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Le rôle des récepteurs des tyrosine kinases
dans l’angiogenèse tumorale
● J. Fayette*, G. Sledge**, J.P. Armand***
ère de l’oncologie moléculaire, qui a commencé avec
des agents ciblant le récepteur HER2 et la protéine de
fusion Bcr-Abl, progresse, avec une multitude de nouvelles thérapies ciblées actuellement en développement préclinique et clinique. Il en résulte un changement fondamental dans
l’approche des traitements anticancéreux, obligeant les cliniciens
à comprendre les nouvelles technologies et à envisager leurs
potentialités en usage clinique.
L’une des cibles de ces nouvelles thérapeutiques est l’angiogenèse tumorale, formation de néovaisseaux sanguins par une
tumeur en croissance. C’est un processus complexe et pas encore
totalement compris, avec de nombreuses étapes et de nombreuses
voies, régulant l’équilibre entre état pro-angiogénique et antiangiogénique. L’intérêt d’une thérapie inhibant l’angiogenèse
réside en partie dans le fait qu’il s’agit de la seule approche nouvelle ciblant des composants tumoraux autres que les cellules cancéreuses. La thérapie anti-angiogénique qui vise spécifiquement
des cellules endothéliales normales, stables génétiquement, pour
inhiber la vascularisation des tumeurs en croissance a plusieurs
avantages (tableau I) (1).
Les thérapies anti-angiogéniques laissent espérer des améliorations pour les patients, grâce à une efficacité et à une tolérance
supérieures à celles des autres thérapies cytotoxiques. Cette
monographie résume brièvement l’angiogenèse et se focalise
sur les récepteurs et les facteurs de croissance par lesquels les
cellules endothéliales de l’environnement tumoral sont stimulées pour former des néovaisseaux.
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L’ANGIOGENÈSE TUMORALE
L’homéostasie angiogénique
De nombreux facteurs naturels avec une activité anti-angiogénique ont été décrits (tableau II) (2), mais seuls quelques-uns ont
été étudiés comme agents thérapeutiques potentiels. Le principal
inhibiteur physiologique de l’angiogenèse est la thrombospon* Hôpital Saint-Louis, service d’oncologie médicale, 1, avenue Claude-Vellefaux,
75010 Paris.
** Indiana University Hospital, Indianapolis, Indiana, États-Unis.
*** Institut Gustave-Roussy, 39, rue Camille-Desmoulins, 94805 Villejuif Cedex.
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
Tableau I. Avantages des cellules endothéliales comme cibles thérapeutiques anticancéreuses (1).
• Il se développe moins souvent de résistances qu’avec les drogues
ciblant directement les cellules tumorales. À la différence des cellules
tumorales, les cellules endothéliales sont stables génétiquement,
diploïdes et homogènes. Les mutations spontanées sont rares. Des traitements prolongés sont donc possibles.
• Les cellules endothéliales des tumeurs se divisent de 50 à 100 fois
plus vite que les cellules endothéliales normales, et les cellules endothéliales activées expriment des marqueurs non exprimés ou à un
niveau beaucoup plus faible par les cellules endothéliales quiescentes.
• Comme l’angiogenèse chez l’adulte est normalement limitée,
il doit y avoir peu d’effets secondaires avec les agents antiangiogéniques.
• À la différence des cellules tumorales, les cellules endothéliales sont
facilement accessibles depuis la circulation sanguine.
• De nombreuses cellules tumorales sont dépendantes d’un seul microvaisseau. La destruction d’un petit nombre de microvaisseaux amplifie donc l’effet antitumoral.
Tableau II. Inhibiteurs naturels de l’angiogenèse (2).
Thrombospondine.
Angiostatine (fragment du plasminogène).
Endostatine (fragment du collagène XVIII).
AaAt (fragment de l’antithrombine III).
Vasostatine (fragment de la calréticuline).
Prolactine (fragment N-terminal de 16 kDa).
Troponine 1.
Angiopoïétine 2.
Interféron alpha.
Interféron gamma.
Interleukine 12.
Fibronectine.
Inhibiteurs tissulaires des métalloprotéinases (TIMP).
Inhibiteur 1 de l’activateur du plasminogène (PAI-1).
Facteur plaquettaire 4 (PF 4).
Facteur dérivé des cellules épithéliales pigmentaires (PEX).
Acide rétinoïque.
2-méthoxyestradiol.
Dopamine.
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dine, constitutivement produite par les cellules normales. Le premier inhibiteur naturel de l’angiogenèse utilisé en clinique a été
l’interféron alpha. De nombreux principes généraux de la thérapie anti-angiogénique ont été déduits de son utilisation (2).
D’autres inhibiteurs naturels ont été étudiés, parmi lesquels
l’angiostatine et l’endostatine. L’angiostatine est le produit d’un
clivage protéolytique du plasminogène, et l’endostatine est dérivée du collagène XVIII par protéolyse. Récemment, il a été montré que la dopamine inhibe l’angiogenèse induite par le facteur
de croissance vasculaire endothélial (VEGF), ce qui illustre les
liens entre le système nerveux et l’angiogenèse.
Parmi les facteurs endogènes, ceux qui activent l’angiogenèse
sont plus nombreux que ceux qui l’inhibent (tableau III) (2).
Les facteurs pro-angiogéniques les plus étudiés sont le facteur
de croissance basique des fibroblastes (bFGF), le VEGF, le facteur de croissance dérivé des plaquettes (PDGF), le facteur de
croissance endothélial dérivé des plaquettes et l’angiopoïétine 1 (Ang-1). Les autres facteurs de croissance pro-angiogéniques incluent le facteur de croissance épithélial (EGF) et le
facteur de croissance transformant (TGF), qui activent indirectement l’angiogenèse par la stimulation de la production de
VEGF. Plusieurs protéinases tissulaires, médiateurs de l’inflammation et molécules d’adhésion stimulent aussi indirectement
l’angiogenèse ou sont nécessaires pour la stabilisation des néovaisseaux sanguins.
Switch angiogénique
et prolifération des cellules endothéliales
L’angiogenèse commence par une modification du phénotype
tumoral. L’équilibre entre facteur pro- et antiangiogénique qui
penchait en faveur d’une inhibition de l’angiogenèse va basculer, principalement grâce au VEGF, vers la formation de néovaisseaux (3). L’hypoxie est le déterminant principal de ce
changement de phénotype. Elle induit, dans les cellules tumorales, l’expression du facteur de transcription HIF-1 (facteur
1 induit par l’hypoxie), ainsi que la transcription des gènes
codant pour le VEGF et son récepteur. L’hypoxie attire les
macrophages dans la tumeur. Ces macrophages contribuent à
la production de protéinases extracellulaires qui facilitent la
migration des cellules endothéliales dans la tumeur. Il est fondamental de souligner que la mutation de la protéine p53 –
mutation qui est présente dans environ 50 % des cancers
humains – diminue le besoin cellulaire en oxygène et limite de
ce fait le recours à l’angiogenèse des tumeurs. Des souris ont
été xénogreffées avec des cellules de cancers colorectaux
humains. Les traitements anti-angiogéniques ont été moins efficaces chez les souris déficientes pour p53 que chez les souris
sauvages. Ainsi, bien que les thérapies anti-angiogéniques
ciblent des cellules endothéliales stables génétiquement, les
altérations génétiques des cellules tumorales peuvent diminuer
leurs réponses à ces traitements en diminuant leur dépendance
aux vaisseaux sanguins.
Les autres déterminants de la néovascularisation tumorale sont
un faible pH intratumoral, l’hypoglycémie, les mécanismes de
stress provoqués par la prolifération des cellules tumorales, les
réponses inflammatoires avec l’expression de la cyclo-oxygé38
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Tableau III. Stimulateurs naturels de la prolifération et de la migration des cellules endothéliales (2).
Facteur de croissance vasculaire endothélial (VEGF).
Facteur de croissance basique des fibroblastes (bFGF).
Facteur de croissance acide des fibroblastes (aFGF).
Facteur de croissance dérivé des plaquettes (PDGF).
Facteur de croissance épithélial dérivé des plaquettes.
Facteur de croissance des hépatocytes/facteur diffus.
Facteur de croissance épithélial.
Facteur de croissance insuline-like (IGF).
Facteur de croissance transformant (TGF).
Facteur de croissance transformant (TGF).
Facteur de nécrose tumorale (TNF).
Facteur de croissance placentaire.
Angiopoïétine 1 (Ang-1).
Angiogénine.
Pléiotrophine.
Interleukine 8.
Facteur stimulant les colonies de granulocytes (G-CSF).
Proliférine.
Leptine.
nase 2 (COX-2), la synthèse de prostaglandines et l’activation des
mastocytes.
Les mutations de certains proto-oncogènes, gènes suppresseurs
de tumeurs et gènes régulateurs favorisent aussi l’angiogenèse.
Le gène VHL, normalement produit, supprime l’expression
génique induite par l’hypoxie. L’inactivation de VHL, comme
dans le syndrome des cancers héréditaires de von Hippel-Lindau
(VHL), active et stabilise HIF-1, induisant la formation de
tumeurs hautement vascularisées. La transfection du gène VHL
sauvage dans diverses lignées tumorales supprime la sécrétion
de VEGF. Le virus SV40, fréquemment détecté dans les mésothéliomes, induit la production de VEGF via son antigène tumoral large (Tag). Dans des lignées de cancers coliques, le VEGF
n’est pas sécrété si la protéine p53 est mutée.
Perméabilité vasculaire augmentée
Les changements induits par la tumeur dans le voisinage des
microvaisseaux augmentent leur perméabilité, leur dilatation et
leur sinuosité, puis le développement de bourgeons de néovaisseaux. Ce processus est médié, au moins en partie, par le VEGF
(originellement connu comme un facteur de perméabilité vasculaire). L’augmentation de la perméabilité vasculaire permet la diffusion de nutriments dans la tumeur, avant même le début de la
néovascularisation. La perméabilité peut être favorisée par une
diminution des péricytes autour des microvaisseaux existants,
diminution due à l’angiopoïétine 2.
Recrutement des facteurs de croissance
Les facteurs de croissance et les protéases sécrétés dans le
microenvironnement tumoral ainsi que les cellules endothéliales
forment une boucle paracrine permettant l’expansion de la masse
tumorale. Les cellules endothéliales stimulées sécrètent des
chémo-attractants et des facteurs de croissance pour les cellules
cancéreuses (le facteur de croissance des fibroblastes [FGF], le
PDGF, l’IGF) (1). Le VEGF sécrété par la tumeur stimule la libéLa Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
ration et l’activation de protéases par les cellules endothéliales.
Ces protéases, à leur tour, activent d’autres facteurs angiogéniques liés à l’héparine, stockés dans la matrice extracellulaire,
en particulier le bFGF, le VEGF, et l’EGF lié à l’héparine, qui
peuvent être mitogéniques pour la tumeur et les cellules endothéliales (2) (figure 1).
" Prolifération
" Invasion
" Migration
Cascade
" Dégradation de la
des réactions
impliquées dans ➜ membrane basale
la transmission " Perméabilité
" Formation des
du signal
tubes capillaires
Figure 1. Stimulation de la prolifération des cellules endothéliales par
les facteurs de croissance sécrétés par les cellules tumorales.
FGF = facteur de croissance des fibroblastes ; MMP : métalloprotéinases ; PDGF : facteur de croissance dérivé des tumeurs ; VEGF : facteur de croissance vasculaire endothélial.
Figure 2. Migration des cellules endothéliales et formation des tubes
capillaires.
Ang-1 : angiopoïétine 1 ; FGF : facteur de croissance des fibroblastes ; PDGF : facteur de croissance
dérivé des plaquettes ; VEGF : facteur de croissance vasculaire endothélial.
Figure 3. Recrutement des péricytes et stabilisation des vaisseaux.
Ang-1 : angiopoïétine 1 ; FGF : facteur de croissance des fibroblastes ; PDGF = facteur de croissance
dérivé des plaquettes ; VEGF = facteur de croissance vasculaire endothélial.
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
Activation des protéases tissulaires
Les protéases libérées par les cellules endothéliales stimulées par
le VEGF sont activées dans la matrice extracellulaire. Le plasminogène, en particulier, est activé par l’activateur urinaire du
plasminogène (uPA), et dégrade la membrane basale, permettant
la migration des cellules endothéliales pour former des tubes (1).
La contribution des protéases à l’angiogenèse inclut aussi les
métalloprotéinases de la matrice (MMP), avec leurs activités
gélatinase, élastase et collagénase. La fuite de plasma et de fibrine
forme un maillage qui permet la migration des cellules endothéliales. Le bourgeon endothélial en développement s’étend par prolifération des cellules endothéliales à sa base, et probablement en
attirant spécifiquement des cellules souches endothéliales circulantes sur le foyer d’angiogenèse (1, 2). Les cordons endothéliaux
en croissance forment ensuite la lumière, et les extrémités de différents bourgeons se rejoignent pour former un nouveau réseau
vasculaire (2) (figure 2).
Stabilisation des vaisseaux
Les étapes finales de la néovascularisation sont la formation
d’une nouvelle membrane basale puis la stabilisation par le recrutement de cellules murales : les péricytes dans les microvaisseaux,
les cellules musculaires lisses dans les vaisseaux plus larges. Les
cellules ne recrutant pas les cellules murales appropriées requièrent du VEGF pour leur survie, alors que celles qui recrutent les
bonnes cellules peuvent survivre en l’absence de VEGF. Le développement des péricytes et leur migration vers la microvascularisation sont stimulés par le PDGF, qui, en présence de VEGF,
est un puissant attracteur pour les cellules musculaires lisses. Les
angiopoïétines, spécifiques des cellules endothéliales, agissent
avec le VEGF pour permettre l’angiogenèse et le remodelage vasculaire (figure 3).
Interactions entre la matrice extracellulaire
et les cellules endothéliales
Certaines interactions cellule-cellule et cellule-matrice requises
pour la néovascularisation se font par le biais d’intégrines ou
d’autres molécules d’adhésion (molécules d’adhésion intracellulaires, cadhérines, sélectines). Par exemple, l’intégrine v3 à
la surface des cellules endothéliales activées permet leur propagation et la formation de tubes. Le lien entre l’intégrine v3 et
ses ligands sur la matrice des cellules endothéliales (la vitronectine, le facteur von Willebrand, la fibronectine, le fibrinogène)
favorise la survie des cellules endothéliales vasculaires pendant
l’angiogenèse. Diverses intégrines sont impliquées dans l’angiogenèse, et elles peuvent être activées par différentes voies de
l’angiogenèse. Par exemple, l’intégrine v3 est activée lors de
l’angiogenèse induite par le FGF-2, alors que l’intégrine v5 est
activée lors de l’angiogenèse induite par le VEGF (1).
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Infiltration tumorale et métastases
L’angiogenèse est essentielle pour la croissance tumorale métastatique (2). La néovascularisation permet à la tumeur de vaincre
le maillage initial pour métastaser et échapper à la tumeur primaire. L’entrée dans la circulation sanguine peut être facilitée par
la proximité entre la tumeur et le néovaisseau, dont la paroi fenestrée est perméable, et par la production par les cellules endothéliales de protéases qui dégradent les membranes basales et favorisent ainsi la migration des cellules tumorales et leur entrée dans
les vaisseaux. Le VEGF et le bFGF produits par les cellules
tumorales stimulent la production de protéases par les cellules
endothéliales et leur activation (2).
Une fois établi dans un capillaire éloigné, l’équilibre local entre
facteurs pro-angiogéniques et anti-angiogéniques détermine si la
tumeur peut se développer sous forme de masse ou non. Les
métastases déficientes pour l’activité angiogénique peuvent rester microscopiques et dormantes pendant des années après l’ablation du cancer primitif, comme c’est le cas pour les cancers du
sein, où les métastases peuvent apparaître de 5 à 10 ans après la
résection de la tumeur initiale (2).
L’ANGIOGENÈSE DANS LES CANCERS HUMAINS
Les preuves de la nécessité de l’angiogenèse pour la poursuite
de la croissance tumorale abondent, du moins en ce qui concerne
les tumeurs expérimentales. L’observation directe de tumeurs
visibles dans des tubes à essai, des cornées de lapin ou des
embryons de poulet montre que, une fois vascularisée, la tumeur
peut augmenter de taille plusieurs centaines de fois en quelques
jours (2). Des études concernant les effets d’un blocage de
l’angiogenèse sur la croissance tumorale in vivo ont été menées
sur plusieurs tumeurs expérimentales avec divers inhibiteurs spécifiques de l’angiogenèse. La majorité des études montre que le
blocage de l’angiogenèse dans ces tumeurs arrête leur croissance ;
il peut même conduire à la disparition des tumeurs (2). Ces études
constituent les bases scientifiques pour considérer l’inhibition de
l’angiogenèse comme une approche rationnelle du traitement des
cancers humains.
Densité des microvaisseaux
et production de facteurs de croissance
Dans les cancers humains, la recherche concernant l’angiogenèse
s’est d’abord focalisée sur l’étude de la néovascularisation en
termes diagnostiques et pronostiques, puis, récemment, elle s’est
réorientée vers leur traitement. Les recherches déjà menées ont
apporté des preuves convaincantes qu’un phénotype angiogénique est corrélé à la progression tumorale et à la diminution de
la survie. Comme pour les tumeurs expérimentales, l’angiogenèse est donc nécessaire à la croissance des cancers humains.
Une corrélation forte a été montrée entre la densité des microvaisseaux dans la tumeur, un indicateur de l’activité angiogénique, et l’évolution clinique de la majorité des cancers, comme
les cancers du sein, gynécologiques, colorectaux, du tractus
gastro-intestinal supérieur, pulmonaires non à petites cellules
(CBNPC), urogénitaux, de la tête et du cou, cérébraux, et les
mélanomes (1).
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La production de VEGF soluble par les cellules tumorales est
aussi liée à l’évolution clinique dans de nombreuses études. Il
existe une très nette relation entre une forte expression intratumorale de VEGF et un stade tumoral avancé ou une faible survie,
indépendamment des facteurs pronostiques conventionnels (4).
Il a également été montré que des taux circulants élevés de VEGF
reflètent l’activité angiogénique des tumeurs et ont, dans la plupart des études, une corrélation négative à la fois avec le statut
tumoral et le pronostic des patients (4). La mesure des taux circulants de VEGF pourrait donc identifier les malades dont les
tumeurs ont une activité angiogénique élevée et devenir utile
dans l’identification des patients qui bénéficieraient le plus des
thérapies anti-angiogéniques.
LES RÉCEPTEURS DE TYROSINE KINASES
DANS L’ANGIOGENÈSE
L’activation des cellules endothéliales ainsi que la stimulation
de leur migration et de leur prolifération au cours de l’angiogenèse se font via des facteurs de croissance qui se lient à des récepteurs membranaires. L’inhibition de l’activité de ces récepteurs
est devenue un objectif dans le développement de médicaments
anticancéreux. La stimulation par les facteurs de croissance se
fait par des récepteurs à la surface des cellules ; ces récepteurs
sont appelés “récepteurs de tyrosine kinases” (RTK), en raison
de leur capacité à phosphoryler les résidus tyrosine qui les composent (autophosphorylation) ou d’autres molécules de signalisation intracellulaire. Cette capacité permet à ces récepteurs
d’initier directement la cascade des réactions impliquées dans
la transmission du signal. Les RTK directement impliqués dans
l’angiogenèse incluent les récepteurs pour le VEGF, le FGF, le
PDGF, l’Ang-1, l’Ang-2, le facteur de croissance des hépatocytes (HGF) et les éphrines (Eph). La compréhension de la biologie de ces facteurs de croissance et de leurs récepteurs sur les
cellules endothéliales ainsi que celle de leur implication dans
l’angiogenèse en fonction du microenvironnement ou des différentes conditions physiologiques favorisent le développement
des meilleures thérapies ciblées possibles contre les cellules
endothéliales.
Le VEGF et les récepteurs du VEGF
Les activités biologiques du VEGF
Le VEGF est le plus puissant stimulateur direct de l’angiogenèse.
Il est quasiment unique parmi les facteurs de croissance en raison de sa spécificité pour l’endothélium vasculaire. Le tableau IV
indique les nombreuses activités biologiques associées au
VEGF (5). L’induction de la perméabilité vasculaire par le VEGF
est 50 000 fois plus importante que celle induite par l’histamine.
Le VEGF est essentiel pour le développement du système cardiovasculaire d’embryons de souris, et indispensable pour la
croissance et la survie des souris en période néonatale. Il régule
la différenciation des angioblastes à partir des hémangioblastes,
précurseurs des cellules endothéliales et des cellules hématopoïétiques. In vitro, le VEGF induit la prolifération et la migration des cellules endothéliales, et inhibe leur apoptose.
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
Tableau IV. Effets biologiques du VEGF.
• Mitogène spécifique des cellules endothéliales artérielles,
veineuses et lymphatiques.
• Permet une réponse angiogénique dans plusieurs modèles in vivo.
• Induit une diffusion des cellules endothéliales.
• Synergise avec le bFGF pour stimuler la migration des cellules
endothéliales.
• Réponse angiogénique synergique avec l’angiopoïétine.
• Permet la survie des cellules endothéliales.
• Induit l’expression par les cellules endothéliales d’activateurs
du plasminogène du type urokinase.
• Induit l’expression par les cellules endothéliales d’inhibiteurs
des activateurs du plasminogène.
• Augmente l’expression par les cellules endothéliales
de métalloprotéinases de la matrice.
• Augmente la perméabilité vasculaire.
• Augmente l’afflux de calcium dans les microvaisseaux.
• Induit l’expression de molécules d’adhésion par les cellules
endothéliales.
• Permet le chimiotactisme des monocytes.
• Induit la formation de colonies par des sous-populations
de progéniteurs des granulocytes/macrophages.
• Inhibe la maturation des cellules présentatrices d’antigène
(cellules dendritiques).
• Régule la différenciation des angioblastes à partir
des hémangioblastes.
• Régulateur possible de la construction osseuse.
• Vasodilatateur des artères coronaires.
• Essentiel pour le développement embryonnaire.
• Indispensable à la survie en période néonatale précoce.
Les variants du VEGF
Le gène du VEGF sur le chromosome 6p code pour 5 variants :
le VEGF121, le VEGF145, le VEGF165, le VEGF189 et le VEGF206.
Ces variants forment tous des homo-dimères par liaisons covalentes et se lient aux mêmes récepteurs de surface, mais ils diffèrent dans leur profil de sécrétion ou leur liaison à l’héparine. Le
VEGF165, une glycoprotéine basique de 45 kDa, est la forme la
plus commune ; elle est produite par diverses cellules normales
ou transformées. Le VEGF121 et le VEGF189 sont détectés dans la
plupart des cellules exprimant le gène du VEGF, alors que le
VEGF206 et le VEGF145 sont rarement détectés. Les formes plus
longues, le VEGF189 et le VEGF206, sont plus basiques et lient
l’héparine avec une plus forte affinité que les formes plus courtes ;
elles sont presque exclusivement retrouvées dans la matrice extracellulaire. Elles peuvent être relarguées de cette matrice extracellulaire par l’héparine, l’héparinase ou la plasmine, rendant compte
partiellement de l’importance de l’activation du plasminogène
dans l’angiogenèse. Grâce à ces isoformes variables, le VEGF peut
stimuler les cellules endothéliales après sa libération soit par les
cellules adjacentes, soit par la matrice extracellulaire. Les différentes isoformes du VEGF peuvent avoir des activités différentes
en fonction des sites anatomiques, ce qui rend compte du rôle du
microenvironnement sur leur fonction. En effet, des cellules de
gliome humain U87 MG implantées chez la souris en intracrânien
ou en intracérébral ne répondent pas de la même façon aux différentes isoformes du VEGF. Le VEGF165 et le VEGF189 stimulent
la croissance tumorale dans les deux sites alors que le VEGF121 ne
stimule que la progression des tumeurs intracrâniennes (6).
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
Membrane
cellulaire
Figure 4. Récepteurs tyrosine kinases dans l’angiogenèse. Tous les
membres de cette superfamille sont caractérisés par un domaine extracellulaire liant le ligand, une région transmembranaire unique, et un
domaine tyrosine kinase intracellulaire continu ou séparé en deux.
Les récepteurs du VEGF : structure et fonctions
La famille des récepteurs du VEGF (VEGFR) comprend quatre
récepteurs de structure comparable (figure 4) (7). Les effets biologiques du VEGF sur les cellules endothéliales se font par
le VEGFR1 (ou tyrosine-kinase fms-like) et le VEGFR2 (ou “récepteur contenant un domaine kinase inséré” [KDR]). L’homologue
murin du VEGFR2 est Flk (kinase fœtale hépatique), avec une
homologie en acides aminés de 85 %. La région extracellulaire du
VEGFR1 et du VEGFR2 qui lie le VEGF est caractérisée par un
motif structural de sept domaines immunoglobulines reliés à la
région interne par une chaîne linéaire unique à travers la membrane.
La région interne contient un domaine juxtamembranaire, un
domaine tyrosine kinase divisé en deux sous-domaines séparés
par un insert de 69 acides aminés, et une queue carboxyterminale.
VEGFR1 et VEGFR2 sont principalement exprimés sur les cellules endothéliales vasculaires et partagent une homologie de
séquence de 44 %. VEGFR3, un troisième récepteur de structure
comparable (ou Flt4), ne lie pas le VEGF, et il est surtout confiné
aux cellules endothéliales lymphatiques chez l’adulte. Un quatrième récepteur du VEGF, VEGF165R, lie spécifiquement le
VEGF165 mais pas le VEGF121. Le VEGF165R est identique à la
neuropiline (NP-1), un récepteur n’appartenant pas à la famille
des récepteurs à tyrosine kinase et qui lie les médiateurs de la
migration des cellules nerveuses (sémaphorine/collapsines). Le
VEGF165R augmente la liaison du VEGF165 au VEGFR2 et module
son activité biologique. Cela peut expliquer, au moins partiellement, les potentialités mitogéniques plus fortes du VEGF165 comparé au VEGF121. Le VEGF165R est exprimé non seulement sur
les cellules endothéliales mais aussi sur plusieurs autres types cellulaires, parmi lesquels les cellules tumorales (mélanome, cancer du sein, cancer de la prostate).
Le VEGFR2 est exprimé pendant le développement fœtal, puis
il est normalement régulé négativement sur les cellules endothéliales adultes, alors que le VEGFR1 est exprimé à la fois par les
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cellules endothéliales fœtales et par les cellules endothéliales
adultes. La perte de l’un des deux récepteurs pendant le développement embryonnaire de la souris est létale. L’expression du
VEGFR1 et du VEGFR2 est augmentée dans les cellules endothéliales des tumeurs comparativement à celles des vaisseaux
des tissus normaux. L’hypoxie aiguë ou chronique entraîne la
régulation positive du VEGFR1 et du VEGFR2, peut-être en
réponse à la production de VEGF.
Réponses au VEGFR1 et au VEGFR2
Le VEGFR2 est le principal récepteur au VEGF sur les cellules
endothéliales. Bien que le VEGFR1 lie le VEGF avec une affinité dix fois supérieure à celle du VEGFR2, aucun signal mitogénique n’est induit via le VEGFR1. Le VEGFR1 pourrait être
un régulateur négatif de l’activité du VEGF dans les tumeurs,
peut-être en liant une quantité significative de VEGF. Il semblerait que le VEGFR1 inhibe les signaux mitogéniques du VEGFR2
via la production de monoxyde d’azote, agent de switch vers la
différenciation des cellules endothéliales. Cependant, le rôle du
VEGFR1 dans le cancer n’est pas clair ; il pourrait être encore
plus important que ce que l’on pense habituellement.
Il a été clairement démontré que le VEGFR1 est un inducteur de la
migration des monocytes en réponse au VEGF. Cette migration
est inhibée chez la souris avec la perte de l’activité tyrosine kinase
du VEGFR1 (TK–/–). L’inhibition de la maturation des cellules
dendritiques par le VEGF est également liée au VEGFR1 (8).
Les récepteurs du VEGF ont été détectés sur divers types de
cancers, mais, à la différence du VEGF, les récepteurs ne sont
généralement retrouvés que sur les cellules endothéliales des
microvaisseaux tumoraux, et non sur les cellules tumorales ellesmêmes. Quelques cellules tumorales, comme celles des sarcomes
de Kaposi (SK), des mélanomes, des cancers ovariens et des cancers pancréatiques, expriment le VEGFR1 et le VEGFR2 aussi
bien que le VEGF, démontrant au moins un potentiel de stimulation autocrine.
Le FGF et les récepteurs du FGF
Les FGF constituent une grande famille de facteurs de croissance. Seuls le FGF-1 (aFGF) et le FGF-2 (bFGF) ont été
bien caractérisés. Le aFGF et le bFGF font partie des protéines
angiogéniques les plus puissantes in vivo. Le rôle du aFGF
dans l’angiogenèse tumorale semble moins important que celui
du bFGF (2, 4).
Le bFGF a été la première protéine angiogénique isolée des tissus tumoraux. Il stimule la croissance et la migration des cellules
endothéliales, des fibroblastes, des cellules musculaires lisses et
des neurones (2). Les isoformes du bFGF induisent la production de protéases, telles l’uPA et les MMP, par des cellules endothéliales en culture, suscitent la formation de tubes dans des gels
de collagène, influencent la morphologie des cellules endothéliales par la sécrétion d’intégrines (v3, 21), permettent la
communication intercellulaire par la formation de gap junctions
et augmentent la production de VEGF et de VEGFR2. Indépendamment de ses effets angiogéniques directs sur les cellules endothéliales, le bFGF agit aussi en synergie avec le VEGF dans
l’induction de l’angiogenèse. Le bFGF induit l’expression de
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VEGF par des mécanismes à la fois autocrines et paracrines. Le
bFGF et le VEGF sont synergiques dans la stimulation de la formation des tubes capillaires. Le récepteur soluble du VEGF
(VEGFR2) bloque complètement l’angiogenèse cornéenne
induite par des implants de bFGF (2).
Le bFGF est habituellement synthétisé par les cellules tumorales,
mais aussi par les macrophages activés recrutés par les cellules
tumorales. Les cellules endothéliales dans les tumeurs peuvent
aussi produire du bFGF, stimulant ainsi l’angiogenèse de façon
autocrine. Des travaux récents suggèrent que la densité de cellules endothéliales peut réguler la production autocrine de bFGF.
Les FGF ont une forte affinité pour l’héparine et le sulfate d’héparine. Ils s’accumulent donc dans la matrice extracellulaire, d’où
ils peuvent être mobilisés par les protéinases ou les héparinases
produites par la tumeur ou les cellules endothéliales.
Beaucoup de tumeurs humaines expriment le bFGF. Il a aussi été
détecté dans les cellules endothéliales des sarcomes de Kaposi et
dans les hémangiomes proliférants. Des taux élevés de bFGF ont
été détectés dans le sérum et les urines de patients atteints de cancers colorectaux avancés, du sein, de l’ovaire, rénaux, et de sarcomes des tissus mous. Les premiers essais cliniques de thérapies anti-angiogéniques ont utilisé l’interféron pour traiter des
enfants atteints d’hémangiomes menaçant la vue ou le pronostic
vital et qui n’avaient pas répondu aux autres traitements. L’excrétion urinaire de bFGF s’est révélée un marqueur utile pour suivre
l’efficacité de ce traitement.
Il existe quatre récepteurs du FGF (FGFR) : tous lient le bFGF
et l’aFGF. Leur structure est similaire à celle des VEGFR, avec
un domaine extracellulaire contenant trois (et non plus sept)
boucles immunoglobulines et un domaine tyrosine kinase interne
divisé en deux (figure 4, p. 41). Les quatre récepteurs sont codés
par quatre gènes différents, mais une multitude d’isoformes du
FGFR1 et du FGFR2 ont été décrites (8). Des interactions à la
surface des cellules cibles entre des monomères du bFGF et des
protéoglycanes contenant des sulfates d’héparine sont probablement requises pour l’activation des récepteurs. Les sulfates
d’héparine induisent une oligomérisation du bFGF, conduisant à
la dimérisation du récepteur et à son activation (9).
Le PDGF et les récepteurs du PDGF
Le PDGF est un mitogène majeur et un chémo-attractant pour
les fibroblastes, les cellules musculaires lisses et les cellules
gliales. Le PDGF existe sous la forme d’un homodimère relié
par un pont disulfure ou d’un hétérodimère de chaînes A et B.
Il existe donc trois isoformes, chacune ayant différentes affinités pour les récepteurs. La chaîne B du PDGF a été identifiée
comme un proto-oncogène lorsque l’on a découvert qu’elle était
l’homologue de v-sis, le gène transformant du virus des sarcomes du singe. Le PDGF a été détecté dans plusieurs lignées
tumorales, parmi lesquelles des cancers du sein ou du côlon, et
des mélanomes.
Le PDGF pourrait contribuer à l’angiogenèse via la prolifération des cellules endothéliales et la formation de tubes, l’induction du VEGF et d’autres facteurs angiogéniques, ou la stabilisation de la néovascularisation par le recrutement de péricytes
et de cellules musculaires lisses. Il stimule le développement et
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
la migration des péricytes. Le PDGF libéré par les cellules
endothéliales induirait l’expression du VEGF et serait un facteur de survie des jeunes cellules endothéliales. Dans des études
expérimentales, le PDGF augmente l’ARNm codant pour le
VEGF dans les péricytes, principalement par l’activation de la
voie de la phosphatidyl-inositol 3-kinase (PI-3K). Ces études
suggèrent que les péricytes pourraient protéger les cellules endothéliales de l’apoptose, en partie par des cytokines qui augmentent l’expression de VEGF.
Les récepteurs du PDGF (PDGFR) ont une structure similaire à
celle des VEGFR et des FGFR : ils possèdent cinq domaines
immunoglobulines dans la région extracellulaire et un domaine
tyrosine kinase interne divisé en deux. La famille PDGFR RTK
comprend le PDGFR , le PDGFR , et trois récepteurs non
connus pour être directement impliqués dans l’angiogenèse :
CSF-1 R, Kit et Flk 2 (figure 4, p. 41).
Le PDGF, en se liant au PDGFR , inhibe les propriétés angiogéniques du bFGF in vitro et in vivo (10).
Le PDGF et ses récepteurs sont coexprimés dans de nombreuses
lignées tumorales, comme les sarcomes et les gliomes. La présence du PDGF et de ses récepteurs a été détectée dans des biopsies de tumeurs. Dans les gliomes, le VEGF et le PDGF sont des
indicateurs du potentiel angiogénique. Les biopsies de 57 astrocytomes montrent que l’expression du PDGFR est directement
corrélée à l’index de prolifération. Une forte expression du
PDGFR et du VEGF dans les cellules endothéliales ou les cellules gliales permet une action combinée de ces facteurs en faveur
de la néovascularisation.
L’angiopoïétine et Tie-2
Tie-2 est un RTK dont l’expression est quasiment restreinte aux
cellules endothéliales (1, 2). La portion extracellulaire de ce
récepteur comprend des domaines immunoglobulines, EGF-like
et fibronectine III-like. Le domaine tyrosine kinase interne n’est
pas coupé par un insert de séquences comme pour les VEGFR et
les FGFR (figure 4, p. 41). Des formes solubles de Tie-2 ont
récemment été mises en évidence.
Les ligands de Tie-2 sont Ang-1 et Ang-2. Le rôle de Tie-2 et
de ses ligands dans l’angiogenèse tumorale n’a été reconnu que
récemment. Comme le VEGF, Ang-1 est un facteur de croissance
spécifique des cellules endothéliales. Cependant, Ang-1 n’a pas
directement d’effets mitogéniques et n’entraîne pas de néovascularisation dans les expériences d’implants cornéens. Elle agit
avec le VEGF pour permettre la croissance des vaisseaux. Elle
induit la production, par les cellules endothéliales, de la chaîne
B du PDGF, qui recrute les péricytes et les cellules musculaires
lisses pour leur incorporation dans la paroi des vaisseaux. Ang1 agit aussi sur la maturation des vaisseaux en stabilisant le
réseau capillaire (1, 2, 11). Dans la peau de souris, la surexpression de Ang-1 entraîne une augmentation de la vascularisation. La peau est plus rouge et les vaisseaux plus larges, mais il
n’y a pas de signes de perméabilité vasculaire ni d’œdèmes
comme on le constate dans les mêmes modèles de surexpression
du VEGF ou dans les tumeurs exprimant le VEGF (2).
Ang-2 bloque Tie-2 et repousse les péricytes et les cellules musculaires lisses. La production de Ang-2 est augmentée pendant
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
l’angiogenèse par le VEGF ou l’hypoxie, ce qui empêche les
interactions entre Ang-1 et le VEGF, expose les cellules endothéliales au VEGF et permet la croissance de nouveaux vaisseaux sanguins. Les cellules endothéliales sont dépendantes d’une
exposition continue au VEGF pour leur survie, puisque le retrait
du VEGF avant la stabilisation du vaisseau par une enveloppe de
péricytes entraîne une apoptose des cellules endothéliales et une
régression du vaisseau (1).
Un nouveau ligand de Tie-2 a été mis en évidence : ANGPTL3.
Il est capable de lier l’intégrine v3 et de stimuler l’angiogenèse.
Il existe des preuves de l’importance de la voie Tie-2 dans les
cancers du sein, du cerveau, du foie et du poumon et de ce que
son blocage réduit la croissance des tumeurs et les métastases (1).
HGF et Met
Parmi les trois membres de la famille Met des RTK (Met, Ron
et Sea), seul Met est connu pour avoir un rôle direct dans
l’angiogenèse (figure 4, p. 41) (8). Le seul ligand connu pour
activer Met est le facteur de croissance des hépatocytes/facteur
diffus (HGF). Met et HGF sont importants dans l’angiogenèse,
l’invasion des cellules tumorales et les métastases. Ils sont une
cible thérapeutique potentielle dans le cancer, le diabète et les
maladies cardiaques. HGF stimule la prolifération des cellules
épithéliales, des hépatocytes, de l’épithélium rénal, des mélanocytes et des cellules endothéliales vasculaires, mais c’est un
mitogène peu actif pour les autres types cellulaires. In vitro, le
HGF entraîne la dispersion de colonies soudées de cellules épithéliales en cellules individualisées, qui prennent une morphologie de fibroblastes.
Pour les cellules endothéliales, le HGF est anti-apoptotique. Il
permet la survie en hypoxie sévère en augmentant l’activité de
Bcl-2, un inhibiteur de l’apoptose normalement diminué en cas
de privation d’oxygène. Le HGF protège aussi les cellules épithéliales et endothéliales des effets cytotoxiques des agents altérant l’ADN. Cette protection, par augmentation de la réparation
des cassures dans les brins d’ADN induites par les drogues ou
les radiations, se fait par l’augmentation de l’activité de Bcl-XL
(un autre inhibiteur de l’apoptose). L’activité anti-apoptotique du
HGF est liée à l’activation de la voie de survie de la PI-3 kinase.
La combinaison d’un agent inhibant l’activité du HGF avec des
radiations ou un cytotoxique induisant des dommages dans
l’ADN est particulièrement pertinente. Des études in vitro suggèrent que le HGF agit en synergie avec le VEGF dans la survie
et la formation de tubes par les cellules endothéliales. Des études
in vivo chez la souris ont montré que la néovascularisation est
fortement augmentée par la combinaison du HGF et du VEGF
par rapport à chaque facteur seul.
Les taux de HGF sont significatifs dans plusieurs cancers
humains. Dans les cancers pulmonaires non à petites cellules ou
ORL, ils sont même un facteur pronostique négatif en termes de
survie. Le HGF est surexprimé dans les cancers prostatiques (12).
La voie HGF est fonctionnelle dans les cancers pulmonaires à
petites cellules. Dans les gliomes, le HGF agit en synergie avec
le bFGF pour induire l’angiogenèse. Une boucle autocrine HGFMet a été mise en évidence dans certains glioblastomes multiformes, et l’apparition de cette boucle est corrélée à la progres43
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sion des astrocytomes. Dans une étude mesurant la vascularisation de la moelle osseuse et les taux circulants d’agents angiogéniques chez des patients avec des hémopathies malignes, les
taux plasmatiques de HGF sont significativement augmentés dans
les leucémies aiguës myéloblastiques et lymphoblastiques, les
leucémies chroniques myéloïdes, lymphoïdes et myélomonocytaires (LMNC), ainsi que dans les syndromes myélodysplasiques.
Les taux plasmatiques de HGF sont les plus importants chez les
patients souffrant de LMNC.
Les RTK de la famille des éphrines (Eph)
Avec au moins 14 membres, la famille des éphrines est la plus
importante des familles de RTK. Bien qu’initialement considérées comme des récepteurs sans ligand, huit ligands de Eph ont
été identifiées, mais, contrairement à la plupart des RTK, les Eph
n’ont pas de forme soluble fonctionnelle et doivent être attachées
à la membrane pour être activées leurs récepteurs (figure 4, p. 41).
Les RTK de la famille Eph permettent la migration et la
connexion des neurones. Certains membres ont un rôle dans le
développement du système vasculaire et dans l’angiogenèse. Les
récepteurs de EphB1 et EphA2 dirigent la formation du maillage
vasculaire en influençant la migration des cellules endothéliales,
la morphogenèse capillaire et l’angiogenèse. Mais les systèmes
de signalisation permettant le couplage de ces récepteurs et
l’assemblage des cellules ne sont pas clairement définis.
Les récepteurs de EphA1 et EphA2 ont été détectés dans la vascularisation de certaines tumeurs et sont exprimés à la fois sur
les cellules endothéliales et sur les cellules tumorales dans des
modèles de xénogreffes tumorales. Les potentialités thérapeutiques de l’inhibition des interactions entre les membres de la
famille Eph et leurs ligands n’ont pas encore été étudiées expérimentalement. Jouant des rôles similaires à ceux de l’angiopoïétine et du récepteur Tie-2 dans la maturation des récepteurs
et la stabilisation, les récepteurs Eph et leurs ligands devraient
bientôt être reconnus comme dignes d’intérêt.
Les RTK de la famille erbB
Les récepteurs de la famille erbB sont les RTK les mieux caractérisés, bien qu’il reste beaucoup à apprendre de leurs fonctions. La
signalisation via erbB entraîne la prolifération des cellules tumorales, leur migration et d’autres activités importantes pour la croissance des tumeurs et les métastases. Cependant, à la différence des
autres RTK dont on a parlé, la famille erbB et ses ligands influencent indirectement l’angiogenèse en activant la production par les
cellules tumorales de VEGF et d’autres stimulateurs de l’angiogenèse. Au moins cinq inhibiteurs des récepteurs de la famille
erbB sont en développement clinique. Plusieurs revues récentes se
focalisent sur les différents aspects de la famille erbB (13).
La famille erbB comprend quatre récepteurs, tous actifs dans la
stimulation de la prolifération. Les hétérodimères formés de ces
quatre membres sont capables de stimuler différents types de cellules en réponse à plusieurs ligands. Les quatre récepteurs erbB
partagent une architecture commune, similaire à celle des autres
RTK (figure 4, p. 41).
Dans l’état actuel de nos connaissances, les membres de la
famille erbB les plus importants en cancérologie sont erbB1
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(EGFR) et erbB2 (HER2). Les ligands de erbB1 comprennent
l’EGF et le TGF. ErbB2 n’a pas de ligand spécifique mais, en
se liant aux autres membres de la famille erbB, il peut être activé
par tous les ligands connus pour cette famille. ErbB2 est le partenaire de dimérisation privilégié des autres récepteurs. ErbB1
et erbB2 sont surexprimés ou exprimés selon une boucle autocrine dans de nombreux types de cancers. La surexpression de
erbB1 a été particulièrement bien étudiée dans les cancers du
sein, dont environ 60 % surexpriment le récepteur. Cette surexpression est corrélée au devenir clinique. De même, erbB2 est
surexprimé par une amplification génique dans environ 30 % des
cancers du sein et de l’ovaire, et cette expression est corrélée
aussi à l’évolution (8).
La signalisation via les RTK
Tous les RTK sont activés par dimérisation, mais seule la
famille erbB et deux récepteurs du PDGF forment des hétérodimères (13). L’hétérodimérisation contribue à la diversité de
la signalisation, car chaque récepteur active une voie spécifique
en aval. L’activation des RTK dans les cellules endothéliales
peut enclencher une ou plusieurs voies d’aval en activant la
PI-3 kinase, Raf, STAT, SRC ou PLC-. Les réponses obtenues
vont de la prolifération et de la migration à la différenciation et
à la modification du métabolisme. Il existe des preuves que les
voies activées dans les cellules endothéliales diffèrent de celles
activées dans d’autres types cellulaires exprimant les mêmes
récepteurs (figure 5).
Figure 5. Voies de signalisation intracellulaires activées par le lien du
VEGF au VEGFR2.
VEGF : facteur de croissance vasculaire endothélial ; VEGFR2 : récepteur 2 du facteur de croissance
vasculaire endothélial.
Activation croisée des voies de signalisation
Les RTK ne sont pas seulement activés par leurs propres ligands,
mais aussi par des hormones, des neurotransmetteurs et des lymphokines. Une voie bien connue de transactivation des RTK
(erbB1, erbB2) est la signalisation via les récepteurs couplés aux
protéines G (GPCR), activés par l’acide lysophosphatidique
(LPA), la thrombine et l’endothéline. Le LPA, normalement
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
présent dans le sérum à des taux de 2 à 20 M (mol.l–20), induit
diverses réponses via les GPCR de la famille des gènes de différenciation endothéliale (Edg). Récemment, une nouvelle voie
d’expression du VEGF dans les cancers ovariens a été décrite.
Le LPA, via le récepteur Edg4, stimule l’expression du VEGF.
L’activation d’Edg4 augmente l’expression du promoteur du
VEGF par des mécanismes différents de ceux qui augmentent
l’expression du VEGF en condition d’hypoxie. Cette voie pourrait être impliquée dans l’augmentation de la perméabilité vasculaire qui conduit à la formation d’ascite chez les patientes
souffrant d’un cancer ovarien.
INHIBITION DE LA SIGNALISATION
PAR LES RTK DANS L’ANGIOGENÈSE
En principe, les événements moléculaires qui contrôlent l’angiogenèse sont des cibles potentielles des drogues anti-angiogéniques. Cependant, le processus est si complexe et implique tellement de facteurs et de voies qu’il est préférable d’attaquer
l’angiogenèse au niveau de la cellule endothéliale (tableau I).
Plus de quarante agents anti-angiogéniques sont en développement clinique, et environ un tiers d’entre eux inhibent la signalisation via le VEGFR. Bien que le bénéfice de ces agents ne
soit pas encore prouvé dans les essais cliniques, le VEGFR
paraît être une cible pertinente, puisque son expression est fortement associée à l’angiogenèse et à l’évolution clinique dans
divers cancers (14). Les agents en développement qui inhibent
directement l’expression du VEGFR ou son activation comprennent des inhibiteurs de l’activation des tyrosine kinases
(SU5416, SU6668, SU011248, ZD6474, PTK787), des anticorps dirigés contre le VEGFR (IMC-1C11), et des oligonucléotides antisens (anti-Flt-1 ribozyme).
semaxanib lie de façon compétitive le site actif du domaine kinase,
qui est normalement occupé par une adénine de l’ATP, et apparaît
comme spécifique du VEGFR. Le traitement par semaxanib de souris portant des xénogreffes de gliome C6 de rat, par exemple,
entraîne l’inhibition de la croissance tumorale. Les vaisseaux tumoraux visualisés en vidéomicroscopie sont moins perméables et la
densité des néovaisseaux est réduite par rapport à ce qui est observé
chez les animaux contrôles non traités. Le semaxanib est surtout
efficace contre les tumeurs à croissance lente, alors que des résultats variables sont observés avec les tumeurs les plus proliférantes
(> 1 000 mm3 14 jours après l’implantation). Les variations des
effets du semaxanib peuvent s’expliquer par des besoins différents, en ce qui concerne la néovascularisation, entre les tumeurs
à croissance lente et celles à croissance rapide, ou par la production différente de facteurs angiogéniques par ces deux types de
tumeurs.
Les principales toxicités associées au semaxanib sont généralement faibles à modérées et comprennent des céphalées, des nausées et des vomissements, des réactions au point d’injection, des
modifications de la voix, et une étude a retrouvé une augmentation des transaminases.
Études cliniques
Le VEGF est surexprimé dans les cancers gastro-intestinaux primaires et métastatiques, et il est important pour l’angiogenèse des
cancers coliques et la progression métastatique. Dans une étude
clinique, il a été montré que l’expression du VEGFR2 était corrélée à la progression tumorale, avec une expression dans 10 %
des adénomes (1 sur 10), dans 29 % des tumeurs non métastatiques (6 sur 21) et dans 63 % des tumeurs métastatiques (15 sur
25). Cette différence dans l’expression du VEGFR2 entre tumeurs
métastatiques et non métastatiques est significative (p = 0,02)
(tableau V). L’expression du VEGFR est également un facteur
Le semaxanib (SU5416)
Études précliniques et de phase I
Le semaxanib est un inhibiteur synthétique de l’activité VEGFRTK dérivé de l’indolinone. Il a été le premier agent avec ce mécanisme d’action à entrer dans des essais cliniques (figure 6). Le
Tableau V. Expression du VEGFR2 dans des tumeurs colorectales
bénignes et malignes.
Tumeur
Adénome
Tumeurs non métastatiques
Tumeurs métastatiques
Expression du VEGFR2
(en % n/N)
10 (1/10)
28,6 (6/21)
62,5 (15/24)
La différence d’expression entre tumeurs métastatiques
et non métastatiques est significative (p = 0,02) (5).
Figure 6. Structure du semaxanib (SU5416).
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
de mauvais pronostic dans les cancers pulmonaires non à petites
cellules (1, 2) et dans les cancers du sein (1, 2).
Le semaxanib, qui a montré des effets positifs dans des études
pilotes, est actuellement testé en phase II en association avec le
5-FU et l’acide folinique en première ligne de traitement de cancers colorectaux métastatiques.
Dans les cancers pulmonaires non à petites cellules, des études
de phases I et II associant le semaxanib au paclitaxel et au carboplatine montrent des résultats encourageants.
Dans les cancers du sein, des études sont en cours associant le
semaxanib et la doxorubicine.
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Tableau VI. Activités in vitro du semaxanib.
•
–
–
–
–
Tests biochimiques de mesure de l’activité tyrosine kinase (par mesure de l’incorporation de phosphate dans des récepteurs solubles) :
inhibition du VEGFR2 (Flk-1/KDR) (Ki = 0,16 mM) ;
inhibition du PDGFR (Ki = 0,32 M) ;
60 à 120 fois moins efficace sur FGFR1 (Ki = 19,5 M) ;
pas d’activité détectable contre EGFR (IC50 > 100 M).
• Tests cellulaires de l’activité tyrosine kinase :
– inhibition du VEGFR (IC50 = 1,04 M) ;
– 20 fois moins d’activité sur PDGFR (IC50 = 20,3 M).
• Tests de mitogenèse in vivo sur des cellules de sang de cordon ombilical activées par des facteurs de croissance :
– inhibition des signaux mitogéniques transmis par le VEGF (IC50 = 0,06 M) ;
– pas d’effet sur les signaux mitogéniques transmis par le FGF (IC50 > 50 M).
Tableau VII. Propriétés pharmacocinétiques du semaxanib.
Métabolisme
Cytochrome P450, CYP3A4, CYP1A2
Distribution
Modèle à 2 compartiments
Volume de distribution à l’état d’équilibre
22 ± 8 l
Volume de distribution
11,8 l
AUC
4 720 g.h/l pour 110 mg/m2
La clairance augmente avec des dosages itératifs
J1 = environ 70 l/h
J25 = 95 l/h
Indépendant de la dose pour des surfaces corporelles de 4,4 à 190 mg/m2
Demi-vie systémique
50 ± 16 mn
Demi-vie biologique
Plus de 72 h (dosages 2 fois par semaine chez l’animal)
Dose recommandée
145 mg/m2 2 fois par semaine, correspondant à la dose efficace dans les études précliniques
Des résultats encourageants ont également été obtenus dans divers
types de cancers comme les cancers du rein, les cancers ORL, les
mésothéliomes, les mélanomes et les sarcomes de Kaposi.
Les propriétés in vitro et de pharmacocinétique du semaxanib sont
résumées dans les tableaux VI et VII.
Le SU6668
Études précliniques
Comme le semaxanib, le SU6668 est un inhibiteur compétitif de
l’activité RTK du VEGF (compétition avec l’ATP) dérivé de
l’indolinone (figure 7). Le semaxanib et le SU6668 ont une biodisponibilité acceptable per os. Le SU6668 a été développé pour
une administration orale. Les deux produits diffèrent dans leur
spécificité ; le SU6668 inhibe l’activité tyrosine kinase du
PDGFR et du FGFR1 aussi bien que celle du VEGFR2
(tableau VIII). Dans le modèle du glioblastome C6, dans lequel
la croissance tumorale est suivie dans une chambre sous-cutanée
par vidéomicroscopie fluorescente, le traitement par SU6668
(75 mg/kg/j) est associé à une inhibition de la croissance tumorale, à une densité vasculaire réduite et à une diminution de la
surface vasculaire tumorale (ces trois paramètres sont significatifs avec un p < 0,01).
46
Figure 7. Structure chimique du SU6668.
Effets antitumoraux cytostatiques et cytotoxiques
Contre un panel de neuf xénogreffes humaines établies, l’administration orale de SU6668 (200 mg/kg/j) entraîne une régression
tumorale (3 tumeurs sur 9,) une stabilisation (4 tumeurs sur 9) ou
un retard de croissance (2 tumeurs sur 9). Avec des xénogreffes
tumorales bien établies (200 à 800 mm3) de la lignée A431 de
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
Tableau VIII. Activité in vitro du SU6668.
• Inhibiteur de l’activité tyrosine kinase des :
– VEGFR2 (Ki = 2,1 µM) ;
– PDGFR (Ki = 0,008 µM) ;
– FGFR1 (Ki = 1,2 µM).
• Sur des tests in vitro de mitogenèse des cellules de sang de cordon
ombilical stimulées par facteur de croissance :
– inhibiteur de la mitogenèse induite par le VEGF (IC50 = 0,34 µM) ;
– inhibiteur de la mitogenèse induite par le FGF (IC50 = 9,6 µM).
• Inhibiteur in vitro de la prolifération de cellules tumorales
(sarcome d’Ewing).
• Inhibiteur de la croissance tumorale :
Tumeur
Sarcome d’Ewing
HT-29
PC-3
A431
CHP-134
Colo 205
SF767T
NCI-H460
LNCaP
B16
MDA-MB-435
SF763T
Type tumoral
Effet
Sarcome humain
Côlon humain
Prostate humaine
Épidermoïde humain
Neuroblastome humain
Côlon humain
Gliome humain
Poumon humain (NPC)
Prostate humaine
Mélanome murin
Sein humain
Gliome humain
Régression
Régression
Régression
Régression
Stabilisation
Stabilisation
Stabilisation
Stabilisation
Stabilisation
Stabilisation
Croissance ralentie
Croissance ralentie
cancer épidermoïde humain, le traitement par SU6668 induit une
régression tumorale et une réponse complète chez la majorité des
animaux. Chez la plupart des animaux avec une réponse complète au SU6668, les tumeurs ne repoussent pas, même après plus
de 100 jours sans traitement. La régression ou la stabilisation avec
le SU6668 a aussi été démontrée contre des xénogreffes établies
de tumeurs ovariennes, coliques et pulmonaires. La régression
des tumeurs épidermoïdes A431 et coliques Colo 205 et l’arrêt
de la croissance des tumeurs pulmonaires NCI-H460 sont associés à une destruction tumorale complète au niveau histologique.
Dans le modèle tumoral A431, le traitement induit l’apoptose des
microvaisseaux tumoraux dans les 6 heures, couplée à une diminution de la densité des microvaisseaux et à une destruction tumorale extensive dans les 24 premières heures du traitement. Dans
un autre modèle (le gliome SF767T), d’un traitement prolongé
résulte une diminution de la vascularisation et de la prolifération
tumorale sans destruction de la tumeur, conduisant à un arrêt de
la croissance tumorale. Dans un troisième modèle (gliome
SF763T), un retard de croissance tumorale substantiel a été induit
avec un traitement prolongé par le SU6668. Dans ce modèle
SF763T, le traitement par SU6668 a conduit à la réduction des
taux tumoraux de phosphotyrosine associée au PDGFR , indiquant que le SU6668 inhibe l’activité du PDGFR. Ces données
suggèrent que le SU6668 peut inhiber la croissance tumorale et
l’angiogenèse en inhibant diverses voies autocrines et paracrines
impliquant des cellules vasculaires, endothéliales et stromales.
Dans le modèle de métastases hépatiques du cancer du côlon
CT-26, l’injection intrapéritonéale quotidienne de SU6668
(60 mg/kg) commençant au 4e jour après l’implantation tumorale
augmente significativement la survie des souris traitées
(p < 0,001). Dans ce modèle, conformément aux données concerLa Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
nant les xénogreffes tumorales sous-cutanées (voir ci-dessus),
l’examen des tumeurs traitées en immunohistochimie et par des
tests de mesure de l’apoptose (TUNEL) a permis de montrer que
l’apoptose des cellules tumorales et endothéliales est augmentée
chez les animaux traités par rapport aux animaux contrôles (15).
Le SU6668 augmente aussi les effets de la radiothérapie.
Étude de phase I
Les résultats d’un essai de phase I chez 56 patients souffrant de
divers cancers avancés ont été présentés récemment. Les patients
recevaient une dose orale quotidienne à jeun (30 patients, 100 à
2 400 mg/m2/j) ou au cours d’un repas (26 patients, de 200 à
1 600 mg/m2/j). Les résultats de pharmacocinétique et de tolérance
de phase I sont résumés dans le tableau IX. La durée médiane de
l’étude était de 13 semaines. La dose maximale tolérée n’a pas été
atteinte, il n’y avait pas de toxicité sérieuse liée au médicament,
et les effets secondaires (parmi lesquels les nausées, les diarrhées,
la fatigue et la dyspnée) étaient de mineurs à modérés. Il y a eu
une réponse mineure d’une durée de 86 semaines chez un patient
avec une tumeur desmoïde ; la maladie a été stabilisée chez un
patient avec un cancer pulmonaire non à petites cellules pendant
74 semaines et chez un patient avec un sarcome pendant
61 semaines. Les différences dans les paramètres pharmacocinétiques entre le groupe avec prise du traitement à jeun et le groupe
avec prise au cours du repas n’étaient pas significatives. Des
études de phases I et II complémentaires concernant le SU6668
sont en cours.
Tableau IX. SU6668 : études de phase I de pharmacocinétique et de
tolérance.
• Pharmacocinétique orale chez 56 patients
Demi-vie terminale
Clairance
Volume de distribution
à l’état d’équilibre
Biodisponibilité
À jeun
Au cours d’un repas
83 ± 59 mn
6,1 ± 3,2 l/h
122 ± 73 mn
4 ± 2,2 l/h
9 ± 2,7 l
17,4 ± 6,6 %
9,1 ± 2,4 l
23,2 ± 7,6 %
• Dose maximale tolérée non atteinte :
– doses orales à jeun de 100 à 2 400 mg/m2/j ;
– doses orales au cours d’un repas de 200 à 1 600 mg/m2/j.
• Temps médian de l’étude : 13 semaines.
• Effets secondaires, tous mineurs ou modérés :
– nausées ;
fatigue ;
– diarrhées ;
dyspnée.
Le SU011248
Études précliniques
Le SU011248 est une petite molécule qui inhibe les activités
enzymatiques des tyrosine kinases (figure 8, p. 48). Ainsi, il
inhibe le VEGFR1, le PDGFR et c-kit, le récepteur du facteur de
croissance des cellules souches (SCF) impliqué dans les hémopathies malignes. À des concentrations plus élevées, il inhibe les
fonctions du FGFR1, troisième récepteur tyrosine kinase impliqué dans l’angiogenèse.
47
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Le ZD6474
Étude préclinique et de phase I
Le ZD6474 est un inhibiteur des tyrosine kinases dérivé de
l’anilinoquinazoline, actif par voie orale contre le VEGFR2 et,
dans une moindre mesure, contre erbB1 (EGFR), à la fois dans
des tests biochimiques et dans des tests de mitogenèse. Il a aussi
une certaine activité contre d’autres RTK (PDGFR > VEGFR1
> Tie-2 > FGFR1) (figure 9, tableau X).
Figure 8. Structure chimique du SU011248.
In vitro, le SU011248 inhibe :
– la réponse mitogénique des cellules endothéliales du sang de
cordon ombilical humain stimulées par le VEGF ou le FGF ;
– la prolifération induite par le PDGF des cellules NIH-3T3
exprimant le PDGFR ;
– la prolifération induite par le SCF des cellules MO7E de leucémies aiguës myéloblastiques. En revanche, le SU011248 n’inhibe
pas directement la prolifération des cellules tumorales dans des
milieux de culture complets, sauf à utiliser des concentrations trois
fois plus importantes que celles requises pour l’inhibition de la prolifération induite par les facteurs de croissance. Dans des modèles
de xénogreffes tumorales sous-cutanées, de l’administration orale
de SU011248 résulte une inhibition forte de la croissance tumorale entraînant la régression ou la stabilisation de tumeurs établies
de volume important et d’origines diverses. L’activité antitumorale du SU011248 est associée à une réduction de la densité des
microvaisseaux tumoraux dans les tumeurs établies. Le SU011248
inhibe aussi la croissance des métastases. En effet, il empêche la
colonisation pulmonaire par des cellules tumorales B16-F1 injectées dans la veine de la queue de souris athymiques.
Des études de pharmacocinétique ont été menées chez diverses
espèces animales (souris, rats, chiens, singes). Il en ressort une
grande distribution tissulaire et une demi-vie modérée chez toutes
les espèces. La biodisponibilité est variable selon les espèces. Les
concentrations plasmatiques maximales et l’exposition plasmatique (AUC) augmentent avec la dose administrée.
Des études de toxicologie ont également été menées. La dose orale
unique maximale tolérée dans ces quatre espèces est au-delà des
doses testées. Il n’a pas été noté d’anomalie microscopique dans
les tissus de rats ou de souris. Des tests de toxicité au long cours
(14 jours) ont été réalisés chez le rat et le singe. Il n’a pas été observé
d’effet secondaire à la dose quotidienne de 5 mg/kg dans les deux
espèces. À des doses plus élevées (15 mg/kg), on observe des
néphropathies tubulaires et des hypoplasies médullaires. À des
doses encore plus élevées (45 mg/kg), on observe des hémorragies
et des nécroses surrénaliennes chez le rat et un allongement du QT
chez le singe. Il n’a pas été mis en évidence d’effet mutagène.
Études de phase I
Des études de phase I sont en cours à l’institut Gustave-Roussy dans
divers types de cancers. Les résultats préliminaires sont très encourageants.
48
Figure 9. Structure chimique du ZD6474.
Tableau X. Activités in vitro du ZD6474.
• Inhibiteur de l’activité tyrosine kinase de :
– VEGFR2 (IC50 = 0,04 µM) ;
– EGFR (IC50 = 0,5 µM) ;
– PDGFR (IC50 = 1,1 µM) ;
– VEGFR1 (IC50 = 1,6 µM) ;
– Tie-2 (IC50 = 2,5 µM) ;
– FGFR1 (IC50 = 3,6 µM).
• Sur des tests in vitro de mitogenèse des cellules de sang de cordon
ombilical stimulées par facteur de croissance :
– inhibiteur de la mitogenèse induite par le VEGF (IC50 = 0,06 µM) ;
– inhibiteur de la mitogenèse induite par l’EGF (IC50 = 0,17 µM) ;
– inhibiteur de la mitogenèse induite par le bFGF (IC50 = 0,80 µM).
• Inhibiteur de la croissance tumorale in vitro :
Tumeur
Type
Effet
Calu-6
LoVo
PC-3
Cancer pulmonaire humain
Cancer colique humain
Cancer humain de prostate
Inhibition de la croissance
Inhibition de la croissance
Régression
L’activité antitumorale, dose-dépendante, a été démontrée chez
des souris athymiques xénogreffées avec cancers humains du
poumon, du côlon, de la prostate, de l’ovaire, du sein ou de la
vulve, et recevant des doses orales allant de 2,5 à 100 mg/kg/j.
Dans le modèle de cancer prostatique PC-3, le traitement par le
ZD6474 a induit une régression tumorale d’autant plus importante
que les tumeurs étaient volumineuses. Contre des xénogreffes établies (0,4 à 0,5 cm3), chez le rat, de cancers pulmonaire (Calu-6)
et colorectal (LoVo), il a été observé une inhibition significative
de la croissance tumorale après 7 à 28 jours de traitement avec
des doses allant de 7,5 à 30 mg/kg/j par rapport aux animaux
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
Tableau XI. ZD6474 : études de phase I de pharmacocinétique et de
tolérance.
• Pharmacocinétique orale chez 41 patients, avec des doses
de 50 à 500 mg/j :
– état d’équilibre pharmacocinétique après dosage à 15 jours ;
– demi-vie terminale : 120 h ;
AUC
50 mg
100 mg
300 mg
3,22 µg.h/m/l
9,31 µg.h/m/l
23,8 µg.h/m/l
Tmax
50 mg
100 mg
300 mg
0,5 à 24 h
4 à 24 h
7 à 24 h
– des concentrations placentaires pertinentes pour l’inhibition
enzymatique in vitro (19 ng/ml) ont été atteintes avec toutes les
posologies.
• Toxicité :
– dose maximale tolérée non atteinte ;
– effets secondaires (modifications cutanées telles que rash, érythème)
chez 29 % des patients ;
– pas de toxicité de grades 3-4.
contrôles traités par placebo. Des réponses divergentes ont été
observées dans divers modèles tumoraux. Ces différences peuvent
refléter une dépendance variable au VEGF en tant que facteur de
survie pour la vascularisation tumorale.
Les résultats d’un essai de phase I avec le ZD6474 chez
41 patients sont résumés dans le tableau XI. Aucune toxicité
dose-limitante n’a été observée. Des modifications cutanées
réversibles, dépendantes de la dose et du temps d’administration,
ont été observées chez 29 % des patients. La demi-vie plasmatique était d’environ 120 heures, avec un état d’équilibre pharmacocinétique atteint au bout de 15 jours de traitement. La
concentration plasmatique nécessaire à l’activité biologique du
ZD6474 (IC50 pour une activité in vitro de 0,04 µM ou 19 ng/ml)
a été atteinte, avec des doses de 50 mg/kg/j et plus. Aucune
réponse antitumorale n’a été observée, mais des essais complémentaires sont en cours.
Le ZD1839 (Iressa®)
Le ZD1839 est un autre inhibiteur des tyrosine kinases dérivé de
l’anilinoquinazoline. Il est spécifique de l’EGFR et agit en bloquant la prolifération tumorale induite par l’EGF. Il est maintenant prouvé, au moins chez l’animal, que le ZD1839 agit aussi
en inhibant l’angiogenèse induite par l’EGF (16). En revanche,
comme attendu, il n’a aucun effet sur l’angiogenèse induite par
le VEGF.
Le trastuzumab
Le trastuzumab est un anticorps monoclonal murin humanisé
dirigé contre erbB2, un récepteur de la famille de l’EGFR. La
signalisation via erbB2 permet la prolifération des cellules
tumorales mammaires. Le trastuzumab est utilisé en thérapie
dans les cancers du sein surexprimant erbB2, avec de bons
résultats cliniques. Une étude récente vient de montrer que
le trastuzumab agit, au moins pour une part, comme un antiangiogénique (17).
Figure 10. Structure chimique du PTK787/ZK 222584.
Tableau XII. Activités in vitro du PTK787/ZK 222584.
• Inhibiteur de l’activité tyrosine kinase in vitro de :
– VEGFR2 (IC50 = 0,04 µM) ;
– VEGFR1 (IC50 = 0,08 µM) ;
– PDGFR ß (IC50 = 0,58 µM) ;
– Flt-4 (IC50 = 0,66 µM) ;
– C-kit (IC50 = 0,73 µM).
• Sur des tests in vitro de mitogenèse des cellules de sang de cordon
ombilical stimulées par facteur de croissance :
– inhibiteur de la mitogenèse induite par le VEGF (IC50 = 0,007 µM) ;
– inhibiteur de la croissance tumorale in vitro :
Tumeur
Type
Effet
Ls174t
HT-29
A431
PC-3
CWR-22
Cancer colique humain
Cancer colique humain
Cancer épidermoïde humain
Cancer de la prostate humain
Cancer de la prostate humain
Inhibition de la croissance
Inhibition de la croissance
Inhibition de la croissance
Inhibition de la croissance
Inhibition de la croissance
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
Le PTK787/ZK 222584 : études précliniques et de phase I
Le PTK787/ZK 222584 se loge dans la région hydrophobe de la
poche de liaison à l’ATP des VEGFR et inhibe l’activité tyrosine
kinase du VEGFR2 (IC50 = 0,04 µM) et du VEGFR1 (IC50 =
0,08 µM) (figure 10, tableau XII) (18). C’est un agent actif par
voie orale (25 à 100 mg/j) avec, in vivo, une activité inhibitrice
de la croissance, chez la souris athymique, de xénogreffes de cancers humains du côlon, de la prostate et épidermoïdes (18). Il
inhibe aussi la croissance intrapéritonéale de cellules de cancer
ovarien humain chez la souris athymique. Dans un modèle murin
de métastases de cancer rénal, le PTK787/ZK 222584 (50 mg/kg)
inhibe la croissance des tumeurs primaires (le ratio de taille des
tumeurs chez les animaux traités par rapport aux animaux non
traités est de 0,34), réduit le nombre de métastases ganglionnaires (ratio = 0,29) ou pulmonaires (ratio = 0,65), et inhibe la
formation de microvaisseaux dans la tumeur primaire et les métastases (18). Les mesures de flux sanguin en IRM sur des mélanomes murins B16 ont montré une réduction de la taille tumorale avec une perméabilité vasculaire diminuée dans les tumeurs
des animaux traités.
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Il existe une association synergique entre le PTK787/ZK 222584
et la chimiothérapie. Des souris nudes ont été xénogreffées avec
une lignée tumorale humaine de cancer du pancréas. Elles ont été
traitées par le PTK787/ZK 222584, la gemcitabine ou l’association des deux. L’inhibition du volume tumoral est de 60 %, 70 %
et 81 % pour le PTK787/ZK 222584 seul, la gemcitabine seule
et l’association des deux respectivement.
Le PTK787/ZK 222584 augmente aussi l’effet des radiations
ionisantes.
Dans un essai de phase I d’escalade de dose (300 à 1 200 mg/j)
chez 15 patients (14 avec un cancer colorectal, 1 avec un cancer
du sein), il n’a pas été observé de toxicité dose-limitante, mais
pas de réponse non plus. Les effets secondaires rencontrés ont
été des nausées, une asthénie, des vertiges et des vomissements.
Le nombre médian de cycles de 28 jours administrés était de 2,6.
Le pic plasmatique a été atteint 1,6 heure après la prise orale, et
la demi-vie plasmatique était en moyenne de 5,9 heures. Un autre
essai de phase I a testé des doses croissantes de PTK787/
ZK 222584 (de 500 à 2 000 mg/j par voie orale) chez 20 patients
souffrant d’un glioblastome en rechute. Sur les 15 patients évaluables pour la réponse, il y a eu quatre stabilisations – de courte
durée – de la maladie et une réponse partielle de 6 mois. Des IRM
montrent une diminution de la perméabilité vasculaire des
tumeurs après la prise du médicament.
Le ribozyme anti-Flt-1 : études précliniques et de phase I
Un ribozyme est un petit acide nucléique catalytique capable de
cliver l’ARNm sur des séquences spécifiques. Le ribozyme antiFlt-1 est un ribozyme synthétique résistant aux nucléases qui
cible l’ARNm codant pour le VEGFR1 (figure 11). Dans un
modèle de cornée de rat, le ribozyme inhibe l’angiogenèse induite
par le VEGF. Le ribozyme anti-Flt-1 inhibe aussi la croissance
d’un variant hautement métastatique du carcinome pulmonaire
de Lewis ( 3 mg/kg/j) et réduit la formation de métastases pulmonaires ( 10 mg/kg/j) (19).
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Chez 14 volontaires sains, le ribozyme anti-Flt-1 a été bien toléré
et sans danger lors de l’administration en bolus sous-cutané
(20 mg/m2) ou en perfusion intraveineuse de 4 heures (10 ou
30 mg/m2). Dans une étude de phase I/II chez 20 patients avec
des tumeurs solides réfractaires, le ribozyme a été administré par
voie sous-cutanée quotidienne (10 à 300 mg/m2/j pour un minimum de 29 jours). Il n’y a pas eu de toxicité systémique ou biologique. Des réactions au point d’injection de grade 1 ou 2 ont
eu lieu 1 à 2 jours après l’injection et se sont résolues dans les
7 jours quelles qu’aient été les doses. Sur les 28 patients évaluables, 17 ont vu leur maladie stabilisée pendant 1 à 6 mois et
2 patients ont eu une réponse clinique mineure. Le ribozyme
anti-Flt-1 a démontré une biodisponibilité satisfaisante et des
taux plasmatiques durables avec une administration sous-cutanée quotidienne. Une stabilisation de la maladie chez la majorité
des patients et 2 réponses cliniques mineures sont encourageantes
et justifient des études de phase II complémentaires avec des
maladies spécifiques. Le ribozyme anti-Flt-1 a été administré à
des patients en association avec du carboplatine (AUC = 6) et du
paclitaxel (175 mg/m2). Cette combinaison a été bien tolérée et
les résultats cliniques sont attendus.
L’aplidine
L’aplidine est un cyclodepsipeptide isolé de l’espèce méditerranéenne Aplidium albicans, dont on pense qu’elle diminue l’expression du VEGFR1 et induit un arrêt du cycle cellulaire en G1 des
cellules traitées. Elle a montré une activité encourageante in vitro
contre plusieurs tumeurs humaines. L’aplidine est en développement de phase I, et des réponses antitumorales ont été rapportées.
L’inhibition de COX-2
La production de VEGF et d’autres facteurs angiogéniques
implique une cascade de signaux intermédiaires, de facteurs de
transcription et de régulation. Parmi ceux-ci figurent les prostaglandines produites par les cyclo-oxygénases (COX), en parti-
Figure 11. Structure chimique de l’angiozyme (ribozyme anti-Flt-1). (majuscule = ribonucléotides ; minuscule = 2’-o-méthyl-ribonucléotide ; B = 2’
déoxyribose abasique inversé ; s = lien phosphorothiolate ; u4 = 2’-C-allyle nucléotide).
50
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
culier l’isoforme inductible de la cyclo-oxygénase COX-2 (20).
L’induction de COX-2 a été rapportée dans de nombreux cancers (côlon, prostate, poumon, sein, pancréas, peau, tête et cou),
mais elle n’est généralement pas retrouvée dans les tissus normaux desquels sont dérivées ces tumeurs. COX-2 a été détectée
dans les cellules tumorales, la vascularisation tumorale et les
capillaires adjacents préexistants. Sa présence dans la néovascularisation a été décrite comme un fait caractéristique des cancers épithéliaux. Dans le cancer du côlon, le nombre de cellules
tumorales exprimant COX-2 est corrélé au stade tumoral, à la
taille tumorale et à la médiane de survie.
L’exposition de fibroblastes de souris à un inhibiteur spécifique de la COX-2 a réduit la production de VEGF de 95 % (21).
Dans le modèle d’induction d’angiogenèse par le FGF-2 dans
la cornée de rat, des réductions dose-dépendantes du nombre et
de la longueur des capillaires ont été obtenues avec le célécoxib,
un inhibiteur sélectif de la COX-2. L’inhibiteur sélectif de la
COX-1, le SC-560, n’a pas d’effet sur la réponse angiogénique,
indiquant que l’angiogenèse est dépendante de l’activité de la
COX-2 dans ce modèle.
Des études in vivo avec les inhibiteurs sélectifs de la COX-2 ont
démontré une activité antitumorale. Le célécoxib oral réduit la
croissance des tumeurs pulmonaires de Lewis de 85 % comparativement aux contrôles, et le nombre et la taille des métastases
pulmonaires de ces tumeurs ont aussi été réduits. Dans un modèle
de cancer colique HT-29, les métastases hépatiques ont subi une
réduction allant jusqu’à 91 % de façon dose-dépendante chez des
animaux traités par le célécoxib. Aucune toxicité associée au traitement n’a été rapportée dans ces études. D’autres études avec
divers inhibiteurs sélectifs de la COX-2 ont montré une inhibition
de la croissance de cancers ORL, de la peau et de la vessie. Des
transplantations de tumeurs chez des souris déficientes pour la
COX-2 (COX-2–/–) ont montré non seulement que la COX-2 est
importante pour la production de VEGF, mais aussi que la COX2 endogène, produite par exemple par l’endothélium vasculaire
ou les fibroblastes, contribue de façon substantielle à la croissance
de cellules tumorales sauvages transplantées (21). Ensemble, ces
données suggèrent que l’activité COX-2 est essentielle à l’angiogenèse, à la croissance tumorale et aux métastases.
Alors que ces résultats suggèrent que les propriétés antitumorales
des inhibiteurs de la COX-2 peuvent être attribuées à l’inhibition
de l’angiogenèse via la PGE et la production de VEGF, d’autres
données montrent un rôle de la COX-2 dans la migration et la
survie des cellules endothéliales, la perméabilité vasculaire et la
suppression des réponses immunes (20). Tous ces événements
contribuent à la progression tumorale et peuvent donc être des
cibles thérapeutiques potentielles. Un essai de phase II a étudié
le bénéfice de l’ajout de célécoxib (400 mg x 2/j) à une chimiothérapie standard par 5-FU, acide folinique et irinotécan en traitement de cancers colorectaux métastatiques ou non résécables.
Vingt-trois patients ont été inclus et 18 étaient évaluables pour
la réponse. Il y a eu 5 réponses partielles (28 %), 10 stabilisations
(56 %) et 3 progressions (17 %). La toxicité était acceptable. Un
autre essai de phase II est en cours et étudie le célécoxib en association avec le docétaxel en traitement d’une rechute d’un cancer pulmonaire non à petites cellules.
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
Anticorps inhibiteurs de l’angiogenèse
Depuis quelques années, les anticorps monoclonaux ont commencé à concrétiser l’espoir qu’ils suscitaient depuis longtemps
en thérapie anticancéreuse. Ils sont actuellement utilisés en traitement des lymphomes non hodgkiniens réfractaires (22), des leucémies et des cancers du sein métastatiques (23).
L’IMC-1C11
Anticorps IgG1 dirigé contre le VEGFR2, l’IMC-1C11 bloque
le lien du ligand au récepteur et inhibe sa phosphorylation.
L’IMC-1C11 est testé en phase I. Les études de toxicité chez le
singe indiquent que l’IMC-1C11 serait bien toléré chez les
patients. Il a été suggéré qu’un anticorps dirigé contre le
VEGFR, tel l’IMC-1C11, pourrait avoir un avantage thérapeutique par rapport à des anticorps ciblant le ligand soluble, car
la surproduction de la cible, dépassant les capacités inhibitrices
de l’anticorps, semble se produire moins souvent avec le
VEGFR qu’avec le VEGF.
Le bévacizumab
Le bévacizumab est un anticorps humanisé qui, à la différence
des autres agents discutés dans cette revue, est dirigé contre le
VEGF et non contre le VEGFR. Il a montré une inhibition de la
croissance tumorale dans des études précliniques. Les résultats
d’une étude de phase I du bévacizumab chez 25 patients avec un
cancer avancé ont récemment été rapportés (24). La toxicité comprend une asthénie légère, des céphalées et des nausées dans les
premiers jours suivant la perfusion de l’anticorps. Il n’y a pas eu
de toxicité de grade 3 ou 4 attribuable au traitement, et aucune
toxicité dose-limitante n’a été atteinte. La pharmacocinétique a
montré une distribution extravasculaire limitée et une demi-vie
circulante de 21 jours, similaire à celle des autres anticorps monoclonaux humanisés. Il y a eu des épisodes de saignement tumoral (2 sérieux, 2 mineurs), et il a été noté qu’une augmentation
du risque de thrombose ou d’hémorragie pouvait être un élément
clinique en lien avec la perte de l’intégrité endothéliale dans les
microvaisseaux tumoraux.
Un essai de phase II chez 35 patientes avec un cancer du sein
métastatique en rechute a confirmé la tolérance en monothérapie du bévacizumab, bien qu’une patiente ait interrompu le traitement en raison d’une hypertension maligne et d’un syndrome
néphrotique apparus peu de temps après le début du traitement.
D’autres expérimentations ont montré la possibilité d’une
hypertension artérielle sérieuse en lien avec le traitement. Parmi
17 patients traités à la dose de 10 mg/kg, il y a eu une réponse
complète et une réponse partielle, et la régression de nodules
cutanés a été observée chez 2 autres patientes. Le bévacizumab
est en développement avancé en combinaison avec des chimiothérapies standard pour des cancers colorectaux, du sein et
pulmonaires à petites cellules. Des possibilités de traitement très
prolongé avec le bévacizumab ont été montrées. Un essai de
phase I/II avait porté sur 52 patients, parmi lesquels 28 ont reçu
le bévacizumab pendant plus d’un an : 16 avaient un cancer
colorectal, 7 un cancer pulmonaire non à petites cellules, 4 un
cancer du sein, 1 un cancer de la prostate. Dix-huit ont reçu une
chimiothérapie concomitante. Le temps moyen jusqu’à pro51
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gression est de 13,7 mois. Deux patients ont eu une réponse
complète, 12 une réponse partielle, 13 une stabilisation et 1 une
progression de la maladie. La survie médiane n’a pas été atteinte :
20 patients sont encore vivants avec un recul de 17 à 40 mois. Il
est très intéressant de noter que bon nombre de patients ont arrêté
le traitement et ont pu le reprendre avec à nouveau une réponse
thérapeutique, certes moins importante. La toxicité à prendre en
compte est le risque thromboembolique (5 thromboses veineuses
profondes).
ont montré que cet oligonucléotide diminuait considérablement
la croissance des tumeurs.
Immunothérapie cellulaire
Une approche originale a récemment été publiée. Elle consiste
non pas à utiliser des anticorps, mais à générer des lymphocytes
cytotoxiques CD8+ spécifiques du VEGFR. Un vecteur rétroviral permet la transfection de séquences du VEGFR dans des lymphocytes CD8. Ces lymphocytes montrent ensuite une activité
cytotoxique spécifique contre les cellules exprimant le VEGFR.
In vivo, chez la souris, de tels lymphocytes sont capables d’inhiber la croissance tumorale. Cette inhibition est encore plus forte
lorsqu’on administre conjointement le TNP-470, un autre agent
anti-angiogénique (25).
Le néovastat
Le néovastat est un inhibiteur de l’angiogenèse aux multiples
fonctions. Il inhibe le VEGFR1 et les métalloprotéinases MMP2, 9 et 12. Il a été étudié en phase II chez 144 patients souffrant
de diverses tumeurs solides, parmi lesquelles 22 cancers du rein.
Le néovastat était administré deux fois par jour par voie orale à
la dose de 60 ou 240 ml/j. Les patients du bras 60 ml/j avaient
reçu une immunothérapie dans 75 % des cas et ceux du bras
240 ml/j dans 43 % des cas. La survie médiane des patients du
groupe 240 ml/j était de 16,3 mois, versus 7,1 mois (p = 0,01)
dans le groupe 60 ml/j. Il y a eu deux réponses objectives dans
le groupe 240 ml/j. Le taux de survie à 2 ans était de 0 % dans le
bras 60 ml/j, contre 36 % dans le bras 240 ml/j. Une étude de
phase III est actuellement en cours dans le traitement du cancer
du rein.
Autres molécules en développement
La squalamine
La squalamine est un stérol naturel anti-angiogénique. Elle est
efficace pour traiter des souris xénogreffées par des cellules tumorales ovariennes humaines. Elle augmente les effets du cisplatine.
Il est intéressant de noter que, alors que les cellules surexprimant
HER-2 sont résistantes au cisplatine, cette résistance est levée en
cas d’association avec la squalamine.
Le CP-547,632
Le CP-547,632 est un inhibiteur de tyrosine kinase du VEGFR2
administrable par voie orale. Il se lie également à l’EGFR et au
PDGFR β. Un essai de phase I a testé sa prise quotidienne par
24 patients porteurs de diverses tumeurs solides. Les doses
allaient de 35 mg/j pendant 14 jours par mois à 160 mg/j quotidiennement en continu. Il n’a pas été observé de toxicité doselimitante. Sur 22 patients évaluables pour la réponse, 6 ont stabilisé leur maladie pendant plus de 8 semaines, et un patient l’a
même stabilisée pendant plus de 6 mois.
Les inhibiteurs des protéines tyrosine phosphatases
Une fois le VEGFR2 activé, il permet la phosphorylation des protéines de transduction du signal grâce à l’intervention de protéines
tyrosine phosphatases. Des inhibiteurs de ces protéines tyrosine
phosphatases ont été développés. Ils montrent une action antiangiogénique (26).
Les oligonucléotides anti-sens
Des oligonucléotides anti-sens neutralisant l’ARNm codant pour
le VEGF ont été développés et montrent un potentiel anti-angiogénique. Un oligonucléotide anti-sens bloquant l’angiopoïétine 1
a été testé. Des études in vitro sur des lignées tumorales HeLa
52
L’oltipraz
L’oltipraz est un dithiolethione synthétique qui inhibe l’angiogenèse. Des souris athymiques xénogreffées par des cellules
d’angiosarcome ont été traitées par l’oltipraz. Il en résulte une
diminution de la masse tumorale de 81 %. Cette réduction est
similaire à celle observée avec le semaxanib.
La voie de la Raf-1 kinase
Un magnifique travail de thérapie génique a été très récemment
publié (27). L’intégrine v3 est préférentiellement exprimée par
l’endothélium des néovaisseaux et sert donc de cible. Une nanoparticule lipidique a été synthétisée et couplée à un ligand de v3.
Un gène peut être couplé à cette particule et ainsi délivré spécifiquement aux cellules exprimant l’intégrine αvβ3. Le gène choisi
ici est une forme mutée de Raf qui inhibe à la fois l’angiogenèse
induite par le VEGF et celle induite par le bFGF. Des souris ont
été xénogreffées par des cellules humaines de mélanome. Celles
traitées par la nanoparticule couplée au ligand de l’intégrine v3
et au gène Raf muté ont présenté une régression tumorale très
rapide. En 6 jours, 4 souris sur 6 avaient une réponse complète
et les 2 autres avaient une réponse partielle supérieure à 95 %,
avec une diminution supérieure à 75 % de la densité en microvaisseaux. Cette réponse est spécifiquement liée au gène Raf
muté délivré dans les cellules endothéliales exprimant l’intégrine
v3. De la même façon, des souris ont été greffées par des cellules syngéniques murines de tumeurs coliques à haut potentiel
métastatique hépatique ou pulmonaire. Le traitement entraîne
également une nécrose des métastases. Cet essai de thérapie
génique est très important, car les nanoparticules sont beaucoup
moins immunogéniques que les vecteurs viraux, ce qui autorise
un traitement répété et prolongé.
Un inhibiteur spécifique de Raf-1 a été développé : le BAY 439006. Dans une étude de phase I, il a été administré par voie orale
à doses croissantes (de 50 mg deux fois par semaine à 200 mg
deux fois par jour) pendant 28 jours sur 35. Il n’y a pas eu d’effet
secondaire important et la dose limitante toxique n’a pas été
atteinte. Les résultats cliniques sont en attente.
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no 2 - mars-avril 2003
9. Schlessinger J, Lax I, Lemmon M. Regulation of growth factor activation by
PERSPECTIVES
Dans les deux dernières décennies, des progrès rapides ont été
réalisés dans la compréhension de l’angiogenèse, incluant ses
voies de signalisation et leur régulation. Avec le séquençage du
génome humain, les molécules participant à l’angiogenèse sont
accessibles à l’étude. Les activations croisées entre les différentes voies ou le maintien de leur spécificité de signalisation
devraient être mieux compris. Cependant, en dépit de la redondance des médiateurs de l’angiogenèse et de ses multiples voies
d’activation, certains agents, tels les inhibiteurs de tyrosine
kinases qui inactivent la signalisation via le VEGF et le VEGFR,
permettent de supprimer substantiellement l’angiogenèse dans
diverses conditions pathologiques. Des études chez l’animal montrent que l’on peut efficacement associer des inhibiteurs du
VEGFR et de l’EGFR (28). Beaucoup de nouveaux inhibiteurs
de la signalisation par le VEGFR et d’autres médicaments antiangiogéniques à ciblage moléculaire sont en cours de développement. Le défi actuel est de déterminer le meilleur emploi de
ces nouvelles thérapies en combinaison les unes avec les autres
ou avec des agents cytotoxiques conventionnels pour augmenter
la survie des patients cancéreux de façon significative. Ce défi
implique de nouveaux modèles de développement clinique qui
considèrent plutôt la nature cytostatique que la nature cytotoxique
des agents anti-angiogéniques, la possibilité de thérapies prolongées avec ces agents et le rationnel pour les combiner avec les
autres thérapeutiques cytotoxiques. Des essais cliniques en cours
appliquent ces concepts avec l’espoir de permettre l’utilisation
des thérapeutiques anti-angiogéniques en pratique clinique. Les
oncologues doivent se préparer à évaluer ces agents en participant à des essais cliniques, et éventuellement à les intégrer dans
leur arsenal thérapeutique.
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