M2 Parcours de Physique Quantique / Physique Macroscopique et Complexité Physique Statistique hors de l’équilibre TD no 2 Équation de Kramers dans la limite des grandes frictions Sur une échelle de temps grande devant la friction inverse 1/γ apparaissant dans l’équation de Langevin, la position d’une particule Brownienne définit un processus de Markov auquel est associée l’équation de diffusion. En d’autres termes, la limite des grandes frictions (γ → ∞) de l’équation de Kramers doit coı̈ncider avec l’équation de Schmoluchowski. C’est ce que nous nous proposons de montrer ici. A/ Développement perturbatif standard (approche de Hilbert) 1) Pour un fluide de particules Browniennes sans interactions dans un champ de force extérieur F(~r), rappeler l’équation de Kramers vérifiée par la fonction de distribution f (~r, ~v , t). On se restreindra dans ce qui suit au cas uni-dimensionnel et on introduit les p quantités adi2 mensionnées τ = tvT /ℓ, V = v/vT , X = x/ℓ, F = Fℓ/(M vT ) où vT = kB T /M est la vitesse thermique tandis que M désigne la masse du colloı̈de et ℓ une échelle de longueur caractéristique du système, par exemple le rayon des particules lorsque celles-ci sont supposées sphériques. Vérifier que l’équation de Kramers devient : ! " # ∂ ∂ ∂ ∂f 1 ∂ +V + F (X) Vf + = f (X, V, τ ) (1) ∂V ∂V γ e ∂τ ∂X ∂V où γ e = γℓ/vT désigne le coefficient de friction adimensionné. 2) Sous cette forme, et dans la limite 1/e γ → 0, cette équation est bien adaptée à un développement perturbatif que nous écrivons f (X, V, τ ) = f (0) (X, V, τ ) + 1 (1) 1 f (X, V, τ ) + 2 f (2) (X, V, τ ) + ... γ e γ e (2) Ecrire les équations vérifiées par f (0) , f (1) et f (2) . Montrer que f (0) est de la forme : f (0) = φ(X, τ ) e−V 2 /2 où φ(X, τ ) est a priori une fonction arbitraire. Déduire de l’équation vérifiée par f (1) que : ∂φ = 0. ∂τ 2 2 3) Montrer que : f (1) = ψ(X, τ )e−V /2 + (φ(X)F (X) − ∂X φ) V e−V /2 où ψ(X, τ ) est ici aussi une fonction arbitraire. De même, utiliser l’équation vérifiée par f (2) pour montrer que : ! ∂ψ ∂φ ∂ φ(X)F (X) − = 0. + ∂τ ∂X ∂X Donner alors l’expression de la fonction f (X, V, τ ) au premier ordre en 1/e γ. R +∞ 4) Nous nous intéressons davantage à la densité ρ(X, τ ) = −∞ f (X, V, τ )dV . Exprimer ρ(X, τ ) en fonction de φ et ψ, et montrer qu’au premier ordre en 1/e γ cette fonction vérifie –en revenant aux variables initiales–l’équation de Smoluchowski : 1 ∂ kB T ∂2 ∂ρ(x, t) =− où D = . ρ(x, t)F(x) + D 2 ρ(x, t) ∂t γM ∂x ∂x γM 5) Ce développement perturbatif, que l’on trouve par exemple dans la monographie de N.G. van Kampen1 , est incohérent. Quel est le problème ? B/ Echelles multiples Pour obtenir un développement pertinent de l’équation de Kramers (1), nous allons utiliser la méthode dite des échelles multiples. L’idée est d’associer à l’équation d’évolution (1) une nouvelle équation ! " # ∂ ∂ ∂ ∂ ∂ ∂ ∂M 1 ∂ + F (X) + γ e−1 + γ e−2 +···+γ e−n +V V M+ = M (3) ∂V ∂V γ e ∂τ0 ∂τ1 ∂τ2 ∂τn ∂X ∂V où la distribution M(X, V, τ0 , τ1 , . . . , τn ) est définie sur un espace à n-dimensions de variables temporelles indépendantes. Le point clé est ensuite de remarquer que la solution de (3) restreinte à la ligne (dite ligne physique) τ0 = τ ; τ1 = γ e−1 τ ; τ2 = γ e−2 τ ; . . . est une solution du problème (1). En dehors de la ligne physique, la solution M(X, V, τ0 , τ1 , . . . , τn ) n’a pas de sens physique, d’où la possibilité d’imposer des conditions aux limites appropriées pour régulariser les problèmes apparaissant avec le développement perturbatif naı̈f (partie A). Finalement, la fonction auxiliaire M est développée en puissances du petit paramètre 1/e γ , comme dans l’équation (2). On peut noter que la dépendence en τi de la fonction de distribution caractérise l’évolution du système sur l’échelle de temps τ ∼ γ ei (i = 0, 1, 2, . . . ). 1) Ecrire les équations vérifiées par M(0) , M(1) et M(2) . 2) Montrer que M(0) est indépendante de τ0 , et de la forme : M(0) = φ(X, τ1 , τ2 , . . . ) e−V 2 /2 . 3) En déduire que M(1) a la même structure que f (1) ci-dessus. Préciser l’équation vérifiée par ψ et φ. Montrer que ψ est indépendante de τ0 . 4) En se ramenant finalement à l’axe physique, montrer que la densité vérifie l’équation de Smoluchowski. 5) Qu’aurait-on obtenu si on avait tenu compte de l’échelle de temps la plus rapide τ ∼ γ e−1 via l’introduction de τ−1 = γ eτ dans le membre de droite de (3) ? Références : Cet énoncé est inspiré de l’article suivant : L. Bocquet, American Journal of Physics 65, 140 (1997). Sur le problème du gaz de Lorentz, traité également par la méthode des échelles multiples, on peut consulter J. Piasecki, American Journal of Physics 61, 718 (1993). 1 Stochastic Processes in Physics and Chemistry, North Holland Personal Library (1997)