C A S C L I N I Q U E CETTE RUBRIQUE A ÉTÉ RÉALISÉE AVEC LE SOUTIEN DE ONCOLOGIE Une adénopathie axillaire isolée ● R. Gilles*, N. Dohollou* me R., âgée de 43 ans, consulte pour une adénopathie axillaire gauche isolée survenue depuis environ un mois, sans antécédent médical ni chirurgical particulier. À l’interrogatoire, il n’y a pas d’antécédents personnels de cancer du sein, mais une grand-mère paternelle a été traitée pour une néoplasie mammaire. Mme R. a eu plusieurs stimulations ovariennes. Il n’y a pas de notion d’excoriation ni de blessure du membre supérieur gauche. Mme R. ne possède pas d’animal de compagnie. À l’examen clinique, il n’y a pas d’autres localisations ganglionnaires ni d’hépatosplénomégalie. L’examen clinique des deux seins ne révèle pas de masse palpable, d’écoulement mamelonnaire ou de signes cutanés d’inflammation. L’adénopathie axillaire gauche est unique et isolée, indolore, et mesure 15 mm. À l’examen radiologique (figure 1a et b) et échographique (figure 2) des deux seins, on ne retrouve pas d’image tumorale, d’altération tissulaire suspecte ni de foyer de microcalcifications, notamment dans le sein gauche. L’étude échographique du ganglion axillaire gauche montre une lésion hypoéchogène irrégulière avec une couronne hypoéchogène de 8 mm de diamètre (figure 3). La biopsie chirurgicale puis l’analyse histologique permettent de poser le diagnostic d’une adénopathie axillaire métastatique isolée. M Un examen IRM des seins est effectué en séquence pondérée T1 avec étude dynamique avant puis après injection de gadolinium. Sur les séquences pondérées T1 sans injection (figure 4), il n’y a pas d’image tumorale ni d’altération tissulaire suspecte. Après injection de gadolinium (figure 5), il existe une prise de contraste précoce survenue une minute après injection. Elle a un aspect morphologique en couronne, est située dans la région rétro-aréolaire et mesure 10 mm. L’aspect morphologique et cinétique de cette prise de contraste est très suspect et nécessite une vérification histologique. Un examen échographique est effectué, centré sur la prise de contraste suspecte détectée à l’examen IRM. Il met en évidence, dans la région rétro-aréolaire, une lésion nodulaire hypoéchogène avec atténuation discrète du faisceau ultrasonore postérieur de 10 mm de diamètre. Figure 1a. Figure 1b. Figure 2. Un repérage préopératoire est réalisé sous contrôle échographique. La biopsie chirurgicale avec curage axillaire et l’analyse histologique permettent le diagnostic d’un carcinome canalaire infiltrant de grade II de 15 mm de diamètre avec 7 ganglions envahis sur le curage axillaire. Les récepteurs hormonaux estrogènes et progestérone sont fortement positifs. Figure 3. * Polyclinique de Bordeaux-Nord-Aquitaine. La Lettre du Sénologue - n° 16 - avril/mai/juin 2002 23 Figure 5. DISCUSSION Depuis 1986, l’imagerie par résonance magnétique (IRM) du sein fait l’objet de très nombreuses publications et prend place dans les méthodes de diagnostic en pathologie mammaire. La sensibilité supérieure à 95 % est confirmée par toutes les équipes, et ce quelles que soient la machine ou la séquence utilisées. Cependant, certaines lésions bénignes prennent le contraste précocement après injection de gadolinium. Actuellement, l’IRM est un examen de troisième intention réservé aux problèmes diagnostiques difficiles. Dans le contexte diagnostique actuel induit par le développement des campagnes de dépistage par la mammographie, l’IRM du sein 24 Le cancer du sein peut se présenter sous la forme d’une adénopathie axillaire isolée sans signe clinique radiologique ni échographique. L’incidence de ce mode de présentation est comprise entre 0,3 % et 0,8 % de tous les cancers du sein. Le traitement le plus habituel est l’association d’une quadrantectomie supéro-externe à une irradiation loco-régionale qui ne permet de retrouver la tumeur primitive que dans 30 à 40 % des cas. Dans les séries publiées, l’IRM du sein permet de retrouver une lésion dans 75 à 80 % des cas. Ces lésions détectées uniquement à l’IRM nécessitent un repérage sous contrôle IRM en préopératoire afin d’assurer de leur exérèse complète. ■ La Lettre du Sénologue - n° 16 - avril/mai/juin 2002 Réf. : DENV 2130 - 2002/06 Figure 4. permet de répondre avec fiabilité à l’attente des cliniciens et facilite la prise en charge des patientes. Ses indications, encore relativement restreintes, évoluent en fonction de l’expérience croissante des équipes. Il s’agit principalement du diagnostic des récidives locales du cancer du sein après traitement conservateur, de l’évaluation de la chimiothérapie préopératoire dans les grosses tumeurs du sein et de la surveillance des prothèses mammaires. Dans le diagnostic de récidives locales du cancer du sein après traitement conservateur, les modifications induites par la chirurgie et la radiothérapie rendent difficile l’interprétation des examens cliniques et mammographiques au cours de la surveillance post-thérapeutique. Parmi les patientes opérées, la moitié seulement ont réellement une récidive locale. Quand la reprise évolutive est confirmée, elle est cliniquement latente chez 30 % des patientes et il n’y a pas de signe mammographique de récidive ou de seconde localisation chez 30 % des patientes également. De nombreuses équipes ont montré les excellentes sensibilité et spécificité de l’IRM dans le diagnostic des récidives locales, passé un délai de 12 à 18 mois. Dans ce contexte diagnostique difficile, l’IRM facilite grandement la prise en charge de ces patientes ayant eu un traitement conservateur. Les grosses tumeurs bénéficient d’une chimiothérapie préopératoire dont le double but est d’évaluer leur sensibilité à ce traitement et de rendre possible un traitement conservateur. Malgré l’importance pronostique de la tumeur résiduelle après chimiothérapie, celle-ci ne peut être quantifiée par les méthodes d’imagerie classiques (mammographie, échographie). De nombreuses séries ont démontré l’excellente corrélation entre l’IRM et l’histologie dans ce contexte. L’IRM permet donc d’évaluer la réponse du cancer à la chimiothérapie et de mieux déterminer la nature du traitement local. Les prothèses mammaires sont principalement utilisées pour les plasties d’augmentation et pour les reconstructions mammaires après une mastectomie totale ou sous-cutanée. Elles peuvent être à simple ou double lumière et placées en situation rétro ou prépectorale. Les techniques classiques d’imagerie ne permettent pas de les identifier avec précision, ni de diagnostiquer avec fiabilité les complications des implants préremplis de silicone, et notamment les ruptures intracapsulaires.