ميحرلا نمحرلا للها مسب Sociologie des prédic-acteurs de l’Islam de France

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Sociologie des prédic-acteurs de l’Islam de France
‫بسم اهلل الرحمن الرحيم‬
Au nom d’Allah, Le Tout-Miséricordieux, Le Très-Miséricordieux
Depuis quelques années maintenant, la communauté musulmane en
France (comme partout ailleurs), connaît une fulgurante inflation de
prédicateurs à l’Islam en tout genre et à toutes les sauces, de l’américaine à la
harissa…
Je ne parle pas ici de ceux qui sont adoubés par les média-manipulateurs officiels (télés et
radios), ni de ceux qui passeraient même pour fonctionnaires tant ils sont assermentés par le
Ministère de l’Intérieur. Je parle de ceux qui bien souvent se sont autoproclamés
prédicateurs (et je pourrais même dire e-procl@mé). Leurs buts : la da’wa ila Allah.
Alors où est le problème pour moi, musulman identitaire et décomplexé, sur-engagé et affilié
à l’orthodoxie et orthopraxie sunnite ?
Et bien justement parallèlement à ça, avec ma petite expérience dans les études historiques,
sociales et politiques, je suis toujours amené à réfléchir sur les origines d’un phénomène et à
méditer sur son devenir en fonction des caractéristiques mêmes de ce phénomène.
Alors justement : quelles sont les caractéristiques de ces prédicateurs ?
Avant toute chose, une petite précision : veuillez à ne pas m’accuser de faire un procès
d’intention en lisant ce que vous allez lire. L’intention étant dans le cœur, seuls les paroles,
les actes, les prises de positions, les styles et les postures m’intéressent. En gros, je suis ici
comme un botaniste devant une fleur ou un zoologiste devant un animal : j’observe et je
prends des notes en essayant de comprendre tous ces mécanismes en tant que phénomène
social.
1.
Primauté du contexte :
Tout d’abord la première chose à rappeler, est que ce genre de prédicateurs ne naît pas exnihilo, de rien, ils émergent d’un contexte, à partir d’un terreau très fertile, en l’occurrence
celui de la France (Mais aussi de la Belgique : alors considérons pour simplifier que les
belges francophones sont comme nos ch’tis du nord…). Pour faire de la petite sociologie de
première année, la société détermine souvent l’ « habitus » des individus et de leurs groupes
sociaux, on ne peut donc pas étudier le fait « prédicateur » indépendamment de son
environnement.
Or le musulman de France est certainement, dans le monde occidental, celui dont la
conscience est la plus déstructurée : spécificité de la dés-intégration à la française, héritage
colonial, type d’immigration et origine sociale sont des amorces d’explications.
La ghettoïsation, l’acculturation, l’assimilation forcée, l’échec scolaire, la perte de repères
stables et cohérents, les manipulations idéologiques et historiques, les mensonges
conformistes qu’ils soient issus de la tradition sclérosée « blédarde » (car inapte à faire face
de manière durable à la modernité occidentale) ou bien ceux véhiculés par l’État en quête de
la soumission absolue de ces néo-citoyens potentiellement dangereux et donc à contrôler…
Tout ceci est de nature à détruire la saine fitra, la saine raison des musulmans français et les
transforme en individus malléables corvéables, manipulables, intégrables à n’importe quoi,
n’importe comment et pour n’importe qui… Sans aucun sens critique, prêts à
consommer (physiquement ou spirituellement) tout ce qu’on leur offre pourvu que les
apparences soient sauves (ou presque). Ce processus entre dans ce que l’on nomme la
socialisation. Et celle-ci leur fait intégrer une néo-culture (qui n’est même plus
authentiquement française), celle de l’hyper-modernité individualiste, qui prône avant toute
chose la réussite égoïste et égocentrée, celle de la consommation ultralibérale cherchant à
satisfaire avant tout ses propres désirs de consommation de masse par un consumérisme le
plus débridé, de celles qui cultive l’Ego, le « Moi », le « Je » primant sur la collectivité, sur
l’esprit de corps, sur les liens de la fraternité, sur la « ’assabiya islamique » (chose honnie
par le système).
D’ailleurs, on connaît à cet égard le but du Rap, de la musique, des modes, de la télévision
et de certaines productions cinématographiques qui visent tout particulièrement les français
d’origine immigrée dans cette entreprise de manipulation idéologique visant à les
conditionner selon les canons connus.
Les musulmans de manière générale et ceux d’origine africano-maghrébine particulièrement,
ont tous intériorisé ces concepts, ils savent tous que pour « réussir », que cela soit par le
sport, le cinéma, la musique, ou par le nouveau job de la « représentation communautaroreligieuse », la soumission totale au système est l’ascenseur social le plus rapide.
Quel est le rapport de cette description et analyse sociologique des musulmans
francophones avec nos prédicateurs ?
2.
Analyse psycho-sociologique de la vocation « prédicateur » :
Il est donc indéniable que le prédicateur et sa prédication se retrouvent conditionnés par cet
environnement. Individualisme, consumérisme libéral, soumission au système dominant. Ces
trois points nous permettent de comprendre la portée de ces prédicateurs et leurs finalités.
L’individualisme, dans une société ultralibérale ayant dépassé le stade même de la
modernité, pousse les individus à utiliser toutes leurs capacités et potentialités dans un seul
but personnel et égoïste : celui de s’accaparer les moyens de satisfaire leurs désirs de se
sublimer par rapport à la masse des individus (par le pouvoir, la richesse qui satisfait les
désirs de consommation et le prestige) : et ce désir de s’élever par rapport aux autres est
d’autant plus fort dans une société démocratique prônant l’Égalitarisme.
Tout ces désirs sont humains, et sont encore plus forts quand ces derniers ne sont pas
affichés de manière consciente et assumée.
Dès lors, sans s’en rendre compte (surtout au début de sa « carrière », avec le zèle de la
sincérité de le faire pour l’Islam), le néo-prédicateur va user inconsciemment de l’Islam
comme d’un simple tremplin social : et machinalement, c’est l’Islam qui va lui permette de
monter dans la hiérarchie de la société et tout d’abord, dans la hiérarchie de son propre
groupe d’appartenance, celui de sa communauté d’origine.
Se faire une place et un nom dans la communauté musulmane française en utilisant l’Islam,
le prétexte de la prêche est facile et a toujours existé en France : depuis le début des années
80/90, tout imam d’une quelconque mosquée maîtrisant un tant soi peu les sciences
islamiques sait quel pouvoir et prestige il pouvait en tirer devant une communauté où
l’ignorance était si présente.
La nouveauté, qui marque une dégradation encore plus perverse de ce phénomène, est que
ces prédicateurs optent pour ce but des stratégies de communication dignes des plus grands
spécialistes du Marketing publicitaire.
L’image est, on le voit très bien, au cœur du système, au cœur du « Star-système ».
Maîtriser son image est un point de ce « dogme » car c’est la clé maîtresse de la réussite de
cette carrière/vocation de prédicateur. Il faut donc la sublimer, la renforcer, la manipuler, et
pouvoir jouer avec par les possibilités infinies qu’offrent les nouvelles technologies de
l’information et de la communication : c’est un axe majeur de cette prédication, sans laquelle
tout l’édifice ne peut se construire.
Le piège qu’ils se construisent à eux-mêmes est que la culture de l’image renforce le culte
de l’image : dans un cercle vicieux, elles se nourrissent et se complètent, renforçant la
dépendance à l’image, si bien qu’au delà d’un certain stade, on ne peut plus s’en passer et
ne pas la cultiver.
D’où l’importance de s’afficher avec tel célèbre imam ou prédicateur star du Moyen-Orient
pour ces prédicateurs, de la même manière qu’une petite star du show-bizz français tient à
montrer qu’il fréquente ces grands homologues américains : tout cela pour valoriser sa
propre image auprès de son propre public.
La « peopolisation » ou la « starification » de la da’wa autour de ces prédicateurs montre
bien, en effet, que « Le changement c’est maintenant », et que nous vivons l’ère de
l’individualisme consumériste habillé en réalité du vêtement et du langage islamique.
Le parallèle avec le « rappeur bling-bling» de nos cités est évident, frappant même.
Vidéoclip, postures, style du langage… Ces rappeurs étaient pourtant beaucoup moins
schizophréniques que ce genre de prédic-acteurs : ils assument leurs individualismes, et le «
MOI JE » (suis le plus beau/fort/riche etc…) qui ne fait que reproduire la culture ultralibérale
du ghetto américain. Le rappeur hédoniste est donc un homme de son temps et issu de la
culture occidentale (anglo-saxonne), profitant de sa notoriété, de sa « gloire », de sa
renommée pour montrer son image de la réussite, ses belles voitures, ses bimbos, ses
vêtements griffés, ses vacances dans les lieux les plus « branchés » de la planète, ses
sorties en boite ultra-select et tendance…
Nous comprenons bien que le néo prédicateur islamique ne peut pas reproduire tout ceci
sous la forme d’un absolu copié-collé, il serait bien entendu en contradiction flagrante avec
les valeurs auxquelles il appelle, mais inconsciemment, il reproduit les mêmes « codes »
sociaux, le même « ethos » (sociologiquement parlant).
Montrant que maghrébins de France/Belgique quand ils sont prédicateurs, rappeurs,
footballeurs ou star du ciné ou de la téléréalité, tous viennent du même quartier, tous ont le
même « habitus », car fondamentalement les mêmes origines sociales, et tous ont
quasiment les mêmes rêves, mais chacun choisit une stratégie différente.
Encore une fois, comprenons bien que tous cela est très souvent inconscient, il ne s’agit pas
d’affaire de sincérité et d’accuser telle ou telle personne d’être foncièrement un malhonnête,
un hypocrite ou un menteur opportuniste. Nous sommes ici en face d’un système : et quand
les individus ne se sont pas « désocialisés » de ce système et de ces processus coercitifs,
notamment par une autocritique « radicale », ils ne feront que reproduire de manière
intériorisée le comportement global et général toléré par ce système et que le système leur a
inculqué.
C’est pourquoi, et malgré lui, le néo-prédicateur islamise les codes d’une culture qui n’est
absolument pas islamique (grosso-modo ce qu’on pourrait appeler pour simplifier le culte de
soi…), aspect d’une culture symptomatique du monde occidental en dérive qui a épuisé et
vidé toutes ses prétendues valeurs. Ce prédicateur ne fait que filtrer et épurer de ces codes
étrangers ce qui est en opposition flagrante avec le rôle et l’image que lui et son auditoire se
font de son statut : tout le reste est assimilé sans aucun recul (ce qui est normal
puisqu’intériorisé).
Pourtant, lorsque l’ego s’en mêle, on remarque très bien que ces prédicateurs ressentent au
fond d’eux mêmes, les effets de cette « personnalité » contradictoire. En effet, à la simple
remarque, critique ou conseil (notamment sur le style : le fond est affaire de spécialiste) le
mot JALOUX en mode défense fuse de leur part, tel un préadolescent essuyant une critique
en commentaire sur son skyblog. Ce mot est un véritable symbole à lui seul : car, au fond,
jaloux de quoi ?
Jaloux de tout ce que nous venons d’expliquer ci dessus : et paradoxalement, c’est la preuve
qu’ils perçoivent le bien fondé des critiques de leurs coreligionnaires. Mais le problème est
qu’ils les intègrent de la manière la plus « animale » possible. Leurs cortex reptiliens veulent
leur faire croire que ces individus qui « osent » les critiquer, ne les critiquent que pour de
mauvaises raisons, la vraie raison de leurs critiques est, qu’au fond, ils ne veulent en fait
qu’une seule chose, prendre une place : la leur, d’où le terme de « Jaloux ».
De la même manière que les stars du show-bizz, rappeurs ou autres, lorsqu’ils sont parfois
attaqués ou dénigrés par leurs ex-fans ou des détracteurs issus de leurs communautés
d’origines (quartiers ou autres), se défendent à l’identique : « De toute façon c’est qu’des
jaloux ces pauv’ nazes, ils ont la rage de mon fric, de moi, de ma tchatche et de mes
meufs… ».
Là encore le langage n’est pas le même avec nos néo-prédicateurs, mais il est simplement «
islamisé » et plus modéré. Cette posture de défense « jaloux » montre bien qu’on est dans le
principe du « Star-system ». Le mot « jaloux » est donc le symbole clair de cette dérive
égocentrique inconsciente.
Je dis très souvent inconscient mais en réalité je pense, que si au début le zèle de la
prédication inhibe les effets pervers de l’ego, la culture de l’image prend consciemment le
dessus petit à petit. A tel point (le comble de tout ceci), qu’ils montrent même à ce sujet,
leurs capacités à rebondir sur ces critiques en rajoutant une couche de da’wa médiatique
authentiquement désintéressé et témoignant leurs consciences du problème : « Hey ! Les
frères et sœurs qu’on aime tous vraiment beaucoup, nous sommes pas des STARS
attention, être fan c’est po bien !!! » car au fond et finalement, tout le monde a compris tout
ces enjeux, et eux les premiers…
Autres éléments particulièrement notables et révélateurs : l’ardent désir de ces prédicateurs
d’être aimés et appréciés par le plus grand nombre.
Nous savons qu’une star du Show-bizz, de la musique ou du cinéma ne peut pas survivre
sans l’existence d’un public, de son public. C’est le public qui assure leurs positions, leurs
statuts (d’où le fait que l’Image ait une importance capitale dans cette relation).
De la même manière, ce prédicateur et sa prédication, sous prétexte affiché de da’wa fi
sabilillah, cherche à convertir, à sensibiliser, à capter, musulmans et musulmanes. Toute la
stratégie de communication tend à séduire la masse de la jeunesse musulmane désireuse
d’authenticité islamique, mais la séduire sur un contenu, sur une image, sur la forme, sur un
style, sur une ambiance dont le critérium suprême est le prédicateur lui-même, sa voix, son
visage et ses gestes.
Si bien que, quand les critiques commencent à se faire entendre, on ne cherche pas à
vérifier le fond ou le texte (preuves théologiques), mais on cherche à tout prix à s’assurer du
soutien indéfectible de ses fans et autres admirateurs(trices). On les consulte pour se
rassurer, on demande leurs avis, on censure les critiques (et pire quand elles sont sur le
champs de la critique scientifique), on met en évidence les compliments et on laisse les
attaques hystériques parfois injurieuses des fans hypnotisés contre leurs détracteurs. Et si
on s’aperçoit que le public est toujours là, on ne changera évidemment rien (ce qui est le cas
pour l’instant), mais si la critique gagne les fans, ce sera automatiquement la panique, la
reculade forcée et le mea culpa faussement modeste. C’est encore une fois la preuve que la
da’wa est détournée de son but initialement affiché et qu’elle est le moyen pour la personne
jouant le rôle d’imam-prédicateur de satisfaire en réalité les seules passions de son Ego et
de se donner un rôle social au sein de la communauté via internet (rôle que la société réelle
via le plus grand des médias, la télé, leurs refusent encore pour l’instant…)
3.
Dernier élément : la soumission au système de domination et à
son rapport de force :
Ces prédicateurs ont tous théoriquement le but de propager l’Islam selon le dogme sunnite
orthodoxe basé sur le Coran et la Sunna authentique et la compréhension et méthodologie
des compagnons et de leurs successeurs. Loin d’être en cohérence avec les implications de
ce dogme, c’est plutôt la fuite en avant.
De la même manière -encore une fois- que l’ancien adepte du gangsta-rap antiflic et
antisystème qui prônait l’état d’émeute insurrectionnelle dans les cités de France, s’est
assagi au fil du temps et entre dans le décor du show-bizz parisien (en appelant même à
voter Sarkozy !), c’est toutes les prétentions islamiques issues du dogme auquel ces
prédicateurs prétendent appartenir qui sont entrain d’être revu à la baisse, petit à petit.
Ce n’est pas plus un retournement du prédicateur ici qui est pointé du doigt (comme celui de
certains rappeurs) que le retournement d’un type de prédication dont les contradictions
étaient évidentes dès le départ. Dés lors, les prédicateurs de 2012 n’ont fait que prendre ce
train en marche, ils n’en sont pas directement responsables même s’ils y participent
activement : c’est l’irrésistible fuite en avant vers la totale soumission à l’ordre politique,
jusqu’à même intérioriser cette soumission (touchant donc le cœur, l’ultime refuge de la Foi
et de la croyance !).
L’un des exemples académiques de cette soumission au système est justement l’appel à la
participation à la mascarade électorale.
Il ne s’agit même pas ici de critiquer les postures et les pseudo-preuves théologiques
permissives qui ne sont en réalité que des arguments d’autorité (du style : tu connais mieux
que le cheikh foulan toi ?) quand bien même le non musulman, lui-même sait qu’il n’existe
pas de clergé en Islam sunnite et que seul Allah et son prophète (le Coran et la
Sunna) tranchent en finalité.
Il ne s’agit pas non plus de dénoncer les fausses postures de juste milieu, du genre : « toi
respecte la divergence et nos preuves, mais nous en faite on respectera pas la tienne…», en
cherchant à humilier sur un ton sarcastique « debouzzien » ceux qui se plongent dans
l’argumentation purement scientifique…
Mais le but est ici d’expliquer encore une fois et tout simplement ce que révèle « socialement
et psychologiquement » ce choix en faveur du vote.
Il y a encore quinze ans, la peur du grand méchant Jean Marie Le Pen, quand on se
revendiquait du minhaj des salafs salihs, en aurait fait rire plus d’un ! Or aujourd’hui c’est la
toute petite Marine qui fait peur à certains !
Mais Peur de quoi en réalité ? D’être expulsé quand on est né citoyen du pays !!?? C’est la
preuve qu’on reproduit un modèle de soumission « blédard » : celui de l’immigré africanomaghrébin soumis à l’ex-puissance coloniale, lui témoignant une crainte démesurée et un
amour servile pour l’avoir autorisé à entrer sur le territoire national et toléré qu’il soit un gentil
petit esclave moderne.
Ou bien alors, peur de ne pas pouvoir pratiquer sa religion ? Mais que faire alors de la Hijra,
l’un des points fondamentaux de la da’wa dite salafiyya !!?? D’ailleurs, l’un des buts de toute
prédication islamique orthodoxe n’était pas de rappeler qu’un musulman en Occident (dar al
koufr) était comme un saumon de l’Atlantique nord dans un aquarium ?
De plus, dans un mal, à savoir Le Pen au pouvoir en France (en imaginant bien que cela soit
un mal ce qui n’est pas prouvé du tout…) n’y a t-il pas un bien comme il est écrit dans un
livre qu’ils sont censé connaître? Le bien de pouvoir enfin se poser les bonnes questions sur
notre présence ici ?
Contradiction qui n’en est pas une en réalité si on réfléchit au fait que l’existence de ces
prédicateurs est liée justement à leurs présence en Europe. Leurs statuts sociaux, leurs
renommées, leurs vies de prédicateurs n’ont de sens qu’ici, n’ont de poids que devant les
musulmans francophones relativement ignorants. C’est à la base de leurs prétentions et de
leurs professions mêmes et c’est le cœur de leurs propres réussites. Leur succès n’est
conditionné que par cet environnement dans lequel ils peuvent nager comme bon leur
semble (au sens propre et figuré!). Ces prédicateurs n’auraient aucune chance de percer
dans les pays dont les sociétés sont historiquement musulmanes. Or, avec un public
inexistant, aucun profit à en tirer.. Des centaines de prédicateurs infiniment plus talentueux,
plus versés en sciences (le rappeler est même insultant!), plus pertinents dans leur
prédication existent, sauf que leurs postures islamiques « traditionnelles » font que ces
derniers n’utilisent pas encore la technologie et les stratégies de com’ « free style, I’m the
Best » qui est le leurs, et surtout qu’ils ont encore beaucoup de scrupule…
Même en France, quantité de frères ayant l’attitude modeste et pleine d’humilité, des vrais
tullâb al’ilm, s’étant profondément investi dans les études théologiques, ayant un droit à la
parole infiniment plus légitime en terme de science devant celle virtuelle de ces néo
prédicateurs adoubés par une séance de photo-vidéo à la Mecque ou Médine.
Alors dans ce cas pourquoi faire la Hijra et risquer d’hypothéquer un avenir encore plus
incertain que celui qui se profile à l’horizon européen ? Elle a décidément bon dos la da’wa !
Dés lors, préférons l’appel au vote tranquille, pépère et sans prise de risque inutile, appelons
à voter pour le parti socialo-sioniste laïcard (ou pour un autre qu’importe…) et préférons
quelques contorsions idéologiques pour rester ici et ne pas provoquer de vagues. De toute
façon, les excuses sont légion, il suffit de piocher dans les livres de science (sans en
maîtriser les outils pour le faire correctement) des propos hors sujet et/ou choisir les paroles
d’un tel ou d’un tel (dont les avis reposent sur une conception des réalités erronée, voire
falsifiée, acquise de questions déjà orientées afin d’obtenir la réponse souhaitée…) : les
francophones, c’est bien connu sont capable d’avaler des grenouilles et de gober n’importe
quoi d’autre.
De plus, c’est gagnant-gagnant, car le système pervers de domination n’oublie jamais ce
genre de prises de position hautement symboliques : je lui donne la preuve de soumission
absolue et concrète, (la soumission à l’ordre politique par le vote, malgré tout mon blabla)
contre une pseudo-liberté. Une liberté, de toute façon, de ne promouvoir qu’une da’wa
handicapée car amputée de toute une partie de son dogme, et incapable de changer quoi
que ce soit à la situation des musulmans en France, sans parler de celle de la oumma toute
entière.
Chose extraordinaire, tout est preuve, chez ces prédicateurs, d’une soumission
insupportable à l’Ordre Politico-social : insupportable tant elle est éclatante. En témoigne, le
traitement des différentes affaires islamo-médiatiques qui ont secoué dernièrement la France
ou la Belgique, d’une bassesse inouïe et d’une lâcheté sans nom !
Le simple jeune faiblement islamisé et de culture moyenne comprend très rapidement que
toutes leurs interprétations vont absolument dans le sens du conformisme puant et ignoble
imposé par le rapport de force dominé/dominant. Bien entendu, on n’osait même plus leurs
demander d’appliquer le principe d’Al wala wal bara (il faut songer sérieusement d’arrêter de
rêver 2 secondes…).
Mais juste la simple neutralité aussi intelligente que bienveillante, et le bon soupçon à l’égard
des membres de la oumma qu’ils soient agresseurs ou agressés, ou mieux encore et plus
salvateur : le silence… Or chose incroyable qui montre bien la logique de soumission : c’est
que le principe de se taire (justement !) est le plus souvent utilisé lorsque ce sont l’Islam et
les musulmans qui sont pris à parti !!! Et inversement, le prédicateur se sent obligé de
monter sur le minbar lorsque les médias officiels s’emparent d’un fait divers pour stigmatiser
la communauté, et pas en faveur de l’Islam, mais pour en rajouter sa propre couche
nauséabonde avec une véhémence que n’égale que son mutisme face aux afflictions de la
oumma !
Pour ces prédicateurs, il est clair et évident que derrière cette posture, il y a la volonté
surdimensionnée de survivre médiatiquement et le plus longtemps possible. Or pour survivre
dans un environnement foncièrement hostile à l’Islam (surtout quand le prédicateur a une
prétention d’orthodoxie et de puritanisme qui est traditionnellement vue comme suspecte et
comme un danger potentiel pour la « cohésion sociale ») et pour continuer son « job » sans
avoir de soucis qui pourraient entraver le chemin de la renommée, rien de plus facile que de
collaborer d’une manière ou d’une autre (que cela soit par une traîtrise consciente comme le
clown du Crif Chalghoumi avec sa caricature d’islam laïc ou des inepties inconscientes avec
les prédicateurs d’un Islam prétendument orthodoxe). Dés lors, malgré toutes leurs
apparences et discours, au fond et comme toujours : il n’y a aucune indépendance morale et
idéologique réelle face au système ni même volonté d’obtenir cette indépendance…
4.
Résultat et perspective d’évolution :
Le résultat final de la da’wa de ce genre de prédicateur est la construction d’un nouvel idéaltype de musulman totalement sécularisé : le système de domination en place sait
qu’irrémédiablement, les musulmans sont poussés à se ré-islamiser à cause des
contradictions de son propre système, il lui faut donc au moins contrôler cette réislamisation.
Créer un musulman pratiquant l’Islam, même de manière la plus orthodoxe (qualifier de
rigoriste ou intégriste par le système avec qamis/barbe/jilbab mais sans en avoir peur tant il
est sous contrôle et aseptisé) mais sans faire de lui un agent du changement radical, tel est
le but final. Tant que sa pratique reste individualiste et individualisée et que les implications
de sa pratique ne bouleversent pas l’ordre établi en France (certes!) mais aussi et surtout
dans le monde arabo-musulman dans la continuation de la logique impérialiste.
Le consumérisme libéral transforme l’Islam en produit marketing, c’est un marché du sens
qui est offert, chaque prédicateur est le golden boy de sa da’wa-entreprise, possédant des
clients, des parts de marché, et veillant à fidéliser ses consommateurs et à en conquérir de
nouveaux.
Mais comme toutes les plus perfides multinationales (créant « holding et réseaux de
distribution » avec d’autres prédicateurs associés), il ne réussit avec ses méthodes qu’à
abrutir le consommateur pour le faire consommer encore plus et n’importe quoi, il veille à ne
pas élever son degré de conscience islamique, son véritable sens critique, son niveau de
réflexion, à ne pas se poser les véritables questions et à ne pas voir les véritables problèmes
avant même d’oser trouver des solutions.
L’emballage est attrayant, le slogan publicitaire est attirant, mais au fond le goût de la da’wa
de ces prédicateurs est en dessous de ce qu’elle prétend : elle n’a pas pour but de créer le
musulman et la musulmane capable de relever et d’affronter tous les défis qui sont imposés
à l’Islam.
Ce musulman pour le système de domination ne doit être qu’une simple mule qui a le droit
de se souvenir que ses ancêtres étaient des étalons pur-sang et même de le revendiquer en
braillant haut et fort : car comme dit le dicton, les chiens peuvent aboyer tant que la caravane
passe…
5.
Et finalement quelle est la valeur ajoutée de ces prédicateurs ?
Lorsqu’on se penche concrètement sur le niveau de science et les prétentions affichées, les
conclusions sont sans appel : nous sommes en face d’un mirage qui s’étiole (quand ce n’est
pas carrément le vrai sauve-qui-peut devant celui qui ose venir chercher la vérité en face et
en discuter ouvertement)…Et les petites vérités qu’ils exposent sont de vraies banalités avec
ceci en moins : la forme qu’ils utilisent nuit même au fond…Les rappels qu’ils ne sont pas
infaillibles (quel fou pourrait le croire????) ne sont que de slogan creux, pour preuve, aucune
remise en cause de leurs paroles n’est tolérés et tolérables. La mesquinerie est encore pire
quant ils invitent leurs seuls auditoires à corriger leurs fautes ! Car toute intrusion extérieure
au couple médiatique Prédicateur/Publics est orgueilleusement vilipendée quand c’est un
étranger qui tente la correction (toi t’es qui pour me corriger ?), tel une Star du cinéma qui
accepte les remarques inutiles de ses fans (cela fait partie du jeu de séduction) mais rejette
avec mépris les critiques fondées des professionnels…
C’est à se demander en quoi leur prédication virtuelle survivra à l’inévitable dépréciation de
leurs images ? Qu’apportent-ils de plus à la da’wa ? Qu’est ce qu’il y aurait en moins s’ils
n’existaient pas ?
En réalité, c’est à eux de tenter d’y répondre si leurs egos et leurs passions n’ont pas
entièrement obscurci la lumière de la lucidité qui reste en eux.
Il est évident que dans cette inflation à la prédication, d’autres vont arriver, ils ont attisé les
feux de la concurrence. Inévitablement, d’autres plus éloquents, plus savants (ce qui ne sera
pas très difficile ici) et surtout avec une image beaucoup plus attrayante que la leur, vont finir
par se montrer (leur véritable crainte en réalité…) et après ?
Quel sera le résultat pour l’Islam et les musulmans si ces futurs derniers arrivés ne tentent
pas de relever réellement et durablement le niveau de conscience islamique des musulmans
francophones et par ricochet celui de la Oumma ?
A cela, on peut tous déjà y répondre….
6.
Mot de fin :
Je sais que ce texte sera sûrement très mal accueilli et encore plus mal compris par le plus
grand nombre. En y voyant que critiques infondées et injustifiées sur des « prêcheurs à
l’Islam »: ils hypothéqueront leurs capacités à réfléchir sur le problème capital soulevé et les
répercussions de ce type de prédication sur le long terme pour les musulmans d’Occident…
Pourtant, il est indéniable que la description des prédicateurs ci-dessus correspond bien à un
« phénomène-type »; phénomène déjà mis en évidence par les néo-orientalistes de
l’Empire (et se félicitant de cette évolution…). On peut toujours croire et prétendre que les
traits sont forcés, voire caricaturaux : mais il est évident qu’ils reposent sur des faits et
postures aisément identifiables par tous. Et en réalité, les évolutions qui ont été décrites
précédemment, sont profondément ressenties par tous les musulmans(souvent malgré eux,
ce qui est un bon signe), et même par ceux qui sont ici « disséqués » : tout ceci n’est qu’une
simple observation détaillée. Le but étant que cette petite étude permette l’introspection et
l’autocritique de tout les acteurs concernés, et en priorité, nous-mêmes. D’où l’importance
fondamentale, pour tous, de comprendre notre contexte social et politique, et que ceux-ci
possèdent des forces invisibles qui essaient constamment de nous modeler de manière
inconsciente et d’imprimer sa marque sur nos attitudes, croyances et idées. Et s’en rendre
est déjà une victoire contre le système.
Finalement il incombe donc aux prédicateurs (sincères…) de comprendre la nature du cercle
vicieux dans lequel ils risquent d’être enfermés (et cela s’il n’est pas trop tard : seul eux
seront en mesure d’en juger) et de se réformer urgemment puisqu’ils ont choisit de se mettre
sur le devant de la scène. Car il est très rare que l’auditoire-public réforme le prédicateur,
comme il est très rare que le peuple réforme son autorité politique (sans violence), ou que
les enfants éduquent leurs parents, puisque la règle est que la guidée vient toujours d’en
haut et de l’élite : pour le meilleur ou pour le pire…
Aïssam Aît-Yahya – pour Anâ Muslim
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