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R É F É R E N C E . . .
La prévention primaire par hormonothérapie
substitutive en question : Women’s Health Initiative
RÉFÉRENCE
Risks and benefits of estrogen plus progestin in healthy postmenopausal women. Principal results from the Women’s
Health Initiative randomized controlled trial.
Writing Group for the Women’s Health Initiative Investigators. ❏ JAMA 2002 ; 288 : 321-33.
LE FOND
Incluant 16 608 femmes ménopausées sans antécédent d’hystérectomie, âgées en moyenne de 63 ans, le Women’s Health
Initiative a étudié, en prévention essentiellement primaire, l’impact d’une hormonothérapie substitutive per os composée de 0,625 mg/jour d’estrogène conjugué et de 2,5 mg/jour d’acétate de médroxyprogestérone (8 506 femmes)
contre placebo (8 102 femmes). Un index global a évalué, outre la mortalité, l’incidence de sept pathologies : coronaropathie, accident vasculaire cérébral, embolie pulmonaire, cancer du sein, cancer colorectal, cancer endométrial, fracture de hanche. Planifiée pour une durée de 8,5 ans, l’étude a été interrompue après un suivi moyen de 5,2 ans en raison d’un rapport bénéfice/risque en défaveur du traitement hormonal : majoration dès le début du suivi des événements
coronariens (hazard ratio – HR – : 1,29) ; majoration à partir de un à deux ans des accidents vasculaires cérébraux (HR :
1,41) ; majoration précoce et constante des embolies pulmonaires (HR : 2,13) ; majoration à partir de la quatrième année
des cancers du sein (HR : 1,26) ; en contrepartie, diminution à partir de la troisième année du taux des cancers colorectaux ( HR: 0,63 ) et diminution soutenue et continue des fractures de hanche (HR : 0,66), mais avec, en définitive, un HR
global à 1,15 justifiant l’arrêt précoce de l’étude. De plus, 42 % des femmes sous hormonothérapie et 38 % des femmes
sous placebo ayant interrompu leur traitement pendant le suivi, les résultats en intention de traiter du Women’s Health
Initiative sont sans doute sous-estimés dans leur ampleur. La mortalité de toutes causes n’est pas influencée par le traitement hormonal (HR : 0,98).
COMMENTAIRES
Après la publication d’études, dont HERS (JAMA 1998), concernant la prévention secondaire par hormonothérapie
substitutive pour des patientes ménopausées coronariennes, et authentifiant une majoration du risque cardiaque lors de la
première année, les recommandations de l’American Heart Association (Circulation 2001) stipulaient l’absence de mise
en route d’un traitement hormonal pour la prévention secondaire des maladies cardiovasculaires. L’attitude pour la prévention primaire restait indécise dans l’attente de grandes études randomisées, dont le Women’s Health Initiative, et la
question cruciale pour nombre de femmes (aux États-Unis, environ 38 % des femmes ménopausées utilisent une hormonothérapie substitutive).
Les résultats du Women’s Health Initiative rendent circonspect. Certes, l’incidence des événements défavorables
comptabilisés sous traitement reste faible : sur 10 000 femmes traitées pendant une année, on observera 7 événements
coronariens, 8 accidents vasculaires cérébraux, 8 embolies pulmonaires et 8 cancers du sein de plus (ainsi que 6 cancers
colorectaux et 5 fractures de hanche de moins). Cependant, sur le suivi global de 5,2 ans, l’excès de complications
concerne 1 % des femmes traitées, et s’agissant d’une prévention primaire, donc prescrite à des femmes ménopausées
en bonne santé, il est souhaité un risque zéro, selon l’adage : primum non nocere. Dans la lignée des études de prévention secondaire, le Women’s Health Initiative confirme la survenue précoce, après la mise en route du traitement substitutif, des complications coronariennes et thromboemboliques veineuses. On ne saurait actuellement généraliser ces résultats et les extrapoler à une substitution hormonale utilisant d’autres produits, d’autres posologies, ou d’autres voies
d’administration... Mais le doute existe, remettant en cause le bien-fondé d’une prescription médicale largement diffusée, et une réponse claire est vivement souhaitée, si l’on considère le nombre important de patientes concernées.
BIBLIOGRAPHIE.
Parmi les 43 références citées, les grandes études de prévention secondaire concernant des
patientes coronariennes (HERS, JAMA 1998 - Nurses’ Health Study, Ann Intern Med 2001). À lire, les recommandations
de l’American Heart Association (Circulation 2001 ; 104 : 499-503) et l’éditorial associé à l’article analysé : “Failure of
estrogen plus progestin therapy for prevention” (Fletcher SW, Colditz GA. JAMA 2002 ; 288 : 366-8).
MOTS-CLÉS. Hormonothérapie substitutive estroprogestative - Ménopause - Prévention primaire - Coronaropathies - Maladie thromboembolique veineuse - Accidents vasculaires cérébraux - Cancer du sein.
TIRÉS À PART. WHI Clinical Coordinating Center, Division of Public Health Sciences, Fred Hutchinson
Cancer Research Center, 1100 Fairview Ave N, MP 1002, PO Box 19024, Seattle, WA 98109-1024, États-Unis.
C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil
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La Lettre du Cardiologue - n° 358 - octobre 2002
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