UN HOMME CONSULTE L’EJACULATION PREMATUREE EST AU PREMIER PLAN Robert PORTO, Marseille INTERÊT DE LA QUESTION L’ITÉRÊT DE LA QUESTION REPOSE SUR: La fréquence de l’EP L’impact de l’EP La différence de perception du trouble selon le sexe L’implication du couple LA FRÉQUENCE DE L’EP La fréquence de l’EP est variable selon les études: • 26% sur 5637 sujets (Gebhart & Johnson 1979) • 36 à 38% sur 23 études (Spector & Carey 1990) • 6,5% « E.P.souvent » 33,1% « E.P.parfois » = enquête CSF sur 1264 sujets des 2 sexes (Levinson 2008) • Moins de 5% par chronométrage, (Waldinger 2008) (sous-entend l’existence d’une forme subjective d’E.P. à IELT normale ou longue) EFFETS DE L’ EP SUR LE PATIENT -L’impact négatif sur la qualité de vie du patient est supérieur à celui de la Dysfonction Érectile! • • • • • Dévalorisation, Culpabilité, Inhibition, Sentiment de déréliction …..Seront à traiter avant de s’attaquer spécifiquement à l’EP • Dans tous les cas l’E.P affecte le moral et la qualité de vie sexuelle et générale non seulement du patient mais aussi de la partenaire. « Si les hommes rompaient avec leur mode de penser égocentrique pour imaginer une vie où ce serait à eux de subir constamment l’interruption de l’acte avant la résolution orgastique de la tension, ils se rendraient compte du martyre sexuel enduré par les femmes… » Sandor FERENCZI « De la portée de l’éjaculation précoce » 1908/1912 E.P = REACTIONS DE LA PARTENAIRE • Tolérance, Patience, • Culpabilité : « je suis trop lente à émouvoir » « je l’excite trop » • Résignation : avec détresse avec masturbation compensatoire Frustration : • Espacement des rapports : indifférence agressivité • Adultère : • Rupture : libidinale et affective avec ou sans séparation IMPACT SUR LA PARTENAIRE ET LE COUPLE – L’EP interdit qu’on le stimule génitalement – Il se protège de la contamination érotique et s’isole des réactions de la partenaire – La partenaire, frustrée, devient indifférente puis hostile – Les rapports se raréfient puis s’arrêtent – Rupture de la communication, fossé affectif. – Lui: humilié, culpabilisé, dévalorisé……DE? – Elle: déstabilisée, anxieuse,……..agressive? LA DIFFÉRENCE DE PERCEPTION DU TROUBLE • Les femmes semblent moins sévères que les hommes dans le vécu de l’E.P. : – 6% contre 9% (Fugl-Meyer 2002) – 27% contre 32% (Byers & Grenier 2003) • Pour elles, cela représente moins un problème que pour les hommes : 39% vs 49% (Fugl-Meyer 2002). • Du moins au début où l’EP affecte la satisfaction sexuelle mais pas encore la relation globale. • Par contre les DS Masculines comme l’EP jouent un rôle plus important dans la discorde conjugale que les DS Féminines. (Rust 1988) VECU DE L’EP DANS LE COUPLE Les hommes consultent peu pour E.P.= 1,3% (6,3% si une D.E. est associée et jusqu’à 10,5% si un trouble du désir s’y ajoute) Levinson 2008. – Car la (dys)fonction sexuelle n’a pas pour tous une place prépondérante dans la vie sexuelle en général. – Le vécu de l’E.P ne dépend pas seulement du délai éjaculatoire mais aussi de l’état relationnel antérieur du couple. – Soit la sexualité est plus basée sur le lien affectif que sur la fonction et l’EP sera relativement bien acceptée; – Soit l’EP est vécue de manière frustrante car le contexte relationnel est défaillant; – Soit l’EP est minorée car d’autres problèmes prévalent. – Soit l’EP aggrave la situation du couple IL Y A TOUJOURS UN COUPLE DERRIERE LE SYMPTOME E.P. Dans l’E.P plusieurs arguments justifient que le couple soit impliqué dans l’évaluation et le traitement= • En cas de sexualité masculine solitaire: l’E.P.n’existe pas. • L’EP primaire implique souvent le couple mère/fils. • L’EP secondaire implique le couple patient/ partenaire car celle ci peut en être la cause, l’entretenir ou l’aggraver. • L’E.P a toujours des conséquences sur la partenaire. • Le problème posé par l’E.P ne dépend pas seulement de l’IELT mais aussi du comportement des deux partenaires. - ORGASME PAR STIMULATION CLITORIDIENNE & EJACULATION RAPIDE Cognitive and partner related factors in rapid ejaculation : Differences between dysfunctional and functional men. World J Hartmann U, Schedlowski M, Krüger THC. Urol 2005 ; 23(2) : 93-101. COMPARAISON SUJETS E.P N = 45 TÉMOINS N =72 ORGASME FÉMININ PRESQUE TOUJOURS 33% 82% ORGASME FÉMININ JAMAIS OU RAREMENT 44% 4% RÉACTION FÉMININE : 59% « POSITIVE » « NÉGATIVE » 23% OU « INAPPROPRIÉE » « MITIGÉE » PEUR DE L’ABANDON À CAUSE DE L’E.P 19% 28% E.P ET DYSFONCTION SEXUELLE FÉMININE 578 FEMMES VIVANT EN COUPLE CONSULTANT POUR D.S.F CHEZ LE PARTENAIRE MOTIF DE CONSULTATION E.P parfois E.P au début du Problème féminin Problème de désir 29,9% 21,3% Problème de lubrification 42,7% 35,4% Anorgasmie 47,8% 34,8% Absence de plaisir 51,5% 48,5% Riley & Riley (2005) E.P ET DYSFONCTION SEXUELLE FÉMININE • Etude FEMALES (Fisher 2007): 59% orgasmes fréquents/versus 39%si partenaire EP • Dans l’étude qualitative de May (2006), l’EP a des conséquences négatives sur la Q. de Vie de la partenaire VULNERABILITES ALEXITHYMIE : ( Simonelli et al. Sexologies 2008) TORONTO ALEXITHYMIA SCALE (TAS-20) 120 E.P PRIMAIRES (90% IELT 2 MIN) 120 TÉMOINS 25% 10% ZONE FRONTIÈRE 61>TAS-20>51 33% 27% NON ALEXITHYMIQUE TAS-20≤ 51 42% 63% ALEXITHYMIE : TAS-20 ≥ 61 INDEX DE SEVERITÉ DE L’E.P (PESI) CORRÉLATION POSITIVE AVEC LE TAS-20 PLUS LE DEGRÉ D’ALEXITHYMIE EST ÉLEVÉ, PLUS L’E.P EST SÉVÈRE. PHOBIE SOCIALE : nette corrélation avec l’ EP ( Tignol , 200 PROPÉDEUTIQUE Avant de se lancer dans une stratégie thérapeutique, il faut demander ce que chaque membre du couple attend du traitement: Si les attentes sont trop différentes, entreprendre de traiter cette inadéquation en premier. Si la demande, bien que commune n’est pas réalisable, le traitement initial devra s’attaquer aux attentes irréalistes du couple. Dans ces thérapies où les motivations comptent plus que les aptitudes, il faudra faire évoluer ces patients de la réaction vers l’action, vrai moteur de changement. MODALITÉS DE PRISE EN CHARGE • L’EP est un réflexe, échappant donc à la volonté. • On peut le reconditionner par une meilleure tolérance des niveaux élevés d’excitation. • Mais tenir compte uniquement des aspects fonctionnels de l’EP serait une erreur! • L’EP concerne un sujet avec une histoire précoce • Et des facteurs individuels de vulnérabilité psycho logique (alexithymie,phobie sociale..) ou biochimiques(serotonine) • Le réflexe éjaculatoire est modulé par le contexte affectif (conjugal, familial) et professionnel, et réagit à des stimuli environnementaux: facteurs étiologiques ou d’entretien inhérents à la partenaire, son caractère, sa personnalité. • Enfin l’EP a des répercussions sur le sujet et sa partenaire qu’il faut impérativement prendre en charge. CIBLES ÉTIOLOGIQUES • Hypothèse Psycho-dynamique: Sadisme inconscient envers la femme né de la relation à la mère (Abraham 1949) • Hypothèse Neuro-Biologique: Diminution de la transmission centrale de Sérotonine(5HT).Hypersensibilité des récepteurs 5HT1a. Hypo sensibilité des récepteurs 5HT2c (Waldinger2005) • Hypothèse du Conditionnement Précoce: Premières expériences sexuelles «hâtives». (Masters &Johnson1970) Conditionnement sociologique au double standard. • Hypothèse de l’Anxiété: blocage des sensations pré-éjaculatoires empêchant ainsi la modulation du réflexe. (Kaplan 1983) • Hypothèse Psycho Relationnelle: Conflits d’intérêt ou de pouvoir, facteurs féminins: personnalité pathologique, attitude castratrice, DSF, (Kaplan 1974) • Hypothèse de la Fréquence Coïtale: Il existe une corrélation entre délais éjaculatoire et fréquence coïtale.(Spiess 1984) • Selon le fonctionnement psycho relationnel et sexuel du couple, chacun des domaines précédents fera l’objet de techniques thérapeutiques adéquates. METHODES THERAPEUTIQUES Traitements Psychologiques • •Sensate focus •Squeeze technique (M & J 1970) •Stop & go (Semans 1956; Kaplan 1974) Thérapies cognitivo-comportementales : •Modulation de l’excitation par gestuelle coïtale spécifique (Kempeners 2004) •Biblio thérapie (De Sutter 2002) • Relaxation, hypnose : Désensibilisation systématique • Thérapies psycho - corporelles: •Prendre en charge les facteurs inhérents à la partenaire • Psychothérapies : •Traiter les conséquences de l’EP sur chacun • •Diminuer l’anxiété de performance du patient •Renforcer son estime personnelle Psychanalyse : Résoudre un conflit Oedipien • Thérapie d’affirmation de soi : • Sexotherapie de couple : - Mieux gérer les facteurs féminins & les conséquences de l’E.P - Améliorer la communication affective et sensorielle. - Optimiser l’adaptation sexuelle réciproque. • METHODES THERAPEUTIQUES APPROCHE PHARMACOLOGIQUE • Anesthésiques locaux:spray, crèmes avec Lidocaïne et Pilocarpine (Atikeler 2002) -irritations, transfert d’anesthésie et D.S ont été signalés (Choi 200, Slob 2000) • Psychotropes : on utilise les effets secondaires de certains antidépresseurs : -Clomipramine (Porto 1981) -ISRS : Fluoxétine, Paroxétine, Sertraline (Waldinger 1998), usage chronique ou à la demande (6h00 à 12h00 avant). -Dapoxétine : efficace à la demande (4h00 avant). • IPDE5 : Sur 5 articles soumis à Comité de lecture, 3 études ont montré un effet bénéfique en monothérapie sur IELT, contrôle éjaculatoire et satisfaction sexuelle. -Deux études ont montré la supériorité de l’association IPDE5+ISRS sur l’ISRS seul (Chen 2007) -Une autre étude n’a pas retrouvé d’effet significatif du Sildénafil sur la latence éjaculatoire mais seulement une augmentation de la confiance et une diminution de la phase réfractaire (Mac Mahon 2005); E.P. PRIMAIRE CONSULTANT SEUL -Psychothérapie -Relaxation, Hypnose -Pharmacothérapie -Action indirecte sur la partenaire : Sensibiliser au soutien de la partenaire pour atténuer les effets négatifs de l’E.P E.P. PRIMAIRE CONSULTANT EN COUPLE Parallèlement : action directe sur la partenaire Une approche comportementale de l’E.P devient possible (Squeeze) E.P. ACQUISE CONSULTANT EN SOLO • Évaluation des facteurs déclenchants en particulier ceux inhérents à la partenaire • Action indirecte sur les facteurs relationnels • Psychothérapie d’affirmation de soi • Pharmacothérapie E.P. ACQUISE CONSULTANT EN COUPLE • • • • • • • • • Évaluer le trouble dans ses circonstances d’apparition et ses facteurs déclenchants. Impliquer astucieusement la partenaire (« besoin d’elle pour mieux soigner le patient ») et évaluer son rôle : personnalité pathologique. , attitude castratrice… DSF … Important: rencontrer la partenaire isolément (s’assurer de sa motivation, avoir son avis..) Éclairer avec pédagogie l’ensemble des problèmes. Rapprocher si nécessaire les attentes divergentes. Obtenir un objectif commun: alliance thérapeutique. Traiter chaque problème permettant de résoudre le suivant (facteurs féminins, conséquences de l’EP,..). Favoriser la reprise de l’intimité affective et sensuelle (Sensate Focus ) Ne traiter spécifiquement l’EP qu’une fois le contexte relationnel sécurisé : thérapie comportementale (Squeeze Technic), traitement pharmacologique . LES TRAITEMENTS MÉDICAMENTEUX S’INTÉGRERONT UTILEMENT À UN CERTAIN MOMENT DE LA PRISE EN CHARGE POUR FRANCHIR UN CAP THERAPIE COMBINEE DE L’ ÉJACULATION PRÉMATURÉE Comparaison du délai éjaculatoire intra vaginal (IELT) chronométré chez des sujets éjaculateurs précoces : Traitement pharmacologique durant 2 mois soit Paroxétine 20mg (randomisation) soit Premjact spray Suivi par 2 mois de thérapie comportementale standardisée (excluant la masturbation solitaire ou par la femme) • Les traitements pharmacologiques ont amélioré significativement le délai éjaculatoire. • La thérapie combinée a permis de maintenir le délai éjaculatoire. • L’amélioration relationnelle signalée par les sujets ne dépend pas de la latence éjaculatoire (durée) mais du retour de l’intimité. • Le traitement pharmacologique contribue à stabiliser la relation ce qui favorise l’évolution de la thérapie comportementale, entraînant une amélioration du délai éjaculatoire initial. (Steggal et al 2008) TAKE HOME MESSAGES • N’oubliez pas le clitoris! Car l’éjaculateur rapide ignore généralement la physiologie orgasmique de sa partenaire. Cela vous permettra de faire l’économie du traitement de l’EP qui ne résout rien pour les clitoridiennes exclusives .(et d’éviter des désillusions chez celles qui ignorent qu’elles le sont) • N’oubliez pas enfin que la sexualité ne se résume pas à l’orgasme. D’autres joies sont aussi exquises. Les dimensions relationnelle, affective et sensuelle participent tout autant si non plus à la satisfaction sexuelle, en particulier chez la femme. • Ces recommandations sont à bien connaître… Mais sachez changer votre fusil d’épaule en cas de besoin : Soyez Créatifs!