Actualités 8 19/04/04 16:03 Page 8 Actualité Santé ORL Pas de médication sans diagnostic Le CAE (conduit auditif externe) peut être le siège de nombreuses affections, dont la plus fréquente, et des plus douloureuses, est l’otite externe. Mais, devant un conduit œdématié, il faut être attentif à toute affection pouvant toucher un épiderme du conduit. L’ oreille comporte trois parties sans communication physiologique entre elles. Le CAE est fermé par le tympan à une extrémité et, à l’autre, ouvert vers l’extérieur. L’oreille moyenne, fermée par le tympan, communique avec le rhinopharynx par la trompe d’Eustache. L’oreille interne, ou labyrinthe, comprend, elle, les organes de l’équilibre. Diagnostic et soins Infos ... Quels soins ? Il faut se méfier des douleurs d’oreilles dites bouchées, sans otorrhée et à tympan perforé mais sec : ne rien instiller, car il peut s’agir d’un hydrops endocochléaire, qu’une instillation rendrait cophotique par l’osmose de la membrane de la fenêtre ronde. Il faut éliminer les gouttes ototoxiques. Un geste simple permet de détecter toute inflammation du CAE, quelle que soit son origine : la traction du pavillon comme la pression du tragus causent une douleur vive. D’où peut provenir cette inflammation ? Le CAE est constitué de deux parties, la première cartilagineuse, la seconde osseuse, revêtue d’un épiderme kératinisant. Cet épiderme est autonettoyant, provoquant l’élimination des déchets grâce à des mouvements ciliaires cellulaires. En dehors de cet épiderme, le CAE comprend des glandes sécrétant le cérumen dont le rôle est double : antibactérien et antifongique. Sa production est très différente d’un individu à l’autre, parfois quasi inexistante. En cas d’hypersécrétion, l’apparition de véritables bouchons peut nécessiter des gestes mécaniques de désobstruction. Dans ces bouchons se mêlent le cérumen, les débris épidermiques et une flore commensale constituée de staphylocoques, de Proteus, d’entérocoques, de Corynebacterium pour les microbes, d’Aspergillus, de Candida pour les champignons. Avant d’examiner le CAE et le tympan, il est essentiel de s’enquérir de l’histoire du patient concernant son oreille. On gagnera du temps et de la précision diagnostique. Ainsi, sont importants à connaître, car pouvant expliquer la pathologie et un traumatisme Professions Santé Infirmier Infirmière N° 54 • avril 2004 local : un voyage aérien, la pratique de bains ou de la plongée sous-marine, un séjour en pays tropical, tout contact avec une personne infectée. Comme par exemple, une atteinte de zona, de varicelle, ou d’herpès, de même que tout antécédent chirurgical ou hospitalisation récente. En cas d’otite, à l’examen otoscopique, on voit un œdème du conduit, qui peut même obstruer totalement ce dernier, associé à une inflammation tympanique. Le traitement consiste alors à prescrire une antibiothérapie locale en gouttes et une antibiothérapie générale per os associée à une corticothérapie ou à un AINS. L’existence d’un magma humide jaunâtre doit faire pratiquer une aspiration avec prélèvement. Il peut révéler une mycose. Le traitement comprend alors une association locale d’antibiotiques et antimycotiques et d’un antimycotique par voie orale. Devant une otite externe qui dure, il faut penser aux mycoses désespérément résistantes aux traitements et récidivant de manière récurrente. Une douleur localisée, vive, peut être le signe d’un furoncle du conduit, qui doit alors être incisé à maturation, puis traité par une antibiothérapie sur éponge expansive et associée à une antibiothérapie per os en cas d’immunodépression ou de maladie immunodéprimante. Autre infection fréquente : celle à staphylocoques, ou impétigo. L’érysipèle est, lui, plus rare que l’eczéma du conduit, qui se caractérise principalement par un prurit intense tenace et nerveusement irritant. Son traitement doit éviter les applications locales d’antibiotiques potentiellement sensibilisants. Complications Si une otorrhée est présente, il est souvent utile de pratiquer un prélève- ment bactérien avant tout traitement antibiotique. D’autant qu’il est nécessaire, avant la prescription de gouttes auriculaires, de s’assurer de l’état du tympan : perforé, celui-ci peut en effet entraîner une infection de l’oreille moyenne nécessitant alors un traitement antibiotique par voie générale. Méconnaître une perforation tympanique risque d’amener à instiller des gouttes ototoxiques telles que la gentalline, provoquant alors une surdité totale par atteinte cochléaire. Devant l’existence de paralysies nerveuses, une otite externe maligne atteignant l’os est à craindre, par exemple une mastoïde. Cette complication est redoutable au point d’être fatale parfois, surtout s’il existe une immunodépression. Le responsable en est le plus souvent Pseudomonas aeruginosa. Une exploration radiologique comprenant un scanner permet de retrouver les signes d’ostéite. L’antibiothérapie prescrite doit être adaptée qualitativement et quantitativement. L’autoprescription ou la prescription de gouttes auriculaires sont des gestes simples, parfois même trop. Ce sont pourtant des gestes non dénués de risques si l’on ne prend garde de suivre quelques précautions, comme celle de toujours vérifier l’intégrité du tympan. Jacques Bidart Entretiens de Bichat, Paris 2003 Les gouttes auriculaires Les gouttes auriculaires ne doivent être administrées qu’après vérification de l’état du tympan perforé ou fermé. Comme dans toute pathologie, il faut s’efforcer à un diagnostic exact par l’examen clinique audiométrique, et le scanner si besoin est, avant d’effectuer l’instillation de gouttes dans le conduit auditif, quelle que soit la facilité de leur administration. (Dr N. Bruhier, Gonesse)