Wissenschaft · Science 5 La CMPS informe sur l’adaptation pré-opératoire du traitement médicamenteux Faut-il arrêter les médicaments avant une opération planifiée? Irene Vo g el K a hm a n n Différentes questions se posent chez les patients recevant un traitement médicamenteux et devant subir une intervention chirurgicale planifiée: est-ce que les médicaments prescrits doivent ou peuvent être pris jusqu’au jour de l’intervention? Certains doivent-ils être arrêtés? Si oui, quand? Par mesure d’économies, les hôpitaux ont tendance à convoquer les patients le jour-même de l’opération. La question du traitement médicamenteux pré-opératoire concerne donc de plus en plus souvent le pharmacien d’officine. Les problèmes éventuels et les mesures envisageables sont abordés ci-après. bibliographie disponible comporte principalement des rapports de cas, sans aucune revue systématique. Il n’existe aucune étude randomisée contrôlée de qualité satisfaisante ou de revue systématique. Les différents hôpitaux travaillent donc d’après des directives internes qui peuvent être très différentes les unes des autres. De même, aucune directive valable sur le plan général ne peut être formulée pour le conseil en pharmacie. Il faut si besoin prendre contact avec le médecin traitant. L’examen de la littérature met en avant la nécessité de favoriser un accord entre le médecin de famille, le spécialiste, le chirurgien, l’anesthésiste, le pharmacien et le patient. [5] Lors de la prise en charge pré-opératoire du traitement médicamenteux, on doit évaluer très soigneusement l’équilibre bénéfice/risque chez chaque patient. Comme déjà souligné, l’arrêt d’un médicament peut entraîner une exacerbation de la maladie de base pouvant s’accompagner d’un risque opératoire accru. Par ailleurs, certains médicaments ne doivent en aucun cas être arrêtés; des effets positifs ont en effet pu être mis en évidence sur l’évolution pré- et post-opératoire du patient. Chez les patients à risque cardiaque, les bêtabloquants ont ainsi un effet cardioprotecteur dans les interventions non cardiologiques car ils réduisent l’incidence de l’ischémie myocardique. Les groupes de médicaments qui ne doivent, par principe, pas être arrêtés figurent au tableau 1. Ces substances seront prises sans modification de leur posologie, y compris le matin de l’intervention. Toutes les interventions chirurgicales constituent un traumatisme. Le corps réagit à ce stress par des modifications hormonales comme une augmentation du cortisol, des catécholamines et du glucagon. Ces réactions peuvent également concerner l’ACTH (hormone adrénocorticotrophique), la vasopressine, la prolactine, l’aldostérone, l’angiotensine et les cytokines. L’ampleur de l’intervention, le type d’anesthésie, la durée de la carence alimentaire, les affections antérieures, les infections et l’angoisse influencent l’importance des réactions d’adaptation. Il est évident qu’un traitement ininterrompu peut entraîner des effets indésirables pendant ou après l’intervention, que ce soit par exemple un déséquilibre métabolique, des interactions avec les médicaments anesthésiques, une tendance accrue aux saignements ou à l’infection. Cependant, il peut être dangereux d’arrêter tous les médicaments pendant la période pré-opératoire. Une exacerbation de la maladie de base peut être ainsi déclenchée, engendrant éventuellement un risque opératoire accru, des Tableau 1: complications immédiates après l’intervention ou un Médicaments ne nécessitant aucune modification du traitement moins bon pronostic. [1] Cette situation peut être R Antagonistes 5-HT3 aggravée si le patient ne peut prendre aucun médicaR Anti-arythmiques ment par voie orale en post-opératoire et si des méR Anti-hypertenseurs dicaments nécessaires à son état ne sont pas dispoR Anticonvulsivants nibles dans une version parentérale. [2,3] Poursuivre le traitement sans rien Conduite à tenir pour la prise en charge changer, y compris le matin de l’intervention Au manque d’études cliniques satisfaisantes, s’ajoute l’absence de directives basées sur la preuve dans la prise en charge pré-opératoire d’un patient observant un traitement médicamenteux. Bien que le premier travail sur le sujet ait été publié dès 1988, [4] la pharmaJournal 04 | 2.2008 R Antiparkinsoniens R Antirétroviraux (VIH) R Bronchodilatateurs sauf théophylline: arrêter 12 heures avant l’intervention R Digitaliques R Nitrés R Statines Wissenschaft · Science 6 Pour d’autres groupes de substances, le médicament perfusion d’insuline au lieu des antidiabétiques sera généralement arrêté ou sa dose fera l’objet oraux. d’une adaptation. Il s’agit surtout des médicaments Chez les patients déjà sous insulinothérapie, qui ont un effet sur le métabolisme, les électrolytes et l’insuline d’action prolongée doit être remplacée au la coagulation sanguine ou les substances pouvant plus tard la veille de l’intervention par une insuline à interagir avec les médicaments instaurés pendant ou durée d’action moyenne ou courte. Le jour de l’interaprès l’intervention. Les catégories importantes sont vention, le patient recevra en traitement une perfuregroupées au tableau 2 et discutées dans les sec- sion d’insuline. [8] En règle générale, on utilise une tions suivantes de cet article. perfusion de glucose à 5–10% contenant de l’Actrapid®; la posologie dépend d’une part des besoins Tableau 2: habituels en insuline et d’autre part de la glycémie Médicaments dont l’adaptation est généralement nécessaire mesurée à jeun. R Antidiabétiques R Hormonothérapie thyroïdienne R Corticothérapie R Diurétiques R Psychotropes Lors de l’opération d’un patient présentant une hypothyroïdie, la survenue d’un taux accru de complica– Inhibiteur du TNF-α tions est possible, notamment une occlusion intesti– Méthotrexate nale ou un état confusionnel, voire un délire. [9] R Substances ayant un effet sur la coagulation sanguine Plusieurs systèmes organiques peuvent être atteints – Anticoagulants comme la fonction cardiovasculaire et pulmonaire, la – Inhibiteurs de l’agrégation plaquettaire motilité gastro-intestinale, l’équilibre hydroélectroly– AINS tique ou l’hémostase. C’est la raison pour laquelle il R Inhibiteurs de l’ovulation, hormonothérapie de faut normaliser l’état métabolique du patient avant substitution une intervention prévue. Si l’intervention chirurgiR Phytothérapie cale est urgente, le patient présentant une hypothyR Antibiotiques roïdie grave se voit administrer de la thyroxine et des glucocorticoïdes en pré-opératoire. Dans ce cas, on Antidiabétiques: modification du métabolisme doit prendre garde à une hypersensibilité accrue à par l’intervention certains médicaments instaurés en prémédication dont la dose devra être réduite. Il s’agit notamment Chez le patient diabétique opéré, l’excrétion des hor- des anxiolytiques et des sédatifs. mones anti-régulatrices comme le cortisol, les catéLes hormones thyroïdiennes ont un effet direct à cholamines, le glucagon et les hormones de crois- la fois inotrope et chronotrope. Le risque périopérasance augmente la gluconéogenèse, la glycogénolyse, toire dans l’hyperthyroïdie est donc surtout caractéla protéolyse, la lipolyse et la cétogenèse. Il en ré- risé par des problèmes cardiovasculaires. Le risque sulte un risque accru de catabolisme métabolique de fibrillation auriculaire est p. ex. évalué entre 10 et avec hyperglycémie, déshydratation (diurèse osmo­ 20%. [10] On redoute surtout une crise thyréotoxique tique) et cétose. Cette situation peut s’aggraver par post-opératoire pouvant s’accompagner de fièvre, les carences alimentaires préde tachycardie, de confusion opératoires. [6] La prise en mentale, de défaillance cardioUn médicament non arrêté charge pré-opératoire du diavasculaire et éventuellement bétique est fonction du type décès du patient. En cas peut entraîner des effets indé- du de diabète, des traitements en d’hyperthyroïdie grave, il fausirables pendant ou après une drait donc déplacer une intercours et de l’importance de l’intervention prévue. vention élective jusqu’à norintervention chirurgicale Chez les patients diabétimalisation de l’état métaboliques non insulinodépendants, que. En cas d’hyperthyroïdie les antidiabétiques oraux devraient être arrêtés le jour légère, l’intervention pourra être effectuée et le pade l’intervention. La metformine doit être arrêtée tient sera traité par bêtabloquants (p. ex. 10 à 40 mg 48 heures avant l’intervention afin d’éviter la sur­ de propranolol par jour). Les médicaments thyréo­ venue d’une acidose lactique. (L’acidose lactique est statiques doivent être pris jusqu’à la veille de l’interune complication métabolique grave d’un traitement vention. [11] par la metformine qui se traduit par une dyspnée acidosique, des douleurs abdominales, une hypo- Corticostéroïdes: attention à l’insuffisance surthermie puis un coma. Depuis 1990, plus de 30 cas de rénalienne ce type ont été décrits en Allemagne, dont la moitié a eu une évolution mortelle! [7]). Lors d’interven- Au cours d’une intervention chirurgicale, on observe tions importantes, on devra plutôt administrer une initialement une réaction à la situation de stress qui R Traitement de fond de la polyarthrite rhumatoïde Arrêter le traitement, l’adapter ou observer les effets indésirables éventuels pharmaJournal 04 | 2.2008 Hormones thyroïdiennes: hypo- ou hyperthyroïdie? Wissenschaft · Science se traduit par une augmentation de l’ACTH (hor- Psychotropes: prendre garde aux interactions mone adrénocorticotrophique) et du cortisol avec possibles perte du rythme circadien. Tandis qu’en post-opératoire, l’ACTH redescend rapidement à des valeurs En cas de poursuite du traitement, on devra évaluer subnormales, le taux de cortisol reste élevé pendant chez chaque patient le risque d’interaction (p. ex. plusieurs jours et ne baisse que lentement. Cette li- avec les médicaments anesthésiques) par rapport au bération accrue de cortisol est importante afin de risque d’une aggravation de la maladie de base, voire permettre des processus adaptatifs après l’interven- la survenue de symptômes de sevrage en cas d’arrêt tion, comme par exemple la mise à disposition de du traitement. On peut entreprendre une démarche glucose, la vasoconstriction et des réactions immuni- telle que celle présentée au tableau 4. Certains extaires de défense accrues. perts recommandent toutefois l’administration ininDans le cadre d’une corticothérapie chronique (> 1 semaine par équivalent de dose de prednisolone > 5–10 mg par jour), l’excrétion du cortisol est dimi- Tableau 4: Conduite à tenir avec les psychotropes [15,16] nuée par la dépression de l’axe hypothalamo-hypoMédicament Conduite à tenir Remarques physo-surrénalien. Ceci peut entraîner une adaptation insuffisante au stress en cas d’intervention Lithium Arrêter 72 heures Risque accru d’intoxication par chirurgicale pouvant aller jusqu’à une crise surrénaavant l’intervention le lithium lienne. Le tableau 3 présente les situations dans les(demi-vie du lithium: R par troubles hydro-électroly­ quelles une prévention périopératoire du stress doit environ 24 heures) tiques pendant l’intervention, être réalisée avec du cortisol ainsi qu’un schéma posurtout chez les patients hémosologique possible. ­dynamiquement instables R par interaction avec les AINS, diurétiques Tableau 3: Conduite à tenir pour prévenir le stress par le cortisol [12,13] Antidépresseurs Diminuer 2 semaines Effet direct sur le système tricycliques avant l’intervention cardiovasculaire Intervention chirurgicale (en cas d’arrêt brutal, Interactions: anesthésiques importante ET risque de syndrome R potentialisation de l’effet R corticothérapie Corticothérapie normale > 1 semaine par un équi- le matin de l’intervention valent de dose de predni- + 25 mg d’hydro­ solone > 5–10 mg/jour cortisone en induction R corticothérapie topique sur de grandes surfaces R en post surrénalectomie, en post hypophysectomie anesthésique + hydrocortisone de sevrage) IMAO de 1re et 2e géné- ration: p. ex. tranylcy- des catécholamines Arrêter 2 semaines Interactions: péthidine, tramadol avant l’intervention R réaction d’excitation grave, promine, clorgyline (non dépression respiratoire, coma commercialisés en CH) 75–100 mg/jour pendant IMAO de 3e génération: Arrêter 24 heures IMAO sélectifs et réversibles 48 à 72 heures moclobémide avant l’intervention R risque d’interaction faible R insuffisance surrénalienne ISRS Arrêter 24 heures Interactions: péthidine, tramadol, Interventions moyennes Toujours corticothérapie (inhibiteur sélectif avant l’intervention dextrométhorphane, métoclopra- et légères habituelle le matin de du recaptage de la mide l’intervention sérotonine) R syndrome sérotoninergique + éventuellement (hyperthermie, instabilité une administration végétative, coma) supplémentaire d’hydrocortisone en prévention du stress Neuroleptiques Données Interactions: bibliographiques R réduction de l’effet des inconsistantes; recommandation générale: Diurétiques: troubles électrolytiques Dans le cadre de l’anesthésie, les diurétiques peuvent entraîner des modifications volumiques et électrolytiques (troubles hydro-électrolytiques), notamment du potassium. Des baisses de pression artérielle et des troubles du rythme cardiaque peuvent être la conséquence de ces modifications. C’est la raison pour laquelle les diurétiques seront généralement pris jusqu’à la veille de l’intervention et arrêtés le jour de l’opération chirurgicale. [14] pharmaJournal 04 | 2.2008 arrêter 24 heures avant l’intervention anesthésiques par inhalation R augmentation de l’effet des anesthésiques intraveineux R allongement de la durée du blocage neuromusculaire des myorelaxants non dépolarisants R risque de survenue d’un syndrome malin des neuroleptiques (hyperthermie, aki­nésie, rigidité musculaire, dysfonction végétative, troubles de conscience, augmentation du taux sérique de CPK) 7 Wissenschaft · Science terrompue du traitement en supposant que le danger d’interaction était surévalué. 8 Traitement de fond de la polyarthrite rhumatoïde: prendre garde à l’immunosuppression Une attention spéciale doit être accordée au traitement de fond de la polyarthrite rhumatoïde. Les corticoïdes (cf. chapitre sur les corticoïdes) et le méthotrexate peuvent être maintenus en période périopératoire. Pour le méthotrexate, il faut prendre en compte le danger d’une colonisation par un staphylocoque doré au niveau de la peau et du nez. Avant une intervention de chirurgie orthopédique (p. ex. mise en place d’une prothèse), il peut être utile d’effectuer une désinfection du nez (p. ex. avec une pommade nasale à base de mupirocine) afin d’exclure ces sources possibles d’infection. Les inhibiteurs du TNF-α doivent absolument être interrompus, car ils peuvent s’accompagner d’un Tableau 5: Conduite à tenir avec l’inhibiteur du TNF-α Médicaments Conduite à tenir Etanercept Arrêter environ 1 à 2 semaines avant Enbrel® l’intervention Infliximab Arrêter environ 6 semaines avant Remicade® l’intervention Adalimumab Arrêter environ 4 semaines avant Humira® l’intervention Tableau 6: Anticoagulants oraux – relais avec une HBPM Médicament Conduite à tenir Phenprocoumone Arrêter 1 semaine avant l’intervention prévue, commencer Marcoumar® l’HBPM dès que l’INR est en dehors de la zone thérapeutique Acénocoumarole Arrêter 3 jours avant l’intervention prévue, commencer Sintrom® l’HBPM dès que l’INR est en dehors de la zone thérapeutique Tableau 7: Conduite à tenir avec un inhibiteur de l’agrégation ­p laquettaire selon l’optique du chirurgien/de l’anesthésiste (pour l’optique du cardiologue, voir texte) Médicaments Arrêt avant une intervention planifiée Dipyridamole + aspirine 7 jours Arrêt avant une anesthésie/ ponction à proximité de la moelle épinière 48 heures Asasantin® Aspirine 7 jours 48 heures 7 jours 7 jours Aspirin cardio® Clopidogrel Plavix® pharmaJournal 04 | 2.2008 risque infectieux nettement plus élevé pouvant aller jusqu’à un sepsis fulminant potentiellement mortel. En raison de la pharmacocinétique très différente des substances actuellement utilisées, on doit se rapporter aux recommandations figurant au tableau 5. [17] Anticoagulants oraux: relayer avec une héparine à bas poids moléculaire Si les anticoagulants oraux étaient arrêtés en période pré-opératoire en raison d’un risque hémorragique accru sans qu’un traitement de remplacement soit mis en place, on provoquerait une lacune anticoagulante à l’origine d’un risque aggravé de complications thrombo-emboliques. Pour réduire ce risque, il est nécessaire d’instaurer un traitement de relais par héparine à bas poids moléculaire (HBPM). L’héparine choisie devra avoir une demi-vie plus courte et permettre un meilleur contrôle de l’hémostase (cf. tableau 6). La recommandation posologique préconisée est celle d’une héparinothérapie complète conforme à celle proposée dans le traitement aigu d’une thrombose veineuse de jambe ou d’une embolie pulmonaire. [18] Dans beaucoup de petites interventions, l’anticoagulation orale ne doit pas être interrompue, ou que de façon limitée. C’est le cas, par exemple, d’un grand nombre d’interventions dermatologiques ou dentaires. Une adaptation de la dose devra être réalisée après évaluation du risque hémorragique individuel du patient. Outre le type d’intervention, il faut également tenir compte de la procédure anesthésique choisie. Selon le risque individuel, l’héparine à bas poids moléculaire sera administrée jusqu’à la veille de l’intervention ou jusqu’au jour-même de celle-ci. Inhibiteurs de l’agrégation plaquettaire: ­ rocédures spécifiques au patient p Pour les substances instaurées dans le cadre d’une inhibition de l’agrégation plaquettaire, il n’est possible de fournir aucune règle universelle avant une intervention planifiée. Une procédure appropriée et individuelle doit être définie en fonction de l’intervention prévue (risque hémorragique), de la procédure anesthésique choisie (augmentation du risque hémorragique, notamment dans les anesthésies régionales réalisées à proximité de la moelle épinière) et du risque de chaque patient. [19] Les règles figurant au tableau 7 ont été établies selon l’optique du chirurgien/de l’anesthésiste. Selon l’optique des cardiologues, un traitement par l’aspirine déjà instauré devrait être poursuivi malgré une tendance hémorragique accrue. Une revue systématique basée sur 10 études randomisées et 38 études d’observation (comportant plus de 40 000 patients examinés) a démontré que l’arrêt pré-opéra- Wissenschaft · Science Tableau 8: Délai d’arrêt avant intervention Médicaments Arrêt avant l’intervention [en jours] Acémétacine 2 Dexibuprofène 2 Dexkétoprofène 2 Diclofénac Inhibition transitoire de l’agrégation plaquettaire possible à doses élevées 2 (200 mg) Etodolac 2 Flurbiprofène 2 Ibuprofène 2 Indométacine 2 Ketorolac 2 Lornoxicam 2 Analgésiques ayant une influence sur l’hémo­ stase: respecter autant que possible le délai d’arrêt selon la demi-vie de la substance Les analgésiques qui ont une influence sur la coagulation sanguine devraient être arrêtés avant une intervention planifiée en fonction de leur demi-vie. Ils peuvent aussi être remplacés par des substances alternatives comme les inhibiteurs de la COX-2 (célécoxib), le paracétamol ou un analgésique opiacé (cf. tableau 8). Contraception hormonale/traitement hormonal de substitution (THS): risque accru de thrombo-embolie Le traitement par des hormones féminines constitue un facteur de risque de thrombo-embolie veineuse Méfenamique (acide) 2 en plus de celui lié à l’intervention chirurgicale. C’est Méloxicam (inhibe uniquement et de la raison pour laquelle on recommande d’arrêter la 7 préférence la COX-2) prise de contraceptifs oraux ou de THS quatre à six Nabumétone 7 semaines avant une intervention planifiée. [22,23] Naproxène 2 Cet intervalle relativement long est nécessaire pour Nimésulid 7 la normalisation des modifications des paramètres de Phénylbutazone 7 coagulation et de fibrinolyse induites par les hormoPiroxicam 7 nes. En effet, les demi-vies des facteurs de coagulaDérivés de l’acide salicylique (aspirine, tion oscillent entre cinq heures (facteur VII) et cinq à 7 bénorilate, extrait de Salicis)* sept jours (fibrinogène, facteur XIII). Un taux d’antiTénoxicam 7 thrombine abaissé recommence à monter environ neuf jours après l’arrêt d’un inhibiteur de l’ovulation * pour les exceptions, voir chapitre sur les inhibiteurs de l’agrégation plaquettaire et atteint son taux initial au bout de 18 jours environ. La formation de la thrombine commence aussi à se normaliser après cette période. Un intervalle de toire de l’aspirine était associé à un syndrome cardio- temps plus court entre la fin de la prise des hormovasculaire aigu chez 10% des patients. Dans le cas où nes et l’intervention chirurgicale pourrait avoir des le traitement par l’aspirine était maintenu, les com- effets délétères. En effet, la restauration des paramèplications hémorragiques étaient multipliées par 1.5, tres individuels à leurs valeurs initiales évolue de fasans que leur gravité augmente pour autant (à l’ex- çon variable sur le plan chronologique, ce qui fait que ception des interventions inl’équilibre de l’hémostase ne tracrâniennes et des prostatecpeut être atteint avant. La Conduite à tenir vis-à-vis des tomies transuréthrales). [20] ­reprise des inhibiteurs de Les patients traités par un médicaments pris avant l’inter- l’ovulation et du THS devra stent coronarien recevaient un au plus tôt, deux vention: l’évaluation individuelle s’effectuer, double traitement antiagrésemaines après la mobilisation gant plaquettaire, comportant bénéfice/risque est importante complète. de l’aspirine et du clopidogrel, Certains experts recompour chaque patient pendant au moins quatre semandent de poursuivre, sans maines s’ils avaient reçu un interruption, la prise des horstent nu et pendant six à douze mois dans le cas où mones avant et après l’intervention chirurgicale, il s’agissait d’un stent couvert. Le clopidogrel ne de- cette longue pause d’administration pouvant en­ vait pas être arrêté pendant cette période en raison gendrer des problèmes éventuels. d’un risque d’occlusion thrombotique des vaisseaux coronariens cibles, potentiellement mortelle. Étant Phytothérapie: interroger les patients donné que le risque hémorragique est fortement augmenté sous clopidogrel, celui-ci devrait être ar- Différentes substances utilisées en phytothérapie rêté sept jours avant une intervention élective. Après peuvent avoir une influence sur la coagulation sanl’implantation d’un stent, les interventions chirurgi- guine, hormis l’interaction qu’elles peuvent déclencales doivent donc, à chaque fois que possible, être cher avec les produits utilisés au cours de l’anesthéeffectuées en dehors du traitement anti-plaquettaire sie. Il n’existe aucune étude de grande envergure obligatoire mentionné. [21] évaluant la fréquence et la gravité de cet effet indésipharmaJournal 04 | 2.2008 9 Wissenschaft · Science rable hémorragique. De nombreuses études de cas font néanmoins mention d’hémorragies, de mauvaises guérisons de la plaie et d’arythmies pouvant conduire au décès. Il est donc généralement recommandé d’arrêter les médicaments phytothérapeutiques dix jours avant l’intervention prévue (cf. tableau 9). 10 Antibiotiques: attention aux résistances et à la sélection de germes Les antibiotiques ne doivent jamais être arrêtés avant une intervention planifiée. Le chirurgien doit toutefois se faire une idée des germes résistants et sélectionnés possibles afin de pouvoir choisir correctement l’antibioprophylaxie périopératoire ainsi que le traitement nécessaire à une infection post-opératoire. Des staphylocoques résistants sur la peau ont p. ex. pu être sélectionnés suite à la prise de quinolones. Ces germes ont pu être mis en évidence jusqu’à six semaines après la fin de la prise de l’antibiotique. [26] Une infection associée à la présence d’un corps étranger (comme une prothèse de hanche) et comportant ce type de germe cutané (résistant!) entraînerait probablement une antibiothérapie parentérale prolongée, pénible et chère avec une combinaison de vancomycine. Il a également pu être démontré que la flore du côlon était modifiée de façon significative après quatre jours d’antibiothérapie, favorisant p. ex. la sélection de Pseudomonas. Conclusion Tableau 9: Conduite à tenir vis-à-vis des médicaments phytothérapeutiques [25] Arrêt avant l’intervention Ginkgo, Ginseng, aïl Au moins 10 jours Effets R Tendance hémorragique accrue, notamment en association avec de l’aspirine ou des anticoagulants oraux Hypericum Au moins 10 jours Inducteurs enzymatiques du CYP 3A4 R Prolongation possible de la narcose Jus de pamplemousse Au moins 1 jour Inhibiteur puissant du CYP 3A4 intestinal R Augmentation du taux sanguin de différents médicaments, p. ex. doublement du taux du midazolam per os pharmaJournal 04 | 2.2008 Cet article a été rédigé sur mandat de la CMPS par Irene Vogel Kahmann, pharmacienne d’hôpital FPH, Schaffhouse, membre de la CMPS. Nous remercions le Prof. Daniel Scheidegger, médecin-chef du département d’anesthésiologie à l’hôpital universitaire de Bâle, pour la relecture du ­manuscrit. Adresse de correspondance Commission des médicaments des pharmaciens suisses (CMPS) Case postale 5247 3001 Berne Tél. 044 994 75 63 Fax 044 994 75 64 E-mail: [email protected] Littérature: voir texte allemand Les patients sous traitement ont besoin de conseils précoces avant de subir une intervention chirurgicale. En dehors de certains cas (inhibiteur du TNF-α, traitement hormonal œstrogénique ou progestatif), il suffit d’analyser les médicaments pris par le patient 14 jours avant son hospitalisation. Le pharmacien peut déterminer si des mesures thérapeutiques anti- Substance cipées sont nécessaires et faire éventuellement des suggestions au médecin traitant. Si le patient prend des médicaments soumis à ordonnance, le pharmacien ne doit faire des recommandations qu’après avoir consulté le médecin traitant ou le chirurgien/ anesthésiste responsable. La prise d’aspirine avec ou sans Plavix® doit en outre faire l’objet d’une discussion avec le cardiologue responsable. Le pharmacien doit attirer l’attention du patient sur le risque engendré par l’automédication (AINS, médicaments phytothérapeutiques) et recommander les mesures mentionnées dans cet article. z