L’Année psychologique
http://www.necplus.eu/APY
Additional services for L’Année psychologique:
Email alerts: Click here
Subscriptions: Click here
Commercial reprints: Click here
Terms of use : Click here
Les troubles cognitifs dans le Post-Traumatic Stress Disorder
(PTSD) : une revue de la littérature
Géraldine Tapia, David Clarys, Wissam El-Hage et Michel Isingrini
L’Année psychologique / Volume 107 / Issue 03 / September 2007, pp 489 - 523
DOI: 10.4074/S0003503307003065, Published online: 03 June 2009
Link to this article: http://www.necplus.eu/abstract_S0003503307003065
How to cite this article:
Géraldine Tapia, David Clarys, Wissam El-Hage et Michel Isingrini (2007). Les troubles cognitifs dans le Post-
Traumatic Stress Disorder (PTSD) : une revue de la littérature. L’Année psychologique, 107, pp 489-523
doi:10.4074/S0003503307003065
Request Permissions : Click here
Downloaded from http://www.necplus.eu/APY, IP address: 78.47.27.170 on 14 Feb 2017
L’année psychologique, 2007, 107, 489-523
Les troubles cognitifs dans le Post-Traumatic
Stress Disorder (PTSD) : une revue
de la littérature
Géraldine Tapia*
1,3
, David Clarys
1,3
, Wissam El-Hage
2,3,4
et Michel Isingrini
1,3
1
UMR CNRS 6215 Langage, Mémoire et Développement Cognitif,
Université François-Rabelais de Tours
2
EA 3248 Psychobiologie des Émotions, Université François-Rabelais de Tours
3
IFR 135 Imagerie fonctionnelle, CHRU de Tours
4
Clinique Psychiatrique Universitaire, CHRU de Tours
RÉSUMÉ
Le principal objectif de cette revue de la littérature est de présenter une syn-
thèse des études traitant des fonctions mnésiques et exécutives dans le Post-
Traumatic Stress Disorder (PTSD) et de conforter les déficits observés par
des données en neuroimagerie portant sur les corrélats neuroanatomiques
de ces fonctions. Son second objectif est de discuter des raisons susceptibles
d’expliquer l’hétérogénéité des résultats observés. Les études ont été sélec-
tionnées en s’appuyant sur les bases de données internationales classiquement
utilisées pour des recherches dans le domaine de la psychologie. De nom-
breux travaux ont mis en évidence des déficits mnésiques et exécutifs chez
les sujets souffrant de PTSD. Certaines études en neuroimagerie ont
confirmé ces déficits comportementaux en révélant des anomalies structu-
rales et fonctionnelles près des régions hippocampique et frontale.
Cependant, les résultats observés divergent fréquemment d’une étude à
l’autre. Les travaux portant sur l’étude du PTSD se heurtent à de nombreux
facteurs confondants qui pourraient expliquer la nature contradictoire des
résultats observés.
Cognitive deficits in Post-Traumatic Stress Disorder: A review
ABSTRACT
The main goal of this paper is to review the existing literature on memory and executive
non-trauma related functioning in Post-Traumatic Stress Disorder (PTSD), as well as the
*Correspondance : Université François Rabelais, Département de Psychologie, UMR CNRS 6215 « Langage,
mémoire et développement cognitif » (LMDC), 3 rue des Tanneurs, BP 4103, F-37041 Tours Cedex 1.
490
Géraldine Tapia • David Clarys • Wissam El-Hage • Michel Isingrini
L’année psychologique, 2007, 107, 489-523
structural and functional brain substrates that might underlie the observed deficits. The
second aim is to examine the reasons that may explain differences between studies. Studies
were identified using general medical and psychology database. A lot of studies have shown
an abnormal cognitive pattern among PTSD patients examining memory and executive
impairments compared to non-PTSD and healthy participants. Neuroimaging studies have
confirmed these behavioral differences between groups showing neuroanatomic abnormali-
ties like hippocampal atrophy and deficit in subcortical-frontal circuitry. However, even if
cognitive impairment is typically found in most of the studies, observed results frequently
diverge from one study to another. Reasons for inconclusiveness of the results are discussed.
Controlling for potential confounds could help to resolve some of the inconsistencies in the
current literature.
INTRODUCTION
Le trouble stress post-traumatique (PTSD pour Post-Traumatic Stress
Disorder) est un désordre anxieux qui a suscité un intérêt relativement
récent puisque ce n’est qu’à la fin de la guerre du Vietnam (1964-1975)
que le concept de PTSD a permis de réintroduire dans la nosographie
psychiatrique (DSM-III, 1980) la « névrose traumatique » qui avait
disparu au lendemain de la seconde guerre mondiale (El-Hage, 2003). La
psychiatrie américaine post-Vietnam a mis en avant ce trouble, stimulant
ainsi la recherche et la littérature scientifique sur ce sujet. La clinique du
PTSD décrit des symptômes de reviviscence, d’évitement et d’hypervigilance
qui s’accompagnent d’un dysfonctionnement mnésique (hypermnésie,
amnésie) et attentionnel (difficultés de concentration). Aussi, la sympto-
matologie du PTSD est souvent associée à d’importants dysfonctionnements
cognitifs. Le principal objectif de cette revue de la littérature est de pré-
senter une synthèse des études traitant des fonctions mnésiques et
exécutives chez les sujets souffrant de PTSD et de conforter les déficits
observés par des données en neuroimagerie portant sur les corrélats neu-
roanatomiques de ces fonctions. Son second objectif est de discuter des
raisons susceptibles d’expliquer la nature contradictoire des résultats
observés. Pour répondre à ces objectifs, cet article est composé de trois
parties. La première consiste en un bref rappel des caractéristiques clini-
ques et comorbides du PTSD. La seconde permet de préciser l’état des
connaissances actuelles concernant l’impact du PTSD sur la mémoire
explicite d’une part et sur les fonctions exécutives d’autre part. Elle con-
fronte également ces données comportementales avec des résultats récents
en neuroimagerie portant sur les corrélats neuroanatomiques des fonc-
tions mnésiques et exécutives dans le PTSD. Enfin, la troisième partie
Les troubles cognitifs dans le PTSD
491
L’année psychologique, 2007, 107, 489-523
développe les raisons pouvant expliquer l’hétérogénéité des résultats
observés.
Méthode
Les articles intégrés dans cette revue de la littérature ont été sélectionnés en utili-
sant les bases de données internationales Medline et PsycINFO à partir des mots
clés suivants : « memory and posttraumatic stress disorder », « executive func-
tionning and posttraumatic stress disorder », « hippocampal volume and
posttraumatic stress disorder » et « frontal and posttraumatic stress disorder ».
Seuls les articles utilisant une approche expérimentale allant de 1990 à 2006 et
comparant au moins 15 sujets PTSD adultes jeunes à un groupe témoin à l’aide
d’une tâche de mémoire dont le matériel utilisé ne fait pas référence au vécu trau-
matique ont été intégrés dans cette revue de la littérature. Au total, 34 études ont
été sélectionnées dont une en cours de publication réalisée dans notre laboratoire.
Elles seront présentées à l’aide de 2 tableaux de synthèse. Avant d’aborder la syn-
thèse de ces travaux, il est important d’apporter quelques éléments sur la clinique
du PTSD.
Caracteristiques du PTSD
Symptômes cliniques
Le PTSD est un trouble anxieux secondaire à l’exposition à un traumatisme psy-
chique où le sujet est confronté à la mort, à une grave blessure ou à une menace
de son intégrité physique, avec la réaction subjective d’une peur intense, d’un
sentiment d’impuissance ou d’horreur (DSM-IV ; APA, 1994).
Le vécu d’un traumatisme psychique n’induit pas systématiquement l’apparition
d’un PTSD. Parmi les facteurs de risque, le nombre élevé d’événements vécus (El-
Hage & Gaillard, 2003) et la perception subjective du danger sont presque aussi
essentiels à la production de symptômes que la sévérité objective de l’événement
lui-même (El-Hage, 2003). Pour les individus qui développent un PTSD, les
symptômes cliniques s’articulent autour de trois syndromes : le syndrome de
répétition avec reviviscences diurnes et nocturnes, l’évitement persistant des
stimuli associés au traumatisme, et le syndrome d’activation neurovégétative.
La répétition traumatique est constituée de souvenirs répétitifs, diurnes ou noc-
turnes (cauchemars), comprenant des images, des pensées ou des perceptions
sensorielles intrusives et involontaires. Ces souvenirs répétitifs défilent sans
ordre, sans avoir été intentionnellement évoqués et deviennent importuns. Ils
peuvent être associés à une impression soudaine de « comme si » l’événement trau-
matique allait se reproduire, accompagnée du sentiment de revivre l’événement
(
flash-back
).
Face à cette souffrance engendrée par les rappels répétés et pénibles de l’événement
traumatique le sujet peut développer trois formes de conduites d’évitement :
492
Géraldine Tapia • David Clarys • Wissam El-Hage • Michel Isingrini
L’année psychologique, 2007, 107, 489-523
cognitive, émotionnelle et comportementale. L’évitement cognitif correspond au
fait que le sujet garde son esprit constamment occupé par d’autres pensées. L’évi-
tement émotionnel se manifeste par le fait de penser à l’événement traumatique
d’une manière complètement déchargée d’émotion. L’évitement comportemental
se traduit par un effort pour éviter les lieux, les activités ou les personnes rappe-
lant le traumatisme. Ces tentatives pour échapper aux souvenirs traumatiques
peuvent faire apparaître chez le sujet une amnésie psychogène, se traduisant par
une incapacité à évoquer l’ensemble ou une partie des souvenirs personnels liés à
l’événement traumatique. Ce phénomène serait sous-tendu par des processus dis-
sociatifs de la conscience associée à la mémoire en ce sens que les perceptions
seraient correctement perçues et stockées mais n’accèderaient plus à la conscience
normale pour finalement échapper au contrôle du sujet et se manifester de
manière autonome (Janet, 1904).
Parallèlement à ces conduites d’évitement, des symptômes d’hyperactivation neu-
rovégétative apparaissent. Ils se caractérisent par des manifestations d’angoisse
somato-psychique associées à l’impression d’une perte de contrôle de soi et sur
les événements du monde extérieur. Les manifestations les plus fréquentes corres-
pondent à une difficulté d’endormissement, un sommeil interrompu, une forte
irritabilité, des accès de colère et des difficultés de concentration. Ces symptômes
peuvent conduire à une hypervigilance vis-à-vis de l’environnement. Elle se
traduit par des états de « qui-vive » quasi permanents et des réactions de sursaut
exagérées susceptibles de constituer des indices précoces du développement d’un
PTSD (APA, 1994). De plus, comme dans la dépression, on retrouve dans ce syn-
drome un émoussement affectif, des difficultés à ressentir des émotions,
notamment positives, des manifestations de perte de plaisir et un repli comporte-
mental allant de la marginalisation aux conduites addictives. Les symptômes de la
dépression peuvent donc ressembler à certains symptômes du PTSD sans compter
l’existence de fortes comorbidités entre les deux troubles.
Comorbidités
Le PTSD partage un certain nombre de caractéristiques cliniques avec d’autres
troubles psychiatriques et de ce fait il est rarement diagnostiqué seul (Barrett,
Green, Morris, Giles, & Croft, 1996 ; Davidson & Foa, 1991 ; McNally, 1992 ;
Keane & Kaloupeck, 1997). McFarlane et Papay (1992) ont montré que 77 % des
sujets souffrant de PTSD reçoivent un autre diagnostic. Cette forte comorbidité a
été observée avec les troubles anxieux (Marshall, Schneier, Lin, Simpson,
Vermes, & Liebowitz, 2000), dépressifs (Shalev, Freedman, Peri, Brandes, Sahar,
Orr, & Pitman, 1998), de somatisation (Pelcovitz, Van der Kolk, Roth, Mandel,
Kaplan, & Resick, 1997), de la personnalité (Pelcovitz
et al.
, 1997), dissociatifs (El-
Hage & Gaillard, 2003 ; Halligan, Clark, & Ehlers, 2002 ; Murray, Ehlers, & Mayou,
2002), et avec les troubles des conduites (suicidaires, alcooliques, addictives)
(Keane & Kaloupeck, 1997). De nombreuses études portant sur les vétérans du
Vietnam ont montré que la dépression, le trouble d’anxiété généralisée et l’abus de
substances psychoactives sont les comorbidités les plus fréquentes (Barrett
et al.
,
1996 ; Davidson & Foa, 1991). L’enquête épidémiologique menée par Keane et
Kaloupeck (1997) a révélé que l’alcoolisme complique un PTSD dans 47 % des cas,
1 / 36 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !