24 Juin 2015
Contenu
1. Editorial
2. Rapport du 12ème Symposium national de Psycho-oncologie du 16.04.2015 à Berne
3. Thème principal: Dignité et oncologie
- Maladie et liberté
- Interview du Dr. Clemens Brandt et du Dr. Steffen Eychmüller
4. Formations continues et manifestations
Film „Winna – Weg der Seelen“
5. Adresses de contact
1. Editorial
Brigitte Leuthold Kradolfer, Christine Morgenthaler et Diana Zwahlen, membres du comité SSPO
Chère lectrice, cher lecteur
La présente newsletter aborde une nouvelle fois le thème de la dignité, traité sous diffé-
rents aspects lors du 12ème symposium de la SSPO en Avril dernier. Voir le rapport détaillé
de ce symposium.
Jelscha Schmid et Mario Schärli, assistants au Département de Philosophie de l’université
de le, nous livrent brillamment leur point de vue sur la maladie et la liberté. Ils démon-
trent que la maladie entrave la liberté de l’homme. Pour assurer au patient un maximum
d’autonomie et d’amour-propre, il est indispensable de le soigner avec dignité.
Lors d’interviews, les Dr. med. Clemens Brandt et Dr. med. Steffen Eychmüller ont entre
autres parlé de la dignité chez les professionnels et du risque qu’ils encourent de la perdre
pendant leur travail quotidien souvent mouvementé. Dans ce contexte, le Dr. Eychmüller
rapporte également que la collaboration vécue entre les équipes interprofessionnelles ne
serait pas toujours empreinte de dignité. Le respect avec lequel les professionnels traitent
les patient(e)s devrait également régner au sein même de l’équipe.
Nous espérons que cette newsletter vous intéressera et marquera pour longtemps votre
réflexion.
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2. Rapport du 12ème Symposium de la Société Suisse de Psycho-
Oncologie (SGPO) le 16 Avril 2015 à Berne
Rapport de Milena Petignat, étudiante en psychologie à l’université de Bâle, collaboratrice de l’étude à l’Hôpital de
Bâle
Les progrès de la médecine et l’évolution de l’état d’esprit de notre époque affectent la
dignité humaine. Lorsqu’une personne perd de son autonomie, en cas de maladie par
exemple, il arrive souvent que sa dignité s’en trouve altérée. La maladie et la faiblesse re-
présentent-elles donc un danger pour la dignité humaine ? Dans quelles circonstances et
comment l’oncologie fait-elle face à la dignité ?
Cette question parmi d’autres a été posée sous divers aspects professionnels lors du
12ème symposium de la Société Suisse de Psycho-Oncologie (SSPO). Ce congrès a permis
de se demander comment les professionnels de la psycho-oncologie pouvaient aider les
patient(e)s à préserver et renforcer leur dignité.
Le programme de ce symposium se composait de conférences, d’ateliers et, pour la pre-
mière fois, d’une exposition de posters consacrés à des projets scientifiques. Les deux
meilleurs posters reçurent une prime de 500 Francs.
Judith Alder
La présidente de la SSPO, Judith Alder, ouvrit le congrès et en présenta le thème aux
quelques 170 participant(e)s. Dès l’allocution de Kathrin Kramis, directrice de la ligue
suisse contre le cancer, il fut clair que „la maladie et la faiblesse“ ne doivent pas entraver
la dignité de l’être humain“ car „la vraie dignité est discrète et pudique, faite de sagesse et
de bonté“.
Suivirent les conférences principales. La première, animée et captivante, fut donnée par
Madame Boglarka Hadinger, psychothérapeute et directrice de l’institut de logothérapie et
d’analyse existentielle à Tübingen/Vienne. Pour pouvoir comprendre la dignité, il nous faut
d’abord comprendre „sa petite soeur“, l’estime de soi, expliqua-t-elle. Celui dont l’estime
de soi est stable n’a rien à craindre pour sa dignité. Elle énuméra également les cinq
sources de l’estime de soi relations, compétences, idéaux et objectifs, auto-évaluation
éthique et vitalité.
La conférence de Steffen Eychmüller, médecin chef du centre de soins palliatifs à l’hôpital
de l’Ile à Berne, offrit une superbe transition vers le quotidien médical. Se basant sur ses
innombrables expériences avec des patients palliatifs, il aborda le thème « une fin de vie
dans la dignité expression très galvaudée ». La citation de l’un de ses patients : «Pour
rester son propre maître en fin de vie, il faut s’y prendre tôt » démontre en peu de mots
qu’il ne faut pas attendre les dernières heures de sa vie pour se préparer à la mort.
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Steffen Eychmüller
La troisième conférence « Encourager la dignité voir l’être humain en grand » fut donnée
par Matthias Mettner, directeur des soins palliatifs et éthique d’organisation à Meilen. Il
évoqua les peurs, en particulier celle de dépendre d’autres personnes susceptibles de bles-
ser leur sens de la dignité. Cependant, Monsieur Mettner interprète cette dépendance
comme le « noyau de l’humanité », que l’on ne doit pas craindre mais au contraire accep-
ter comme un « besoin humain de l’importance des autres ».
L’humour subtil de l’artiste Baldrian sut tendre et faire rire le public entre ces trois con-
férences.
Ces dernières, suivies de la pause déjeuner, firent place à six ateliers, qui permirent
d’apporter un éclairage sur le thème du symposium et de l’approfondir sous différents as-
pects.
Pour finir, l’artiste Baldrian sortit de son rôle pour parler de ses expériences de patient
AML en isolement. Un moment émouvant et très personnel pour clôre le symposium de
digne manière.
L’artiste Baldrian
Membres de l’équipe de l’organisation
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Deux lauréates du prix du meilleur poster lors du symposium
Une exposition de posters a eu lieu pour la première fois pendant le symposium. En raison
de la grande qualité des sujets, il a été décerné deux prix au lieu d’un seul. Les deux lau-
réates présentent ci-après un résumé de leur projet.
Abstract du Katrin Conen
Valeur pronostique du stress et de l’activité physique chez les patients avec glioblastome
nouvellement diagnostiqainsi que leur entourage (TOGETHER). Une étude de cohorte
prospective et multicentrique
.
Katrin Conen1, Regula Schüpach1, Diana Zwahlen1, Benjamin Kasenda1, Mira Katan2, Mirjam Christ-
Crain3, Katharina Rentsch4, Ralf Beyrau4, Michael Weller2, Viviane Hess1
1 University Hospital Basel, Medical Oncology, Petersgraben 4, 4033 Basel, Switzerland
2 Clinic of Neurology, University Hospital Zürich, Frauenklinikstrasse 26, 8091 Zürich, Switzerland
3 University Hospital Basel, Endicrinology, Diabetology and Metabolism, Petersgraben 4, 4033 Basel,
Switzerland
4 University Hospital Basel, Laboratory Medicine, Petersgraben 4, 4033 Basel, Switzerland
Le diagnostic de glioblastome (GBM), une forme de tumeur cérébrale des plus fréquentes
et des plus malignes, déclenche chez le patient atteint et son entourage un stress chro-
nique dont le rôle n’a jusqu’à présent pas été vraiment analysé ni compris.
Le stress modifie la réaction neuroendocrinienne de l’organisme sur la tumeur. On ne sait
pas si de telles modifications influencent le pronostic de cette tumeur. Nous partons du fait
que le stress, mesuré sur la base d’une sécrétion quotidienne anormale de cortisol, est un
facteur indépendant du pronostic chez les patients avec GBM. Nous supposons également
que l’activité physique des patients et le stress de leur partenaire (facteurs dits modula-
teurs de stress) peuvent influencer encore plus le stress du patient et son pronostic. Le
but de cette étude de cohorte prospective et multicentrique est de définir le stress et les
facteurs modulateurs de stress, qui permettront à l’avenir d’élaborer des concepts de trai-
tements palliatifs multiprofessionnels innovants, facilitant pour le patient et son entourage
une approche thérapeutique plus globale, en adjuvant de la thérapie anti-tumorale. On
envisage d’étudier tous les patients nouvellement atteints, avec un partenaire chacun, qui
vont être soumis à une thérapie standard. L’étude recrute depuis Septembre 2014 à
l’hôpital universitaire de Bâle et à l’hôpital cantonal de Lucerne. Depuis vrier 2015, la
clinique universitaire de Zurich est également ouverte. A l’heure actuelle, l’étude compte 7
patient(e)s et 6 partenaires. Nous projetons au moins un autre centre d’étude au CHUV de
Lausanne.
Abstract du Sarah Cairo Notari
Les changements du fonctionnement sexuel de la femme pendant les premiers mois de
traitement pour un cancer du sein: une étude mixed-methods.
Sarah Cairo Notari, MSc
1
, Luca Notari, MSc1, Prof. Nicolas Favez, PhD1, Tania Antonini, MSc1, Béné-
dicte Panes-Ruedin, BNS
2
, Dr. Linda Charvoz, PhD
3
, & Prof. Jean-François Delaloye, MD2.
Nous avons mené une étude, financée par le Fonds National Suisse de la Recherche Scien-
tifique et qui était une partie du Pôle National LIVES, dont le but était de crire les chan-
gements du fonctionnement sexuel qui peuvent survenir chez des femmes ayant un cancer
du sein, au tout début du traitement de la maladie. Septante-cinq femmes, âgées entre 31
et 77 ans, ont été recrutée à l’Unité de Sénologie du CHUV (Lausanne). Nous avons procé-
à une analyse qualitative d’entretiens semi-structurés dans lesquels nous leur avons
demandé de décrire les changements éventuels de leur vie sexuelle ; elles ont également
1
Université de Genève, FPSE, Genève
2
Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (CHUV), Unité de Sénologie, Lausanne
3
Ecole d’Etudes Sociales et Pédagogiques (EESP), Lausanne
5
rempli des questionnaires auto-reportés qui ont permis de récolter des données quantita-
tives. Les résultats ont montré que les femmes peuvent suivre trois trajectoires diffé-
rentes dans cette situation: elles peuvent arrêter toute activité sexuelle ; garder une
sexualité tout en faisant l’expérience de multiples changements d’ordre quantitatif et/ou
qualitatif ; continuer à avoir une vie sexuelle comme avant la maladie (sans changement).
Les femmes ayant arrêté tout activité sexuelle ont en outre rapporté plus de perturbations
de l’image corporelle que les autres. Cette étude a montré que les fait de se focaliser sur
les trajectoires individuelles des femmes au travers la maladie pourrait aider à mettre sur
place des interventions plus adaptées pour les problèmes sexuels rencontrés dans cette
population.
3. Thème principal : Dignité et oncologie
- Maladie et liberté
- Interview du Dr. Clemens Brandt et du Dr. Steffen Eychmüller
Maladie et liberté
Jelscha Schmid, assistante au Département de Philosophie à l’université de Bâle
Mario Schärli, assistant au Département de Philosophie à l’université de Bâle
La dignité entre en jeu dès que l’on ne peut parler de prix. Au quotidien, on parle de prix
pour tout ce que l’on peut payer avec de l’argent. Comme nous donnons une valeur moné-
taire aux choses, nous les évaluons toutes selon un critère uniforme. La conséquence de
ce critère uniforme est donc que les choses évaluées ne sont pas seulement comparables,
mais également potentiellement interchangeables. Car si les valeurs marchandes des ob-
jets se laissent comparer, un système de références est engendré, selon lequel ce qui est
très différent devient comparable : c’est ainsi que nous pouvons nous demander si nous
préférons acheter un anneau en diamant ou une voiture ; ces deux objets remplissent des
buts totalement différents tout en étant pourtant comparables, car on peut les obtenir
avec le même argent. Cependant, nous posons implicitement des limites à cette compa-
rabilité universelle. Cela nous range d’appliquer ce système de valeurs marchandes s’il
s’agit de vie humaine : le prix d’un traitement médical peut-il dépasser la valeur d’un être
humain ? Nous sommes tentés de répondre : non.
Pourquoi avons-nous l’impression qu’il est incorrect de mesurer la valeur d’une vie
humaine et de la soumettre à des comparaisons ? Pourquoi rechignons-nous à lui donner
un prix ? Parce que, selon le philosophe allemand Emmanuel Kant, l’être humain possède
une
dignité.
Que faut-il entendre par ? Selon Kant, la dignité revient à ce qui a un
but
intrinsèque
.
4
Sous cet aspect, les hommes diffèrent des objets usuels, d’après Kant. Que
les hommes aient un but intrinsèque signifie que leur existence en soi est précieuse et que
l’on ne peut donc l’échanger contre quoi que ce soit. Ce qu’il faut entendre par devient
plus clair lorsque nous prenons conscience des objets qui nous entourent, auxquels nous
donnons un prix et qui n’ont qu’un but extérieur : un anneau en diamant est valable parce
qu’il
nous
plaît, une maison trouve son but en ce sens qu’elle
nous
offre un abri. La diffé-
rence centrale entre ces objets utilitaires et l’homme réside dans le fait que les choses ont
un but seulement
relatif
, c.a.d. par rapport à notre vécu. Personne ne serait prêt à dépen-
ser de l’argent pour quelque chose qui ne sert à rien et n’est apprécié par personne. Que
nous soyons prêts à payer quelque chose avec de l’argent signifie donc que ce quelque
chose
nous
est utile et que sa valeur dépend également de nous.
Selon Kant, ce qui possède une dignité présente un but intrinsèque. Cependant,
qu’est-ce qui justifie de différencier ainsi l’homme des choses ? Dans le document proba-
blement le plus célèbre de l’histoire de la philosophie concernant la notion de dignité,
l’
Oratio de hominis dignitate
du philosophe de la renaissance italienne Jean Pic de la Mi-
4
Emmanuel Kant,
Fondements de la métaphysique des moeurs,
éd. par Wilhelm Weischedel, Oeuvre
en douze volumes, Vol. VII (Frankfurt am Main: Suhrkamp, 1974), BA 7779.
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