Tracer une voie au sein du corps C hacun de nous possède environ 100 000 kilomètres de vaisseaux sanguins qui atteignent tous les organes et tissus et nous maintiennent en vie. Chaque fois que nous prenons des médicaments, ce vaste réseau veille à ce que les médicaments atteignent toutes les parties du corps. Les agents chimiothérapeutiques s’attaquent aux tumeurs cancéreuses, mais ces substances hautement toxiques passent également partout ailleurs, ce qui affaiblit les patients et les rend souvent malades. Dans de tels cas, un vecteur pouvant naviguer au sein du système de transport élaboré du corps et administrer des traitements à la seule zone touchée serait bien plus adapté. Sylvain Martel a voulu construire ce vecteur et il a passé la dernière décennie à étudier la façon de s’y prendre. Ses efforts ont abouti à des résultats de recherche significatifs, notamment une démonstration réussie de la manière de modifier les fonctions de contrôle d’un appareil d’imagerie par résonance magnétique (IRM) afin que celui-ci puisse fournir des images et un traitement guidé. Ses recherches ont débuté au Massachusetts Institute of Technology (MIT), où il a aidé à créer un robot téléguidé miniature marchant sur trois pattes à une vitesse de 4 000 nanopas par seconde. Désormais, en tant que professeur de génie à l’École Polytechnique de Montréal, il exploite les moteurs moléculaires existant déjà au sein des bactéries afin qu’ils puissent atteindre directement une partie spécifique du corps. Agissant en tant que transporteurs de médicaments, ces bactéries ne se déplacent que vers une destination spécifique, telle qu’une tumeur, plutôt que d’aller ailleurs. Ces vecteurs microscopiques s’appuient sur un guidage électronique pour manipuler et détecter les agents pathogènes. L’idée initiale a été validée en utilisant plusieurs puces fabriquées au moyen des technologies CMOS, Micragem Juillet 2011 et Protolyne avec l’appui de CMC Microsystèmes. Martel l’a adaptée pour permettre un fonctionnement en conjonction avec les systèmes d’IRM couramment utilisés pour voir ce qui se passe à l’intérieur d’un patient. Martel désirait continuer à travailler sur le NanoWalker du MIT lorsqu’il a créé son propre laboratoire à Montréal. Il a toutefois reçu plus de soutien pour le développement de mécanismes de taille moléculaire qui pourraient offrir un nombre sans précédent d’applications médicales. Alors qu’il pouvait voir les possibilités d’utiliser le champ magnétique de l’appareil d’IRM pour guider les sondes au sein du corps, les fabricants de ces machines ne partagent pas facilement les détails d’ingénierie portant sur le fonctionnement de ces machines. Martel reconnaît les mérites du réseau d’infrastructures de recherche soutenu par CMC et de la capacité de son équipe à relever un grand nombre de défis multidisciplinaires dans des domaines aussi divers que le génie électrique et informatique, la mécatronique, la biochimie, la biologie et la physiologie. « Le réseau a joué un rôle-clé en nous aidant à évoluer dans chacun de ces domaines », a-t-il déclaré. Sylvain Martel, PhD, professeur et directeur du laboratoire NanoRobotics, Département de génie informatique et logiciel, Institut de génie biomédical, École Polytechnique de Montréal. Son équipe de recherche met au point des techniques révolutionnaires en nanorobotique qui exploitent les propriétés uniques des mécanismes à l’échelle moléculaire. Cette intégration de compétences se reflète dans l’équipe tout aussi diversifiée d’étudiants diplômés que Martel a réunis pour explorer le fonctionnement interne de l’équipement d’IRM et déterminer comment il pourrait être modifié afin que les utilisateurs puissent manipuler des objets minuscules à l’intérieur du corps. Les chercheurs ont alors commencé à cartographier les limites des forces de gradient magnétique qui pourraient être maintenues autour des capillaires conduisant à une tumeur. Cette restriction a conduit à l’utilisation de la bactérie magnétotactique MC-1 (MTB) pour le transport de médicaments vers les tumeurs. « Bien que la plupart des gens la voient comme un simple organisme vivant, d’un point de vue technique, cette bactérie peut être considérée comme un actionneur sophistiqué avec une interface de contrôle intégrée », a-t-il expliqué dans un article pour la revue International Journal of Robotics Research. Les éléments-clés de cette interface sont les particules superparamagnétiques, connues sous le nom de magnétosomes, ne dépassant pas 50 à 100 nanomètres de diamètre. Elles jouent le rôle crucial de compas de navigation pour les MTB qui sont entraînées par de longues vrilles appelées flagelles, que les bactéries utilisent normalement pour se déplacer. Ce moteur MTB pouvant fonctionner entre 200 et 1 000 tr/min est composé de protéines et est alimenté par un flux de protons. Avec deux faisceaux de flagelles par bactérie, une force de poussée de quatre piconewtons peut être atteinte, ce qui correspond à un ordre de grandeur plus important que ce que de nombreuses espèces de bactéries génèrent habituellement. Cette force permet même aux MTB d’atteindre des vitesses de 200 microns/seconde, ce qui correspond une fois de plus à presque 10 fois ce que les autres bactéries typiques peuvent atteindre. Martel se rappelle l’accueil plein de scepticisme qui avait été réservé à cette entreprise. « Il aura fallu deux ans pour convaincre les gens avant de commencer le projet, mais nous savions que cela fonctionnerait. » cmc © CMC Microsystems | www.cmc.ca