L’appareil urinaire Urologie

publicité
Urologie
Sommaire
• Les cancers :
en augmentation avec l’âge
• L’insuffisance rénale :
de la dialyse à la greffe
• L’AFIDTN : une association pivot
pour les infirmières de dialyse
L’appareil urinaire
• Transplantation de rein :
beaucoup d’appelés, peu de greffés
• Incontinence urinaire de la femme :
étapes et mode de vie
• Infections nosocomiales urinaires :
mauvais chiffres pour les sondages
• L’autosondage intermittent :
simple mais protocole rigoureux
• Congrès ATC :
les greffes au cœur des débats
Le système uronéphrologique comporte les reins,
les uretères, la vessie et l’urètre. C’est un système ouvert
sur l’extérieur, comme le système digestif ou respiratoire
mais, contrairement à ces deux systèmes, il ne participe pas
aux fonctions d’incorporation, c’est-à-dire à un apport
extérieur quelconque tel celui des aliments ou de l’air.
une des fonctions principales de l’appareil
urinaire est de “drainer les émonctoires” auL’
rait pu affirmer Molière en son temps. De nos
jours, on parlerait plus couramment d’éliminer
les toxines.
Le maintien de la balance hydroélectrolytique,
avec la régulation de l’équilibre acidobasique, est
la fonction essentielle du rein. Le rôle chimique
important s’exerce dans le maintien de l’hydratation du corps et d’un pH sanguin corrects, dans
la régulation catabolique, dans l’hématopoïèse
(la synthèse d’EPO stimule la moelle osseuse productrice des hématies).
Le rein contribue à l’excrétion des déchets azotés résultant du catabolisme interne, mais aussi
des substances exogènes comme les métabolites
des médicaments et des hormones. Au niveau du
rein, la vitamine D est synthétisée sous sa forme
active, contrôlant le métabolisme phosphocalcique. Le rein a aussi une fonction régulatrice de
la pression artérielle, grâce à la synthèse de la rénine et à la régulation volumétrique liquidienne.
Quand les reins fonctionnent mal, une ou plu-
Composition normale de l’urine
A 96 %, l’urine est formée d’eau et, à 4 %, de matières solides. Parmi celles-ci, les déchets azotés,
dont l’urée, l’acide urique, la créatinine mais aussi
les Na, K, Ca, Mg, P, So4, et les nitrates, Cl, HCO3.
Elle contient les acides organiques, l’ammoniac et
ses sels, et les métabolites de médicaments.
sieurs de ces fonctions sont perturbées, avec des
conséquences sur le cœur (HTA, insuffisance
cardiaque), sur l’équilibre acidobasique, sur le
métabolisme calcique. Et dans ce cas, le mauvais
fonctionnement de la filtration rénale résulte
d’une atteinte de son parenchyme qui cause une
insuffisance rénale. Si un calcul bloque l’écoulement de l’urine, c’est une lithiase urinaire et
sa conséquence douloureuse : la colique néphrétique, avec les risques d’atteinte rénale,
voire d’infection.
En aval, la vessie sert de réceptacle aux urines, et
de sa contraction musculaire naît la miction, laquelle dépend, chez l’homme, de la pression de
la prostate. Cette glande exocrine constitue un
véritable plancher vésical en même temps qu’un
défilé pour l’urètre. Quand elle s’hypertrophie, la
vessie se bloque, l’urètre se trouve comprimé, situation qui peut aboutir à une véritable rétention
aiguë d’urine. Comme glande, elle joue un rôle
essentiel, avec les vésicules séminales, dans la
fertilisation. Leur sécrétion sert à véhiculer, nourrir et donner ainsi un maximum de chances de
survie aux spermatozoïdes produits par les testicules. La prostate joue également un rôle important dans l’éjaculation, notamment dans sa première phase, ou phase d’émission grâce à sa
musculature lisse.
Atteinte de l’appareil urinaire
L’ensemble de l’appareil urinaire peut être infecté
au niveau :
– des reins (il s’agit alors d’une pyélonéphrite) ;
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 39 - août-septembre 2002
●●●
21
Urologie
●●●
– de la vessie (cystite) ;
– de l’urètre (urétrite, surtout en cas de MST) ;
– de la prostate (prostatite).
Chaque niveau peut être aussi le siège d’une atteinte tumorale bénigne ou maligne.
Des symptômes spécifiques guident vers la
sphère urinaire : une hématurie (sang dans les
urines), une pyurie (présence de pus), une dysurie (difficultés ou douleurs à la miction), une
anurie (arrêt de la production d’urine) ou encore une pollakiurie (émission fréquente
d’urine). Une douleur de la région lombaire doit
être également considérée comme suspecte.
D’autres symptômes ne sont guère spécifiques
mais doivent alerter : une fièvre, une asthénie,
un amaigrissement inexpliqués. Une affection
urinaire peut être découverte quelquefois lors
d’un examen fortuit, alors qu’il y a une absence
totale de signes d’appel. Il ne faut jamais oublier qu’une douleur osseuse vertébrale, par
exemple, peut révéler une métastase d’une néo-
plasie du rein ou de la prostate. Cependant,
l’exploration clinique est moins efficiente que
l’emploi d’examens complémentaires. Détecter
une infection urinaire basse est aisé grâce aux
bandelettes réactives ou à un ECBU. Des marqueurs prostatiques (PSA) aident à diagnostiquer, et surtout à suivre l’évolution des cancers
prostatiques.
L’imagerie médicale a fait de réels progrès avec
l’échographie et le scanner spiralé qui permettent de diagnostiquer nombre d’affections. Tout
diagnostic se doit d’être précoce devant l’efficacité grandissante des traitements médico-chirurgicaux qui permettent de guérir de plus en
plus de cancers urologiques. Quant à la lithotripsie (opération consistant à broyer les calculs
à l’aide d’un lithotripteur permettant ainsi l’évacuation des fragments par l’urètre), elle évite
nombre d’opérations chirurgicales inévitables
auparavant.
Jacques Bidard
Les cancers
En augmentation avec l’âge
Parmi les affections de l’appareil néphro-urinaire, les cancers sont fréquents, surtout
chez l’homme. Leur pronostic dépend souvent de la précocité du diagnostic. Or, bien
souvent, ils sont asymptomatiques.
Le cancer de la prostate
C’est le plus fréquent des cancers de l’homme,
avec 9 000 nouveaux cas déclarés annuellement.
Son incidence est de 15 à 20/100 000 personnes. C’est aussi la deuxième cause de décès
après le cancer du poumon. Parmi les facteurs
de risque, on retrouve la notion de familles à
risque et une incidence liée à l’âge, avec une
nette augmentation après 50 ans. Une fréquence
plus faible a été observée chez les Asiatiques,
mais elle est plus élevée chez les Noirs américains. Malheureusement, le cancer de la prostate
est souvent diagnostiqué à un stade métastatique (30 à 40 % des cas) à cause d’une absence
de signes précoces révélateurs. En effet, dysurie
et pollakiurie ne sont pas spécifiques, et la rétention aiguë d’urine ou l’hémospermie sont
bien trop tardives. Ce sont les douleurs osseuses
et les tassements vertébraux qui, souvent, fournissent l’occasion de le découvrir.
Le traitement actuel repose sur le bilan anatomopathologique résultant des biopsies, plus gé22
néralement de l’état du malade. Dans les formes
limitées, le recours à la chirurgie (même cœliochirurgie) est possible, de même que l’emploi
d’ultrasons localisés au niveau du rectum, de la
curiethérapie sous forme d’aiguilles ou de grains
radioactifs implantés. Dans les formes étendues
ou compliquées, les traitements anti-androgènes
sont les plus efficaces.
Le taux de PSA
Le prostate specific antigen (PSA) est un marqueur
de la prostate. Pratiqué à distance d’un examen
prostatique ou toucher rectal, il doit guider une
biopsie si son taux est supérieur à 10 ng/ml. Entre
4 et 10 ng/ml seront pris en considération l’âge
du patient et le volume de la glande. Dans ce cas,
le rapport PSA libre/PSA total est étudié :
> 20 %, il permet d’écarter un cancer ;
< 20 %, il doit entraîner la réalisation de biopsies.
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 39 - août-septembre 2002
Tumeurs de la vessie
Avec une fréquence qui augmente (3 % des
tumeurs malignes de l’adulte) et une mortalité
qui diminue les tumeurs de la vessie sont les plus
fréquentes des tumeurs des voies excrétrices urinaires. De plus, elles ont une fâcheuse tendance
à récidiver et à devenir infiltrantes. Toute irritation de l’urothélium est susceptible de provoquer une tumeur vésicale et, au premier rang des
responsables, se trouve encore le tabac (plus d’un
cancer sur deux en est la conséquence).
En dehors du tabac, les facteurs de risque de
tumeurs vésicales sont la bilharziose, l’exposition aux sels d’arsenic, au caoutchouc, aux hydrocarbures, à l’aluminium, aux amines aromatiques. Le traitement, en dehors de l’exérèse
toujours lourde de conséquences psychologiques, comprend la radiothérapie, la chimiothérapie, voire le cumul des deux.
core, ce sont un syndrome paranéoplasique ou
une localisation métastatique qui révèlent la tumeur. D’où l’importance de l’échographie, puis
du scanner ou de l’IRM diagnostiques ou d’éléments de bilan d’extension. Une extension tumorale existe dans moins de 5 % des tumeurs
de moins de 3 cm mais dans 85 % de celles de
plus de 10 cm.
Le traitement de la tumeur rénale repose sur son
bilan anatomopathologique, sa taille et la détermination de son extension. Petite, la tumeur sera
traitée par néphrectomie (chirurgie désormais
possible sous cœliochirurgie) mais, en cas de métastases, l’immunothérapie et la chimiothérapie
seront utilisées. Toute hématurie (hors la présence évidente et avérée d’une infection urinaire)
doit faire rechercher une tumeur du rein ; toute
tumeur solide du rein est à considérer, jusqu’à
preuve du contraire, comme un cancer du rein.
Tumeurs du rein
Au troisième rang des cancers urologiques, le
cancer du rein représente 3 % de l’ensemble des
tumeurs malignes de l’adulte. Avec, cependant,
une incidence qui ne cesse d’augmenter.
Dans 40 % des cas, sa découverte (échographique principalement) est fortuite. Cependant,
une hématurie peut être un signe révélateur. Ses
facteurs de risque sont principalement la dysplasie multikystique acquise de l’hémodialysé,
mais aussi la transplantation rénale. Des familles
à risque existent également (atteintes par la maladie de von Hippel-Lindau, les phacomatoses).
L’obésité, l’hypertension artérielle, le tabac font
partie également des facteurs de risque. Professionnellement, les travaux sidérurgiques, l’exposition aux solvants, à l’amiante et aux produits pétroliers est à prendre en compte.
Rarement, le diagnostic peut être établi sur la
triade hématurie, douleur lombaire et masse
perçue dans la même région. Trop souvent en-
Cancer du testicule
Première cause de mortalité par cancer des moins
de 25 ans, le cancer du testicule diagnostiqué
suffisamment tôt a maintenant un taux de guérison avoisinant les 90 %. Un seul facteur de risque
est connu : la cryptorchidie, qui augmente le
risque d’apparition de ce cancer de 5 à 10 fois.
L’orchidopexie (chirurgie réparatrice avec descente du testicule dans les bourses) est donc le
traitement préventif de référence à engager dès
que possible. Un diagnostic, parfois tardif, car il
y a peu de symptômes révélateurs, est marqué
par une augmentation de volume d’un testicule
ou de sa consistance, plus rarement des deux. Le
traitement est fonction du type anatomopathologique, et il est essentiellement fondé sur la radiothérapie ou la chimiothérapie. La toxicité de
ces traitements nécessite un prélèvement préalable de sperme pour une éventuelle fécondation
ultérieure.
J.B.
Lithiase urinaire
La colique néphrétique est la manifestation la plus évidente et la mieux connue des lithiases urinaires : c’est une douleur typiquement unilatérale, intense, de siège lombaire, à irradiation inguinale. S’y ajoutent des manifestations digestives, comme des nausées et des vomissements, pouvant réaliser un véritable syndrome subocclusif. Mais quelquefois moins évidente, la douleur
peut se limiter à une gêne lombaire réalisant une lombalgie banale, voire à une douleur pelvienne ou costale. La colique néphrétique qui traduit une obstruction des voies urinaires par un
calcul, peut s’accompagner d’une hématurie. L’exploration de base comprend un examen de l’abdomen, qui visualise le calcul, l’échographie permettant de détecter une éventuelle dilatation des
cavités rénales. L’urographie intraveineuse (UIV) confirme la présence du calcul et sa situation.
Elle détecte aussi d’autres anomalies urologiques éventuelles, morphologiques par exemple.
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 39 - août-septembre 2002
23
Urologie
L’insuffisance rénale
De la dialyse à la greffe
En France, 40 000 patients sont atteints d’insuffisance rénale chronique terminale.
Un seul rein peut suffire. Mais une atteinte du deuxième rein conduirait à une issue
fatale. Pour vivre, ces patients ont besoin d’une méthode de suppléance de la fonction rénale, hémodialyse ou dialyse péritonéale, voire transplantation.
insuffisance rénale peut survenir comme un
événement aigu ou sous forme chronique.
Dans le premier cas, elle est souvent réversible,
dans le second, l’altération ou la perte de néphrons progressent de façon irréversible sur plusieurs mois ou plusieurs années.
Les causes de l’insuffisance rénale aiguë sont classées en prérénales, rénales ou postrénales. Les
causes de la réduction progressive de la fonction
rénale conduisent à l’insuffisance rénale chronique. Ce sont principalement les anomalies rénales congénitales comme la polykystose rénale,
© Alix/Phanie
L’
l’hypertension artérielle, les infections chroniques, les glomérulonéphrites et les néphropathies diabétiques. Les effets de l’insuffisance rénale ne deviennent apparents que lorsque le
débit de filtration glomérulaire est réduit de
75 %. Lorsque la production d’urine est faible,
l’organisme ne peut excréter les déchets, et un effet toxique, l’urémie, se développe, d’où l’accumulation des déchets azotés et l’élévation du taux
d’urée sanguine (> 2,5 à 6 mmol/1). Il se produit
alors une altération de la balance électrolytique
26
et acidobasique, et les ions potassium et hydrogène sont retenus. L’excès de potassium entraîne
une hyperkaliémie responsable de troubles du
rythme cardiaque ; la rétention des ions hydrogène conduit à une acidose métabolique. La rétention d’eau et de sodium entraîne des œdèmes
et une insuffisance cardiaque. De plus, le patient
peut se plaindre de nausées et de vomissements,
d’un hoquet par irritation du nerf phrénique,
d’un prurit. Une dyspnée secondaire à l’anémie,
la confusion, des crises convulsives, voire un
coma, peuvent survenir.
Quels traitements ?
Le traitement de l’insuffisance rénale dépend de
sa cause, de l’âge et de l’état du patient. Il faut
traiter la cause quand c’est possible, et les symptômes quand ils sont gênants. La restriction hydrique est établie en fonction de la quantité
d’urine émise en tenant compte de la balance de
tous les apports et pertes d’eau. Des régimes alimentaires particuliers, avec restriction de sodium, de potassium et de protéines sont habituels. Ils sont associés à une prise de glucides qui
limite la consommation des protéines, des lipides
et des produits du catabolisme des tissus de l’organisme. Quand ces traitements ne suffisent pas,
il peut être nécessaire de mettre en route soit une
dialyse péritonéale, soit une hémodialyse. La dialyse péritonéale utilise le péritoine comme membrane sélective et l’hémodialyse, une membrane
de synthèse, qui fait partie du rein artificiel. Quel
que soit le type de dialyse, le sang du sujet est séparé du liquide de dialyse par une membrane sélectivement perméable. Le liquide de dialyse ne
contient ni dérivé azoté, ni potassium, ce qui
permet que ces molécules du sang migrent vers
lui. La dialyse peut constituer une mesure temporaire en cas d’insuffisance rénale aiguë, mais,
dans les insuffisances rénales chroniques, des
dialyses itératives sont nécessaires en attendant
la greffe rénale. Malheureusement, tout le monde
ne peut pas bénéficier de la greffe.
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 39 - août-septembre 2002
Marc Blin
L’AFIDTN
Une association pivot pour les infirmières de dialyse
Infirmiers et infirmières de dialyse constatent l’incessante évolution de la prise en
charge des insuffisants rénaux. L’AFIDTN* les aide depuis 1980.
n matière de dialyse, de nouvelles connaissances apparaissent sans cesse. Le soignant qui
choisit ce domaine doit savoir que cela requiert un
apprentissage, voire une formation continue auprès de ses pairs. Il sera confronté à un environnement technologique complexe à maîtriser. Une association aide les soignants qui ont fait ce choix à
appréhender les aspects techniques, relationnels et
éthiques de la dialyse : l’AFIDTN (Association française des infirmières de dialyse, transplantation et
néphrologie).
En 1980, l’AFIDTN est créée par le “groupe
France” de l’EDTNA (European Dialysis Transplantation Nurse Association). L’AFIDTN travaille avec
l’EDTNA sur l’élaboration de normes européennes
de soins infirmiers en néphrologie. Elle est membre
de la Commission de traitement de l’insuffisance
rénale au ministère de la Santé. En 1982, l’AFIDTN
publie sa revue et devient organisme de formation.
Elle tient un congrès annuel et promeut la recherche infirmière.
E
L’abord vasculaire
« En hémodialyse, tout commence par l’abord vasculaire, rappelle Didier Borniche, président de
l’AFIDTN dans l’éditorial du dernier numéro de la
revue de l’association, car pas de bonne dialyse sans
bon abord vasculaire. Tout le monde le sait » (1). La
ponction artérielle est-elle un gage de qualité en hémodialyse ? se demande une infirmière d’Auvergne (2). « Le choix de la ponction de la fistule artério-veineuse du patient se fait sur prescription médicale,
en collaboration avec l’infirmière. Mais il arrive que
dans nos centres périphériques, nous ayons à prendre
des décisions concernant celle-ci en l’absence du médecin. » Son étude sur 52 patients hémodialysés a permis d’évaluer le meilleur cas de figure de ponction
artérielle d’une fistule artério-veineuse (FAV).
Deux index de doses de dialyse ont été utilisés
comme indices de qualité. « Le Kt/V représente une
fraction du volume corporel épuré durant la dialyse, dit
l’auteur. Le SRI représente le pourcentage de la masse
d’urée éliminée durant la dialyse. » Le diamètre de l’aiguille améliore les indices lorsqu’on l’augmente.
Avec le 14 G, les indices sont meilleurs, mais cette
amélioration est très faible. « Nous proposons de privilégier le diamètre 16 G, le plus fin car, psychologi-
quement, il sera admis plus facilement que des grosses
aiguilles. » Le sens de la ponction n’influence pas les
résultats. « Le dialysé n’ayant qu’une seule veine fistulée, il faut la préserver le plus possible. Il vaut donc
mieux choisir le sens le plus facile sur le plan de la dextérité, afin d’assurer le maximum de réussite du geste. »
Un abord vasculaire doit pouvoir être ponctionné
par toute l’équipe, et pas seulement par “le” spécialiste du patient (3). Cela renforcera la sécurité du
patient et de sa FAV par diminution du risque d’hématome, du traumatisme de la fistule et de la douleur de la ponction “à côté”, qui découlent souvent
de la difficulté de piquer. C’est un moyen d’atténuer
l’appréhension que suscite la pose, pour le soigné
comme pour le soignant.
Hémodilution et ultrasons
Formations, colloques et publications de l’AFIDTN
abordent ainsi les stratégies soignantes en matière
de dialyse, de transplantation et de néphrologie.
L’éducation et la qualité de vie du patient, la prise
en charge de la douleur, les risques au travail et l’ergonomie (sous tous ses aspects physiques, psychologiques, environnementaux ou liés aux horaires de
travail) sont également abordés. Dans le dernier numéro de la revue de l’association, les résultats d’une
étude rétrospective menée au centre hospitalier
d’Angoulême font ressortir l’intérêt de l’utilisation
du Transonic (4). Les infirmières y utilisent cet outil de surveillance des abords vasculaires, associant
hémodilution et ultrasons, depuis 1997. Chacune
assure la programmation des Transonics des patients dont elle a la charge. « Après un temps d’inquiétude, le patient est maintenant conscient que cet
acte est un atout supplémentaire de dépistage dans la
surveillance de son abord vasculaire. »
M.B.
* AFIDTN (Association française des infirmières de dialyse, transplantation et néphrologie), BP 90, 76233 BoisGuillaume Cedex. Tél. : 02 35 59 87 52. Fax : 02 35 59 86 25.
Site Internet : www.afidtn.com.
(1) Borniche D. Éditorial. Échanges de l’AFIDTN 2002 ; 63 ; 2.
(2) Savanier F. Abords vasculaires : la ponction est-elle un gage de qualité en hémodialyse ? Échanges de l’AFIDTN 2000 ; 58.
(3) Pourchez D. Suivi et surveillance des fistules. Congrès de l’AFIDTN à
Saint-Lô, 1994.
(4) Maguier MA, Triochet R. Le rôle infirmier dans l’utilisation du
Transonic. Échanges de l’AFIDTN 2002 ; 63 ; 40-1.
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 39 - août-septembre 2002
27
Urologie
Transplantation de rein
Beaucoup d’appelés, peu de greffés
Des organes rares et de moins bonne qualité ! Telle est la situation à laquelle se
heurtent des milliers de candidats à la transplantation rénale.
fisance rénale terminale ont pu bénéficier d’une
telle greffe.
« Cette thérapeutique a l’avantage majeur d’offrir
au patient un meilleur confort de vie, avec un coût
financier beaucoup moins important que la dialyse,
indique le Pr Kreis. Pourtant, ce traitement
connaît certains écueils. Ses modalités thérapeutiques sont complexes. Les traitements immunosuppresseurs doivent être améliorés : ils n’offrent
pas encore les meilleures garanties contre les rejets,
et ils ont des effets secondaires parfois majeurs. Enfin, le manque de greffons ne permet pas à tous les
malades qui pourraient être greffés de bénéficier
d’une transplantation rénale. »
rès de vingt mille personnes relèvent d’une
greffe de rein. « Pourtant, seulement 1 924 patients ont été greffés en l’an 2000, faute de greffons
disponibles », observe le Pr Henri Kreis (1), chef
du service de transplantation rénale à l’hôpital
Necker-Enfants malades (Paris). Cette annéelà, 4 893 patients étaient en attente de greffe de
rein (2). Explication : « Actuellement, en France,
environ 35 000 personnes sont traitées par dialyse, précise le Pr Kreis. Aujourd’hui, on estime
qu’environ 50 % de ces patients pourraient bénéficier d’une transplantation. Une transplantation
n’est pas indiquée pour l’autre moitié des patients,
en raison de leur âge, de leurs éventuelles autres
maladies, des effets indésirables des traitements immunosuppresseurs... »
P
Des résultats en progrès
Les résultats de la transplantation rénale
s’améliorent cependant. La survie du greffon à
cinq ans est ainsi passée de 65 %, entre 1985 et
1987, à plus de 75 % entre 1992 et 1998 (3).
Pour chaque patient, le résultat dépend de
paramètres nombreux : qualité du greffon, âge
et état de santé du receveur, médicaments
immunosuppresseurs dont la tolérance et
l’efficacité varient selon chacun. « Les résultats
sont moins bons lorsqu’une greffe est faite à
partir d’un rein prélevé sur une personne décédée, par exemple, que lorsque le greffon est issu
d’un donneur vivant », explique le Pr Kreis.
Mais 4 % seulement des greffes rénales en
France sont réalisées à partir d’un donneur
vivant (2).
© Burger/Phanie
Des premières greffes à nos jours
Les premières greffes de rein chez l’homme furent mises au point dans les années cinquante.
Depuis, de nombreux patients souffrant d’insuf-
28
Des organes de moins bonne qualité
Non seulement les reins manquent, mais la qualité de ceux disponibles laissent à désirer. « Une
des difficultés actuelles, à laquelle sont confrontés
les spécialistes de la greffe, est la moins bonne “qualité” des greffons, dit le Pr Kreis. Cela s’explique
surtout par la pénurie des organes et le vieillissement de la population des donneurs. » L’âge moyen
des donneurs est en effet passé de 38,4 ans,
en 1997, à 41,5 ans, en 2000 (2). De ce fait, les
receveurs risquent davantage de perdre les
greffons. Cela nécessite plus de nouvelles transplantations, parfois précédées d’un retour en
dialyse.
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 39 - août-septembre 2002
Un plan pour le rein
En septembre 2001, le plan de lutte contre l’insuffisance rénale, conçu pour trois ans, visait à
améliorer l’accès aux greffes de rein. Son objectif : 2 500 transplantations en 2004 (contre 1 924
en 2 000). Pour cela, ce plan préconise notamment d’augmenter le nombre de sites autorisés à
prélever, d’améliorer le système de répartition et
d’attribution des greffons, et de favoriser la greffe
rénale à partir de donneurs vivants.
Les immunosuppresseurs
De nombreux progrès sont attendus des nouveaux traitements immunosuppresseurs. Plus
efficaces, ils devront présenter moins d’effets
secondaires. « Pour la plupart des familles d’immunosuppresseurs, de nombreux travaux sont en
cours pour mettre de nouveaux médicaments,
comme de nouveaux anticorps, ou de nouveaux antimétabolites, explique le Pr Yvonne Lebranchu,
professeur d’immunologie clinique au CHU de
Tours. Mais l’innovation du début de ces années 2000 concerne une nouvelle famille d’immuno
suppresseurs, les rapamycines » (4). Ces substances respecteraient davantage le rein greffé.
Les spécialistes de la transplantation envisagent
aussi de nouveaux traitements, permettant à
l’organisme de ne pas identifier le greffon
comme un corps étranger.
Effets secondaires
« Les immunosuppresseurs utilisés après une transplantation d’organe ont l’inconvénient de provoquer une immunodéficience favorisant la survenue d’infections, mais aussi de cancers », rappelle
le Pr Lebranchu. Ces effets secondaires sont liés
à la nature même de ces médicaments. L’organisme est plus vulnérable aux infections bactériennes, virales, mycosiques. Le risque de cancer augmente avec la durée du traitement. Les
immunosuppresseurs présentent aussi des effets toxiques pouvant être importants. « Ils peuvent engendrer des troubles métaboliques importants – diabète, hyperlipidémie... – ou générer une
hypertension, souligne le Pr Kreis. Ils peuvent encore altérer le fonctionnement de certains organes,
comme le foie, le rein... Un traitement efficace nécessite souvent de prendre une association de deux,
trois, voire quatre médicaments. Ce qui a pour
conséquence de multiplier ces effets indésirables. »
Les interactions avec les autres traitements du
patient (antibiotiques, anti-ulcéreux) rendent
d’autant plus délicate la prescription des immunosuppresseurs. Ces difficultés déterminent
les progrès escomptés. « On attend de nouveaux
médicaments donnant moins d’effets secondaires,
poursuit-il. Cela permettra d’optimiser leur utilisation et de mieux préserver ou traiter les épisodes
de rejets. On attend aussi des médicaments qui permettront une meilleure immunosuppression ou
même une immunosuppression uniquement ciblée
sur l’organe greffé. »
Les rapamycines
Le mécanisme d’action des rapamycines diffère
de celui des autres immunosuppresseurs. Parmi
eux, le sirolimus est le premier inhibiteur de la
mTOR, une activité enzymatique indispensable
à la transmission de signaux nécessaires au déclenchement du cycle cellulaire. Son inhibition
par le sirolimus freine la division des lymphocytes qui subissent un processus de mort cellulaire appelé “apoptose”. « Le sirolimus peut être
utilisé en traitement d’initiation après transplantation, en association avec la ciclosporine et des corticostéroïdes durant deux ou trois mois, explique
le Pr Lebranchu. En traitement d’entretien, le sirolimus peut être poursuivi, en association avec des
corticostéroïdes, si la ciclosporine peut être arrêtée
progressivement. » Une étude sur 525 greffes de
rein a permis d’étudier comment la ciclosporine, qui constitue une partie des traitements
immunosuppresseurs, peut être supprimée sans
danger, tout en maintenant le patient sous sirolimus et corticostéroïdes (5). Une seconde
étude, portant sur 247 greffes de reins, a montré que l’arrêt de la ciclosporine, à un stade précoce du traitement, améliorait la fonction du
rein, et n’augmentait pas le taux de rejets (6).
Comme pour maints immunosuppresseurs, un
traitement par sirolimus nécessite de doser régulièrement sa concentration dans le sang du
patient. Il faut une surveillance liée au risque
d’augmentation des triglycérides et du cholestérol. Les éventuelles interactions médicamenteuses doivent être surveillées également. Il faut
adapter la posologie du sirolimus en cas d’insuffisance hépatique. Parmi les effets indésirables, on observe des douleurs abdominales,
des diarrhées, un lymphocèle, de l’anémie et
une baisse des plaquettes, des infections urinaires, de l’acné, des arthralgies... Actuellement, des essais thérapeutiques sont en cours
pour mieux connaître l’utilisation de cette molécule et mieux évaluer ses bénéfices à long
terme.
Pistes et recherches
« L’idéal serait de dévier la réponse immunitaire
pour qu’elle puisse garder ses fonctions de défense
contre tout agent étranger – et notamment continuer de lutter contre des agents infectieux – mais
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 39 - août-septembre 2002
●●●
29
Urologie
●●●
en “acceptant” la présence d’un greffon étranger,
poursuit le Pr Lebranchu. Cet objectif sera peutêtre atteint grâce à l’“induction de tolérance”,
sur laquelle les spécialistes de la transplantation
fondent actuellement d’importants espoirs.
Grâce à un traitement spécifique, il s’agirait
d’induire une tolérance de l’organisme receveur
à l’égard du greffon. « Par une manipulation thérapeutique, poursuit le médecin, on souhaite
rendre “aveugle” l’organisme receveur pour éviter
qu’il identifie le greffon comme un corps étranger.
On pourrait ainsi “manipuler” les systèmes immunitaires au moment de la greffe. On espère même
s’abstenir, par la suite, de tout traitement. L’idéal
serait d’utiliser une immunothérapie de courte durée – de quelques jours à quelques semaines – suivie d’une simple surveillance ou d’une immunosuppression légère. » Cette solution a été envisagée,
de façon empirique, par l’observation clinique.
Des greffés ont arrêté, de leur propre initiative,
les médicaments immunosuppresseurs. Certains ont pu conserver leur greffon. Les immunologistes envisagent d’engendrer une induction de tolérance en conjuguant différentes
stratégies. Il s’agit de provoquer la destruction
des lymphocytes qui reconnaissent de façon
spécifique le greffon. « Certaines molécules ayant
des nouvelles modalités d’action ont déjà été identifiées. Elles pourraient participer à cette mission. »
Il s’agit aussi de bloquer la stimulation des lymphocytes provoquée par les cellules “présentatrices” des antigènes. Il s’agit enfin de dévier la
réponse immunitaire en faisant apparaître des
lymphocytes régulateurs capables de supprimer
spécifiquement la réaction immunitaire. « Des
premières études en laboratoire ont déjà montré,
chez des animaux, des résultats d’induction de tolérance encourageants, note le Pr Lebranchu. On
peut espérer que cette stratégie thérapeutique sera
transposable à l’homme. »
M.B.
(1) “En cinquante ans, la greffe rénale a connu d’immenses progrès…
mais beaucoup reste à faire”, Pr Henri Kreis, Congrès de l’European
Society for Organ Transplantation (ESOT), du 6 au 11 octobre 2001,
Lisbonne, atelier “la transplantation rénale”.
(2) Source : Établissement français des greffes (EFG). Entente-information et change 2001 ; 15.
(3) Bilan des activités de prélèvement de greffes en France en 1999.
Établissement français des greffes.
(4) Les Prs Yvonne Le Branchu et Henri Cherrys ont fait le point sur la
transplantation rénale lors du Congrès de l’European Society for Organ
Transplantation (ESOT), du 6 au 11 octobre 2001, à Lisbonne.
(5) RWG et al. Sirolimus allows early cyclosporin withdrawal in renal
transplantation resulting in improved renal function and lower blood
pressure. Johnson Transplantation 2001 ; 72 : 777-87.
(6) Hricik DE. Cyclosporin elimination in sirolimus treated renal transplant
recipients results in improved renal function : 12 months results of a
phase II trial. Congrès de l’European Society for Organ Transplantation
(ESOT), du 6 au 11 octobre 2001, à Lisbonne.
Prélèvement d’organes
Une mission infirmière
France Roussin est coordinatrice de prélèvements d’organes dans le département d’anesthésie réanimation
chirurgicale des Prs Benoît Eurin et Laurent Jacob de l’hôpital Saint-Louis (AP-HP), à Paris. Interview.
Quel est le rôle d’une coordinatrice de prélèvements d’organes ?
France Roussin : Accueillir et recevoir les familles est ma première fonction. Il s’agit de personnes sur lesquels
des prélèvements peuvent être effectués. Elles doivent être en situation de mort encéphalique, laquelle
représente environ 1 % des décès en France. Il s’agit de victimes d’accidents vasculaires cérébraux,
d’homicides, de suicides, d’accident de la voie publique ou du travail, etc.
Comment procédez-vous ?
F.R. : Je reçois, dans un bureau, deux ou trois personnes de la famille avec le médecin réanimateur. Celui-ci
annonce le décès. La famille nous confie ce que le défunt aurait ou a souhaité. Tout au long de cette
démarche, l’écoute et le respect de la famille s’impose en premier lieu.
Vous avez aussi un rôle d’encadrement logistique.
F.R. : Ce deuxième volet concerne les liens avec de nombreux partenaires : Établissement français des greffes,
équipes de chirurgie, funérarium, direction de l’hôpital pour autoriser le prélèvement, police et Parquet si
la mort est suspecte ou accidentelle, etc. Le facteur temps est important. La mort encéphalique constatée,
la fonction des organes se dégrade très vite. Pour nous, les points clés restent : l’accompagnement des
familles, le respect des procédures, la qualité de l’organisation et de la communication.
30
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 39 - août-septembre 2002
Téléchargement