Articulations temporo-mandibulaires

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Les articulations temporo-mandibulaires
P.Carpentier
La mandibule constitue la pièce maîtresse de l’appareil manducateur qui assure
l’ensemble des fonctions contribuant au boire et au manger. Elle est reliée à la
base du crâne par les articulations temporo-mandibulaires (ATM) qui libèrent des
mouvements complexes orchestrés par les muscles masticateurs.
Les articulations temporo-mandibulaires tout comme l’oreille moyenne sont des
structures qui possèdent une forte valeur taxonomique dans l’embranchement des
vertébrés. Pour appartenir à la classe des mammifères, il faut parmi un ensemble
d’autres caractères plus connus, posséder une oreille moyenne comprenant trois
osselets et des articulations temporo-mandibulaires de type squamoso-dentaire.
L’os dentaire, celui qui porte les dents, compose à lui seul la mandibule des
mammifères qui articule avec la partie squameuse de l’os temporal.
Par opposition, l’articulation primitive des mâchoires reptiliennes, de type
quadrato-articulaire, met en relation l’os carré qui appartient au crâne et l’os
articulaire qui compose avec d’autres pièces osseuses, dont l’os dentaire, la
mandibule des reptiles. Dans cette classe,l’oreille moyenne ne comporte qu’un seul
osselet, le stapès.
Ces caractères spécifiques n’étant pas apparus simultanément, un reptile prémammalien, appelé pour cette raison diarthrognathus, dispose des deux
articulations : la reptilienne et la mammalienne côte à côte. Ces données issues de
l’anatomie comparée soulignent le lien étroit entre les ATM et l’oreille moyenne.
L’ontogénèse de ces articulations temporo-mandibulaires est particulière car à la
différence des articulations synoviales de l’organisme qui naissent classiquement
de la division d’un blastème unique, chaque ATM naît de la réunion de deux
blastèmes, l’un temporal, l’autre mandibulaire. Chaque blastème fournit les
composants osseux spécifiques à chaque compartiment articulaire: la tête de la
mandibule pour le compartiment inférieur, et la partie squameuse horizontale de
l’os temporal composée par la fosse mandibulaire et l’éminence articulaire, pour le
compartiment supérieur.
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Fig. 1.Coupe coronale IRM passant par les articulations temporo-mandibulaires.
1 : Eminence articulaire de l’os temporal -2 : Disque articulaire – 3 : Tête de la mandibule – 4 :
Fossette ptérygoïdienne – 5 : Muscle ptérygoïdien latéral – 6 : Branche mandibulaire – 7 : Muscle
ptérygoïdien médial – 8 : Muscle masséter 9 :Oro-pharynx – 10 : Base de la langue
Les composants osseux .
La tête de la mandibule encore appelée condyle mandibulaire présente une forme
oblongue à grand axe transversal orienté obliquement en arrière et médialement.
Elle est reliée au bord postérieur de la branche mandibulaire par l’intermédiaire
d’une zone effilée, le col du condyle. Cette configuration évite l’impaction de la
tête de la mandibule dans la fosse crânienne moyenne en cas de traumatisme, la
fracture du col servant en quelque sorte de fusible.
La tête de la mandibule n’est pas centrée par rapport au col, mais présente un
port- à- faux médial surplombant la fossette ptérygoïdienne qui donne insertion au
muscle ptérygoïdien latéral. Les pôles condyliens, latéral et médial, situés à
chaque extrémité du condyle donnent insertion au disque articulaire. Sur une
radiographie du crâne réalisée avec une incidence orthogonale, les axes condyliens
droit et gauche, passant par les pôles, forment un angle d’environ 130 degrés dont
le sommet se projette sur le 1/3 antérieur du foramen magnum.
De forme arrondie chez l’enfant, la tête de la mandibule se modèle au cours de la
croissance sous l’effet de la fonction et différencie classiquement un versant
antérieur, fonctionnel, composé de deux facettes et un versant postérieur, non
fonctionnel, séparés par une crête mousse située au sommet du condyle.
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Fig.2. Vue antéro-médiale de la tête de la mandibule
1 : Pole latéral – 2 : Vertex condylien – 3 Pôle médial –
4 : Fossette ptérygoïdienne – 5 : Col du condyle
La surface articulaire temporale
Elle présente deux parties bien distinctes. La fosse mandibulaire située
immédiatement en avant du méat acoustique externe à la forme d’une cuvette
ovalaire destinée à recevoir le bourrelet postérieur du disque articulaire lorsque
les arcades dentaires sont en occlusion. Cette fosse est bordée postérieurement
par l’os tympanal qui forme la paroi antérieure du méat acoustique externe. La
fissure tympano-squameuse oblique en avant et médialement constitue la limite
postérieure du compartiment articulaire supérieur.
L’éminence articulaire située en avant de la fosse mandibulaire à la forme d’une
selle orientée transversalement selon un axe oblique en arrière et en dedans,
parallèle à celui du condyle mandibulaire. Elle est convexe dans le sens sagittal et
présente, à son extrémité latérale, le tubercule articulaire antérieur. Son sommet
articule avec la tête de la mandibule par l’intermédiaire du disque articulaire
lorsque la bouche est grande ouverte.
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Fig. 3. Vue inférieure de la surface articulaire temporale
1 : Tubercule articulaire du temporal – 2 : Eminence temporale – 3 : Fosse mandibulaire – 4 : Os
tympanal – 5 :Méat acoustique externe – Tubercule articulaire postérieur – 7 : Fissure tympanosquameuse
Le fibrocartilage
Les surfaces articulaires sont recouvertes d’un fibrocartilage, non vascularisé et
non innervé, qui comprend différentes couches cellulaires. De la cavité articulaire
à l’os sous-chondral, on identifie : une couche fibreuse, le périchondre, une couche
proliférative pré-chondroblastique, une couche fibrocartilagineuse composée de
chondrocytes en maturation à sa partie haute et de chondrocytes hypertrophiques
à sa partie basse, une couche de cartilage minéralisé au contact de l’os souschondral.
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L’origine membraneuse de la mandibule et de l’os temporal explique la présence
d’un fibro-cartilage et non d’un cartilage hyalin comme dans la plupart des
articulations synoviales. Le fibro-cartilage de l’ATM est à la fois un cartilage
articulaire et un cartilage de croissance ce qui le différencie radicalement du
cartilage articulaire des os longs qui est distinct et distant de la plaque de
croissance.
Fig.4 Coupe sagittale du fibro-cartilage de l’ATM
1 :Périchondre – 2 : Couche proliférative – 3 : Chondrocytes – 4 : Chondrocytes
hypertrophiques -5 : Matrice cartilagineuse minéralisée
L’appareil musculo-disco-condylien
La complexité des articulations temporo-mandibulaires explique les différentes
formes de description rencontrées dans les ouvrages d’anatomie notamment à
propos de la capsule articulaire, du disque et des insertions musculaires.
Le disque articulaire
Au sens strict, le disque se limite à sa partie dense dont la position est
objectivable en imagerie par résonance magnétique du fait de son hyposignal
(Fig.15).
De forme biconcave, il présente deux épaississements transversaux, les
bourrelets antérieur et postérieur qui circonscrivent une zone intermédiaire moins
épaisse, interposée entre la tête de la mandibule et l’éminence articulaire du
temporal au cours de la fonction (Fig .4). Chez l’adulte, le disque est ni
vascularisé, ni innervé ce qui est compatible avec les contraintes qu’il supporte et
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qu’il distribue au cours de la mastication grâce à sa viscoélasticité. Il est toujours
plus épais dans sa partie médiale que latérale.
Fig 5. Vue supérieure du disque articulaire et de la zone bilaminaire
1 : Bourrelet antérieur – 2 : Zone intermédiaire -3 : Bourrelet postérieur – 4 : Zone bilaminaire – 5 :
Attache latérale du disque jonction des deux bourrelets
Contrairement à l’image habituelle que procure la coupe sagittale de l’articulation
(Fig.6), le disque n’est pas une structure neutre interposée entre deux pièces
osseuses, mais entretient un rapport privilégié avec la mandibule comme en
témoigne la coupe frontale (Fig7).
Fig. 6. Coupe sagittale d’une ATM droite en position bouche fermée
1 : Méat acoustique externe – 2 : Os tympanal – 3 : Fissure tympano-squameuse- 4 : Fibres
supérieures de la zone bilaminaire – 5 : Fibres inférieures de la zone bilaminaire – 6 : Plexus veineux
rétro-discal – 7 : Fosse mandibulaire – 8 : Bourrelet postérieur – 9 : Zone intérmédiaire – 10 :
Bourrelet antérieur – 11 : Eminence temporale – 12 : Lame tendineuse pré-discale – 13 : Fibres
discales du chef supérieur du muscle ptérygoïdien latéral – 14 : : Fibres osseuse du chef supérieur du
muscle ptérygoïdien latéral – 15 : Chef inférieur du potérygoïdien latéral – 16 : Col du condyle
mandibulaire – 17 : Glande parotide
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Fig. 7. Coupe frontale oblique passant par les pôles condyliens
1 :Parotide -2 :Ligament disco-condylien latéral - 3 :Muscle temporal – 4 :Bourrelet postérieur du
disque - 5 : ligament disco-condylien médial - 6 :Insertion du ptérygoïdien latéral –
7 :Nerf auriculo-temporal - 8 : Artère maxillaire 9 : Veine maxillaire – 10 : Col du condyle
En effet, les bourrelets antérieur et postérieur se rejoignent latéralement et
médialement pour constituer les attaches du disque sur les pôles condyliens d’ou la
notion de complexe disco-condylien.
Ainsi le disque accompagne obligatoirement les déplacements de la mandibule au
cours de la fonction tout en ayant la possibilité de se mouvoir par rapport à elle
dans la limite autorisée par le jeu des ligaments disco-condyliens. Classiquement, il
effectue un mouvement de rotation autour d’un axe passant par les pôles, mais en
réalité le disque se déforme et ce mouvement n’est pas essentiellement rotatoire.
Aux plans anatomique et biomécanique, les ligaments disco-condyliens latéral et
médial ne sont pas identiques. Le ligament latéral discal est essentiellement
fibreux, tandis que son homologue médial est renforcé par l’insertion du muscle
ptérygoïdien latéral (PL). Un tiers des fibres du chef supérieur du PL pénètre la
partie médiale du bourrelet antérieur et vient circonscrire l’attache médiale du
disque sur le pôle. Cette organisation crée une asymétrie anatomique et
fonctionnelle du complexe disco-condylien qui présente une liaison musculotendineuse médiale résistante opposée une attache latérale fibreuse fragile,
faisant du pôle médial le pôle moteur du complexe disco-condylien.
Capsules et compartiments articulaires
La capsule articulaire est sans aucun doute la structure anatomique qui donne lieu
à des descriptions les plus diverses et variées. A l’ évidence, elle ne se présente
pas comme un simple manchon tronconique fibreux inséré à la périphérie des
surfaces articulaires temporale et mandibulaire exceptée sans sa partie latérale.
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Nous avons fait le choix de décrire deux capsules, une par compartiment
articulaire, ce qui est d’ailleurs en accord avec les deux blastèmes d’origine
caractérisant l’ontogenèse de l’articulation.
A la périphérie de la zone dense du disque naissent des fibres qui vont délimiter
les compartiments articulaires et former une capsule pour chacun d’eux. Du fait de
la forme en dos d’âne du complexe disco-condylien dans le plan frontal, le
compartiment articulaire supérieur, recouvre latéralement et médialement le
compartiment articulaire inférieur.
Le compartiment articulaire supérieur,disco-temporal.
Les fibres capsulaires qui émanent du bord supérieur des bourrelets discaux vont
s’attacher à la périphérie de la surface articulaire temporale. On peut diviser
cette capsule supérieure en quatre quadrants selon la densité des fibres qui la
composent et les structures anatomiques en rapport.
Fig. 8 .Vue inférieure de la fosse mandibulaire figurant le disque au centre et à sa périphérie la
capsule articulaire supérieure divisée en quatre quadrants.
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Fig. 9 Coupe axiale passant par le bourrelet antérieur (A comparer à l’image précédente)
1 :Plexus veineux antéro-latéral – 2 : Muscle masséter profond – 3 : Muscle temporal – 4 : Muscle
ptérygoïdien latéral – 5 : Zone bilaminaire – 6 : Os tympanal – 7 : Cartilage du méat acoustique
externe – 8 : Capsule articulaire latérale – 9 : Condyle mandibulaire – 10 : Bourrelet antérieur du
disque
Dans le quadrant 1, la capsule est accolée au plexus veineux antéro-latéral et aux
fibres musculaires issues du masséter profond et du temporal.
Dans le quadrant 2, la capsule est très épaisse et se présente comme une lame
tendineuse pré-discale qui recouvre et adhère aux fibres supérieures du muscle
ptérygoïdien latéral.
Le quadrant 3 est constitué par les fibres supérieures de la zone bilaminaire. Ces
fibres lâches forment des replis qui se déploient et s’étirent lorsque le disque se
déplace vers l’avant. Elles enserrent le plexus veineux rétro-discal qui se remplit
de sang à l’ouverture buccale et se vide lors de la fermeture. Ces fibres discotemporales s’insèrent en arrière sur les berges de la fissure tympano-squameuse.
Certaines rejoignent le malleus constituant le ligament disco-malléaire ou ligament
de Pinto qui témoigne des rapports étroits entre l’oreille moyenne et l’ATM lors de
l’organogénèse. Ce ligament n’a pas de rôle fonctionnel, car il ne coulisse pas dans
la fissure mais est attaché à ses berges (Fig. 10).
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Fig. 10 Coupe sagittale passant par le pôle médial du condyle mandibulaire
1 : Incus – 2 : Malleus -3 : Ligament disco-malléaire – 4 : Portion osseuse du méat acoustique externe
– 5 : Os tympanal – 6 : Plexus veineux rétro-discal – 7 : Fibres disco-temporales de la zone
bilaminaire- 8 : Fibres disco-condyliennes de la zone bilaminaire – 9 : Bourrelet postérieur – 10 :
condyle mandibulaire
Le quadrant 4 est également constitué de fibres bilaminaires supérieures issues
de la moitié latérale du bourrelet postérieur. Ces fibres s’attachent en arrière sur
la partie cartilagineuse du méat acoustique externe, perdent progressivement
leurs replis et se dirigent en haut et en avant pour s’insérer sur le bord inférieur
de l’arcade zygomatique. Elles forment la partie latérale de la capsule articulaire
supérieure qui est renforcée par des ligaments intrinsèques. Une bandelette
fibreuse oblique en bas et en arrière croisant sous le pôle latéral s’étend jusqu’au
col du condyle et l’empaume. Un autre ligament plus profond et moins oblique,
dénommé corde circonscrit l’attache latérale du disque sur le pôle, mais sa
présence est plus une exception qu’une règle (Fig.11).
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Fig. 11 - 1 : Bandelette – 2 : Capsule articulaire postéro-inférieure constituée par les fibres discomandibulaires – 3 : Capsule articulaire postéro-supérieure constituée par les fibres disco-temporales
- 4 : Plexus veineux - 5 : Bourrelet postérieur – 6 : Corde – 7 : Capsule articulaire antéro-supérieure.8 : Bourrelet antérieur – 9 : Capsule articulaire antéro-inférieure
Fig 12 . Partie latérale d’une ATM droite après section sagittale médiane.
1 : Eminence articulaire de l’os temporal – 2 : Compartiment articulaire supérieur – 3 : Disque
articulaire – 4 Compartiment articulaire inférieur – 5 : Tête de la mandibule
Le compartiment articulaire inférieur ou disco-condylien.
Compris entre la face inférieure du disque et la tête de la mandibule, il est limité
latéralement et médialement par les attaches du disque sur les pôles condyliens.
Son volume est de ce fait moins important que son homologue supérieur.
Postérieurement, les fibres disco-condyliennes issues du bord inférieur du
bourrelet postérieur convergent en direction du col du condyle sur lequel elles
s’insèrent. Ces fibres épaisses et verticales longent le versant postérieur du
condyle sans réaliser de replis. Elles confèrent à la face postérieure de la capsule
inférieure une forme triangulaire à sommet inférieur.
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Fig. 13. Vue postéro-médiale du compartiment articulaire inférieur après section de la capsule
articulaire inférieure au niveau de ses attaches condyliennes (flèches)
1 : Bourrelet postérieur – 2 : Pôle latéral – 3 : Versant postérieur de la tête de la mandibule - 4 : Col
du condyle – 5 : Pôle médial – 6 : Muscle ptérygoïdien latéral
En avant, les fibres issues du bord inférieur du bourrelet antérieur délimitent le
compartiment inférieur. Elles se replient vers l’arrière et s’insèrent sur la limite
séparant le versant antérieur du condyle de la fossette ptérygoïdienne. Elles
forment un récessus qui se comble lorsque la tête de la mandibule réalise sa
rotation sous le disque lors de l’ouverture buccale.
A la limite des surfaces articulaires, où s’insèrent les capsules, les récessus
constituent des culs de sac dont la paroi interne est tapissée par le tissus synovial
qui produit un ultra-filtrat plasmatique, le liquide synovial. Son rôle est essentiel
au bon fonctionnement de l’articulation car il assure la lubrification et la nutrition
des tissus non vascularisés (disque, fibro-cartilage), et possède une action
bactéricide.
Le muscle ptérygoïdien latéral
Le muscle ptérygoïdien latéral est le seul véritable muscle articulaire et pour
certains auteurs, le disque ne serait qu’un tendon différencié du muscle
ptérygoïdien latéral interposé entre deux surfaces articulaires.
Le muscle est classiquement composé de deux chefs supérieur et inférieur, mais
cette organisation est discutée aujourd’hui car ces deux chefs fusionnent en avant
de l’ATM et ne sont pas distincts dans leur partie médiale. Néanmoins au plan
didactique la reconnaissance de deux chefs reste habituelle. Ainsi le chef
inférieur ou ptérygoïdien qui est propulseur de la mandibule s’insère exclusivement
dans les 2 /3 inférieurs de la fossette ptérygoïdienne et n’a aucune insertion sur
l’ATM.
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Fig.14 Coupe sagittale d’une ATM droite
Muscle ptérygoïdien latéral - 1 : Faisceau discal du chef supérieur – 2 : Faisceau osseux du chef
supérieur – 3 : Chef inférieur
Le chef supérieur ou sphénoïdal est quant à lui composé majoritairement de fibres
musculaires s’insérant dans le tiers supérieur de la fossette ptérygoïdienne.
Les fibres discales représentent en moyenne 30% (10% - 60%) des fibres du chef
supérieur. Elles établissent des connections tendineuses directes en pénétrant la
partie médiale du bourrelet antérieur dans l’espace situé entre l’insertion des
capsules supérieure et inférieure. Certaines fibres s’insèrent également dans la
partie médiale du disque.
Dans la partie jouxtant l’articulation, les fibres
supérieures du muscle
ptérygoïdien latéral s’insèrent également à la face inférieure de lame tendineuse
pré-discale par l’intermédiaire de fibres denses.
Aux plans anatomique et physiologique, le muscle ptérygoïdien latéral se révèle
être d’une grande complexité. De forme grossièrement conique à sommet
articulaire, il est capable de recruter sélectivement certains groupes de fibres
selon le mouvement mandibulaire à effectuer. Ainsi toute la partie médiale du
muscle est active lors des mouvements d’ouverture, de propulsion et d’abduction
contro-latérale. Le chef inférieur mobilise la mandibule grâce aux fibres insérées
dans la fossette ptérygoïdienne, tandis que seule la partie médiale du chef
supérieur est active dans ces mouvements et contrôle le pôle médial de
l’articulation.
D’un point de vue fonctionnel, le chef supérieur peut être divisé en trois parties
dans le sens transversal. La partie médiale fonctionne comme nous venons de
l’évoquer en synergie avec le chef inférieur alors que la partie latérale ne
démontre pas d’activité lors de ces mouvements. Elle est active à l’inverse lors des
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mouvements de fermeture, de rétropulsion et de diduction ipsi-latérale. La partie
moyenne du chef supérieur présente une activité intermédiaire.
L’ activité du chef supérieur lors du mouvement de fermeture est d’autant plus
complexe que certaines de ses fibres s’insèrent dans la fossette ptérygoïdienne
et d’autres sur le disque. Les premières freinent le retour de la tête de la
mandibule dans la fosse mandibulaire, elles sont antagonistes des muscles rétropulseurs comme le temporal et le digastrique. Ce couple agoniste / antagoniste
permet un contrôle précis de la position de la tête de la mandibule dans la fosse
mandibulaire lors de la mastication.
Quant aux fibres qui s’insèrent dans le bourrelet antérieur, elles contribuent à
ramener le disque vers l’avant alors que le condyle recule et à verrouiller
progressivement sa position sur la tête de la mandibule au cours de la fermeture.
L’organisation du muscle ptérygoïdien latéral en deux chefs bien dissociés
latéralement et en un chef commun médialement s’accorde avec les données
actuelles de l’électromyographie puisque toute la partie médiale du muscle est
active à l’ouverture, et que seule la partie latérale du chef supérieur est active à
la fermeture .
Innervation
L’innervation de l’articulation temporo-mandibulaire est assurée aux 4/5 par le
nerf auriculo-temporal, seule la partie antérieure est contrôlée par le nerf
temporo-massétérin. La périphérie du disque est riche en terminaisons nerveuses
composées majoritairement de fibres amyéliniques de Type IV et de récepteurs
encapsulés (Ruffini, Pacini, Golgi) qui sont sollicités lorsque les pièces articulaires
atteignent des positions limites. Ainsi la zone bilaminaire qui est la plus innervée
peut toujours être considérée comme « un frein discal postérieur » mais au sens
neurophysiologique et non mécanique du terme. Lorsqu’elle est étirée en ouverture
maximale, ses capteurs informent le système nerveux central que la limite du
déplacement articulaire est atteinte. Par contre au cours de la mastication ce sont
principalement les fuseaux neuro-musculaires et les organes tendineux de Golgi
des muscles masticateurs qui renseignent le SNC sur la position de la mandibule
dans l’espace. Signalons que le nerf auriculo-temporal contribue également à
l’innervation de l’oreille externe, ce qui explique la fréquence des otalgies
associées à un dysfonctionnement de l’ATM.
Vascularisation
Elle est assurée par plusieurs branches issues de l’artère maxillaire et de l’artère
temporale superficielle et prédomine sur la face médiale de l’ATM. Les plexus
veineux rétro-condylien et pré-condylien jouent alternativement le rôle
d’amortisseur hydraulique lors des mouvements mandibulaires d’ouverture et de
fermeture ce qui favorise la production de liquide synovial par extravasation
plasmatique.
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Rapports avec les muscles masticateurs
Le masséter et le temporal entretiennent des rapports étroits avec l’ATM. Pour
certains auteurs, ces muscles s’insèrent sur la partie latérale de la capsule voire
sur le disque, mais leur action éventuelle sur la cinématique articulaire reste un
sujet de discussion et ne peut être assimilée à celle du ptérygoïdien latéral.
Les ligaments
Il est classique de reconnaître des ligaments intrinsèques et extrinsèques.
Les premiers viennent renforcer les parties médiale et latérale de la capsule
articulaire supérieure.
Les ligaments extrinsèques sont situés à distance de l’articulation.
Le ligament sphéno-mandibulaire est tendu de l’épine du sphénoïde à la mandibule
où il s’insère sur la lingula et la berge qui borde le foramen mandibulaire jusqu’à
l’antilingula. Le ligament stylo-mandibulaire naît du processus styloïde et s’insère
sur le bord postérieur de la branche mandibulaire. Le ligament ptérygomandibulaire s’insère sur l’hamulus ptérygoïdien et rejoint la crête buccinatrice qui
borde latéralement le triangle rétro-molaire.
Rapports
Latéralement l’articulation temporo-mandibulaire est recouverte de dehors en
dedans par la peau, le panicule adipeux et le prolongement massetérin de la
glande parotide qui recouvre plus ou moins la capsule articulaire. L’artère
transverse de la face, branche de l’artère temporale superficielle, croise
latéralement le col du condyle, ainsi que le rameau temporo-frontal du nerf facial
qui rejoint secondairement la région temporale en contournant l’arcade
zygomatique en avant de l’ATM.
Médialement, l’artère et la veine maxillaires ainsi que le nerf auriculo-temporal
cheminent dans le défilé stylo-mandibulaire bordé par le col du condyle
latéralement et les ligaments stylo-mandibulaire et sphéno-mandibulaire
médialement (Fig.7).
En avant, l’ATM est en rapport avec le muscle ptérygoïdien latéral, médialement,
les muscles temporal et masséter profond, latéralement.
Postérieurement le condyle mandibulaire répond médialement à l’os tympanal et
latéralement au cartilage du méat acoustique externe. Le pôle supérieur de la
glande parotide s’insinue entre ce dernier et le col du condyle, des nœuds
lymphatiques prétragiens superficiels et profonds appartenant au lymphocentre
parotidien sont palpables à ce niveau.
Imagerie
Les articulations temporo-mandibulaires bénéficient de l’imagerie sectionnelle
tomodensitométrique (Scanner) et par résonance magnétique (IRM) qui
permettent d’observer les structures dans les trois plans de l’espace en positions
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bouche ouverte et bouche fermée. L’IRM permet de visualiser les tissus mous et
en particulier d’évaluer la position du disque articulaire.
Fig. 15. Coupe sagittale d’une ATM droite en position bouche ouverte
1 : Eminence articulaire- 2 : Disque – 3 : Tête de la mandibule
Anatomie fonctionnelle
Les articulations temporo-mandibulaires sont particulièrement sollicitées au cours
de la manducation mais également lors de la phonation. Bien qu’elles fonctionnent
simultanément, les mouvements qu’elles exécutent au cours de la mastication sont
relativement complexes et diffèrent d’un côté à l’autre. On distingue
classiquement les mouvements volontaires exécutés à vide lors de l’examen
clinique (ouverture, fermeture, propulsion et latéralités), des mouvements
fonctionnels plus ou moins automatisés réalisés en mastication. Lors de l’ouverture
buccale, chaque ATM libère un mouvement de rotation dans le compartiment
inférieur associé à un mouvement de translation dans le compartiment supérieur.
On estime qu’en moyenne le condyle tourne autour de l’axe instantané de rotation
de 2° pour une translation de 1 millimètre le long de l’éminence articulaire. Soit
pour une ouverture moyenne : 24° de rotation pour 15 millimètres de translation.
Chaque individu ouvre avec un pourcentage variable de rotation / translation, cette
proportion étant influencée par l’inclinaison plus ou moins prononcée de l’éminence
articulaire du temporal.
A vide, la trajectoire d’ouverture décrite par la mandibule s’effectue dans le plan
sagittal médian. Lorsque les arcades sont en occlusion, la surface de contact entre
le versant antérieur du condyle, le disque et l’éminence temporale est maximale
assurant ainsi une distribution optimale des contraintes. Lors de l’ouverture, le
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sommet condylien quitte le bourrelet postérieur et vient se placer sous la zone
intermédiaire du disque. Cette dernière étant moins épaisse que le bourrelet
postérieur, les ligaments disco-condyliens se détendent libérant un léger jeu
entre le condyle et le disque. La surface de contact entre les deux pièces osseuses
convexes et le disque interposé étant alors réduite au minimum, une grande liberté
de mouvements contrôlés par les muscles masticateurs peut alors s’exprimer
autour des deux pivots articulaires ( Fig. 15).
A l’ouverture, on observe un léger déplacement latéro-médial du disque par
rapport au condyle résultant de l’action du muscle ptérygoïdien latéral sur le pôle
médial. En ouverture maximale, la tête de la mandibule se place légèrement en
avant de l’éminence articulaire du temporal et les pôles latéraux soulèvent la peau
ce qui les rend aisément identifiables à la palpation.
La zone bilaminaire supérieure se déploie, comme aspirée par le déplacement du
complexe disco-condylien et se remplie de sang, tandis que les fibres discocondyliennes sont relâchées.
Le mouvement de fermeture nécessite l’action conjuguée des muscles élévateurs
et rétropulseurs de la mandibule, l’action de ces derniers étant contrebalancée
par celle du muscle ptérygoïdien latéral qui contrôle le recul du condyle et replace
progressivement la tête de la mandibule sous le bourrelet postérieur. La zone
bilaminaire supérieure est alors comprimée, jouant le rôle d’amortisseur
hydraulique et de pompe à liquide synovial, alors que les fibres inférieures sont
tendues et plaquées sur le versant postérieur du condyle.
En mastication, la mandibule effectue des mouvements de diduction (latéralité) qui
se combinent aux mouvements d’ouverture et de fermeture. L’ouverture est
d’abord symétrique, puis la mandibule se latéralise progressivement en se
dirigeant du côté où le bol alimentaire est interposé. Dès lors, ce côté devient
travaillant (masticant) et le côté opposé non travaillant (non masticant). Dans ce
mouvement, le condyle non travaillant se déplace en bas, en avant et en dedans,
tandis que simultanément le condyle non travaillant se déplace en avant, en haut ou
en bas et légèrement en dehors. Au cours des déplacements disco-condyliens, les
zone de contraintes articulaires se déplacent médio-latéralement, une torsion des
branches mandibulaires sous l’action différentielle des muscles masticateurs
pouvant en être la cause.
Il est curieux de constater que le condyle non travaillant est celui qui travaille le
plus en termes de contrainte et de déplacement. Il est ainsi préférable de
mastiquer du côté douloureux lorsque la source de la douleur est articulaire.
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