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Neuropsychiatrie
de
l’enfance
et
de
l’adolescence
62
(2014)
278–286
Article
original
Caractéristiques
comportementales
et
personnelles
chez
des
enfants
âgés
de
8
à
12
ans
(n
=
215)
présentant
un
problème
alimentaire
:
étude
rétrospective
Behavioral
and
personal
characteristics
in
children
aged
8
to
12
years
old
(n
=
215)
with
an
eating
disorder:
A
retrospective
study
D.
Meilleura,,
O.
Jamoulleb,
D.
Taddeob,
J.-Y.
Frappierb
aUniversité
de
Montréal,
CP
6128
succursale
centre-ville,
Montréal,
Province
de
Québec,
H3C
3J7
Canada
bCentre
hospitalier
universitaire
Sainte-Justine,
Montréal,
Canada
Résumé
But.
Cette
étude
a
pour
but
de
décrire
les
caractéristiques
psychologiques,
sociodémographiques
et
somatiques
de
tous
les
enfants
(âgés
de
8
à
12
ans)
qui
ont
consulté
pour
un
problème
alimentaire
sur
une
unité
de
soins
pédiatriques
d’un
centre
hospitalier
universitaire
pendant
une
période
de
15
ans.
Méthode.
Nous
avons
revu
les
dossiers
médicaux
de
215
enfants
à
l’aide
d’une
grille
détaillée
élaborée
pour
cette
étude.
Des
statistiques
descriptives
(tests-t,
Chi2)
ont
été
effectuées.
Résultats.
L’échantillon
total
est
composé
majoritairement
de
filles
(92
%,
n
=
197),
4
%
d’entre
elles
sont
des
jumelles.
Des
215
enfants,
52
%
ont
été
hospitalisés
au
moins
une
fois
et
48
%
ont
été
soignés
en
service
ambulatoire.
Dans
l’échantillon,
82
%
expriment
des
préoccupations
à
l’égard
de
la
nourriture
et
du
poids,
69,4
%
ont
peur
de
prendre
du
poids,
57,5
%
désirent
encore
en
perdre
et
46,6
%
ont
des
préoccupations
par
rapport
à
leur
image
corporelle.
La
majorité
des
enfants,
soit
95
%,
ont
des
comportements
restrictifs
et
13,3
%
ont
des
comportements
boulimiques.
Des
difficultés
alimentaires
durant
l’enfance
sont
présentes
chez
15,9
%
des
enfants.
Un
peu
plus
de
la
moitié
des
enfants
(55,8
%)
a
au
moins
un
autre
trouble
comorbide
et
la
présence
d’antécédents
familiaux
de
maladies
psychiatriques
est
notée
chez
36,3
%
des
enfants
de
l’échantillon.
Les
filles
et
les
garc¸ons
obtiennent
des
résultats
similaires
sur
la
majorité
des
variables
de
l’étude.
On
note
une
seule
différence
significative
entre
eux
:
les
garc¸ons
sont
plus
isolés
socialement.
Des
différences
significatives
sont
observées
entre
les
enfants
plus
jeunes
(âgés
de
8
à
10
ans)
et
les
plus
âgés
(10–12
ans)
constituant
l’échantillon.
Conclusion.
Les
résultats
soulèvent
des
questionnements
sur
l’étiologie
du
trouble
et
sur
son
éventuelle
évolution.
Des
études
sur
le
devenir
de
ces
enfants
sont
essentielles
afin
de
mieux
les
comprendre
et
nous
aider
à
mieux
adapter
nos
stratégies
d’interventions
auprès
d’eux.
©
2014
Elsevier
Masson
SAS.
Tous
droits
réservés.
Mots
clés
:
Troubles
alimentaires
;
Enfants
;
Prépubères
;
Anorexie
Abstract
Objective.
This
study
aimed
to
describe
psychological,
sociodemographic
and
somatic
characteristics
of
all
children
aged
8–12
years
who
received
treatments
for
eating
disorders
on
a
pediatric
unit
of
a
University
Health
Centre
during
a
period
of
15
years.
Methods.
We
reviewed
the
medical
records
of
215
children
with
a
detailed
grid.
Descriptive
statistics
(t-test,
Chi2)
were
performed.
Results.
The
overall
sample
was
comprised
largely
(92%)
of
girls
(n
=
197);
4%
of
whom
were
twins.
Out
of
the
215
children,
52%
were
hospitalized
at
least
one
time
and
48%
were
seen
and
treated
as
outpatients.
In
the
sample,
82%
expressed
concerns
towards
food/weight,
69.4%
were
afraid
of
gaining
weight,
57.5%
still
want
to
lose
weight
and
46.6%
had
body
image
preoccupations.
Most
of
the
children,
e.g.
95%,
had
restrictive
eating
behaviors
and
13.5%
had
bulimia
symptoms.
Eating
problems
during
infancy
were
present
in
15.9%
of
the
sample.
More
than
half
of
the
children
(55.8%)
had
at
least
one
comorbid
condition
and
family
history
of
psychiatric
problems
was
observed
for
36.3%
of
the
children.
Boys
and
girls
obtained
very
similar
results
on
all
variables
of
the
study.
Only
one
significant
difference
had
been
observed
between
them:
boys
Cette
recherche
a
été
réalisée
grâce
aux
fonds
institutionnel
du
Conseil
de
Recherche
en
Sciences
Humaines
du
Canada.
Auteur
correspondant.
Adresse
e-mail
:
(D.
Meilleur).
http://dx.doi.org/10.1016/j.neurenf.2014.04.004
0222-9617/©
2014
Elsevier
Masson
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Tous
droits
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D.
Meilleur
et
al.
/
Neuropsychiatrie
de
l’enfance
et
de
l’adolescence
62
(2014)
278–286
279
were
more
socially
withdrawn.
Some
significant
differences
were
found
between
younger
children
(8–10
years
old)
and
the
older
one
(10–12
years
old)
of
the
sample.
Conclusion.
These
results
bring
out
questioning
on
the
etiology
of
ED
in
children
and
on
their
outcome.
Follow-up
studies
of
children
presenting
ED
are
essential
to
better
understand
these
problems
and
their
evolution
in
order
to
adapt
our
strategies
for
treating
them.
©
2014
Elsevier
Masson
SAS.
All
rights
reserved.
Keywords:
Eating
disorders;
Prepubertal
anorexia;
Anorexia;
Children
1.
Contexte
théorique
Les
troubles
alimentaires
touchent
environ
0,5
à
3
%
des
femmes
dans
la
population
générale
[1,2].
Leur
présence
chez
les
adultes
et
les
adolescents
est
reconnue
depuis
longtemps.
Certains
cliniciens
et
chercheurs
ont
noté
une
recrudescence
de
problèmes
alimentaires
chez
les
enfants
et
les
pré-adolescents,
soit
ceux
âgés
entre
8
et
12
ans,
au
cours
des
dernières
années
[1,3–7].
Il
n’est
pas
clair
pour
les
cliniciens
et
les
chercheurs
si
ces
troubles
alimentaires
s’apparentent
à
ceux
observés
chez
les
enfants
plus
jeunes
(0–6
ans)
ou
s’ils
sont
plu-
tôt
similaires
à
ceux
que
l’on
retrouve
à
l’adolescence.
Des
auteurs
soulignent
la
diversité
des
présentations
cliniques
des
problèmes
alimentaires
chez
les
enfants
qui
pourraient
les
dis-
tinguer
de
ceux
qui
surviennent
à
l’adolescence
et
à
l’âge
adulte.
Malgré
l’intérêt
de
plusieurs
auteurs
pour
ce
sujet,
nos
connaissances
entourant
les
problèmes
alimentaires
qui
sur-
viennent
chez
les
enfants
âgés
de
8
à
12
ans
demeurent
fragmentaires.
Diverses
raisons
peuvent
expliquer
cette
situa-
tion.
D’une
part,
les
enfants
qui
ont
des
difficultés
alimentaires,
de
par
la
diversité
des
symptômes
qu’ils
présentent,
consultent
des
services
et
équipes
de
soins
appartenant
à
des
spécialités
variées.
Les
données
cliniques
à
leur
endroit
peuvent
ainsi
se
confondre
à
l’intérieur
d’autres
groupes
d’âges
ou
d’autres
pro-
blèmes
spécifiques
et
provenir
de
sources
variées
les
rendant
difficiles
à
répertorier.
De
plus,
malgré
une
certaine
recrudes-
cence
de
cas,
leur
nombre
demeure
restreint.
Il
peut
donc
être
difficile
de
constituer
un
échantillon
significatif
provenant
d’un
seul
site
d’accueil.
Aussi,
il
ne
semble
pas
y
avoir
de
consensus
quant
à
l’appellation
privilégiée
pour
identifier
les
problèmes
alimentaires
présentés
par
ces
enfants.
Les
auteurs
utilisent
diverses
expressions
parmi
lesquelles
on
retrouve
:
troubles
alimentaires
durant
l’enfance,
trouble
alimentaire
d’apparition
précoce
ou
trouble
alimentaire
chez
les
prépubères.
Cette
absence
de
consensus
peut
nuire
à
l’adoption
de
repères
consen-
suels
permettant
un
meilleur
dépistage
des
troubles,
à
leur
identification
dans
les
services
et
conséquemment
à
la
constitu-
tion
d’un
échantillon
de
recherche.
Les
auteurs
sont
nombreux
à
noter
que
le
diagnostic
de
trouble
alimentaire
non
spécifié
(Eating
Disorder
Not
Otherwise
Specified
EDNOS)
est
plus
souvent
posé
chez
les
enfants
que
les
diagnostics
d’anorexie
et
de
boulimie,
les
enfants
ne
rencontrant
pas
tous
les
critères
requis
[8–11].
Certains
auteurs
ont
même
proposé
une
classifi-
cation
spécifique
pour
eux
[12]
ayant
contribué
à
l’élaboration
d’une
nouvelle
catégorie
diagnostique,
soit
le
trouble
alimen-
taire
évitant/restriction
alimentaire
(Avoidant/Restrictive
Food
Intake
Disorder
ARFID)
dans
la
version
du
DSM-V
qui
vise
particulièrement
ce
groupe
d’âge
[1].
Au
cours
des
dernières
décennies,
des
études
ont
tout
de
même
réussi
à
mettre
de
l’avant
certaines
caractéristiques
propres
aux
enfants
atteints
de
problèmes
alimentaires.
Des
auteurs
suggèrent
que
l’éventail
de
comportements
alimentaires
restrictifs
serait
moins
grand
chez
les
enfants
que
chez
les
ado-
lescents
de
même
que
les
comportements
de
boulimie
et
de
vomissements
[7,12].
L’hyperactivité
physique
et
le
refus
de
prendre
des
liquides
seraient
plus
fréquents
chez
les
enfants
comparativement
aux
adolescents
[7,13,14].
Plusieurs
auteurs
ont
souligné
l’absence
de
distorsion
de
l’image
corporelle
chez
une
majorité
d’enfants
ayant
des
pro-
blèmes
alimentaires
[7,15].
Leur
perte
de
poids
ou
l’absence
de
gain
de
poids
serait,
chez
certains
enfants,
attribuable
au
désir
de
s’alimenter
sainement
plutôt
qu’à
un
désir
de
minceur
ou
de
perte
de
poids
[16]
les
distinguant
des
groupes
plus
âgés.
Toutefois,
la
crainte
de
prendre
du
poids
serait
présente
chez
plusieurs
d’entre
eux
[7].
Il
semblerait
y
avoir
plus
de
garc¸ons
atteints
de
problèmes
alimentaires
chez
les
enfants
comparati-
vement
aux
adolescents
:
des
études
avancent
une
proportion
de
3
filles
pour
1
garc¸on
[7,17–19],
comparativement
à
9
filles
pour
1
garc¸on
chez
les
adolescents
et
adultes
[2].
La
présence
de
plaintes
somatiques
variées
associées
aux
comportements
et
préoccupations
alimentaires
chez
les
enfants
est
soulevée
par
de
nombreux
auteurs
[16].
Les
symptômes
physiques
orienteraient
d’ailleurs
fréquemment
les
premières
investigations
vers
une
pathologie
médicale,
ce
qui
aurait
comme
conséquence
de
retarder
le
diagnostic
[20,21].
D’autres
études
ont
mis
de
l’avant
la
présence
de
troubles
comorbides
dans
les
tableaux
cliniques
présentés
par
les
enfants
atteints
de
troubles
alimentaires.
Parmi
les
principaux
troubles
identifiés,
on
note
les
symptômes
dépressifs
précoces
ou
associés
au
problème
alimen-
taire
[7,14,22,23],
les
symptômes
phobiques
et
obsessionnels
[7,24],
les
gestes
suicidaires
[14],
et
les
troubles
alimentaires
durant
l’enfance
[25,26].
Par
ailleurs,
d’autres
auteurs
notent
qu’il
est
plus
fréquent
d’identifier
un
événement
déclencheur
au
problème
alimentaire
chez
les
enfants
comparativement
à
leurs
acolytes
plus
âgés.
Des
événements
tels
un
stress
psychosocial,
une
maladie
d’un
parent
et
des
commentaires
négatifs
de
l’entourage
sur
l’apparence
sont
les
plus
souvent
évoqués
comme
motif
ayant
initié
le
problème
[7,14,17,22,27].
Les
conséquences
associées
à
la
présence
d’un
trouble
ali-
mentaire
sont
très
préoccupantes
chez
les
enfants
en
raison
de
leur
impact
sur
la
santé
physique
et
psychique.
Certains
auteurs
rapportent
un
pronostic
moins
favorable
lorsque
le
trouble
280
D.
Meilleur
et
al.
/
Neuropsychiatrie
de
l’enfance
et
de
l’adolescence
62
(2014)
278–286
alimentaire
débute
avant
l’âge
de
13
ans
[28].
Des
comportements
alimentaires
qui
occasionnent
une
absence
de
gain
de
poids,
une
perte
de
poids
ou
une
déshydratation
rapide
peuvent
avoir
des
conséquences
graves
sur
la
santé
du
jeune
[11,15,16,29].
Les
stratégies
d’interventions,
développées
pour
les
adolescents,
s’avèrent
souvent
plus
ou
moins
efficaces
auprès
des
enfants
et
doivent
fréquemment
être
révisées
ou
adaptées
afin
de
mieux
prendre
en
considération
les
facteurs
développementaux
propres
à
cet
âge
[11].
Les
auteurs
sont
nombreux
à
soulever
l’importance
d’accroître
nos
connais-
sances
concernant
les
enfants
de
8
à
12
ans
qui
souffrent
de
TCA
afin
de
mieux
documenter
leurs
présentations
cliniques
et
de
favoriser
une
meilleure
compréhension
des
facteurs
susceptibles
de
jouer
un
rôle
dans
le
développement
et
maintien
du
problème
de
même
que
dans
leur
évolution
[20].
2.
Objectif
L’objectif
de
cette
recherche
de
nature
rétrospective
est
de
répertorier
les
caractéristiques
somatiques,
comportementales
et
familiales
de
tous
les
enfants
âgés
de
8
à
12
ans,
évalués
et
suivis
pour
un
problème
alimentaire
au
cours
d’une
période
de
15
ans
dans
un
centre
hospitalier
universitaire
de
la
région
métropoli-
taine
québécoise.
Parmi
l’échantillon
de
participants
constitués,
nous
tenterons
de
voir
si
des
différences
sont
observées
sur
les
variables
en
fonction
du
sexe
et
de
l’âge
des
enfants.
Les
résultats
obtenus
seront
discutés
en
regard
des
connaissances
actuelles
sur
le
sujet
et
des
pistes
de
réflexion
pour
des
recherches
futures
seront
proposées.
3.
Méthodologie
L’approbation
du
comité
scientifique
et
d’éthique
à
la
recherche
du
centre
hospitalier
universitaire
a
été
obtenue
pour
permettre
la
sélection
et
la
consultation
des
dossiers
médicaux
jugés
pertinents
à
l’étude.
L’échantillon
de
l’étude
a
été
constitué
à
partir
des
dossiers
des
enfants
qui
ont
consulté
au
centre
hospitalier
universi-
taire
pour
des
difficultés
alimentaires
au
cours
d’une
période
de
15
ans.
Une
première
liste
de
dossiers
a
été
établie
à
par-
tir
de
mots
clés
susceptibles
de
correspondre
soit
au
motif
de
consultation
ou
au
diagnostic
de
l’enfant
à
son
arrivée
dans
les
services
(clinique
externe
ou
hospitalisation).
Les
mots
clés
utili-
sés
sont
:
perte
de
poids,
difficulté/problème/trouble
alimentaire,
anorexie,
anorexie
atypique,
refus
de
manger,
refus
alimentaire,
phobie
alimentaire,
boulimie,
vomissements,
retard
de
crois-
sance,
retard
staturo-pondéral,
arrêt
de
croissance,
absence
de
gain
de
poids.
Les
dossiers
ainsi
sélectionnés
ont
ensuite
été
analysés
manuellement
par
les
principaux
auteurs
de
l’étude
afin
de
retrancher
ceux
des
enfants
dont
les
symptômes
ou
pro-
blème(s)
alimentaire(s)
étaient
associés
à
un
trouble
organique
(p.
ex.
la
fibrose
kystique
ou
une
maladie
gastrique).
Au
final,
215
dossiers
ont
été
retenus
et
analysés.
4.
Description
de
la
grille
Les
informations
ont
été
recueillies
dans
les
dossiers
à
partir
d’une
grille
d’analyse
élaborée
spécifiquement
pour
cette
étude
et
composée
de
534
items
(potentiels)
regroupant
les
variables
d’intérêt.
Une
grille
a
été
complétée
pour
chaque
dossier.
Un
échantillon
de
10
%
des
dossiers
a
fait
l’objet
d’un
accord
inter-
juges
pour
la
cotation
;
ce
dernier
a
été
établi
à
90,4
%.
5.
Résultats
Des
statistiques
descriptives
(analyse
de
fréquences,
test-t,
Chi2)
ont
été
effectuées
pour
analyser
les
résultats
obtenus.
Les
résultats
pour
l’ensemble
de
l’échantillon
sont
présentés
selon
les
principales
variables
à
l’étude
soit
les
caractéristiques
soma-
tiques,
comportementales
et
personnelles
des
enfants.
Certaines
données
concernant
la
trajectoire
des
patients
dans
les
services
sont
présentées.
Les
résultats
ont
été
analysés
en
tenant
compte
du
sexe
des
participants.
Des
comparaisons
sur
certaines
varia-
bles
entre
les
enfants
plus
jeunes
(8
à
10
ans)
et
les
plus
âgés
(10
à
12
ans)
sont
rapportées.
6.
Description
de
l’échantillon
L’échantillon
est
composé
de
215
enfants
;
197
filles
(91,6
%)
et
18
garc¸ons
(8,4
%).
L’âge
moyen
des
enfants
à
l’arrivée
dans
les
services
est
de
141
mois
soit
11
ans
et
9
mois
(DS
=
13,3).
Le
poids
moyen
à
la
première
visite
est
de
35,7
kg
(DS
=
8,6)
avec
une
taille
moyenne
de
149,6
cm
(DS
=
10,6)
et
un
indice
de
masse
corporelle
moyen
de
15,8
(DS
=
2,3),
le
situant
entre
le
10eet
25epercentile.
Un
peu
plus
de
la
moitié
de
l’échantillon,
soit
52
%
(n
=
112),
a
été
hospitalisé
au
moins
une
fois
pour
ce
problème.
Les
garc¸ons
sont
répartis
également
entre
les
enfants
hospitalisés
et
ceux
suivis
en
ambulatoire.
Les
personnes
ayant
initié
la
consultation
pour
l’enfant
sont
variées.
Sur
196
enfants
pour
lesquels
il
a
été
possible
d’avoir
l’information,
57
%
ont
été
référés
par
un
médecin,
32
%
sont
amenés
par
leurs
parents
qui
ont
initié
la
consultation
médicale
et
11
%
ont
été
référés
par
un
professionnel
ou
une
personne
de
l’entourage.
La
majorité
des
jeunes
(85
%)
habitent
la
région
métropolitaine
et
ses
environs.
7.
Caractéristiques
sociodémographiques
Une
majorité
d’enfants,
soit
67
%
est
issue
de
familles
nucléaires
intactes
et
habitent
avec
leurs
deux
parents
bio-
logiques,
28,8
%
viennent
de
familles
dont
les
parents
sont
séparés/divorcés
et
2,9
%
ont
un
parent
décédé.
Deux
partici-
pantes,
soit
0,9
%
de
l’échantillon,
vivent
en
famille
d’accueil.
L’origine
ethnoculturelle
est
majoritairement
canadienne-
franc¸aise,
soit
à
92
%.
L’âge
moyen
du
père
est
de
42,4
ans
(DS
=
6,6)
et
celui
de
la
mère
de
40,3
ans
(DS
=
5,7).
Une
majorité
de
mères
(78,7
%)
et
de
pères
(94,7
%)
ont
une
occupation
professionnelle
ou
scolaire.
Près
de
la
moitié
des
participants,
soit
47
%,
viennent
d’une
famille
composée
de
deux
enfants,
39
%
d’une
famille
de
trois
enfants
et
plus
et
14
%
sont
enfants
uniques.
On
note
la
présence
de
jumelles
pour
3,7
%
de
l’échantillon,
toutes
de
sexe
féminin.
La
majorité
des
enfants,
soit
92,5
%,
a
un
cheminement
scolaire
régulier.
Une
grande
proportion
d’entre
eux
(37,7
%)
fréquente
soit
la
dernière
année
du
primaire
(6eannée)
ou
la
D.
Meilleur
et
al.
/
Neuropsychiatrie
de
l’enfance
et
de
l’adolescence
62
(2014)
278–286
281
Tableau
1
Comportements
et
attitudes
à
l’égard
de
l’alimentation.
Filles
(n
=
197)
(%)
Garc¸ons
(n
=
18)
(%)
n
total
(%)
Comportements
de
restriction 94,8 94,1 95
(200/211)
Activité
physique
excessive 35,6 46,4 40,2
(78/194)
Boulimie
13,4
12,5
13,3
(28/210)
Vomissements
15,3
17,6
15,5
(33/213)
Utilisation
de
laxatifs
3,1
0
2,8
(6/211)
Réduction
du
gras
et
sucre
64,4
75
65,2
(135/207)
Évite
certains
aliments
51
64,7
52,1
(110/211)
Couper
en
petits
morceaux
19,2
18,8
19,1
(40/209)
Mange
les
mêmes
aliments
17,6
13,3
17,3
(35/202)
Manger
les
aliments
dans
un
certain
ordre
11
12,5
11,1
(23/207)
Refus
de
s’hydrater
13,9
5,6
13,2
(28/212)
première
année
du
secondaire
(34,4
%),
14
%
sont
en
5eannée
et
11
%
sont
en
2e,
3eou
4eannée
du
primaire.
La
fréquenta-
tion
scolaire
récente
est
décrite
comme
stable
pour
la
majorité
d’entre
eux
soit
89
%
et
68
%
des
enfants
se
disent
satisfaits
de
leur
école.
Aucune
différence
significative
n’est
observée
entre
les
filles
et
les
garc¸ons
sur
l’ensemble
des
caractéristiques
sociodémo-
graphiques.
8.
Caractéristiques
somatiques
Une
perte
de
poids
est
notée
chez
une
grande
majorité
des
enfants
de
l’échantillon
soit
chez
90,5
%
des
participants.
La
perte
de
poids
moyenne
est
de
8,5
kg
(DS
=
5,9),
avec
un
pour-
centage
de
perte
de
poids
moyen
de
17,7
%
(DS
=
8,6).
Les
symptômes
alimentaires
sont
présents
en
moyenne
depuis
un
peu
plus
de
7
mois
(DS
=
5,7),
situant
leur
début
aux
environs
de
l’âge
de
11
ans
et
1
mois.
Les
garc¸ons
et
les
filles
sont
similaires
sur
tous
les
aspects
somatiques
évalués.
Chez
les
filles,
64
%
ont
une
aménorrhée
primaire.
Parmi
les
filles
pubères
(36
%,
n
=
71),
on
note
une
aménorrhée
secondaire
chez
59
%
(n
=
41)
d’entre
elles.
À
l’arrivée
dans
les
services,
9,5
%
des
enfants
prennent
une
médication
:
7
rec¸oivent
une
médication
pour
un
TDA/TDAH,
3
un
anxiolytique
et
2
un
anti-
dépresseur.
9.
Caractéristiques
comportementales
et
personnelles
9.1.
Comportements
et
attitudes
à
l’égard
de
l’alimentation
Différents
comportements
et
attitudes
à
l’égard
de
l’alimentation
sont
notés
chez
les
enfants.
Les
comportements
de
restriction,
les
diètes
et
les
jeûnes
sont
présents
chez
95
%
des
enfants
de
l’échantillon.
La
grande
majorité,
soit
65
%,
rapporte
avoir
diminué
la
consommation
d’aliments
considérés
riches
en
gras
et
en
sucre.
L’évitement
de
certains
aliments
est
présent
chez
52
%
de
l’échantillon.
La
présence
d’activités
physiques
exces-
sives
(p.
ex.
course
à
pied,
redressements
assis,
musculation)
est
notée
chez
40
%
des
enfants.
Diverses
manies
par
rapport
à
l’alimentation
sont
présentes
:
couper
sa
nourriture
en
petits
morceaux
lors
des
repas
(19,1
%),
manger
souvent
les
mêmes
aliments
(17,3
%)
et
manger
les
aliments
dans
un
certain
ordre
(11,1
%).
On
note
que
13,2
%
des
enfants
boivent
peu
de
liquides
ou
ne
s’hydratent
pas.
Des
comportements
de
régurgitation
(5
%)
et
de
rumination
(3
%)
sont
présents
chez
8
%
de
l’échantillon.
La
présence
de
comportements
boulimiques
est
notée
chez
13,3
%
des
enfants,
leur
fréquence
est
de
1
à
7
fois/semaine
pour
36
%
d’entre
eux.
Les
vomissements
sont
présents
chez
15,5
%
de
l’échantillon
;
leur
fréquence
est
d’une
à
six
fois
par
semaine
pour
24
%
et
quotidienne
pour
30
%
d’entre
eux,
soit
4,7
%
du
total
des
enfants.
L’utilisation
de
laxatifs
est
notée
chez
2,8
%
des
enfants
(Tableau
1).
Aucune
différence
significative
n’est
observée
entre
les
garc¸ons
et
les
filles
quant
aux
comportements
et
attitudes
à
l’égard
de
l’alimentation.
9.2.
Préoccupations
à
l’égard
de
l’alimentation,
du
poids
et
de
l’image
corporelle
La
majorité
des
enfants,
soit
82,5
%,
exprime
des
préoc-
cupations
face
à
l’alimentation.
Différentes
motivations
sont
exprimées
par
les
enfants
pour
expliquer
leurs
comportements
:
14,3
%
disent
avoir
modifié
leur
alimentation
dans
le
but
de
man-
ger
de
fac¸on
saine
manger
santé
»)
;
14,4
%
disent
craindre
les
maux
de
ventre
après
avoir
mangé
;
et
10
%
ont
peur
de
vomir
ou
d’avoir
la
nausée.
La
crainte
de
s’étouffer
est
exprimée
par
5,3
%
des
jeunes
et
la
même
proportion
(5,3
%)
rapporte
la
pré-
sence
d’une
sensation
de
«
boule
dans
la
gorge
»
au
moment
de
la
déglutition
pour
expliquer
la
diminution
des
apports
alimen-
taires.
La
crainte
de
prendre
du
poids
est
exprimée
par
une
majo-
rité
d’enfants,
soit
69,4
%,
et
plusieurs
souhaitent
encore
perdre
du
poids
au
moment
de
la
première
consultation,
soit
57,5
%.
Seulement
7,8
%
disent
craindre
de
perdre
du
poids
et
19,2
%
souhaitent
en
gagner.
On
note
que
15,6
%
disent
avoir
peur
de
grandir.
Un
peu
plus
de
la
moitié
des
enfants,
soit
54
%,
ont
une
perception
d’eux-mêmes
qualifiée
de
bonne
ou
moyenne
correcte
»).
En
ce
qui
concerne
la
perception
de
l’image
corpo-
relle,
46,6
%
disent
se
trouver
gros,
30
%
se
considèrent
comme
étant
normaux
et
19
%
verbalisent
se
trouver
maigres.
Une
majo-
rité
d’enfants
(59
%)
mentionne
entretenir
de
bonnes
relations
282
D.
Meilleur
et
al.
/
Neuropsychiatrie
de
l’enfance
et
de
l’adolescence
62
(2014)
278–286
Tableau
2
Préoccupations
à
l’égard
de
l’alimentation,
du
poids
et
de
l’image
corporelle.
Filles
(n
=
197)
(%)
Garc¸ons
(n
=
18)
(%)
n
total
(%)
Préoccupations
face
à
l’alimentation 83,9 66,7 82,5
(174/211)
Désir
de
manger
sainement 14,8
31,3
16,1
(33/205)
Craint
les
maux
de
ventre
14,2
16,7
14,4
(30/208)
Peur
de
vomir/nausées
9,9
11,1
10
(21/209)
Crainte
de
prendre
du
poids
68,9
75
69,4
(143/206)
Désire
encore
perdre
du
poids
59,1
41,2
57,5
(111/193)
Verbalise
peur
de
grandir
16,5
6,3
15,6
(29/186)
Perception
de
soi
(bonne/moyenne)
53,6
58,4
54
(81/150)
Verbalise
se
trouver
gros(se)
47,1
40
46,6
(76/163)
Perception
IC
normale
30
30,1
30
(49/163)
Bonnes
relations
avec
les
parents
58,8
61,5
59
(98/166)
Isolées
socialement
9,9
31,3*
11,6
(23/198)
*p
0,05.
avec
leurs
parents.
Au
plan
social,
62,6
%
des
enfants
(64,3
%
des
filles
et
43,8
%
des
garc¸ons)
disent
avoir
plusieurs
amis
et
ils
décrivent
leur
relation
avec
eux
comme
étant
satisfaisante
(77,5
%).
Toutefois,
un
nombre
significativement
plus
élevé
de
garc¸ons
ont
peu
d’amis
et
sont
isolés
socialement,
et
ce,
depuis
longtemps
(31,3
%
vs
9,9
%,
x2(3,
n
=
198)
=
9,345,
p
=
0,025).
Il
s’agit
de
la
seule
différence
significative
entre
les
sexes
des
participants
sur
cette
dimension
(Tableau
2).
Plusieurs
enfants
expriment
des
plaintes
somatiques.
Ces
der-
nières
sont
de
natures
variées.
Parmi
les
plus
fréquentes,
on
retrouve
les
douleurs
abdominales
et
les
étourdissements
qui
sont
rapportés
par
la
même
proportion
d’enfants
soit
25,5
%.
Environ
21,5
%
des
enfants
souffrent
de
constipation,
13,1
%
ont
des
céphalées,
11,7
%
disent
avoir
des
nausées,
7
%
ont
une
sensation
de
satiété
précoce
et
5
%
ont
du
reflux
ou
de
la
dysphagie.
9.3.
Antécédents
On
note
à
l’histoire
développementale
des
difficultés
alimen-
taires
durant
l’enfance
chez
15,9
%
des
enfants
de
l’échantillon.
Un
peu
plus
de
9
%
sont
décrits
par
les
parents
comme
des
«
petits
mangeurs
»,
10,5
%
comme
ayant
«
peu
d’appétit
»,
6,2
%
ont
souffert
de
douleurs
gastriques
durant
l’enfance
et
4,3
%
d’allergies
alimentaires.
Parmi
les
enfants
pour
lesquels
les
données
sont
disponibles,
on
note
la
présence
d’idées
suicidaires
chez
11
%
d’entre
eux
et
2
%
ont
déjà
posé
un
geste
suicidaire.
Des
abus
physiques
sont
présents
chez
5,6
%
et
la
présence
d’abus
sexuel
est
notée
chez
4,6
%
d’entre
eux.
De
l’absentéisme
scolaire
est
présent
chez
6
%
des
enfants.
Des
comportements
d’automutilation
sont
notés
chez
5,1
%
des
enfants,
les
principaux
comportements
sont
:
se
frapper,
se
pincer,
se
lacérer
certaines
parties
du
corps,
s’arracher
des
cils
ou
des
cheveux.
Parmi
les
principaux
événements
identifiés
par
le
jeune
ou
par
une
personne
de
son
entourage
comme
déclencheurs
du
trouble,
22,7
%
(44/194)
mentionnent
avoir
fait
l’objet
de
railleries
ou
de
moqueries
par
rapport
à
leur
apparence
physique
;
9,4
%
(19/202)
rapportent
un
problème
de
santé
pré-
cédant
le
début
du
trouble
(p.
ex.
:
gastroentérite)
et
5,8
%
(11/191)
soulignent
la
présence
de
conflits
entre
les
parents
(Tableau
3).
On
n’observe
aucune
différence
significative
entre
les
filles
et
les
garc¸ons
concernant
les
antécédents.
10.
Trajectoires
dans
les
services
Sur
les
215
enfants,
un
peu
plus
de
la
moitié,
soit
52
%
(n
=
112)
a
été
hospitalisée.
Parmi
ceux-ci,
59
%
l’ont
été
une
fois,
17
%
ont
été
hospitalisés
à
deux
reprises,
et
24
%
l’ont
été
trois
fois
et
plus.
Près
des
deux
tiers
(67
%)
de
ces
enfants
ont
été
hospitalisés
à
leur
première
visite,
suggérant
un
état
de
santé
physique
précaire
à
leur
arrivée
dans
les
services.
Les
filles
et
les
garc¸ons
suivis
en
clinique
ambulatoire
(92
%
vs
7,8
%)
et
ceux
hospitalisés
(92
%
vs
8
%)
sont
répartis
de
manière
similaire.
11.
Comparaisons
entre
les
enfants
plus
jeunes
et
les
plus
âgés
Des
comparaisons
sur
les
principales
variables
à
l’étude
ont
été
effectuées
entre
les
enfants
en
fonction
de
leur
âge.
À
cette
fin,
ils
ont
été
divisés
en
deux
groupes
soit
:
les
enfants
âgés
de
8
à
10
ans
(n
=
18)
et
ceux
âgés
de
plus
de
10
ans
(n
=
197).
Seules
les
différences
significatives
sont
rapportées.
Une
proportion
significativement
plus
grande
d’enfants
âgés
de
8
à
10
ans
a
été
hospitalisée
au
moins
une
fois
(77,8
%
vs
49,7
%,
x2(1,
n
=
215)
=
5,19,
p
=
0,027).
Ces
derniers
sont
plus
nombreux
à
prendre
une
médication
à
leur
arrivée
dans
les
ser-
vices
(27,8
%
vs
7,7
%,
x2(1,
n
=
212)
=
7,75,
p
=
0,017).
La
médication
prescrite
la
plus
fréquente
est
un
psychostimulant
pour
un
trouble
de
déficit
de
l’attention
avec
ou
sans
hyperacti-
vité.
Concernant
leurs
attitudes
à
l’égard
du
poids,
de
la
nour-
riture
et
de
leur
image
corporelle,
les
enfants
plus
jeunes
sont
significativement
moins
nombreux
à
exprimer
craindre
de
prendre
du
poids
comparativement
aux
plus
âgés
(26,7
%
vs
72,8
%,
x2(1,
n
=
206)
=
13,93,
p
=
0,001).
La
présence
d’activité
physique
excessive
(hyperactivité)
visant
la
perte
de
poids
est
significativement
moins
élevée
chez
les
enfants
plus
jeunes
comparativement
aux
autres
(5,6
%
vs
39,3
%,
1 / 9 100%
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