R E V U E D E P R E S S E Revue de presse ● Y. Ansquer*, O. Dupuis**, V. Gilly*, C. Poncelet* • La corticothérapie anténatale diminue-t-elle le risque anténatal de leucomalacie périventriculaire ? O. Dupuis Canterino JC et al. Antenatal steroids and neonatal periventricular leukomalacia. Obstet Gynecol 2001 ; 97 : 135-9. Résumé Le but de cette étude est d’évaluer l’effet de la corticothérapie anténatale sur le risque de leucomalacie périventriculaire (LMPV). Les auteurs ont réalisé une étude rétrospective de 1 161 nouveau-nés qui ont été répartis en deux groupes selon qu’ils avaient ou non reçu une corticothérapie anténatale. Tous les enfants nés entre 24 et 34 SA et d’un poids compris entre 500 et 1 750 g ont été inclus. Les échographies transfontanellaires (ETF) étaient réalisées au 3e et au 7e jour de vie. Les ETF étaient considérées comme anormales s’il y avait une des trois anomalies suivantes : leucomalacie périventriculaire, hémorragie intraventriculaire ou l’association de ces deux anomalies. Cette étude montre que les enfants qui ont eu une corticothérapie anténatale ont une réduction de 56 % du risque de LMPV associée à une hémorragie intraventriculaire et de 58 % du risque de LMPV isolée. Les intervalles de confiance associés à ces diminutions de risques sont, respectivement, de 0,25-0,77 et 0,20-0,88. Selon cette étude, l’utilisation d’une corticothérapie anténatale avant 34 SA diminue de plus de 50 % le risque de leucomalacie périventriculaire. Commentaire Compte tenu des bénéfices attendus en cas de corticothérapie anténatale, les études randomisées contre placebo ne sont plus éthiquement acceptables. Les séries rétrospectives gardent donc toute leur valeur. * Hôpital Bichat, service du Pr Madelenat, 46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris. ** Fédération femme, mère, nouveau-né des Prs Dargent, Mellier et Thoulon, hôpital Edouard-Herriot, 5, place d’Arsonval, 69437 Lyon Cedex 03. 4 Cette étude rétrospective confirme les données obtenues en France et publiées en 1999 dans le New England Journal of Medicine par O. Baud (1) (tableau I). Dans cette série, le risque de leucomalacie périventriculaire cavitaire passait de 8,4 % dans le groupe sans corticothérapie à 4,4 % dans le groupe qui avait reçu de la bétaméthasone. Dans la série américaine, on observe également une diminution de plus de 50 % du risque de leucomalacie périventriculaire isolée ou associée à une hémorragie intraventriculaire. Tableau I. Comparaison des séries étudiant l’impact de la corticothérapie anténatale sur le risque de leucomalacie. Année Pays N Terme de naissance Molécule Stratification des résultats par nombre de cures Durée du suivi des nouveau-nés Baud O et al. (1) 1999 France 883 24-31 SA Bétaméthasone (n = 361) 12 mg x 2 i.m. Dexaméthasone (n = 165) 6 mg x 4 i.m. Pas de traitement (n = 357) Canterino JC 2001 États-Unis 1 161 24-34 SA Bétaméthasone (n = 400) 12 mg x 2 i.m. Pas de traitement (n = 761) Oui Non Durée de l’hospitalisation Durée de l’hospitalisation Le bénéfice d’une corticothérapie est donc confirmé. Il apparaît aujourd’hui dangereux de faire l’amalgame entre les différents types de corticothérapie tant en ce qui concerne la molécule (bétaméthasone et dexaméthasone) qu’en ce qui concerne le nombre de cures (de une à plus de trois) (tableau II). Pour ce qui est du type de molécule, il a été démontré que, contrairement à la bétaméthasone, la dexaméthasone a un impact nul ou délétère sur le système nerveux (1). Cela pourrait être lié soit aux sulfites (qui sont neurotoxiques in vitro) contenus dans les préparations de dexaméthasone, soit à la petite différence de structure qui existe entre les deux molécules. C’est pour cette raison que la plupart des équipes ont aujourd’hui abandonné la prescription de dexaméthasone. Le délai entre la dernière cure et l’extraction n’est pas précisé dans l’étude commentée ; en revanche, dans l’étude de Baud, La Lettre du Gynécologue - n° 261 - avril 2001 Tableau II. Comparaison des effets de la bétaméthasone et de la dexaméthasone. Nom commercial Diminution du risque de MMH Diminution du risque de LMPV Diminution de la mortalité néonatale Nombre d’injections Effet sur la variabilité du RCF Bétaméthasone Célestène® Oui Oui Oui 2 +++ Dexaméthasone Soludécadron® Oui Non Non 4 +* MMH : maladie des membranes hyalines ; LMPV : leucomalacie périventriculaire ; RCF : rythme cardiaque fœtal. * Une étude récente réalisée sur les fœtus de brebis a montré qu’en cas d’injection de dexaméthasone, la variabilité du RCF diminuait seulement pendant les 12 premières heures suivant l’injection ; cette même étude a montré que la PAO2 fœtale diminuait significativement pendant les 24 heures suivant l’injection (4) ! la corticothérapie semble aussi efficace, que le délai entre l’extraction et la dernière prise soit < 48 h, compris entre 48 h et 7 jours ou de plus de 7 jours (1). Notons que, pour ce qui est de l’effet des corticoïdes sur le poumon, celui-ci est, au moins chez l’agneau, évident dès 15 heures après l’injection (2). Concernant le nombre de cures, de nombreuses incertitudes demeurent. Dans la série américaine, les résultats ne sont pas stratifiés par nombre de cures. Dans la série française, les résultats ont été stratifiés et montrent que le bénéfice de la bétaméthasone existe pour les patientes qui ont reçu une seule cure ; en revanche, pour les patientes qui ont reçu deux ou trois cures, le pourcentage de LMPV est le même dans les groupes béta- et dexaméthasone. Malheureusement, dans cette série, les résultats sont donnés mais n’ont pas été discutés (1). On doit enfin connaître les résultats de l’étude de French (3), obstétricien australien, qui a démontré en 1999, sur une série de 652 prématurés, l’impact délétère de la répétition des cures de corticoïdes. Dans cette série, les nouveaux-nés qui ont reçu trois cures ou plus ont un poids de naissance diminué en moyenne de 9 % (122 g) et une circonférence crânienne diminuée en moyenne de 1 cm. On observe également une tendance à des lésions pulmonaires séquellaires plus sévères ; en revanche, l’examen de ces enfants à l’âge de trois ans ne met pas en évidence d’anomalies neurologiques. Dans cette série, les nouveaunés qui ont reçu plusieurs cures n’ont aucun bénéfice supplémentaire par rapport aux enfants qui ont reçu une seule cure (3). En conclusion, on retiendra que la corticothérapie anténatale par bétaméthasone (Célestène ®) non seulement apporte un bénéfice dans la prévention de la maladie des membranes hyalines (MMH) mais permet également de diminuer de moitié le risque de LMPV. Le bénéfice semble être maximal dès la première cure. En attendant les séries comparant l’administration d’une ou de plusieurs cures de corticoïdes, et tant que l’innocuité de la répétition des cures n’est pas démontrée, il n’est pas licite de prescrire systématiquement plusieurs cures. R ÉFÉRENCES B IBLIOGRAPHIQUES 1. Baud O et al. Antenatal glucocorticoid treatment and cystic periventricular leukomalacia in very premature infants. N Engl J Med 1999 ; 341 : 1190-6. La Lettre du Gynécologue - n° 261 - avril 2001 2. Ikegami M et al. Minimum interval from betamethasone treatment to postnatal lung responses in preterm lambs. Am J Obstet Gynecol 1996 ; 174 : 1408-13. 3. French NP et al. Repeated antenatal corticosteroids : size at birth and subsequent development. Am J Obstet Gynecol 1999 ; 180 : 114-21. 4. Bennet L et al. Temporal changes in fetal cardiovascular, behavioural, metabolic and endocrine responses to maternally administered dexamethasone in the late gestation fetal sheep. Br J Obstet Gynecol 1999 ; 106 : 331-9. • Intérêt de l’oxymétrie de pouls fœtal en cas d’anomalie du rythme cardiaque fœtal pendant le travail. Étude multicentrique contrôlée randomisée nord-américaine O. Dupuis Garite TJ et al. A multicenter controlled trial of fetal pulse oxymetry in the intrapartum management of non reassuring fetal heart rate patterns. Am J Obstet Gynecol 2001 ; 183 : 1049-58. Résumé L’objectif de cette étude est de répondre à la question suivante : l’utilisation de l’oxymètre de pouls fœtal permet-elle de diminuer le nombre de césariennes réalisées pour suspicion de souffrance fœtale ? Il s’agit d’une étude contrôlée randomisée réalisée dans neuf maternités. Mille dix patientes en travail à terme qui avaient des anomalies du RCF ont été randomisées en deux groupes : les unes avaient une surveillance du RCF (n = 502), les autres bénéficiaient d’une surveillance associant RCF et oxymétrie fœtale (n = 508). Dans cette étude, l’oxymétrie était considérée comme pathologique si les valeurs étaient inférieures à 30 % dans l’intervalle entre deux contractions ou si elles n’étaient pas enregistrables. Le critère de jugement principal était le taux de césariennes réalisées pour suspicion de souffrance fœtale. Dans le groupe bénéficiant d’une surveillance mixte, on a observé une diminution de plus de 50 % des césariennes faites pour suspicion de souffrance fœtale ; néanmoins, le taux de césariennes réalisées dans chaque groupe (toutes indications confondues) n’est pas différent : 29 % versus 26 %. En effet, dans le groupe “oxymétrie”, il existe un taux plus élevé de césariennes pour dystocie. Enfin, on notera que la morbidité néonatale évaluée tant sur la fréquence des pH < 7,15 que sur le taux d’admission des nouveau-nés en réanimation est identique dans le groupe oxymétrie et dans le groupe RCF. Les auteurs concluent que l’utilisation du saturomètre fœtal permet de diminuer le taux de césariennes réalisées pour suspicion de souffrance fœtale, mais sans améliorer le taux global de césariennes. Commentaire L’analyse du rythme cardiaque fœtal a été instaurée en 1968. Initialement réservé à la surveillance des grossesses à risque, 5 R E V U E D ce procédé a rapidement été étendu à la population générale : en 1978, les deux tiers des femmes américaines en bénéficiaient. Pourtant, dès 1979, Haverkamp a montré que l’utilisation du RCF plutôt que celle de l’auscultation intermittente entraînait une augmentation du taux de césariennes, ce taux passant de 6 à 18 % sans améliorer le pronostic néonatal (1). D’autres équipes ont montré que le taux de césariennes n’était pas modifié, mais que celui de l’utilisation des forceps l’était. Ainsi, MacDonald (2) retrouve un taux de forceps de 6 % dans le groupe auscultation intermittente contre 8 % dans le groupe RCF ; il montre cependant que dans le groupe RCF il existe significativement moins de cas de convulsions néonatales, le monitorage de 433 fœtus permettant d’éviter un cas de convulsions néonatales. Actuellement, il est admis que seules 20 à 40 % des anomalies du RCF sont associées à une acidose fœtale. Différentes techniques ont été proposées pour améliorer la spécificité du RCF, la technique de mesure du pH au scalp (Saling et Schneider 1967) et, plus récemment, l’oxymétrie de pouls fœtal. En théorie, pH au scalp et oxymétrie de pouls fœtal s’opposent par leur mode d’enregistrement continu ou discontinu et par leur caractère invasif ou non. Cette étude démontre que cette dichotomie est caricaturale ; en effet, même si, dans cette série, un signal a pu être obtenu dans 95 % des cas, l’enregistrement n’était considéré comme satisfaisant que pendant 67 % du tracé (40 minutes de signal interprétable nécessitent 60 minutes d’enregistrement). Le résultat le plus surprenant de cette série est le taux de césariennes pour dystocie. Celui-ci est en effet significativement supérieur (19 % versus 9 %) dans le groupe oxymétrie. L’analyse statistique a démontré que ce taux plus élevé persistait après correction des différences dans les taux d’utilisations de prostaglandine et dans les taux de déclenchements de ces deux groupes. Il n’est pas impossible que la mise en place du capteur ait un rôle néfaste dans le bon déroulement de la dilatation cervicale ; malheureusement ce point n’est pas discuté par les auteurs de l’étude. Enfin, il est possible que les patientes qui ne sont pas césarisées pour anomalies du RCF parce que l’oxymétrie est rassurante le soient quelque temps plus tard pour dystocie. Autrement dit, il est possible que certaines anomalies du RCF (en particulier certains ralentissements variables) ne s’accompagnent pas d’hypoxie, mais soient des marqueurs de risque de dystocie. Il faut enfin noter que les études d’Haverkamp (1, 2) avaient déjà montré que, dans le groupe de femmes suivies par RCF, le taux de césariennes pour dystocie était supérieur à celui du groupe “auscultation intermittente” (respectivement 5 et 11 %). Les auteurs évoquaient alors l’hypothèse de l’effet néfaste de l’interventionnisme médical sur le bon déroulement du travail. Il apparaît en effet que ces techniques ont un impact non négligeable sur la femme en travail, surtout quand celle-ci non seulement a sous les yeux le déroulement du RCF, entend le bip sonore du RCF, mais encore est confrontée à la visualisation ou à la disparition (inquiétante) du chiffre d’oxymétrie. Même si les auteurs de cette étude démontrent que l’oxymétrie améliore la pertinence du diagnostic de souffrance fœtale (les 6 E P R E S S E sensibilité et spécificité de l’oxymétrie sont supérieures au RCF isolé pour le diagnostic de souffrance fœtale), ils mettent également en évidence que cette amélioration diagnostique n’a pas de répercussion sur la morbidité néonatale. Il faut garder à l’esprit le fait que, dans cette série, la morbidité néonatale étant faible, ce type d’étude n’a probablement pas la puissance suffisante pour retrouver un impact sur cette morbidité. Une fois de plus, cette étude soulève le problème de la subjectivité de l’interprétation du RCF. On peut penser que les RCF considérés comme “pathologiques” dans cette série rassemblent une population très hétérogène de situations fœtales. L’idéal serait, peut-être, de comparer la surveillance par oxymétrie et RCF à la surveillance par RCF isolé dans des situations reproductibles, telles que les RCF plats, par exemple, ou en sélectionnant un type de RCF pathologique par le biais d’une analyse informatisée du RCF. En somme, on peut retenir que l’oxymétrie de pouls améliore la pertinence des décisions médicales (c’est-à-dire que les fœtus des patientes qui sont césarisées pour anomalies du RCF avec oxymétrie basse ont en effet plus de risques d’avoir une acidose), mais sans qu’aucun bénéfice ne transparaisse pour les patientes (le taux global de césariennes est le même). Seules des études comportant un effectif plus important permettraient de s’assurer de l’impact de cette surveillance sur la morbidité néonatale, impact qui, dans cette série, est nul (pH < 7,15 et taux d’admissions en réanimation néonatale identiques dans les groupes oxymétrie et RCF et RCF isolé). R ÉFÉRENCES B IBLIOGRAPHIQUES 1. Haverkamp AD et al. A controlled trial of the differential effects of intrapartum fetal monitoring. Am J Obstet Gynecol 1979 ; 134 : 399-412. 2. Haverkamp AD et al. The evaluation of continuous fetal heart rate monitoring in high risk pregnancy. Am J Obstet Gynecol 1976 ; 125 : 310-20. • La fertiloscopie transvaginale comparée à la cœlioscopie dans l’évaluation de l’infertilité féminine : une étude prospective en double aveugle V. Gilly, C. Poncelet Darai E, Dessole L, Lecuru F, Soriano D. Transvaginal hydrolaparoscopy compared with laparoscopy for the evaluation of infertile women : a comparative blind study. Hum Reprod 2000 ; 15 : 2379-82. Résumé Cette étude prospective compare la cœlioscopie et la fertiloscopie ou hydrolaparoscopie transvaginale comme méthodes d’exploration des organes pelviens dans le cadre du bilan de La Lettre du Gynécologue - n° 261 - avril 2001 l’infertilité féminine. La fertiloscopie a l’avantage de pouvoir être pratiquée sous anesthésie locale, en externe, ce qui réduit les coûts et l’incidence des complications de l’anesthésie générale. De plus, elle permet de voir les organes pelviens dans leur position anatomique sans manipulation grâce à l’hydroflottation. Cette étude a inclus 60 femmes suivies pour infertilité secondaire sur une période d’un an. Les critères d’inclusion étaient une infertilité secondaire > 2 ans, une ovulation normale, des examens gynécologique et échographique pelviens normaux, une hystérographie normale (sauf dans quatre cas pour lesquels on suspectait un spasme tubaire) et un spermogramme normal (sauf dans deux cas d’oligospermie). La fertiloscopie était pratiquée en deuxième partie de cycle, sous anesthésie générale et par un chirurgien expérimenté, juste avant la cœlioscopie, pratiquée par un autre chirurgien ne connaissant pas les résultats de l’examen précédent. Après introduction d’une aiguille de Veress dans le cul-de-sac vaginal postérieur, puis d’un trocard de 3 mm, une solution de sérum physiologique était instillée dans le cul-de-sac de Douglas et un endoscope semi-rigide permettait l’exploration pelvienne. Une épreuve au bleu de méthylène rendait compte de la perméabilité tubaire. La durée moyenne du geste était de 15 minutes. Une hystéroscopie évaluait la cavité utérine. L’exploration par fertiloscopie a été réalisée chez 54 patientes. L’examen de la face postérieure de l’utérus et du Douglas, des trompes et des ovaires était possible dans 100 et 95 % des cas. Les cas d’échec (6/60, soit 10 %) étaient liés à un utérus rétroversé (3 cas) ou à un pelvis inflammatoire et adhérentiel (3 cas). L’évaluation des adhérences est moins précise par fertiloscopie, en particulier lorsqu’il s’agit d’adhérences péri-ovariennes. Quelques lésions d’endométriose n’ont pas été vues par fertiloscopie du fait d’un processus adhérentiel associé. En sachant que les faux négatifs ne sont appréciés qu’en cas d’exploration complète du pelvis, la sensibilité est de 92,3 %, la spécificité de 100 %, la valeur prédictive positive de 100 % et la valeur prédictive négative de 92,3 %. Commentaire La fertiloscopie est une technique dérivant de la culdoscopie qui a été abandonnée après l’avènement de la cœlioscopie. La disponibilité de fibres optiques de faible calibre avec une bonne résolution d’image fait réévaluer l’accès vaginal pour le bilan d’infertilité. Cette étude tend à démontrer la faisabilité de la fertiloscopie. Cette technique comporte plusieurs avantages : sa réalisation sous anesthésie locale, en externe, procurant un confort certain aux patientes. Elle devrait donc être mieux acceptée et tolérée. Elle permettrait de plus une interactivité entre la patiente et son chirurgien durant toute la procédure. Cependant, ces avantages demeurent théoriques puisque aucun d’entre eux n’a été évalué dans cette étude. La seule contre-indication relative est la rétroversion utérine. Les limites de cette méthode sont : la vision limitée à la partie postérieure du pelvis, une vue panoramique cœlioscopique du pelvis plus familière pour les chirurgiens, l’absence de manipulation annexielle, les possibilités exclusivement diagnostiques. Comme l’ont très bien souligné les auteurs, la fertiloscopie La Lettre du Gynécologue - n° 261 - avril 2001 impose une stricte sélection des indications. Elle pourrait être considérée comme une alternative à la cœlioscopie dans un cadre diagnostique de bilan d’infertilité chez des patientes supposées avoir un pelvis anatomiquement normal. En cas d’anomalie, elle ne permet cependant aucun geste chirurgical fonctionnel, conservateur et/ou radical. Actuellement, seule la normalité du pelvis après exploration complète doit être considérée comme satisfaisante. Elle apporte néanmoins une alternative supplémentaire dans l’arsenal du bilan d’infertilité. R ÉFÉRENCES B IBLIOGRAPHIQUES ❒ Brossens I, Campo R, Gordts S. Office hydrolaparoscopy for the diagnosis of endometriosis and tubal infertility. Curr Opin Obstet Gynecol 1999 ; 11 : 371-7. ❒ Watrelot A, Dreyfus JM, Andine JP. Evaluation of the performance of fertiloscopy in 160 consecutive infertile patients with no obvious pathology. Hum Reprod 1999 ; 14 : 707-11. • Méta-analyse sur la précision des prélèvements d’endomètre dans le diagnostic des cancers de l’endomètre et des hyperplasies V. Gilly, C. Poncelet. Paul F, Dijkhuizen HLJ, Mol BWJ, Brolmann HAM, Peter A, Heintz M. The accuracy of endometrial sampling in the diagnosis of patients with endometrial carcinoma and hyperplasia. A meta-analysis. Cancer 2000 ; 89 : 1765-72. Résumé L’évaluation histologique endométriale par biopsie ou échantillon de cellules endométriales (pipelle, canule de Novak, lavage) est une méthode alternative moins invasive que le curetage après dilatation cervicale, hystéroscopie ou hystérectomie. À ce jour, le curetage utérin est la méthode de référence pour le diagnostic de la pathologie endométriale chez les femmes saignant anormalement. Cette méta-analyse évaluait et comparait la sensibilité et la spécificité d’un échantillonnage endométrial comparé au curetage, à l’hystéroscopie ou à l’hystérectomie pour le diagnostic d’adénocarcinome de l’endomètre et pour celui d’hyperplasie endométriale atypique. Pour le diagnostic de cancer de l’endomètre, 39 études ont permis de calculer la sensibilité et 19 études la spécificité. La symptomatologie des patientes et le type d’études analysées ne semblaient pas modifier les résultats en termes de sensibilité et de spécificité des méthodes d’échantillonnage. La sensibilité de la pipelle (91 %) était significativement supérieure à celle des autres méthodes (57 à 80 % ; p < 0,05), avec une spécificité de 93 à 100 % en fonction de l’examen utilisé comme référence. La sensibilité des différentes méthodes, et notamment de la pipelle, était meilleure chez les femmes ménopausées. Parmi les études sur l’hyperplasie atypique, 19 ont permis le calcul de la sensibilité et 17 celui de la spécificité. La sensibilité de la pipelle (82,3 %) était significativement supérieure à 7 R E V U E D celle des autres méthodes (53 à 66,7 % ; p = 0,01). La spécificité était de 100 % et celle des autres méthodes allait de 98,9 à 99,8 % (p = 0,01). Commentaire La valeur diagnostique de la pipelle est meilleure que celle des autres méthodes d’échantillonnage endométrial pour le diagnostic de cancer de l’endomètre ou d’hyperplasie endométriale atypique. Cette constatation apparaît d’autant plus vraie chez les patientes ménopausées. Ces conclusions paraissent attrayantes ; pourtant, des réserves devraient être prises en considération. Comme toute méta-analyse, cette étude peut comporter des biais, et notamment des biais de publications, qui, dans ce contexte, induiraient des résultats optimistes pour les calculs de sensibilité et de spécificité. Les études incluses étaient très hétérogènes tant sur le plan méthodologique que sur celui de la méthode utilisée comme référence pour le diagnostic définitif. Aucune étude n’était prospective ou comparative, avec comme référence l’hystérectomie. Toutes les études rapportées étaient unanimes sur le fait qu’un prélèvement insuffisant ne devait pas être satisfaisant et nécessitait des investigations supplémentaires. Malgré les bonnes valeurs de sensibilité et de spécificité de la pipelle pour le diagnostic du cancer de l’endomètre et de l’hyperplasie endométriale atypique, des études complémentaires prospectives, continues, comparatives, avec une méthode de référence bien évaluée seraient nécessaires avant de conclure définitivement. Par ailleurs, l’échographie endovaginale, moyen diagnostique non invasif, facilement disponible et peu onéreux, mériterait également d’être évaluée. R ÉFÉRENCES B IBLIOGRAPHIQUES ❒ Stovall TG, Solomon SK, Ling FW. Endometrial sampling prior to hysterectomy. Obstet Gynecol 1989 ; 106 : 623-32. Salet-Lizee D, Gadonneix P, Van den Akker M, Villet R. Fiabilité des méthodes d’exploration de l’endomètre. Etude comparative chez 178 patientes. J Gynecol Obstet Biol Reprod 1993 ; 22 : 593-9. ❒ • Estrogènes et cancer du sein Y. Ansquer, P. Madelenat Clemons M, Goss P. Estrogen and the risk of breast cancer. N Engl J Med 2001 ; 344 : 276-85. Le New England Journal of Medicine a publié, le 25 janvier 2001, une revue sur les estrogènes et le risque de cancer du sein (1). Le lien entre les estrogènes et le cancer du sein est connu depuis plus de 100 ans, lorsque George Beatson a montré que l’ovariectomie bilatérale pouvait entraîner une rémission du cancer du sein chez la femme non ménopausée (2). Mécanisme d’action des estrogènes : les estrogènes diffusent de façon passive au travers de la membrane cellulaire et nucléaire. Lorsque la cellule porte des récepteurs aux estro8 E P R E S S E gènes, l’estrogène se fixe au récepteur, puis le complexe hormone-récepteur migre vers le noyau et active la séquence régulatrice de gènes impliqués dans la prolifération et la différenciation cellulaire. Récepteurs aux estrogènes : le nombre de récepteurs aux estrogènes est faible dans le tissu mammaire normal. Le risque de cancer du sein est plus élevé chez les femmes ayant un taux de récepteurs aux estrogènes élevé dans le tissu mammaire. Ce taux de récepteurs augmente avec l’âge, et il est plus élevé chez les femmes blanches que chez les femmes noires et les Japonaises. Deux types de récepteurs aux estrogènes sont connus : le récepteur α et le récepteur ß. Le récepteur α a plus d’affinité pour les estrogènes que le récepteur ß. In vitro, α et ß forment un hétérodimère où ß agit comme modérateur de l’affinité de α pour les estrogènes. ß est donc un régulateur physiologique des effets prolifératifs du récepteur α. Le contrôle de la balance de l’expression des récepteurs α et ß n’est pas connu dans le tissu mammaire normal. Dans les cancers du sein, on observe un déséquilibre en faveur du récepteur α. Rôle des produits du métabolisme des estrogènes : parmi les métabolites des estrogènes, les produits de la 16α-hydroxylation ont un effet estrogénique, donc supposé carcinogène, alors que les métabolites de la 2-hydroxylation sont anticarcinogéniques. La 2-hydroxylation de l’estradiol est augmentée par le tabac, ce qui pourrait expliquer en partie le plus faible risque de cancer de l’utérus et le plus fort risque d’ostéoporose chez les fumeuses. Concernant le risque de cancer du sein chez les fumeuses, les résultats sont contradictoires et l’augmentation de l’activité de la 2-hydroxylase pourrait être contrecarrée par les effets carcinogènes de l’aromatisation des hydrocarbures. Marqueurs de l’exposition aux estrogènes et risque de cancer du sein : des taux élevés d’estrogènes circulants sont associés à un excès de risque de cancer du sein chez la femme ménopausée (3). Chez la femme non ménopausée, les résultats sont contradictoires, probablement en raison de la variation du taux circulant au cours du cycle. Histologiquement, la densité du sein à la mammographie est directement corrélée à l’importance des contingents fibreux et épithéliaux et inversement corrélée à l’importance du contingent graisseux. Les femmes ayant des seins denses ont plus de risques de développer un cancer du sein (4). Le traitement hormonal de la ménopause augmente la densité des seins, le tamoxifène la diminue. La densité osseuse pourrait être un marqueur de “l’exposition aux estrogènes” dans la mesure où les estrogènes constituent un élément clé de la minéralisation osseuse. Des études ont ainsi montré un risque accru de cancer du sein chez les femmes ayant une forte densité osseuse. Rôle des thérapies estrogéniques : les premières études épidémiologiques concernant les contraceptifs oraux n’ont pas montré d’augmentation du risque de cancer du sein liée à la pilule. D’autres études ont montré une association, en particulier chez les femmes ayant adopté précocement ce type de contraception ou pour les prises très prolongées. Cependant, il ne semble pas y avoir d’excès de risque 10 ans après l’arrêt de la contraception. La Lettre du Gynécologue - n° 261 - avril 2001 L’excès de risque de cancer du sein associé au traitement hormonal substitutif de la ménopause (THS) est lié à la durée de prise du traitement, n’existe que pendant cette prise et disparaît rapidement à son arrêt. L’association d’un progestatif semble augmenter le risque de cancer du sein (5). Malgré cet excès d’incidence du cancer du sein, la mortalité globale est diminuée chez les utilisatrices de THS en raison de la protection vis-à-vis des risques cardiovasculaires et de l’ostéoporose. Un dernier reflet de l’implication des estrogènes dans le risque de cancer du sein est l’effet protecteur des modulateurs du récepteur aux estrogènes. Le tamoxifène diminue le risque de cancer du sein chez les femmes ménopausées et non ménopausées ayant des facteurs de risque (6). Le raloxifène diminue le risque de cancer du sein chez la femme ménopausée ostéoporotique (7). R ÉFÉRENCES B IBLIOGRAPHIQUES 1. Clemons M, Goss P. Estrogen and the risk of breast cancer. N Engl J Med 2001 ; 344 : 276-85. Beaton GT. On the treatment of inoperable cases of carcinoma of the mamma : suggestions for a new method of treatment, with illustrative cases. Lancet 1896 ; 13 : 104-7. 3. Cauley JA, Lucas FL, Kuller LH et al. Elevated serum estradiol and testosterone concentrations are associated with a high risk for breast cancer. Ann Intern Med 1999 ; 130 : 270-7. 4. Boyd NF, Byng JW, Jong RA et al. Quantitative classification of mammographic densities and breast cancer risk : results from the Canadian National Breast Screening Study. J Nat Cancer Inst 1995 ; 87 : 670-5. 5. Schairer C, Lubin J, Troisi R et al. Menopausal estrogen and estrogen-progestin replacement therapy and breast cancer risk. JAMA 2000 ; 283 : 485-91. 6. Fisher B, Costantino JP, Wickerham DL et al. Tamoxifen for prevention of breast cancer : report of the National Surgical Adjuvant Breast and Bowel Project P-1 study. J Nat Cancer Inst 1998 ; 90 : 1371-88. 7. Cummings SR, Norton L, Eckert S et al. Raloxifen reduces the risk of breast cancer and may decrease the risk of endometrial cancer in postmenopausal women : two years findings from the Multiple Outcomes of Raloxifen Evaluation (MORE) trial. Proc Am Soc Clin Oncol 1998 ; 17 : 2a (abstr.). 2. • Facteurs pronostiques des cancers épithéliaux de l’ovaire au stade I Y. Ansquer, P. Madelenat Vergote I, De Brabanter J, Fyles A et al. Prognostic importance of degree of differentiation and cyst rupture in stage I invasive epithelial ovarian carcinoma. Lancet 2001 ; 357 : 176-82. Résumé Une étude rétrospective de six bases de données a permis l’analyse multivariée des facteurs pronostiques de la survie sans récidive de 1 545 patientes traitées pour cancer épithélial de l’ovaire au stade I. Le degré de différenciation tumorale était le facteur pronostique le plus important : OR = 3,13 (IC 95 % : 1,68-5,85) pour la comparaison “moyennement différencié” versus “bien différencié”, et OR = 8,89 (IC 95 % : 4,96-15,9) pour la comparaison “indifférencié” versus “bien La Lettre du Gynécologue - n° 261 - avril 2001 différencié”. Les autres facteurs significativement liés au pronostic étaient : 1. la rupture du kyste avant la chirurgie : OR = 2 (IC 95 % : 1,53-4,56) ; 2. la rupture du kyste pendant la chirurgie : OR = 1,64 (IC 95 % : 1,07-2,51) ; 3. le stade Ib (FIGO 1973) versus Ia : OR = 1,70 (IC 95 % : 1,01-2,85) ; 4. l’âge : par année OR = 1,02 (IC 95 % : 1,00-1,03). Inversement, les facteurs suivants n’étaient pas pronostiques de la survie sans récidive : type histologique, importance des adhérences, tumeur extracapsulaire, ascite, stade FIGO 1988, taille tumorale. En conclusion, le degré de différenciation cellulaire devrait être pris en compte dans le traitement et la classification FIGO des cancers de l’ovaire au stade I. La rupture peropératoire de ces tumeurs doit être évitée. Commentaire Les résultats de cette étude mettent en évidence le rôle majeur du degré de différenciation cellulaire, qui pourrait à terme être pris en compte dans la classification FIGO des cancers de l’ovaire au stade I. La définition du grade d’une tumeur ovarienne pose le problème de sa reproductibilité. Le degré de différenciation est cependant déjà pris en compte dans les recommandations thérapeutiques puisque le comité de la FIGO en onco-gynécologie recommande de ne pas administrer de chimiothérapie adjuvante aux femmes jeunes traitées pour un cancer de l’ovaire de stade I grade 1 (et pas de biopsie de l’ovaire controlatéral s’il est macroscopiquement sain) ; en revanche, une chimiothérapie est préconisée pour les stades Ia grade 2 ou 3, les stades Ib et Ic (1). Il est à noter que la FIGO recommande, pour ces cancers débutants de l’ovaire, une stadification complète incluant un curage pelvien et lombo-aortique. En effet, 4 % des patientes ayant une tumeur apparemment de stade Ia ont une atteinte des ganglions lombo-aortiques et 15 % une cytologie péritonéale positive. Dans l’étude de Vergote, les curages ganglionnaires ainsi que la cytologie péritonéale systématique n’ont pas concerné toutes les patientes, ce qui constitue une des principales limites de cette étude. Concernant le risque lié à la rupture peropératoire, les auteurs indiquent que l’excès de risque observé concernait des interventions pratiquées par laparotomie. Il n’y a donc pas de conclusion définitive concernant l’usage de la cœlioscopie. La cœlioscopie doit cependant être réservée aux kystes supposés bénins, et la découverte inattendue d’un cancer de l’ovaire lors de l’examen extemporané doit conduire à une exploration immédiate et complète par laparotomie, l’influence du délai entre la cœlioscopie et la laparotomie ayant par ailleurs été démontrée (2). R ÉFÉRENCES B IBLIOGRAPHIQUES 1. FIGO Committee on Gynecologic Oncology. Staging classifications and clinical practice guidelines of gynecologic cancer. Int J Gynecol Oncol 2000 ; 70 : 207-312. 2. Lehner R, Wenzl R, Heinzl H et al. Influence of delayed staging laparotomy after laparoscopic removal of ovarian masses later found malignant. Obstet Gynecol 1998 ; 92 : 967-71. 9