L’hormonothérapie du cancer du sein Gestion des effets secondaires Jacques Jolivet Oncologue médical Co-gestionnaire médical cancérologie CISSS des Laurentides L’hormonothérapie du cancer du sein Médicaments • MODULATEURS SÉLECTIFS DU RÉCEPTEUR DES OESTROGÈNES (SERM) : • Tamoxifène - propriétés mixtes antagonistes et agonistes • Effets antagonistes : • Inhibe les récepteurs ostrogéniques dans les tissus mammaires • Induit la ménopause : • Bouffées de chaleur, changements d’humeur, atrophie vaginale, dysfonction sexuelle, gain pondéral • Effets agonistes : • Hyperplasie endométriale avec pertes vaginales et irrégularités menstruelles • Augmentation du risque du cancer de l’endomètre • Augmentation du risque de thromboembolies • Augmentation de la densité osseuse • Diminution du cholestérol total et LDL L’hormonothérapie du cancer du sein Médicaments • ANTI-AROMATASES : • Inhibent ou inactivent l’enzyme aromatase qui est responsable de la conversion des androgènes en estrogènes avec diminution de > 90 % des estrogènes circulants : • Inhibiteurs non-stéroïdiens • letrozole (Femara™) • anastrazole (Arimidex™) • Inactivateur stéroïdien • exemestane (Aromasyn™) • Les trois agents ont des activités biochimiques et cliniques comparables • Inactifs chez les femmes ayant une fonction ovarienne intacte L’hormonothérapie du cancer du sein Médicaments • ANTI-AROMATASES : • Effets immédiats de l’abolition des estrogènes circulants : • Bouffées de chaleur, changements d’humeur, atrophie vulvovaginale, dysfonction sexuelle, gain pondéral • Effets prolongés de l’abolition des estrogènes circulants : • Risques accrus d’ostéoporose et maladies cardiovasculaires • Syndrome musculo-squelettique : • Étiologie inconnue • Arthralgies, raideurs articulaires et/ou douleurs osseuses chez près du tiers des patientes • Tunnel carpien L’hormonothérapie du cancer du sein Indications thérapeutiques • Femmes pré-ménopausées : • Candidates à une chimiothérapie adjuvante • Suppression ovarienne plus exemestane • Non candidates à la chimiothérapie • Tamoxifène • Les anti-aromatases ne devraient pas être utilisés seuls chez les femmes ayant une fonction ovarienne intacte • Femmes post-ménopausées (> 60 ans ou plus d’un an sans menstruations) : • Un anti-aromatase plutôt que le tamoxifène • Durée : • Un minimum de 5 ans d’anti-aromatase avec 5 ans additionnelles si possible • Pour les femmes ayant reçu 5 ans de tamoxifène, il est recommandé de recevoir 5 années additionnelles d’un anti-aromatase ou 5 années additionnelles de tamoxifène si non toléré L’hormonothérapie du cancer du sein Impact de la compliance Treatment Adherence and Its Impact on Disease-Free Survival in the Breast International Group 1-98 Trial of Tamoxifen and Letrozole, Alone and in Sequence Journal of Clinical Oncology 34:2452-2459, 2016 CONSORT diagram showing the derivation of the 6,144 women in the analytic cohort. Jacquie H. Chirgwin et al. JCO 2016;34:2452-2459 ©2016 by American Society of Clinical Oncology Cumulative incidence of stopping protocol-assigned endocrine treatment because of an adverse event according to treatment assigned in the Breast International Group 1-98 clinical trial La raison principale (83 %) de l’arrêt de l’hormonothérapie est la toxicité médicamenteuse Jacquie H. Chirgwin et al. JCO 2016;34:2452-2459 ©2016 by American Society of Clinical Oncology Survival estimates of disease-free survival (DFS) comparing patients (Pts) who received ≥ 36 months of assigned endocrine treatment (blue line) with those who received < 36 months (gold line) Jacquie H. Chirgwin et al. JCO 2016;34:2452-2459 ©2016 by American Society of Clinical Oncology Adverse events reported as reason for stopping protocol-assigned endocrine treatment early according to treatment group Jacquie H. Chirgwin et al. JCO 2016;34:2452-2459 ©2016 by American Society of Clinical Oncology L’hormonothérapie du cancer du sein Gestion des effets secondaires • Syndrome musculo-squelettique : • Discontinuer l’anti-aromatase pour 2 à 8 semaines jusqu’a résolution des symptômes et débuter un nouvel antiaromatase. Le taux de réussite est d’environ 40 % • Un programme d’exercice (exercices de résistance supervisés deux fois semaine et exercices aérobiques modérés de 150 minutes par semaine) peut atténuer les symptômes • Les AINS et la duloxetine (Cymbalta™) peuvent être utiles • Le traitement est modifié pour le tamoxifène chez les patientes intolérantes aux anti-aromatases L’hormonothérapie du cancer du sein Gestion des effets secondaires • Thromboembolies : • Les risques de thromboembolies sont accrues de deux à trois fois chez les patientes sous tamoxifène • Les anti-aromatases ne sont pas associés à un risque accru de thromboembolies • Les facteurs de risque associés à l’emploi du tamoxifène incluent une chirurgie antérieure, une fracture et une immobilisation • Il est recommandé de cesser le tamoxifène quelques jours avant une chirurgie L’hormonothérapie du cancer du sein Gestion des effets secondaires • Bouffées de chaleur : • Particulièrement fréquentes avec le tamoxifène • Près de 80 % des femmes se plaignent de bouffées de chaleurs jugées sévères chez 30 % • Les anti-aromatases provoquent généralement des bouffées de chaleurs moins fréquentes et sévères • Parfois associées à des changements d’humeur pouvant aller jusqu’à la dépression particulièrement chez les femmes pré-ménopausées placées sous tamoxifène ou suppression ovarienne plus exemestane • L’emploi des thérapies estrogéniques est contrindiqué L’hormonothérapie du cancer du sein Gestion des effets secondaires • Bouffées de chaleur : • Aucun des traitements suivants n’est universellement efficace. Des essais de quelques semaines peuvent être tentés successivement et parfois en association • Les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) sont souvent employés en première ligne. Ils sont particulièrement indiqués lorsqu'il y a des symptômes dépressifs associés • Les ISRS inhibent les CYP2D6 qui métabolisent le tamoxifène à son métabolite actif principal, l’endoxifène. L’impact des polymorphismes CYP2D6 sur l’efficacité du tamoxifène est incertain cependant • Les ISRS qui sont les plus puissants inhibiteurs des CYP2D6, particulièrement la paroxétine (Paxil™) et la fluoxétine (Prozac™), pourraient théoriquement diminuer l’efficacité du tamoxifène • Il est recommandé d’employer plutôt la venlafaxine (Effexor™) ou le citalopram (Celexa™) qui inhibent moins les CYP2D6 • La gabapentine peut être administrée au coucher (300-600 mg) chez les femmes qui ont surtout des sudations nocturnes • Le megestrol (Megace™) peut être efficace à petites doses (20 mg po die) • La clonidine (Catapres™; Dixarit™) peut parfois être utile L’hormonothérapie du cancer du sein Gestion des effets secondaires • Hyperplasie endométriale, pertes vaginales, irrégularités menstruelles et augmentation du risque du cancer de l’endomètre associés au tamoxifène • Le risque du cancer utérin est accru (environ x 2.4) mais n’est pas associé à un risque accru de décès par cancer de l’endomètre • Le suivi d’usage est recommandé chez les femmes post-ménopausées qui n’ont pas de pertes sanguines. Les biopsies endométriales et les échographies utérines ne sont pas indiquées • Une biopsie endométriale est indiquée chez les femmes post-ménopausées qui ont des pertes sanguines • Une évaluation avec échographie, hystéroscopie et biopsie endométriale est recommandée chez les femmes pré-ménopausées avec pertes sanguines irrégulières si la source n’est pas identifiée • L’épaisseur de l’endomètre à l’échographie ne doit pas automatiquement provoquer une investigation plus approfondie puisque le tamoxifène entraîne un épaississement des glandes sous-endométriales L’hormonothérapie du cancer du sein Gestion des effets secondaires • Conclusions : • De 30 à 50 % des patientes ne complètent pas l’hormonothérapie adjuvante prévue • L’arrêt de l’hormonothérapie est associée à une risque plus élevé de récidive du cancer du sein • Une meilleure connaissance et une gestion rapide et soutenue des effets secondaires pourrait améliorer la compliance