É D I T O R I A L À propos de qualification About the qualification ● J. Caron* ean-Paul Demarez nous précise, dans ce numéro de La Lettre du Pharmacologue (pages 111 à 115), ce qu’il faut entendre par “personne qualifiée” en pharmacovigilance et, avec le talent qu’on lui connaît, aborde les missions et les responsabilités inhérentes à cette fonction, vues sous l’angle européen et/ou national. J Tout cela est précis, argumenté, mais je vous trouve, si vous me le permettez, cher Jean-Paul, un peu court concernant l’adjectif “qualifié”. En effet, si j’ouvre mon Petit Robert (qui est en fait celui que Bernard Dupuis a oublié dans le service et qu’il avait “emprunté” il y a une vingtaine d’années à sa fille Barbara), je trouve quatre définitions : la première et la dernière s’appliquent respectivement à une action délictueuse et à la mathématique et, à l’évidence, ne nous intéressent pas. La deuxième nous ramène à l’adjectif anglais qualified, apparu en 1840, et à connotation nettement sportive, puisque se disant d’un cheval qui satisfait aux conditions de la course, ou d’un athlète ou d’une équipe auxquels les performances précédentes donnent le droit de disputer d’autres épreuves ; même si le parcours de nombreux pharmacovigilants peut effectivement s’apparenter à une course d’obstacles, je ne pense pas qu’il s’agisse, là encore, de la bonne définition. En conclusion, en son sens le plus habituel en français, l’adjectif “qualifié” s’entend comme “sat i s faisant aux conditions requises”, c’est-à-dire “ayant qualité ou compétence pour…”. Vous restez donc évasif sur le sujet, même si vous nous rappelez que la qualification résulte, selon le décret 2004/99 du * Centre régional de pharmacovigilance, CHU, 59045 Lille Cedex. 110 29 janvier 2004, de l’expérience, que “c’est en forgeant que l’on devient forgeron” et que “c’est au pied du mur que l’on voit le maçon”. Si je ne peux qu’être d’accord avec vous en ce qui concerne le maçon, l’apprentissage du forgeron me semble à développer. Nous venons tous, en effet, d’horizons extrêmement divers, et notre formation est tout aussi variée. S’il est vrai que l’ennui naît de l’uniformité, on peut néanmoins espérer une formation commune qui nous permette d’afficher notre appartenance à la famille des spécialistes du médicament, c’est-à-dire des pharmacologues (pourquoi pas médicaux ?). Il me semble difficile d’imaginer, dans l’avenir, un pharmacovigilant n’ayant pas un solide bagage en pharmacologie clinique, en pharmacoépidémiologie, et même en pharmacologie expérimentale, lui permettant d’intégrer dans son raisonnement toutes les facettes de notre discipline. La réciproque est d’ailleurs vraie, qui fait que le versant efficacité du médicament, traditionnellement exploré par le pharmacologue clinicien, se fond de plus en plus dans une approche globale du “rapport bénéfice/risque”, et qu’une partie de plus en plus importante de la pharmacologie expérimentale est consacrée à la sécurité du médicament. Régis Bordet, au cours d’une récente réunion des enseignants de pharmacologie, a lancé l’idée d’un DESC de pharmacologie médicale qui, au-delà de l’affirmation de notre spécialité, nous permettrait d’organiser cette formation. Il est urgent que, tous ensemble, nous réfléchissions à ce qu’il est encore temps de faire. ■ P.S. Bien entendu, Bernard Dupuis peut toujours venir récupérer son Petit Robert dans le service (en espérant qu’il le rendra à Barbara !). La Lettre du Pharmacologue - Volume 18 - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2004