Préambule Cette version du cours de Biologie du développement des plantes constitue un cadrage général, qui reprend des éléments acquis en licence, les complète et les développe. Elle peut être considérée comme une base indispensable pour assimiler des données plus approfondies présentées en cours ou procéder à des recherches bibliographiques personnelles dans le cadre des travaux dirigés. Cette articulation du cours est complétée par un fascicule de figures qui pour le moment n’est pas disponible en version électronique mais sera communiqué dès le commencement du module aux étudiants. Bonne lecture, Bon travail ! BIOLOGIE DU DEVELOPPEMENT DES PLANTES CHAPITRE I : INTRODUCTION GENERALE CHAPITRE II - LE DEVELOPPEMENT VEGETAL : CROISSANCE ET DIFFERENCIATION II – A - LA CROISSANCE : II-A1- Les deux composantes de la croissance : II-A1-a- La division cellulaire : II-A1-b- Grandissement cellulaire : II –A 2 -Relations entre croissance et métabolisme (besoin énergétiques et en matériaux de base) II –A 2-a- Besoins en molécules de base : II –A 2-b Besoins énergétiques : II-A3-Mesure de la croissance : II-A3- a-La croissance de l’organisme ou d’un organe : II-A3- b- Mesure des composantes individuelles de la croissance sur l’ organe donné II-A4- Localisation de la croissance dans l’espace et dans le temps II-A4-a- Dans l’espace : les Méristèmes II-A4-b- Dans l’espace : les zones d’élongation II-A4-c- Localisation de la croissance dans le temps : II-A5- Cinétique de la croissance – Vitesse de croissance : II-A6- Vitesse de croissance II-A6 – a- Relation avec l’efficacité photosynthétique : II-A6 – b- Vitesse de croissance et choix des espèces cultivées : II-A6 – c- Croissance végétale et associations symbiotiques : CHAPITRE III : LES HORMONES VEGETALES III-A -LES FACTEURS QUI CONTROLENT LE DEVELOPPEMENT ET LEURS INTERACTIONS : III-B-GENERALITES SUR L’HORMONOLOGIE VEGETALE : III-B- a - Notion d’hormone et comparaison hormones végétales – hormones animales : III-B– b- Les différents types d’hormones végétales : III-B–c- Méthodes d’études des hormones végétales et de leurs mécanismes d’action : III-B –d- Notion de récepteur hormonal : III-B- e- Un exemple d’approche biochimique pour la caractérisation de récepteur hormonal : le marquage par photoaffinité III-B- f- Un exemple d’approche génétique pour la caractérisation de récepteur hormonal : le cas des récepteurs de l’éthylène III–C- L’ACIDE ß INDOLACETIQUE ET LES AUXINES III–C– a- Nature chimique des auxines : III–C- b- Répartition et évolution dans la plante III–C- c- Facteurs intervenants dans la régulation du taux d’auxine – Biosynthèse – Dégradation – Transport – Inactivation : III–C- d- Diversité des effets biologiques. Exemple particulier de la croissance des fruits : III–C- e- Mécanismes d’action dans le phénomène de grandissement cellulaire : III–C- f- Les récepteurs d’auxine : III–C- g- L’auxine et le contrôle de l’expression des gènes : III–D- LES GIBBERELLINES : III–D– a – Historique – Découverte : III–D– b-Nature Chimique et Diversité des Gibbérellines Naturelles : III–D– c– Biosynthèse et Métabolisme des Gibberellines : III–D- d- Les Gibberellines dans la plante – Répartition- Transport : III–D– e–Effets Physiologiques : III–D– f- Mécanismes Moléculaires d’action des Gibbérellines : III–D–g– Modification des taux de Gibberellines chez les plantes par génie génétique : III–E - LES CYTOKININES III–E– a- Historique et découverte : III–E– b- Nature chimique : III–E– c- Biosynthèse – Métabolisme III–E– d- Cytokinines dans la plante : III–E– e- La perception et la transduction du signal cytokinine : III–E– f- Ingénierie de la production des cytokinines : III–F - L’ETHYLENE III–F– a- Découverte du rôle hormonal : III–F–b– Production par la plante : III–F–c– Voies de biosynthèse et régulation de la synthèse : III–F–d– Effets physiologiques : III–F–e– Mécanismes d’action de l’éthylène : III–F–f– Applications biotechnologiques : III–G – L’ACIDE ABCISSIQUE III–G– a– Historique – Découverte : III–G– b– Nature chimique –Biosynthèse : III–G– c– Effets physiologiques et mécanismes d’action : III–H - LES BRASSINOSTEROIDES III–H– a- Découverte , Historique : III–H– b- Structure et Biosynthèse des Brassinostéroïdes : III–H– c- Effets physiologiques des brassinostéroïdes : III–H– d- La perception et la transduction des brassinostéroïdes : CHAPITRE IV - LES PHOTORECEPTEURS CHEZ LES VEGETAUX IV–A - INTRODUCTION : IV–B – LE PHYTOCHROME : IV–B1– Découverte du phytochrome : IV–B2– Généralisation des résultats : Universalité du Phytochrome – Diversité des effets : IV–B3 –Méthodes d’étude du phytochrome : IV–B4 –Structure du phytochrome : IV–B5 - Photoréversibilité IV–B6 –Propriétés du phytochrome « in vivo » : IV–B7 –La multiplicité des phytochromes : IV–B8 -Mécanismes d’action et chaîne de transduction du signal lumière : IV–C- LES CRYPTOCHROMES : IV–D-LES PHOTOTROPINES : CHAPITRE V - LE DEVELOPPEMENT VEGETATIF A L’ECHELLE DE LA PLANTE ENTIERE V–A- LES CORRELATIONS DE CROISSANCE V–A1 –Interactions système radiculaire –système aérien : V–A2 –Les corrélations entre bourgeons – la dominance apicale : V–A2- a–Mise en évidence : V–A2- b- Mécanisme de la dominance apicale : V–A2- c - Autres phénomènes influençant la forme, l’architecture des végétaux : V–B- LA DORMANCE DES BOURGEONS UN EXEMPLE DE PERIODICITE SAISONNIERE : V–B- a- Notion de vie ralentie et de vie active V–B– b- Les deux types de vie ralentie : V–B– c- La dormance des bourgeons : V–B– c-1- Signification biologique de la dormance en relation avec l’adaptation aux conditions de vie défavorables : V–B– c-2- L’entrée en dormance : V–B– c-3- La levée de dormance : V–B– c-4- Contrôle hormonal de la dormance : V–B– c-5- Variabilité de la profondeur des dormances : CHAPITRE VI : LES PRINCIPALES ETAPES DU CYCLE DE DEVELOPPEMENT VI – A – PHYSIOLOGIE DE LA GERMINATION : VI-A1- Introduction – Problème de terminologie concernant la germination : VI-A2- Conditions de formation et viabilité des graines : VI-A3- Aspects biochimiques de la germination VI-A4- Aspects Physiologiques de la germination : VI-A5- L’industrie des semences en France : VI-A6- La graine organe cible pour les transformations génétiques : VI-B- PHYSIOLOGIE DE LA FLORAISON VI-B1- Conditions de la floraison : VI-B2- La Vernalisation : VI-B2- a- Mise en évidence : VI-B2- b- Classification des espèces : VI-B2- c- Caractéristiques du phénomène de vernalisation : VI-B2- d- Mécanisme hypothétique de la vernalisation : VI-B3- Le photopériodisme : Exigences photopériodiques : VI-B3- a- Mise en évidence de l’influence de la photopériode sur l’initiation florale : VI-B3- b- Classement des espèces suivant leurs exigences photopériodiques : VI-B3- c- Etudes physiologiques des mécanismes induisant la floraison en réponse à la photopériode VI-B3- d- Intervention du phytochrome et d’autres photorécepteurs dans le contrôle de la floraison – problème de la mesure du temps VI-B3- e- Photopériodisme et répartitions des espèces : VI-B3- f- Aspects moléculaires de la différenciation florale : VI-C- PHYSIOLOGIE DE LA SENESCENCE VI-C1- Modalités de la sénescence selon les types de végétaux : VI-C2- Modifications liées à la sénescence : VI-C3- Les causes de la sénescence VI-C4- La sénescence foliaire une étape de remobilisation des éléments nutritifs pour le remplissage des graines. VI-C5- Approches Biotechnologiques visant à différer la sénescence : VI-C6 – L’abcission : VI-C6- a- Description du phénomène : VI-C6- b- Mécanismes : CHAPITRE I : INTRODUCTION GENERALE Ce cours porte sur les mécanismes et les facteurs influençant le développement des végétaux, l’acquisition de leur taille, de leur forme et de leurs fonctions. Notre anthropomorphisme conduit souvent à considérer ces problèmes comme secondaires. Cela se traduit par l’effort de recherche consacré aux organismes animaux qui est 10 à 20 fois plus élevé que celui consacré aux plantes. Il est vrai que le débouché dans le cas de la biologie animale est la santé et la longévité humaine. Pourtant les plantes, producteurs primaires dans la biosphère, sont la source directement ou indirectement de nos aliments, matériaux, sources d’énergie, substances thérapeutiques et sont indispensable au fonctionnement des écosystèmes. Toutes ces propriétés sont liées à l’autotrophie des végétaux par rapport au carbone à travers la photosynthèse, à l’émission d’oxygène qui en résulte et à l’extraordinaire potentiel de synthèse chimique des plantes conduisant à des molécules très diversifiées. L’évolution qui a conduit aux 240 000 espèces de plantes à fleurs actuellement recensées, s’est accompagné de différentes stratégies adaptatives aux plans morphologiques et biochimiques et aux plans de tolérance ou de lutte contre les stress biotiques et abiotiques. Ces stratégies très efficaces indispensables pour un organisme immobile comme la plante sont de plus en plus décryptées dans le cadre de ce qu’on appelle parfois l’écologie biochimique pour ce qui est des interactions avec les facteurs biotiques. Ces aspects adaptatifs peuvent être illustrés ici de façon simple à 2 niveaux 1. le rôle de polymères dans l’acquisition du port dressé des végétaux (lignines) et de l’homéohydrie (cutine). Les lignines polymères phénoliques déposées dans les parois qui sont apparues chez les plantes vasculaires il y a 350 millions d’années ont conféré aux cellules végétales une rigidité compatible avec le développement de végétaux de grande taille et secondairement un système vasculaire (passage des bryophytes aux ptéridophytes). La cutine revêtement de surface des feuilles de nature lipidique empêchant l’évaporation de l’eau a contribué au maintien contrôlé de l’état hydrique des tissus, les échanges ne se produisant plus de façon extrêmement régulée qu’au niveau des stomates. 2. la production par les plantes de substances attractives ou répulsives vis-à-vis des insectes selon des stratégies sophistiquées faisant même intervenir des communications chimiques entre plantes. Toutes ces adaptations font des plantes terrestres un grand succès évolutif puisqu’elles ont colonisé toutes les latitudes sous tous les climats. Dans ce contexte évolutif il faut souligner que la photosynthèse est un événement ancien (3 milliard d’années chez les bactéries procaryotes) par rapport à l’invasion par les plantes du milieu terrestre 400 millions d’années. D’une façon générale, la plante dispose d’une panoplie de différentes variantes de programmes d’expression génétique. Elle se développe dans un environnement fluctuant et agressif. Face à chaque type de contraintes la plante est capable de sélectionner dans cet ensemble des programmes génétiques de rechange dont la réalisation permet une meilleure adaptation aux nouvelles conditions. Cette aptitude à utiliser des signaux environnementaux pour piloter l’expression du génome est une spécialité du monde végétal connue sous le nom plasticité phénotypique. La biologie du développement chez les plantes en différentes étapes : émergence de la discipline 1870 Julius Sachs 1870-1970 Approche corrélative relevant de la physiologie traditionnelle 1970-2000 Approche mécanistique impliquant de façon croissante la biochimie, la biologie et la génétique moléculaire 2000Approches intégrées exploitant les données de la génomique (microarray, high throughput biology) Les conclusions de ce dernier type d’études démontrent l’existence de réseaux d’interactions extrêmement complexes entre les gènes et leurs produits d’expression pour le contrôle du développement. Les démarches mécanistiques et intégrées font appel aux techniques suivantes : = clonage et identification de gènes = expression spatio-temporelle des gènes = expression hétérologues des gènes et production de protéines recombinantes pour l’étude des relations structure/fonction = obtention de mutants, de plantes transgéniques = phénotypage par techniques biochimiques et physiologiques = étude des réactions croisées entre gènes (cross-talk) et de l’expression globale du génome. En Biologie du développement des plantes malgré des projets rapides de nombreux mécanismes restent mal compris ou seulement en partie expliqués, le déterminisme de la floraison par exemple. Comment expliquer ces insuffisances, ces retards qui vous apparaîtrons parfois décevants. 1. les végétaux que nous allons considérer sont des pluricellulaires donc présentent un fonctionnement beaucoup plus complexe que des bactéries ou des unicellulaires (relations transport entre cellules). 2. les végétaux ont par rapport aux animaux un fonctionnement parfois plus complexes et surtout au niveau du rôle de l’environnement sur la physiologie. L’intégration des fluctuations de l’environnement représente ainsi une dimension supplémentaire particulièrement complexe. 3. l’effort de recherche sur le fonctionnement des végétaux est récent et quantitativement est beaucoup moins important que celui consacré à l’étude du fonctionnement des animaux comme cela a été dit plus haut. Les retombées pratiques des études de Biologie du développement. L’amélioration des rendements et de la productivité agricole est classiquement due pour l’essentiel à 3 facteurs : l’amélioration génétique les engrais les pesticides Dans un contexte de développement durable et d’agriculture raisonnée ou la réduction des « intrants » devient maintenant une obligation, la progression des connaissances en Biologie du développement autorise des avancées dans des domaines associés à l’amélioration génétique ou des domaines associés à la production : identification des gènes utilisés pour la sélection génétique ou la transgénèse maîtrise de la culture « in vitro » régulateurs de croissance utilisés en agriculture inspirés des effets des hormones naturelles meilleure exploitation des facteurs du milieu dans le cadre des cultures en serres ou enceintes climatiques. Retombées pratiques d’une meilleure connaissance du déterminisme et contrôle des étapes du développement germination, floraison, sénescence. Définitions Le terme de développement tel que nous l’utiliserons représentera l’ensemble des modifications d’ordre quantitatif et qualitatif qui se déroulent au cours de la vie de la plante. En effet lorsque l’on examine un organisme végétal en fonction du temps on peut observer des différences à chaque examen. En considérant uniquement les variations irréversibles (une plante peut passer d’un état de flétrissement à un état turgescent il s’agit alors d’une modification réversible), celles-ci peuvent être d’ordre quantitatif. Elles correspondent alors à la croissance. Une tige pourra être plus haute, un tronc plus épais, etc… On définit la croissance d’un organisme comme l’augmentation irréversible de ses dimensions (hauteur, diamètre, longueur) ou d’une grandeur liée à une de ses dimensions (masse, volume, surface…). Grossièrement la croissance est un accroissement de taille il s’agit d’une variation toujours mesurable. Les modifications observées peuvent également être d’ordre qualitatif on parle alors de différenciation. Ces modifications se traduisent par l’acquisition de propriétés nouvelles morphologiques ou fonctionnelles à l’échelon cellulaire ou de l’organe qui faut parfois franchir au végétal une étape bien particulière de sa vie (ex : la floraison). La différenciation peut être considéré comme un accroissement en complexité, pas toujours mesurable mais décelable. Le fait de rassembler croissance et différenciation sous le terme de développement comprend plusieurs avantages. Cela correspond au sens commun de développement, se développer (s’accroître mais se transformer) On retrouve cette idée dans l’expression cycle de développement On regroupe sous un seul terme 2 types de phénomènes qui se déroulent le plus souvent simultanément. Un autre terme plus rarement utilisé est Morphogénèse (parfois synonyme de développement) qui au sens éthymologique signifie acquisition de la forme. Le terme a été souvent retenu dans l’expression photomorphogénèse. Ce cours considérera les problèmes de développement chez les spermatophytes ou plantes à graines et plus particulièrement chez les angiospermes qui représentent la grande majorité des plantes cultivées. La vie d’une angiosperme qui débute avec la germination d’une graine par exemple peut se dérouler selon des modalités qui sont parfois très différentes dans le temps (quelques mois à nombreuses années) ou dans l’espace (la taille et la forme peuvent être différentes), mais dans tous les cas la plante vise à atteindre l’état reproducteur, c'est-à-dire à assurer la perpétuation de l’espèce, par la production des fleurs, puis de fruits et de graines. Les agriculteurs, horticulteurs parlent du temps où les conditions nécessaires pour mener une plante de graine à graine. Cette idée de boucle fermée se retrouve dans la notion de cycle de développement c'est-à-dire la succession des différentes étapes de la vie d’une plante qui dans le cas le plus simple des espèces monocarpiques annuelles se déroule au cours d’une même année (quelques mois). CHAPITRE II - LE DEVELOPPEMENT VEGETAL : CROISSANCE ET DIFFERENCIATION Le développement d’une plante c'est-à-dire l’acquisition de sa taille de sa forme et de son architecture finale résulte d’une série d’événements élémentaires qui schématiquement correspondent comme nous l’avons dit : A la croissance de l’individu : une augmentation irréversible de la taille et de sa masse. A sa différenciation : une augmentation de complexité et une diversification des types cellulaires. II – A - LA CROISSANCE : II-A1- Les deux composantes de la croissance : La croissance des végétaux supérieurs provient au niveau cellulaire à la fois D’une augmentation du nombre de cellules (croissance par mérèsis de méristein : partager) D’un agrandissement de cellules préexistantes (croissance par auxésis de anxein : croître) Les deux phénomènes ne se produisent pas dans les mêmes territoires de l’individu et interviennent simultanément ou séquentiellement. II-A1-a- La division cellulaire : Elle comprend : La caryokinèse ou mitose (formation de 2 noyaux) La cytokinèse qui correspond à la séparation de 2 cellules filles suite à la formation d’une paroi. Nous parlerons ici uniquement de la cytokinèse, la mitose étant classiquement bien connue. La cytokinèse suit généralement la mitose mais dans certains cas peut être décalée dans le temps. On peut avoir également plusieurs divisions du noyau sans formation de nouvelles parois. On aboutit alors à des structures coenocytiques (comme l’albumen des graines), cependant transitoires car un cloisonnement intervient secondairement. Le premier événement de la cytokinèse consiste en l’agrégation de vésicules provenant du RE et de l’appareil de Golgi autour du reste du fuseau achromatique (le phragmoplaste) pour constituer la plaque cellulaire qui s’étend de façon centrifuge (à la différence des animaux ou la division cellulaire résulte d’un pincement de la cellule par un anneau contractile). Les vésicules fusionnées vont donner les 2 membranes plasmiques des 2 cellules filles et à l’extérieur vont se mettre en place les nouvelles parois et la lamelle moyenne. Des interruptions dans la plaque cellulaire vont permettre la formation de plasmodesmes éléments de communication entre cellules. Les plasmodesmes représentent des structures intéressantes qui ont été bien étudiées au cours des dernières années. Le cylindre membranaire associant 2 cellules est appelé desmotubule il est en continuité avec les membranes plasmiques et laisse passer l’eau et les substances dissoutes. Des études avec des sondes fluorescentes non perméantes à travers les membranes ont montré qu’une limite d’exclusion de 1 Kda caractérisait les plasmodesmes. Cependant, au-delà d’un transport passif, un transport actif sélectif de certaines protéines intervient à travers le desmotubule (facteur de transcription, protéines de mouvement des virus..). En réponse à certains stress (blessures) un dépôt de callose intervient pour « boucher » le plasmodesme et éviter des fuites du contenu cellulaire. Par ailleurs, certaines cellules dont le fonctionnement exige un isolement et une étanchéité ne possédent pas de plasmodesmes (cas des cellules de garde des stomates qui ne communiquent pas avec les cellules épidermiques voisines). Enfin si pour l’essentiel des plasmodesmes primaires sont mis en place au niveau de la plaque cellulaire lors de la division cellulaire, des plasmodesmes secondaires peuvent être formés dans des situations particulières (greffes entre tissus). D’une façon générale, la circulation de l’eau, des substances dissoutes et des macromolécules se réalise chez les plantes dans deux espaces : Le symplaste qui correspond à l’ensemble des cytoplasmes en communication via les plasmodesmes L’apoplaste qui correspond au réseau de parois en contact les unes avec les autres Les plasmodesmes sont importants car ils permettent dans un système pluricellulaire végétal la transmission de métabolites et stimulus hormonaux d’une cellule à une autre, le plasmalemme procurant cependant une isolement suffisant pour assurer un devenir relativement indépendant de chaque cellule. Le processus de division cellulaire ne modifie pas la structure générale des cellules filles qui demeurent isodiamétriques de petite taille 10-20µ de côté avec un fort rapport nucléocytoplasmique et une vacuole de petite taille. Après chaque division la taille de la cellule s’accroît pour atteindre celle de la cellule mère avec une synthèse nouvelle de matériaux des parois et du cytoplasme. Si la cytokinèse présente de nombreuses particularités chez l’organisme végétal on observe de grandes analogies dans les mécanismes de la mitose au niveau des différents règnes. Des études approfondies sur le cycle cellulaire chez les végétaux ont montré l’existence des déterminants communs dans le contrôle du cycle cellulaire (en particulier de protéines Kinases). L’utilisation de systèmes de cultures cellulaires en suspension, où les divisions sont synchronisées (apport d’hormones, température, blocage du cycle par un inhibiteur suivi de son élimination) est largement exploitée pour étudier les événements moléculaires associés à la cytokinèse. De nombreux composés déterminent un dérèglement de la mitose chez les végétaux. Agents mitodépresseurs bloquent la prophase Agents mitoclassiques : inhibent le fonctionnement du fuseau achromatique et entraînent le doublement du stock chromosomique, sans séparation des 2 noyaux, ex : colchicine, alcaloïde de colchicum autumnale, vinblastine alcaloïde de catharanthus, c’est le cas également d’un herbicide : la trifluraline. Le clivage des chromosomes s’opère mais leur répartition en deux lots équivalents est rendue impossible par l’absence de fuseau : le noyau devient polyploïde. Ces agents mitoclassiques se combinent fréquemment avec la tubuline et empêchent sa polymérisation. L’utilisation de substances mitoclassiques a été envisagée par les généticiens pour créer des races tétraploïdes d’intérêt agricole (Betterave) ou horticole (œillets). Si on traite de jeunes bourgeons par des solutions de colchicine les mitoses en cours sont bloquées et des noyaux tétraploïdes se forment. Ces noyaux peuvent se diviser normalement après le traitement et s’ils sont nombreux dans le méristème, la tige qui est construite par la prolifération des cellules méristèmatiques peut être entièrement tétraploïde. Au niveau des techniques de culture « in vitro » il s’agit d’un moyen de passer de l’état haploïde à l’état diploïde : c’est l’haplodiploïdisation des plantes haploïdes obtenues par culture d’anthères ou d’ovules. Cette technique est utilisée en pratique par les semenciers en vue d’obtenir plus rapidement des lignées pures (cf cours de Biotechnologie végétale). II-A1-b- Grandissement cellulaire : Evénements cytologiques : Le grandissement des cellules peut être très important. Il est par exemple fréquent qu’une cellule de parenchyme palissadique voit son volume multiplié par 200 par rapport à la cellule initiale dont elle dérive. Comme l’accroissement en longueur est souvent beaucoup plus important que l’accroissement en largeur on parle souvent d’élongation cellulaire (l’accroissement en longueur peut être de 100 alors que l’ accroissement en largeur seulement de 2 à 5). La cause de ce grandissement est essentiellement une arrivée importante d’eau dans la cellule qui se traduit par la formation de plusieurs vacuoles qui fusionnent pour donner une grande vacuole (80-90 % du volume de la cellule). La paroi de la cellule doit devenir suffisamment extensible pour permettre cette entrée d’eau qui se fait par osmose. Evénements biochimiques : Lors de l’accroissement de volume la paroi cellulaire ne devient pas plus mince on n’assiste pas un simple étirement, la paroi conserve son épaisseur. Ces phénomènes impliquent un remaniement de structure de la paroi et une synthèse active des polysaccharides qui la constituent. En dehors de cette entrée d’eau et de cette synthèse d’éléments des parois, il y a également une synthèse de petites molécules pour maintenir constante la concentration en solutés des liquides intracellulaires (acides aminés, oses, sels minéraux), synthèse de macromolécules constitutives du cytoplasme (protéines – acides ribonucléiques) on constate également une augmentation du nombre d’organites (mitochondries, chloroplastes, dictyosomes, ribosomes). Ainsi, même si le cytoplasme ne constitue, généralement pour la cellule ayant atteint sa taille maximale, qu’une zone étroite entre la vacuole et la paroi il y a une synthèse active de constituants cytoplasmiques au cours du grandissement cellulaire. En conclusion il faut souligner que : En opposition aux cellules animales pour lesquelles la migration des cellules après leur formation est un important aspect du développement, les cellules végétales ne migrent pas et conservent leur position relative toute leur vie. La morphogénèse de la plante est donc pour une importante proportion dépendante d’un contrôle spatial et temporel précis de la division cellulaire et de l’expansion cellulaire. II –A 2 -Relations entre croissance et métabolisme (besoin énergétiques et en matériaux de base) Toute croissance s’accompagne de synthèses nouvelles qui exigent de l’énergie et des molécules élémentaires, la croissance ne pourra donc se dérouler qu’associée à un métabolisme actif. Cette énergie et ces molécules proviennent de la photosynthèse pour les organes autotrophes ou de l’utilisation de réserves lors des premières phases du développement (germination) ou d’un développement à l’obscurité (réserves des tubercules, bulbes) II –A 2-a- Besoins en molécules de base : Qu’il s’agisse de division ou d’élongation cellulaire on retrouve sur un plan biochimique la synthèse de polysaccharides constitutifs des parois végétales. Les végétaux possèdent une paroi primaire présente dans toutes les cellules et qui est la seule concernée dans les phénomènes de croissance et une paroi secondaire qui vient s’ajouter à l’intérieur de la précédente à la fin du grandissement de la cellule. La paroi primaire est constituée essentiellement de molécules polysaccharidiques. Cellulose – enchaînement linéaire d’unités glucose liaison ß₁-₄ Hémicelluloses –hétéroglycanes – associations de divers oses (glucose, xylose, galactose) Composés pectiques – lamelle moyenne et paroi primaire (ac. Galacturonique et glucuronique + divers oses) En plus faible proportion la paroi renferme de nombreuses protéines : protéines structurales = extensine, protéines fonctionnelles = péroxydase… Au-delà des composants de la paroi on assiste à d’autres synthèses : Synthèse des protéines enzymatiques et structurales Synthèse d’acides nucléiques DNA et RNA dans le cas de la division cellulaire RNA dans le cas du grandissement cellulaire. Toutes ces synthèses exigent donc des unités de base (oses, ac. aminés, bases puriques et pyrimidiques) qui proviennent de la photosynthèse et de la respiration. II –A 2-b Besoins énergétiques : • Dans la synthèse des polysaccharides et des protéines les unités monomères sont initialement activées ex : aminoacylAMP, GDP glucose avec consommation d’ATP ou d’autres donneurs de groupements phosphates (GTP). Pour la synthèse d’acides nucléiques les nucléotides phosphatés ou désoxynucléotides sont à la fois donneurs d’énergie et d’unités de base. La croissance exige donc une fourniture d’énergie importante qui est confirmée par le fait que la respiration est particulièrement importante dans les tissus en croissance par élongation. Par ailleurs, la charge énergétique (paramètre utilisé) pour mesurer l’état énergétique d’un tissu ou d’un organe, doit dépasser une certaine valeur (80 %) pour que la croissance se produise. II-A3-Mesure de la croissance : II-A3- a-La croissance de l’organisme ou d’un organe : En fonction de la définition que nous avons donné de la croissance différents critères de mesure liés à une dimension linéaire apparaissent utilisables. Hauteur (tige) Diamètre (tronc) Surface (feuille) Volume (fruit) Masse fraîche ou sèche Constituant cytoplasmique comme protéine On procède donc à des mesures à des temps échelonnés et on apprécie l’augmentation du critère considéré. Les méthodes retenant la mesure des dimensions présentent l’avantage de ne pas être destructives et donc de pouvoir être répétées sur le même individu. Le critère masse fraîche est à considérer avec réserve étant donné les fluctuations des entrées d’eau dans la plante. La mesure des teneurs en protéine est longue destructive mais reflète bien la croissance active. II-A3- b- Mesure des composantes individuelles de la croissance sur l’ organe donné La division cellulaire peut être apprécié par numération cellulaire, après dissociation et comptage des cellules : Quantité de DNA : Une autre manière d’apprécier la division cellulaire réside dans le dosage du DNA. La quantité de DNA est en principe proportionnelle au nombre de cellules mais la relation est en fait souvent perturbée en raison de la polyploïdie de certaines cellules végétales (en particulier à la suite du phénomène d’endomitose = division des chromosomes sans séparation en deux noyaux). Le grandissement cellulaire : Il peut être apprécié par des observations microscopiques ou par des mesures de volume cellulaire : connaissant le volume total d’un échantillon (fragment de tissu) et le nombre de cellules par échantillon on peut obtenir le volume cellulaire moyen. Les déterminations indépendantes des deux composantes de la croissance sont utilisées pour situer dans l’espace et le temps les deux phénomènes mais aussi pour apprécier l’effet de traitements ou de substances chimiques (hormones) retardant de croissance sur ces phénomènes considérés individuellement. Chez les animaux l’embryon est une version miniaturisée de l’organisme adulte puisqu’il possède la plupart des organes et tissus sous une forme simplifiée qui subiront seulement une augmentation de taille et une maturation lors du développement post-embryonnaire. Chez les végétaux la morphogenèse se poursuit pendant toutes les phases de la vie de la plante et l’embryon très rudimentaire ne présage pas de la taille, forme et organisation de la plante adulte. Cet embryon est en fait très comparable d’une espèce à l’autre même si la taille finale des individus est très différente. Le développement post-embryonnaire est donc très important chez les végétaux, il assure la complexification de l’organisme et se révèle flexible en fonction des conditions d’environnement. Il dépend de petits massifs de cellules indifférenciées qui conservent une capacité à se diviser, les méristèmes et qui sont responsables de la formation des cellules à l’origine de l’édification de la plante adulte. Il existe différents types de méristèmes mais le mieux connu et le plus important est le méristème apical caulinaire qui produit des tiges, des feuilles, contrôle la disposition spatiale des feuilles et des bourgeons sur la tige (phyllotaxie – le temps qui sépare l’apparition de deux feuilles successives sur la tige est le plastochrome). Les autres méristèmes qui assurent la croissance en longueur de la plante sont pour la partie aérienne les méristèmes axillaire et les méristèmes adventifs et pour la partie souterraine les méristèmes racinaires. Les méristèmes axillaires sont issus du méristème caulinaire et sont situés à l’aisselle des feuilles. Ils sont souvent au repos (dominance apicale) et constituent pour la plante une réserve de méristèmes en cas de blessure, décapitation, du méristème apical. Les méristèmes adventifs correspondent à des néoformations résultant d’une phase de dédifférenciation puis de redifférenciation de tissu déjà différenciés (limbe foliaire). Ils peuvent se mettre en place spontanément sur certains tissus de plantes intactes phénomène d’épiphyllie sur les feuilles de Kalanchoé mais sont plus fréquents en réponse à des blessures ou lors de la culture in vitro de végétaux où ils représentent une voie de régénération de tissus déjà différenciés. On a pu induire la formation de méristème axillaire ou le phénomène d’épiphyllie par transformation génétique du tabac avec le gène IPT (synthèse de Cytokinines) ou le gène Kn1 impliqué dans le fonctionnement du méristème. Les méristèmes racinaires assurent seulement une production de nouvelles cellules et une élongation de la racine sans production de nouveaux organes à la différence des méristèmes caulinaires. Les méristèmes racinaires latéraux ne sont pas issus du méristème apical racinaire mais d’une différenciation de tissus déjà en place. Au-delà, une deuxième catégorie de méristème à propriétés complètement différentes assure la croissance en épaisseur en particulier des espèces pérennes et des arbres ce sont les méristèmes latéraux ou cambium, anneaux de quelques cellules d’épaisseur à l’intérieur des tiges et des troncs. Les cellules issues de ces méristèmes se différencient en phloème à l’extérieur et en xylème à l’intérieur de l’axe vertical. Ces cambium comprennent deux types cellulaires : 1. longues cellules à l’origine des vaisseaux et des fibres du bois ce sont les initiales fusiformes 2. cellules de type isodiamètrique à l’origine des rayons ligneux (parenchyme ligneux du bois) : initiales radiales. Les méristèmes apicaux caulinaires sont organogènes ils engendrent des tiges et des feuilles puis des fleurs lors de la transition méristème végétatif – méristème floral. Les méristèmes latéraux sont seulement histogènes ils produisent de nouveaux tissus. Structure, fonctionnement, caractéristiques du méristème apical caulinaire Le méristème se situe à l’apex des tiges et comprend différents zones qui se distinguent selon la structure des cellules et surtout leur devenir. D’une manière générale, les cellules méristèmatiques sont de petites tailles, cubiques, avec un fort rapport nucléo-cytoplasmique et peu ou pas de vacuoles. • • • Zone centrale : cellules relativement grandes, avec quelques vacuoles se divisant moins que les cellules de la zone périphérique, maintiennent une population de cellules indéterminées Zone périphérique : cellules plus petites se divisant rapidement et conduisant à la formation de primordia foliaires Zone support ou (rib. zone) à la base du méristème fournissent les tissus de la tige. Une autre distinction au sein du méristème correspond aux appellations : tunica pour les cellules de la couche extérieures du méristème qui se divisent de façon perpendiculaire à la surface (divisions anticlinales) de façon à accroître la surface du méristème corpus pour les cellules des couches intérieures du méristème qui se divisent de façon parallèle à la surface (divisions périclinales) l’émergence d’un primordium foliaire correspond à un changement dans 1 plan de division au niveau tunica anticlinal périclinal indication d’un nouveau primordium avec formation d’une protubérance première Fonctionnement des méristèmes à l’échelle moléculaire Les résultats ont été essentiellement obtenus à la suite d’analyse de mutants (principalement chez A. Thaliana) affectés dans le fonctionnement du méristème. Plusieurs des gènes ainsi identifiés ont la particularité de coder des protéines à homéodomaines qui contiennent une séquence de 61 ac. Aminés très conservée et se retrouvent chez les mammifères impliqués dans le contrôle du développement. Les gènes renferment une séquence conservée de 180 bp appelée homebox on retrouvera l’intervention de ce type de gène dans le contrôle de la floraison. Exemples de gène : Stm (shoot meristem less) mutant incapable de conserver son méristème Knotted 1 (Kn1). Chez le mutant on empêche la formation du méristème, localisé par hybridation « in situ » dans la zone centrale. Le gène code pour un facteur de transcription jouant un rôle de répresseur de différenciation Clavata. Le mutant présente 1 méristème anormalement grand (mille fois la taille du méristème normal) avec une augmentation du nombre de feuilles. Clavata serait donc un répresseur du développement du méristème. D’autres gènes peuvent être cités comme MGOUN impliqué dans la formation des primordia foliaires la mutation réduit leur nombre ou CUC impliqué dans la séparation des organes son extinction entraîne la fusion des organes floraux. Un travail intéressant (2003) a été publié par le groupe de Sarah Hake ; il concerne le gène BREVIPEDICELLUS un gène à homebox de la famille de Kn1(Knox genes). Ce gène a été démontré agir comme un répresseur de la lignification processus de différenciation cellulaire très marqué, antagoniste du maintien de la cellule méristèmatique indifférenciée. Le fonctionnement du méristème implique donc un ensemble de gènes activateurs et répresseurs en interactions complexes. Ce problème est maintenant de comprendre comment ces informations sont intégrées au sein du méristème qui doit répondre à une double exigence s’autoentretenir évoluer dynamiquement mais de façon régulée avec la production de primordia foliaire L’existence de domaines à l’intérieur du méristème suggère des fonctionnements spécifiques, les cellules de l’ensemble du méristème étant en contact à travers les plasmodesmes et l’expression de gènes en interactions conduisant finalement à des profils hormonaux spécifiques de sous ensembles du méristème. Au total on doit souligner que chez la plante la croissance est continue grâce au fonctionnement des méristèmes (croissance indéterminée). Elle ne s’arrête qu’avec la floraison chez les monocarpiques ou chez les espèces pérennes ligneuses à la mort de l’individu après des dizaines ou des centaines d’années. II-A4 –b- Dans l’espace : les zones d’élongation Elongation : les zones d’élongation sont souvent nettement différenciées des zones de multiplication. C’est le cas classique de la croissance des racines pour lesquelles la zone d’élongation sous méristématique est facilement reconnaissable. Chez les tiges l’élongation se fait au niveau des entre-nœuds (nœud : niveau d’insertion des feuilles sur la tige). En revanche, chez les feuilles et les fruits les zones d’auxésis et de mérésis sont beaucoup plus mal délimitées et leur localisation varie avec les espèces. Organes à croissance définie – organes à croissance indéfinie : En raison de l’existence des méristèmes apicaux et latéraux les tiges et les racines ont une croissance dite indéfinie. Ce terme est peut être un peu exagéré mais il est retenu pour opposer cette croissance à la croissance définie des feuilles, des fruits et des fleurs. Pour ces derniers organes la croissance se poursuit pendant une certaine durée puis cesse. Si au départ l’organe est initié à partir de cellules méristématiques, les zones méristématiques disparaissent, seul le grandissement cellulaire permet la croissance puis l’organe atteint sa taille définitive. En revanche, les tiges et les racines ont une croissance limitée par la mort de la plante mais potentiellement indéfinie. Des extrémités de racine de tomates sont conservées en culture stérile depuis plus de 40 ans et continuent à se diviser (repiquage hebdomadaire). Une branche d’arbre (Saule) espèce particulièrement apte au bouturage prélevée sur un arbre de plusieurs dizaine d’années, mise en terre, donnera un arbre identique au précédent. Ces exemples tendent à justifier l’expression « croissance indéfinie » et à démontrer l’immortalité des méristèmes. II-A4-c- Localisation de la croissance dans le temps : • Localisation dans le cycle de développement de la plante : Plantes annuelle : Si l’on considère le cycle complet depuis l’œuf jusqu’à la fructification on peut distinguer : o Une phase active de croissance qui conduit de l’œuf à l’embryon, c’est l’embryogénèse. Nous étudierons plus tard cette phase qui est mal connue, l’embryon en raison de sa taille et de sa position à l’intérieur de la graine n’ayant pas servi de modèle pour l’étude de la croissance. o Après cette embryogénèse la croissance peut être interrompue pendant des délais très variables parfois plusieurs années. Elle reprendra avec la germination phase de croissance très active. La croissance se ralentit ensuite. Elle peut reprendre de façon spectaculaire lors de la formation du fruit. – Corrélative de la formation de l’embryon. • Séparation temporelle des phases de division et d’élongation Dans de nombreux organes en particulier les feuilles, les fruits, la séparation entre division cellulaire et élongation cellulaire est plutôt temporelle que spatiale. Ce comportement est fréquent dans de nombreux fruits (concombre, tomates) mais n’est pas universel. Un exemple à retenir est celui du coléoptile d’avoine. Si on fait germer à l’obscurité des caryopses de graminées, on observe autour des premières feuilles une graine : le coléoptile capable d’atteindre 4 à 5 cm en quelques jours. Tant que sa longueur n’excède pas 1 cm sa croissance se réalise uniquement par allongement des cellules déjà formées. C’est au cours de cette phase de croissance uniquement par grandissement que l’on utilise le coléoptile comme matériel d’étude dans les recherches sur l’auxine (action sur une seule composante), un autre exemple de séparation temporelle est représenté par la croissance du spadice d’Arum maculatum (voir figure). II-A5- Cinétique de la croissance – Vitesse de croissance : Les différentes méthodes de mesure de la croissance que nous avons examinées ont permis d’accumuler de nombreuses informations sur la cinétique de la croissance et les vitesses de croissance. Quelle que soit la méthode et l’organe étudié les courbes donnant l’évolution du critère retenu (masse, longueur, etc…) en fonction du temps ont une grande analogie. Ce sont des courbes dont l’allure générale est toujours une sigmoïde (courbe en S). II-A6- Vitesse de croissance La vitesse de croissance d’une espèce est bien sûr dépendante des conditions nutritives, climatiques mais dans des conditions comparables les différentes espèces présentent des vitesses de croissance plus ou moins rapides Bambou Maïs 60 cm/24h 13 cm/24h Ces valeurs sont des valeurs extrêmes mais de nombreuses espèces ont pendant la période active de croissance des vitesses d’allongement des tiges de 1 à 4 cm/24h. II-A6 – a- Relation avec l’efficacité photosynthétique : Ces caractéristiques de croissance sont liées à des potentiels génétiques différents, cependant d’une manière générale, on a pu montrer une relation entre vitesse de croissance et efficacité de la photosynthèse. • La vitesse d’assimilation nette = vitesse d’accroissement de masse sèche par unité de surface foliaire est un reflet direct des capacités photosynthétiques. Il y a toujours correspondance entre cette valeur et la vitesse relative de croissance. Taux d’assimilation CO2 g/m²/semaine Vitesse relative de croissance mg/g/semaine Herbacées Zea mays (C4) Hordeum vulgare (C3) 152 68 2310 920 Feuilles caduques Fraxinus excelsior 33 300 Feuilles persistantes Pinus abies 20 58 On peut déduire de ce tableau que les herbacées ont généralement des vitesses relatives de croissance plus élevées que les espèces arborescentes et les arbres à feuilles caduques un meilleur rendement que les résineux. Parmi les herbacées les plantes les plus performantes sur le plan photosynthétique ont la croissance la plus rapide. Ces comparaisons entre espèces C3 et C4 sont valables dans des conditions de culture identiques, il faut cependant penser que la croissance végétale est comme d’autres phénomènes physiologiques soumise à la loi du facteur limitant (eau, nutrition minérale). II-A6 – b- Vitesse de croissance et choix des espèces cultivées : Lorsque l’on examine la productivité des espèces cultivées deux cas sont à considérer : Les végétaux dont on exploite l’appareil végétatif Les végétaux dont on exploite l’appareil reproducteur (graines, fruits) en fait les plus nombreux. Dans le premier cas sylviculture, plantes annuelles : tabac, potagères…il faut donc privilégier la croissance de l’appareil végétatif et rechercher des espèces à croissance rapide (Peuplier, Eucalyptus). Dans le 2ème cas un aspect très important réside dans la distribution des assimilats selon le principe de la relation organe source (feuille) organe puit (fruits, graines), c’est à dire un transfert des produits de la photosynthèse et de leurs dérivés des feuilles aux parties récoltées. Comparaison portant sur différentes variétés de blé Triticum boeticum (diploïde) Triticum aestivum (hexaploïde) Index de récolte (1) 33.8 49.3 Taux d’assimilation (2) 45.7 31.4 (1) index de récolte =poids sec grains / poids sec plante entière (2) taux d’assimilation = mg CO2 fixe / dm² / heure Avec une meilleure efficacité photosynthétique Triticum boeticum est moins productif que Triticum aestivum une variété cultivée, car ce dernier présente une meilleure capacité à orienter les photosynthétats vers les graines. Les paramètres de sélection pourront donc porter sur la distribution des assimilats. Par ailleurs si dans les cas précédents une croissance maximale est souhaitée dans d’autres c’est au contraire une croissance lente qui est recherchée. Certains arbres d’ornement Arbres fruitiers (permettant une cueillette directe) chaque individu produit moins mais la production à l’hectare est comparable. II-A6 – c- Croissance végétale et associations symbiotiques : La croissance des plantes cultivées est liée à la constitution génétique des espèces et au conditions de milieu que vont conditionner la vitesse de croissance potentielle. Il faut ici insister sur le fait que pour une constitution génétique donnée la nutrition carbonée est rarement limitante mais la nutrition minérale (azote, éléments minéraux) et l’alimentation en eau sont plus souvent les facteurs limitants. L’agriculteur peut pallier les insuffisances du milieu par le biais de la fertilisation et de l’irrigation qui peut régulariser les rendements en évitant les aléas de la sécheresse. Des recherches importantes ont portés ces dernières années sur des associations symbiotiques entre plantes et microorganismes qui naturellement facilitent la nutrition minérale des plantes, il s’agit des associations : + Plantes bactéries + Plantes champignons légumineuses – rhizobium Alnus – frankia champignons mycorhiziens Ce dernier cas recouvre des associations entre champignons (Basidiomycètes et Ascomycètes) et les racines de végétaux supérieurs on distingue les ectomycorhizes qui se développent à la surface des racines et concernent 10 % des plantes y compris les essences forestières les plus importantes (Fagacées, Bétulacées, Salicacées, Abiétacées…) les endomycorhizes qui concernent 90 % des espèces végétales et se développent à l’intérieur des racines. La mycorhization stimule la croissance • • en améliorant la nutrition minérale (phosphore, azote) en protégeant les plantes contre les agents pathogènes par la production de substances de type antibiotiques. Le champignon bénéficie des excrétions racinaires de la plante au plan nutritif et facilite la nutrition minérale en augmentant la surface de contact entre le sol et plante et en réalisant un certain nombre de réaction chimiques intermédiaires facilitant l’absorption des éléments minéraux. CHAPITRE III : LES HORMONES VEGETALES III-A -LES FACTEURS QUI CONTROLENT LE DEVELOPPEMENT ET LEURS INTERACTIONS : Le développement d’une plante ne se déroule pas au hasard mais à la fois de façon : Ξ Ξ Ξ Harmonieuse Coordonnée Reproductible Harmonieuse : une plante est généralement équilibrée dans ses proportions , la taille relative des différents organes est proportionnée le rapport surface aérienne / surfaces parties souterraine demeure relativement constant. Coordonnée : apparition séquentielle d’organes. Une semence lors de sa germination émet d’abord une radicule qui pénètre dans le sol et fixe la jeune plantule qui va développer sa partie aérienne. (les fleurs apparaissent après les feuilles) Reproductible : pour une espèce donnée, si les conditions sont identiques les dimensions de l’individu arrivé à maturité sont comparables, les périodes de floraison ou de fructification se retrouvent à des époques comparables. Le développement comprend une série d’événements au niveau cellulaire : division, élongation, différenciation, mort cellulaire qui sont intégrés à l’échelle du tissu et de l’organe via des interactions cellulaires générant en particulier des gradients morphogénétiques. Le développement se déroule donc selon un plan propre à chaque espèce qui dans les conditions normales correspond à la mise en place séquentielle de programmes génétiques de développement se recouvrant partiellement. Par exemple, dans la floraison les gènes d’identité du méristème floral comme « leafy » interviennent dans la conversion méristème végétatif – méristème floral mas activent également l’activation des gènes d’identité d’organes floraux intervenant plus rapidement. Dans le cas du développement végétal l’environnement a un poids particulier, une très forte influence sur le développement. Il s’agit des contrôle externes. Contrôles externes Les facteurs de l’environnement peuvent agir selon des effets que nous qualifierons de trophiques en conditionnant l’intensité du métabolisme cellulaire (T°, lumière,etc…), parfois selon des effets mécaniques (exemple vent). Et enfin selon une 3ème catégorie d’effets beaucoup plus subtile que nous appellerons effets signaux, une modification du milieu extérieur correspondant pour la plante à un signal qui va influencer son développement. Ces effets signaux peuvent faire intervenir les hormones comme intermédiaires ou agir après avoir été enregistré au niveau de la plante par des récepteurs capable de percevoir ces signaux et de les transformer en information utilisable par la plante. Les photorécepteurs comme le phytochrome représentent un exemple typique de perception de l’environnement lumineux et de contrôle de développement. Les contrôles internes : Ils sont directement liés à la constitution génétique des individus, à leur génome qui contient une information de base (protéines enzymes facteur de transcription) et une information d’organisation susceptibles de percevoir, d’intégrer les signaux externes et de coordonner leurs effets. III-B-GENERALITES SUR L’HORMONOLOGIE VEGETALE : III-B- a - Notion d’hormone et comparaison hormones végétales – hormones animales : La notion d’hormone (du grec hormao : exciter le terme fait son apparition en 1905) s’applique à des substances organiques biologiquement actives et fait intervenir 3 idées essentielles : 1. activité à de très faibles concentrations (aucun rôle énergétique ni nutritif) 2. synthèse par l’organisme lui-même 3. transport du site de synthèse au site d’action où elle influence spécifiquement des cellules cibles. Hormones végétales : composés organiques synthétisé par la plante qui à de très faibles concentrations ont une action sur le métabolisme et le développement généralement dans des tissus différents du lieu de production. Les hormones végétales comme les hormones animales sont impliquées dans les communications intercellulaires. Certaines substances qui ont des effets analogues à ceux des hormones mais qui ne sont pas synthétisées par les végétaux sont appelées régulateurs de croissance. Ce sont généralement des substances chimiques de synthèse qui sont abondamment utilisées en agriculture et horticulture. L’étude des hormones, messagers chimiques agissant sur le métabolisme et le développement, est très avancée chez les animaux, où on a pu montrer que : des structures chimiques variées jouaient le rôle d’hormone : stéroïdes, peptides comme : l’insuline, protéines comme l’hormone de croissance, dérivés d’acides aminés (adrénaline), gaz comme le monoxyde d’azote les hormones agiraient par le biais de récepteurs membranaires ou cytosoliques la production d’hormones était souvent cyclique (cycle d’ovulation chez la femme, hormone de croissance produite la nuit..) les avancées du génie génétique ont conduit à la production d’hormones (protéines) recombinantes à des fins thérapeutiques : insuline, hormone de croissance, érythropoïétine… - - Les hormones végétales tout en présentant un certain nombre de points communs avec les hormones animales (perception, voies de transduction…) s’en distinguent sous différents aspects. - Molécules de faibles PM < 500 lié aux difficultés de translocation de cellules à cellules Structures chimiques généralement différentes à l’exception des brassinostéroïdes voisins des stéroïdes animaux Produites dans différentes régions de l’organisme (même si une zone de production majoritaire est fréquente) et active à la fois au lieu de synthèse et à distance. Ceci à la différence des hormones animale, où la distinction site de production (ex : glande endocrine) et site d’action est plus claire. Enfin les hormones végétales agissent fréquemment de façon additive, antagoniste, ou en synergie sur divers phénomènes physiologiques (action moins ciblée que les hormones animales). - - Ce dernier point met l’accent sur la difficulté des études d’hormonologie végétale. Une hormone n’agit généralement pas seule sur un phénomène mais en présence d’autres hormone qui agissent dans le même sens ou en sens contraire. III-B– b- Les différents types d’hormones végétales : La véritable mise en évidence d’une hormone végétale remonte à 1926 il s’agit des travaux de WENT sur l’auxine. Jusqu’en 1950 on considéra que l’auxine représentait la seule phytohormone mais après cette date d’autres hormones végétales ont été découvertes, dont l’importance s’est confirmée avec les années. Chronologiquement il s’agit des gibberellines (1950), des cytokinines (1955), de l’éthylène (1960), de l’acide abcissique (1965) et des brassinostéroïdes (1995). A l’heure actuelle on connaît donc 6 types d’hormones végétales pour lesquels on peut distinguer : Des hormones physiologique) : - stimulatrices (qui induisent ou stimulent un phénomène Auxines Gibberellines Cytokinines Brassinostéroïdes pour ces hormones on observe des familles de molécules actives En parallèle on distingue des hormones à effets mixtes comme - l’éthylène l’acide abcissique dans ce cas une seule structure active a été identifiée. D’autres molécules à rôle de « médiateur chimiques » chez les végétaux comme les polyamines, le jasmonate, le salicylate, les oligosaccharides …n’ont pas encore obtenu le statut d’hormone végétale vraie. III-B – c- Méthodes d’études des hormones végétales et de leurs mécanismes d’action : a Approches biochimiques Elles sont utilisées pour le dosage des hormones, la mesure d’activité des enzymes des voies de synthèse, caractérisation biochimique des récepteurs… Examen du cas particulier du dosage des hormones. Historiquement 3 méthodes ont été retenues 1. les tests biologiques sensibles, peu spécifiques parfois complexes à mettre en œuvre 2. les méthodes physico-chimiques sensibles et spécifiques mais demandant une instrumentation lourde (HPLC –GC – spectro de masse) 3. les test immunochimiques ou radioimmunoessais ultrasensibles et très spécifiques exigeant des anticorps vis-à-vis des hormones et une hormone sous forme radioactive (expériences de compétition). b Approches de biologie moléculaire et de génie génétique, elles sont utiles pour la : - - c Caractérisation des gènes impliqués dans les voies de biosynthèse des hormones, des gènes qui répondent à l’application d’hormones (Northern blot, RT – PCR, hybridation in situ…) Analyse des promoteurs des gènes répondant aux hormones : éléments cis / facteurs trans Recherche de gènes par la technique de « promoteur trapping » Modulation des taux d’hormones par génie génétique aspects fondamentaux et appliqués, y compris l’utilisation de promoteurs spécifiques Approche génétique Caractérisation de mutants de sensibilité aux hormone de mutants de production d’hormones d Approche pharmacologique Basée sur l’apport de drogues, inhibiteurs y compris par microinjection pour disséquer les étapes des voies de transduction du signal hormonal. III-B – d- Notion de récepteur hormonal : La reconnaissance d’un signal chimique (hormone) par une cellule et sa transformation en information utilisable ne peuvent se réaliser que si la cellule contient au moins un constituant qui est capable de se lier initialement à l’hormone : le récepteur doit ainsi avoir une forte affinité et une forte spécificité vis-à-vis de l’hormone. Les seules molécules qui présentent assez de variations dans leur composition et leur structure pour répondre à ces exigences de spécificité sont les protéines il est donc admis que les récepteurs hormonaux sont généralement des protéines . La liaison hormone-récepteur activerait le récepteur de façon à ce qu’il puisse assurer la transduction du signal hormonal. Cette activation correspond généralement à un changement de conformation qui stimule une activité enzymatique sur la molécule de récepteur (ex : protéine kinase) ou induit une capacité nouvelle d’interaction avec une autre protéine. Cette première étape est suivie d’une série d’événements moléculaires, la chaîne de transduction, qui aboutit finalement à des modifications « décisionnelles » - Transcription de nouveaux gènes Degré d’ouverture de canaux ioniques etc Le récepteur (son abondance) peut se révéler un facteur limitant dans l’action hormonale. On a parlé d’état de compétence d’un tissu selon la plus ou moins grande abondance de récepteurs. Enfin étant donné les effets pléiotropiques des hormones végétales (effets diversifiés) il a été envisagé une pluralité de récepteurs affectés à des effets cibles spécifiques ( ex : cas de l’éthylène). III-B- e- Un exemple d’approche biochimique pour la caractérisation de récepteur hormonal : le marquage par photoaffinité Technique utilisée pour la caractérisation de protéines fixatrices de l’acide abscissique (ABA) sur le plasmalemme des cellules de garde au niveau des stomates de Vicia Faba. Les stomates jouent le rôle fondamental dans la régulation des échanges gazeux et des échanges d’eau entre la plante et son environnement. Il s’agit d’un ensemble cellulaire, l’appareil stomatique (cellules de garde – pore stomatique souvent entouré de cellules épidermiques différentes par leur taille et leur forme des autres cellules épidermiques voisines- les cellules subsidiaires). Ces stomates peuvent être ouverts ou fermés et dans ce dernier cas les échanges gazeux et l’évapotranspiration sont alors très réduits. Le mécanisme de fermeture des stomates repose sur une fuite d’agents osmotiques au niveau des cellules de garde les faisant passer d’un état turgescent à un état moins turgescent ou semi-plasmolysé déterminant ainsi le resserrement du pore stomatique. Lors du stress hydrique les stomates se ferment en réponse à l’ABA, un stimulus hormonal, dont la concentration augmente dans les feuilles (supposé être libéré ou synthétisé « de novo » au niveau du mésophylle foliaire) et plus spécifiquement au niveau des cellules de garde. L’ABA entraîne une fuite de K+ au niveau des cellules de garde. Le gros problème de l’étude des interactions hormone / récepteur réside dans le caractère labile des liaisons chimiques faibles qui s’établissent entre les 2 partenaires. Une approche pour résoudre ce problème réside dans le marquage par photoaffinité. Le principe du marquage de protéines, de récepteurs par photoaffinité est le suivant : certaines molécules comportent des groupements chimiques qui par photoactivation deviennent très réactifs et peuvent former des liaisons covalentes irréversibles. Si la molécule est par ailleurs radioactive, ou fluorescentes on peut ainsi marquer de façon stable la protéine réceptrice. L’ABA contient un groupement cétone qui peut être photoactivé par irradiation par des longueurs d’onde de 330 nm. Ceci peut fournir un moyen de marquer irréversiblement des récepteurs protéiques potentiels de l’ABA sans utiliser d’hormones modifiées. Quand l’hormone naturelle ne contient pas de groupement photoactivable on peut travailler avec des dérivés d’hormones sur lesquels on a greffé des groupements photoactivables (groupement azido dans le cas de l’auxine) avec bien sûr conservation de l’activité biologique. Protocole expérimental : On prépare des protoplastes d’épiderme de fève en pelant les épidermes de Fève et en les mettant en contact avec des enzymes de digestion des parois ce qui libère le protoplaste entouré par la membrane plasmique. Par un procédé de centrifugation différentielle on peut même obtenir spécifiquement des protoplastes de cellules de garde. Les protoplastes sont ensuite incubés avec de l’ABA tritié ³H-cis(S)-ABA. La forme active de l’ABA sur la fermeture des stomates….. On irradie la suspension de manière à provoquer le marquage par photoaffinité d’éventuels sites récepteurs. Des contrôles sont effectués 1. avec l’énantiomère cis(R) ABA qui est biologiquement inactif 2. avec une protéine banale l’albumine de sérum de bœuf pour évaluer la possibilité de fixations aspécifiques. L’interprétation des différents résultats montre qu’il existe une fixation spécifique et aspécifique de l’ABA physiologiquement actif au niveau des protoplastes de cellules de garde. Cette fixation est moins importante au niveau des protoplastes de mésophylle foliaire. La fixation de l’hormone radioactive sur son site de fixation obéit à une cinétique de saturation et peut être déplacée par de l’hormone froide non radioactive de façon très spécifique (isomère physiologiquement actif seul efficace pour le déplacement). Des traitements ménagés des protoplastes des cellules de garde par une protéase, la trypsine supprime complètement la fixation de l’ABA en conservant l’intégrité du protoplaste. Les sites de fixation seraient donc des protéines. Ces expériences ne démontrent cependant pas le caractère fonctionnel du récepteur, la protéine ayant liée l’ABA pouvant être un transporteur ou une enzyme de dégradation. III-B- f- Un exemple d’approche génétique pour la caractérisation de récepteur hormonal : le cas des récepteurs de l’éthylène Le récepteur de l’éthylène est un des récepteurs les mieux caractérisés au plan moléculaire et génétique. Sa caractérisation repose sur l’étude de mutants de sensibilité à l’éthylène dont le mutant ETR1 d’Arabidopsis qui ne présente plus le phénomène de triple réponse lors d’application d’éthylène. Le clonage positionnel du gène muté et l’analyse du produit du gène a montré une analogie marquée avec une famille de protéines « senseurs » de l’environnement chez les bactéries : les systèmes à deux composantes constitués d’un domaine de perception du signal et de transmission du signal : une histidine Kinase et d’un domaine receveur : le régulateur de réponse. La perception du signal entraîne généralement une autophosphorylation dans un domaine conservé de l’histidine Kinase la phosphate étant ensuite transféré à un résidu aspartate du receveur. Ce type de système à double composante se retrouve chez les bactéries dans la perception de la lumière, de l’oxygène et chez les plantes a été aussi impliqué dans la réponse à la lumière et aux cytokinines. Dans ces différents exemples on retrouve le domaine conservé des histidines Kinases HNGFG. D’autres caractéristiques communes entre le gène ETR1 et des gènes bactériens suggère une origine évolutive à partir des bactéries. Le gène ETR 1 a été exprimé dans des levures ce qui leur confère l’aptitude à fixer l’éthylène. Il s’agit donc bien d’un récepteur d’éthylène car on associe ici les preuves génétiques et biochimiques. Un ion cuivre est nécessaire pour la fixation de l’éthylène sur le récepteur d’Arabidopsis et le cuivre est co-purifié avec la protéine récepteur. Une cystéine en position 65 est par ailleurs indispensable pour l’interaction entre le cuivre et la protéine. Au total le récepteur qui est un dimère interagit avec l’éthylène ce qui résulte en un changement conformationnel de site de liaison propagé en suite au domaine transmetteur. Par analyse du génome, plusieurs gènes ETR ont été caractérisés chez Arabidopsis (au moins une famille de 5 membres) qui comprennent des domaines communs mais aussi des spécificités. Ceci permet de les classer en 2 sous familles ETR1 et ERS1 qui ont en commun le domaine conservé de l’histidine Kinase, ETR2, EIN4, ERS2 qui ne l’ont pas. Ces différents gènes pourraient coder des récepteurs affectés à des réponses spécifiques ou à des tissus spécifiques. Il faut noter cependant qu’il n’existe qu’une redondance fonctionnelle partielle entre les différents gènes de récepteurs car les mutants insensibles à l’éthylène au niveau de la triple réponse n’auraient pu sinon être obtenus. III – C- L’ACIDE ß INDOLACETIQUE ET LES AUXINES Rappelons tout d’abord les étapes essentielles dans la connaissance de l’AIA. Darwin 1880 observation du phototropisme chez les coléoptiles de graminées excitation perçue au sommet et transmise vers la base Went 1926 récupération par diffusion d’une substance active sur la croissance appelée auxine, d’auxein = croître. Mise au point d’un test biologique permettant d’apprécier les teneurs en substance active Kögl 1934 identification chimique de l’auxine à l’acide ß indolacétique (isolé initialement à partir d’urine humaine) puis caractérisation de cette structure dans les tissus végétaux (Zea mays) par Haagen – Smith en 1942 1925-1970 recensement des différentes réponses des plantes à l’action de l’AIA. Caractérisation de substances naturelles ou synthétiques à action auxinique. 1970-1990 études sur le mode d’action de l’AIA au niveau moléculaire en particulier dans le phénomène de grandissement cellulaire développement des substances à action auxinique en agriculture. 1990-2005 perception / transduction du message auxinique. Exploitation de la génomique et de mutants pour la compréhension de la production et des mécanismes d’action de l’AIA. III –C– a- Nature chimique des auxines : Nous utilisons le terme auxine au pluriel car au-delà de l’identification chimique de l’acide ß indolacétique d’autres substances se sont révélées actives sur les tests biologiques initialement définis pour quantifier l’AIA. Ces tests ne sont pas en fait absolument spécifiques de l’AIA mais d’une famille de composé à action biologique commune : les auxines. Auxines naturelles : il s’agit de structure à noyau indole très voisine de l’AIA. Il faut cependant noter que la plupart de ces substances sont impliquées dans les voies de synthèse de l’AIA, en tant qu’intermédiaires, et il n’est pas clairement établi si elles ont une action auxinique par elles mêmes ou si leur effet résulte de leur conversion rapide en AIA lors du test biologique (effet de précurseurs). D’autres substances non indoliques comme l’acide phénylacétique ont une action auxinique cependant plus faible, à même concentration, que l’AIA. Auxines de synthèse : il s’agit de molécules qui miment les effets des auxines naturelles. Ce sont généralement des structures de type indolique ou bien : ¾ de type phénoxycarboxylique ¾ de type naphtalène acétique ¾ de type benzoïque Les plus connues de ces molécules sont le NAA et le 2-4 dichlorophénoxyacétique qui à de fortes concentrations sont utilisées comme herbicide (effet hyperauxinique toxique car la molécule qui n’est pas dégradée s’accumule). Des études importantes ont été réalisées dans une optique relation structure-fonction pour dégager des points communs entre toutes ces structures actives. La plupart de ces molécules ont un noyau insaturé et un groupement carboxylique. Une théorie intéressante a été proposée par Thimann (1969). Elle fait apparaître des analogies marquées dans la répartition des charges dans l’espace (charge positive à 5,5 Ǻ de la charge négative portée par le carboxyle). Ces observations suggèrent la fixation de l’hormone sur un récepteur selon un processus de complémentarité de charges. Par exemple la charge positive de l’azote de l’indole et la charge négative du carboxyle dans le cas l’AIA seraient associées à deux sites de charges complémentaires sur le récepteur. La spécificité de la reconnaissance est confirmée par le fait que de légères modifications d’une molécule peuvent supprimer son activité, le 2-4 D est actif mais le 2-6 D est inactif. Par ailleurs des molécules à structures proches des auxines inhibent compétitivement l’auxine. Ce sont des anti-auxines : exemple 2-4-6 trichlorophénoxyacétique. Ces substances occuperaient les sites récepteurs de l’AIA ou un site particulier du récepteur sans induire la suite des événements et la chaîne de transduction du signal auxine. III – C- b- Répartition et évolution dans la plante : Initialement caractérisée dans les coléoptiles de graminées, l’AIA et les autres auxines semblent présentes chez toutes les plantes vasculaires. Chez les formes végétales inférieures (Bryophytes, algues, champignons) la répartition et l’action biologique sont très limitées. L’AIA est également produit par les bactéries Agrobacterium tumefaciens, Pseudomonas syringae mais par des voies de synthèse différentes. Le rôle de la molécule pour la bactérie n’est pas clair mais elle intervient dans l’interaction plante/bactérie. Chez les plantes les sites de synthèse maximum sont souvent les sites d’accumulation (apex, jeunes feuilles) mais il faut aussi noter comme nous le verrons plus loin que l’AIA à un transport polarisé qui conduit à sa migration de l’apex vers la base. D’une manière générale les racines sont plus pauvres en auxine que les parties aériennes (les concentrations dans les tissus végétaux varient de 10 à 300 µg/kg matériel frais). La fig. ( ) donne une évolution des teneurs en différentes auxines dans les différents rangs foliaires de plantes de tabac à la suite d’une séparation des molécules par chromatographie en phase gazeuse. III–C- c- Facteurs intervenants dans la régulation du taux d’auxine – Biosynthèse – Dégradation – Transport – Inactivation : L’auxine comme les autres hormones doit pour jouer son rôle de messager chimique ne pas demeurer à une concentration constante dans les tissus mais voir ses teneurs fluctuer. C’est la « vague auxinique » qui va déterminer une réponse dans le temps, adaptée au contexte de morphogenèse et de la différenciation. Le taux d’auxine active dans un tissu qui va contrôler l’intensité des réponses physiologiques, en parallèle avec la sensibilité de ce tissu à l’auxine peut être potentiellement régulé par différents facteurs qui relèvent du métabolisme de l’auxine ou de son transport. + + + + + Biosynthèse Dégradation Inactivation réversible Transport Compartimentation Ces mécanismes qui sont particulièrement bien connus dans le cas de l’ »AIA peuvent intervenir pour l’ensemble des hormones nous les étudierons particulièrement dans le cas de l’AIA. Biosynthèse : Le tryptophane est un précurseur de l’AIA ceci a été clairement démontré par des expériences d’apport de tryptophane marqué dans le cas de plantes obtenues en conditions stériles (pour éviter des effets de contamination bactérienne). Cependant selon les végétaux les voies de conversion du tryptophane en AIA différent et on a pu identifier au moins 3 séquences principales de conversion. La voie de l’indoleacétonitrile La voie de la tryptamine La voie de l’acide indole pyruvique On n’a pas jusqu’à présent caractérisé de mutants déficients en AIA (mutants de synthèse) soit parce que la déficience est léthale soit parce que l’AIA est synthétisé par plusieurs routes. Effectivement en dehors des voies passant par le tryptophane il existerait une (des) voie(s) ne faisant pas intervenir cet acide aminé. Ainsi le mutant orp de maïs (pour orange péricarpe) comporte une mutation dans la voie de synthèse du tryptophane. Les graines germent mais les plantules meurent après le stade 4 feuilles si il n’y a pas de supplémentation en tryptophane. Or ces plantules contiennent de l’AIA. Le précurseur serait dans ce cas un dérivé indolique antérieur au tryptophane. Pour un même plante la contribution des voies dépendante ou indépendante du tryptophane pourrait varier en fonction du développement (ex : chez Arabidopsis). Le transport : Transport polarisé de l’AIA : (Rubery – Raven – Goldsmith) En effet il s’agit d’un transport polarisé de l’apex vers la base. Des expériences simples qui sont représentées sur le schéma ( ) ont permis de confirmer ce phénomène. Ce transport est donc suppose être unidirectionnel. Par ailleurs il s’agit d’un transport actif de cellules à cellules stimulé par l’ATP, dépendant de la T°, de la présence d’O2 et sensible aux inhibiteurs métaboliques (cyanure, azide de sodium). La vitesse de transport est de 10 à 20 mm/heure. La polarité diminue à mesure que l’on s’éloigne de l’apex et au niveau des racines les résultats obtenus sont contradictoires. Ce transport de l’auxine qui conduit l’auxine des sites de synthèse principaux : les apex, vers le reste de la plante peut être artificiellement perturbé par des analogues d’auxine du type TIBA : acide triiodo-benzoïque (inhibiteur) ou des composés fluorène (morphactines) qui entraînent des morphologies anormales. • • • Raccourcissement des tiges Ramification désordonnée des rameaux Nanisme La théorie proposée pour le transport polarisé est appelée théorie chimiosmotique de la diffusion polaire. Cette théorie implique que la cellule végétale dépense de l’énergie pour maintenir un gradient de pH de part et d’autre du plasmalemme de telle manière que l’espace pariétal est acide par rapport à l’intérieur de la cellule. Ce sont des ATPases qui expulsent les protons vers la paroi. Puisque les membranes sont plus perméables aux molécules non ionisées l’auxine sous sa forme non dissociée pénètre facilement de la paroi vers le cytoplasme par simple diffusion. Une fois dans le cytoplasme la plupart de ces molécules se dissocient en raison du pH cytoplasmique plus élevé et ce phénomène permet une accumulation de l’auxine dans le cytoplasme par déplacement de l’équilibre, la membrane étant relativement imperméable à la forme ionisée. La théorie implique en outre que la portion basale du plasmalemme est plus perméable à l’anion auxine ou possède une plus grande proportion de transporteurs d’efflux que la partie apicale. En fonction de ces différents éléments on peut concevoir le transport polarisé de l’AIA. Il a été effectivement localisé par des techniques d’immunofluorescence, un transporteur d’auxine à la partie basale de parenchyme de tiges de pois. Les gènes codant le transporteur d’efflux, les gènes PIN sont au nombre de 8 chez Arabidopsis thaliana. Des travaux récents ont remis en cause le dogme du transfert unidirectionnel de l’auxine. Ainsi a été démontré un changement de localisation de certains gènes PIN au cours du développement et le rôle de ces gènes dans l’établissement d’un axe apico-basal lors de l’embryogénèse : Nature 13 novembre 2003 Vol 426 – p 147 Friml et al. La mise en place de cet axe est commune aux plantes et aux animaux. La première étape chez les plantes consiste en la division du zygote en deux cellules distinctes. Chez Arabidopsis par exemple la cellule apicale est plus petite que la cellule basale. La cellule apicale se divise ensuite verticalement et la cellule basale continue à se diviser horizontalement pour produire le suspenseur. Il a été montré que dans les premiers stades la cellule basale transporte l’auxine et que la cellule apicale répond à l’auxine. Cette complémentarité est liée à l’intervention d’une protéine impliquée dans l’efflux de l’auxine à l’apex de la cellule basale : PIN 7. PIN 7 est localisé par immunoréaction dans la cellule basale immédiatement après la division du zygote dans le système endomembranaire et sur la membrane plasmatique à l’interface avec la cellule apicale. Jusqu’au stade 32 cellules PIN 7 continue à être localisé au sommet du suspenseur à l’interface avec l’embryon en développement. Après le stade 32 cellules la localisation asymétrique de PIN 7 évolue se déplaçant vers la partie basale des cellules du suspenseur. Il existe un redondance entre les différents gènes PIN et des mutants simples n’aboutissent pas à 1 phénotype particulier, en revanche des quadruples mutants (pin1, pin3, pin4, pin7) montrent des défauts profonds dans l’établissement d’une polarité apico-basale. Ces résultats montrent : Le polymorphisme génique des gènes PIN Leur redistribution spatiale / polarisée au cours du développement précoce de l’embryon Leur rôle dans la création de gradients d’auxine important pour la création d’un pôle apico-basal et pour la morphogenèse. Inactivation : L’AIA peut être converti en formes conjuguées inactives par associations avec des métabolites présents dans les cellules. ac. aminés oses - liaisons peptidiques ex : indolyl aspartate - liaisons esters ex : indolyl glucose indolyl inositol Ces formes conjuguées peuvent être mise en évidence à la suite de l’apport d’AIA radioactif à une plante : 50 % de l’AIA est parfois retrouvé sous forme conjuguée après 3 heures. On peut également montrer par identification et dosage que l’AIA conjugué représente 50 à 90 % de l’AIA total (dans les feuilles de pois de 2 semaines). Ces formes conjuguées sont souvent présentes à des concentrations supérieures aux formes libres et elles sont très répandues dans les graines, où elles semblent participer à la libération d’AIA libre (par hydrolyse de liaisons esters alors que les liaisons peptidiques sont stables). Ainsi chez les semences de maïs les formes conjuguées diminuent lors de la germination alors que l’AIA libre augmente, on caractérise la présence d’une enzyme qui hydrolyse l’AIA inositol. Ces formes conjuguées peuvent contribuer à maintenir une certaine homéostasie des teneurs en AIA. Ainsi chez les mutants tryp 5-1 chez Arabidopsis l’anthramilate synthase est insensible au tryptophane son effecteur allostérique normal. On observe ainsi une forte augmentation des teneurs en tryptophane mais une stabilité de l’AIA libre avec une augmentation des teneurs en AIA conjuguées. La dégradation de l’auxine : L’AIA peut être dégradé par des oxydase de type péroxydase (l’AIA oxydase) selon cependant un mécanisme atypique des péroxydases ne consommant pas d’H2O2. Les produits de dégradation correspondent à une voie catabolique sans décarboxylation produisant de l’ acide oxindole 3-acétique ou à une voie catabolique avec décarboxylation : dans ce cas le méthylène oxindole et l’indolaldéhyde sont les produits caractéristiques. Les tissus âgés sont généralement riches en AIA oxydase ainsi que les racines, ce qui contribue à un faible taux d’AIA libre dans ces organes. Le catabolisme auxinique bien étudié dans les années 1950 à 1980 est actuellement peu abordé dans les recherches. III–C- d- Diversité des effets biologiques. Exemple particulier de la croissance des fruits : Nous avons dis précédemment qu’une même hormone avait des effets multiples sur le développement des plantes. On parle d’effets pléiotropiques. Ces réponses multiples dépendent du tissu étudié, du stade de développement et correspondent à ce que nous avons appelé un certain état de compétence des tissus lié à la proportion de récepteurs et à leur nature. Les effets pléiotropiques pourraient compenser le faible nombre de messagers hormonaux chez les plantes (6) en comparaison avec les systèmes animaux (40). Ceci sous toute réserve, étant donné la complexité supérieure des animaux au plan fonctionnel. Ces effets multiples sont mis en évidence par : Apport d’hormones exogène sur les tissus Par l’étude de corrélations entre l’accumulation d’hormones dans l’espace et le temps et les réponses physiologiques observées. Cette multiplicité d’action est particulièrement bien illustrée dans le cas de l’auxine qui intervient sur : ▫ ▫ ▫ Division Elongation Différenciation ≡ ≡ ≡ cambium action typique sur les coléoptiles action rhyzogéne classique en interaction avec les cytokinines L’effet sur le grandissement cellulaire est classique. Il est à noter : 1. que généralement l’auxine est sans effet lorsqu’on l’apporte sur des apex de plantes intactes. La plante disposant alors de ses centres producteurs d’auxines aurait une concentration optimale et un apport exogène est sans influence. En revanche l’auxine est active sur les tiges dont les apex ont été décapités ou sur des parties isolées d’organes. 2. que la sensibilité des différents organes varie considérablement tiges 10⁶ M racines 10¹⁰ M Au-delà de ces concentrations, l’auxine exerce un effet inhibiteur sur la croissance – effet hyperauxinique. L’auxine intervient dans des phénomènes plus complexes à l’échelle de la plante entière faisant intervenir des interactions entre différentes hormones et dont nous reparlerons : rôle dans la dominance apicale, l’abscission ou le retard de sénescence. Nous détaillerons ici le problème de la croissance des fruits. La formation des fruits correspond chez le végétal à une période de croissance souvent rapide par division et élongation cellulaire. D’une manière générale les fruits résultent de la croissance des parois de l’ovaire de la fleur ou du réceptacle floral qui se produit dès la pollinisation et se poursuit à la fécondation et pendant la formation des graines (l’ovaire est une partie de la fleur femelle qui renferme les ovules où se produira la double fécondation conduisant à l’embryon et au tissu de réserve). Nous avons dit que la croissance du fruit pouvait commencer dès la pollinisation, ceci se produit par exemple chez l’Orchidée et chez cette espèce on a pu montrer que des extraits de pollen pouvaient déterminer la croissance des parois de l’ovaire. Ces extraits contenaient de l’AIA et le pollen est ainsi une source d’auxine. D’une manière plus générale, il semble donc très probable que ce soit l’AIA qui, produit par le pollen ou les graines en formation, soit responsable de la croissance du fruit. Si on élimine les graine de certains fruits en formation (fraise) on arrête la croissance du fruit. Par ailleurs, on a pu également montrer que l’embryon et l’albumen tissu de réserve de la graine produisaient de l’AIA au cours de leur formation. On peut ainsi observer l’obtention de fruits sans pollinisation ni fécondation par simple application d’AIA sur la fleur femelle (Tomates, Figue), on obtient alors des fruits sans graines : parthénocarpiques. On peut également citer les expériences de NITSCH sur la Fraise ou les akènes sont la source d’auxine, leur ablation sur le jeune fruit empêche son développement normal. La forme du fruit peut ainsi être affectée par l’élimination spécifique de certains akènes mais l’addition d’auxine peut remplacer les akènes manquants. La production naturelle de fruits sans pépins (agrumes) correspond à d’autres situations ou certains mutants ont été sélectionnés. III–C- e- Mécanismes d’action dans le phénomène de grandissement cellulaire : Avant d’aborder l’étude d’un mécanisme d’action de l’auxine dans le grandissement cellulaire, rappelons les conditions du grandissement cellulaire. Ce grandissement est conditionné par une entrée d’eau dans la cellule. Ainsi quatre types d’évènements se produisent chronologiquement au niveau de la paroi lors de la croissance de la cellule. 1. accroissement des propriétés d’extensibilité de la paroi 2. entrée d’eau résultant de la diminution de la pression de turgescence 3. extension des parois et grandissement de la cellule 4. synthèse de nouveaux éléments des parois. Les mouvements de rentrée d’eau dans la cellule qui se font par osmose sont conditionnés par la concentration saline du contenu cellulaire (pression osmotique). Mais la cellule est entourée par un cadre rigide la paroi qui va lors de l’entrée d’eau opposer une résistance (pression de turgescence). L’attraction réelle que subissent les molécules d’eau va donc être égale à la différence entre pression osmotique et pression de turgescence. Pression de succion = Pression osmotique – pression de turgescence. Il apparaît donc qu’un élément déterminant dans l’entrée d’eau peut être la diminution de la pression de turgescence, résultat de l’accroissement des propriétés d’extensibilité des parois. De nombreux arguments sont en faveur d’un rôle de l’auxine sur le grandissement cellulaire via une action sur l’extensibilité de la paroi. Les facteurs intervenants dans le relâchement pariétal : 1. rôle du pH Les mécanismes de modification de la structure pariétales au cours de l’élongation ont été étudiés sur des fragments d’épicotyles, hypocotyles ou coléoptiles, organes dont la croissance est due uniquement à de l’élongation cellulaire (Figure). Placés dans une solution additionnée d’auxine, ces organes subissent une élongation plus importante. Les études des facteurs capables de remanier les parois ont montré que l’élongation de coléoptiles sous contrôle de l’auxine était associée à une acidification du milieu dans lequel était effectuée l’expérience. Il a ensuite été observé que la même élongation était obtenue par l’incubation des coléoptiles dans une solution acide. Rayle et coll. ont alors proposé que les échantillons traités à l’auxine acidifient leur parois et que cette acidification (pH=5,5) pourrait permettre l’activation d’enzymes capables de remanier la paroi (Rayle and Cleland, 1992). C’est l’hypothèse de la croissance acide. Des expériences complémentaires de mesure de potentiels électriques sur des protoplastes traités par une auxine (NAA) ont permis de montrer une hyperpolarisation des protoplastes liés à une excrétion de protons en dehors de la membrane plasmique et une inhibition de cette hyperpolarisation par des anticorps anti-ATPase. Ces résultats suggèrent fortement que l’auxine augmenterait l’activité ATP-ase via une action sur la transcription, la traduction ou le transport de la protéine vers la membrane plasmatique. Comment l’acidification agit-elle sur l’extensibilité de la paroi ? Sans rappeler la structure et la composition chimique de la paroi en détail on peut préciser que la paroi I est un composite formé de plusieurs polymères associés par différents types de liaison - cellulose - hémicellulose matières pectiques protéines Ce sont surtout les interactions entre cellulose et hémicelluloses (2 composants majeurs) par l’intermédiaire de liaisons H qui ont été considérés. Ces liaisons H stabilisent le composite et leur suppression le fragilise en le rendant plus malléable, plus extensible. 3 modes d’action de l’acidification sur l’extensibilité de la paroi ont été envisagés : 1. Hypothèse d’une action chimique d’une concentration accrue de H⁺ sur la rupture de liaisons hydrogènes – Hypothèse peu confirmée par l’expérimentation. 2. Hypothèse de l’optimisation en milieu acide de l’activité d’enzymes de dégradation des polysaccharides type glucanases. Certains arguments plaident en faveur de leur intervention = blocage de l’expansion par des anticorps antiglucanases, l’auxine induit par ailleurs certains glucanases (chez la tomate). 3. Hypothèse de l’intervention d’autres protéines. 2. Rôle des expansines : La paroi contient de nombreuses enzymes hydrolytiques (actives sur les polysaccharides, Fry, 1995) : glycosylhydrolases catalysant soit des hydrolyses au milieu des chaînes (endoglycosylases comme les ß-,4- endoglucanases) ou à leur extrémités (exoglycosylases comme les xylosidases). Par ailleurs, des transglycosylases spécifiques des xyloglucanes (xyloglucane transglycosylases hydrolases ou XTH, anciennement XET, voir §3) ont été identifiées. Néanmoins, aucune de ces enzymes n’apparaît plus active à pH acide, et aucune n’induit une élongation in vitro quel que soit le pH. Par contre, la purification d’extraits pariétaux d’hydrocotyle de concombre a permis d’identifier des protéines, appelées Ex29 et Ex30 pour expansines, sans activité catalytique détectable, capables d’induire une importante élongation cellulaire à pH acide (McQueen-Mason et al., 1992). Le clonage des gènes correspondant a conduit à l’identification d’une famille multigénique subdivisée en expansines α et expansines ß conservées chez les Dicotylédones et les Monocotylédones (Cosgrove, 1999). Récemment, grâce au séquençage complet du génome d’Arabidopsis thaliana, une nouvelle classe est également distinguée : les expansines γ ou « expansin-like proteins » (Li et al., 2002). L’ensemble des expansines comporte, d’une part une domaine similaire au domaine catalytique d’endoglucanases mais sans acides aminés catalytiques, d’autre par un domaine similaire aux CDB (Cellulose Binding Domains) de cellulases microbiennes (Figure). Les expansines forment une famille de 38 gènes chez Arabidopsis thaliana (www.bio.psu.edu/expansins/). Elles sont largement exprimées dans tous les organes, et en particulier dans les tissus en élongation (Cosgrove, 1999 ; Cosgrove, 2000 ; Li et al., 2002). On peut noter en particulier différentes observations en faveur de leur rôle majeur dans le relâchement pariétal (revue par Cosgrove, 2000) : en particulier : les expansines Ex29 et Ex30 ne sont présentes que dans des zones en élongation de l’hypocotyle. 3. Rôle des XTH (ou xyloglucanes transglycosylases hydrolases) : Malgré leur incapacité à induire « in vitro » un relâchement pariétal plusieurs enzymes hydrolytiques sont exprimées spécifiquement dans les tissus en expansion. Les XTH peuvent couper une molécule de xyloglucane et rattacher un des fragments sur une seconde molécule. Dans certains cas le transfert peut avoir lieu sur une molécule d’eau résultant en un clivage simple comme celui réalisé par une endoglucanase. Les XTH sont exprimés dans des tissus en élongation et induites par des traitements inducteurs de l’élongation (auxine). Par ailleurs, des fragments courts de xyloglucane (oligosaccharides) induisent une élongation cellulaire mais les longs fragments l’inhibent. Les résultats suggèrent que le métabolisme des xyloglucanes contrôle l’élongation. 33 gènes de XTH ont été identifiées chez Arabidopsis associés à des profils d’expression tissus –spécifiques mais aussi à des spécificités de substrats. 4. Rôle des endoglucanases : Elles sont incapable d’induire l’élongation in vitro mais des arguments plaident en faveur de leur intervention comme l’induction par IAA de la glucanase CEL 7 chez la Tomate. III–C- f- Les récepteurs d’auxine : Des protéines de liaisons (Auxin binding proteins : ABP) pour l’auxine ont été caractérisés initialement par des techniques chimiques du type photoaffinité. Les expériences ont conduit à la caractérisation d’anticorps vis-à-vis de ces protéines et à l’identification de gènes correspondants. Une difficulté d’interprétation a porté sur la localisation majoritaire d’ABP sur le reticulum endoplasmique, seule une faible proportion d’ABP étant situé au niveau de la membrane plasmique (en contradiction avec la localisation théorique des récepteurs sur la M. P. et sur l’effet biologique d’auxines non perméantes). La protéine est un dimère de 44 Kd correspondant à 2 sous-unités de 22 Kd. Son rôle fonctionnel est démontré par quatre types d’arguments : 1. L’apport d’ABP1 de maïs purifié à des protoplastes de tabac, augmente la réponse d’hyperpolarisation en présence de NAA 2. Au contraire l’apport d’anticorps ABP supprime cette réponse 3. Un mutant d’insertion dans le gène ABP1 a été identifié chez Arabidopsis thaliana. A l’état d’homozygote le mutant meurt dans la phase globulaire de l’embryogénèse démontrant le caractère essentiel de ce gène. 4. La surexpression du gène ABP1 chez le tabac (associé à un promoteur inductible par la tétracycline) amplifie certaines réponses à l’AIA. Ces différents résultats ne préjugent pas de l’existence d’autres récepteurs au-delà d’ABP1. III–C- g- L’auxine et le contrôle de l’expression des gènes : L’impact de l’auxine sur le grandissement cellulaire via une acidification de la paroi n’est qu’une des réponses biologiques à l’AIA. Cette action biochimique sur une ATPase s’accompagne par ailleurs d’un effet positif sur l’expression de gènes dans le cas du grandissement cellulaire ou d’autres phénomènes. En clair, l’apport d’AIA entraîne l’augmentation d’expression d’un grand nombre de gènes (le plus souvent dans le sens d’une surexpression). Bien qu’on connaisse mal la chaîne de transduction du signal auxine on a approfondi au cours des dernières années certains des mécanismes impliqués au niveau du contrôle de la transcription par l’AIA. • Les promoteurs des gènes sensibles à l’AIA possèdent en commun des séquences (simples ou composites) communes qualifiées d’auxine responsive éléments AUX-RE. Cette situation est expérimentalement démontrée par des expériences de délétion du promoteur ou par un couplage d’un promoteur minimum contenant ces éléments avec le gène GUS, qui est ainsi exprimé et réponse à l’AIA. Cette présence de séquences spécifiques dans les promoteurs des gènes dont l’expression est contrôlée par les hormones est générale pour l’ensemble des hormones. Au-delà, des facteurs de transcription capables de reconnaître les séquences AUX-RE ont été caractérisés : les ARF1 (auxine response factor) et 23 gènes ARF1 ont été caractérisés chez A. thaliana (pour des protéines de 67 à 129 Kd). Cette multiplicité de facteur de transcription qui peut correspondre à des voies de transduction spécifiques se complique encore par l’intervention d’une autre classe de gènes la famille AUX/AIA pour laquelle on a démontré l’existence de 25 gènes. Ces gènes répondent très rapidement à l’auxine et comportent dans leur séquence des éléments très comparables à la séquence de gènes ARF1 (dans la partie C terminale). Cette identité de domaine (domaine III et IV) facilite l’interaction des protéines AUX/AIA et ARF1 et cette liaison avec ARF1 module sa capacité d’activation de la transcription. Les protéines AUX/AIA ont des demi-vies très courtes de 8 à 10 minutes et leur dégradation contrôlée par le système protéasome ubiquitine dépendant est stimulée par l’AIA. Une complexité du système réside dans le fait que selon les situations le complexe AUX/AIA/ARF1 stimule ou inhibe la transcription (le cas plus fréquent est l’inhibition). Des mutants manquant de certains facteurs ARF présentent des anomalies de développement ainsi que certains mutants des gènes AUX/AIA. Récemment un travail sur la tomate impliquant la sous expression selon la stratégie anti-sens d’un gène AUX/AIA, le gène DR4, a montré l’apparition de phénotypes caractéristiques d’une hyperauxinie telle que par exemple l’apparition de fruits parthénocarpiques, AUX/AIA serait dans ce cas un régulateur négatif et d’une manière générale le système AUX/AIA pourrait représenter un système de rétrocontrôle par l’AIA des phénomènes induits par l’AIA (empêchant que la machine « s’emballe »). On a ici une démonstration de la complexité des facteurs qui interviennent dans la régulation de la nature et de l’intensité des mécanismes transcriptionnels contrôlés par l’AIA. - Spécificité des gènes et protéines ARF1 et AUX/AIA. Teneurs en protéines ARF1 et AUX/AIA. Dans le cas des gènes AUX/AIA la teneur en protéines correspondantes résulte à la fois de l’intensité de la transcription et de la vitesse de dégradation, toutes deux contrôlées par l’AIA. III–D- LES GIBBERELLINES : Les gibbérellines constituent un deuxième groupe de substances de croissance qui paraissent actuellement avoir une importance peut être aussi grande que les auxines dans le développement de la plante. Si les premières observations relatives à la découverte de l’auxine étaient liées à une réponse physiologique normale de la plante (les tropismes), les gibbérellines ont été mises en évidence à la suite de l’observation d’un fonctionnement pathologique. Elles ont en effet été caractérisées à la suite de l’étude d’une maladie du riz. III–D– a – Historique – Découverte : Dès le début du siècle, des fermiers japonais avaient constaté que certains plants de riz étaient atteints de gigantisme. Ces plants cependant ne fructifiaient pas et ne présentaient donc pas d’intérêt pour la production. Il fut établi que cette anomalie dans la croissance résultait de l’infection par un Ascomycète parasite appelé Gibberella fujikuroi (KUROSAWA, 1926) ou Fusarium moniliforme quand le champignon est cultivé in vitro = un extrait de son milieu de culture provoque les mêmes symptômes d’élongation, et vers 1938 on arriva à isoler de ces milieux de culture un mélange de substances actives appelées gibbérellines. Ces travaux ne furent pendant longtemps connus qu’au Japon et ce n’est qu’après la deuxième guerre mondiale que des recherches furent entreprises dans le monde occidental. Vers 1956, à partir d’une souche de Gibberella ne produisant qu’une seule gibbérelline on put isoler et caractériser chimiquement l’acide gibbérellique ou GA3 (travaux de CROSS). Pendant ce temps, les physiologistes démontraient les effets spectaculaires des gibbérellines isolées des filtrats de cultures de champignons sur la croissance de végétaux (à très faibles doses ces substances stimulent en particulier la croissance des espèces naines : haricot, pois, maïs) qui sont souvent des mutants de production de GA. Une dose de 0,1 µg par plant permet de doubler la hauteur de pois nains. Parallèlement on démontrait la présence des gibbérellines dans les tissus végétaux (non infectés) (PHINNEY et WEST en 1956 chez le concombre). Avec la mise en évidence de la répartition générale des gibbérellines il apparaissait donc que l’on était en présence d’un nouveau groupe d’hormones végétales. III–D– b-Nature Chimique et Diversité des Gibbérellines Naturelles : Nous avons parlé de ces substances au pluriel car la caractérisation de la première gibbérelline GA3 a été suivie de la mise en évidence de nombreuses autres gibbérellines dans les tissus végétaux puisqu’on connaît plus d’une centaine de gibbérellines (130) à l’heure actuelle caractérisées chez les végétaux supérieurs et les champignons (certaines étant présentes dans les deux sources). Ces différentes structures possèdent en commun un squelette carboné le squelette gibbane qui constitue un système de cycles pratiquement unique dans la chimie des substances naturelles. Les substituants carbonés portés en 7 et 9a du noyau C étant réunis par une liaison pour donner un 4ème cycle. Définition des gibbérellines : Substances synthétisées par les plantes possédant le squelette gibbane et actives vis-à-vis de tests biologiques spécifiques tels que la croissance de mutants nains (Maïs) ou la production d’αamylase par des albumens d’orge. Les différentes gibbérellines se différencient par : Le nombre total d’atomes de carbone (gibbérellines en C19, ex : GA3 et en C20, ex : GA18). La présence ou non de doubles liaisons Le nombre de carboxyles Le nombre et la position des substituants (OH ou CH3 en particulier). Différentes remarques à propos de cette multiplicité de gibbérellines naturelles : • • • • • La progression dans le nombre des gibbérellines connues est liée à l’utilisation des techniques très efficaces de chromatographie en phase gazeuse associée à la spectrométrie de masse (ce qui permet à la fois séparation et analyse de la structure des molécules). Les gibbérellines sont affectées d’un nombre qui correspond à la chronologie de leur découverte (exception GA3, la première mise en évidence). Un même végétal ne contient au maximum que 8 à 10 formes différentes (nous verrons l’exemple du maïs). Ces différentes formes ont des activités différentes vis-à-vis des tests biologiques ou même peuvent être inactives. GA3, GA4, GA7, GA14 ont le plus grand spectre d’activité. Cette diversité de structures actives pose un problème au niveau de la finalité. S’agit-il de substances hormonales voisines mais plus particulièrement affectées à une fonction particulière ? ou d’intermédiaires dans la synthèse d’une seule forme active. L’exemple du maïs permet de conclure en retenant la 2ème hypothèse. Chez le maïs 8 gibbérellines ont été identifiées GA53, GA44, GA20, GA29, GA19, GA17, GA1, GA8. Chez cette espèce où de très nombreux mutants sont disponibles différents mutants nains ont été étudiés en particulier d1 et d5 (d pour dwarf) dont nous verrons les caractéristiques après la description de la voie de biosynthèse des gibbérellines. Pour conclure à propos de cette diversité il faut noter que l’on retrouve cette pluralité de structures pour les hormones stéroïdes chez les vertébrés qui présentent par ailleurs des analogies de structure avec les gibbérellines. Sur un plan pratique des mélanges commerciaux de GA4 et GA7 sont produits à partir de cultures de Gibbérella fugikuroi. III–D– c– Biosynthèse et Métabolisme des Gibberellines : Alors que les gibbérellines ont une structure assez complexe on a une bonne idée de leurs voies de synthèse. Travaux initiaux de WEST (1965-1970) aux USA. Les gibbérellines appartiennent au groupe des terpénoïdes composés résultant de la condensation d’unités isoprène elles-mêmes provenant d’unités acétate. Acétate isoprène terpènes (mono –sesqui – diterpènes) Appartiennent à ce groupe une autre hormone végétale l’acide abcissique et des constituants végétaux importants comme les stérols végétaux, les caroténoïdes, le caoutchouc polymère de milliers d’unités isoprènes. Sur un premier schéma où est représenté une voie de biosynthèse simplifiée des gibbérellines vous pouvez voir : l’origine métabolique de différents terpènes, le niveau d’intervention de certaines substances (régulateurs de croissance) comme l’AMO16-18 ou le CCC qui sont des antigibbérellines car elles bloquent la synthèse des gibbérellines (ce sont des retardants de croissance). Sur un deuxième schéma plus complet on peut voir que la voie de biosynthèse des gibbérellines se déroule à 3 niveaux à localisation subcellulaire distincte : chloroplaste, réticulum endoplasmique, cytoplasme. Toutes les enzymes de la voie de synthèse ont été caractérisées ainsi que la plupart des gènes correspondants. Certaine de ces enzymes sont multifonctionnelles (elles catalysent plusieurs réactions séquentielles sur la chaîne) et certaines sont codées par de petites familles multigéniques dont les membres sont régulés indépendamment par des facteurs endogènes ou exogènes (stade de développement, lumière, hormones…). Voir figure. La copalyl phosphate synthase est très fortement exprimée dans les tissus en croissance. La kaurène synthase est la première étape spécifique de la synthèse des gibbérellines il s’agit vraisemblablement d’une enzyme régulatrice. Des cytochromes monooxygénases transforment le kaurene en GA 12 aldéhyde. Des GA 20 oxydases transforment GA12 en GA 20. Finalement 2 classes d’hydroxylases sont importantes : Les 3ßhydroxylases conversion de GA 20 en GA 1 ou de GA 9 en GA4 les formes actives. les 2ßhydroxylases qui transforment GA1 en GA8 en l’inactivant en participant ainsi à l’homéostasie du pool de gibbérellines actives en limitant l’accumulation excessive de GA1. Plusieurs commentaires sont à faire à propos de cette voie de synthèse - L’accumulation de gibbérellines entraîne par un phénomène de feedback la répression des gènes de GA20 oxydases et 3ßhydroxylases. - Diverses expériences de génie génétique ont montré le rôle in vivo de ces gènes et enzymes ex : la surexpression de la 2ßhydroxylases entraîne le nanisme des plantes par inactivation des gibbérellines. Un mutant de pois muté sur cet enzyme conduit au contraire à un phénotype de réponse « exagérée » aux gibbérellines. La multiplicité des gibbérellines une ou plusieurs formes actives ? Si l’on revient maintenant aux mutants nains de maïs d1 et d5 on a pu montrer que le mutant d5 voyait sa croissance rétablie par addition de Kaurène : le gène muté est celui de la Kaurène synthase. En revanche pour le mutant d1 seul l’apport de GA1 permet la reprise de croissance toutes les autres gibbérellines en particulier GA20 sont inefficaces. Ces résultats permettent donc de conclure, qu’au moins chez le maïs, une seule gibbérelline GA1 est active et que toutes les autres gibbérellines sont des précurseurs ou des formes d’inactivation/ dégradation. Le gène muté correspond dans ce dernier cas à l’enzyme de conversion de GA20 en GA1. - Les gibbérellines existent également sous forme liées avec des oses (glucosides inactifs) dont le rôle physiologique est peu clair. Rôle dans le transport, réversibilité de la liaison ? III–D- d- Les Gibberellines dans la plante – Répartition- Transport : Les gibbérellines sont présentes chez toutes les plantes supérieures, elles sont synthétisées également par certains champignons. Comme nous l’avons dit on ne retrouve que quelques gibbérellines chez une espèce donnée, et les gibbérellines détectées varient selon le stade de développement. On pense que les sites de synthèse sont les organes contenant les concentrations les plus élevées en gibbérellines, apex des tiges et des racines, jeunes feuilles, mais aussi embryon et tissu de réserve des graines en développement, fruits… Les concentrations habituelles sont de 0,1 à 100 ng / g de tissu frais mais de 1 à 10 µg au niveau des graines. Les gibbérellines ne présentent pas de transport polarisé à la différence de l’auxine. Appliquées à un niveau quelconque de la plante, elles peuvent avoir des effets régulateurs sur toutes les autres parties. Elles ont été retrouvées dans la sève brute et la sève élaborée et leur vitesse de transport (5 cm/h) analogue à celle des sucres laisse supposer qu’elles sont transportées passivement dans les flux de sève dans le xylème et le phloème. Un transport de cellules à cellules de type symplastique est également probable, on constate en effet une réduction du transport par des inhibiteurs métaboliques de type azide. III–D– e–Effets Physiologiques : Au niveau cellulaire comme les auxines, les gibbérellines ont à la fois une action sur la division, l’élongation et la différenciation. Parmi les effets observables on peut citer : - L’action sur la croissance des tiges (au niveau des racines et feuilles on observe de très faibles réponses) – Cette action est particulièrement spectaculaire sur des : 1) Mutants nains qui dans la majorité des cas ont perdu la faculté de synthétiser des gibbérellines, par blocage génétique. Les retardants de croissance peuvent déterminer également un nanisme chez des espèces comme Chrysanthemum et leur effet est levé par apport de gibbérellines exogènes. 2) Espèces en rosette bisanuelles – choux, laitue dont les entre-nœuds sont très courts pendant la 1ère année de végétation et les feuilles sont accolées les unes aux autres. Dans la nature, chez ces espèces les tiges s’allongent la deuxième année. Un traitement par les gibbérellines (0,1 mg / semaine) peut conduire rapidement à des croissances spectaculaires (3 m de haut). Cependant, les gibbérellines ont un effet sur la croissance de nombreuses plantes normales et intactes comme la Tomate (qui ne posséderaient donc pas des concentrations optimales pour leur croissance). Le plus souvent on assiste à un accroissement des entre-nœuds existant par des phénomènes d’élongation essentiellement). Croissance des fruits Effet commun avec les auxines, mais les gibbérellines agissent sur des espèces pour lesquelles l’auxine n’a pas d’action (Rosacées, Pêcher, Pommier, Raisins). La parthénocarpie peut être obtenue avec des gibbérellines. Levée de dormance L’application de gibbérellines à des bourgeons dormants permet la levée de dormance et leur débourrement. Même effet sur la levée de dormance des graines. Initiation de la floraison Pour des espèces ayant des exigences photopériodiques ou de vernalisation pour fleurir, la transformation d’un méristème végétatif en méristème floral peut être obtenue dans de nombreux cas par application de gibbérellines. Sans que l’on sache si ces hormones sont directement impliquées dans le processus physiologique normal. III–D– f- Mécanismes Moléculaires d’action des Gibbérellines : Nous l’avons vu les gibbérellines déterminent un nombre important de réponses mais leur mode d’action au niveau moléculaire a été, comme dans le cas de l’auxine, essentiellement étudié en détail vis-à-vis d’un seul phénomène : l’induction des enzymes d’hydrolyse de l’amidon dans les graines de céréales. Exposition du problème L’embryon des graines de céréales est entouré d’un tissu de réserve : l’albumen qui est luimême entouré d’une fine couche de cellules riches en protéines (grains d’aleurone) appelée couche d’aleurone. Quand la germination débute, sous l’influence de l’humidité par exemple, les cellules de la couche d’aleurone libèrent des enzymes qui hydrolysent l’amidon, les protéines et le RNA de l’albumen, les produits solubles formés étant ensuite utilisés pour le développement de l’embryon. En 1958, YOMO au Japon et PALEG en Australie trouvèrent que des graines d’Orge privées de leur embryon et placées à l’humidité ne produisaient pas d’amylase. Si les grains et les embryons étaient placés en suspension dans une même fiole, les grains présentaient alors une activité amylasique comme des semences normales. YOMO montra de plus que des extraits purifiés d’embryon appliqués sur les graines déterminaient l’apparition de l’activité amylase. Ceci suggère, bien que l’embryon fournit normalement à la couche d’aleurone une substance qui lui permet de libérer l’α amylase. Il s’agit d’une hormone la gibbérelline qui a été isolée des grains d’Orge sous la forme GA3 et qui peut remplacer l’action de l’embryon. Les étapes suivantes ont permis de montrer que l’augmentation de l’activité α amylase provenait d’une synthèse de novo de l’enzyme (expériences de marquage en densité D₂O ou avec des acides aminés ¹⁸0 suivi d’une centrifugation à l’équilibre) et que cette synthèse provenait elle-même de la production de nouveaux ARN messagers spécifiques (expérience de Northern, inhibiteurs de la transcription). De nombreuses études ont ensuite porté sur la chaîne de transduction du message gibbérelline. Si diverses expériences démontrent la présence de récepteurs de GA sur le plasmalemme (action d’hormone non perméante, inefficacité de la micro–injection de GA) la nature moléculaire du récepteurs n’est pas connue. En revanche, de nombreux messagers secondaires et éléments de la chaîne de transduction ont été proposés dans le mécanisme d’action des gibbérellines avant la stimulation de la transcription : L’ion Ca⁺⁺ Le pH cytosolique La calmoduline Le GMP cyclique Ces différents paramètres augmentent séquentiellement lors du traitement de protoplastes de cellules d’aleurone par GA. Par exemple, GA3 accroît la teneur en calcium cytosolique via l’ouverture de canaux calciques, le retour à des concentrations « normales » de calcium serait du à des Ca⁺⁺ ATPases de la membrane plasmique et à un influx de calcium vers le RE. Des protéines G hétérotrimèriques sont également impliquées dans les premières étapes de la transduction : le MAS 7 qui stimule l’échange GDP/GTP stimule la production d’α amylase. Au niveau terminal de la chaîne de transcription il faut souligner dans le promoteur du gène d’α amylase l’existence d’un « Gibberellic acid responsive complex » GARC avec 3 régions essentielles dont une le GARE (gibberellic acid responsive element). Par ailleurs, un cDNA codant une protéine de 60 Kda (GAB1) avec un domaine en doigt de Zinc répété a été caractérisé ainsi qu’un gène GAMyb (facteur myb) stimulant la production d’α amylase en l’absence de GA. GA stimule, par ailleurs, la production de GAMyb. La réponse finale dépend d’un équilibre entre GAB1 inhibiteur de la transcription et GAMyb activateur. Enfin il faut souligner que l’α amylase est une glycoprotéine sécrétée à l’extérieur des cellules d’aleurone (pour qu’elle puisse migrer ensuite vers l’albumen). Des inhibiteurs de glycosylation bloquent donc cette sécrétion. III–D– g– Modification des taux de Gibberellines chez les plantes par génie génétique : Une amélioration de la productivité des céréales a reposé sur l’obtention de variétés seminaines chez lesquelles l’utilisation de l’azote des amendements était plutôt utilisé pour la mise en place du grain que de la tige. De ce point de vue on peut rappeler que deux gènes dits de la « révolution verte » le gène de blé Rht et le gène de riz Sd1 sont impliqués dans la signalisation associé à GA et à sa biosynthèse respectivement. Par génie génétique plusieurs approches peuvent être envisagées pour réduire les taux de GA 1. réduire la biosynthèse 2. augmenter le catabolisme 1. Par exemple des constructions anti-sens du gène de GA 20 oxydase réduisent les taux de gibberellines chez Arabidopsis 2. Surproduction de GA2 oxydase une enzyme du catabolisme de GA. Un groupe Japonais (2003) vient d’obtenir des résultats intéressants selon cette approche en transformant une variété de riz par une construction associant le gène de GA2 oxydase au promoteur (la synthèse de GA chez le riz est dépendante des organes) d’un gène de biosynthèse de GA dans les tiges. Les plantes transformées ont un phénotype semi-nain mais une floraison et un développement du grain normal contrairement à des plantes où le gène était associé à un promoteur constitutif (actine). III–E - LES CYTOKININES La troisième catégorie d’hormones que nous abordons aujourd’hui les cytokinines présentent comme les précédentes AIA, gibberellines des effets biologiques multiples mais l’effet initialement mis en évidence porte sur la division cellulaire, plus particulièrement sur la cytokinèse d’où le nom de cytokinines. III–E– a- Historique et découverte : La découverte des cytokinines a été associée à la recherche des exigences hormonales des cultures d’organes ou de tissus végétaux in vitro. Ces tissus ou organes isolés de la plante exigent en effet pour se développer des éléments divers dans le milieu et en particulier des hormones. 1941 Van Overbeek met en évidence les propriétés actives du lait de noix de coco* vis-à-vis de la croissance de jeunes embryons de Datura stramonium. Ce milieu est toujours utilisé en culture de tissus végétaux. * endosperme liquide de la noix de coco qui se solidifie par la suite et qui est très riche en acides nucléïques. 1954 Le groupe de SKOOG montre que la croissance in vitro des tissus de moelle de tabac ne peut se faire avec la seule présence d’auxine (faible croissance pas de division, seulement grandissement cellulaire). La recherche de substances actives conduit à mettre en évidence l’action positive • Du lait de noix de coco • D’extrait de levure • De DNA autoclavé 1955 Miller obtient à partir de sperme de Hareng autoclavé (très riche en ac. nucléïques) une substance capable d’induire la division cellulaire des tissus de moelle de tabac à de très faibles concentrations 1 µg/litre. Cette substance a été identifiée il s’agit de la 6-furfurylaminopurine ou kinétine actuellement encore utilisé comme régulateur de croissance. D’autres substances synthétiques de nature voisine et des dérivés de l’adénine isolés des végétaux ont une action comparable. L’ensemble de ces substances est regroupé sous le terme de cytokinines : Adénines substituées ayant une action sur la croissance et la différenciation des tissus végétaux en culture « in vitro » III–E– b- Nature chimique : A côté de la kinétine d’autres substances synthétiques à activités cytokinine existent dont la plus connue est la benzyladénine disponible commercialement très utilisée en culture « in vitro ». Des activités cytokinines ont été initialement caractérisées dans divers extraits végétaux : lait de noix de coco, extraits de divers fruits mais sans identification des structures actives. En 1964, 9 ans après la découverte des cytokinines LETHAM identifie dans les endospermes laiteux de maïs (Zea Mays) la 4-hydroxy-3méthyl-2butényl amino purine ou Zéatine. Depuis cette molécule a été caractérisée dans de nombreuses plantes ; elle est responsable de l’activité biologique du lait de noix de coco. Par la suite on a abouti à la caractérisation chez les végétaux de l’isopentenyladénine libre ou sous forme de riboside qui semble la plus largement répandue. Ces cytokinines naturelles sont plus efficaces que les cytokinines synthétiques. Relations structure activité : De nombreuses substitutions sont possibles au niveau du groupement NH2 de l’adénine tout en conservant l’activité. Substitution sur les cycles : perte d’activité à l’exception de la substitution en 9 d’un hydrogène par un groupement ribose ou ribose phosphate. III–E– c- Biosynthèse – Métabolisme : La voie de Biosynthèse est très simple. Les cytokinines sont des adénines substituées, l’adénine est une base purique, constituant naturel des végétaux qui intervient dans la synthèse des acides nucléiques. Les cytokinines naturelles connues résultent de la substitution d’un hydrogène du NH2 (en 6) par une chaîne, à 5 atomes de carbone correspondant à une unité isoprène de type pyrophosphate d’isopentényle (Cf synthèse Gibb-ABA). Cette origine a été démontrée par des incorporations de mévalonate marquée dans les cytokinines. Une enzyme réalisant le couplage 5’AMP + pyrophosphate d’isopentenyle est l’isopentenyltransférase IPT (cytokinine synthase) cette enzyme n’accepte pas l’adénine ou l’adénosine comme substrats elle a été caractérisée initialement ainsi que son gène chez les microorganismes et c’est La caractérisation récente du gène chez les végétaux qui conclut définitivement le débat polémique relatif à la production des cytokinines non pas par la plante mais par la flore épiphyte qui la colonise. Les cytokinines existent et sont actives à la fois à l’état libre à l’état de nucléosides et de nucléotides. Curieusement on trouve des structures de type cytokinine dans les ARN de transfert (tRNA). Les t RNA après avoir fixé un ac. aminé vont le transférer et permettre son incorporation dans une chaîne polypeptidique en voie de formation au niveau des ribosomes. Chaque t RNA possède 2 régions de sa molécule particulièrement typiques celle où se fixe l’ac. Aminé celle appelée anticodon (correspondant à une séquence de 3 nucléotides) qui lui permet de s’apparier avec le codon correspondant du RNA messager et donc de contribuer à la traduction de cet ARN messager en introduisant au bon endroit le bon ac. aminé. Les ARN de transfert qui ont une structure secondaire en feuille de trèfle en raison de liaisons hydrogénes entre bases complémentaires comportent de nombreux nucléotides rares ou inhabituels : natures des bases méthylées, addition, substitution type de liaisons entre base et sucre et parmi ces nucléotides rares on trouve des structures de type cytokinine comme les adénines substituées. Ces cytokinines occupent une position spécifique adjacente à l’anticodon se terminant par un A. Cette présence des cytokinines dans les t RNA se retrouve donc chez les végétaux mais aussi chez les animaux et bactéries. On a envisagé que les cytokinines proviendraient de la dégradation des t RNA végétaux mais les études réalisées sur le renouvellement (turn over) des t RNA végétaux semblent indiquer que celui-ci n’est pas suffisamment rapide pour maintenir une quantité de cytokinines compatible avec les exigences pour la croissance. Par ailleurs c’est la forme isomèrique cis-zéatine qui est présente dans les t RNA alors que la forme trans-zéatine est la forme prédominante et la plus active dans les tissus, il existe cependant une cis-trans isomérase dans les tissus végétaux. Au final on pense que les cytokinines ont une double origine : synthèse via l’IPT et via la dégradation des t RNA. Les cytokinines lorsqu’elles sont apportées de façon exogène subissent 3 types de transformation. Formation de nucléotides mono-di-triphosphates qui sont actifs au même titre que les cytokinines bases et qui pourraient même être les formes actives les plus générales. Formation de glucosides O-cytokinines glucosylés sur la chaîne latérale – ces réactions sont réversibles et les glucosides constituent donc des formes de réserves inactives. N-cytokinines glucosylés sur les N en 7, 9, 3 ; il s’agit dans ce cas d’une désactivation réversible (le glucose est dans ce cas lié à un atome d’azote du noyau purique). Dégradation par élimination de la chaîne latérale et perte d’activité sous l’action d’une cytokinine oxidase. Cette enzyme maintiendrait l’homéostasie du taux de cytokinines (elle est ainsi inhibée par la diphénylurée qui mime, par effet indirect, les effets de l’apport de cytokinines exogènes). La réaction catalysée est du type : isopentenyladénosine adénosine. III–E– d- Cytokinines dans la plante : Il est classiquement admis que les cytokinines sont produites de façon préférentielle dans les racines, bien que les embryons, les jeunes fruits, les bourgeons aient aussi une autonomie de production. Elles sont présentes dans les racines en grande quantité et sont synthétisées à partir de précurseurs radioactifs. On retrouve des cytokinines dans les exsudats racinaires de certaines plantes (Maïs) Les feuilles sont dépendantes des racines pour la production de cytokinine Exemple : Phaseolus vulgaris lorsque l’on sectionne une tige feuillée et si on la maintient en survie dans l’eau le taux de cytokinines diminue mais recommence à augmenter lors de la formation de racines adventives. Les cytokinines seraient transportées dans le xylème. Appliquées de façon exogène au niveau des feuilles elles migrent peu. Division cellulaire : Un des effets des cytokinines est de permettre la cytokinèse c'est-à-dire la formation d’une paroi transversale assurant la séparation de deux cellules filles. C’est en raison de cette action spécifique sur cette phase de la division cellulaire que le nom de cytokinine a été donné à ces hormones. Il faut également remarquer que dans les conditions des essais biologiques les cytokinines seules sont sans action sur la division cellulaire mais qu’elles ne peuvent agir qu’en présence d’auxine. Ceci est un exemple de complémentarité d’action entre deux substances de croissance = synergie qui doit vraisemblablement se retrouver dans de nombreux cas. Si l’on considère l’intervention des cytokinines dans les conditions naturelles on peut faire référence aux tissus tumoraux pour lesquels on a montré une nette activation de la synthèse des cytokinines et on peut penser que dans les zones méristématiques des tissus normaux ces systèmes de synthèse sont particulièrement actifs. Différenciation Les cytokinines permettent la différenciation de bourgeons sur des tissus en culture leur action est contrebalancée par celle des auxines qui favorisent la production de racines, la différenciation du tissu dépendant en fait de l’équilibre auxine . cytokinines Levée de dormance : les semences de diverses graines Tabac, Laitue, voient leur germination stimulée par les cytokinines. Cet effet peut avoir des répercussions écologiques. Aux USA les graines d’une plante parasite des cultures Striga asiatica ne germent qu’au contact des sécrétions racinaires de la plante-hôte Maïs. Au-delà de cette observation il est possible que les cytokinines aient un rôle plus général dans la germination des semences dans les conditions naturelles. Effet sur la mobilisation des métabolites MOTHES (1961) a découvert que des applications localisées de cytokinines à des feuilles entraînait une mobilisation de métabolites apportés de façon exogène des zones de dépôt vers la zone traitée ou une rétention de métabolites au niveau du traitement (sels minéraux – acides aminés). Cet effet actuellement inexpliqué peut être en partie à l’origine des deux autres manifestations de l’action des cytokinines que nous développerons plus tard • • L’action sur la dominance apicale L’action anti-sénescence Les cytokinines produites par les bactéries : différentes bactéries pathogènes ou colonisatrices des plantes produisent des cytokinines ce qui entraîne au niveau des végétaux des phénomènes tumoraux par multiplications cellulaires anarchiques. Agrobacterium tumefaciens avec transfert du gène IPT à la plante Pseudomonas savastanoi sans transfert de gène mais excrétion de cytokinines Rodococcus fascians producteur de cytokinines produit un phénotype particulier que nous verrons à propos de la levée de dominance apicale : les balais de sorcière. On ne connaît pas de mutants affectés dans la synthèse des cytokinines ni d’inhibiteurs de la synthèse des cytokinines. Cependant la transformation génétique des plantes par différents génotypes d’Agrobacterium tumefaciens a apporté des conclusions intéressantes. En culture de tissus les tissus tumoraux résultant de l’action de cette bactérie se révèlent autotrophes par rapport aux hormones suggérant que le transfert de TDNA entraîne une surproduction d’hormones (ils n’ont pas besoin d’apport d’hormones exogènes contrairement aux tissus normaux). Trois gènes ont été ainsi identifiés dans le TDNA. Deux impliqués dans la production d’AIA. Le gène 1 code une enzyme de formation d’indole acétamide. Le gène 2 code une enzyme hydrolysant l’indole acétamide en tryptophane. Le 3ème gène correspond à l’IPT enzyme de synthèse des cytokinines. Des expériences de mutagenèse par insertion de transposons (transposon TN) chez agrobacterium tumefaciens ont conduit à des souches affectées dans certains de ces gènes. La transformation des plantes par ces souches modifiées a conduit à des phénotypes tumoraux spécifiques qui on conduit à associer le locus affecté à l’allure de la tumeur. tms tmr pour pour tumour tumour shooty rooty Les mesures de teneurs en hormones de ces tissus tumoraux ont montré une réduction des quantités en auxine chez tms, une réduction des quantités en cytokinines chez tmr. Les locus ont été ensuite associés à des gènes codant des enzymes de synthèses de ces hormones mais ces expériences ont surtout montré l’impact des balances hormonales sur la différenciation. La corrélation observée confirme les résultats décrits à l’origine pas Skoog et Miller pour les tissus de tabac en culture. Formation de tiges favorisée par un rapport racines favorisée par un rapport élevé cytokinines auxine faible cytokinines AIA III–E– e- La perception et la transduction du signal cytokinine : Un des systèmes les plus conservés pour la transduction des signaux extracellulaires est la voie des protéines G liant le GTP. Ce sont les protéines G qui en changeant de conformation lors de l’échange GDP-GTP se lient à des protéines effecteurs et les activent (enzymes, canaux ioniques). De nombreuses évidences démontrent l’existence de ce système chez les plantes. ♦ Systèmes affines pour ³²P GTP ♦ Systèmes réagissant aux anticorps contre les unités G α, G β mais pas G γ Il est vraisemblable que le système des G protéines existe donc chez les plantes. Ces observations suggèrent que des récepteurs membranaires à 7 domaines transmembranaires (qui sont couplés aux protéines G) existent donc également chez les plantes. Ces récepteurs sont très nombreux 1 % du génome chez les animaux et sont capables de reconnaître des messages aux structures aussi variées que les photons, les ions, des effecteurs chimiques… En 1998 le groupe de Hooley à Bristol en exploitant les homologies de séquence aux niveaux des EST de Arabidopsis, riz, pin a pu trouver des séquences présentant des homologies avec les 7 TM receptors. A partir de ces informations on est arrivé au clonage d’un gène chez Arabidopsis : GCR1 qui est exprimé à un faible niveau dans différents organes de la plante. La transformation de plantes avec des constructions antisens (promoteur 35 S) conduit à des transformants à phénotype modifié analogue à celui de plantes manquant de cytokinines ou à celui d’un mutant CVR1 insensible aux cytokinines. Par ailleurs, le transformant est moins sensible à l’apport exogène de benzyladénine. Arguments en faveur d’un système à double composante dans la perception / transduction du signal cytokinine Ces systèmes comprennent comme cela a été mentionné précédemment : une partie récepteur une partie transmetteur (histidine kinase) une partie régulateur de réponse Une approche par Activation TDNA Tagging a consisté à transformer un grand nombre de plantes (50 000 cals d’A. thaliana) par une construction comprenant un tétramère du domaine enhancer du promoteur 35S. L’insertion au hasard de cette séquence dans un promoteur quelconque va amplifier la transcription du gène correspondant et permettre également de localiser le promoteur interrompu (par hybridation). Le crible de sélection a porté sur la recherche de plantes présentant un phénotype comparable à celui résultant d’un apport de cytokinines (prolifération de tiges, verdissement accéléré, inhibition de la formation de racines…). Le gène CKI1 a été caractérisé, il code pour un système à deux composantes et sa surexpression donne un phénotype correspondant à l’apport de cytokinines exogènes (pas encore de liaison entre la protéine et les cytokinines démontrée). Enfin un screening de mutants par rapport à la perte de sensibilité aux cytokinines en cultures de tissu a conduit à isoler le mutant Cre1-1 cytokinine . Le mutant ne répond pas à l’apport exogène de kinétine, zéatine, IPA. Le gène correspond à une histidine kinase et la mutation correspond au changement d’une Glycine 467 par Asparagine 467. Cependant le mutant ne présente pas d’anomalie au niveau du système aérien sur la plante entière mais seulement des altérations du système vasculaire des racines suggérant le fonctionnement majoritaire de CRE 1 dans les racines, d’où l’idée de récepteurs tissus spécifiques. III–E– f- Ingénierie de la production des cytokinines : Deux démarches ont été envisagées à des fins soit fondamentales ou appliquées. La surexpression du gène IPT. Ce gène a été associé à différents promoteurs. - un promoteur constitutif fort comme le 35 S entraîne une surproduction de cytokinines avec les symptômes associés classiques : ¾ perte de dominance apicale ¾ réduction du système racinaire ¾ augmentation du nombre de chloroplastes. Cependant la plante a un développement général perturbé par excès de cytokinines. Le gène IPT a donc été associé à des promoteurs inductibles ou exprimés de façon spécifique dans le temps. ¾ gène de protéine de heat shock induit par un élévation de T° ¾ gène exprimé lors de la sénescence Dans ces conditions la surproduction de cytokinines modérée ou limitée dans le temps se traduit par des effet positifs, antisénescence en particulier. La deuxième approche consiste à inhiber par une stratégie antisens ou RNAi le gène de cytokinines oxydase. Cette approche potentiellement intéressante a été encore peu utilisée. III–F - L’ETHYLENE III–F– a- Découverte du rôle hormonal : La démarche qui a conduit à la découverte du rôle hormonal de l’éthylène est tout à fait différente de celle que nous avons évoquée pour les autres hormones. En effet, l’action de l’éthylène exogène est connue depuis longtemps sur les végétaux et ce n’est qu’à la suite de la démonstration de la présence naturelle de l’éthylène chez les plantes que l’on a conclu à son action hormonale. Dès 1886 une jeune Botaniste russe NELJUBOW observait l’effet du gaz d’éclairage sur la morphologie de plantules de pois : raccourcissement et épaississement des tiges, perte du géotropisme négatif : ensemble de réponses regroupées sous le terme de triple réponse. Parmi les différents effets de l’éthylène ce sont cependant les observations relatives à la maturation des fruits qui ont été décisives dans la découverte de son rôle hormonal. 1924 : 1937 : DENNY : l’éthylène permet le jaunissement et la maturation des citrons GANE : montre que les émanations gazeuses de pommes mûres initient la maturation des fruits verts et que l’éthylène constituait le gaz actif (première démonstration de la production d’éthylène par un végétal). A partir de ce moment on attribue un rôle à l’éthylène dans la maturation des fruits et l’on montre que de nombreux fruits émettent de l’éthylène. 1955-1960 : le développement de chromatographie en phase gazeuse fit franchir une nouvelle étape car cette méthode très sensible et particulièrement adaptée à la détection de ce gaz permet de montrer que l’éthylène était présente dans toute les parties de la plante. Parallèlement on démontrait au-delà de la maturation les actions diverses de l’éthylène sur le développement des végétaux et en 1969 ce composé était finalement rangé parmi les hormones végétales. Produite par les végétaux, active à faible dose et à distance du lieu de synthèse l’éthylène répond tout à fait à la définition d’une hormone. Elle représente cependant des caractéristiques particulières au niveau du transport : on observe en effet une diffusion gazeuse à l’intérieur de la plante mais aussi à l’extérieur d’où la possibilité d’action sur d’autres individus. Cette propriété suggère une analogie avec les phéromones animales. Son caractère gazeux la fait, par ailleurs, comparer à un autre gaz l’oxyde nitrique (NO) molécule gazeuse impliquée dans la signalisation chez les animaux (les végétaux produisent aussi de l’oxyde nitrique). III–F– b– Production par la plante : En raison de la sensibilité et de la spécificité de l’analyse chromatographique en phase gazeuse on ne retient pratiquement pas de test biologique pour estimer les quantités d’éthylène dans la plante (sensibilité 10¹² mole - 10⁶ µl). Les fruits, les fleurs et différents organes de la plante produisent de l’éthylène. On distingue généralement : La teneur interne (TI) L’émission dans l’atmosphère (EAth) Exemple pour la Poire Williams : TI= 80 µl/g EAth = 200 µl/g/24h Aux USA, ABELES a estimé que la production d’éthylène par les plantes était de 2.10⁴ tonnes par an. Cette production peut être comparée à celle provenant des véhicules et des industries 15.10⁶ tonnes par an. Ces concentrations pourraient être toxiques pour les plantes mais l’éthylène est soit transformé par oxydation par l’ozone par réaction avec les oxydes d’azote à la lumière ou utilisée par les microorganismes du sol. Il est à noter : 1) Que la production d’éthylène est très sensible aux facteurs de l’environnement : lumière, température, différents types de « stress » (blessures, radiations, sécheresse, attaques par les microorganismes, etc…). Dans le cas de ces agressions cette synthèse accrue d’éthylène s’accompagne de la formation de composés phénoliques, les enzymes de synthèse PAL ou d’oxydation (peroxydase) de ces composés étant nettement activées. L’éthylène déclenche ainsi des réactions de la plante qui peuvent être assimilées à des sortes de réactions de défense de la plante (cicatrisation, protection…) d’où l’appellation d’Hormone de Stress. 2) Que la production d’éthylène est stimulée par les auxines (naturelles ou synthétiques). Les travaux d’ ABELES et de BURG (1968-1972) ont montré que de nombreuses réponses obtenues chez les plantes lors de l’application d’auxine pouvaient être reproduites par l’exposition des plantes à l’éthylène. Ainsi de nombreuses réponses attribuées à l’auxine aux fortes concentrations se produiraient par l’intermédiaire de l’éthylène (inhibition de l’élongation). Cette interaction pourrait fournir un contrôle naturel lors de la production excessive d’auxine. III–F– c– Voies de biosynthèse et régulation de la synthèse : Depuis longtemps il avait été démontré que la méthionine (ac. aminé) était un précurseur de l’éthylène. En effet, si on apporte de la méthionine marquée à des tranches de pommes ou de bananes on observe une incorporation de la radioactivité dans l’éthylène. L’éthylène dériverait des carbones 3 et 4. Les étapes intermédiaires ont été ensuite caractérisées selon la séquence : Méthionine S-adenosyl méthionine Acide cyclopropane carboxylique (ACC) Ethylène L’enzyme de synthèse de S-adenosyl méthionine la SAM synthase n’est pas spécifiquement impliquées dans la synthèse de l’éthylène car son produit est majoritairement utilisé comme donneur de méthyle dans d’autres synthèses : lignines, polyamines… Les autres enzymes plus en aval ont un rôle plus spécifique. L’enzyme de synthèse de l’ACC semble jouer un rôle régulateur important dans la production de l’éthylène. C’est une ACC synthase enzyme comportant un groupement prosthétique pyridoxal – phosphate dont l’activité est bloquée par des inhibiteurs, des enzymes à pyridoxal-P. L’ACC synthase a été purifiée et clonée. C’est un exemple d’une famille multigénique dont chaque membre est différemment exprimé en réponse à des facteurs du développement, de l’environnement ou des facteurs hormonaux. Avec des sondes spécifiques une expression différentielle des différents gènes a été évaluée par exemple : Une forme augmente lors de la maturation Une autre forme augmente en réponse à des blessures Une dernière forme augmente en réponse à l’auxine L’ACC oxydase qui transforme l’ACC en éthylène est une dioxygénase qui demande du fer et de l’ascorbate et fonctionne en présence d’O2. Elle correspond également à une famille multigénique et subit également une augmentation de son activité lors du stress. Plusieurs observations tendent à montrer que la stimulation de la production d’éthylène à la suite du stress procède d’une néosynthèse d’ACCsynthase qui jouerait un rôle limitant dans la production d’éthylène. En effet, le système de conversion de l’ACC en éthylène apparaît constitutif dans la plupart des tissus car l’apport d’ACC à une large variété de plantes ou de tissus détermine un accroissement très important de production d’éthylène. L’auxine, le « wounding », le « flooding » stimulent la synthèse d’ACC synthase et la production d’ACC et d’éthylène. Certains mutants de tomate « rin » sont incapables de mûrir en raison d’un défaut dans la production d’éthylène. L’apport d’ACC maturation. La mutation concerne le gène de l’ACC-synthase l’effet négatif de l’apport de différents précurseurs de l’ACC. L’épinastie constatée au niveau des feuilles lors de la croissance sur sols inondés est due au transport vers les parties aériennes d’ACC non transformé au niveau des racines en raison de l’absence d’O2. Enfin l’ACC peut être transformé en une forme conjuguée de manière irréversible : le malonyl ACC. Il a été proposé de façon « humoristique » que la quantité de malonyl ACC retrouvée chez une plante soit un indicateur des situations de stress vécues par la plante. Au-delà des voies de biosynthèse naturelle un certains nombre de composés chimiques exogènes sont utilisés comme précurseurs d’éthylène il s’agit de l’ethephon ou de l’ethrel. La dégradation de l’éthylène essentiellement à l’extérieur de la plante implique une conversion en oxyde d’éthylène ou en éthylène glycol. III–F – d– Effets physiologiques : L’éthylène peut être considéré comme une hormone mixte avec des effets positifs : initiation de la floraison, et des effets négatifs sur le développement : inhibition de la croissance, abscission, sénescence. Elle exerce une influence sur toutes les phases du développement de la germination à la sénescence souvent en interaction avec d’autres hormones. Maturation des fruits : Le phénomène de maturation englobe des changements biochimiques profonds qui conduisent à des modifications de texture, du goût, de la couleur du fruit et le rendent apte à la consommation. Sans entrer dans le détail de ces modifications il faut signaler qu’elles sont précédées chez de nombreux fruits par un accroissement très net de l’intensité respiratoires que l’on appelle crise climactérique, la période antérieure ou phase pré climactérique étant une période d’activité métabolique ralentie (voir figure). Changements biochimiques lors de la maturation : Hydrolyse des composés pectiques Hydrolyse de l’amidon Disparition des acides organiques pectine soluble sucres oses Disparition des substances astringentes (tannins) 1. on a pu montrer que l’apport de l’éthylène déclenche la crise climactérique et les phénomènes de maturation qui s’en suivent. 2. des mesures de la production d’éthylène dans le fruit révèlent que la quantité de gaz s’accroît avec la crise climactérique. 3. enfin l’utilisation d’inhibiteur de la production d’éthylène « la rhizobitoxine » retarde la maturation des pommes. Selon les fruits on constate que la production d’éthylène est parallèle à la montée de la crise climactérique ou la précède en revenant à sa valeur initiale lors de la montée (Banane). On considère donc que l’éthylène est l’hormone de maturation naturelle des fruits. Le contrôle de la production éthylène a des applications commerciales dans le contrôle de la maturation des fruits. La maturation des fruits peut être considérée comme une étape précoce de la sénescence qui est définie par rapport à des critères de consommation. L’éthylène de façon plus générale, induit la sénescence chez d’autres organes comme les fleurs ou les feuilles. III–F – e– Mécanismes d’action de l’éthylène : L’éthylène est sans doute l’hormone végétale dont les mécanismes moléculaires d’action (perception, transduction du signal…) sont les mieux connus. Ces résultats sont liés à une exploitation extensive de mutants d’Arabidopsis thaliana insensibles à l’éthylène au niveau de la réponse physiologique classique de la triple réponse. Le mutant ETR1 (éthylène résistant) a permis l’isolement du récepteur d’éthylène. Ce gène isolé par clonage positionnel code une protéine qui comporte des homologies avec les systèmes régulateurs bactériens à deux composantes : Domaine senseur Domaine histidine kinase (transmetteur) Domaine receveur (régulateur de réponse). La protéine récepteur existe sous forme de dimères les 2 sous unités étant liée par 1 pont disulfure. La protéine recombinante est capable de fixer l’éthylène au niveau de sa région N terminale hydrophobe. La cystéine 65 est impliquée dans cette fixation. D’autres mutants de sensibilité ont été caractérisés tels que CTR1, EIN2, EIN3, ETR2, EIN4, ERS. Certains des gènes correspondants (ETR2, EIN4) correspondent peut être à une redondance des récepteurs, d’autres codent pour des intermédiaires de la chaîne de transduction. CTR1 code pour une protéine répresseur, car la mutation entraîne une triple réponse constitutive. La liaison du récepteur ayant fixé l’éthylène avec CTR1 désactive ce dernier. L’ordre d’intervention de ces différentes protéines le long de la cascade perception transduction a commencé à être identifié : ETR1 CTR1 EIN2 EIN3 ERF1 Réponses Le domaine cytoplasmique de ETR1 interagit avec le domaine régulateur de CTR1(protéine kinase de type RAF). EIN2 protéine membranaire, EIN3 et ERF1 (Ethylene response factor) qui sont pour les deux derniers des protéines nucléaires à rôle de facteur de transcription se situent plus en aval. ERF1 est rapidement induit en réponse à l’éthylène et déclenche un ensemble de réponses physiologiques quand il est exprimé ectopiquement. L’intervention de ces gènes sur une même voie de transduction a été ordonnée par des tests génétiques d’épistasie qui permettent par croisement de 2 mutants suivie d’une autofécondation de déterminer par analyse du phénotype le gène qui agit avant l’autre sur la chaîne (le gène qui agit en 1er donne le phénotype). III–F– f– Applications biotechnologiques : Le métabolisme de l’éthylène a fait l’objet de manipulations génétiques en vue de contrôler la maturation. De nombreuses pertes de fruits résultent en effet de phénomènes de maturation / sénescence non contrôlés après la récolte. Les interventions ont porté sur la sous-expression des gènes d’ACC synthase ou d’ACC oxydase ou sur la surexpression d’un gène bactérien d’ACC désaminase du genre Pseudomonas qui réalise la conversion (ACC acétobutyrate) Par ces différentes stratégies on a pu obtenir des plantes à maturation différée (tomate, melon…). La maturation peut être déclenchée par apport d’éthylène (comme c’est le cas industriellement pour la banane récoltée verte). Une amélioration du procédé consiste en l’utilisation de promoteurs spécifiques associés à ces gènes. Fruit spécifique pour éviter des effets pléiotropiques Ou inductibles par des conditions particulières Lumière inductible et transfert à l’obscurité par exemple pour initier la maturation. III–G – L’ACIDE ABCISSIQUE Des inhibiteurs de croissance ont depuis longtemps été caractérisés chez les plantes il s’agit souvent de composés phénoliques sécrétés ou excrétés souvent actifs après leur oxydation. Ces composés sont impliqués dans les phénomènes d’allélopathie c'est-à-dire l’inhibition de croissance d’une plante par une autre plante à proximité. Au-delà de ces phénomènes une substance à effet inhibiteur de la croissance qui a une répartition générale et une fonction hormonale est l’acide abcissique. III–G– a– Historique – Découverte : La découverte de l’acide abcissique est intéressante car elle a été réalisée simultanément par des chercheurs travaillant dans des laboratoires différents sur des problèmes physiologiques distincts. Dans les années 1960, WAREING et ses collaborateurs au Pays de Galles recherchaient la cause de l’arrêt de la croissance des arbres en automne et le facteur qui provoque la formation des bourgeons dormants. Ils obtinrent à partir des feuilles d’Acer pseudoplatanus un extrait acide qui était un puissant inhibiteur de la croissance et qui appliqué aux apex des tiges feuillées était capable d’induire la formation de bourgeons dormants. Ils appelèrent la substance active encore inconnue : la dormine. ADDICOT et ses collaborateurs à l’Université de Californie DAVIS s’intéressaient au problème de l’abcission des feuilles et obtinrent à partir du cotonnier deux substances abcissine I et abcissine II capables d’accélérer l’abcission des feuilles de jeunes plants de coton. Parallèlement était caractérisé un inhibiteur de croissance du Lupin par WAIN en Angleterre. L’isolement de la dormine par CORNFORTH et al. (1966) permet sa caractérisation chimique et fut suivie par des travaux qui montrèrent que dormine inhibiteur de croissance du Lupin et abcissine II étaient en fait la même substance qui fut définitivement appelée acide abcissique en 1967 (ABA). III–G– b– Nature chimique –Biosynthèse : L’ABA est un sesquiterpène, molécule en C₁₅ résultant de l’association de 3 molécules d’isoprène. L’ABA présente 2 types d’isomérie lié d’une part à la présence d’un carbone assymétrique (le composé naturel est dextrogyre, le produit commercial est un racémique mélange des 2 isomères optiques) et d’autre part à l’existence d’une double liaison sur la chaîne latérale isomérie cis-trans. Le cis ABA est le seul actif dans le cas de l’action de l’ABA sur la fermeture des stomates. Deux voies de biosynthèse ont été successivement proposées pour l’ABA, la première dite voie en C₁₅ correspondrait à la condensation de 3 molécules d’isopentenyl pyrophosphate selon un mécanisme analogue à celui de la synthèse des gibberellines. La 2ème voie dite en C₄₀ a été caractérisée plus récemment elle correspond à une coupure de caroténoïdes en C₄₀ du type zeaxanthine selon la séquence : Zéaxanthine (C₄₀) Violaxanthine (C₄₀) Xanthoxine (C₁₅) ABA aldéhyde (C₁₅) ABA (C₁₅) Divers mutants ont permis de caractériser cette voie de synthèse à travers des études qui sont de bons exemples de combinatoire d’approches génétiques, moléculaires et biochimiques. Des mutants de tabac déficients en ABA (mutants ABA₂) sont altérés au niveau de la zéaxanthine époxydase (cette enzyme possède en fait 2 activités conversion de la zéaxanthine en antheraxanthine puis en violaxanthine). La zéaxanthine qui est non détectable chez la plante sauvage est bien représentée chez le mutant alors que la violaxanthine présente chez la plante sauvage n’est pas caractérisable. D’autres mutants chez la tomate comme flacca (phénotype à flétrissement permanent) sont affectés dans des étapes terminales comme la conversion de ABA aldéhyde en ABA. Différents mutants dits vivipares chez le maïs (les graines germent sur le pied mère par défaut d’ABA) sont bloqués à différents niveaux de la chaîne de synthèse du ß-carotène (Vp1, Vp2, Vp5, Vp9, Vp7) Vp7 par exemple est bloqué au niveau de la conversion lycopène en carotène. Au total il est maintenant admis que la voie en C₁₅ n’est pas opérationnelle chez les plantes mais chez certains champignons, la totalité de l’ABA venant de la voie en C₄₀ chez les organismes chlorophylliens où la synthèse de l’ABA a d’ailleurs lieu dans les chloroplastes riches en caroténoïdes (la zéaxanthine epoxydase correspond à un cDNA présentant une séquence d’adressage vers le chloroplaste). Le catabolisme de l’ABA procède via une hydroxylation pour donner le 8 hydroxy ABA ensuite converti en acide phaséïque, l’ABA 8 hydroxylase est une monooxygénase à phytochrome P₄₅₀. Cette dégradation intervient, par exemple lors du retour à un état hydrique normal après une période de sécheresse pour réduire le taux d’ABA. L’ABA peut également être converti en formes conjuguées inactives : ABA glucosyl ester sur le COOH ABA glucoside sur l’OH du carbone assymètrique. Au cours de la période hivernale on assiste chez certaines espèces à une interconversion entre formes libres et formes conjuguées. III–G– c– Effets physiologiques et mécanismes d’action : Action sur la fermeture des stomates : il s’agit d’un phénomène très important au plan physiologique puisqu’il permet de contrôler les pertes d’eau de la plante et de maintenir l’homéohydrie. C’est un exemple de réponse rapide à une hormone de l’ordre de quelques minutes (lors de l’apport d’ABA exogène). Harris et coll (1990) en utilisant un radio immuno essai (extrêmement sensible) pour l’ABA ont été capables de quantifier l’ABA dans une seule cellule de garde. A la suite d’un stress hydrique on observe un accroissement du taux d’ABA par un facteur 20. La production d’ABA se ferait en 1er au niveau des racines stressées qui perçoivent le stress et l’ABA serait transporté vers les apex. Le mécanisme d’action de l’ABA sur la fermeture des stomates a été étudié via des mesures électrophysiologiques au niveau de canaux ioniques. On a montré que l’ABA active un canal calcique du plasmalemme ce qui entraîne un accroissement en calcium cytoplasmique qui secondairement induit l’ouverture d’un canal potassique sortant, de canaux anioniques et la fermeture canal K⁺ entrant. Le résultat global est une fuite de K⁺ et la fermeture des stomates. Le mécanisme fin est plus complexe faisant intervenir des phénomènes de phosphorylation / déphosphorylation. Certains mutants insensibles à l’ABA et présentant une tendance au flétrissement ont permis l’isolement d’un gène muté qui est une phosphatase. De plus différentes études pharmacologiques à l’aide d’inhibiteurs de Kinases ou de phosphatases ont montré l’importance d’étapes de phosphorylation et de déphosphorylation dans la régulation de l’activité des canaux ioniques impliqués dans la fermeture des stomates. A l’inverse des autres cellules végétales, les cellules de garde ne comportent pas de plasmalemmes et sont donc isolées de leurs voisines. Il s’agit d’un système clos adapté aux techniques électrophysiologiques et aux micro-injections. Une approche originale ayant confirmé l’intervention de l’ABA dans la fermeture des stomates repose sur l’expression ectopique, obtenue par transgénèse, d’anticorps contre l’acide abcissique, ARTSAENKO et al, 1995. Un anticorps monoclonal présentant une forte spécificité et affinité pour l’ABA a été caractérisé et le cDNA correspondant cloné puis introduit dans une construction avec un promoteur fort pour la transformation du tabac. Le gène étranger est exprimé dans le tabac et son expression conduit à un phénotype flétri analogue aux mutants à phénotype flétri de tomate (flacca). Différents travaux déjà décrits ont montré que le récepteur à l’ABA était sur la face extérieure de la membrane plasmique (voir partie du cours concernant les récepteur d’hormones) mais la structure moléculaire de récepteur n’est pas connue. Formation des graines et dormance : L’ABA intervient comme nous le verrons ultérieurement dans le contrôle de l’expression de gènes qui correspondent à des protéines de réserve des graines et à des protéines permettant sans dommage la déshydratation des tissus (les déhydrines). Parmi ces protéines une classe particulière a été spécialement étudiée ce sont les LEA protéines (late embryogenesis abundant) produite durant les phases tardives de l’embryogénèse. Leur expression est associée à l’acquisition de la tolérance à la déshydratation et elles sont censées protéger les structures cellulaires des effets de la perte d’eau (protection de protéines ou de membranes). L’ABA est, par ailleurs, nécessaire à l’entrée en dormance des graines et des bourgeons. L’ABA est d’une manière générale un antagoniste des gibbérellines dans des phénomènes comme la dormance ou la production d’α-amylase par les cellules d’aleurone. Abcission : Bien que l’hormone ait été initialement caractérisée en relation avec l’abcission. Ce sont des doses supraphysiologiques qui sont actives et on pense que ces doses entraîneraient la surproduction d’éthylène véritable hormone responsable de l’abcission. En conclusion le nom de dormine aurait été beaucoup plus adapté pour ce que nous appelons aujourd’hui l’acide abcissique. III–H - LES BRASSINOSTEROIDES Les Brassinostéroïdes (BR) représentent une classe d’hormones végétales présentant en commun des structures de stéroïdes qui ont de multiples effets sur le développement : germination des graines, élongation des tiges, expansion des feuilles, différenciation du xylème. Le rôle des Br a été clairement démontré par l’étude de mutants soit déficients, soit insensibles aux brassinostéroïdes qui présentent différentes anomalies de développement. Des phénotypes comparables peuvent être obtenus par des inhibiteurs de biosynthèse des Br comme le brassinazole (Brz). III–H– a- Découverte , Historique : Ces molécules ont été initialement isolées en 1970 du pollen de Brassica majus sous le terme de brassines, une molécule particulière appelée brassinolide étant caractérisée en 1979. Ces molécules appliquées sur divers systèmes expérimentaux à des concentrations nanomolaires présentent un effet marqué sur l’élongation cellulaire ou sur la prolifération cellulaire. Ceci indépendamment des effets induits par d’autres hormones comme l’auxine, les cytokinines ou les gibbérellines. Une quarantaine de structure actives ont été actuellement caractérisées les Brs étant présents chez les algues, fougères, gymnospermes, angiospermes mais pas chez les microorganismes. Le brassinolide est le plus actif biologiquement et le plus répandu. Les preuves génétiques, démontrant que les Brs étaient essentiels pour le développement normal des plantes, ont été très récemment apportées par l’étude de mutants ainsi que des informations sur les mécanismes d’action des brassinostéroïdes. III–H– b- Structure et Biosynthèse des Brassinostéroïdes : Le brassinolide (Br type) est un stéroïde présentant un squelette cholestane qui possède un cycle B-7oxalolactonique et 2- hydroxyles adjacents sur le cycle A(C₂α et C₃α) et sur la chaîne latérale C₂₂ et C₂₃. Des analyses de structure fonction des Brs ont montré que les structures actives devaient présenter un certain nombre de caractéristiques qui sont retrouvées dans le Br type le Brassinolide. Les différents Brs se distinguent par le nombre et la nature des substituants sur les cycles A et B et sur la chaîne latérale. La voie de synthèse du Brassinolide à partir du campestérol, un stérol végétal de répartition très générale a été établie au cours des dernières années. Elle comprend une série de réductions, d’oxydation et d’épimérisation (voir figure). Différents mutants ont été caractérisés sur les nombreuses étapes de la chaîne de synthèse. Le mutant nain det₂ est un mutant déficient en BR qui est complémenté par l’apport de Br exogène. La mutation concerne une stéroïde réductase assurant la conversion du campestérol en campestanol. L’auxine et les gibbérellines ne complémentent pas la mutation au plan fonctionnel. Le fait que le gène det₂ est nécessaire à la biosynthèse des Brs et que la perte de fonction entraîne des modifications profondes du développement : nanisme mais aussi d’autres manifestations sur la dominante apicale, la sénescence… démontre sans ambiguïté le rôle hormonal des Brs. Un autre mutant nain appelé CPD a été étudié, le gène a été cloné et séquencé. Les analogies de séquence observées montrent que ce gène code pour une étape d’hydroxylation dans la chaîne de synthèse des Brs. Les apports de teasterone, thyphastérol, castastérone « complémentent » la mutation. L’apport de casthastérone est sans effet. La protéine correspondant au gène muté catalyse la conversion de casthastérone en teasterone. C’est une hydroxylase a cytochrome P₄₅₀ (appelée CYP 90) qui présente des analogies avec les stéroïdes hydroxylases. Le phénotype sauvage est retrouvé par transformation génétique avec le cDNA de cette hydroxylase. Mutants insensibles aux Brs : Des mutants de sensibilité au Br ont été caractérisés par un crible de sélection simple : absence d’inhibition de la croissance racinaire par des doses élevées de Br. Un excès de Br comme dans le cas de l’AIA, entraîne en effet, une inhibition de croissance. Un de ces mutants BRI1 (Brassinosteroid insensitive) correspond à ces critères. A maturité il est nain et présente d’autres altérations phénotypiques. Il demeure sensible aux autres hormones : l’auxine, cytokinines, AIA, éthylène. La caractéristique du gène a permis l’identification du récepteur aux Brs (voir plus bas). III–H– c- Effets physiologiques des brassinostéroïdes : Les brassinostéroïdes ont des effets pléiotropiques sur les systèmes végétaux. Nous avons déjà parlé de leur action sur la division et l’élongation cellulaire. Ils interviennent également dans la différenciation des tissus vasculaires qui est supprimée par apport d’uniconazole inhibiteur de la synthèse des stéroïdes mais rétablie par apport de Brassinolide. Ils accélèrent la sénescence dans des systèmes simplifiés (feuilles, cotylédons isolés) par des effets antagonistes des cytokinines. Les effets sur l’élongation cellulaire présentent des cinétiques différentes de ceux induits par l’AIA dont les premières manifestations s’observent après 15’ et le maximum après 30 à 45’. Les premiers effets des Brs se manifestent, en effet, après 45’ et peuvent se prolonger et augmenter pendant plusieurs heures. III–H– d- La perception et la transduction des brassinostéroïdes : Trends in Plant Science Vol 9 Feb 2004. Une première remarque concerne le lieu de perception des hormones stéroïdes qui est différent dans le règne animal et le règne végétal. La plupart des réponses aux stéroïdes chez les animaux impliquent la perception du message par des récepteurs nucléaires alors que la perception se fait par un récepteur plasmalemmique chez les végétaux. Des études sur des mutants de sensibilité au Br chez Arabidopsis qui sont des mutants nains ont conduit à l’identification d’un récepteur et d’éléments de la chaîne de transduction. Le récepteur a été appelé BRI1 pour « Br insensitive » c’est un leucine rich repeats LRR receptor like kinase : LRR-RLK. BRI1 a un domaine extracellulaire contenant 25 LRR, un domaine transmembranaire et un domaine cytoplasmique qui porte une activité sérine / thréonine Kinase. La fixation de Br sur le récepteur provoque son autophosphorylation et des mutations sur le domaine extracellulaire suppriment la fixation de Br et l’activation de la Kinase. La situation est cependant plus complexe avec l’intervention potentielle de deux autres composants BAK1 qui pourrait former un hétèrodimère avec BRI1 et une sérine carboxypeptidase BRS1 qui réaliserait le processing d’une partie extracellulaire de la protéine BRI1 (voir figure). Divers composants de la voie de transduction ont été caractérisés BIN2 est un régulateur négatif dont l’effet est levé par l’activation du récepteur. BZR1 et BES1 sont des protéines nucléaires régulateurs positifs en aval de BIN2. Au total l’activation du complexe BRI1 – BAK1 inhibe BIN2 à travers un mécanisme inconnu, ce qui permet l’accumulation des formes non phosphorylées de BZR1 et BES1 qui sous cette forme activent les gènes cibles des Br. En l’absence de Br la kinase BIN2 inhibe les réponses en phosphorylant BZR1 et BES1 et en les orientant vers la voie de dégradation impliquant le protéosome 26S. Cette voie de transduction présente de nombreuses analogies avec des voies impliquées pour d’autres signaux chez les animaux et les végétaux (par exemple l’auxine ou l’éthylène). De façon surprenante le récepteur BRI1 de tomate a deux fonctions : la fixation de Br mais aussi de systèmine, une hormone peptidique qui induit des réponses à la blessure chez la tomate via la production d’acide jasmonique. Les fixations se produisent sur 2 sites différents, se pose alors le problème de la spécificité de la réponse en aval et du choix de ce récepteur commun parmi les centaines de LRR-RLKcaractérisés chez les plantes (210 chez Arabidopsis). Une situation comparable a été trouvée chez la Drosophile avec le récepteur Toll, à la fois important pour le patterning dorsoventral et pour l’acquisition de l’immunité innée aux bactéries et aux champignons. Dans ce cas les 2 phénomènes sont temporellement séparés lors du développement ce qui n’est pas le cas chez la tomate pour BRI1. Les Brs contrôlent l’expression génique : Il a été montré par des expériences d’apport de Brs à des systèmes végétaux et de suivi de la synthèse protéique, et de la transcription et par des analyses de criblage différentiel (transcrits produits uniquement ou stimulés en présence de Br) que les Brs favorisent la transcription de certains gènes. Chez le soja un gène a été caractérisé appelé BRU1 (brassinosteroid upregulated) dont les transcrits augmentent 2h après l’apport de Br mais non lors de l’apport d’auxine de cytokinine, de gibbérelline ou d’acide d’abcissique. La séquence de ce gène BRU1 présente des analogies fortes avec celle du gène connu codant pour la xyloglucane endotransglycosylase (XET). L’augmentation du message BRU1coincide avec l’accroissement d’extensibilité de la paroi et il est probable que les Brs agissent sur l’élongation cellulaire par l’intermédiaire de la production de XET (gène appelé aussi TCHU). L’activation de la transcription se faisant par l’intermédiaire d’un facteur de transcription TCH4-BF1 qui se lie au promoteur du gène TCH4. CHAPITRE IV - LES PHOTORECEPTEURS CHEZ LES VEGETAUX IV – A - INTRODUCTION : Les végétaux qui ont évolué dans un environnement dont la lumière est un facteur prépondérant ont mis en place au cours de l’évolution des systèmes de perception de lumières de différentes longueurs d’onde qui sont capables d’avoir un effet sur différentes phases du développement. Le phytochrome est le plus anciennement connu de ces photorécepteurs. Il faut noter que cette capacité des végétaux à lire et à exploiter des signaux lumineux de leur environnement pour réguler leur développement double une autre caractéristique retrouvée très tôt chez les organismes photosynthétiques la capacité à utiliser l’énergie lumineuse pour créer de l’énergie chimique via le processus de photosynthèse. Plusieurs points sont à noter : - - Cette action de la lumière n’est pas limitée au fonctionnement des végétaux. Chez les animaux, la vision ainsi que le développement sexuel, certaines migrations sont contrôlées par la lumière. Cependant la lumière contrôle une gamme d’effets beaucoup plus large chez les végétaux que chez les animaux. On regroupe sous le terme de photomorphogénèse le contrôle du développement des plantes par la lumière indépendamment de la photosynthèse. La distinction fondamentale est d’ordre énergétique ; dans la photomorphogénèse de très faibles énergies sont mises en jeu concerne la nature des photorécepteurs impliqués chlorophylle et pigments accessoires dans le cas de la photosynthèse, autres photorécepteurs dans le cas de la photomorphogénèse. La lumière varie par sa quantité, sa qualité (longueur d’onde) et son rythme de distribution (photopériode) et on peut distinguer dans la photomorphogénèse plusieurs aspects et aboutir à des définitions plus restrictives. Stimulus lumineux unilatéral (1) phototropisme Photorécepteurs impliqués: phototropine non périodique non unilatéral (3) photomorphogénèse proprement dite périodique (2) photopériodisme phytochromes (1) – croissance unidirectionnelle en réponse à un stimulus unilatéral (– caractère adaptatif : recherche d’une lumière maximale) (2) – étapes du développement en réponse à un stimulus lumineux périodique (– entrée et sortie en dormance : contrôle de la floraison) (3) – réponses non directionnelles à un stimulus non unilatéral et non périodique ex : photocontrôle de la germination Dans la réponse d’un organisme vivant à la lumière on peut généralement envisager la séquence d’évènements suivante : - absorption d’un rayonnement d’une certaine longueur d’onde par un photorécepteur modification de ce photorécepteur (activation) action primaire du photorécepteur modifié différentes étapes de la chaîne de transduction conduisant à l’effet observé. Ces étapes sont très comparables à celles intervenant lors de la liaison d’une hormone à son récepteur. Les première études de photobiologie chez les végétaux ont porté sur un photorécepteur le phytochrome, puis on s’est aperçu qu’il existait plusieurs phytochromes, que d’autres catégories de photorécepteurs intervenaient et que ces différents photorécepteurs agissaient de façon concertée et en interactions ce qui complexifie fortement la situation. Pour des raisons pédagogiques on abordera tout d’abord les étapes initiales de la découverte du phytochrome considéré à l’origine comme unique photorécepteur. Avant de terminer cette introduction présentons une expérience simple qui illustrera tout d’abord l’intervention de la lumière indépendamment de la photosynthèse. Trois plantules étiolées de moutarde de même constitution génétique sont placées, éclairement excepté, dans des conditions identiques de culture. La première reste à l’obscurité La deuxième reçoit de la lumière blanche La troisième reçoit de la lumière rouge lointain (730 nm). Au bout de 72 heures l’aspect des plantules est très différent. Les tiges des spécimens restés à l’obscurité sont plus longues et les cotylédons sont plus petits (c’est le port des plantes étiolées) (figure). Ces différences ne sont pas dues à la photosynthèse en effet les plantules qui ont poussé à la lumière blanche sont identiques à celles qui ont poussé à la lumière rouge lointain, or ces dernières radiations ne permettent pas la photosynthèse. Le phénomène observé est donc bien un phénomène pur de photomorphogénèse lié à la présence des radiations rouge lointain. IV–B – LE PHYTOCHROME : IV–B1– Découverte du phytochrome : Au-delà d’observations initiales isolées sur l’impact de la lumière deux types de résultats ont permis de progresser : - D’une part, le fait que de nombreuses photoréponses chez les plantes et les graines ont pratiquement le même spectre d’action (énergie nécessaire pour obtenir une réponse donnée en fonction des longueurs d’onde). D’autre part, la découverte du caractère réversible des photoréponses. Ainsi, BORTHWICK, en 1952, étudiant la germination des laitues sous l’action de bandes passantes de longueurs d’ondes de 10 à 20 nm obtint les spectres d’action représentés sur la figure. On remarque un effet inducteur maximum au voisinage de 660 nm (lumière rouge = rouge clair = red). Si sur ces semences qui ont acquis la potentialité de germer on fait agir des longueurs d’onde dans l’extrême rouge on constate une inhibition de la germination avec un effet maximum à 730 nm (lumière rouge lointain = rouge sombre = far-red). Sur ces figures sont également représentés les effets des lumières rouge et rouge lointain sur l’induction ou l’inhibition de l’initiation florale de Xanthium saccharatum plante de jour court. On peut constater la similitude des spectres d’action. Dans les deux cas les énergies mises en jeu restent très faibles. La figure 3 démontre clairement le caractère réversible de l’action de la lumière. En soumettant les semences à une série d’expositions aux lumières rouge et rouge lointain on peut obtenir l’induction ou l’inhibition de la germination : le résultat dépendant de la nature du dernier éclairement. Si une période d’obscurité est intercalée entre les lumières rouge et rouge lointain le pourcentage de germination obtenu dépend de la durée de la phase obscure (figure 4). Au bout d’un certain temps, le phénomène étant déclenché, une nouvelle irradiation ne modifie plus son expression. Le caractère réversible de l’action de la lumière s’est avéré être commun aux différentes photoréponses prouvant ainsi l’identité de l’acte photochimique initial dans le contrôle de réponses variées. A la suite de ces expériences, BORTHWICK et HENDRICKS ont proposé l’existence de deux formes d’un même photorécepteur, l’action de la lumière correspondant à la conversion d’un système dans l’autre, d’une forme inactive en une forme active ou inversement, ce pigment fut appelé : phytochrome. Rc P660 P730 Rs P660 absorbe dans le rouge avec un maximum d’absorption à 660 nm et se transforme en P730 forme physiologiquement active dont le maximum d’absorption est déplacé vers le rouge lointain. Pr = P660 = forme inactive du phytochrome Pfr = P730 = forme active du phytochrome IV–B2– Généralisation des résultats : Universalité du Phytochrome – Diversité des effets : Depuis ces premiers résultats de très nombreuses observations ont montré la généralité de la présence de phytochrome chez les plantes vasculaires et ont également permis d’observer la diversité de réponses physiologiques contrôlées par la lumière (rouge) : - Germination des semences Croissance des feuilles et des cotylédons (stimulée) Synthèse de pigments : flavonoïdes, chlorophylles Mouvements d’organes (photonasties chez le Mimosa pudica ou l’Albizzia julibrissin) Mouvements d’organites (chloroplastes chez l’algue verte Mougeotia) - Induction de la transcription de nombreux gènes et de la synthèse des protéines correspondantes. Croissance des tiges (inhibée) IV–B3 – Méthodes d’étude du phytochrome : Le pigment n’est jamais apparent, en raison de sa très faible concentration, même dans les germinations étiolées, où il n’est pourtant pas masqué par les chlorophylles. Historiquement différentes techniques ont été utilisées pour l’étude du phytochrome dont la spectrophotométrie in vivo qui mettait en jeu un spectrophotomètre différentiel mesurant des différences de densité optique entre 2 longueurs d’onde prédéterminées 660 à 730 nm sur du matériel végétal étiolé soumis à différentes irradiations ce qui donnait une estimation de la quantité de phytochrome réversible. La purification à partir de quantités importantes de matériel végétal (plusieurs Kg) selon des techniques de la biochimie des protéines (300mg de phytochrome à partir de 20 Kg de jeunes plantules étiolées de seigle). Ultérieurement des techniques de purification par immunoaffinité, plus rapides ont été mises au point. La biologie moléculaire a permis par la suite d’obtenir le gène du phytochrome et de plus grandes quantités de la protéine recombinante. IV–B4 – Structure du phytochrome : Il s’agit d’une chromoprotéine (association entre un groupement chromophore responsable de la coloration et une protéine) de couleur bleue (P660) ou bleu-vert (P730) selon la forme sous laquelle elle se trouve. Une telle modification de couleur peut être obtenue in vitro en irradiant une solution de phytochrome purifié. Le phytochrome est un dimère résultant de l’association de 2 monomères d’environ 120 KDa portant chacun une molécule de chromophore. La caractérisation au plan structural du chromophore est difficile car il représente une faible proportion de la molécule de phytochrome et est fortement associé à la protéine par des liaisons covalentes. Le chromophore présente des propriétés voisines de certaines biliprotéines et de la phycocyanine, pigment accessoire des algues bleues intervenant dans la photosynthèse. Il s’agit d’une structure tétrapyrrolique ouverte (fermée dans le cas de la chlorophylle). Différents modèles structuraux ont été proposés celui de Rüdiger et Corell (1969) est reporté sur la figure ( ) et fait intervenir des interactions avec la protéine au niveau d’un groupement propionyl et du groupement hydroxy-éthyle. Quand P660 est converti en P730 on assisterait à une élimination d’un proton du cycle 1 qui deviendrait alors chargé négativement mais pourrait être stabilisé par interaction avec la protéine. Le clonage et la caractérisation de l’ADNc correspondant au phytochrome ont permis de bien progresser dans la caractérisation structurale de la protéine. Chez l’avoine il s’agit d’une protéine de 1128 ac. aminés et d’une masse moléculaire de 125 Kda. La région N terminale de fixation du chromophore est très conservée et fait intervenir la cystéine en position 322 dans une interaction directe avec le phytochrome. La région C terminale est moins conservée elle est responsable de la dimérisation du phytochrome et est impliquée dans la transduction du message lumière. On trouve dans cette région C terminale un domaine présentant des similarités avec les histidines Kinases et un domaine « PAS » (per, arnt, sim) impliqué dans les interactions protéine- protéine dont la mutation entraîne la perte de l’activité biologique. IV–B5 - Photoréversibilité : Nous avons déjà vu que le phytochrome pouvait être converti d’une forme dans l’autre par action de lumière Rc ou Rs. La réaction ne nécessite pas de cofacteurs et la transformation peut être réalisée pour des éclairement très brefs de faible énergie. Il a pu être montré qu’après irradiation par la lumière rouge P660 disparaissait en un temps inférieur à 10⁻⁵ s et P730 apparaissait en 0,15 s (ce temps est considérablement plus long que celui nécessaire à l’excitation d’une mole de chlorophylle (inférieur à 10⁻⁹ seconde)). Ces résultats suggèrent qu’une réaction obscure lente fait donc suite à la phase photochimique de la phototransformation. HENDRICKS donne un schéma de la phototransformation (figure) qui fait apparaître l’existence d’intermédiaires entre les deux formes P660 et P730 (les deux formes les plus stables). On voit que le chromophore reste constamment lié à la protéine et que cette dernière change de configuration au cours de la transformation, à l’appui de cette dernière hypothèse, la sensibilité différente des deux formes vis-à-vis des agents dénaturants tels que : urée, les composés thiols, les protéases. La première action de la lumière rouge clair 660nm détermine la transformation en un premier intermédiaire (transformation qui dure quelques millionièmes de seconde). L’action s’arrête là si la température est < à110 °C (ces études ont été faites à de très basses températures dans le glycérol pour apprécier les différentes étapes intermédiaires. A ces basses températures la molécule peut être reconvertie dans sa forme initiale par action de la lumière. A des températures supérieures à 110 °C plusieurs formes intermédiaires apparaissent qui se différencient par leur maximum d’absorption avant l’apparition de la forme finale, P730. La lumière rouge lointain détermine la réaction inverse mais avec de nouveaux intermédiaires. Il existe donc deux types de réactions : photochimiques pouvant se produire à très basses températures, et sombres se réalisant à des températures plus élevées. Il faut environ trois ou quatre fois plus de quanta pour réaliser la réaction P730 P660 que la réaction inverse. Cette différence d’exigence quantique explique en partie que la lumière blanche puisse avoir les mêmes effets que la lumière rouge clair (elle est par ailleurs plus riche en longueur d’onde 660nm). Il faut signaler une analogie tout à fait remarquable entre ces transformations et celles intervenant dans le mécanisme de la vision. Dans ce cas le chromophore, le cis- rétinal, (aldéhyde de la vitamine A) est aussi associé à une protéine l’opsine pour former la rhodopsine. Quand le système est excité par la lumière il y a conversion du rétinal d’une forme cis en une forme trans puis transformation de la protéine avec une série d’intermédiaires à maximum d’absorption caractéristiques. Notion d’équilibre photostationnaire : Lorsque l’on irradie un végétal par de la lumière dont les proportions relatives en longueurs d’onde 660 nm et 730 nm sont différentes il s’établit ce que l’on définit comme un équilibre photostationnaire qui correspond au rapport P 730 / P total qui dépend des proportions de lumières rouge et rouge lointain et de la durée d’éclairement. La valeur de l’équilibre photostationnaire peut varier entre 0,8 et 0,02. IV–B6 –Propriétés du phytochrome « in vivo » : La synthèse du phytochrome et sa stabilité dépendent comme nous le verrons ultérieurement des types de phytochrome mais on peut signaler que le phytochrome voit un contrôle transcriptionnel de son propre gène s’exercer positivement par la lumière et négativement par le produit lui-même (la protéine). Conversion enzymatique P730 – P660 à l’obscurité : Dans les tissus étiolées ou dans les graines à l’obscurité on ne trouve généralement que du phytochrome P660. La forme P730 n’apparaît qu’après exposition à la lumière rouge clair. Si l’on suit l’évolution de la teneur en P730 après avoir replacé le végétal à l’obscurité elle diminue progressivement et parallèlement la proportion de P660 augmente. Cette reconversion dépend de la température (rapide à 27 °C, nulle à 3°) elle est sensible à la présence d’inhibiteurs, on pense qu’il s’agirait d’une transformation enzymatique. Localisation cellulaire : Le phytochrome est présent dans tous les organes de la plante et particulièrement dans les organes jeunes. Sa localisation cellulaire étudiée par différentes techniques (fractionnement cellulaire, immunocytochimie…) a conduit à proposer une localisation multiple : membranes, cytoplasme, noyaux, mitochondries…. Une observation intéressante plusieurs fois rapportée concerne la conversion d’un Pr soluble dans le cytoplasme en un Pfr lié aux membranes. Chez le coléoptile d’avoine un traitement par la lumière rouge conduit à un accroissement considérable de la quantité de phytochrome sédimentable (insoluble) de 5 à 60 %. La sédimentabilité du phytochrome induite par la lumière a été interprétée comme une interaction entre le phytochrome et un récepteur membranaire ce qui représenterait une étape initiale dans le mode d’action. Plus récemment on a montré que l’activation du phytochrome s’accompagnait d’une migration du photorécepteur du cytoplasme vers le noyau. Deux théories sont en présence pour rendre compte de l’action du phytochrome en réponse à la lumière. 1. le contrôle de la perméabilité cellulaire : Il existe, en effet, chez de nombreuses plantes des photoréponses physiologiques qui ne peuvent être expliquées par la théorie de l’activation des gènes parce qu’elles sont soit trop rapides (mouvements d’organes, mouvements d’organites, 1à 10 minutes) soit très étroitement associées aux membranes cellulaires. L’effet primaire du phytochrome pourrait alors s’expliquer par un « effet de membrane ». Le changement de forme du phytochrome son association aux membranes modifierait leur perméabilité ce qui pourrait se répercuter sur diverses fonctions de la cellule. 2. le contrôle de la transcription que nous allons détailler par la suite. IV–B7 – La multiplicité des phytochromes : Des observations initiales avaient montré qu’il n’y avait pas toujours de corrélations entre la teneur en Pfr mesurable par spectrophotométrie in vivo et l’intensité des réponses physiologiques. Le clonage des gènes de phytochrome chez différentes espèces : pois, avoine et surtout Arabidopsis a conduit à la mise en évidence de 5 gènes codant pour 5 apoprotéines différentes : PhyA à PhyE avec le même chromophore. Les homologies de séquence entre les gènes de ces différents phytochromes sont relativement faibles 50 à 90 %. Certains mutants affectés dans la voie de synthèse des tétrapyrroles linéaires (chromophore) manquent de l’ensemble de phytochrome : mutants hy1, d’autres que nous examinerons plus tard manquent de certains phytochromes spécifiques. Ces différences ont permis d’obtenir des anticorps spécifiques de chaque forme (en particulier anticorps monoclonaux) et de les quantifier dans différentes conditions. PHYA PHYB (valeur exprimée en ng/individu) Embryon de pois obscurité 0,2 0,05 Très jeunes plantules de pois lumière 0,01 0,05 Conclusion PHYA et PHYB coexistent : PHYA majoritaire à l’obscurité PHYA dégradé à la lumière PHYB stable à la lumière ou à l’obscurité. Les 5 phytochromes sont regroupés en 2 catégories en fonction - de leur expression dans les organes de leur stabilité après conversion de Pfr de certaines réponses spécifiques. Type 1 comprenant PhyA rapidement dégradé à la lumière Type 2 comprenant PhyB, PhyC, PhyD, PhyE Relativement stable à la lumière après conversion en Pfr. La dégradation de PhyA sous la forme Pfr est médiée par un système de protéolyse ubiquitine dépendant. Il s’agit d’un moyen de prévenir la « persistance » des effets de la lumière lorsque la plante est replacée en conditions d’obscurité. Ce mécanisme est commun à la signalisation hormonale ou intervient la notion de « vague hormonale » augmentation transitoire du taux d’hormones. Les mutants affectés dans la production de Phytochromes spécifiques : Les études ont surtout porté sur A. thaliana et mis en jeu 2 types de cribles - recherche de plantes présentant un phénotype étiolé à la lumière recherche de plantes « deétiolées » à l’obscurité 0. mutants (hy1, hy2, hy6) sans phytochromes mutés dans la chaine de synthèse de chromophore (phytochromes non fonctionnels) 1. mutants PhyA hypocotyle long sous FR mutants PhyB hypocotyle long sous R mutants PhyA chez la tomate (mutant aurea) PhyB est au même niveau 2. mutants dans la chaine de transduction : DET, COP, FUS présentent un phénotype lumière à l’obscurité, les gènes codent, en effet, pour des répresseurs. Il n’existe pas de mutants pour PhyC mais la surexpression du gène indique une implication dans le phénomène d’expansion des feuilles. Au-delà d’une sensibilité commune aux longueurs d’onde spécifiques du phytochrome ces différentes formes se distinguent par leur réponse à différentes quantités d’énergie. On parle de VLF très faible fluence LF faible fluence HIR radiation à forte intensité Nb de photons ≈1 1 à 1000 > à 1000 Si l’on considère par exemple l’inhibition de la croissance de l’hypocotyle il y aurait au moins trois niveaux de contrôle VLF LF HIR PhyA PhyB PhyA Cette 3ème réponse étant amplifiée par la formation de Pfr B. On peut donc conclure que les différentes réponses régulées par le phytochrome sont souvent dues à l’action combinée de différents phytochromes intervenant de façon redondante en synergie ou de façon antagoniste ce qui rend l’établissement d’un schéma de synthèse global extrêmement difficile. PhyA présente une propriété unique parmi les différents phytochromes, celle d’être activé, à la fois, par les radiations VLF et HIR. Les réponses à la lumière VLF impliquent par exemple l’expression de différents gènes, la germination des graines. Les réponses de type HIR comprennent par exemple l’inhibition de l’élongation de l’hypocotyle, l’expression des cotylédons, l’accumulation des anthocyanines. Le dogme central de la photoréversibilité (Pfr forme active) s’applique en fait essentiellement aux réponses LF médiée par PHYB-PHYE et aux réponses VLF médiée par PHYA. La localisation subcellulaire des phytochromes : Les premiers résultats ont abouti à un panorama assez confus, le phytochrome étant associé à différents compartiments cellulaires dont une localisation membranaire. Une percée intervient en 1996 quand des chercheurs japonais ayant fusionné la région C terminale de gène de Phytochrome B avec le gène GUS ont montré que la protéine de fusion était associée avec le noyau. Des expériences complémentaires ont démontré la translocation induite par la lumière rouge de Phy B du cytoplasme vers le noyau (Low fluence response) (translocation complète en à peu près 4h). Le même type d’expérience avec le gène de protéine GFP associé au gène de Phytochrome A a permis de montrer l’import nucléaire de PhyA sous l’action de VLF et HIR, les deux phytochromes majeurs présentent ainsi des localisations subcellulaires et des dynamiques de translocation qui dépendent fortement de la qualité et de la quantité de lumière. Il semble en revanche que les Phyto C à E sont constitutivement nucléaires. IV–B8 - Mécanismes d’action et chaîne de transduction du signal lumière : Le phytochrome est-il une protéine phosphorylée ? Il s’agit d’une question abondamment débatue. Le phytochrome de mousse : Ceratodon purpureus est codé par un gène codant pour une protéine de 145 Kd alors que le Phyto classique est une protéine de 120 Kda. On aurait fusion entre le phytochrome et un domaine de 300 aa avec des homologies substantielles avec des protéines kinases. Le phytochrome de ceratodon a une activité kinase et s’autophosphoryle. Hypothèse envisagée chez les plantes supérieures au cours de l’évolution on aurait assisté à la séparation des 2 systèmes. Chaque forme de phytochrome aurait sa propre kinase associée. Plus récemment on a pu montrer que des préparations purifiées de phytochrome A recombinant chez Saccharomyces cerevisiae possèdent une activité de phosphorylation dépendante de la lumière, cette activité Kinase a été trouvé intrinsèque du phytochrome et proposée comme étant parti du mécanisme d’action. Il s’agit d’une activité sérine/thréonine Kinase. La voie de transduction du phytochrome sous l’action de la lumière surtout connue pour PhyA comprend donc initialement la translocation de PhyA vers le noyau et l’activation de sa composante kinase. Le contrôle de l’expression génique par PHYA : L’utilisation de microarrays a permis de montrer que la lumière via PHYa contrôlait un très grand nombre de gènes. Les effets interviennent chronologiquement sur des gènes codant des facteurs de transcription et plus tardivement de gènes correspondant à des enzymes. On est donc dans un cas classique de cascade transcriptionelle avec des cibles primaires et des cibles secondaires indiquées sur la Figure. Le Phytochrome nucléaire qui possède une activité Kinase (sérine – thréonine Kinase) est capable de s’autophosphoryler et de phosphoryler différentes protéines substrats par exemple les « phytochromes interacting factor » comme PIF3 mais aussi d’autres protéines comme CRY1 et CRY2 dont nous parlerons plus tard, ainsi que des AUX/IAA protéines. Cependant la signification physiologique de ces interactions n’est pas encore très claire. PIF 3 est un régulateur transcriptionnel et le fait que le phytochrome puisse interagir avec PIF3 est un indice d’une activation relativement directe de la transcription. Il a été montré que PHYB pouvait spécifiquement et photoréversiblement se lier à PIF3 déjà associé à ses sites de liaison au niveau de l’ADN (la G box CACGTG sensible à la lumière). Les gènes portant ces Gbox codent des facteurs de transcription de type MYB (CCA 1, LH4) qui secondairement activeraient des cibles secondaires. L’intervention de la protéolyse dans la signalisation associée à PhyA : - PhyA sous sa forme Pfr est rapidement dégradé par un mécanisme ubiquitine dépendant. L’activation de PhyA entraîne également une diminution de la dégradation des facteurs de transcription en aval dans la chaîne de transduction comme HY5. La dégradation de HY5 à l’obscurité implique une protéine COP1 (un régulateur négatif de la photomorphogénèse) COP1 interagit à l’obscurité avec HY5 et l’oriente vers la dégradation via un processus médié par le protéasome. COP1 fonctionne vraisemblablement en tant qu’ubiquitine ligase. D’autres gènes (9) tels que COP9/DET/FUS fonctionnent comme des répresseurs de la photomorphogénèse. Des études réalisées avec une protéine de fusion COP1-GUS indiquent une réduction de l’abondance de COP1 à la lumière dans le noyau mais les mécanismes ne sont pas encore clairs. La lumière aurait donc un effet sur les photoréponses via la dégradation de molécules à effet répresseurs et l’activation de molécules à effets promoteurs. La transduction du signal lumière par le phytochrome : un exemple d’interactions complexes en réseau : Tout d’abord on doit souligner l’intervention de plusieurs compartiments cellulaires dans le processus. La base simplifiée du mécanisme implique la translocation de PHYA et PHYB vers le noyau et l’activation de différentes protéines pouvant réagir avec l’ADN et contrôler l’expression génique. Quels sont les mécanismes qui contrôlent l’intensité des réponses ? La vitesse de translocation vers le noyau Le fonctionnement des systèmes de dégradation protéolytique L’intensité de production de facteurs de transcription à effets promoteurs L’intervention de facteurs cytosoliques et chloroplastiques qui interagissent avec les voies de signalisation. En conclusion la signalisation liée aux Phytochromes en réponse à la lumière est extrêmement complexe et fait intervenir de multiples interactions entre facteurs protéiques y compris l’intervention d’autres photorécepteurs tels que les cryptochromes dont nous allons maintenant parler. IV–C- LES CRYPTOCHROMES : ⁺ Les réponses à la lumière bleue sont nombreuses chez les plantes on peut citer par exemple le phénomènes suivants : - Phototropisme Inhibition de l’élongation de l’hypocotyle Ouverture des stomates Production d’anthocyanes Expression de gènes spécifiquement régulés par la lumière bleue. - Certaines de ces réponses sont par ailleurs également induites par les phytochromes activés. L’inhibition de l’élongation des hypocotyles fait en effet intervenir 3 photorécepteurs : Phytochrome Cryptochrome photorécepteur sensible aux UVA Le photorécepteur cryptochrome n’a été caractérisé que tardivement, d’où le nom de cryptochrome « caché ». On supposait initialement qu’il s’agissait d’un caroténoïde en raison de la nature du spectre action. L’isolement du photorécepteur CRY1 chez Arabidopsis thaliana a été réalisé par les techniques de la génétique moléculaire. Des mutants à long hypocotyle sous lumière blanche ont été caractérisés. Parmi ces mutants on peut citer le mutant HY4 insensible à la lumière bleue caractérisé chez une collection de mutants taggés avec du TDNA chez Arabidopsis. Le gène muté identifié, a été appelé CRY1 et code une protéine de 681 acides aminés. Il s’agit d’une chromoprotéine de 75 Kd. Les 500 premiers acides aminés, extrémité N-terminale, montrent une forte homologie avec les photolyases de l’ADN de type 1 microbiennes, une classe de flavoprotéines qui catalysent la réparation lumière dépendante de dimères de pyrimidine de l’ADN endommagé par la lumière d’UV. Cependant CRY1 se distingue par une extension de 200 acides aminés au-delà de la région d’homologie. Le chromophore est une ptérine (méthényltétrahydrofolate) avec pour la chromoprotéine une absorption maximale à 450 nm. Le gène CRY1 est exprimé dans tous les tissus et la protéine, qui ne présente pas de domaines hydrophobes, n’a pas vraisemblablement de localisation membranaire mais une localisation nucléaire démontré grâce à une transformation génétique avec un gène codant pour une protéine de fusion avec GFP. La surexpression de CRY1 chez des plantes transgéniques entraîne une hypersensibilité à la lumière bleue dans le cadre de réponses du type élongation de l’hypocotyle et production d’anthocyanines. Un mutant HY4 dépourvu de cryptochrome ne présente plus ces réponses en conservant toutefois la réponse phototropique qui contrôlée par la lumière bleue n’implique donc pas le cryptochrome. - Les réponses contrôlées par CRY1 ne se produisent pas en l’absence de phytochrome (doubles mutants manquant de Phya et Phyb). L’expression des réponses à la lumière bleue (via CRY1) requiert donc les phytochromes dans la voie de signalisation. On a observé une multiplicité de formes de cryptochromes avec au moins 2 membres CRY1 et CRY2 sans doute en partie redondants. - Questions demeurant ouverte ? o comment un récepteur à la lumière bleue a-t-il pu évoluer à partir d’une enzyme de réparation de l’ADN o quelle est la modification moléculaire induite par la lumière au niveau du cryptochrome o quelle est la 1ère cible moléculaire de l’action du cryptochrome et la chaîne de transduction. Des résultats indiquent que le cryptochrome interagit avec d’autres protéines et que l’absorption de lumière bleue contrôlerait ces interactions. IV–D-LES PHOTOTROPINES : Comme nous l’avons dit un certain nombre de réponses physiologiques chez les plantes sont contrôlées par la lumière bleue indépendamment de l’intervention du cryptochrome. Ainsi ⁺ les hypocotyles se courbent vers la lumière pour maximiser la photosynthèse dans les cotylédons (phototropisme) ⁺ les chloroplastes - se déplacent vers la lumière pour la capture maximale de l’énergie - s’éloignent de trop fortes intensités lumineuses pour éviter les photodommages. les stomates ⁺ - s’ouvrent le jour pour passage des gaz se ferment la nuit pour éviter perte d’eau Dans ces différents contextes la lumière bleue est la plus efficace et les phototropines sont les récepteurs à la lumière bleue contrôlant ces mouvements. La phototropine est une protéine de 120 Kda soumise à phosphorylation dépendant de la lumière bleue. Elle a été découverte à la suite de l’étude de mutant Nph1 (non phototropic hypocotyl) ce qui a initialement permis de caractériser la phototropine 1 (Phot1). Ce gène code pour une protéine de 996 ac. aminés comprenant deux domaines LOV (caractéristiques des protéines régulées par la lumière, l’oxygène ou le voltage). La protéine se lie de façon non covalente à 2 flavines mononucléotide et comporte sur son extrémité C terminale une activité sérine / thréonine kinase. Deux phototropines ont été caractérisées phot1 et phot2. Des doubles mutants sont affectés dans l’ensemble des 3 fonctions contrôlées par la lumière bleue évoquées plus haut alors que le simple mutant pour Phot 1 ne l’est pas pour certaines réponses. Ce qui implique une redondance de fonctions. Transduction du signal lumière bleue via les phototropines : Phot 1 est localisé dans la membrane plasmique. Un élément de la chaîne de transduction est codé par le gène nph 4 qui correspond à un facteur de transcription de la famille ARF. On assiste donc à ce niveau à un cross-talk entre la lumière et l’auxine qui est également impliquée dans le phototropisme. D’autres voies de signalisation impliquent une augmentation des teneurs en Ca⁺⁺ par la lumière bleue démontrée par utilisation d’aequorine. Cette augmentation est très atténuée chez le mutant nph1 mais pas chez les mutants Cry1 et Cry2. La phototropine 1 pourrait catalyser la phosphorylation de transporteurs de Ca⁺⁺ au niveau de la membrane plasmique. Perspectives – Conclusion : Dans ce domaine des photorécepteurs « mineurs » la progression a été grandement facilitée par les études de génétique sur Arabidopsis mais la nature des photoréactions pour le cryptochrome n’est pas bien connue alors que dans le cas des phototropines elle est mieux appréciée. En effet, la lumière bleue semble faciliter via les phototropines la phosphorylation de différentes protéines de la membrane plasmique ce qui secondairement contrôle les mouvements d’ions et de molécules. Les protéines concernées sont potentiellement des ATPases, canaux calciques, transporteurs d’auxine. CHAPITRE V - LE DEVELOPPEMENT VEGETATIF A L’ECHELLE DE LA PLANTE ENTIERE A) Les corrélations de croissance B) La dormance des bourgeons Au-delà d’une approche à un niveau d’analyse cellulaire et moléculaire et d’observations réalisées au niveau de tissus ou d’organes spécifiques (coléoptiles, stomates, cellules d’aleurone) nous allons maintenant considérer des phénomènes plus globaux à l’échelle de la plante. La plante est « un tout » avec des interactions entre ses différentes parties dont le développement est fortement contrôlé par l’environnement, ce sont donc ces phénomènes intégrés avec des chaînes d’évènements complexes entre stimulus et réponse que nous allons aborder dans ce chapitre. Cette notion d’interactions en particulier entre organes peut être illustrée en comparant la situation représentée par un cal ensemble de cellules indifférenciées nécessitant la présence de nutriments et d’hormones pour se développer et une jeune plantule dont le schéma d’organisation résulte d’interactions entre tissus et organes de l’établissement de gradients hormonaux et de la perception et du « décodage » de signaux de l’environnement. V–A- LES CORRELATIONS DE CROISSANCE Les végétaux à la différence des animaux ont peu d’organes spécialisés (tiges, racines, feuilles pour l’appareil végétatif) et chacun de ces organes est particulièrement adapté à une fonction. La feuille est le siège de la photosynthèse, les racines sont le siège de l’absorption minérale. Il existe donc une complémentarité entre ces organes. Par ailleurs, les organes d’une plante s’ils sont peu nombreux sont présents pour chacun d’eux en un très grand nombre d’exemplaires. Entre organes de types variés et entre organes de même type s’établissent des relations réciproques à effets régulateurs (corrélations) qui vont intervenir dans le déterminisme de la taille de l’individu : aspect quantitatif, et le déterminisme de la forme de l’individu : aspect qualitatif. Nous allons prendre deux exemples : Les interactions entre système radiculaire et système aérien Les interactions entre bourgeons qui vont faire à la fois apparaître la nature trophique (concernant des éléments nutritifs) et hormonale de ces interactions. V–A1 – Interactions système radiculaire –système aérien : Elles s’illustrent par des observations très simples : Quand on taille un jeune arbre sévèrement au niveau de sa partie aérienne on constate après un certain temps que son système radiculaire est plus chétif que celui des arbres du même âge non taillés. Inversement, quand on maintient une plante dans un pot trop petit on empêche le libre développement des racines et cela retarde la croissance de la partie aérienne (Bonsaï : arbres nains japonais). RICHARDSON a apporté des preuves expérimentales objectives à l’appui de ces interactions en étudiant l’influence de l’intensité lumineuse sur la vitesse de croissance des racines chez Acer saccharinum. Une diminution de l’intensité de l’éclairement de 5000 à 200 lux provoque une douzaine d’heures plus tard un ralentissement très marqué de la croissance radiculaire. Le retour aux conditions premières ayant un effet inverse (figure). Ces interactions s’expriment essentiellement par une complémentarité dans la production des éléments indispensables à une bonne nutrition d’ensemble. La croissance des végétaux se réalise à l’interface de deux environnements le sol et l’air. Les racines et les parties aériennes exploitent ces 2 environnements au bénéfice du développement de la plante et dans les conditions naturelles la plante tend à réaliser un équilibre entre le développement de ces 2 systèmes en raison de leur rôle complémentaire (le rapport surface foliaire / surface des racines peut rester dans certains cas d’une grande stabilité). Nature des éléments échangés : 1. Eléments nutritifs : eau, sels minéraux (en provenance des racines) Photosynthétats, vitamines (produits par les feuilles) La thiamine, la pyridoxine, l’acide nicotinique sont des vitamines produites par les feuilles indispensables à la croissance des racines dont le développement « in vitro » est impossible en l’absence de vitamines. 2. Hormones en particulier auxine produite par l’apex caulinaire et cytokinines produites par les racines Exemple : une partie aérienne d’une plantule de tomate maintenue dans une solution nutritive équilibrée ne se développe que lorsque des racines adventives sont apparues. Ces dernières ont un effet même si elles apparaissent en dehors de la solution nutritive et n’ont alors aucun rôle de conduction d’éléments nutritifs. Les corrélations entre systèmes radiculaire et aérien proviennent donc d’échanges portant sur des aliments minéraux ou organiques et sur des éléments catalytiques (vitamines, cofacteurs, hormones). Applications pratiques - La greffe : opération qui consiste à réunir 2 végétaux par la mise en contact de leurs tissus dans des conditions permettant leur soudure au cours de la cicatrisation, c’est donc une symbiose entre 2 plantes dont l’une, le greffon, fournit l’appareil aérien, l’autre, le porte-greffe l’appareil souterrain. L’objectif est de propager un appareil aérien intéressant en profitant des qualités de vitesse de croissance, de robustesse, de résistance à des maladies du porte-greffe (vigne française greffée sur des pieds américains résistant au phylloxéra. V–A2 –Les corrélations entre bourgeons – la dominance apicale : La dominance apicale est l’exemple le mieux étudié des nombreuses corrélations de croissance qui ont leur siège dans la plante. Elle se manifeste sous l’influence du bourgeon terminal par l’inhibition de croissance des bourgeons latéraux. Il faut ici remarquer qu’une caractéristique du développement de nombreuses plantes réside dans la formation d’un nombre de méristème apicaux très largement supérieur au nombre de méristèmes se développant réellement (réserve de méristème – adaptation à valeur de survie pour remplacer l’apex éliminé par le vent ou les animaux). V–A2- a–Mise en évidence : Sur une jeune tige de Pois en croissance seul le méristème terminal est en activité, il engendre les feuilles et les entre-nœuds. A l’aisselle des feuilles l’évolution des méristèmes axillaires est imperceptible. Si on décapite l’extrémité d’une tige de Pois en enlevant le sommet de l’épicotyle, le bourgeon axillaire situé le plus près de la section et qui était alors inactif va se développer. Si on enlève ce nouveau rameau c’est le bourgeon immédiatement en dessous qui prendra le départ. La période de latence entre l’élimination du bourgeon terminal et les premiers changements au niveau du bourgeon en dessous est d’environ 6h. C’est donc l’extrémité en voie de croissance active qui maintient au repos les bourgeons situés au-dessous, on dit qu’il y a dominance apicale, ou encore inhibition corrélative. Il faut ici remarquer : 1. que le bourgeon terminal n’inhibe pas perpétuellement les bourgeons axillaires. Quand la tige principale a atteint une certaine longueur l’inhibition ne s’exerce plus ou s’exerce moins et les bourgeons de la base donnent quelques rameaux. 2. que la dominance apicale n’est pas générale chez toutes les plantes (forte chez le tournesol Helianthus anuus, faible chez la Tomate, inexistante chez des espèces à port buissonnant (Kochia trichophylla). 3. que la dominance apicale est en partie responsable du port des arbres. Si elle est faible toutes les branches se développent sensiblement de la même façon et on a un port en boule. Si elle est importante il existe une flèche comme chez certains conifères ou des feuillus comme le Peuplier. V–A2- b- Mécanisme de la dominance apicale : Il s’agit d’un problème complexe qui malgré de nombreuses recherches n’est pas encore à l’heure actuelle complètement élucidé. Deux types de théorie se sont initialement opposées : La théorie dite nutritive selon laquelle le bourgeon apical croît préférentiellement car il détourne à son profit les aliments venant des racines et des feuilles. Il serait privilégié car le premier formé et cela lui conférerait un avantage initial dans la compétition pour les composés nutritifs. La théorie hormonale selon laquelle il y aurait transmission d’un inhibiteur du bourgeon apical vers les axillaires. Chez Vicia Faba, l’AIA peut remplacer l’apex décapité. Ce phénomène a été retrouvé chez de nombreuses espèces. Il est suggéré que l’auxine pourrait être l’inhibiteur qui s’accumulerait dans les bourgeons axillaires et créerait une situation hyperauxinique. En fait les expériences récentes de dosage d’AIA montrent qu’on ne trouve que peu d’AIA dans les bourgeons axillaires, d’où explication abandonnée. Les 2 théories se sont maintenant rejointes et on pense que les 2 types d’influence trophiques et hormonales interviennent conjointement. Causes trophiques : 1. la dominance apicale s’exprime d’autant mieux que le milieu nutritif est pauvre, elle est levée sur sols riches en particulier en azote cas du lin – linum usitatissimum 2. l’étude de la répartition d’un métabolite marqué confirme le pouvoir attractif de l’apex (voir figure). 3. l’auxine peut sur un apex décapité reproduire en partie ce pouvoir attractif. Ceci donne lieu à une hypothèse sur l’action indirecte de l’auxine via un détournement des métabolites dont le mécanisme est inexpliqué (effet comp. au cytok.). Causes hormonales : Par ailleurs, d’autres types d’arguments sont en faveur d’interventions hormonales. Les apports exogènes d’hormones ou de composés perturbant le transport des hormones modifient les réponses observées. a) TIBA ou MORPHACTINES qui inhibent le transport de l’AIA entraînent 1 départ des bourgeons axillaires b) Apport d’AIA rétablit la dominance apicale. Les expériences d’hormones exogènes sont toujours critiquables mais une transformation génétique par le gène IaaH codant la tryptophane monooxygénase amplifie la dominance apicale. c) La benzyladénine appliquée sur bourgeons axillaires entraîne leur départ de croissance ainsi que la surexpression du gène IPT. Conclusions : 1. l’AIA constitue un signal transmissible vers les parties inférieures de la plante et n’agit pas uniquement au niveau de l’apex par détournement des métabolites. 2. les cytokinines sont impliquées dans la croissance des bourgeons axillaires. La condition de bourgeon inhibé semble liée a une déficience en cytokinines et initialement la levée de dominance apicale est liée à une reprise des mitoses sous l’action des cytokinines. Il est intéressant de noter la relation entre cet effet des cytokinines et les phénomènes de fasciation provoqués chez les plantes par corynebacterium fascians. Le symptôme de la maladie est une perte de dominance apicale qui se traduit par une prolifération de tiges pour donner ce que l’on appelle des balais de sorcière (chez le Saule par exemple). Le symptôme peut être reproduit par application de kinétine, ce qui suggère l’intervention des cytokinines dans ce phénomène. Ceci a d’ailleurs été confirmé par l’identification dans les extraits de la bactérie d’isopentényladénine. L’apex grâce à sa haute teneur en auxine mais aussi en cytokinines et gibberellines, car on a montré que l’apport de ces substances de croissance sur la tige sectionnée en présence d’AIA augmentait le maintien de la dominance apicale assurerait l’attraction de composés nutritifs et de composés hormonaux et en diffusant vers le bas l’AIA empêcherait les bourgeons latéraux de recevoir ou de synthétiser les substances hormonales sans lesquelles ils ne sauraient évoluer. Le phénomène est donc complexe impliquant plusieurs hormones et au-delà des interactions entre bourgeons, des interactions potentielles entre bourgeons et feuilles ou racines. On conçoit donc qu’une multitude d’équilibres puissent exister ce qui rend compte des divers degrés de dominance apicale selon les espèces et de l’évolution de l’intensité de la dominance apicale avec le développement chez une même espèce. Applications pratiques : Pincement : l’opération consiste à supprimer l’extrémité d’une jeune pousse herbacée en voie d’allongement, elle stoppe son expansion et provoque la naissance de nouvelles ramifications moins vigoureuses situées plus bas. Taille : même principe mais sur végétation au repos : taille formative, taille fruitière. Contrôle génétique de la dominance apicale chez la pomme de terre : Rosin et al, avril 2003. Les gènes à boîte MAD (Mads box genes) sont des gènes de type homéotique contrôlant de nombreux aspects du développement. Chez la pomme de terre, le gène POT M1 (pour potato Mads box 1 gene) est exprimé activement dans les tissus à croissance rapide, par exemple, dans les zones tunica et corpus des méristèmes caulinaires. La réduction d’activité de POT M1 (stratégie antisens) active la croissance du méristème axillaire avec un port ramifié de la plante (et surproduction de cytokinines). On observe chez ces plantes un phénotype similaire à celui de transformants qui surproduisent des cytokinines par introduction gène ipt. Ce rôle du gène POT M1 est encore hypothétique. POT M1 peut être impliqué dans la régulation de la balance de croissance entre méristèmes apicaux et axillaires. La suppression de POT M1 modifierait le rapport auxine/cytokinine en stimulant la production de cytokinines et en diversifiant les centres de croissance par un effet indirect sur mobilisation des nutriments. V – A – 2- c - Autres phénomènes influençant la forme, l’architecture des végétaux : Au-delà de la dominance apicale qui peut avoir un rôle important sur la forme des végétaux d’autres phénomènes peuvent chez certaines plantes jouer également un rôle. • • • Le gravimorphisme Les dormances inégales Les mouvements. V–B- LA DORMANCE DES BOURGEONS UN EXEMPLE DE PERIODICITE SAISONNIERE : Il existe une périodicité saisonnière très marquée de la croissance chez les plantes pérennes des zones tempérées. Habituellement les arbres cessent leur croissance dès la fin de l’été ou au début de l’automne (ils entrent en état de vie ralentie) ils la reprennent au printemps avec des températures plus favorables et des jours plus longs (reprise de la vie active). V–B- a- Notion de vie ralentie et de vie active L’exemple de vie ralentie fourni par les bourgeons des arbres pendant l’hiver va nous permettre de définir cet état comme un état physiologique normal et réversible qui se caractérise par une réduction des activités métaboliques et des échanges avec l’extérieur, cet état ne s’applique pas uniquement aux bourgeons mais est également caractéristiques des organes de dissémination et de conservation des espèces : graines, tubercules, bulbes. Pour les bourgeons et les graines qui sont les organes en vie ralentie les plus importants on peut noter des caractères communs : • • Faible teneur en eau Présence d’organes protecteurs (écailles des bourgeons, téguments des graines) Ces caractéristiques sont à la fois une cause de la réduction des activités métaboliques (pas d’eau, réduction des échanges gazeux) et en même temps constituent une adaptation aux conditions climatiques défavorables (froid en particulier). • Réserves pour permettre le démarrage du métabolisme lors du retour à la vie active. Pour les bourgeons les réserves sont localisées à distance dans les rayons ligneux du bois. Par opposition à la vie ralentie, la vie active est la période de retour aux activités métaboliques normales et à une croissance active. V–B– b- Les deux types de vie ralentie : Le repos imposé ou quiescence – cet état de vie ralentie se caractérise par un retour immédiat à la vie active dès que les conditions favorables sont réalisées. C’est le cas général de tous les organes qui n’ont pas de croissance active en raison des températures trop basses de l’hiver mais qui dès que la température s’élève commencent à croître (la sécheresse, le manque d’oxygène peuvent aussi empêcher la croissance). Dans ce type de repos imposé on peut également inclure le cas des bourgeons axillaires soumis à des inhibitions corrélatives et qui reprennent leur croissance dès que l’apex dominant est supprimé. La dormance : Le deuxième type de vie ralentie est plus complexe il s’agit de l’état de dormance. Un organe dormant placé dans des conditions favorables de croissance n’évolue pas. Les causes de la vie ralentie ne sont plus à rechercher dans les conditions de l’environnement mais dans l’organe lui-même. La dormance est définie comme une inaptitude interne au retour à la vie active (un bourgeon dormant ne pourra éclore même si ses voisins sont supprimés et s’il est placé dans une serre convenablement climatisée). (une graine dormante ne germera pas même si les conditions de température, humidité sont tout à fait favorables). La dormance comme nous le verrons est cependant réversible. Dans le cadre de cette étude de la périodicité de la croissance nous allons développer ici le problème de la dormance des bourgeons. Nous examinerons le problème de la dormance des graines lors de l’étude de la physiologie de la germination. V–B– c- La dormance des bourgeons : La dormance des bourgeons est essentiellement une caractéristique des espèces ligneuses des régions tempérées. De nombreuses espèces herbacées par exemple croissent chaque fois que la température le permet et sont donc dépourvues de dormance. Ainsi des espèces vivaces des prairies croissent pendant l’hiver ne cessant leur croissance que si la température est inférieure à 5° C. Parmi les plantes ligneuses certaines comme la Bruyère Calluna vulgaris sont dans le même cas et leur allongement reprend en hiver dès qu’il ne fait pas trop froid. Parmi les arbres l’Eucalyptus est un exemple d’espèce n’entrant pas en dormance. Alors que c’est l’approche de l’hiver qui induit le plus souvent la dormance dans les zones tempérées, dans les régions chaudes les fortes sécheresses peuvent également induire l’entrée en dormance. V–B– c-1- Signification biologique de la dormance en relation avec l’adaptation aux conditions de vie défavorables : Pour survivre dans un environnement variable et souvent hostile la plante organisme immobile si elle interrompt ses activités physiologiques dans des conditions défavorables doit se préparer à l’avance pour survivre à ces conditions défavorables. Exemples : Des géraniums laissés au froid meurent car ils n’ont pas de bourgeons dormants. En revanche, un arbuste ou un arbre un Marronnier par exemple se prépare à la mauvaise saison en développant des bourgeons dormants protégés de différentes manières du monde extérieur. Adaptations : A l’intérieur du bourgeon – présence de matériel cotonneux isolant provenant d’une modification des feuilles du bourgeon donnant des sortes de poils qui entourent le point végétatif. A la place des feuilles produites au niveau des nœuds, formation d’écailles protectrices ; qui s’assemblent pour donner une protection particulièrement efficace. De plus, les écailles sont couvertes par une sécrétion visqueuse qui rend le bourgeon imperméable : le propolis. Anticipation : Pour que ces adaptations morphologiques contre la mauvaise saison soient efficaces il faut qu’elles soient mises en place avant l’arrivée du froid, la plante a donc du développer des systèmes permettant de prévoir et d’anticiper sur l’approche de la période défavorable. Durée : Une autre caractéristique importante de la dormance réside dans la durée du phénomène lorsqu’il est installé. Une durée suffisante (quelques mois) est en effet nécessaire pour que la finalité de protection du processus soit atteinte. V–B– c-2- L’entrée en dormance : Causes internes, les entrées en dormance autonomes : Chez de nombreuses espèces l’entrée en dormance est « autonome ». Le Lilas débourre fin mars et son allongement cesse obligatoirement en mai juin quelles que soient les conditions de culture (température, longueur du jour). De nombreux arbres en particulier les arbres âgés ont également une période de croissance relativement brève 1 à 2 mois pendant laquelle se fait l’allongement et le grandissement des feuilles. L’arrêt de croissance dont on ne connaît pas le déterminisme (épuisement des métabolites, équilibres hormonaux) est ensuite suivi par un état de dormance caractéristique. Généralement une entrée en dormance par année. Un cas plus complexe est celui du Chêne dont les bourgeons éclosent en avril, évoluent durant 2 à 3 semaines puis passent par une période de repos (formation d’écailles sur le bourgeon apical). Un deuxième éveil à lieu en juin qui donne naissance à de nouvelles pousses (pousses de la St Jean). Puis, après cette période de croissance on assiste à une nouvelle entrée en vie ralentie suivie d’un nouveau départ en août (pousses d’août). Ainsi le bourgeon terminal se recouvre d’écailles 2 à 3 fois au cours de la période de végétation à des moments où les conditions externes sont très différentes. De plus, maintenus en chambre climatisée dans des conditions constantes de jeunes chênes présentent de la même manière des vagues successives de croissance. En revanche, les racines croissent dans les mêmes conditions de manière continue. Ces arrêts de croissance des bourgeons attribués initialement à des phénomènes de dormance sont en fait dus à des phénomènes d’inhibition corrélative exercés par les jeunes limbes dont l’ablation supprime le phénomène, les limbes devenant plus grands, leur pouvoir inhibiteur diminue. En septembre en revanche on assiste à une entrée en dormance typique des bourgeons. Causes externes : A ces entrées en dormance autonomes on peut opposer celles qui sont étroitement liées à une variation d’un facteur du milieu. La durée des jours : des expériences très précises portant sur diverses espèces ont démontré en chambre climatisée ou au champ que l’allongement des nuits induit l’arrêt de croissance et la formation d’un bourgeon terminal écailleux qui devient dormant (Robinia pseudoacacia – Populus sp. – Larix decidua – Salix repens, ce dernier maintenu au tiède en jours longs pousse indéfiniment). Donc dans les zones tempérées où l’approche de l’hiver est annoncé par une diminution de la longueur des jours, la préparation à l’état de dormance résulte de la perception d’un changement de photopériode. La dormance peut selon les espèces être induites (Populus), accélérée (Acer) ou non contrôlée (Malus) par la photopériode. Autres facteurs dont l’efficacité a été démontrées : ª La sécheresse ª Le refroidissement des nuits V–B– c-3- La levée de dormance : Le principal facteur du milieu efficace dans la nature est le froid. Les températures les plus efficaces se situent entre 3 et 7 °C et la période de froid requise varie selon les espèces de 250 à 1500 heures (dormance plus ou moins forte). Il est surprenant de noter que le facteur contre lequel les plantes cherchent à lutter en se mettant en état de dormance soit celui-là même qui permet la levée de la dormance. L’hiver n’est donc pas un simple inhibiteur de croissance, il a un rôle positif. Il est nécessaire au développement des végétaux. Vous verrez qu’il est également indispensable pour préparer certaines floraisons (vernalisation). La plante a donc mis au point des systèmes qui lui permettent de mesurer l’intensité et la quantité du froid nécessaire à la levée de dormance. On doit remarquer que chez la plupart des espèces la dormance est levée par le froid bien avant que la croissance reprenne dans les conditions naturelles, en raison même des températures trop basses qui maintiennent la plante en état de repos imposé (mais ces espèces placées en conditions favorables en salles conditionnées verraient leur croissance reprendre immédiatement). Autres facteurs naturels : Jours longs : chez certaines espèces comme le Bouleau, le Hêtre, le transfert en jours longs élimine la dormance des bourgeons alors que l’influence de la température est nulle. Les bourgeons perçoivent ici eux-mêmes le stimulus lumineux. Sécheresse : à la suite d’un automne particulièrement sec, certains arbres peuvent débourrer après une forte pluie. Substances chimiques et hormones : les vapeurs d’éther de monochlorydrine du glycol (CH₂Cl- CH₂OH) peuvent se substituer aux facteurs du milieu. Leur effet est strictement local (forçage du Lilas). On aboutit ainsi à l’idée qu’un phénomène identique peut être induit ou au contraire supprimé par différents facteurs. V–B– c-4- Contrôle hormonal de la dormance : Les preuves expérimentales de l’intervention des hormones dans la dormance peuvent être groupées en 3 catégories : 1- observations indiquant qu’un stimulus transmissible est impliqué dans l’entrée ou la levée de dormance 2- variations des taux de certaines hormones au cours des phénomènes d’entrée en dormance et de levée de dormance. 3- Effets d’hormones exogènes sur l’entrée et la levée de dormance. En ce qui concerne le premier type de preuve nous avons vu que la dormance pouvait être provoquée par les jours courts chez de nombreuses espèces ligneuses, ce sont les feuilles qui perçoivent le stimulus lumineux. Il y aurait soit une production d’une substance au niveau des feuilles qui serait transmises vers les bourgeons soit l’arrêt de production d’une substance (voir : Expériences sur Cornus florida). 2ème type de preuve : de nombreux résultats ont montré une augmentation des taux d’inhibiteurs de croissance (ABA) avec l’entrée en dormance et corrélativement une diminution des gibberellines. A l’opposé lors de la levée de dormance on constate un enrichissement progressif des teneurs en gibberellines (chez Acer pseudoplatanus au cours de l’hiver) et une diminution de l’ABA. 3ème type de preuve : Apports d’ABA exogènes induisent la dormance des bourgeons chez Betula pubescens, Ribes nigrum, Salix. Apports de GA 3 lèvent la dormance chez certaines espèces par exemple : le Pêcher, le Bouleau. Des apports simultanés des deux hormones montrent que les effets dépendent de leurs proportions relatives. Ces expériences sont donc en faveur de l’hypothèse selon laquelle la dormance des bourgeons serait régulée par une interaction entre hormones stimulatrices et inhibitrices dans les conditions naturelles. Caractéristiques cytologiques et métaboliques de l’état de dormance : Dormance et arrêt des cycles en phase G₀-₁ : 95 % des noyaux des bourgeons dormants de peupliers sont bloqués dans une phase particulière du cycle cellulaire, appelée G₀-₁, déjà rapportée par de nombreux auteurs pour des situations d’arrêt de croissance, telles que celles observées dans des graines et des bourgeons. D’après CLOWES (1967), les cellules en G₁ sont les plus aptes à préserver l’intégrité de leur ADN et les plus susceptibles de reprendre une activité mitotique après une phase de quiescence. La dormance est un état pour lequel les activités métaboliques sont ralenties d’une manière générale, des expériences classiques de TUAN et BONNER en 1964 ont montré plus précisément que la dormance correspondait à un état de répression généralisée du génome. Ces auteurs ont extrait la chromatine de bourgeons dormants et de bourgeons en activité et fait agir cette chromatine in vitro sur un ensemble de nucléotides et de cofacteurs nécessaires à la synthèse d’ARN en présence d’ARN polymérase on obtient les résultats suivants : Synthèse ARN Bourgeons non dormants Bourgeons dormants + ̴0 Ce type de résultat a été confirmé par un groupe de français COUDUROUX (ClermontFerrand) qui a réalisé des mesures de l’intensité de transcription in situ (incorporation d’adénosine ¹⁴C) sur des tubercules de Topinambour soit dormants soit après traitement par l’acide gibberellique ou par le froid. V–B– c-5- Variabilité de la profondeur des dormances : Le génotype a une grande influence sur la dormance. On le montre en cultivant différentes variétés d’une même espèce dans les mêmes conditions de milieu. Ce fait a des incidences pratiques : planter des pommiers dont la dormance exige trop de froid pour être levée sous un climat à hivers trop doux perturbe fortement leur ramification et leur production. Planter des conifères qui entrent en dormance tardivement dans une région à gelées précoces est une erreur irrémédiable. Dans les régions tropicales ou équatoriales où les facteurs T° et lumière varient peu on considère que quelques plantes ont une croissance continue mais la plupart des plantes ont des phases de vie ralentie. En effet, on constate pour de nombreuses plantes des croissance rythmique (anglo saxon – type flush) analogue à celle du chêne. Il s’agit de causes internes mal élucidées. En outre, pour certains arbres on a sur un même individu des bourgeons dormants et non dormants. Cas des espèces des zones tempérées transférées dans des zones chaudes : le Hêtre planté à Java continue à perdre ses feuilles périodiquement une fois par an à une époque quelconque de l’année. Plusieurs hêtres poussant dans une même localité ne perdent pas forcément leurs feuilles en même temps en l’absence du mécanisme régulateur que constitue le cycle des saisons. Les périodicités biologiques résultent donc au moins dans certains cas de la conjonction de fluctuations endogènes et de variations cycliques du milieu. En conclusion la périodicité de croissance des végétaux pérennes qui se caractérise par des périodes de vie ralentie associées à la dormance est directement liée à des facteurs saisonniers : longueur des jours, froid hivernal. Ces facteurs au-delà de leurs effets trophiques, agissent en tant que signaux perçus par la plante et transformés en information utilisable par le biais de modifications du taux d’hormones. Facteurs saisonniers niveaux hormonaux état de répression du génome Le lien entre facteurs climatiques et teneurs en hormones n’est pas encore clair. En fait, les phénomènes sont souvent encore plus complexes impliquant des facteurs génétiques relatifs à l’intensité des dormances (durée), l’influence des facteurs du milieu, l’existence de corrélations entre organes et de rythmes internes. CHAPITRE VI : LES PRINCIPALES ETAPES DU CYCLE DE DEVELOPPEMENT VI – A – PHYSIOLOGIE DE LA GERMINATION : La multiplication végétative et la multiplication sexuée : La germination que nous allons approfondir dans ce chapitre est associée à un des moyens mis en jeu par les végétaux pour assurer leur propagation : la multiplication sexuée qui comprend séquentiellement la formation de fleurs, de gamètes, la fécondation, la formation de graines et la germination. Parallèlement les végétaux peuvent se reproduire par l’intervention de la multiplication végétative, c'est-à-dire le développement d’un nouvel individu autonome à partir d’une portion d’appareil végétatif de la plante mère. Cette deuxième voie de propagation des végétaux se rencontre chez différentes formes végétales dont les plus évoluées (monocotylédones par exemple) et est beaucoup plus développée que chez les animaux où elle intervient seulement chez des espèces inférieures (vers, spongiaires…). Chez les végétaux la multiplication végétative est soit naturelle soit se fait par l’intervention humaine. Cette multiplication végétative a une grande importance en horticulture et agriculture. La multiplication végétative naturelle : On peut distinguer la fragmentation pure et simple de l’intervention de mécanismes spécialisés. - Fragmentation : Chez les végétaux qui ont une ramification abondante de leurs axes aériens ou souterrains au niveau du sol, on peut constater une différenciation de ces axes (enracinement des parties aériennes par exemple) suivie d’une séparation ultérieure. De nombreuses graminées (chiendent) forment des racines à partir des axes aériens. Iris, Sceau de Salomon, Bambou produisent des tiges feuillées à partir d’organes souterrains ex : rhizomes - Intervention d’organes spécialisés : Stolons : (Fraises – Ronces) tiges grêles horizontales susceptibles d’enracinement. Drageons : Peuplier, racines horizontales susceptibles de bourgeonner. Bulbilles : Bourgeons charnus en vie ralentie capables de repasser rapidement en vie active (lieu de formation variable), à l’aisselle des feuilles : Ranunculus ficaria, sur le limbe foliaire : Bryophyllum et de donner un individu autonome. La multiplication végétative artificielle : La multiplication végétative artificielle est pratiquée par l’homme en mettant en jeu diverses techniques pour répondre aux motivations suivantes : - Multiplication d’espèces dont la reproduction sexuée est impossible. Espèces qui ne fructifient par en dehors de leur climat d’origine (espèces exotiques en climat tempéré). Espèces dioïques ou 1 seul sexe a été implanté (élodée). Espèces dont on a sélectionnée des variétés sans graines ou dont la constitution génétique interdit la multiplication sexuelle : bananier. Accélération de la production (exemple de la pomme de terre : graines – 4 ans, tubercule – 1 an). La multiplication végétative accélère le cycle de développement par rapport au semis (palmier dattier). Maintien de la constitution génétique et obtention d’un clone dans le cas de plante à propriétés intéressantes. Les techniques utilisées sont classiques le bouturage (Peuplier, Vigne, Hortensia), le marcottage, la greffe. Des régulateurs de croissance sont utilisés pour faciliter la rhizogénèse dans le cas du bouturage, ce sont des composés auxiniques aux noms évocateurs : exubérone, rootone. VI-A1- Introduction – Problème de terminologie concernant la germination : Plusieurs aspects de la germination se révèlent particulièrement intéressants. Pour la plante il s’agit d’une étape très importante du cycle de développement, c’est le départ d’une nouvelle vie, la perpétuation de l’espèce. Pour le chercheur il s’agit d’une transition vie ralentie vers vie active facile à étudier sur le plan métabolique et biochimique. Pour l’économie, les graines sont à la fois un élément de compétition économique (industrie des semences) et ont une grande importance dans l’alimentation de l’homme et des animaux. Le contrôle de la germination est un élément essentiel de l’obtention des plantes cultivées en Agriculture. Quelques problèmes de termes : la graine est un élément caractéristique des spermaphytes (plantes à graines : angiospermes, gymnospermes) qui assure la propagation des espèces. Le terme graine a une signification botanique bien précise. Il s’agit de l’organe résultant de la double fécondation de l’ovule, contenant l’embryon, un tissu de réserve et des téguments. La propagation des espèces n’est cependant pas assurée par des graines uniquement, on parle plus généralement de semences : il s’agit de l’organe ou de la partie de l’organe que l’on sème : graine le plus souvent mais aussi fruit (le caryopse est un fruit), groupe de graines ou de fruits (betterave). Par extension, le terme de semences concerne les tubercules (de pomme de terre) ou les bulbes. Germination : Processus physiologique qui permet à l’embryon contenu dans la graine de donner une jeune plantule. - Conception courante : la germination recouvre la séquence des événements allant de la graine au repos jusqu’à l’obtention d’une plantule autotrophe (viable). - Conception des physiologistes : la germination commence avec l’imbibition de la graine et finit avec la percée des téguments par la radicule ou par l’hypocotyle s’il sort le premier, les étapes ultérieures étant des étapes de croissance. D’une manière générale la séquence d’événements intervenant est la suivante : 1. imbibition des éléments vivants déshydratés et gonflement de la graine. 2. démarrage de la digestion des réserves. 3. grandissement des cellules de la radicule déjà formée dans l’embryon puis prolifération des cellules du méristème radiculaire. 4. éclatement des téguments et sortie de la radicule. 5. développement de la partie aérienne et libération des téguments VI-A2- Conditions de formation et viabilité des graines : La double fécondation caractéristique des Angiospermes (voir par ailleurs rappel sur l’anatomie et la cytologie des tissus concernés) conduit à la formation de la graine. L’œuf principal donnant l’embryon avec des ébauches de gemmule et de radicule, l’œuf accessoire (initialement triploïde et syncitial mais redevenant rapidement diploïde) aboutissant à la formation de l’albumen ou tissu de réserve. Les téguments de l’ovule donnent pour leur part les téguments de la graine alors que la paroi de l’ovaire donne la chair du fruit. On distingue généralement : - Les graines à albumen (céréales) Les graines à cotylédon (légumineuses) pour lesquelles les cotylédons ont digéré l’albumen Les graines à périspermes peu nombreuses (caféier) dans lesquelles le nucelle tissu entourant l’ovule persiste. La maturation des semences se produit généralement sur la plante mère associée à une déshydratation très poussée (les graines ne renferment que 10 % d’eau) ce qui entraîne leur entrée en vie ralentie. Les graines sont maintenues dans les fruits au niveau de la plante mère ou rapidement dispersées par déhiscence des siliques par exemple. Un niveau important de l’amélioration des plantes cultivées a porté sur le blocage de cette dispersion spontanée afin de préserver la récolte sur pied. Les graines sont très variables dans leurs dimensions, une des plus volumineuses est celle d’une variété de Palmier (Lodoicea maldivica) qui se forme pendant environ 7 ans et pèse environ 10 kg. D’autres graines sont de véritables poussières (Orchidées) ou sont de très petite taille sans relation avec la taille finale de l’individu (Carotte, tabac). En résumé, une graine est toujours fondamentalement constituée d’un embryon élément essentiel, d’un tissu de réserve à rôle nourricier et d’enveloppes (téguments ou autre : péricarpe). Le problème des réserves sera développé ultérieurement mais on peut dire que l’on connaît très mal la façon dont les éléments nutritifs sont transportés des organes assimilateurs : feuilles vers les organes de réserves, comme les graines, ceci rejoint le problème dont je vous ai déjà parlé de la distribution des assimilats. Il est évident qu’il est intéressant de mieux connaître ces phénomènes pour mieux les orienter. Ce qui est assez remarquable c’est que l’information génétique pour certaines protéines ne va pas s’exprimer que dans les tissus de la graine ou vont s’accumuler un nombre très limité de protéines dont la synthèse est très active pendant un temps très court (exemple globuline) . La déshydratation et la nature des téguments souvent durs, sclérifiés, résistants et imperméables peuvent conférer aux graines une résistance tout à fait remarquable aux conditions défavorables : froid – chaud (des semences sèches peuvent survivre après avoir été plongées dans azote liquide vers -180 °C). La viabilité des semences varie selon les espèces. Elle dépasse souvent 15 ans et peut atteindre une centaine d’années (graines viables retrouvées dans les herbiers). Exemples de viabilité : Mimosa glomerata 221 ans Lupinus articus 10 000 ans à l’état gelé dans le Yukon. A l’opposé certaines graines ont une viabilité limitée comme le Peuplier ou Acer saccharinum et meurent en quelques semaines à la T° ambiante (les basses T°, l’atmosphère sèche prolongent la survie). La péroxydation et l’oxydation des acides gras insaturés des lipides provoquent des radicaux libres hautement réactifs, des hydroperoxydes, et des produits secondaires qui accélèrent le vieillissement via des dégâts causés aux membranes, aux enzymes et à la chromatine. VI-A3- Aspects biochimiques de la germination - Caractéristiques biochimiques des graines, Nature biochimique des réserves : Ces réserves ont une grande importance car elles assurent l’alimentation du jeune embryon en cours de germination ce qui lui permet d’atteindre l’autotrophie. Même dans de petites graines comme celles de Laitue (Lactuca sativa) pesant seulement quelques mg les réserves peuvent autoriser la croissance de l’embryon pendant plusieurs jours. Chez des graines comme la fève pesant jusqu’à 1 g les réserves sont suffisantes pour plusieurs semaines. Ces réserves concentrées à un niveau jamais atteint dans les autres parties de la plante sont également importantes pour la nutrition de l’homme et des animaux. Les céréales sont une des bases de l’alimentation humaine. D’autres graines : Tournesol, Colza, Soja, Sorgho, Féverole, Pois, Haricot ont un rôle économique important. On peut rappeler l’impact provoqué il y a une vingtaine d’années par l’arrêt des exportations de Soja par les USA (alimentation des animaux). Parmi les graines celles contenant une forte proportion de protéines sont particulièrement recherchées et actuellement on cherche à réduire notre dépendance par rapport à l’importation de semences protéagineuses par le développement en France d’espèces comme le pois protéagineux, la fèverole dont les graines sont riches en protéines. Les protéines : On définit 4 groupes de protéines basée sur des différences de solubilité ce qui représente une définition opérationnelle. - Albumine : hydrosolubles Globulines : solubles dans des solutions salines Glutélines : solubles dans des acides ou bases faibles Prolamines : solubles dans alcool Les céréales contiennent des prolamines : zéine (maïs), hordéine (orge) des glutélines : gluténines du blé qui interviennent en donnant une structure au pain. Les légumineuses contiennent des globulines : légumine, viciline. Ces protéines sont stockées dans ce qu’on appelle des corps protéiques, (appellation ancienne grains d’aleurones) généralement répartis dans tout l’organe de réserves, ou concentrés à la périphérie de la graine chez les céréales par exemple (couche de cellules à aleurone). Ce sont des organelles cellulaires bordés par une membrane qui proviendraient de la transformation de vacuoles avec déshydratation. Ces corps protéiques ont un diamètre de 0,1 à 25 µ. Ils ont une structure variable avec ou sans inclusions (globoïde et cristalloïde) La composition moyenne des corps protéines est la suivante : Protéines : 70-80 % Phytine : 10 % Enzymes : Protéase, Phosphatases, glycosidases, ribonucléases. La principale forme de réserve de phosphate dans les grains de céréales et les graines oléagineuses est constituée par l’acide phytique (myo-inositol hexa phosphate). Le phosphate de l’acide phytique peut constituer jusqu’à 90 % du phosphate total de la graine, dans le cas du maïs notamment. L’acide phytique forme de plus un sel complexe de K, Mg, Ca, Zn, et Fe appelé phytine et qui représente une réserve importante de minéraux dans la graine. Pour permettre l’utilisation du phosphate et des cations minéraux contenus dans la phytine, celle-ci doit être hydrolysée par des phosphatases spécifiques appelées phytases. L’activité phytase est généralement très faible dans les graines en cours de maturation ou dans les graines sèches. Cette activité augmente considérablement en début de germination. En alimentation animale, la phytine contenue dans les graines utilisées pour la nutrition des animaux monogastriques est considérée comme l’un des principaux facteurs limitants de la valeur nutritive des graines. En effet, la phytine des graines ne contenant pas de phytase à l’état sec (ce qui est le cas du maïs) n’est pas digérée dans le tube digestif de ces animaux et elles est rejetée intacte dans les excréments, causant de graves problèmes d’eutrophisation des eaux dans les régions d’élevage intensif. En l’absence d’hydrolyse de la phytine, les minéraux fortement chelatés sont de plus inutilisables par l’animal, d’où la nécessité paradoxale d’ajouter du phosphate inorganique et des cations minéraux aux aliments à base de graines dépourvues de phytase, bien que ces graines possèdent déjà des teneurs élevées en ces éléments. La présence dans les grains secs de maïs d’une phytase endogène (comme cela est le cas pour le blé dont le son possède une activité phytase élevée), serait particulièrement intéressante. De nombreux travaux ont envisagé le transfert par génie génétique des gènes de phytase fongique ou végétale associés à des promoteurs graines spécifiques et plus particulièrement spécifiques de compartiments de la graine qui ne contiennent pas de phytine (cas de l’albumen chez le maïs). Une phytase « latente » serait alors mise au contact de la phytine au cours des phases de mastication et de prédigestion (par décompartimentation) et devrait permettre d’améliorer la qualité nutritive des grains et de diminuer les pollutions liées à l’excrétion de la phytine non digérée par les animaux. Les glucides : L’amidon constitue la forme principale des réserves glucidiques, notamment chez les Graminées dont il forme presque tout l’albumen. Il représente le composé glucidique le plus important de notre régime alimentaire. Les hémicelluloses constituent les albumens cornés ou indurés type datte (polymères de pentoses et hexoses). Les sucres solubles sont en petites quantités dans la graine au repos (saccharose chez l’Amande ou le Ricin). Les lipides : Si la notion de réserve des graines est souvent associée aux glucides en raison de leur rôle dans l’alimentation humaine, ce sont les lipides qui constituent la forme de réserve la plus répandue, dans 9/10 des plantes. La plus grande partie de ces réserves est constitué d’ester, de glycérol et d’acides oléique et palmitique, présents en gouttelettes de différentes tailles appelées oléosomes. Phénomènes biochimiques de la germination : Le premier phénomène réside dans une inhibition de la graine c'est-à-dire une phase d’hydratation du protoplasme qui amène la teneur en eau à environ 50 à 60 % du poids frais. Cette phase d’hydratation permet la reprise des activités métaboliques qui se manifeste très rapidement dès le début de l’inhibition. La synthèse de nucléotides est détectable 15 minutes après le début de l’imbibition chez la graine de laitue. Cette reprise d’activités métaboliques est liée à l’augmentation du niveau d’activité de certaines enzymes. A) Les enzymes d’hydrolyse des réserves qui vont donner les métabolites nécessaires à la synthèse des constituants des nouvelles cellules ou utilisés comme substrats respiratoires. Nous avons déjà parlé de ces phénomènes à propos de l’action des gibberellines sur la germination de l’Orge. Il est à noter que chaque catégorie de graines possède des enzymes en relation avec son contenu en réserve (voir tableau). Réserves amylacées : amylase, maltase, phosphorylase amidon + P1 glucose 1 phosphate Réserves lipidiques : Les triglycérides sont d’abord hydrolysés par des lipases qui donnent du glycérol et des acides gras. Les acides gras sont ensuite oxydés en acétyl CoA puis transformés en glucides par le cycle glyoxylique ou intégrés dans le cycle de KREBS. Réserves protéiques Protéases peptides, ac. aminés utilisés dans la synthèse protéique ou intégrés dans le cycle de KREBS après transamination. B) Les enzymes du cycle respiratoire qui vont fournir de l’ATP à partir de substrats libérés par les enzymes d’hydrolyse. L’intensité respiratoire s’accroît très fortement au cours des premiers stades de la germination et s’accompagne parfois d’un dégagement de chaleur. Mode de formation de ces enzymes : Soit ces enzymes sont déjà présentes dans la graine et l’inhibition et la réhydratation des tissus permet leur activité (cas d’enzymes de la respiration). Soit encore on peut assister à une activation d’enzymes préexistantes sous une forme inactive (action de protéases par exemple). Cependant dans le cas le plus fréquent les enzymes sont synthétisées « de novo » dès le début de la germination. Dans cette synthèse d’enzymes deux mécanismes ont été mis en évidence qui peuvent d’ailleurs intervenir séquentiellement. Stimulation de la transcription avec synthèse de nouveaux mRNA (cf amylase chez l’Orge). ¾ Stimulation de la traduction par une transition monosomes polysomes (l’activité de traduction est beaucoup plus importante quand plusieurs ribosomes se déplacent sur une même molécule de RNA formant plusieurs copies du polypeptide dans un même temps). ¾ Dans ce second cas il faut considérer que des ARN préexistants sont dans les graines pour permettre la reprise rapide de la synthèse protéique (on a utilisé le terme d’informosomes pour les caractériser) Contrôle hormonal de la transcription : Les interactions hormonales entre embryons et tissus de réserves que nous avons examinées dans l’action des gibberellines sur la germination du grain d’orge sont certainement très répandues. Par exemple chez le Pois l’ablation de l’embryon empêche la synthèse de protéases au niveau des cotylédons. VI-A4- Aspects Physiologiques de la germination : • Conditions de la germination : La germination de la graine dépend : • Des conditions externes liées aux facteurs de l’environnement Des conditions internes liées à l’état physiologique et aux caractéristiques de la graine. Conditions externes : Eau : nécessaire à l’hydratation de la graine et à la reprise des activités métaboliques (trop d’eau empêche cependant la germination : asphyxie). O2 : nécessaire à la respiration. Température : convenable pour les activités métaboliques. Lumière : 3 catégories : germination induite par la lumière 70 % germination inhibée par la lumière germination indifférente Ces dernières exigences sont plus théoriques que réelles car elles se manifestent pour des semences fraîchement récoltées et à des t° élevées alors que la germination dans les régions tempérées se produit dans un contexte de températures fraîches. • Conditions internes : Lorsque des graines arrivées à maturité sont placées dans des conditions optimales de température, d’humidité et d’oxygénation pour leur croissance et qu’elles ne germent pas, plusieurs types de causes sont à envisager : la dormance de l’embryon ou les inhibitions de germination. On peut d’ailleurs souligner que les caractéristiques de germination des espèces cultivées résultent d’une sélection très poussée qui a contribuée à éliminer un grand nombre de mécanismes de contrôles naturels et qui conduit à une germination rapide et uniforme nécessaire dans le cas des plantes cultivées. • Inhibition de germination (tout phénomène qui s’oppose à la germination d’un embryon non dormant) : a. Inhibition tégumentaire : les téguments assurent normalement la protection des graines mais dans de nombreux cas ils peuvent empêcher la germination en jouant un rôle de : Barrière physique = résistance mécanique, imperméabilité à l’eau Barrière chimique = piégeage de l’oxygène par des composés phénoliques, présence d’inhibiteurs de germination dans les téguments. Certaines graines ne germent qu’après de très fortes pluies et l’on pense que c’est un lessivage d’inhibiteurs de germination qui autorise le phénomène au-delà d’une simple réhydratation. Dans les différents cas évoqués on peut démontrer effectivement le rôle des téguments en réalisant leur ablation qui permet la germination. Dans les conditions naturelles le gel de l’hiver (craquèlement, putréfaction partielle), les pluies peuvent altérer l’intégrité des téguments. Cette inhibition par les téguments joue un rôle adaptatif car dans les conditions naturelles elle demande une période correspondant à l’hiver pour être levée et diffère ainsi d’une germination précoce pouvant se produire dans de mauvaises conditions. Au laboratoire ou lors de la réalisation de semis par des horticulteurs ou pépiniéristes différents traitements sont utilisés pour fragiliser ou altérer les téguments : - Abrasions : papier de verre - Incisions : scarification - Traitements chimiques : H₂O₂, solvants, SO4H2 dilué. b. La dormance de l’embryon : Par définition on dit que la dormance est d’origine embryonnaire quand la graine étant débarrassée de ses téguments et placée dans des conditions convenables ne germe pas. L’embryon peut être dormant au moment de la récolte de la semence on parle alors de dormance I. Dans d’autre cas l’embryon des semences fraîchement récoltées est parfaitement capable de germer mais il perd cette aptitude sous l’influence de différents facteurs externes (T°, privation d’O2), on parle de dormance II. Différents traitements peuvent lever la dormance au plan expérimental : - Traitement par le froid : le traitement généralement utilisé, la stratification, consiste à placer les graines dans du sable en couches superposées à basses températures. Dans les conditions naturelles c’est le froid de l’hiver qui réalise la levée de dormance - Traitement par la lumière : avec le froid, la lumière est le facteur de l’environnement actif, avec une portée cependant moins importante que le froid (voir remarque précédente). • Contrôle hormonal de la levée de dormance des semences : En particulier dans les levées de dormance par le froid il semble que l’on soit en présence d’un équilibre entre ABA et gibberelline analogue à celui décrit pour la dormance des bourgeons. L’acide abcissique semble être l’inhibiteur fondamental, il est présent dans de nombreuses graines et il présente un puissant effet inhibiteur sur la germination quand il est apporté de façon exogène. Par ailleurs, il existe des corrélations entre degré de dormance d’espèces voisines dans un même genre et la teneur en acide abcissique. Le froid pourrait intervenir en diminuant le taux d’ABA des graines. De plus, des stimulateurs comme l’acide gibberellique semblent impliqués dans la germination. Ce point est confirmé par l’inaptitude de nombreux embryons dormants de céréales à synthétiser des gibberellines, les potentialités de synthèse reprenant avec la levée de dormance. D’autre part, l’acide gibberellique exogène favorise la germination des graines dormantes chez le Noisetier, et le froid a un effet favorable chez ce même végétal dans la production d’acide gibberellique. On retrouve donc le même type de mécanisme que celui déjà mentionné pour la dormance des bourgeons un équilibre entre inhibiteurs et stimulateurs qui serait sous la dépendance des conditions de l’environnement. Enfin, le rôle de l’acide gibberellique est clairement démontré par le comportement de mutants déficients en GA qui ne germent pas sans apport exogène de GA. Au-delà de variations dans l’équilibre entre hormones stimulatrices et inhibitrices pour le contrôle de la dormance, on a noté des changements de sensibilité aux hormones chez, par exemple, l’embryon de Tournesol. Il s’agit ici de variations se produisant au cours du développement (à distinguer des mutants de sensibilité qui induisent des variations irréversibles). Ainsi la sensibilité à GA décroîtrait lors de l’entrée en dormance et augmenterait dans les conditions favorisant la levée de dormance (ce qui entraîne des réponses variables pour une même concentration en GA). Parallèlement des mutants de synthèse de l’ABA n’entrent pas en dormance (mutants vivipares de maïs germent sur le pied mère, mutants de tomates rin avec des graines germant dans le fruit…). Un autre argument en faveur du rôle de l’ABA est la suppression de l’entrée en dormance par la Fluridone inhibiteur de synthèse de l’ABA. Un mutant vivipare de maïs Vp1 ou (AB1 3) correspond à la perte d’un gène cloné et étudié en détail. Ce gène code une protéine présentant des caractéristiques de facteurs de transcription extrémité acide aminé terminale acide et trois domaines basiques B1, B2, B3. Des études biochimiques et moléculaires ont montré que la protéine VP1 a 2 fonctions séparées. Elle active la transcription du promoteur EM (embryo maturation specific protein), elle réprime la transcription du promoteur d’α-amylase dans les couches d’aleurones. Cette double action permet le contrôle de deux processus qui doivent s’exclure : 1. maturation 2. germination Des homologues de VP 1 ont été clonés chez différentes espèces avec un haut degré d’homologie. D’une façon générale : Développement de la graine et germination sont 2 processus opposés – 2 stades physiologiques qui présentent des évolutions inverses et sont séparées par une période de vie ralentie pendant laquelle la graine est fortement déshydratée. Développement de la graine • Mise en place des réserves • Déshydratation • Acquisition de la tolérance à la déssication Germination • Réhydratation • Utilisation des réserves L’ABA est un signal de la mise en place des réserves protéiques des graines : hélianthine, crucifèrine et de polypeptides de protection contre la déssication (dehydrines). L’ABA intervient donc à plusieurs niveaux : il joue un rôle stimulateur dans les étapes de formation et de déshydratation de la graine et inhibe de façon générale, la germination précoce qui est ensuite empêchée par la déssication. Son taux peut ensuite décroître pendant la période de conservation. Ainsi l’ABA n’est pas à son maximum dans les graines dormantes où il a au préalable fixé la dormance. Des équilibres multiples entre teneurs en hormones, variations de sensibilité aux hormones, taux de facteurs régulateurs peuvent expliquer les différents comportements observés au niveau de la dormance. VI-A5-L’industrie des semences en France : Les travaux de recherche des sélectionneurs conduisent constamment à de nouvelles variétés qui procurent à l’agriculteur un produit de haute qualité en fonction de leurs objectifs et de leur environnement. Au-delà de la création variétale l’industrie des semences s’intéresse au contrôle, au tri, au traitement et au conditionnement des semences. La France est le premier producteur Européen de semences, le 2ème producteur mondial derrière les USA et le 3ème exportateur mondial. Quelques chiffres au niveau national - Production des semences en tonnes - Chiffres d’affaires - Exportations 1 300 000 1,7 milliard d’€ 500 millions d’€ La répartition des espèces dans le chiffre d’affaires est la suivante : Maïs et sorgho 35 % Céréales à paille 15 % Potagères et florales 18 % Fourragères, gazon et protéagineux Oléagineux et fibres Betteraves Pommes de terre 9% 8% 8% 7% On assiste d’une manière générale à un développement de l’utilisation des semences certifiées par opposition « aux semences de ferme ». L’industrie des semences où la compétition est très vive entre firmes concurrentes en raison d’un marché de taille limitée (surfaces cultivées constantes) voit des évolutions fréquentes dans le périmètre des sociétés (rachats, absorption). Biogemma en France, Syngenta à l’international sont des exemples de sociétés semencières. VI-A6- La graine organe cible pour les transformations génétiques : L’expression de gènes a été souvent ciblée vers la graine dans des expériences de génie génétique dans le cadre de deux objectifs majeurs. 1. une meilleure valorisation du contenu de la graine. Ex : phytase mais aussi glucanase pour améliorer la mobilisation des glucanes chez l’orge, lipase pour favoriser directement la production de diester (biocarburant) sans hydrolyse chimique des triglycérides. 2. une accumulation de molécules à intérêt pharmaceutique – molecular pharming peptides / proteins (exemple : lipase gastrique pour le traitement de la mucoviscidose produite dans le grain de maïs par la firme Meristem therapeutics). VI-B- PHYSIOLOGIE DE LA FLORAISON Après la germination et le développement végétatif la floraison représente une transition particulièrement complexe du cycle de développement. Les approches utilisées dans l’étude de la floraison ont exploité des méthodes de la physiologie puis plus récemment des outils moléculaires. La fleur est l’organe le plus complexe de la plante avec des parties stériles – sépales (rôle de protection), pétales (rôle d’attraction) – et des parties fertiles – étamines (pollen), pistil (ensemble de carpelles contenant ovaires/ovules). Près de 70 % des angiospermes sont des hermaphrodites vrais portant les 2 sexes ♂ et ♀ sur un même individu (espèces monoïques). Environ 5 % ne portent qu’un seul sexe (espèces dioïques : chanvre, peuplier, kiwi, asperge, mercuriale…). La floraison comprend schématiquement 3 phases : 1. l’initiation florale ou évocation florale qui correspond à l’étape de transition méristème végétatif méristème floral avec formation de primordia d’organes floraux. 2. la formation des ébauches florales (bourgeons floraux) 3. l’anthèse ou épanouissement des fleurs qui peut intervenir un temps assez long après la phase 2. La formation des fleurs correspond à une étape typique de différenciation associée à la mise en place de protéines et de métabolites spécifiques. Les plus apparents de ces métabolites sont les pigments floraux (flavanoides, caroténoïdes) qui donnent leur couleur aux fleurs. Toutes les cellules contiennent les gènes correspondants mais ceux-ci ne vont s’exprimer souvent massivement que lors de la formation des fleurs. Pour terminer cette introduction rappelons que : 1. l’apparition des angiospermes ou plantes à fleurs a représenté un succès évolutif, les angiospermes colonisant tous les biotopes. Différents types d’innovations ont en effet émergés − formation d’un fruit entraînant une amplification des possibilités de dissémination des graines par les animaux − phénomènes d’autoincompatibilité entraînant un brassage génétique − l’accumulation des réserves plus efficace que chez les gymnospermes. 2. la floraison représente une transition importante pour la plante − c’est un préalable à la reproduction sexuée − c’est l’arrêt de la croissance et du développement végétatif chez les plantes monocarpiques (plantes à floraison unique). 3. la production florale est une activité économique importante d’un chiffre d’affaires de l’ordre d’un peu moins d’un milliard d’Euros en France, avec une forte focalisation sur un nombre limite d’espèces : roses 40 %, œillets 20 % et une localisation géographique sur le VAR et les Alpes Maritimes. La production s’effectue en serres pour l’essentiel et il s’agit d’un secteur fortement déficitaire au plan de la balance commerciale avec une forte pénétration des produits Hollandais. La connaissance et le contrôle de la floraison sont importants pour ces activités ainsi qu’au niveau de l’arboriculture fruitière. En conclusion rappelons que la finalité de la fleur c'est-à-dire la double fécondation des angiospermes (aggeion, receptacle – sperma-graines) plantes ayant des graines « cachées » est une spécificité des végétaux par rapport à tous les autres êtres vivants l’œuf principal donnant l’embryon, l’œuf accessoire le tissu de réserve comme nous l’avons déjà vu. VI-B1- Conditions de la floraison : Les Botanistes ont été de tout temps intrigués par le fait que certaines espèces (Muguet de mai, Chrysanthème, pour donner des exemples concrets) fleurissent à une période bien précise de l’année souvent de façon très reproductible. On connaît maintenant certaines conditions requises pour la floraison, se sont des conditions internes : maturité de floraison, et des conditions externes : action de la lumière – photopériodisme, de la température – vernalisation. A) Conditions internes : 1. Maturité de floraison : Pour qu’une plante puisse fleurir il faut qu’elle ait atteint un certain développement végétatif. On appelle ce stade maturité de floraison. L’acquisition de cette maturité de floraison est de durée très variable selon les espèces. Avant ce stade la plante est dans un état dit juvénile et ne pourra fleurir quels que soient les traitements. A titre d’exemple cette maturité de floraison est atteinte à des stades de développement différents : Seigle : 7 feuilles Tomates : 13 entre-nœuds Chez les arbres ce temps est beaucoup plus long : Poiriers 5 -7 ans, Chêne plusieurs dizaines d’années. La notion de maturité de floraison repose sur des explications empiriques. La plus vraisemblable est de nature trophique il ne serait pas bon pour une plante de fleurir avant qu’elle ait suffisamment développé son système végétatif (feuilles, racines) afin de permettre l’alimentation des organes le plus souvent non chlorophylliens – fleurs, fruits, graines – qui vont résulter de la floraison. B) Conditions externes : Exigences thermiques : la VERNALISATION : Quand nous parlons ici d’exigences thermiques, il ne s’agit pas des exigences minimales nécessaires aux activités métaboliques et à la croissance mais à des effets indirects de la T° selon la terminologie déjà utilisée des « effets signaux ». Définition : C’est une transformation interne opérée par le froid qui confère à certaines plantes l’aptitude à fleurir (aucune modification morphologique). Il faut tout de suite différencier ce phénomène de la levée de dormance par le froid ou le traitement thermique agit sur un phénomène de croissance. Il faut aussi insister sur l’expression « aptitude à fleurir » car la vernalisation confère seulement une potentialité à fleurir qui s’exprimera plus tard si d’autres conditions sont remplies. A l’observation macroscopique ou microscopique rien ne distingue un bourgeon vernalisé d’un bourgeon non vernalisé. VI-B2- La Vernalisation : VI-B2- a- Mise en évidence : 1. L’exemple du Blé : Le Blé présente deux types de variétés : Le Blé d’hiver (plus précoce et d’un meilleur rendement) semé à l’automne passe l’hiver à l’état de jeune plantule fleurit fin du printemps, épiaison au début de l’été. Le Blé de printemps : semé au printemps fleurit en été, épiaison en été. Cependant semé au printemps le Blé d’hiver ne fleurit pas. Semé au printemps ou en automne le Blé d’hiver présente à peu près le même état de développement au printemps. Il semble donc que c’est la période d’hiver qui ait un effet sur sa floraison mais non sur le développement et l’acquisition d’une certaine maturité de floraison. En U.RS.S. et en particulier en Ukraine la culture du Blé de printemps est impossible (bonne saison trop courte) et celle du Blé d’hiver parfois aléatoire (parfois hiver trop rigoureux), aussi les agronomes soviétiques désiraient faire subir au Blé d’hiver un hiver artificiel pour pouvoir le mettre en terre au printemps. L’agronome LYSSENKO montra que si dans les conditions naturelles le froid agit sur une plantule déjà formée le froid est également susceptible d’agir sur la graine non dormante et partiellement imbibée ; celle-ci semée au printemps germe et donne une plante dont la floraison est aussi rapide que si la mise en terre avait eu lieu en automne. L’action du froid a donc en quelque sorte transformé une variété d’hiver en une variété de printemps d’où le nom de vernalisation donné au phénomène (en latin vernalis = printemps). La vernalisation appliquée aux semences imbibées maintenues à 2° C pendant 1 mois en chambre froide a donné des résultats irréguliers appliquée à grande échelle (jusqu’à 2 millions d’hectares de plantation) et n’a pu être généralisée selon l’optique initiale (on a plutôt cherché à améliorer par sélection les variétés de printemps). 2. Le phénomène peut également être analysé chez beaucoup de plantes bisannuelles comme le Jusquiame noire (Hyoscyamus niger), l’Oenothère bisannuelle, la Digitale pourpre. Ces espèces maintenues à des températures tièdes (supérieures ou égales à 16°C) demeurent indéfiniment à l’état de rosette sans jamais fleurir. On ne peut arriver à les faire fleurir que si les rosettes sont exposées pendant une assez longue durée de l’ordre de plusieurs semaines à des températures froides (1 à 5 ° C). Après quoi, en revenant à des températures tièdes et si d’autres exigences concernant en particulier la photopériode sont remplies, les plantes fleuriront. Cette exigence au froid explique leur caractère bisannuel. Le terme de vernalisation qui désignait à l’origine le traitement qui confère l’aptitude à fleurir (froid naturel de l’hiver ou froid artificiel ou encore d’autres agents) recouvre maintenant également la transformation subie par le végétal devenu apte à fleurir et les phénomènes physiologiques qui s’y rapportent. Le besoin de vernalisation est une caractéristique importante dans l’amélioration et la sélection des plantes et a conduit à l’identification de variétés d’hiver et de printemps exploitées selon les aires géographiques de culture de différentes espèces. VI-B2- b- Classification des espèces : Les besoins de vernalisation sont très variables selon les espèces mais il faut tout de suite dire qu’il s’agit là d’une exigence relativement peu répandue chez les plantes. On peut classer les plantes en 3 groupes. Les premières n’ont pas besoin de vernalisation elles sont appelées indifférentes. Ce sont les plantes annuelles qui semées au printemps fleurissent dans le courant de la même année sans avoir eu besoin de froid (céréales de printemps, tabac). D’autres espèces sont dites préférentes, la vernalisation n’est pas indispensable mais elle hâte la floraison, c’est le cas de la variété de seigle d’hiver (« Petkus »). Vernalisée, la floraison se produit après production de sept feuilles, non vernalisé il faut attendre l’apparition de 25 feuilles pour que la plante puisse fleurir. Les plantes annuelles dites d’hiver se comportent de la même façon, le Blé d’hiver dont nous avons déjà parlé voit sa floraison accélérée par le traitement vernalisant mais si la belle saison était suffisamment longue il arriverait à fleurir sans vernalisation. Les plantes à vernalisation obligatoire, c’est le cas de la plupart des plantes bisannuelles, celles que nous avons déjà citées mais aussi d’autres espèces telles que Betterave et Choux, Carotte et Céleri, de plantes vivaces ex : Geum urbanum, Olivier. Comme la levée de dormance essentiellement contrôlée par le froid les phénomènes de floraison et donc de reproduction de certaines plantes sont donc limités aux climats dont les hivers sont assez froids. L’adaptation biologique paraît ici moins nette mais il semble que ces espèces doivent accumuler des réserves pendant la première année avant de pouvoir fleurir de manière satisfaisante la 2ème année. Exemples concernant les plantes vivaces dont simplement certains bourgeons sont vernalisés : La Benoîte (Geum urbanum). Les bourgeons axillaires les plus jeunes de la rosette perçoivent l’induction par le froid hivernal tandis que les autres bourgeons poursuivent leur croissance végétative, assurant la pérennité de l’espèce. Une scrofulaire (Scrofularia alata) fleurit sur la tige principale qui s’allonge après vernalisation et les bourgeons axillaires aux aisselles des feuilles les plus anciennes donneront des rosettes axillaires végétatives. Un exemple particulièrement net de relation entre l’aire de répartition d’une espèce, et des exigences thermiques et en particulier un besoin de vernalisation est donné par l’olivier : • L’olivier a besoin chaque année de certains abaissements thermiques durant l’hiver sinon sa floraison est nulle (moyenne thermique de janvier inférieure à 10 ° C). Ce besoin de froid interdit ainsi l’extension de l’aire de l’olivier vers des régions aux hivers plus chauds que la région méditerranéenne c'est-à-dire la région tropicale, dans ces régions l’olivier peut se montrer vigoureux mais ne fleurit pas. L’aire de l’olivier est donc limitée au nord par les froids excessifs et au sud par le besoin de froid hivernal qui n’empêche pas la végétation mais interdit la floraison. Les espèces cultivées ont été sélectionnées pour éliminer ces barrières à la floraison. Les espèces spontanées dont les aires de répartition à la surface du globe sont les plus larges sont celles qui sont indifférentes. VI-B2- c- Caractéristiques du phénomène de vernalisation : Notion de maturité de vernalisation : Nous avons vu dans le cas du Blé que la vernalisation pouvait être réalisée sur la graine. Cependant, certaines plantes ne sont sensibles aux traitements vernalisants qu’à certains stades de leur développement. C’est le cas de la Jusquiame noire plante bisannuelle qui n’est vernalisable qu’à l’état de rosette. L’action du froid ne peut donc être effective que sur des plantes ayant atteint un état particulier appelé maturité de vernalisation tout à fait distinct de la maturité de floraison. Conditions de la vernalisation : Les températures efficaces sont comprises entre 1 et 10 ° C et la période de froid nécessaire est variable selon les espèces. L’action est parfois cumulative : chez le Seigle le froid peut être donné en plusieurs périodes séparées par des retours aux températures tièdes. C’est la quantité totale de jours de froid qui compte. Ceci correspond à l’action des conditions naturelles - alternance périodes froides et périodes plus douces. La vernalisation n’est pas un phénomène de tout ou rien : sur les plantes préférentes comme le seigle on peut obtenir l’épiaison sur des plantes de 7 à 16 feuilles selon la durée de la période de froid. Lieu de perception du stimulus : Ce sont des cellules des méristèmes qui sont capables de percevoir le traitement par le froid. L’état vernalisé peut être qualifié d’autocatalytique c'est-à-dire que tous les bourgeons dérivant de l’apex vernalisé sont vernalisés chez les plantes annuelles. La transformation opérée par le froid semble transmissible au cours des divisions cellulaires. Dévernalisation : L’état vernalisé peut être conservé pendant très longtemps : graine inhibée vernalisée puis maintenue au sec conserve un état vernalisé pendant plus d’un an. Jusquiame : cette plante présente pour fleurir une double exigence : froid puis photopériode. On peut après le traitement vernalisant différer la floraison pendant 200 jours en conservant l’état de compétence. Cependant un trop long délai, des traitements par la chaleur > à 30 ° C, l’anaérobiose suppriment l’état vernalisé. VI-B2- d- Mécanisme hypothétique de la vernalisation : Une compréhension des mécanismes moléculaires de la vernalisation a résulté d’études de génétique moléculaire chez Arabidopsis en exploitant différents mutants. En résumé le traitement par le froid entraîne la répression du gène FLC qui code un inhibiteur de floraison. Cette expression réduite de FLC est maintenue pendant la suite du développement (après le traitement par le froid) par l’activité des gènes de VERNALISATION (gènes VRN). VRN1 code une DNA-binding protein et VRN2 code un homologue de l’un des gènes du groupe Polycomb qui maintient le « silencing » de certains gènes durant le développement animal. FLC est un régulateur transcriptionnel à boîte MAD qui fonctionne comme un répresseur de floraison en inactivant un ensemble de gènes requis pour la transition d’un méristème végétatif en méristème floral. Chez les espèces qui n’ont pas d’exigences en vernalisation des gènes comme FCA interviennent dans la répression de FLC. Un des problèmes qui se pose est de comprendre comment après le traitement par le froid se maintient la répression de FLC et on a suggéré dans ce contexte un mécanisme épigénétique. On a pu récemment montrer (Bastow et collaborateurs Nature 427, 164 (2004) des changements dans le degré de méthylation des histones (diméthylation des lysines 9 et 27 sur l’histone H3) ce qui correspond à une chromatine « silencieuse » chez la drosophile et l’homme. Le phénomène de diméthylation de H3 sur la lysine 27 disparaît chez le mutant VRN2. Ce gène ou son produit au voisinage du gène FLC serait donc impliqué dans la méthylation. La mémoire épigénétique de l’hiver est ainsi « médiée » par un état des histones qui induit une chromatine silencieuse, ce type de mécanisme semble conservé chez les animaux et les plantes. Modèle de synthèse Répression de gènes importants pour la transition vers la floraison Froid Diminution de la transcription de FLC Formation d’un complexe entre région 5’ de FLC et VRN2. Mécanisme inconnu ? Maintien d’un bas niveau de FLC après retour à des températures douces Diméthylation de H3 sur K27 (chromatine silencieuse dans l’environnement du locus FLC) Méthodes utilisées : — Précipitation de la chromatine par des anticorps spécifiques de différents états (modifications chimiques) — Transformations génétiques avec la fusion FLC-GUS montrant une forte réduction d’expression du produit de fusion avec le traitement par le froid. VI-B3- Le photopériodisme : Exigences photopériodiques : A côté d’exigences thermiques qui correspondent au phénomène de vernalisation et qui concernent un nombre assez limité de plantes, un beaucoup plus grand nombre de végétaux présente pour fleurir des exigences photopériodiques. Le photopériodisme désigne les réactions de certaines plantes (et de certains animaux) à une alternance définie de lumière et d’obscurité au cours d’un cycle de 24h. Chez les végétaux la mise à fleur constitue la réaction essentielle, mais d’autres réactions comme l’entrée en dormance, l’abcission sont sous contrôle photopériodique. Chez les animaux, la maturation des gonades chez les oiseaux (induction par jours longs) l’initiation de la diapause chez les insectes, la migration des oiseaux (induction par jours courts) sont des phénomènes contrôlés par la photopériode. Ces phénomènes physiologiques du développement ou du comportement chez les animaux ne sont possibles ou ne sont induits que pour des conditions d’éclairement dans lesquelles la durée relative du jour et de la nuit au cours d’un cycle de 24 h est bien définie. A l’Equateur, à Bornéo, la durée du jour et de la nuit est identique toute l’année. Au fur et à mesure que l’on monte en latitude dans l’hémisphère Nord ou que l’on descend dans l’hémisphère Sud on assiste à des variations de plus en plus importantes des durées du jour selon les saisons. Les plantes qui ont évolué dans des conditions où l’environnement lumineux subissait des fluctuations liées aux changements de saison se sont adaptées à ces conditions pour mieux contrôler leur développement. A titre de rappel à Toulouse : ¾ Le 23 janvier 11h de jour 13 h de nuit ¾ Le 24 juin 16 h de jour 8 h de nuit Il faut noter : • • Que pour une même latitude la durée relative des jours et des nuits est un paramètre de l’environnement qui se reproduit de façon absolument reproductible d’année en année à la même date, c’est donc 1 repère des saisons parfait. Les exigences photopériodiques de nombreuses plantes sont extrêmement strictes ce qui explique le calendrier de floraison précis observé : chrysanthème - fin octobre, muguet – fin avril. VI-B3- a- Mise en évidence de l’influence de la photopériode sur l’initiation florale : Les travaux de Garner et Allard en 1920 sur la variété de tabac « Maryland Mammoth » montrent qu’à l’automne, alors que les autres variétés ont fleuri, celle-ci continue sa croissance végétative jusqu’à ce que le froid l’arrête. Si la plante est élevée en serre elle forme ses fleurs au début de l’hiver en jour court. Si on sème les graines tardivement au début de l’automne la floraison se fait comme précédemment mais sur des plantes plus petites. La longue période végétative observée dans la nature ne correspond donc pas à une maturité de floraison particulièrement difficile à atteindre. Garner et Allard attribuèrent la mise à fleur à l’influence des jours courts ce qu’il vérifièrent par d’autres expériences. Si en été, on met les plantes à l’obscurité avant la tombée de la nuit de façon à les soumettre à une journée suffisamment courte : elles fleurissent. Inversement la floraison peut être empêchée en hiver grâce à un éclairement d’appoint donné aux plantes à la fin de la journée. La floraison de la variété de tabac Maryland Mammoth dépend donc de la façon absolue d’un facteur saisonnier la durée relative du jour et de la nuit. Des plants de Soja biloxi semés à 15 jours d’intervalle de Mai à Juillet fleurissaient tous à la même période en septembre, malgré des différences de développement végétatif importantes ce qui montre qu’il ne s’agit pas d’une maturité de floraison difficile à atteindre. Depuis ces recherches sur le photopériodisme se sont multipliées et ont abouti à classer les plantes selon leurs exigences photopériodiques. On appelle héméropériode la période de lumière, nyctipériode la période d’obscurité et photopériode la séquence héméropériode et nyctipériode au cours d’un cycle de 24h. VI-B3- b- Classement des espèces suivant leurs exigences photopériodiques : On peut classer les espèces en 4 grands groupes : a) Espèces aphotiques : ces sont les espèces peu nombreuses qui peuvent former leurs ébauches florales à l’obscurité c’est le cas de la Jacinthe. On remarque que toutes ont des réserves abondantes leur permettant une longue survie sans photosynthèse. b) Espèces indifférentes : la floraison s’effectue quelle que soit la photopériode à condition cependant qu’elle soit assez longue pour permettre une photosynthèse suffisante. Cette valeur minimale qui est liée non pas à des exigences photopériodiques mais à des exigences photosynthétiques constitue le minimum trophique. La valeur de ce minimum est en général de 5 à 6 heures de lumière solaire par 24 h. c) Les plantes de jours courts : ne peuvent fleurir que si l’héméropériode est inférieure à une certaine durée d’éclairement qui est caractéristique de chaque espèce. Cette durée correspond à la notion d’héméropériode critique HC. Ces espèces peuvent être absolues c'est-à-dire qu’elles ne fleurissent jamais en présence d’une photopériode défavorable ou seulement préférentes auquel cas une photopériode défavorable retarde seulement leur floraison qui est néanmoins possible. Absolues : Kalanchoe Blossfeldiana Xanthium pensylvanicum Préférentes : Soja biloxi HC : 12 h HC : 15 h d) Plantes de jours longs : ces plantes ne peuvent fleurir que pour une héméropériode supérieure à une hémépériode critique également caractéristique de chaque espèce. On distingue également des espèces absolues ou préférentes. Absolues : Préférentes : Hyoscyamus niger HC 10 h Spinacea oleracea HC 13 h Avena sativa Beta vulgaris Vicia faba On peut représenter la réaction de telles plantes par un graphique où l’on porte en abscisse l’hémépériode et en ordonnée le temps nécessaire pour obtenir la floraison de la plante avec une telle hémépériode. Remarque : 1. le terme de jour court ou de jour long ne signifie pas que la période d’éclairement est courte ou longue en valeur absolue ou même par rapport à la période d’obscurité mais simplement que la floraison n’interviendra que pour une durée d’éclairement plus courte ou plus longue que l’ hémépériode critique. Par exemple le Xanthium plante de jour court ne fleurit que pour une photopériode inférieure à l’ hémépériode critique 15 h. Il fleurira donc pour une durée d’éclairement de 14 h 30 plus importante que la durée d’obscurité 9h30 et également plus importante que la durée d’éclairement compatible avec la floraison de certaines plantes de jours longs Epinard HC de 11 à 13 h selon les variétés. 2. d’une façon générale, les plantes originaires des zones tempérées qui fleurissent à partir du milieu du printemps jusqu’à la fin de l’été sont des plantes de jours longs préférentes ou absolues. Celles qui fleurissent plus tôt sont des plantes préalablement vernalisées soit des plantes ayant initié leurs ébauches florales l’année précédente et dont la dormance a été levée par le froid. Les plantes qui fleurissent tard à la fin de l’été ou au début de l’automne sont des plantes de jours courts. VI-B3- c- Etudes physiologiques des mécanismes induisant la floraison en réponse à la photopériode Précisons tout d’abord que les végétaux utilisent des signaux de l’environnement diversifiés pour réguler la transition vers l’état reproducteur via la floraison. Ces mécanismes visent vraisemblablement à synchroniser la floraison de individus pour faciliter la pollinisation croisée et les brassages génétiques et les facteurs de l’environnement efficaces sont ceux qui présentent une variabilité saisonnière importante : T°, lumière, mais aussi secondairement disponibilité en eau. Ces facteurs peuvent se substituer les uns aux autres dans des cas particuliers. Pharbilis nil peut être induit à fleurir dans des conditions de photopériode défavorable par un changement de température ou de conditions nutritives. Dans le cas plus spécifique du photopériodisme les mécanismes supposés convertir le stimulus lumineux initial en réponse physiologique appartiennent à 3 catégories : 1. le rôle de facteurs hormonaux 2. la diversion des nutriments vers l’apex 3. le contrôle multifactoriel 1. Au plan historique on peut rappeler le concept de florigène, élaboré par le russe ChailaKhyan sur la base de nombreuses expériences de greffe montrant la transmission du stimulus de floraison. La réalité chimique du florigène n’a pu être établie. La notion de florigène a été ensuite étendue à un ensemble d’hormones à action antagoniste dont l’équilibre serait contrôlé par la photopériode. Chez Sinapis alba par exemple les cytokinines peuvent déclencher la floraison en conditions non inductrices. La situation n’est cependant pas éclaircie. 2. la diversion des nutriments (Sachs et Hackett 1983). Il s’agit d’une théorie qui se rapproche de ce qui a été dit pour la dominance apicale. Les conditions d’induction (bonne photopériode) entraîneraient une meilleure alimentation de l’apex en nutriments déclenchant la transition vers l’état floral. 3. le contrôle multifactoriel. Il s’agit d’une théorie intermédiaire dans laquelle interviendraient des hormones et des nutriments et qui a été bien illustrée par les travaux de Bernier sur Sinapis alba. Exemples et approches expérimentales Sinapis alba est un système modèle intéressant. Cette plante de jour long lorsqu’elle est âgée d’environ 2 mois peut être induite à fleurir par une exposition à un seul jour long. La perception est effective au niveau des feuilles adultes. L’initiation de la transition méristème végétatif / méristème floral commence 2 jours après le traitement inducteur. L’analyse des exsudats au niveau des pétioles après exposition à un seul jour long démontre : • • une augmentation de la teneur en saccharose (résultant de la dégradation de l’amidon), ce saccharose est exporté vers le méristème apical où sa concentration augmente. Il faut noter que des expériences de transgénèse visant à augmenter ou réduire les teneurs en amidon ont des répercussions sur l’aptitude à la floraison. Des modifications dans les teneurs en cytokinines au niveau racinaire appréciée par l’analyse des exsudats racinaires (riboside de zéatine, riboside d’isopentenyl adénine). Les cytokinines voient leurs teneurs augmenter de façon rapide et transitoire en réponse au jour long. Les résultats d’interruption de la circulation des sèves sont particulièrement intéressants. L’élimination d’un anneau de tissu contenant le phloème empêche la floraison si elle est réalisée vers la 10ème heure de jour long mais non à la 12ème heure ou plus tard. Ceci indique le transport rapide des feuilles vers les racines d’un signal (saccharose ?) qui conditionne la floraison. Des essais d’interruption du flux racine/tige ont été réalisés par la conservation des plantes dans 100 % d’humidité. Ces conditions stoppent la transpiration et le mouvement de sève dans le xylème. Ce traitement quand il est appliqué après le JL abolit la réponse de floraison. Les mouvements de sèves sont essentiels pour la floraison. Le contrôle de la transition vers la floraison est donc multifactoriel chez Sinapis alba et fait intervenir des échanges d’information à longue distance à l’échelle de la plante. L’induction photopériodique cause des modifications complexes concernant au minimum le saccharose et les hormones (cytokinines). Toutes les parties de la plante participent à l’échange de signaux et sont rapidement informées du changement de photopériode auquel sont soumis les feuilles. Les signaux ne sont sans doute pas universels et peuvent changer d’une plante à l’autre (Gibberellines pour d’autres plantes). Cependant le saccharose et les Cytokinines sont impliqués chez d’autres plantes (xanthium). Malheureusement nous n’avons ici que des arguments de type physiologiques basés sur des corrélations mais non des preuves définitives et aucune précision sur les mécanismes initiaux de l’action de la lumière. VI-B3- d- Intervention du phytochrome et d’autres photorécepteurs dans le contrôle de la floraison – problème de la mesure du temps L’induction photopériodique de la floraison implique de la part de la plante. 1. la capacité de distinguer lumière et obscurité (photoperception) 2. la capacité de mesurer les durées de lumière ou d’obscurité 3. la capacité de transmettre l’information reçue sous une forme utilisable (le phytochrome est impliqué à des titres divers dans ces 3 types de phénoménes) 1. dans le cas de la photoperception le phytochrome est un des photorécepteurs. Nous avons déjà mis en évidence dans le cours sur le phytochrome l’intervention de ce photorécepteur dans le contrôle de la floraison. La démonstration repose sur la nature des spectres d’action et le caractère de photoréversibilité des réponses. Plantes jours longs HC :12h 9 Plantes jours courts HC :12h 15 9 15 végétatif 660 floraison 660 floraison 660+730 végétatif 660+730 végétatif floraison La floraison fait partie des photoréponses mixtes car la floraison peut être induite ou inhibée par la forme active du phytochrome selon qu’il s’agit d’une plante de jours courts ou de jours longs et selon le moment ou la lumière est apportée (interruption nuit). D’autres photorécepteurs que le phytochrome peuvent être également impliqués soit indépendamment soit en combinaison avec le phytochrome. Démonstration de l’intervention du cryptochrome dans le contrôle de la floraison (Korneef et al, Nature genetics 201 vol 29 p435) : Les mécanismes semblent cependant plus complexes et impliquent plusieurs photorécepteurs dont le cryptochrome. Les écotypes d’Arabidopsis thaliana correspondent à des individus de la même espèce qui se développent dans des environnements et des sites géographiques très différenciés et qui présentent parfois de profondes différences entre eux sur les plans biochimique et physiologique. On peut parler en quelque sorte de différentes variétés de la même espèce. Ainsi l’écotype CV1 localisé aux Iles du Cap Vert est peu sensible à la photopériode pour sa floraison à la différence des écotypes Columbia ou Landberg erecta (Ler) qui sont les variétés d’Arabidopsis utilisées pour les études de laboratoires (variétés préférentes qui fleurissent plus précocement en jour long qu’en jour court). Des études génétiques ont montré que chez CV1 un seul locus sur le chromosome 1 est responsable de cette sensibilité réduite à la lumière. Le gène correspondant a été caractérisé il s’agit d’un allèle du gène CRY2 codant pour le cryptochrome. En fait le cryptochrome avait déjà été suggéré intervenir dans le contrôle de la floraison en jour long. L’allèle CV1 ne présente qu’une seule substitution dans la protéine CRY2 une méthionine en position 367 remplace la valine retrouvée chez les variétés Ler ou Columbia. Cette mutation réduit la dégradation de la protéine CRY2 en réponse à la lumière bleue. Ainsi lors de la transition obscurité lumière il y a une perte progressive de CRY2 chez Ler mais pas chez CV1. La relation entre ce phénomène de dégradation et le contrôle de la floraison par la photopériode n’est pas claire mais on peut intuitivement suggérer qu’une plus grande quantité de CRY2 demande une quantité moindre de lumière pour un effet physiologique donné et donc une floraison pour des jours plus courts. L’exemple décrit ici est intéressant car il représente une situation pour laquelle une mutation sur un seul nucléotide entraînant une modification d’un seul aminé d’une protéine entraîne une modification physiologique significative chez un variant naturel d’Arabidopsis. 2. Problème de la mesure du temps : Les plantes sont capables d’apprécier de façon extrêmement précise la durée des périodes lumineuses et obscures. Des différences d’une vingtaine de minutes dans la durée du jour pourront empêcher la plante de fleurir. Le Xanthium qui est une plante de jour court avec une HC de 15h40 ne fleurit pas pour une héméropériode de 16h. La plante est donc capable d’apprécier avec une extrême justesse la durée du paramètre qui constitue l’information photopériodique. Une théorie rendant compte de cette aptitude à la mesure du temps repose sur le concept des rythmes endogènes (la chronobiologie). Théorie du pendule faisant appel aux rythmes endogènes : Cette théorie suppose que la mesure du temps est reliée au degré de coïncidence (superposition) entre conditions lumineuses externes et oscillations internes de sensibilité à la lumière. • De nombreux phénomènes biologiques chez les plantes sont soumis à des fluctuations rythmiques. Les exemples les plus fréquents concernent des rythmes présentant une période de l’ordre de 24 heures – Rythmes circadiens : par exemple les mouvements de repliements nocturne des feuilles de Haricot : Phaseolus multiflorus. Le rythme se manifeste spontanément en conditions naturelles ; il peut se maintenir pendant un certain temps en conditions constantes de lumière ou obscurité mais s’atténue et disparaît à la longue. En conditions naturelles le rythme est réinitié toutes les 24 h par la transition jour nuit. Dans le contexte de l’étude de ces rythmes circadiens Bünning suggéra l’existence d’une alternance chez les végétaux de phase photophile et de phase scotophile. Dans la phase photophile la lumière a un effet positif dans la phase scotophile la lumière à un effet négatif ou pas d’effets. Il proposa également que la réponse des plantes à la lumière dans le cadre du photopériodisme était reliée au moment d’application de la lumière par rapport à ces phases d’un rythme endogène. Preuve expérimentale : Expériences de Hamner chez Soja biloxi (plante de jour court). Cette plante fleurit normalement lorqu’elle est placée dans une alternance de 12h jour/ 12h nuit. Elle fleurit également mais moins bien pour une alternance de 8h jour 64h nuit pour des cycles anormaux de 72 h (7 cycles). L’auteur interrompt la période de nuit de 64 h par des périodes de lumière de 4h situées à différents moments (il faut ici se rappeler qu’un éclair pendant la nyctipériode d’une plante de jour court peut empêcher la floraison). Il constata que la suppression de la floraison n’intervient que si la lumière est apportée à certaines périodes. La lumière apportée pendant la période ou la plante était normalement à l’obscurité – inhibe la floraison – phase scotophile. La lumière apportée au contraire pendant la période normalement diurne (phase photophile) améliore la floraison. Les résultats démontrent effectivement l’existence d’un rythme de sensibilité à la lumière dans le cas de la floraison, avec l’existence successive de phases photophiles et scotophiles. Lors des périodes où l’éclairement est sans action on pourrait penser à une insensibilité générale de la plante à la lumière, en fait il n’en est rien car il suffit de changer le critère de réponse physiologique , en mesurant par exemple l’élongation de la tige pour s’apercevoir que la lumière via le phytochrome est parfaitement efficace : il y a donc perception du stimulus lumineux et naissance d’un signal lequel n’est pas lu pour la réponse florale à certaines heures du cycle photopériodique. Dans la rythmicité et la succession des phases photophiles et scotophiles le rythme est réajusté généralement par le signal « aube ». Si l’on prend le cas de figure d’une alternance de 12h / 12h (photophile / scotophile) il est alors simple d’expliquer le comportement d’une plante de jour court qui aurait une héméropériode critique de 12 heures. Au-delà de cette valeur la lumière rentrant dans la phase scotophile la plante ne fleurit plus. La situation est cependant plus complexe si l’on considère que les plantes ont des héméropériodes critiques variables et qu’il existe également des plantes de jour long ! Le 3ème aspect est celui de la conversion de l’action de la lumière en information utilisable pour la floraison. Nous aborderons ces problèmes avec les aspects moléculaires de la floraison. VI-B3- e- Photopériodisme et répartitions des espèces : Les espèces les plus largement distribuées à la surface du globe sont les espèces indifférentes. On peut cependant observer comme nous l’avons vu pour Arabidopsis thaliana l’existence de différentes variétés pour une même espèce avec différentes exigences de photopériode. - Boutelona curtispendula : est une espèce implantée du Canada au Mexique 12 variétés de cette espèce ont été récoltées qui présentent différentes réponses photopériodiques. Les plantes des zones les plus au sud ne pouvaient pas fleurir pour des héméropériodes plus longues que 14 heures tandis que les races du nord fleurissaient normalement sous ces photopériodes. Espèces cultivées : Les variétés primitives d’espèces comme le soja, le sorgho, d’origine tropicale sont des plantes de jours courts. Quand ces plantes sont transférées directement à des latitudes plus élevées le besoin en jours courts est obtenu trop tard dans la saison pour que ces variétés soient productrices. L’adaptation de ces cultures a exigé la sélection de variétés moins sensibles à la longueur du jour. Du maïs issu directement du Brésil atteint dans nos régions 3 à 4 m de haut et ne fleurit qu’à la fin septembre lorsque les jours ont moins de 12 heures. Ceci peut avoir un intérêt dans le cas de production de fibre (sorgho papetier) si l’on peut se procurer facilement des graines chaque année. Pour d’autres récoltes comme la betterave à sucre, pour laquelle la floraison réduit le taux de sucre la sélection a été dans l’autre sens c'est-à-dire vers une sélection d’espèces très strictement dépendantes de la longueur du jour. Souvent ces sélections ont été accomplies avant que l’explication du processus soit connue (contrôle de la floraison par la lumière). VI-B3- f- Aspects moléculaires de la différenciation florale : Quand les plantes à fleurs ont atteint un certain développement des signaux de l’environnement peuvent déclencher la transition vers le développement floral. Le méristème apical arrête de produire des primordia foliaires et se met à produire des primordia d’organes floraux : pétales, sépales, étamines, carpelle. Les nombreuses études de génétique sur le développement de la fleur ont conduit à conclure que ce processus de développement est déterminé par un réseau très complexe et conservé de gènes opérant en cascade et qui s’expriment dans différents territoires spécifiques. La différenciation est, en effet un problème d’expression spatio-temporelle particulière de gènes spécifiques. Toutes les cellules d’un végétal contiennent les mêmes gènes seuls certains d’entre eux vont s’exprimer lors de la formation de certains organes. Les études sur des mutations qui affectaient la durée de temps nécessaire pour fleurir ou perturbaient la nature et la structure normale de la fleur ont permis d’identifier différents gènes que l’on peut classer dans les 4 catégories suivantes. Gènes impliqués dans la chronologie de floraison Gènes d’identité du méristème floral Gènes d’identité des organes floraux qui agissent plus tardivement dans le développement floral. Gènes de construction des organes floraux Il est à signaler cependant que des mutants qui restent indéfiniment à l’état végétatif n’ont pas été observés, ceci suggère qu’il existe certainement une redondance entre les gènes qui induisent la floraison et que l’inactivation de l’un d’entre eux est partiellement compensée par d’autres. Par ailleurs, dans les études sur Arabidopsis différentes voies de promotion de l’induction florale relativement indépendantes selon les variétés ont été mises en évidence : une induction autonome soit une induction par l’acide gibberellique ou par les facteurs de l’environnement (vernalisation, photopériode). a) Gènes de chronologie de floraison : Chez Arabidopsis la floraison est stimulée par les jours longs et chez certains écotypes par les températures froides (vernalisation). De nombreux mutants à floraison tardive sous conditions inductives ont permis d’identifier de nombreux loci impliqués dans la floraison. Mutant de type FCA : retard de floraison dans n’importe quelle condition de jour – FCA a été cloné – il code une protéine qui contient deux domaines de liaison à l’ARN et un domaine ww typique des interactions entre protéines suggérant qu’il s’agit d’un facteur régulateur post transcriptionnel (2 tryptophanes séparés par un motif consensus conservé). Par ailleurs, le mutant Co présente un retard dans la floraison en jour long et une réponse réduite à la vernalisation. La protéine correspondante à Co contient 2 doigts de Zinc suggérant sa capacité de liaison à l’ADN et son implication dans la régulation de l’expression génique. Son ARN est plus abondant en jour long. Des mutations sur les régions doigt de Zinc abolissent la fonction. b) Gènes d’identité de méristème floral : Le méristème apical caulinaire donne des feuilles, des entre nœuds, et des bourgeons axillaires. Il peut après sa transformation en méristème floral donner des organes floraux. Le méristème floral présente une activité déterminée de divisions cellulaires et d’organogénèse résultant dans la production de 4 cercles d’organes floraux (sépales, pétales, étamines et carpelles). Chez Arabidopsis sépales et pétales sont des organes protecteurs puis quand la fleur arrive à maturation ces organes jouent un rôle d’attraction des insectes pollinisateurs. En retenant comme plante modèle Arabidopsis thaliana des études de génétique classique et de génétique moléculaire ont permis de caractériser divers gènes associés à la transition méristème végétatif – méristème floral. Exemple gène Leafy = LFY. Des mutations de LFY causent un blocage de la transition méristème végétatif / méristème floral. Les fleurs sont remplacées par des pousses feuillées. Hypothèse : la protéine codée par LFY serait un facteur de transcription car elle contient une région riche en proline et des régions acides et basiques caractéristiques des facteurs de transcription. Une fonction de Leafy serait d’agir comme déclic génétique du développement de la fleur en régulant positivement l’expression en aval de gènes homéotiques. LFY est le 1er gène à être activé durant la transition. L’expression du gène est détectable avant apparition des primordia et s’arrête quand les 4 types d’organes sont en place. c) Gènes de spécification de l’identité des organes floraux Modèle ABC Ces gènes interviennent en aval des gènes d’identité de méristème floral et en amont des gènes de construction des organes floraux. Le modèle ABC proposé par Meyerowitz, implique des gènes dont l’expression se produit dans 3 domaines A. B. C. Ce modèle résulte des résultats de l’analyse des pertes de fonction de certains gènes. Gènes du domaine A expression unique sépale expression combinée pétale Gènes du domaine B expression combinée étamines Gènes du domaine C expression unique carpelle Domaines Gènes Phénotype perte de fonction A B C Apetala 1 Apetala 3 Agamous pas de pétale – pas de sépale pas de pétale – pas d’étamine pas de carpelles – pas d’étamines 1. Ces gènes correspondent à des gènes appelés homéotiques. Des mutations qui transforment des parties de l’organisme en structures normalement associées à d’autres positions / localisations sont appelées homéotiques. Des mutants homéotiques ont été initialement trouvés chez la drosophile – remplacement des antennes par des pattes – remplacement des yeux par des ailes. Ces gènes homéotiques ont des caractéristiques communes de gènes à boîte MAD (MAD box genes) codant des facteurs de transcription comprenant un domaine amino terminal de fixation de l’ADN de 58 ac. aminés très conservé. Chez ces protéines le domaine MAD fonctionne à la fois dans l’interaction avec l’ADN et avec des protéines (protein-protein interaction) et est hautement conservé au niveau des contrôles développementaux chez différents organismes. 2. Ces gènes sont très conservés entre les espèces (A. thaliana et Anthirinium majus par exemple), ils discriminent les types d’organes floraux mais ne donnent pas d’informations ou d’instructions sur le détail de la construction des organes floraux qui implique des gènes réalisateurs en aval. Ces gènes ont été caractérisés initialement à partir de mutations naturelles ou provoquées puis par des expériences de gène tagging (TDNA) conduisant au même phénotype. La disponibilité de la séquence a permis de faire des expériences d’hybridation in situ conduisant à montrer la localisation spécifique de l’expression de ces gènes : Apetala 2 Apetala 3 Agamous pétale/sépale pétale-étamine Etamines-carpelles L’expression tissu spécifique des gènes homéotiques est contrôlée essentiellement par des intéractions négatives. Par exemple l’expression du gène agamous (classe C) est réprimée dans les cercles extérieurs par le gène de classe A apetala 1. L’activation initiale des gènes homéotiques est réalisée au moins en partie comme cela a été dit par les produits de gènes exprimés plus précocement comme les gènes d’identité du méristème floral de type LEAFY. Des gènes autres que les gènes d’identité d’organes doivent contrôler le nombre d’organes dans chaque rang puisque les mutations de ces gènes n’altèrent pas le nombre d’organes mais seulement leur identité. Un exemple récent : Le contrôle de la floraison, un réseau complexe d’interactions entre facteurs inducteurs et répresseurs : cas particulier de la régulation du développement des fleurs par GA (Yu et al PNAS – 2004 – 101 – 20 – 7827). Chez Arabidopsis le mutant Ga1-3 déficient en gibberelline développe des fleurs dont la croissance est nettement retardée au niveau des différents organes floraux qui conservent cependant leur identité. Les progrès dans la connaissance des mécanismes d’action des gibberellines conduisent à penser que ces hormones contrôlent le développement en supprimant un groupe de protéines nucléaires à fonction de répresseurs : les protéines DELLA qui contiennent en commun un domaine N-terminal « DELLA » qui serait impliqué dans l’inactivation de ces protéines par le signal GA. Il existe 5 protéines DELLA dans le génome d’Arabidopsis (GAI, RGA, RGL1, RGL2, et RGL3). GA entraînerait la disparition de ces protéines represseurs en induisant leur dégradation par l’intermédiaire de mécanismes ubiquitine / protéasome dépendants. Comme ces protéines ne renferment pas de domaines typiques de liaison à l’ADN il est supposé que ces régulateurs transcriptionnels formeraient des complexes actifs avec d’autres facteurs de transcription pour contrôler l’expression des gènes. Il a été montré que la suppression de RGA et de RGL2 (mutations sur les gènes de ces protéines DELLA) restaure un développent floral normal chez le mutant ga1-3 indiquant leur rôle de répresseur dans le développement des fleurs. Des études ont été réalisées visant à évaluer l’impact de l’apport de GA et la surexpression de RGA sur différents gènes de contrôle de la floraison. LEAFY un gène en amont n’est pas affecté. En revanche les gènes homéotiques APETALA 3 et AGAMOUS sont induits par GA et réprimés par RGA. Ces résultats montrent que la croissance des organes floraux nécessite l’expression continue de certains gènes homéotiques. Il faut enfin mentionner que les protéines DELLA intervenant dans le contrôle d’une large gamme de processus du développement, leur implication dans la floraison doit faire intervenir des régulateurs fleur-spécifique. Schéma récapitulatif : Mutant ga1-3 DELLA PROTEINS Gènes homéotiques Fleurs à croissance réduite wt DELLA GA PROTEINS Schéma de synthèse : Gènes homéotiques Fleurs normales Signaux de l’environnement ou contrôles endogènes Gènes de chronologie de floraison emfi (répresseur) constans (Co) luminidependens Gènes d’identité de méristème floral Leafy CAL Gènes intermédiaires AGL2 AGL4 AGL9 Gènes d’identité des organes floraux modèle ABC FCA AP1 AP2 AP3 AG Gènes réalisateurs Ex : sépales AGL1 , pétales AGL5 (exprimés spécifiquement dans les carpelles en différenciation par exemple) étamines carpelles Les gènes encadrés d’un rectangle sont des gènes homéotiques à boîte MAD Plus de 80 gènes ont été impliqués dans le contrôle de la floraison chez Arabidopsis. Ces gènes codent fréquemment des régulateurs transcriptionnels et sont en interactions positives ou négatives dans un réseau extrêmement complexe. Les gènes à domaines MAD ont un rôle prépondérant. VI-C- PHYSIOLOGIE DE LA SENESCENCE La sénescence correspond chez les végétaux à une phase normale du cycle de développement des espèces qui se place après l’état juvénile, la maturité et l’acquisition de l’état reproducteur et au cours de laquelle s’installent des processus de dégénérescence irréversibles des structures et des fonctions cellulaires qui vont conduire à une détérioration des tissus et organes et finalement à la mort de ces organes ou même de l’organisme (au cours de cette phase la plante est en état de sénescence). En particulier, chez les annuelles la sénescence n’est pas due à des conditions externes défavorables (elle peut être accéléré par ces facteurs), mais à des régulations internes, il s’agit d’un événement programmé. La sénescence peut donc se développer en absence de toute condition extérieure défavorable mais le froid, la sécheresse, l’ombrage, l’élimination de certains organes de la plante peuvent l’induire et l’accélérer. On a souvent rapproché la sénescence de l’apoptose ou mort cellulaire programmée chez les animaux (PCD). En fait les phénomènes sont assez distincts : 1. On ne retrouve pas lors de la sénescence des indicateurs biochimiques propres de la PCD Signaux mitochondriaux DNA ladder Intervention de caspases 2. Les analogies seraient plus évidentes au niveau de la réponse hypersensible (HR) qui, chez les végétaux correspond à la mise en place d’une zone de cautérisation par mort cellulaire autour d’un site d’infection empêchant la diffusion du pathogène ou au niveau de phénomènes de mort cellulaire isolés à l’échelle de la plante : Cellules des vaisseaux à l’intérieur du xylème Cellules à aleurone Enfin on peut évoquer le terme d’oncose pour désigner la mort accidentelle de cellules de plante qui ne sont plus capables de réparer les dommages causés par le stress. VI-C1- Modalités de la sénescence selon les types de végétaux : La sénescence peut concerner l’ensemble du végétal ou seulement certaines de ses parties. Ainsi chez les espèces monocarpiques, elle concerne l’ensemble de la plante et se produit dès la floraison (annuelles, bisannuelles, pluriannuelles) seules les graines survivent et assureront la survie de l’espèce. Chez ces espèces la sénescence au niveau des feuilles peut être progressive et séquentielle par exemple les feuilles âgées meurent les premières alors que les feuilles plus jeunes restent en vie suggérant aux différents niveaux, différents équilibres nutritifs et hormonaux. Espèces pérennes : Les herbacées peuvent voir leur système aérien mourir chaque année en conditions défavorables mais leur système racinaire reste en vie et permet le départ de la végétation au printemps. Chez les arborescentes à feuilles caduques seules les feuilles, les fleurs et les fruits entrent en sénescence. Le tronc, les branches, les bourgeons et les racines restent en vie. Chez les arborescentes à feuilles persistantes, les feuilles les plus âgées deviennent sénescentes après une période variables de 1 à 7 ans alors que les feuilles jeunes continuent à croître et l’arbre est toujours couvert de feuilles. Si la sénescence est directement liée au programme de développement pour les espèces monocarpiques qui entrent en état de sénescence dès la floraison [certaines plantes monocarpiques maintenues dans des conditions d’éclairement défavorables pour la floraison voient leur sénescence différée de plusieurs années], les facteurs responsables du déclenchement de la sénescence sont moins nets et beaucoup plus complexes au niveau des espèces pérennes. Il existe bien sûr des différences liées aux caractéristiques génétiques, certaines espèces ayant des longévités exceptionnelles, ex : Pinus aristata 4000 ans (Juniperus ostreatus) mais des maladies, des stress divers, des conditions défavorables de nutrition, la difficulté accrue des échanges au sein de l’individu avec l’augmentation de ses dimensions peuvent favoriser la sénescence. VI-C2- Modifications liées à la sénescence : La sénescence a été essentiellement étudiée chez les feuilles, les fleurs et les fruits (nous avons parlé des fruits à propos du contrôle de la maturation par l’éthylène, début d’une phase de sénescence, nous considérons seulement ici le cas des feuilles). a) Modifications visibles : Changement de coloration des feuilles – couleur automnale due à la disparition de la chlorophylle qui ne masque plus les caroténoïdes de couleur jaune-orangée et/ou à la synthèse de pigments anthocyaniques rouges/roses. A la suite de la sénescence des feuilles un phénomène visible est l’abcission. b) Modifications ultrastructurales : Diminution de la taille des choroplastes et des mitochondries puis détérioration, diminution du nombre de ribosomes Altération des systèmes membranaires, tonoplaste, disparition de l’ER, dictyosomes, altération du plasmalemme lors des étapes finales. Les ruptures de compartimentation liées aux altérations sont létales pour la cellule : invasion décompartimentation ionique du cytosol par les protéases, c) Modifications biochimiques : Elles sont associées aux modifications ultrastructurales précédentes Diminution de la photosynthèse avec une destruction des chlorophylles Diminution de la respiration Diminution de la teneur en protéine : dégradation accrue, synthèse réduite Diminution des ac. nucléiques dégradation accrue (Rnase). Ces modifications peuvent être globalement liées à un ralentissement de la synthèse et à une accélération de la dégradation. D’une manière générale on assiste à une diminution des teneurs en macromolécules à l’exception des constituants pariétaux, et à une augmentation transitoire en petites molécules. La vacuole jouerait un rôle particulièrement important dans la sénescence avec son rôle lysosomal. Elle renferme en effet des hydrolases normalement séparées du cytoplasme et la détérioration de la membrane vacuolaire (le tonoplaste) permettrait la libération de protéases, nucléases, phosphatases qui hydrolyseraient les constituants cytoplasmiques. Si la sénescence n’est pas associée à une activité de croissance ou de morphogénèse ce n’est pas un phénomène passif mais un processus de différenciation particulier, associé à l’expression de nouveaux gènes qui ont été regroupés sous l’appellation gènes SAG (sénescence associated genes). La nécessité d’une synthèse protéique est, par ailleurs, démontrée par l’arrêt de sénescence provoquée par des inhibiteurs de la synthèse protéique. Les gènes SAG sont nombreux ils correspondent à diverses fonctions Facteur de transcription potentiellement impliqués dans les cascades de signalisation associées à la mise en place de la sénescence ex : WRKY 6 (domaine conservé de 60 acides aminés domaine WRKY). Protéases comme SAG12 chez Arabidopsis :Protéase à cystéine Chlorophyllase : impliquée dans la dégradation des chlorophylles Phospholipase (SAG 101) libère de l’acide oléique à partir de trioléine. La désorganisation des membranes pendant la sénescence résulte en partie de la dégradation des lipides membranaires par différentes enzymes comme la phospholipase D, la lipoxygénase. Cette dernière enzyme donne lieu à la formation de radicaux libres : oxygène singulet, radical superoxyde très toxiques pour les structures cellulaires et contribue à la formation d’acide jasmonique parfois appelée hormone de mort. Des études avec des techniques comme la RPE (résonance de spin paramagnétique) montrent une augmentation de ces radicaux avec la sénescence alors que les enzymes de détoxification des radicaux :peroxydase, catalase, superoxyde dismutase voient leur activité diminuer. VI-C3- Les causes de la sénescence Causes nutritives : Cette hypothèse propose que la sénescence des feuilles serait induite par une carence en ressources nutritives en raison du prélèvement de métabolites pour la formation des fleurs, des graines et des fruits : organes non photosynthétiques. Effectivement l’ablation des jeunes bourgeons floraux ou de jeunes fruits diffère considérablement la sénescence chez des espèces comme le soja ou la tomate. Ceci est en accord avec la sénescence des espèces monocarpiques qui débute avec la floraison. Cependant cette hypothèse intéressante ne peut-être généralisée. En effet, ces observations ne sont pas retrouvées chez d’autres espèces comme les céréales. Par ailleurs, sur certaines espèces dioïques (Epinard) l’élimination des fleurs mâles a le même effet que l’élimination des fleurs femelles dont les besoins nutritifs sont beaucoup plus importants. Par ailleurs, l’apport massif d’engrais, de substances nutritives ne retarde pas la sénescence chez les plantes ayant fleuri, il semble donc que la floraison soit à l’origine d’un signal systémique marquant le début de la sénescence. Causes hormonales : L’effet antisénescence des cytokinines est classique il peut être en partie expliqué au plan mécanistique par une stimulation de la synthèse protéique et un effet de rétention des métabolites en présence des cytokinines (effet MOTHES). On observe une réduction des teneurs en cytokinines ou de l’excrétion de cytokinines au niveau des exsudats racinaires (Tournesol) lors de l’installation de la sénescence. L’apport de cytokinines exogènes (mais aussi d’autres hormones comme GA3 ce qui suggère un contrôle multihormonal) retarde la sénescence. Par ailleurs diverses expériences de transgénèse visant à surexprimer le gène de l’isopentenyltransférase (IPT) dans différentes conditions en particulier en association avec des promoteurs de gène SAGE montrent un retard spectaculaire de la sénescence. L’éthylène a par ailleurs un effet inducteur de la sénescence particulièrement net chez les fleurs. VI-C4- La sénescence foliaire une étape de remobilisation des éléments nutritifs pour le remplissage des graines. La sénescence foliaire s’accompagne de la dégradation des macromolécules (protéines, acides nucléiques..) et de la migration des produits d’hydrolyse et d’une manière générale des petites molécules présentes dans les feuilles vers les parties de la plante encore en développement fruit et surtout graine. Il s’agit d’un processus très adapté de récupération « utile » des nutriments formés par la plante au cours de son développement végétatif. Les études ont surtout porté sur les protéines et sur la protéine foliaire la plus abondante : la Rubisco. VI-C5- Approches Biotechnologiques visant à différer la sénescence : Nous avons déjà parlé du problème de la conservation des fruits. En ce qui concerne les fleurs et les feuilles différentes stratégies ont été explorées. Tout d’abord il faut noter que peu de mutants affectés dans la sénescence ont été caractérisés. On peut signaler le mutant Arabidopsis Ore 9 qui correspond à la perte de fonction d’une « protéine F Box » composante des systèmes de protéolyse ubiquitine dépendant. Ce qui confirme l’implication de ce système dans la sénescence. Pour les feuilles une préoccupation des sélectionneurs est de privilégier chez certaines cultures le phénotype « stay green » qui permet un maintien prolongé de l’activité photosynthétique. Des expériences exploratoires de transgénèse ont été envisagées ¾ Par surexpression du gène IPT ¾ Par surexpression de gène de superoxyde dismutase ou de catalase. Par ailleurs un traitement après récolte (laitue par exemple) par acide ascorbique, EDTA ou GA3, a été envisagé pour éviter jaunissement et flétrissement. Pour les fleurs (la fleur coupée n’a pas achevé sa croissance en général lors de la vente), des solutions nutritives visant 2 objectifs sont commercialisées (type SEVAFLOR) afin d’améliorer la conservation ¾ Antiseptiques, agents d’acidification pour éviter la formation de bouchons au niveau des vaisseaux (d’origine fongique ou résultant de la précipitation de certains sels – fluorure, sels de Ca++ ¾ Eléments nutritifs de type glucose ou saccharose. On arrive ainsi à multiplier la longévité par un facteur 3. VI-C6 – L’abcission : La phase finale de la sénescence en ce qui concerne les organes comme les feuilles, les fleurs et les fruits consiste en leur séparation de la plante mère lors du phénomène d’abcission. Considérons le cas des feuilles : VI-C6- a- Description du phénomène : L’abcission se produit généralement à la base du pétiole, près de la jonction avec la tige. • A ce niveau se produit avant l’abcission une période de divisions cellulaires intenses qui aboutit à la mise en place de la zone d’ abcission. Cette zone comprend des cellules petites à parois minces et se met en place à des périodes différentes avant l’abcission selon les espèces. • Il se produit ensuite une augmentation des activités enzymatiques : pectinases, cellulases au niveau de cette zone d’abcission entraînant la lyse de parois des cellules. Les cellules se gélifient et la feuille n’est plus retenue que par les faisceaux conducteurs qui seront rompus mécaniquement par le vent. Enfin une couche de cicatrisation subérisée se met en place (liège) qui protège la section au niveau de la tige des pertes d’eau et de l’invasion des pathogènes. VI-C6- b- Mécanismes : Nous avons déjà précisé à propos de l’ABA que cette hormone ne représentait pas le véritable facteur de l’abcission. Il s’agit comme dans de nombreux cas d’un contrôle plurihormonal. L’AIA produit par la feuille retarde l’ abcission tant que la feuille est jeune (des résultats contradictoires ont été initialement obtenus en relation avec l’application d’AIA exogène liée à la production secondaire d’éthylène). Au cours de la sénescence l’auxine diminue progressivement (l’ablation du limbe producteur d’auxine accélère l’abcission. Les cytokinines et gibberellines retardent également l’abcission. A partir d’un certain moment il y aurait dans les tissus sénescents production d’éthylène qui stimule la production d’enzymes d’hydrolyse (cellulases – pectinase) actives dans l’abcission. Lors de la sénescence des feuilles, dans le cas des espèces pérennes, les constituants de petits poids moléculaire résultant de l’hydrolyse des réserves (protéines par exemple) migrent soit vers les bourgeons dormant soit vers les rayons ligneux du bois (files de cellules parenchymateuses) où ils seront réutilisés dès le départ de la végétation au printemps. Le contenu en substances minérales et en matière organique des feuilles après abcission ou de l’organisme entier pour les espèces monocarpiques sera repris dans les phénomènes d’humification (formation de l’humus) et après passage par les cycles des éléments de la biosphère pourra être réutilisé par la végétation. En horticulture et agriculture on peut vouloir prévenir l’abcission prématurée des fleurs ou fruits par application de régulateurs de croissance (auxines de synthèse) ou au contraire favoriser l’ abcission des feuilles pour favoriser la récolte d’autres organes (cotonnier).