Conclusion : point de vue d’un médecin, directeur d’établissement, participant à la mise en place du DAA Conclusion: the point of view of establishment director Dossier D ossier IP F. Guillemin* L’ idée répond à un besoin exprimé par les patients et les articles de cette revue illustrent les solutions apportées par les professionnels. Le dispositif d’annonce ne se conforme pas à un schéma standard. Les diverses situations médicales nécessitent des prises en charge appropriées : le diagnostic initial de cancer, le diagnostic d’une récidive ou d’une évolution métastatique, l’échec d’un traitement par une poursuite évolutive, le diagnostic d’un risque génétique et ses conséquences, l’explication d’une complication au cours d’un traitement, un changement de thérapeutique, la décision d’une attitude palliative ou l’approche de la phase terminale sont autant de situations précises et particulières où il faut annoncer une mauvaise nouvelle. Le dispositif ne se résume pas à une consultation spécifique unique : les consultations médicales successives, les consultations infirmières, la prise en charge psychologique, un espace de rencontre et d’information, des supports médiatiques type Internet ou la télévision interne, les associations de patients ou d’usagers… sont quelques-uns des outils du dispositif. Les patients ont des personnalités et des expériences différentes. La connaissance du patient, son niveau d’information et de compréhension sont des prérequis. Son âge, sa culture, sa situation dans l’histoire de la maladie vont modifier les attitudes des professionnels et le choix des outils à proposer. Les praticiens n’ont pas appris à communiquer avec les patients ni avec leurs familles. Il n’y a pas de vraie formation au cours des études médicales et l’industrie pharmaceutique fait peut-être plus que la faculté. Dans l’annonce, le comportement du médecin est essentiel ; il détermine les réactions du patient. Quand ça va mal psychologiquement, le médecin devrait commencer par faire une analyse critique de sa relation avec le patient. Il ne résoudra pas forcément le problème en prescrivant des pilules ou en réquisitionnant le psychologue. L’écoute est la priorité absolue des infirmières impliquées dans l’annonce. Ce que le patient n’ose pas exprimer au médecin, il va le dire à l’infirmière. Son objectif sera d’identifier les besoins du patient, de reprendre des explications et de l’orienter si nécessaire auprès des professionnels compétents. Le but n’est pas de paraphraser la consultation médicale, c’est un autre service qui est attendu. Il n’y a pas confusion avec une consultation infirmière avant une hospitalisation dont l’objectif est de décrire les modalités de la prise en charge. Il n’y a pas confusion avec le diagnostic infirmier à l’accueil du patient lors d’une admission. Ces démar* Centre Alexis-Vautrin, Nancy. La Lettre du Sénologue - n° 37 - juillet-août-septembre 2007 ches se complètent. Un travail sur la transcription du contenu de ces consultations et leur transmission reste à faire. Les psychologues doivent évaluer quantitativement la pertinence (car tous les patients n’ont pas besoin d’un soutien psychologique) et l’impact de leurs interventions. Les comptes-rendus des entretiens doivent figurer dans le dossier médical. Leur objectif est d’aider le patient à mobiliser les ressources pour retrouver un équilibre personnel et de donner des éléments d’orientation aux soignants dans leur relation avec le patient. La mesure du service rendu est un vrai travail de recherche qui requiert une évolution culturelle ; on l’a fait avec la douleur, puis avec la qualité de vie, réputées pourtant non mesurables. Si on ne discute pas a priori l’utilité des psychologues à l’hôpital, il faut mesurer la réalité du besoin. Le dysfonctionnement réside autant dans l’insuffisance que dans l’excès ; les professionnels doivent élaborer les outils qui permettront à la direction d’ajuster l’effectif selon les besoins objectifs. Les associations d’usager ne sont pas intégrées suffisamment dans le dispositif. Leur registre est celui du partage d’expérience où l’on admet la difficulté à faire face à la maladie et où l’on sait montrer comment d’autres, confrontés aux mêmes situations, ont pu trouver les ressources affectives, sociales, professionnelles ou spirituelles pour s’en sortir. L’hôpital doit leur donner une place et les médecins doivent apprendre à travailler avec elles. Les patients sont admirables de courage et de volonté. La menace de mort replace les valeurs humaines dans le contexte de leur propre vie. Les soignants ont des leçons d’humanité à prendre. S’il y a parfois de l’agressivité ou des sollicitations répétées, c’est qu’elles expriment un besoin. Il faut le reconnaître et donner une réponse relationnelle adaptée. Il faut aussi respecter la liberté du patient, son rythme, sa personnalité, et ne pas imposer une démarche non souhaitée ou à contretemps. Le dispositif d’annonce est un concept que les soignants élaborent, affinent et adaptent en coopération avec les patients. Certains, heureusement, n’avaient pas attendu une formalisation réglementaire. La formation, l’analyse critique des expériences et des organisations, la détermination des professionnels autant que celle des pouvoirs publics sont gages de succès. Le dispositif d’annonce n’est ni une fin en soi, ni un moyen d’autovalorisation des professionnels, c’est un outil au service du malade et de ses proches. Une direction hospitalière attentive aux évolutions sociétales et soucieuse du service attendu par ses usagers doit accompagner la mise en œuvre cohérente et coordonnée du dispositif d’annonce. Gérant des moyens humains et matériels, elle a besoin de données quantitatives et qualitatives pour apporter les réponses adaptées aux besoins. n 29