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Méta-analyse d’Oxford sur le traitement adjuvant
du cancer du sein par tamoxifène
● Henri Roché*
a-t-il encore beaucoup à apprendre sur les antiestrogènes ? Si les mécanismes d’action et de
régulation semblent commencer à se dévoiler, les
applications cliniques paraissaient, il y a peu, encore figées. La
troisième méta-analyse publiée en mai 1998 dans The Lancet
offre son lot d’informations nouvelles. Cette compilation
d’essais randomisés bénéficie maintenant de bases solides, d’un
recul médian de 10 ans et d’un nombre d’événements considérables rendant plus fiables les conclusions. 36 689 femmes
incluses dans 55 essais ont été suivies, dont 13 268 sont décédées.
Quels sont les principaux apports à nos connaissances délivrés
par cette publication ? Quels sont les points encore laissés dans
l’ombre et justifiant des analyses ultérieures ?
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Trois apports sont à retenir en priorité :
– La durée du traitement adjuvant : quels que soient les autres
paramètres étudiés (sauf pour les récepteurs estrogéniques
négatifs), l’allongement de la durée d’exposition au tamoxifène
augmente l’efficacité. Il devient clair que cette durée doit être
d’au moins 3 ans (9 essais sur 55 et 8 349 patientes sur les
36 689). La médiane de durée d’exposition dans cette catégorie
d’étude est de 5 ans. La réduction des risques de rechute et de
décès est multipliée par 2,2 et 1,5 par rapport à des durées de
traitement de 1 et 2 ans. Dans ce cas, toutes patientes confondues, la diminution du risque de rechute est de 42 % et celle du
risque de décès de 22 %. La conclusion évidente est qu’en
situation adjuvante, le tamoxifène doit être prescrit à la dose de
20 mg par jour pendant 5 ans.
– L’inefficacité du tamoxifène sur des tumeurs RE – est démontrée. Même en cas de prescription pour 5 ans, il n’y a aucun
bénéfice sur la survie sans rechute et la survie. En revanche, le
bénéfice sur le risque de cancer du sein controlatéral est le
même (– 47 ± 9 %), témoignant bien qu’il s’agit là d’une autre
maladie.
– Le tamoxifène est un traitement adjuvant efficace avant la
ménopause en cas de tumeur RE +. Il s’agit là d’un fait nouveau majeur esquissé lors de la méta-analyse précédente, indiscutable maintenant (2 248 patientes étudiées). Cet effet n’apparaît que pour une durée d’exposition de 5 ans. Si cette dernière
*Institut Claudius-Regaud, Toulouse.
La Lettre du Sénologue - n° 2 - octobre 1998
condition est remplie, le bénéfice (45 % sur le risque de rechute,
32 % sur le risque de décès) rejoint celui observé chez les
femmes ménopausées. Bien que le nombre d’observations soit
limité, ce bénéfice s’observe aussi bien dans la tranche d’âge
inférieure à 40 ans que dans celle des 40-50 ans. Le tamoxifène
seul devient une des options thérapeutiques recevables pour des
femmes non ménopausées ayant une tumeur RE +. Bien sûr, les
inconvénients gynécologiques éventuels doivent être soigneusement étudiés.
Parmi les confirmations intéressantes, on peut retenir que :
– l’association chimiothérapie + tamoxifène est supérieure au
tamoxifène seul chez les patientes RE + ;
– les bénéfices en valeur relative sont les mêmes pour les
patientes N – et N + ;
– le bénéfice sur la rechute est moins important après 5 ans
d’observation alors que l’effet sur la mortalité s’amplifie ;
– le risque de survenue d’un cancer du sein controlatéral disparaît pour 3 femmes sur 1 000 par an.
Le risque relatif de survenue d’un cancer de l’endomètre sous
tamoxifène est multiplié par 2,5 (augmentant avec la durée
d’exposition) : l’excès de mortalité par cancer de l’endomètre
et par an est de 0,2/1 000.
Que peut-on demander à la prochaine méta-analyse ?
– De préciser l’effet réel pour les très petites tumeurs de bon
pronostic,
– de donner des indications sur des situations cliniques plus
rares : RE + RP –, RE – RP +,
– de mieux documenter les conséquences d’une prise prolongée
au-delà de 5 ans.
Toutefois, il sera encore trop tôt pour comparer le tamoxifène
aux nouvelles hormonothérapies : anti-estrogènes purs et antiaromatases.
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O U R
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S A V O I R
P L U S
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Early Breast Cancer Trialists Collaborative Group (EBCTCG). Tamoxifen
for early breast cancer : an overview of the randomised trials. Lancet 1998 ; 351 :
1451-67.
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