paroi en laissant une lumière circulante cylindrique sans turbulences.
Les endoprothèses couramment utilisées sont des treillis métalliques,
suffisamment radio-opaques pour permettre leur pose sous contrôle
scopique, qui exercent sur la paroi un certain degré de force radiaire pour
maintenir la lumière vasculaire ouverte. Leur expansion peut être
assurée par l’intermédiaire d’un ballon ou en leur laissant reprendre leur
diamètre nominal en les larguant à l’aide d’un cathéter dans lequel elles
sont repliées : on parle dans ce dernier cas d’endoprothèses
autoexpansibles. Parmi celles-ci, un certain nombre sont faites dans un
métal à mémoire de forme, le Nitinol, qui permet à l’endoprothèse de
reprendre son calibre nominal à la température du corps.
Un certain nombre de facteurs ont été pris en compte lors du
développement des endoprothèses.
– Thrombogénicité : bien qu’une endothélialisation se produise en
quelques semaines, la thrombose précoce est une complication non
négligeable de cette technique. Sa fréquence est limitée par l’emploi
d’un métal non thrombogène, par une architecture laissant aussi peu de
page 4
2 Couverture de l’ostium hypogastrique par une endoprothèse de Palmaz (A),
placée à cheval sur l’iliaque primitive et l’iliaque externe. Le contrôle à 2 ans (B)
montre le maintien de sa perméabilité (courtoisie du Dr JM Cardon, clinique des
Franciscaines, Nîmes).
métal que possible en contact avec le sang circulant, et par un traitement
anticoagulant dont les modalités (antiagrégants, héparine) et la durée ont
été simplifiées à la suite des études réalisées surtout en pathologie
coronaire.
– Resténose : un mécanisme d’hyperplasie intimale a été décrit, la paroi
réagissant aux forces radiaires exercées contre elle lors de l’angioplastie
mais également par l’endoprothèse qui reste en place. Cette réaction
pariétale entraîne une resténose d’autant plus significative que
l’endoprothèse a été placée dans un vaisseau de petit calibre. Un certain
nombre de resténoses aux extrémités de l’endoprothèse ont été décrites
dans les semaines ou les mois qui suivaient sa mise en place : bien que
l’on puisse évoquer une hyperplasie myo-intimale favorisée par le
changement de compliance de la paroi artérielle [2], il est probable qu’un
certain nombre de ces sténoses sont dues à une couverture incomplète
de la lésion à traiter : les dissections induites par l’angioplastie
transluminale sont souvent plus longues que la lésion initiale, et
l’angiographie est un moyen insuffisant d’appréciation. La constatation
d’une sténose plus longue que prévue ou se prolongeant au-delà du stent
est l’indication formelle à la mise en place d’un stent complémentaire,
en réalisant un chevauchement de quelques millimètres, pour être sûr de
couvrir la totalité de la lésion.
– Rigidité : les partisans des stents les plus rigides arguent du fait que
moins un vaisseau est rendu compliant, moins importante sera
l’hyperplasie intimale. En outre, une endoprothèse rigide maintient avec
plus de force (force radiaire) le calibre que l’on veut imposer à l’artère.
Cependant, la rigidité d’une endoprothèse gêne sa pose au niveau des
vaisseaux sinueux.
– Irrégularités de calibre : il ne faut pas se fier à l’aspect du ballon,
rempli de sérum mélangé à du produit de contraste, ou à l’angiographie
de contrôle pour juger du caractère complet de l’expansion de
l’endoprothèse. Les contrôles en échographie endovasculaire montrent
souvent des irrégularités de calibre : il ne faut pas hésiter à réaliser une
angioplastie complémentaire (même en cas de prothèse autoexpansible)
pour obtenir un calibre homogène sur toute la longueur de
l’endoprothèse.
– Perméabilité des collatérales : la faible proportion de paroi artérielle
couverte est un gage théorique de maintien de la perméabilité des
collatérales, et la couverture de l’artère hypogastrique par des stents à
larges mailles ne semble pas avoir donné lieu à des complications à
moyen terme (fig 2).
– Sepsis : il ne faut pas oublier que la mise en place d’endoprothèse
est la seule technique endoluminale où on laisse un corps étranger à
l’intérieur de l’artère. Même si les cas rapportés sont rares, les
précautions d’asepsie lors de l’implantation doivent être
rigoureuses.
Endoprothèses déployées par ballon
Stents de Palmaz
L’endoprothèse de Palmaz (Cordis) est un tube d’acier inoxydable percé
d’encoches rectangulaires disposées en quinconce le long du tube. Une
fois déployée, les fenestrations prennent un aspect losangique alors que
l’endoprothèse se raccourcit d’autant plus que son calibre augmente.
Ces endoprothèses peuvent être serties à la main ou utilisées
« préserties ». Ce sont elles qui ont été le plus étudiées dans la
littérature [26, 43, 45].
Techniques chirurgicales
CHIRURGIE RESTAURATRICE AORTO-ILIAQUE (I)
Les endoprothèses de la gamme « Medium » sont adaptées aux artères
de 4 à 9 mm de diamètre et passent dans des introducteurs de 7 F à l’aide
d’un « passe valve » métallique (ou 6F sans passe valve, si l’on fait
attention lors du passage de la valve par le stent). Elles existent en
longueurs variables, de 10 à 39 mm, avec un raccourcissement qui ne
dépasse pas 15 % pour une expansion complète à 9 mm de diamètre.
Les endoprothèses de la gamme « Large » sont adaptées aux artères de 8
à 12 mm de diamètre et existent en trois longueurs : 12 mm, 18 mm et
30 mm.
Les endoprothèses de la gamme « Extra-Large » ont été développées
pour le stenting aortique, permettant une expansion de 12 à 25 mm et
existent en deux longueurs : 40 et 50 mm.
Pour pallier la rigidité du stent de Palmaz, qui peut être un handicap lors
d’un stenting long, des endoprothèses articulées « Long Medium » ont
été développées : elles sont composées de plusieurs segments articulés
par une pièce métallique qui assure leur continuité et permettent de
couvrir des lésions de 42 mm à 78 mm de long.
Autres endoprothèses
De nombreuses autres endoprothèses ont été développées, et nous nous
limiterons à citer celles qui présentent une conception nettement
différente de celle du stent de Palmaz, sans prétendre être ici exhaustif.
Les endoprothèses de Strecker (Meditech) sont constituées d’un treillis
de monofilament de tantale qui se raccourcit peu pendant son expansion.
Elles sont préserties et ont une grande flexibilité qui permet leur
utilisation dans les procédures controlatérales, nécessitant un cross
over [36]. On leur reproche d’assurer une impaction insuffisante en cas de
lésion dure ou épaisse. Ces endoprothèses existent en différentes tailles,
de 4 à 11 mm de diamètre, en 40 et en 80 mm de long.
Les endoprothèses Perflex (Cordis) seraient plus flexibles que les
endoprothèses longues de Palmaz, et, comme toutes les endoprothèses
« préserties », devraient être plus fiables que les endoprothèses serties
manuellement, en particulier pour le stenting primaire.
Endoprothèses autoexpansibles
Wallstent
Le Wallstent (Schneider) est une endoprothèse composée de
l’entrelacement de 14 à 20 filaments d’acier trempé, dont les points de
croisement ne sont pas scellés, mais libres de s’articuler les uns par
rapport aux autres. On peut ainsi étirer l’endoprothèse pour lui conférer
le diamètre le plus étroit possible, et elle reprend son calibre et sa
longueur initiaux quand on la relâche. Dans le système de pose initial,
elle était placée dans son calibre le plus fin à l’intérieur du cathéter qui
43-038-A
servait à la mettre en place, entourée d’une membrane que l’on dépliait
progressivement lors du largage. Récemment, un système de largage a
été mis au point, dérivé de celui des stents biliaires : il permet un
déploiement plus aisé par retrait d’une gaine externe, qui autorise par
ailleurs un meilleur ajustement du stent lors du largage, un
repositionnement du stent dans sa gaine étant possible au début du
largage. C’est une endoprothèse plus fine que le stent de Strecker :
comme lui, elle est plus flexible que le stent de Palmaz. Différents
calibres (de 7 à 16 mm pour des artères de 6 à 14 mm) et différentes
longueurs de Wallstent (de 33 à 100 mm) sont disponibles pour
implantation iliaque [15, 44].
Endoprothèses en Nitinol
Les endoprothèses autoexpansibles à mémoire thermique utilisent la
propriété du Nitinol, alliage de nickel et de titane, de reprendre sa forme
à la température du corps. Elles se rétractent au froid et peuvent être
préchargées dans un système de gaines passant sur guides. Une fois
positionnées en regard de la lésion, la gaine est retirée par un système de
poussoir ou de gâchette, et l’endoprothèse est progressivement
déployée.
De nombreuses endoprothèses en Nitinol ont été développées :
Memotherm (Bard), Symphony (Meditech), Cragg [22] (Meditech),
Instent (Medtronic), Optimed, Vascucoil [25] (Medtronic)…
Endoprothèses couvertes
La couverture des endoprothèses métalliques par un matériau étanche a
pour but d’éviter une réocclusion ou une resténose par passage de
matériel athéromateux, de thrombus ou d’hyperplasie myo-intimale
évolutive dans les mailles de la prothèse. La seule endoprothèse
couverte pour laquelle le recul existe est l’Endopro/Passager
(Mintec/Boston Scientific Corp) : il s’agit d’un stent de Cragg à
mémoire de forme, en Nitinol, couvert d’un polyester à paroi mince [46].
Les résultats préliminaires dans le traitement d’occlusions
athéromateuses à l’étage iliaque semblent prometteurs.
Deux concepts s’opposent actuellement dans la conception du matériel :
les stent-grafts utilisent une prothèse classique (polyester ou PTFE) dont
la fixation est assurée par un stent ou par un système d’amarrage aux
deux extrémités ; les endoprothèses couvertes proprement dites sont
constituées par un treillis métallique continu, recouvert d’un matériau
étanche à paroi ultramince : polyester, PTFE (Hemobahn, Prograft), PU
(Corvita).
Il n’existe pas actuellement d’étude comparative prouvant le bénéfice
indiscutable des endoprothèses couvertes par rapport aux endoprothèses
non couvertes dans le traitement des occlusions athéromateuses, même
si les séries préliminaires sont encourageantes.
Techniques
Abord
Abord percutané
Il est pratiqué avec les même règles d’asepsie qu’un abord chirurgical
(rasage, badigeonnage avec un antiseptique, mise en place de champs
stériles). Après repérage du pouls artériel entre deux doigts, on infiltre
d’anesthésique local le derme et l’hypoderme. On peut utiliser une
aiguille de ponction 16 G avec mandrin métallique ou un trocart de
ponction type Seldinger. On ponctionne la peau à quelques centimètres
du pouls que l’on perçoit et l’on introduit l’aiguille à 45° jusqu’au
contact de l’artère. Lors d’une ponction rétrograde, vers l’axe iliaque,
il faut se méfier de ne pas ponctionner la fémorale commune trop haut.
Une ponction de l’iliaque externe en arrière de l’arcade crurale
exposerait en effet à un hématome rétropéritonéal extensif en
postopératoire. Si on utilise la technique de Seldinger, on pousse
l’aiguille jusqu’à traverser les deux parois (antérieure et postérieure)
de l’artère, puis on retire doucement l’aiguille jusqu’à obtenir un reflux
de sang artériel. Cette technique a comme inconvénient d’exposer à un
saignement au niveau de la sortie de l’aiguille à la face postérieure de
l’artère, où siège souvent une épaisse plaque athéromateuse, à une
fistule artérioveineuse si on ponctionne la veine adjacente au contact
de l’artère. Au niveau fémoral, une ponction trop profonde expose
également à une lésion de l’artère fémorale profonde. Si l’on veut
éviter ce type d’incident, on a intérêt à ne ponctionner que la paroi
antérieure de l’artère : dès qu’on obtient un reflux de sang artériel, on
arrête la progression de l’aiguille. L’inconvénient de cette dernière
technique est de risquer de s’engager dans un faux chenal : le
décollement d’une plaque par l’aiguille peut entraîner une dissection
localisée circulante (avec parfois un reflux sanguin trompeur) ; on
risque, en injectant dans ce plan, d’aggraver la dissection. Il est donc
prudent, une fois le reflux obtenu, d’injecter quelques millilitres de
produit de contraste pour vérifier que l’aiguille est bien dans la vraie
lumière et que le produit injecté ne stagne pas dans la paroi artérielle.
Cette injection test a, de plus, l’intérêt de situer avec précision le point
de ponction, en particulier au niveau du trépied fémoral, ce qui évite,
dans les ponctions antérogrades de la fémorale commune, de s’engager
dans la fémorale profonde. On retire alors le mandrin en maintenant
l’aiguille en place et on passe un guide à travers l’aiguille dans la
lumière artérielle. Lorsque le guide est avancé suffisamment loin dans
l’artère pour ne pas risquer de ressortir lors d’une fausse manœuvre,
on retire l’aiguille et on élargit l’orifice de ponction cutané d’une
moucheture au bistouri pour ne pas abîmer le bout des cathéters que
l’on va introduire le long du guide.
page 5
43-038-A
CHIRURGIE RESTAURATRICE AORTO-ILIAQUE (I)
Plusieurs artifices de ponction peuvent être utilisés :
– lorsque le pouls est faiblement senti, l’utilisation d’un brassard à
tension gonflé temporairement à la racine de la cuisse peut faciliter la
ponction ;
– la ponction première de la veine (souvent involontaire) qui permet une
injection de produit de contraste et une ponction de l’artère en dehors de
la veine opacifiée ;
– la ponction sous roadmapping : un masque créé par artériographie à
partir d’une sonde positionnée dans l’aorte en amont des lésions par
voie controlatérale ou brachiale, permet de se repérer, mais la ponction
peut être rendue difficile par une artère mobile, qui « roule » sous
l’aiguille ;
– la ponction première de l’artère par une aiguille fine transfixiant
l’artère et laissée en place permet d’immobiliser l’artère pour
ponctionner ensuite à l’aiguille 16 G habituelle ;
– l’utilisation d’un mini-doppler stérile lorsque le pouls n’est pas
palpable, peut aider à guider la ponction ;
– enfin, plus sophistiquée car demandant un apprentissage, la ponction
sous doppler-échographie permet de guider précisément la ponction,
mais a un intérêt majeur pour choisir le site de ponction sur un trépied
fémoral très pathologique.
Des hématomes volumineux peuvent être observés après abord
percutané, ce qui justifie une compression d’au moins 10 minutes après
retrait des cathéters et de l’introducteur, la surveillance prolongée du
point d’introduction, et parfois le recours à un brassard gonflable de
contrepression.
Techniques chirurgicales
est alors passé le long du guide. L’abord de la fémorale superficielle à
la pointe du Scarpa peut être utilisé même en cas d’occlusion à son
origine.
L’intérêt de la voie chirurgicale est d’éviter tout hématome
postopératoire, et d’autoriser ainsi une héparinisation postopératoire
identique à celle de la chirurgie conventionnelle. Il est néanmoins
prudent de refermer l’incision sur un drain de Redon aspiratif laissé en
place 24 heures pour éviter tout suintement postopératoire.
Site de ponction
Voie fémorale homolatérale
C’est la voie la plus utilisée. La ponction rétrograde permet l’accès à
l’artère iliaque. Elle est possible même en cas d’occlusion longue de
l’artère iliaque externe car l’artère fémorale commune est le plus
souvent perméable, du fait de la réentrée par les branches de
l’hypogastrique. La perméabilité de la fémorale commune est affirmée
par les temps tardifs de l’artériographie et par le doppler-échographie
préopératoire. Néanmoins, en cas d’occlusion proche de la jonction
iliofémorale, la ponction à proximité de la lésion rendra difficile
l’inflation du ballonnet, car la gaine de l’introducteur risque de couvrir
la lésion à traiter. C’est dans ces cas que se discute une voie
controlatérale ou un abord homolatéral plus bas, fémoral superficiel,
voire, pour certains, poplité [6].
Voie fémorale controlatérale
Abord chirurgical
L’abord limité de la fémorale est certes moins esthétique que la ponction
percutanée, mais l’abord chirurgical du point de ponction présente
plusieurs avantages.
– Il permet de ponctionner l’artère en zone « saine », après palpation de
celle-ci au besoin sur plusieurs centimètres.
– Il autorise la mise en place d’un introducteur de taille importante
(au-dessus de 10 F), par une artériotomie ou par ponction sous
contrôle de la vue, et d’assurer après retrait de l’introducteur une
hémostase chirurgicale, soit par une bourse ne prenant que l’adventice
autour du point de ponction, soit à points séparés de Prolènet
chargeant toute l’épaisseur de la paroi artérielle, de façon à fixer le
ressaut créé par la ponction au niveau d’une paroi souvent
athéromateuse.
– Il permet de faire une hémostase chirurgicale après thrombolyse
locorégionale, ce qui est une alternative intéressante à la solution qui
consisterait à laisser l’introducteur en place le temps que les
paramètres d’hémostase se normalisent. Cette dernière solution
présente en effet le risque de formation de thrombus sur l’introducteur
laissé en place.
Cet abord limité peut être réalisé sous anesthésie locale. Un court abord
dans le pli inguinal peut être utilisé lorsqu’on veut ponctionner la
fémorale commune. Cet abord est insuffisant quand on veut réaliser
dans le même temps une chirurgie du trépied fémoral et on doit alors
pratiquer une incision verticale « classique » du Scarpa. On peut
également avoir recours à un abord de la fémorale superficielle à la
pointe du Scarpa, c’est-à-dire sous le niveau de la lame ganglionnaire :
après une courte incision cutanée (2 à 3 travers de doigt), suffisante pour
mettre en place un écarteur de Beckmann, on incise l’aponévrose du
couturier que l’on écarte en dehors en ayant soin de respecter les
branches nerveuses. L’aiguille de ponction artérielle est introduite par
voie percutanée, le plus souvent à quelques centimètres de l’abord
chirurgical de façon à percer l’artère avec un angle de 45°, pour éviter
toute coudure de l’introducteur. La technique de mise en place de
l’introducteur est dès lors la même que pour un abord percutané. Quand
la taille de l’introducteur semble trop importante par rapport au calibre
de l’artère et que l’on craint des complications de la ponction artérielle
(fausse route en cas d’artère très infiltrée, suture sténosante d’un orifice
de ponction trop large), on peut préférer la mise en place de
l’introducteur à travers une véritable artériotomie transversale à la face
antérieure de l’artère, car une artériotomie longitudinale exposerait à
une suture sténosante ou imposerait une fermeture par patch ; le guide
est introduit dans l’artère après vérification du reflux et l’introducteur
page 6
Cette voie est utile pour traiter des lésions iliaques complexes, des
lésions hypogastriques, ou des lésions descendant sur la terminaison de
l’iliaque externe où un abord de la fémorale commune homolatérale fait
courir un risque de dissection dès le point d’entrée [30]. Elle suppose un
matériel particulier pour franchir la bifurcation aortique (cathéter
d’angiographie angulé Cobra, voire Sidewinder), et un guide
suffisamment rigide pour assurer la progression des cathéters au niveau
du cross over de la bifurcation aortique, en évitant une plicature (guides
super-stiff). Lorsque le guide peut être poussé suffisamment loin dans la
fémorale superficielle ou dans la fémorale profonde, il peut suffire à
assurer la progression du cathéter d’angioplastie ou de l’endoprothèse.
En revanche, quand le guide ne peut pas progresser au-delà du trépied
fémoral ou qu’il se loge dans l’hypogastrique, le recours à un
introducteur courbe franchissant la bifurcation aortique peut être
nécessaire. L’inconvénient de la voie controlatérale est d’exposer aux
complications de la ponction artérielle du côté asymptomatique.
Voie humérale
En cas d’impossibilité de cathétériser les trépieds fémoraux, l’accès
artériel ne peut être assuré que par ponction des artères du membre
supérieur. Elle est facile du fait du caractère superficiel de l’artère
quelques centimètres au-dessus du pli du coude, mais présente plusieurs
inconvénients : la taille des introducteurs est limitée du fait du calibre
de l’artère (ce qui peut justifier un court abord chirurgical), la longueur
du trajet jusqu’aux artères des membres inférieurs oblige à prévoir des
guides et cathéters plus longs, et enfin, le guidage de la procédure est
plus difficile en raison de l’éloignement et des courbures artérielles
franchies (origine des sous-clavières, crosse aortique). On a souvent
intérêt à s’aider, comme en angioplastie coronaire, d’un cathéter-guide
amené à proximité de la lésion pour permettre aux mouvements de
torsion et de poussée imprimés au guide d’être transmis de façon
efficace.
Recanalisation iliaque
Recanalisation par voie homolatérale
La voie d’abord est le plus souvent percutanée et, généralement,
homolatérale de première intention si l’artère fémorale commune est
ponctionnable. On utilise le plus souvent un introducteur 7 F, car il
permet l’utilisation de la majorité des techniques interventionnelles et
l’implantation de la plupart des endoprothèses. Un guide hydrophile
Techniques chirurgicales
CHIRURGIE RESTAURATRICE AORTO-ILIAQUE (I)
0,035 droit ou courbe est alors monté avec précaution à travers
l’occlusion. La désobstruction peut parfois être facile et le guide
retrouver rapidement la lumière aortique. Ailleurs, le guide est trop
flexible et bute au niveau de l’occlusion : on peut alors s’aider d’un
cathéter 5 F, droit ou courbe, pour faciliter la poussée sur le guide ou
pour l’orienter (« torquer »), et lui permettre de franchir une lésion
excentrée et de retrouver le « bon chenal ». Il faudra s’assurer de sa
bonne position dans cette lumière aortique, et non dans la paroi, en
injectant du produit de contraste à travers le cathéter 5 F qui a suivi le
guide, après retrait de celui-ci. Une fois certain que l’on a franchi la
lésion, on remet en place le guide jusqu’au niveau aortique, et ce guide
devra rester en place jusqu’à la fin de la procédure, car c’est ce que
Cardon a appelé la « ligne de vie » : une perte d’accès en cours de
procédure expose à l’impossibilité de cathétériser à nouveau la lésion et
au passage du guide dans un plan de dissection. Outre l’impossibilité de
terminer la procédure, cette perte d’accès empêche de traiter rapidement
certaines complications, dissection mais surtout rupture artérielle, nous
le reverrons. La surveillance du guide doit être confiée à l’aide ou à
l’instrumentiste.
La désobstruction peut en revanche être plus difficile, le guide butant sur
des plaques fibreuses ou calcifiées et il peut facilement passer dans la
paroi artérielle en position sous-intimale, voire sous-adventicielle,
récupérant parfois plus en aval la bonne lumière artérielle mais
cheminant dans certains cas dans la paroi aortique et entraînant une
dissection plus ou moins étendue. C’est un des dangers des guides
hydrophiles qui, s’ils sont particulièrement indiqués pour franchir des
occlusions thrombotiques, peuvent être dangereux dans les occlusions
athéromateuses où ils empruntent un mauvais plan sans qu’on ait la
sensation tactile d’un ressaut lors du passage dans l’épaisseur de la paroi.
– Il est important de faire le diagnostic de localisation sous-intimale du
guide de manière à ne pas faire d’angioplastie et à ne pas placer de
prothèse dans ce faux chenal, ce qui pourrait entraîner des lésions et des
complications sévères.
– Si la désobstruction par voie homolatérale s’avère impossible, on
utilise alors la voie controlatérale. Une des caractéristiques de
l’occlusion iliaque est de pouvoir être abordée par ses deux extrémités
dans le sens antérograde et rétrograde.
Recanalisation par voie controlatérale
Les cathéters pigtail, ou les cathéters adaptés (Sidewinder, Cobra)
permettent généralement de faire franchir au guide la bifurcation
aortique. Le cathéter Sidewinder a pour inconvénient de nécessiter
souvent un positionnement haut, au niveau de l’aorte thoracique, pour
reprendre sa forme en crosse ; outre l’inconfort de la manipulation, il
peut lors de sa « descente » vers la bifurcation aortique, s’accrocher dans
une plaque ou mobiliser du matériel athéromateux, ce qui nécessite un
suivi en scopie de sa progression. Une fois le cathéter courbe positionné
au-dessus de la bifurcation aortique, une rotation permet de positionner
son extrémité dans l’ostium de l’iliaque primitive controlatérale et on
assure la progression du guide suffisamment loin vers l’hypogastrique
ou la fémorale controlatérale. En effet, l’extrémité du guide étant souple,
on risque de déloger celui-ci lors du retrait du cathéter. Dans certaines
lésions de franchissement difficile par le guide seul, on a intérêt, une fois
le cross over réalisé, à faire progresser le cathéter sur le guide dans
l’iliaque controlatérale pour permettre d’orienter (« torquer »)
l’extrémité du guide face à la lésion. Il est important d’avoir un bon
support de manière à avoir un « push » suffisant pour franchir la sténose
ou l’occlusion, d’où l’intérêt dans certains cas d’utiliser des
introducteurs longs et courbes qui passent la bifurcation aortique. Une
fois la recanalisation obtenue, il est également important de s’assurer
que le guide est dans la lumière artérielle par une injection de produit de
contraste. Dès lors, l’angioplastie avec ou sans mise en place
d’endoprothèse peut être réalisée à partir de l’introducteur controlatéral,
à condition de suivre le franchissement de la bifurcation aortique, lors
duquel on risque un déplacement du guide. Dans certains cas, on peut
préférer le recours à une voie homolatérale : le guide est alors récupéré
dans l’introducteur situé du côté de la lésion, soit directement, soit avec
un lasso ou une pince à préhension afin de le faire ressortir à travers la
valve [17]. On peut alors laisser le guide entre les deux introducteurs
(technique du « téléphérique ») [20], ce qui permet de faire progresser sur
le guide les systèmes les plus rigides, ou le retirer de l’introducteur
controlatéral en le positionnant dans l’aorte. Ce rétablissement de la voie
homolatérale a également un intérêt en cas d’angioplastie simultanée de
43-038-A
la bifurcation iliaque (kissing balloons) : l’angioplastie iliaque primitive
ou iliaque externe est réalisée sur le guide homolatéral, l’angioplastie
hypogastrique étant réalisée par le guide controlatéral.
Recanalisation par voie humérale
La voie brachiale peut être intéressante en cas de lésions bilatérales qui
rendraient impossible le cathétérisme par voie basse, mais elle limite la
taille des introducteurs et ne permet pas l’implantation de certaines
prothèses. Elle devra souvent être complétée par une voie fémorale après
recanalisation du vaisseau, le guide pouvant être récupéré de la même
façon que précédemment dans l’introducteur fémoral. En cas de
difficulté de mise en place de l’introducteur fémoral, on peut s’aider
d’une angiographie par voie haute.
Recanalisation mécanique
En cas d’échec de recanalisation, même avec un guide hydrophile, la
conversion chirurgicale est licite. Certains auteurs ont néanmoins
recours à d’autres techniques [4] : laser, athérectomie (Rotacs,
Rotablator), thromboaspiration, voire thrombectomie mécanique
(Hydrolyser...). Ces techniques n’ont pas fait la preuve de leur
supériorité par rapport aux recanalisations au guide [35], mais peuvent
être tentées lorsque le franchissement de la lésion s’avère impossible.
Il est possible, dans le but d’éviter des embolies distales, de mettre en
place un garrot au niveau fémoral ou distal. Ce garrot sera gonflé
pendant les procédures de recanalisation mécanique. Cette précaution
peut être importante chez des malades extrêmement fragiles chez qui la
thrombolyse ou le traitement des complications de type embolie distale
risquent d’être aléatoires.
Dans tous les cas, une angiographie en fin de procédure devra s’assurer
de l’absence d’embolie distale au niveau des deux membres inférieurs.
Recanalisation précédée d’une thrombolyse
Elle était préconisée par beaucoup d’auteurs avant l’avènement des
stents. Pour Hausegger, elle facilite la recanalisation dans les occlusions
« récentes » de moins de 3 mois. Elle semble se compliquer plus
volontiers d’embolies distales que les autres techniques [42], et son risque
hémorragique incite à la réserver à des indications bien ciblées [50]. La
technique la plus employée est le protocole de MacNamara (4 000 U
d’urokinase/min pendant 2 heures puis 2 000 U/min les heures
suivantes). Un contrôle angiographique répété est effectué pour vérifier
la réouverture du vaisseau. La durée de la thrombolyse varie de 6 à
24 heures selon le résultat angiographique. Un cathéter est placé au
contact du thrombus, généralement par voie controlatérale. On peut
essayer de le faire pénétrer dans la partie haute de l’occlusion à l’aide
d’un guide hydrophile pour avoir un meilleur contact du thrombolytique
avec le matériel thrombotique. Les injections pulsées augmenteraient
pour certains l’efficacité et la rapidité de la thrombolyse.
À côté du protocole de MacNamara, d’autres protocoles ont été décrits
avec l’urokinase à 50 000 U/h ou le rt-PA (recombinant tissue type
plasminogen activator) 2,5 mg/h [8].
Dans certains cas, après thrombolyse ou après franchissement du guide,
on constate l’existence d’images intraluminales évoquant des thrombi
résiduels. On peut dans ce cas, procéder avant toute angioplastie à
ballon, à une thromboaspiration par cathéter ou à l’aide d’un système de
thrombectomie hydrodynamique. Cette méthode limiterait le risque
d’embolie distale. Une alternative semble être la mise en place d’une
endoprothèse, dont le risque d’embolie à travers les mailles du stent
semble faible dans la littérature [3].
Angioplastie aorto-iliaque par ballonnet
Taille du ballonnet
La prévision du calibre du ballonnet du cathéter d’angioplastie se fait
par rapport à la taille de la lumière de l’artère en amont du segment à
traiter. Les notions anatomiques sur la taille des artères iliaques non
athéromateuses peuvent conduire à surestimer la taille du ballonnet.
Cette taille est moindre au niveau des artères athéromateuses, qui, même
à distance des lésions sténosantes, sont le siège d’une endartérite diffuse.
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43-038-A
CHIRURGIE RESTAURATRICE AORTO-ILIAQUE (I)
Ainsi, les angioplasties iliaques primitives nécessitent des ballonnets de
7 à 10 mm le plus souvent. Au niveau des iliaques externes, on utilisera
des ballonnets de 5 à 8 mm. C’est au niveau de l’aorte que l’on doit se
méfier le plus, et la mesure préopératoire par doppler-échographie ou par
angioscanner apporte souvent des renseignements précieux. En effet, le
calibre des terminaisons aortiques athéromateuses dépasse rarement
15 mm. Il faut avoir cette notion avant de réaliser une angioplastie
aortique et surtout avant de réaliser une angioplastie par kissing balloons
de l’origine des deux iliaques primitives, en raison du risque d’induire
des lésions de la terminaison aortique par surdilatation. Il est toujours
préférable de sous-dilater les lésions occlusives, quitte à choisir un
ballonnet de taille supérieure en cas de résultat incomplet ou de gradient
de pression résiduel. L’évaluation de la taille du ballonnet par
l’angiographie impose la prise en compte d’un facteur de correction, lié
à l’amplification de l’image. On peut le calculer en se référant à la taille
de repères osseux comme les vertèbres, ou utiliser une référence radioopaque que l’on pose à proximité de l’artère. La mesure peropératoire la
plus précise repose sur l’échographie endovasculaire, ou à défaut
l’utilisation de guides ou de cathéters calibrés par des marqueurs
radio-opaques.
En cas d’angioplastie des lésions de la terminaison aortique, on a le
choix entre la technique des kissing balloons, placés à cheval sur l’aorte
et l’ostium de l’iliaque primitive, et une angioplastie aortique isolée.
Cette dernière, si elle est indiquée pour des lésions aortiques à distance
de la bifurcation, présente le risque de lésion de l’ostium de l’iliaque car
la terminaison du ballonnet risque d’être gonflée dans l’ostium de
l’iliaque primitive, et de produire une surdilatation. Il existe maintenant
des ballonnets dont l’extrémité est moins fusiforme que les ballonnets
classiques, et qui permettent une angioplastie de la terminaison aortique.
Enfin, il nous apparaît important d’insister sur les pressions d’inflation :
le rapport entre la pression d’inflation, mesurée par le manomètre
branché sur le port latéral du cathéter, et la pression réellement exercée
sur la paroi a été détaillé dans le chapitre consacré aux techniques de
chirurgie endovasculaire. La pression d’inflation doit être d’autant
moins importante que le calibre de l’artère est élevé. Ainsi, une
angioplastie aortique ne doit pas être réalisée avec des pressions
supérieures à 4 atmosphères, et une angioplastie iliaque est réalisée le
plus souvent avec des pressions de 4 à 6 atmosphères. Mieux vaut
attendre que la sténose cède progressivement à une pression basse que
de procéder à une inflation rapide atteignant d’emblée des pressions
élevées. Ce n’est qu’en cas de persistance de la sténose que l’on est en
droit d’augmenter progressivement la pression d’inflation. Pour
certains, les artères calcifiées présenteraient un risque plus important de
rupture au cours de l’angioplastie. Pour d’autres, la mise en place d’une
endoprothèse de première intention permettrait de limiter le risque de
rupture artérielle à l’occasion d’inflations à plus forte pression.
Tactique opératoire
Voie homolatérale
C’est la voie de référence pour toutes les sténoses simples et les
occlusions courtes. Dans les occlusions longues, certains privilégient la
voie homolatérale car elle permet de mettre en place les systèmes
d’endoprothèses les plus rigides, qui auraient du mal à franchir la
bifurcation aortique en cross over. Nous avons vu plus haut comment
« retrouver » la voie homolatérale, même en cas de franchissement de la
lésion par voie controlatérale.
Voie controlatérale (fig 3)
Elle est utilisée dans les occlusions longues, en cas d’impossibilité de
franchir le segment proximal de la lésion par voie homolatérale. La plus
grande facilité à franchir certaines occlusions dans un bon plan par voie
controlatérale peut être expliquée par l’existence d’une thrombose en
amont de la lésion athéromateuse causale. La voie controlatérale est
préférable en cas de lésions proches de la jonction iliofémorale. Dans
les sténoses hypogastriques, l’angle de l’artère oblige le plus souvent à
un cathétérisme controlatéral.
Voie bilatérale
Les lésions ostiales bilatérales des iliaques primitives nécessitent le
recours à la technique des kissing balloons : il s’agit de réaliser
l’angioplastie simultanée des deux artères. Outre le risque de sténose
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Techniques chirurgicales
A
4
B
A. Stenting d’une lésion ostiale de l’iliaque primitive gauche. L’impaction de la
plaque détermine une sténose controlatérale.
B. Indication à un kissing balloon (courtoisie du Dr JM Cardon, clinique des
Franciscaines, Nîmes).
résiduelle, l’angioplastie unilatérale expose en effet à la survenue d’une
sténose controlatérale (fig 4) par bascule de la plaque d’athérome (qui
est en règle une plaque aorto-iliaque). Cette technique limite également
le risque d’embolie controlatérale.
En cas de lésion de la terminaison de l’iliaque primitive ou de l’origine
de l’iliaque externe, le cathétérisme de l’hypogastrique est systématique
pour certains, pour deux raisons : le risque de sténoser l’ostium
hypogastrique, et la forte probabilité d’avoir une récidive de la sténose
iliaque dès la déflation du ballonnet, celui-ci s’étant appuyé sur
l’hypogastrique lors de l’inflation. On peut soit mettre en place un guide
dans l’hypogastrique (qui serait plus difficile à positionner en cas de
sténose ostiale ou de dissection après angioplastie), soit réaliser
d’emblée une angioplastie en kissing balloon (fig 5).
Contrôle du résultat
Il repose de toute façon sur l’artériographie, mais dans de nombreux cas,
on aura intérêt à s’aider de la prise des pressions, voire de l’échographie
endovasculaire. L’interprétation du résultat après recanalisation
artérielle doit prendre en compte quatre facteurs.
– Le degré de sténose résiduelle : celui-ci est le rapport du diamètre de
l’artère traitée par rapport à l’artère sus-jacente. Il est admis qu’une
sténose résiduelle de plus de 30 % expose à une plus forte probabilité de
resténose. Le calibre de l’artère traitée doit être calculé sur au moins
deux incidences, car il n’est pas rare que l’absence de sténose résiduelle
sur le cliché de face masque une sténose de plus de 50 % sur le cliché de
profil. Une sténose de l’artère d’amont ou d’aval est parfois notée. À côté
des complications pariétales que nous détaillons plus loin, il peut s’agir
d’un spasme, qui réalise une image de sténose concentrique, régulière et
peut intéresser une assez grande longueur d’artère. Il disparaît souvent
en quelques minutes, au besoin après injection in situ de vasodilatateurs.
Une sténose résiduelle après mise en place d’une endoprothèse doit être
recherchée, même si on a l’impression que le ballonnet sur lequel
l’endoprothèse a été expandue s’est complètement ouvert, et même si
l’artériographie de contrôle est rassurante : la visualisation de
l’endoprothèse, qui est radio-opaque, retrouve parfois un défaut
d’expansion à une extrémité, ou une sténose en diabolo, qui sont
l’indication d’une angioplastie itérative. Il est maintenant acquis que le
critère le plus fiable, et surtout le plus reproductible pour conclure à
l’absence de sténose résiduelle significative, est l’absence de gradient
de pression transsténotique.
– L’existence d’anomalies pariétales ou endoluminales : la survenue
d’une dissection artérielle au décours de l’angioplastie laisse en place
un faux chenal périphérique, dans lequel existe un flux circulant, visible
en angiographie, ou du thrombus, non opacifié, mais responsable d’une
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CHIRURGIE RESTAURATRICE AORTO-ILIAQUE (I)
Techniques chirurgicales
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Techniques de recanalisation aorto-iliaque par voie controlatérale.
A. Cathétérisme par une sonde Sidewinder.
B. Angioplastie transluminale simple sur un guide descendu dans la fémorale controlatérale.
L’utilisation d’un guide rigide permet également la mise en place de certains stents par cette
technique.
C. Extériorisation du guide par l’introducteur controlatéral à l’aide d’une sonde « lasso » (on peut
aussi utiliser une pince à préhension, ou une sonde de Dormia).
D. Technique du « téléphérique » : le contrôle du guide par les deux introducteurs permet
le franchissement de la bifurcation aortique par des cathéters et des stents plus rigides.
E. Repositionnement du guide dans la lumière aortique, une fois la lésion franchie par voie
controlatérale. On se retrouve ainsi dans les conditions d’un abord homolatéral.
F. Introducteur long par voie controlatérale : il permet d’assurer la progression de stents rigides
au niveau de la bifurcation aortique.
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E
sténose avec décrochage au niveau de la paroi artérielle, le
rétrécissement se prolongeant souvent sur plusieurs centimètres. Dans
les deux cas, le vrai chenal est rétréci, et il faut considérer qu’il existe
une sténose résiduelle, indication à une angioplastie répétée ou, en cas
de persistance, à la mise en place d’une endoprothèse. L’existence de
ces anomalies pariétales, même en l’absence de gradient de pression
résiduel, pose le problème de leur devenir évolutif, car rien ne prouve
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Techniques chirurgicales
A. Lésions bilatérales des carrefours iliaques.
B. Du côté droit : cathétérisme de l’axe iliaque par voie homolatérale et de l’hypogastrique par voie controlatérale.
C. Résultat après angioplastie par kissing balloons.
D, E. Du côté gauche : l’instabilité du guide dans l’hypogastrique a obligé à l’utilisation d’un introducteur long et courbe Balkin (Cook), pour réaliser l’angioplastie, avec
un contrôle satisfaisant.
que la lésion « non significative » initiale ne se majore pas par accrétion
de thrombus, par réorganisation de la paroi, voire par sclérose évolutive
de toutes les tuniques de la paroi (remodeling, qui a surtout été
documenté en pathologie coronaire). Ces arguments incitent nombre
d’auteurs à recommander la mise en place d’endoprothèses de façon
systématique lors des recanalisations d’occlusions, ou à la constatation
de la moindre anomalie résiduelle lors du contrôle.
Techniques chirurgicales
CHIRURGIE RESTAURATRICE AORTO-ILIAQUE (I)
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G
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H
(suite). Schémas des alternatives pour la mise en place de guides.
F. Deux guides.
G. Guide homolatéral et introducteur long controlatéral.
H. Introduction long controlatéral : la mise en place des deux guides est possible par cette voie mais la taille de l’introducteur (8 ou 9 F) impose le recours à des cathéters
d’angioplastie coronaire.
– Un ralentissement du flux artériel en scopie peut faire suspecter une
sténose ou une dissection non visible lors de la première opacification.
C’est une invitation à répéter les clichés sous plusieurs incidences pour
préciser la lésion responsable et déterminer son extension en hauteur.
– L’état du lit d’aval : en dehors de lésions préexistantes, mal définies
par l’artériographie préopératoire, et qui peuvent justifier une
angioplastie complémentaire, l’étude du lit d’aval permet de dépister
une dissection avec sténose en aval d’une occlusion recanalisée, le guide
étant « réentré » dans la vraie lumière artérielle, parfois plusieurs
centimètres après la fin de l’occlusion. Elle peut également montrer des
lésions pariétales créées à distance par le passage du guide. Enfin, les
embolies distales doivent être systématiquement recherchées : elles ne
sont pas toujours symptomatiques, mais exposent à une détérioration du
résultat, alors que, dépistées au cours de la procédure, on peut les traiter
immédiatement par thromboaspiration ou par thrombolyse.
Angioplastie associée à une endoprothèse
Certains profils lésionnels sont responsables d’échecs techniques
initiaux de l’angioplastie ou de détérioration du résultat à court ou
moyen terme. C’est dans ces indications que le recours aux
endoprothèses est nécessaire.
Mise en place
La taille du ballon, ou la taille de l’endoprothèse, en cas de stent
autoexpansible, doit correspondre au calibre souhaité en cas
d’endoprothèse rigide, ou être surdimensionnée de 1 mm en cas
d’endoprothèse plus flexible qui a tendance à se resserrer un peu après
déploiement (recoil). C’est pourquoi il est souvent recommandé
d’utiliser une endoprothèse d’un calibre de 1 à 2 mm de plus que le
calibre nominal de l’artère. Certaines endoprothèses autoexpansibles
n’atteindraient leur pleine expansion qu’après plusieurs heures ou
plusieurs jours. Ce phénomène est loin d’être constant dans notre
expérience, et nous recommandons au moindre doute de compléter
l’expansion par une angioplastie au ballonnet. Il faut néanmoins prendre
garde à ne pas surdilater les endoprothèses articulées de calibre fixe, car
on risque des fractures du système métallique.
Même s’il existe une forte probabilité d’avoir recours à une
endoprothèse dès le début de la procédure (par exemple recanalisation
d’occlusion), de nombreux auteurs recommandent de commencer par
une angioplastie transluminale simple : la mise en place de
l’endoprothèse sans angioplastie préalable nécessiterait de la part du
ballon une force suffisante pour à la fois dilater la lésion et assurer
l’expansion de l’endoprothèse, ce qui est très aléatoire. De plus, le
passage de l’endoprothèse à frottement dur contre la paroi artérielle
exposerait à sa migration le long du ballon. En revanche, d’autres
auteurs recommandent le stenting primaire des occlusions, de façon à
minimiser le risque embolique.
Lorsqu’on doit franchir des artères sinueuses, ce qui est souvent le cas à
l’étage iliaque, le cathéter risque de frotter contre la paroi en provoquant
une migration de l’endoprothèse par rapport au ballon : il vaut mieux
dans ce cas utiliser un introducteur long que l’on positionne à proximité
de la lésion à traiter ; encore faut-il s’assurer avant inflation que le ballon
sort de plusieurs centimètres de l’introducteur pour éviter le largage de
l’extrémité proximale de l’endoprothèse dans l’introducteur.
Si on doit couvrir une lésion longue par plusieurs endoprothèses, il vaut
mieux commencer par couvrir la lésion la plus à distance de
l’introducteur pour éviter le passage répété du cathéter d’angioplastie
qui risquerait de déloger l’endoprothèse.
Le largage des endoprothèses montées sur ballon doit se faire par une
inflation progressive à faible pression pour éviter une rupture du ballon :
le plus souvent 6 bars pour les endoprothèses de moins de 8 mm, moins
pour les endoprothèses de calibre supérieur. En cas de rupture du ballon
alors que l’endoprothèse est incomplètement déployée, on peut essayer
de sauver la situation en gonflant à forte pression le ballon pour obtenir
la meilleure expansion possible, puis dégonfler le ballon le mieux
possible. L’inflation du ballon par du produit de contraste pur, plus
visqueux, permet souvent une expansion partielle. Une autre solution est
d’utiliser une inflation rapide, au besoin à l’aide d’un injecteur. Une fois
l’expansion, au moins partielle, obtenue, on retire prudemment le ballon
en laissant le guide en place sous contrôle scopique : si l’endoprothèse,
radio-opaque, a tendance à migrer lors du retrait du cathéter, on peut
tenter une nouvelle inflation, mais il faut surtout dégonfler patiemment
le ballon et essayer de le « décrocher » de l’endoprothèse par de petits
mouvements de va-et-vient. Une fois le cathéter retiré, il faut repasser
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CHIRURGIE RESTAURATRICE AORTO-ILIAQUE (I)
A
B
C
Techniques chirurgicales
D
6 Sténose aortique par bourgeon calcaire et sténose du carrefour aortique et de l’origine des deux
iliaques primitives visible à l’artériographie (A, B) et au scanner (C, D) préopératoires.
Échographie endovasculaire préopératoire mesurant avec précision le calibre aortique en amont de
la lésion (E), montrant le bourgeon calcaire aortique (F), et la sténose du carrefour aortique (G), et
mesurant le calibre de l’iliaque primitive en aval de la sténose (H).
La procédure comporte, après mise en place de guides 0,035 à travers les différentes sténoses à
l’aide d’un cathéter angulé type « vertébral », une angioplastie première par kissing balloons de 6 et
7 mm de diamètre de la sténose aortique (I), et du carrefour aortique (J). Les deux ballonnets sont
gonflés simultanément et progressivement jusqu’à 2 atmosphères, en surveillant la tension artérielle
du patient. Dans un deuxième temps, implantation d’un stent de Palmaz en position aortique (K) sur
un cathéter à ballonnet de 12 mm de diamètre, et de deux stents de Palmaz en kissing (L) au niveau
de la bifurcation aortique. Les ballonnets sont g
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